Campanella et Paracelse
p. 379-393
Texte intégral
1Les citations de Paracelse, des paracelsiens et divers “chimistes” sont, au regard de son œuvre immense, plutôt rares sous la plume de Campanella. Elles méritent néanmoins d’être relevées dans la mesure où elles traduisent une attitude qui n’est pas faite que de rejet pur et simple. Car si le dominicain italien est effectivement très critique vis-à-vis de la nouvelle doctrine des éléments du médecin suisse et des spéculations qui s’en réclameront plus ou moins fidèlement, il semble avoir été impressionné et comme tenu en respect – pas toujours à bon escient – par “l’expérimentalisme” de Paracelse et de ses disciples. Les pages qui suivent sont une première approche d’un thème qui, à notre connaissance, n’a fait à ce jour l’objet d’aucune étude spéciale.
2Quand Campanella a-t-il connu les idées de Paracelse et sous quelle forme ? Il est presque impossible de répondre à cette question avec précision. Dans la préface de la Philosophia sensibus demonstrata rédigée en 1589 – le livre sera publié en 1591 – Campanella évoque de façon vague les lectures hors programme qu’il a pu faire au Studium generale des dominicains à Cosenza, puis dans le petit couvent d’Altomonte (Calabre) où ses supérieurs l’avaient relégué : outre le De natura iuxta propria principia de Telesio dans la première édition en deux livres parue à Rome en 1565, il a pu, dit-il, se procurer des livres d’aristotéliciens, de platoniciens et de médecins. l’ avait-il parmi ces derniers livres des ouvrages de Paracelse, dont les premières traductions latines remontaient aux années 1570 ? Il ne le semble pas : seuls Galien et Hippocrate sont cités ici, et le nom de Paracelse n’apparaît pas dans le corps du livre1.
3Il est probable que c’est à Naples, où il devait séjourner en 1590 et 1591 dans une certaine familiarité avec Giovan Battista Della Porta, que Campanella a entendu parler pour la première fois de Paracelse et de ses expériences. Mais la Magia naturalis, dont l’édition en vingt livres était parue en 1589, ne cite Paracelse qu’occasionnellement – par exemple à propos du fameux onguent armaire2 – et il n’était pas nommé du tout dans les Phytognomonica parues un an plus tôt, œuvre dans laquelle pourtant le thème des signatures – développé aussi par Paracelse3 – est largement exploité : une discrétion dont il faudrait se demander si elle traduit une méconnaissance ou une hostilité de la part de Della Porta4.
4Un autre informateur de Campanella sur Paracelse a dû être Tobias Adami, l’ami allemand à qui il devra l’édition de plusieurs de ses œuvres en Allemagne entre 1617 et 16235. Dans les préfaces très riches d’information où il présente au public cultivé européen la pensée de Campanella, Adami évoque par deux fois la philosophie paracelsienne. Dans l’« Ad philosophos Germaniæ præfatio » placée en tête du Prodromus philosophiœ instaurandœ, id est Dissertationis De natura rerum compendium [= Prodromus], Adami vante les fruits qu’on est en droit d’attendre de la philosophie du moine italien en cette période extraordinaire de l’histoire qui a produit, pour la connaissance de la terre, l’admirable philosophie magnétique de William Gilbert et, pour celle du ciel, les travaux et les observations de Copernic, de Tycho Brahe, de Galilée et de Kepler6. Et Adami ajoute : « Si l’on joint à cela l’Anatomie Vulcanique de l’Hermès germanique Paracelse et la Maturation de la nature inférieure, que restera-t-il que la Nature puisse encore nous cacher ? »7. Mais l’admirateur de Campanella va plus loin. Selon lui, toutes les vérités énoncées par les auteurs susdits doivent pouvoir être mises en concordance, tâche qu’il se propose de réaliser dans une sienne Philosophie en langue allemande. Et il donne un exemple intéressant pour nous du genre de conciliation qu’il entrevoyait. « Bien loin que nos principes [ici Adami reprend à son compte les principes de Telesio qui servent de fondement à la physique campanellienne] soient en désaccord avec ceux des chimistes (à la connaissance directe desquels sa condition de reclus a empêché Campanella d’avoir accès), ils les expliquent beaucoup mieux et plus clairement, et ils ouvrent un accès aisé à plusieurs secrets. Car le Soufre, le Mercure et le Sel sont eux aussi composés de chaleur et de matière selon des degrés bien déterminés et chacun avec son idée et son caractère spécifiques qui constituent sa force séminale. Le sage considère en effet les principes chacun en soi, alors que la nature, dans sa pratique, opère sans les distinguer »8.
5On retrouve la même conviction qu’il serait possible d’intégrer les trois principes des paracelsiens dans le cadre de la physique campanellienne dans la préface qu’Adami mettra en tête des Realis philosophiœ epilogisticœ partes quatuor publiées par ses soins en 1623. Il y déclare en effet que « le Soufre, le Mercure et le Sel tenus par les chimistes pour des principes et qui constituent toutes choses à partir de la chaleur et de la matière diversement combinées, sont pour cette raison subordonnés à nos [principes] »9.
6On ne sait pas ce qu’il advint du projet d’Adami d’une philosophie en langue vulgaire : celle-ci ne fut probablement jamais écrite par l’ami luthérien de Campanella qui commencera dès son retour en Allemagne une carrière active de conseiller politique à la Cour de Saxe et qui mourra en 1643 après avoir édité en tout quatre ouvrages de notre auteur10.
7Si l’on considère maintenant les écrits de Campanella, dont la période de composition ne correspond presque jamais à la date de publication, on distinguera deux types de textes. D’une part ceux où le nom de Paracelse apparaît ponctuellement, sans que l’on puisse dire si Campanella vise une œuvre en particulier du médecin bâlois. D’autre part les livres dans lesquels les idées de Paracelse et de ses disciples sont citées parfois à la lettre et discutées.
8Parmi les écrits du premier groupe, on citera d’abord l’Epilogo magno, œuvre qui dans sa version italienne enrichie de nombreux « Avvertimenti », devait être achevée vers 1613 : dans un chapitre traitant des pierres et des métaux, Campanella affirme que Paracelse s’est trompé en affirmant avec Aristote que la cendre serait de la terre pure au lieu d’être de la terre réduite en poussière par la chaleur11.
9Autre mention de Paracelse dans l’Apologia pro Galilœo publiée en 1622 par Adami, mais composée en 1616. Évoquant une des conséquences possibles des découvertes galiléennes, à savoir l’existence d’une pluralité de mondes habités, Campanella écrit : « Il faudrait alors admettre avec l’hérétique Paracelse qu’il existe dans l’air, dans l’eau et sous la terre d’autres hommes ayant part à la béatitude, et à propos desquels on peut se demander si la rédemption ne les concernerait pas eux aussi ». Conception qualifiée plus bas par notre auteur de démente, en accord avec le jugement du jésuite Martin Del Rio dont les Disquisitiones magicœ, publiées une première fois à Louvain en 1599-1600, paraissent bien être ici la source directe de Campanella12.
10Dans le De gentilismo non retinendo, dont la première rédaction remonte à 1609, mais qui sera publié seulement en 1636 à Paris (2e édition augmentée en 1637 sous le titre Disputatio in prologum instauratarum scientiarum ad scholas christianas, præsertim Parisienses), Campanella esquisse un jugement d’ensemble sur Paracelse et d’autres auteurs. Après avoir évoqué le cas de l’astronomie, dont les travaux de Peurbach, de Copernic, de Tycho Brahe et de Galilée ont rendu la réforme nécessaire, Campanella écrit : « Il faut [aussi] de toute nécessité élaborer une nouvelle physique, ce qu’ont commencé de faire Pic de la Mirandole, Telesio, Vallès et Paracelse. Et bien que ces auteurs aient erré sur tel ou tel point, du moins montrent-ils que la philosophie dans son ensemble doit être rénovée »13. Passons sur le problème que pose le rapprochement de ces quatre noms. S’agissant de Paracelse, on peut supposer que le jugement générique plutôt positif dont il bénéficie de la part de Campanella qui voit en lui un des initiateurs de la nouvelle philosophie de la nature devant remplacer celle d’Aristote, tient au mépris affiché de Paracelse pour les livres des Anciens et à sa volonté de ne tirer son savoir que du livre du monde14.
11Mais c’est dans le De libris propriis et recta ratione studendi syntagma (= Syntagma) publié à titre posthume par G. Naudé en 1642, soit quelque dix ans après que le dominicain eut confié le texte à l’auteur français15, que Paracelse fait l’objet d’un jugement à la fois global et contrasté. Campanella y écrit en effet que si dans le domaine des distillations et de la médecine chimique Paracelse a apporté une contribution, en revanche, dans l’ordre spéculatif, il divague fréquemment, donnant pour des raisons ce qui ne mérite pas ce titre. Et il ajoute : Paracelse aurait pu rendre la médecine moins verbeuse, plus riche du point de vue doctrinal et, pour tout dire, rationnelle, objectif que Campanella estime, lui, avoir atteint dans ses Medicinalia 16.
12Contrairement à ce que suggère ce passage du Syntagma, on ne trouve que de très rares références à Paracelse dans les Medicinalia confiés par leur auteur en 1632 à J. Gaffarel (qui les éditera à Lyon en 1635), œuvre dans laquelle Campanella examine à la lumière de ses propres principes (iuxta propria principia) les connaissances essentiellement livresques qu’il a acquises en ce domaine17. On apprend ainsi au détour d’une page que Paracelse a utilisé à bon escient des aquœ destillatœ dans le traitement de certaines affections, tandis qu’il lui est reproché ailleurs d’avoir cru que certaines maladies « transnaturelles » pourraient être guéries grâce à des exorcismes qui pour Campanella ont des relents de superstition18. En revanche, on se trouve devant un silence quasi complet touchant le domaine dans lequel, au dire même de Campanella, Paracelse aurait fait progresser la médecine, à savoir l’utilisation de remèdes chimiques : la pharmacopée campanellienne reste traditionnelle19. De même, les Medicinalia sont muets sur les reproches adressés à Paracelse in speculativis en des termes particulièrement sévères.
13C’est dans le deuxième groupe d’ouvrages que nous avons distingués que l’on trouve une prise de position argumentée contre les doctrines du maître et de ses disciples plus ou moins fidèles. Ces ouvrages sont les suivants : le De sensu rerum et magia dans sa seconde édition publiée à Paris en 1636, les Quæstiones physiologicœ qui font suite à la Realis philosophia epilogistica dans l’édition parisienne de 1637 et enfin l’Universalis philosophia (ou Metaphysica) publiée un an plus tard, toujours à Paris. Comme on le constate, ces livres sont tous postérieurs à la libération définitive de Campanella et à son arrivée en France, où il séjournera de 1634 jusqu’à sa mort en 1639. Il est clair que Campanella a mis à profit son séjour parisien pour lire les livres qui lui avaient été inaccessibles pendant ses quelque 26 années d’emprisonnement, et pour s’informer directement auprès des philosophes et autres spécialistes des diverses doctrines au goût du jour. Parmi ces livres et parmi ces doctrines, ceux et celles des paracelsiens et autres « chymistes » occupaient en France une place de choix au moins depuis les années 1620, comme l’ont montré, entre autres, les travaux d’H. Metzger, de R. Pintard, de R. Lenoble, et, plus récemment ceux de F. Secret et de A.G. Debus20. Mais si les lectures paracelsiennes de Campanella sont certaines, quels ouvrages a-t-il lus ? Une bonne partie des œuvres de Paracelse – authentiques ou attribuées – lui était théoriquement accessible en version latine, par exemple dans l’édition de Francfort publiée en 1603- 160521. Mais selon son habitude, surtout s’agissant d’auteurs modernes ou contemporains, Campanella ne donne pratiquement jamais les titres des livres de Paracelse d’où il tire les doctrines qu’il expose, à une seule exception importante : celle du De natura rerum, fréquemment cité et dont certains passages sont transcrits presque littéralement22. Il en va de même pour les écrits de ceux qu’il appelle les Paracelsistœ ou encore les Chymici. A part une citation assez longue d’un texte qui semble emprunté à Oswald Croll et la mention d’un certain Girardus Torneus23, on n’a pas d’indication plus précise de nom. En revanche, Campanella évoque à plusieurs reprises des opinions défendues par des auteurs désignés génériquement comme des Chymici Galli, ou parle de tel ou tel Paracelsista ou chimista qu’il a lu ou avec lequel il s’est entretenu. De ce dernier point de vue, certains textes de Campanella suggèrent que les alchimistes s’agitaient beaucoup sur le devant de la scène intellectuelle parisienne, et que leurs prétentions n’étaient pas modestes. Dans une « Additio » de ses Quœstiones, notre auteur ne peut cacher son agacement lorsqu’il écrit que « les chimistes qui philosophent à la façon des Empiriques et qui croient avoir trouvé dans leurs fourneaux de nouveaux éléments des corps mixtes et des principes des choses, rebattent tous les jours les oreilles des philosophes, qui [pourtant] inspectent le monde entier, comme s’ils étaient des ignorants »24.
14S’il est bien une chose que Campanella ne saurait accepter, c’est d’être considéré comme un inexpers s’agissant de la connaissance du livre du monde, même si sur le terrain de la pratique expérimentale qui est le point fort des chimistes, il doit reconnaître sa carence. En possession d’une philosophie depuis longtemps mûrie qu’il s’emploie activement à répandre depuis son arrivée en France tant par l’écrit que par la parole, c’est avec un esprit a priori négatif qu’il va juger les doctrines de Paracelse et de ses disciples – la difficulté étant souvent de distinguer qui peut bien être visé à travers les références génériques de Campanella. Seule une étude minutieuse des passages des Quœstiones physiologicœ et de la Metaphysica où ce dernier évoque les opinions des alchimistes sur la matière, sur le nombre et les propriétés des éléments visibles et invisibles, sur les astralitates, sur le spiritus vitæ, sur la quintessence, etc. permettrait à un historien de l’alchimie dans la période considérée d’identifier les sources et d’apprécier point par point les critiques de Campanella.
15Nous nous limiterons pour notre part à l’examen d’une question essentielle : qu’en est-il, aux yeux de Campanella, des éléments ou principes des alchimistes ? Dans un deuxième temps, nous évoquerons la réaction du philosophe italien devant une « expérience » extraordinaire de Paracelse.
16On sait combien est complexe la question du statut des trois principes de Paracelse et de leur rapport avec les quatre éléments traditionnels25. Les lecteurs du début du xviie siècle rencontraient aussi cette difficulté. La langue obscure et pleine de néologismes de Paracelse et des paracelsiens – qui avait suscité la publication de dictionnaires parfois multilingues26 – s’ajoutant à la pluralité des courants qui traversaient la philosophie chimique, conduisaient à une situation doctrinale particulièrement floue, pour ne pas dire, avec H. Metzger, « anarchique ». Quant aux adversaires des alchimistes, qu’ils se recrutassent dans l’École ou qu’ils fussent ce qu’on appelait des « novateurs », leur souci primordial n’était pas de chercher à comprendre pour elle-même la pensée de celui ou de ceux qu’ils combattaient, mais de rejeter ce qui leur paraissait contredire leurs propres principes. C’est dans ce dernier cas de figure que nous nous trouvons avec Campanella, qui examine la doctrine des éléments des paracelsiens à la lumière de concepts physiques dont il doit l’essentiel à son maître Telesio27.
17C’est dans la Quœstio 18 des Disputationes physiologicœ consacrée au problème de la mixtio que Campanella traite suivant le modèle scolastique la question Utrum Elementa sint mistorum corporum Sal, Sulphur et hydrargyrum, un examen, rappelons-le, traité dans une « Addition » écrite spécialement pour réfuter les prétentions des adeptes du fourneau.
18 Le Videtur quod sic est articulé en trois points.
- Les « alchimistes allemands » appuient leur conviction sur le fait que le feu résout tous les corps mixtes en ces trois éléments, qui sont donc leurs composants. D’autres « chimistes français » ajoutent maintenant à ces trois éléments l’huile, l’eau et l’air en lesquels les corps composés se réduiraient également28.
- Le propre des principes est d’être impérissables : or ceux des alchimistes – qu’ils soient au nombre de trois ou de cinq – ne se transforment pas les uns dans les autres, ni en d’autres choses : ils se mélangent et se séparent. Réduits en particules et dispersés, ils sont cachés dans les différents corps, mais ils réapparaissent comme tels lorsque lesdites particules sont réunies.
- Une fois ces trois ou cinq principes extraits de la matière commune, il reste non de la cendre que le feu pourrait transformer en autre chose, mais ce qu’on appelle « tête morte », sur quoi le feu n’a aucune action. Sans les premiers éléments il n’y a en effet ni mixtion ni génération : ils sont donc bien les vrais principes des mixtes29.
19Le Sed contra comporte six points qui constituent en fait un sommaire des principes de base de la physique campanelliennne.
- Par élément, on entend les premiers corps du monde à partir desquels tous les mixtes, appelés corps seconds, sont constitués.
- Ces éléments sont les plus grands tant par leur taille que par leur force.
- Ils sont au plus haut point contraires et actifs.
- Ils sont les plus connus par nos sens sur lesquels ils agissent instantanément et fortement.
- Ils sont situés dans les parties les plus distantes du monde, car les contraires ne peuvent pas coexister.
- Enfin, ils engendrent tous les mixtes comme par accident et prœter intentionem : en effet les principes qui ne sont pas engendrés par autre chose cherchent spontanément à se répandre et à se multiplier par eux-mêmes, fin pour laquelle ils luttent entre eux30.
20Or, les corps tenus par les chimistes pour des éléments ont des conditions en tous points opposées à celles qu’on vient d’énumérer : ce ne sont donc pas de véritables éléments, du moins pour qui sait ce qu’élément veut dire31.
21 Nous retiendrons les principaux arguments qui étayent ces affirmations avant que Campanella ne conclue en rejetant les trois thèses initialement admises.
22Le sel, le soufre et le mercure ne sont premiers ni selon le temps, ni selon la grandeur, ni selon le lieu, ni selon les forces, ni selon la dignité, ni selon la nature. Dieu a-t-il créé au commencement les êtres dérivés, ou au contraire les éléments et les principes, à savoir le Ciel et la Terre que Campanella met à l’origine du monde sensible ? La réponse est évidente. Si Paracelse avait raison. Moïse aurait dû prononcer : In principio [Deus] creavit Sal, Sulfur et Mercurium, ex quitus deinde tanquam ornatum eorumfecit Cœlum et Terram32.
23Du point de vue de la grandeur, les tria paracelsiens ne représentent que d’infimes parties de la Terre, le plus petit des deux corps premiers du monde. Leurs forces ne l’emportent pas non plus sur celles des éléments de Campanella : ils n’ont pas le pouvoir de se libérer par eux-mêmes des mixtes où ils sont liés. Qu’ils soient en outre postérieurs localement est clair puisqu’ils n’occupent pas les sièges les plus distants où sont les éléments premiers, mais qu’ils sont enfouis dans le ventre de la Terre où ils croissent comme les pierres et les métaux : mais n’est-il pas évident que sont les elementa qui contiennent les elementata, et pas l’inverse33 ?
24Dans aucun des principes des alchimistes on ne découvre la contrariété maximum qui doit par essence se trouver entre des éléments premiers. Le sel et le soufre, qui sont secs et chauds, ne s’opposent ni par leurs qualités actives, ni par les passives. Semblablement pour l’huile, l’air, le mercure et l’eau qui sont tous, selon Campanella, chauds et humides. Enfin, si l’on demande d’où viennent l’âme, le sensus, l’art, la composition, la formation, les forces, les couleurs, etc. qu’on trouve dans les mixtes, les alchimistes ne pourront pas nous satisfaire en répondant : du sel, du soufre et du mercure, car ceux-ci ne peuvent donner ce qu’ils n’ont pas, un axiome sur lequel notre auteur appuie toute sa pensée physique34.
25Ici cependant Campanella marque un arrêt : peut-être la doctrine des chimistes signifie-t-elle que le sel, le soufre et le mercure sont pour ainsi dire comme trois semences ou parties de semences des mixtes, contenant seulement les forces prochaines et amoindries, et non pas vives et intenses, des véritables éléments ? Si les chimistes ajoutaient leurs semences ou parties de semences (sous-entendu : à nos propres principes), alors peut-être diraient-ils une chose digne d’intérêt. Mais Campanella, qui semble suggérer ici un rapprochement possible avec sa doctrine du sensus rerum, met brusquement fin à cette réflexion en déniant aux chimistes en question la capacité de s’élever à de telles hauteurs35.
26 Campanella poursuit son analyse en faisant allusion à d’autres doctrines. Certains ont dit que le sel, le soufre et le mercure ne seraient pas des éléments premiers, mais la substance respectivement de la terre, de l’eau et du feu. Mais alors, quelle sera la substance de l’air puisque ces auteurs disent garder les quatre éléments d’Hippocrate et d’Aristote ? Ceux qui parlent d’huile ajoutent aussi, au dire de Campanella, une cinquième et une sixième substance qui seraient précisément l’air et l’eau : en cette hypothèse, c’est bien d’un renversement de leur propre philosophie qu’il faudrait parler.
27Si, comme nous le suggérons plus haut, Campanella vise ici les auteurs des thèses de 1624 – il aurait pu rencontrer l’un d’entre eux, Étienne de Clave36 –, nous ne savons pas qui sont les chimistes qui lui auraient soutenu de vive voix que le feu ne serait qu’un accident, tandis que leurs principes à eux seraient substantiels : une absurdité aux yeux de Campanella pour qui la même logique conduirait à qualifier la terre, qui est le substrat de toute chose, elle aussi d’accident37.
28Résumons pour terminer sur ce point la réponse de notre auteur aux trois arguments initiaux.
29Au premier argument, Campanella répond que le soufre, le sel et le mercure ne peuvent pas être des éléments car seule l’action du feu les rend discernables. Si on les retrouve dans les mixtes, c’est en tant qu’ils sont produits par la chaleur : cela voudrait dire pour notre auteur qu’ils sont dans les mixtes en tant qu’effets, et non en tant que causes antérieurement présentes, une idée sur laquelle il revient ailleurs38.
30Au deuxième argument, Campanella répond que les éléments en tant que touts – tels qu’il faut les entendre – ne se transforment pas, mais qu’ils demeurent toujours, telle étant la condition de la persistance du monde. Ils ne changent qu’en certaines de leurs parties, par génération ou par mélange. En revanche, les éléments des chimistes se transforment les uns dans les autres : le sel devient huile et soufre, et ceux-ci donnent à leur tour du sel, de l’huile et de l’air, et toutes choses deviennent toutes choses. Soutiendra-t-on qu’il n’y a pas là mutation substantielle, mais seulement séparation ? Il ne faudra plus alors parler de génération et de corruption, mais seulement de déplacement et de rassemblement de parties. Cela ne saurait convenir à de véritables principes, et du reste certains chimistes ont ajouté à la liste déjà mentionnée qui l’acide, qui la chaux, qui l’or, en soutenant que tout proviendrait de tout seminaliter. Et pour faire bonne mesure, d’autres encore posent un soufre, un sel et un mercure spirituels à côté de la triade corporelle, se réfugiant à l’évidence dans l’équivoque selon l’habitude des chimistes et des inventeurs de fables39.
31Enfin, s’agissant de la « tête morte », qui ne pourrait plus rien devenir, Campanella avance qu’il s’agit peut-être de la terre pure dont Platon a dit qu’elle était immuable : mais il suffit d’observer qu’une simple semence suffit à transformer la terre en une plante pour que nous devions considérer celle-ci comme convertible40.
32Le déni du statut de principe opposé ici par Campanella aux tria de Paracelse et aux éléments que les chimistes ont ajouté ensuite chacun plus ou moins à son gré était inhérent aux prémisses mêmes de sa physique, comme le confirment d’autres passages des Quœstiones.
33Ainsi, dans la Question 30 consacrée aux métaux, le rejet est formulé derechef très explicitement en écho à la discussion que l’on vient de rapporter, en même temps que la problématique de la transmutation est soumise à examen. Ici Campanella s’appuie sur un texte précis, le De natura rerum libri septem – sur la paternité duquel il n’a aucun doute41 –, un texte qu’il connaît bien et qu’il aime citer : on ne compte pas moins de huit références quasi littérales dans cette Question et dans trois autres42.
34L’énoncé des propriétés fondamentales des trois principes telles que Paracelse les résume au livre 6 du De natura rerum43, appelle ce commentaire abrupt : « s’agissant du soufre, du sel et du mercure, ce que disent les chimistes est arbitraire (voluntarium), puisqu’ils sont engendrés également par le Soleil à partir de la Terre, comme les plantes et les pierres, et qu’ils ne sont pas antérieurs aux autres choses, comme on l’a prouvé dans la question 18 ». Mais Campanella va plus loin en s’attaquant à une affirmation essentielle de Paracelse : celle selon laquelle la totalité d’un métal serait convertible en mercure. Après avoir rapporté textuellement la procédure expérimentale décrite par ce dernier44, Campanella formule une objection de fond. Si la transformation seulement partielle d’un métal en mercure est à ses yeux possible, elle ne saurait être interprétée en terme de séparation de parties en acte, mais proprement comme une génération. Autrement dit, « à moins que Paracelse ne veuille être quelque Anaxagore » – idée sur laquelle notre auteur revient plus longuement dans la Metaphysica 45 – on ne peut pas penser que le mercure préexiste en chaque métal où il serait caché, l’action du feu se bornant à le rendre visible. Pour Campanella, le feu engendre le mercure au sens propre, de la même façon que le pain engendre dans notre corps (sous l’action de la chaleur), le sang, la chair, le nerf, l’os et le souffle qui ne préexistaient pas en lui. Et Campanella pour qui cette comparaison vaut raison, ajoute : de même que la matiere hétérogène (dissimilaris) du pain qui provient de la semence d’un animal immobile [i. e. la plante] a une disposition pour se transformer en parties d’un animal mobile, il se peut aussi que dans le sel, dans le soufre et dans le mercure il y ait une « disposition » pour les métaux, et réciproquement, tout comme d’un cadavre proviennent animalcules et plantes46.
35Si dans le cas présent Campanella met en doute l’expérience de Paracelse qui établirait la réalité de la transmutation complète des métaux en la qualifiant de mirifica, ce n’est pas là son attitude ordinaire. Les expériences de Paracelse lui inspirent plutôt du respect, à lui qui n’a aucun moyen de les contrôler, et il avertit même qu’on ne doit pas les mépriser a priori, mais les refaire si on veut corriger Paracelse ou au contraire le suivre47. Recommandation qui s’applique précisément à une « expérience » improbable, à moins qu’il ne faille parler de recette fantastique, que Campanella évoque au moins trois fois dans les Quœstiones physiologicœ après qu’il en eut fait l’objet d’un appendice ajouté dans la seconde édition du De sensu rerum et magia, livre auquel nous allons maintenant nous référer.
36Cette « expérience » a trait à la production artificielle d’homoncules qui aurait déjà été tentée par Rhazès (al-Rhazi, 865-925) et par Albert le Grand, et dont Paracelse se vanterait, en son De rerum natura, d’avoir reçu la révélation de Dieu48. Après avoir rappelé comment ce dernier s’y prenait pour ressusciter en vase clos des oiseaux (les serpents ne sont pas chez Paracelse) à partir de leurs propres cendres, Campanella ajoute : « en ce qui concerne l’homme, Paracelse dit : “Si du sperme humain dans un vaisseau scellé se putréfie en atteignant le suprême degré de putréfaction à la chaleur du ventre de cheval pendant quarante jours, ou jusqu’à ce qu’il commence à vivre, à se mouvoir et à s’agiter [...] le sperme sera devenu en quelque façon semblable à un homme, mais transparent et sans corps. Si maintenant, chaque jour avec soin et attention on nourrit et entretient cet être avec l’arcanum du sang humain et que, pendant quarante semaines, on le maintient constamment et uniformément à la chaleur du ventre de cheval, il naîtra un véritable enfant, avec les mêmes membres qu’ont les enfants engendrés par une femme, mais il sera beaucoup plus petit de taille. Et il faut lui donner aussitôt une éducation soignée jusqu’à ce qu’il se soit développé et commence à devenir instruit et intelligent” [...] »49.
37Comment Campanella réagit-il devant ce texte de Paracelse dont nous abrégeons la citation pour nous en tenir à l’aspect qui nous intéresse ici50 ? « À cela je réponds : j’ignore ce que l’expérience ne m’a pas encore enseigné. J’accorde que tout naît à partir de la putréfaction, mais avec le concours d’une force externe, car ni les éléments privés de sens posés par les philosophes, ni les éléments dotés de sens qui cherchent seulement à se multiplier, ne sauraient produire les animaux et les plantes sans le concours d’un agent artiste [...]. Je ne nierai pas qu’à partir de serpents ou d’oiseaux réduits en poudre ou mis à macérer et transformés en humeur, une fois que l’esprit vital en a été à nouveau (?) extrait, des oiseaux ou des serpents, différents quant à l’individu, soient engendrés ». Et Campanella poursuit de façon plus rassurante, en faisant état de ses doutes quant à la génération spontanée des mammifères : « Mais étant donné que de bœufs en putréfaction nous voyons naître non pas des bœufs, mais des abeilles, et de lions en putréfaction non pas des lionceaux, mais des vers, et que les cadavres humains n’engendrent que des vers et des couleuvres, on doit à coup sûr avoir de grands doutes touchant un tel mode de génération de l’homme qui ne se fait pas à partir d’une femme. Car même si l’on donne la forme d’une vulve au vase dans lequel se fait la putréfaction des éléments [...], et bien que Paracelse y ajoute également de la semence humaine, alors que d’autres couperaient un homme en morceaux et le mettraient dans le vase où se fait la putréfaction, comme on dit que le marquis de Villena a voulu le faire pour lui-même, toutefois je n’oserai pas confier une si grande œuvre à un petit vase fabriqué par l’art et à des esprits engendrés dans la matière putréfiée »51. Suivent quelques bonnes raisons pour lesquelles la génération d’un homuncule in vitro serait impossible – Campanella va même jusqu’à invoquer le principe aristotélicien qu’il n’y a pas régression de la privation à l’habitus52. Mais il regrette aussitôt d’avoir été raisonnable en tranchant aussi vivement dans le sens négatif : d’où cette conclusion en forme de remords : « Pourtant je n’ose pas nier [ce que dit Paracelse] car là où l’on a quelque chose qui ressemble à une vulve et une intelligence, si un corps humain est produit, Dieu ne refusera pas de lui infuser une âme. Mais faute de révélation divine, je me tais »53.
38 Il est clair que ce texte de Paracelse a fasciné Campanella et qu’il lui a fait franchir les bornes de la prudence. Il n’a pas remarqué que cette page du De natura rerum ne présente pas cette expérience comme effectivement réalisée. En effet, aux philosophes anciens qui se sont interrogés sur la possibilité de fabriquer artificiellement un homunculus, Paracelse répond très précisément que cela ne répugne ni à la nature, ni à Pari spagirica, et même que cela est tout à fait possible... pourvu que l’on procède comme indiqué54. Campanella, ou tout autre, eût été évidemment bien en peine de refaire une expérience que Paracelse n’a sans doute jamais tentée, mais dont il a imaginé le « protocole »... et les résultats. Car c’est sur un terrain bien particulier qu’il faut ici se placer : celui du mythe, réactivé par l’auteur du De natura rerum, de l’homme qui rivaliserait avec le Dieu créateur en se faisant le démiurge de lui-même.
39Dans le chapitre de son Jābir ibn Hayyān consacré à la fabrication artificielle de l’homme, Paul Kraus – à qui le texte de Paracelse n’avait pas échappé – a montré que cette idée, en partie sous la forme du rêve de l’homme-automate ou de l’animal-machine, en partie sur la base de la théorie de la génération spontanée de l’homme, a une origine antique55. Il semble bien en tout cas que Paracelse a redonné à ce rêve dangereux une vigueur ou une actualité qu’il avait apparemment perdue pendant le Moyen Âge : en effet, l’idée d’une production artificielle de l’homme figure dans un certain nombre de textes du xvie et du xviie siècle ayant des connotations alchimiques et parfois aussi cabalistiques56, textes qui circulent notamment en Italie où ils ont pu être connus de Campanella.
40Ainsi Giulio Camillo Delminio parlait-il dans son Trattato delle materie d’une personne de sa connaissance qui, « per artificio di lambicchi e di altri istromenti » aurait produit un enfant qui mourut malheureusement à sa naissance57 ! Ce récit connut une assez large diffusion à travers l’œuvre souvent rééditée de Tommaso Garzoni, la Piazza universale di tutte le professioni del monda58. S’en feront l’écho des auteurs comme Cesare della Riviera59, Pietro Passi60 ou encore Giovan Battista Marino dans ses Dicerie sacre61. Diffusion que les dénonciations des théologiens furent incapables d’enrayer, si elles ne contribuèrent pas au contraire à la nourrir. C’est le cas en particulier de Martin Del Rio, l’auteur déjà cité des célèbres Disquisitiones magicae connues de Campanella. Dans une Quæstio où est prononcée la condamnation de l’alchimie, Del Rio qualifiait l’expérience de Camillo rapportée par Garzoni de « stupide, impie, erronée et blasphématoire ». Elle impliquerait que Dieu serait contraint d’insuffler une âme rationnelle dans le corps de l’homme créé artificiellement, ou encore, ce qui n’est pas mieux, que l’âme rationnelle pourrait surgir de la puissance de la matière ; en outre, l’âme d’un tel homme, qui ne descendrait pas d’Adam, ne serait pas souillée par le péché originel ; enfin la rédemption du Christ ne lui serait pas nécessaire : autant d’hérésies62 ! Trois quarts de siècle plus tard, la critique sera reprise en des termes semblables par un autre jésuite, Athanasius Kircher, qui lui visera explicitement Paracelse63.
41Ii serait sans doute inadéquat de condamner de façon abrupte l’adhésion, quelque peu hésitante malgré tout, de Campanella à cette histoire d’homuncule chimique. Si on laisse de côté la prise de position des théologiens cités, qui ne jugeaient pas sur le fond, le parti à adopter n’était pas évident pour ceux qui, comme lui et beaucoup d’autres, avaient pris le risque de sortir des chemins – et des garde-fous – de l’École. Le rapprochement avec un Mersenne qui, peut-être éclairé sur ce point par un alchimiste « spéculatif », avait proposé un niveau supérieur d’interprétation – la fabrication de l’homunculus comme allégorie de la résurrection spirituelle de l’homme par l’initiation alchimique – ne serait évidemment pas à l’avantage de Campanella64. Mais il faut voir au moins une des raisons pour lesquelles notre auteur s’est trompé. C’est qu’en donnant a priori crédit à l’“expérience” de Paracelse, ou si l’on préfère en n’osant pas la nier, il a payé son tribut à une tradition pluriséculaire qui commençait à peine, et de façon balbutiante, à se défaire. Une approche nouvelle de l’expérience était en train de prendre forme dans l’esprit des plus éclairés de ses contemporains : l’expérience non plus comprise comme acceptation a-critique de ce que d’autres hommes censés dignes de foi témoignent avoir vu, entendu ou encore réalisé – de préférence en secret, à l’instar des membres de l’Accademia dei Secreti que Campanella avait fréquentés à Naples dans sa jeunesse –, mais conçue comme expérimentation contrôlable et répétable par quiconque selon des modalités précises, conformément à une pratique qui s’imposera de façon de plus en plus rigoureuse à partir de la seconde moitié du xviie siècle65.
Notes de bas de page
1 Cf. Philosophia sensibus demonstrata (= PSD), Naples, 1591, Præf., pp. 4-5. Il existe une traduction italienne due à L. De Franco parue sous le titre La filosofia che i sensi ci addittano, Naples 1974 (cf. pour le passage cité, pp. 15-16). L’influence de la lecture de Paracelse soutenue par N. Badaloni dans certains passages de la PSD n’est étayée sur aucun texte : cf. Tommaso Campanella, Milan, 1965, pp. 99 sq.
2 Cf. Magia naturalis libri XX (Leiden, 1651) : cf. lib. VIII, 12, p. 354 (un noble de la cour impériale a communiqué à Délla Porta la formule de cet onguent donné autrefois à l’Empereur par Paracelse) ; voir encore lib. X, 14. p. 429, à propos d’un type d’extraction que les paracelsiens cacheraient ou ignoreraient.
3 Voir sur ce point le livre de Massimo Luigi Bianchi, Signatura rerum. Segni, magia e conoscenza da Paracelse a Leibniz, Rome 1987, pp. 90-91.
4 Il est curieux de constater que plus de trente ans après les affirmations génériques de N. Badaloni sur la présence du paracelsisme dans la culture napolitaine de la fin du xvie siècle (voir notamment son étude « I fratelli Della Porta e la cultura magica e astrologica a Napoli nel ’500 », Studi storici, I, 1959-1960, pp. 677-715), la question de l’impact de la pensée de Paracelse sur les conceptions de Délla Porta n’a fait l’objet d’aucune communication lors du grand colloque Délla Porta de 1986 (cf. Giovan Battista Della Porta nell’Europa del suo tempo, a cura di M. Torrini, Naples, 1990).
5 Sur T. Adami (1581-1643) voir l’introduction de L. Firpo à la réimpression des éditions francfortoises des œuvres de Campanella publiées sous le titre Opéra latina Francofurti impressa annis 1617-1630, [= Op. lat.], 2 vol., Turin, 1975, vol. 1, pp. v-xix. Adami avait séjourné à Naples huit mois entre 1612 et 1613, période pendant laquelle il a peut-être rencontré directement le prisonnier des Espagnols et en tout cas a échangé avec lui plus de deux cents lettres (malheureusement perdues).
6 Prodromus, Præfatio, sign. C2 r-v (= Op. lat., vol. 1, pp. 19-20). Très éclectique, Adami écrit encore : « Nec Iordani Bruni, Nicolai Hill, Fr. Patricii, Gv. Postelli et aliorum imaginationes et philosophemata omnia omnino vana sunt » : noms que l’on retrouvera dans la préface écrite par Adami en tête de l’Apologia pro Galilœo (Francfort, 1622) : cf. p. 4 (= Op. lat., vol. 1, p. 478).
7 Prodromus, sign. C 2 v (= Op. lat., vol. 1, p. 20) : « Quibus si accedai Germani Hermetis Paracelsi Anatomia Vulcanica et Maturatio naturæ inferioris, quid Natura a nobis abscondere amplius poterit [...] ».
8 Prodromus, ibid. : « tantum enim abest, ut Chymicis (quæ tamen Campanellam experiri afflictionum suarum necessitas non sivit) nostra sint dissona, ut ea longe melius et dilucidius explicent, et ad plura arcana eruenda viam facilem monstrent. Nam Sulphur et Mercurius et Sal etiam ex Calore et Materia constant, certis tamen et appropriatis gradibus, idea charactereque suo specifico, quibus vis seminalis constituitur. Aliter igitur considerat sapiens principia in se, aliter operatur Natura practice iis junctis. »
9 Cf. op. cit., Præfatio, sign. b2v (= Op. lat., vol. 2, p. 544). Les principes naturels auxquels Adami se réfère sont les deux contraires actifs investissant la matière inerte conformément aux idées de Dieu.
10 Dans l’avertissement placé en tête de la deuxième édition du De sensu rerum (Paris, 1636), Campanella, en écho à un passage de la Præfatio du Compendium de 1617 (cf. Op. lat., vol. 1, pp. 23- 24), parle d’une « école » qu’Adami aurait fondée en Saxe et où il aurait enseigné la philosophie campanellienne. On ne sait rien sur cette « académie » qui pourrait bien n’être restée qu’à l’état de projet.
11 Cf. Epilogo magno (Fisiologia italiana) a cura di C. Ottaviano, Rome, 1939, p. 308, note c. Le nom de Paracelse disparaîtra dans les versions latines de l’Epilogo parues respectivement à Francfort en 1623 et à Paris en 1637.
12 Cf. op. cit., pp. 8 et 52 (= Op. lat., vol. 1, pp. 482 et 526). Pour l’ouvrage de Martin Del Rio (en latin Delrius), cf. éd. cit., t. 1, pp. 343-344 : l’opinion de Paracelse est tirée de l’Epistola ad Athenienses sive de occulta philosophia. Campanella revient sur cette question dans le livre IV de sa Theologia (« De homine »), éd. R. Amerio, 2 vol., Rome, 1961, vol. 2, pp. 142-144 : il y déclare que si les pygmées et les géants sont d’authentiques hommes, les follets, tritons, sirènes et autres créatures dont parle Paracelse ne participent pas de l’espèce humaine faute de posséder le langage et de descendre directement d’Adam.
13 Cf. De gentilismo non retinendo quæstio unica, Paris, 1636, p. 6 : « Ergo etiam Physiologiam oportet nouam facere de necessitate, sicut Picus, et Telesius, et Valesius, Paracelsus cœperunt ; quamuis in aliquo errauerint, indicant tamen quod tota Philosophia debet renouari [...] ». Sur F. Vallès, médecin de Philippe II et auteur en particulier d’un De iis quae scripta sunt physice in libris sacris, sive de Sacra philosophia liber singularis liber, Turin, 1587, voir G. Zanier, Medicina efilosofia tra ’500 e ’600, Milan, 1983, pp. 20-38. Nous ne connaissons pas d’autre référence à cet auteur espagnol sous la plume de Campanella : au lieu de Valesius, ne faut-il pas lire Vesalius ? Le célèbre anatomiste est cité, lui, dans plusieurs ouvrages du dominicain.
14 Pour l’épisode bien connu du brûlement du Canon d’Avicenne auquel se livra Paracelse le 24 juin 1527, voir W. Pagel, Paracelse. Introduction à la médecine de la Renaissance, trad. fr., Paris, 1963, pp. 25-26. Rien ne permet de dire si Campanella a eu connaissance de cet événement précis, mais le rôle primordial accordé par le médecin bâlois à l’expérience dans ses écrits n’a pas pu lui échapper. Quant au primat théorique donné par Campanella à la connaissance directe de la nature, on en trouve de nombreuses formulations dans son œuvre, et une en particulier dans une lettre de 1607 où il reproche précisément à Pic de la Mirandole de n’avoir tiré sa science que des livres des hommes (cf. T. Campanella, Lettere, éd. V. Spampanato, Bari, 1927, p. 134).
15 Sur les rapports entre Campanella et G. Naudé, voir R. Pintard, Le Libertinage érudit dans la première moitié du xviie siècle (1943), helle éd., Genève – Paris, 1983, pp. 253 sqq. et en dernier lieu L. Bianchi, Tradizione libertina e critica storica. Da Naudé a Bayle, Milan, 1988, pp. 92-99. G. Naudé pourrait aussi avoir été un des informateurs de Campanella en matière d’alchimie, dont il lui aurait présenté un tableau peu favorable (voir la contribution de L. Bianchi dans le présent volume).
16 Syntagma, cap. II, art. 5, dans H. Grotii et aliorum Dissertationes de studiis instituendis, Amsterdam, 1645, p. 393 : « Paracelsus [...] in destillatoriis et Medicinis chymicis aliquid promovit ; in speculativis vero ineptit plerumque, et accipit pro ratione non rationem. Sane Medicina posset abbreviari in verbis, augeri in sententiis et rationaliter fieri, ut patet ex libris nostris Medicis. » Les auteurs que mentionne Campanella comme d’une lecture indispensable en matière médicale sont, outre Paracelse, les grands classiques : Hippocrate, Galien et Celse ; il y ajoute Alexandre de Tralles (vie siècle), Avicenne, Rhazes et Femel (cf. ibid, pp. 392-393).
17 Sur les doctrines campanelliennes en matière médicale, voir le livre de M.W. Mônnich, Tommaso Campanella. Sein Beitrag zur Medizin und Pharmazie der Renaissance, Stuttgart, 1990.
18 Cf. Medicinalium iuxta propria principia libri septem, Lyon, 1635, pp. 290-291 et 303-304. Gaffarel, qui était informé des doctrines des chimistes, a pu aussi être une des sources de Campanella en ce domaine.
19 Cf. M.W. Mönnich, op. cit., p. 235 : « Wenngleich Campanella in den “Medicinalia” auch durch alchemische Verfahren bereitete Arzneimittel anführt, so kann er nicht als überzeugter Anhänger der Chemiatrie bezeichnet werden [...] » : c’est le moins qu’on puisse dire !
20 L’ouvrage de R. Pintard a été cité supra n. 15. Pour H. Metzger, cf. Les Doctrines chimiques en France du début du xviie à la fin du xviiie siècle, Paris, 1923 (2e tirage 1969) ; pour R. Lenoble, cf. Mersenne ou la naissance du mécanisme, Paris, 1943 (2e éd., 1971) ; pour F. Secret, voir les nombreux articles parus dans Bibliothèque d’Humanisme et Renaissance, Rinascimento, etc. ; pour A.G. Debus, voir notamment The Chemical Philosophy : Paracelsian Science and Medicine in the Sixteenth and Seventeenth Centuries, New York, 1977 et, en dernier lieu, The French Paracelsians. The Chemical Challenge to Medical and Scientific Tradition in Early Modem France, Cambridge, 1991.
21 Pour la bibliographie des œuvres de Paracelse, l’ouvrage fondamental reste celui de K. Sudhoff, Bibliographia paracelsica, Berlin, 1894 (réimp. Graz, 1958). Voir aussi pour de très utiles compléments les sections bibliographiques dans le volume collectif Paracelse des Cahiers de l’Hermétisme, Paris, 1980, pp. 220-231 et 272-280.
22 En particulier dans le De sensu rerum (= SR) et les Quœstiones physiologicœ (= Qu. phys.) ; Nous revenons plus bas sur ce texte.
23 Cf. Universalis philosophiœ seu metaphysicarum rerum libri XVIII (= Met.), I, 188a et 194a : ces deux noms figurent en marge du texte, (le premier sous la forme abrégée Crol.). Le second nom semble désigner Gérard Dorn.
24 Cf. Qu. phys., 10, dans Disputationum [..] in quatuor partes, Paris, 1637, p. 166.
25 Voir en particulier sur ce point R. Hooykaas (par exemple son article « Chemical trichotomy before Paracelsus ? », Archives internationales d’histoire des sciences, 1948, pp. 1063-1074 (où l’on trouvera référence à d’autres travaux du même auteur) ; W. Pagel, Paracelse, trad. fr., op. cit. et les articles rassemblés dans le volume intitulé Religion and Neoplatonism in Renaissance Medicine, edited by M. Winder, Londres, 1985 ; voir aussi G. Zanier, L ’espressione e iimmagine. Introduzione a Paracelso, Trieste, 1988, pp. 29 sqs. L’étude d’A. Koyré sur Paracelse dans Mystiques, spirituels, alchimistes du xvie siècle allemand, Paris, 1956 reste indispensable.
26 Les quelques dictionnaires que nous avons consultés n’ont pas toujours satisfait notre curiosité quand nous y avons cherché des termes employés par Campanella : ainsi pour astralitas, qui pourrait être du cru de notre auteur. M.L. Bianchi a entrepris récemment de dresser le lexique allemand du Paragranum : cf. Lessico del « Paragranum » di Theophrast von Hohenheim detto Paracelsus. I. Indici (Lessico intelletuale europeo, 47), Rome, 1988. Le terme d’H. Metzger cité un peu plus bas est tiré de son livre Les Doctrines chimiques, pp. 146 sqq. où il sert à caractériser la situation intellectuelle du début du xviie siècle.
27 Du moins dans les Disputationes, seul texte que nous prenons en considération ici. Dans la Metaphysica, l’analyse est conduite dans une perspective en partie différente, et sur la base d’une information qui nous semble plus riche. – Sur les caractères propres des principes physiques télésiens, voir notre étude « Aristote ‘oublieux de lui-même’ selon B. Telesio », dans Etudes philosophiques, 1986 (n° 3), pp. 371-389.
28 Les chimistes français dont parle ici Campanella pourraient être les auteurs des thèses condamnées par la Sorbonne en 1624. Mersenne s’en faisait l’écho par exemple dans La Vérité des sciences contre les septiques [sic] ou Pyrrhoniens, Paris, 1625, pp. 79 sqq. Un autre auteur que Campanella a rencontré en 1636 à Paris a pu aussi l’informer sur ce sujet : il s’agit de Jean de Launoy, qui publiera la première édition de son De varia Aristotelis in Academia Parisiensi fortuna [...] liber en 1653 : dans ce livre, les thèses condamnées sont reproduites avec la censure des théologiens de la Faculté de Paris ; cf. op. cit., pp. 128 sqq. (sur les relations entre ces deux auteurs, voir J.M. Headley, « Tommaso Campanella and Jean de Launoy : The Controversy over Aristotle and his Réception in the West », Renaissance Quarterly, 43, 1990, pp. 529-550).
29 Cf. Qu. Phys. 18, (Additio), loc. cit., p. 166. Dom Pernety définit ainsi la tête morte : « Ce sont les fèces qui demeurent au fond de la cucurbite, ou de la retorte, après la distillation ou la sublimation des esprits » : cf. Dictionnaire mytho-hermétique (1787), rééd. Paris, 1972, p. 351, col. b.
30 Cf. ibid., pp. 166-167. Tous ces points sont développés dans le corps du texte lui-même : voir Physiologia epilogistica, cap. 1, art. 4 et cap. 4-5, dans Disputationum, pp. 5-6 et 19-27.
31 Ibid. : « At corpora posita Chimicis tanquam elementa, oppositas habent hisce prorsus conditiones, ergo non sunt Elementa nisi apud ignorantes quid sit Elementum. »
32 Cf. ibid., p. 167. La référence à la Bible est conforme au projet campanellien d’une philosophie de la nature qui soit en accord avec l’Écriture : conception développée ici comme dans la Theologia : voir en particulier le livre III de cette œuvre édité par R. Amerio sous le titre Cosmologia (Rome, 1964).
33 Id. : « Nemo quidem tam delirus qui non intelligat elementa continere intra se elementata, non autem elementata continere elementa. Nec enim pars continet totum, nec fœtus Patrem et Matrem. »
34 Cf. SR, I, 1, p. 1 : « Ens nullum aliis dare posse quod ipsum in se non habet [...] ». Nous avons traité cette question de façon exhaustive dans notre thèse (inédite) Pansensisme et interprétation de la nature chez Tommaso Campanella. Le ‘De sensu rerum etmagia’, Paris, 1986.
35 Cf. Qu. phys. cit., pp. 168-169. W. Pagel, qui soutient qu’il y a une parenté entre le sensus naturalis campanellien et le courant de pensée issu du « paracelsisme », ne cite aucun texte des Quœstiones physiologicœ et de la Metaphysica à l’appui de son affirmation, mais seulement quelques passages peu significatifs du De sensu rerum et des Medicinalia : cf. The Smiling Spleen. Paracelsianism in Storm and Stress, Bâle – Munich, etc., 1984, pp. 82-86.
36 Les conférences du « Bureau d’Adresses » fondées par Théophraste Renaudot ont été fréquentées, entre autres, par Campanella, par J.B. Morin et par E. de Clave : cf. H.M. Solomon, Public Welfare, Science and Propaganda in Seventeenth Century France. The Innovations of Théophraste Renaudot, Princeton, 1972, p. 68. Voir aussi L. Borselli, C. Poli, P. Rossi, « Una libera comunità di dilettanti nella Parigi del ’600 », dans Cultura popolare e cultura doua nel Seicento, Milan 1983, pp. 11-65. Sur E. de Clave, voir les remarques de O.R. Bloch dans La Philosophie de Gassendi. Nominalisme, matérialisme et métaphysique, La Haye, 1971, pp. 238-241. Rappelons que les thèses de 1624 étaient dirigées aussi contre Paracelse et les « chimistes vulgaires » (voir en particulier la thèse 6 citée par J. de Launoy, op. cit., pp. 130-131 ; voir aussi ibid., pp. 134-135).
37 Cf. Qu. phys. cit. p. 170.
38 Par exemple dans la Question 30 où il réfute directement une affirmation de Paracelse : voir plus bas.
39 Cf. Qu. phys. cit., pp. 170-171. Campanella pourrait-il ici viser un auteur comme Joseph Duchesne (= Quercetanus) ? : voir sur ce point W. Pagel, « Paracelsus and the Neoplatonic and Gnostic Tradition », dans Ambix, VIII (1960), pp. 125-166 (repris dans Religion and Neoplatonism cité supra note 25) : cf. pp. 137-138.
40 Ibid., p. 171 : la réponse de Campanella paraît singulièrement tirée par les cheveux. Sur le caractère immuable de la terre selon Platon, seul élément qui ne peut pas se transformer en un autre élément, voir Timée, 56 C-D, et le commentaire ad locum de L. Brisson dans Le Même et l’Autre dans la structure ontologique du « Timée » de Platon, Paris, 1974, pp. 388 sqq.
41 K. Sudhoff a contesté l’authenticité paracelsienne de ce texte (qui d’après sa dédicace aurait été composé en 1537) : voir le volume 11 de l’édition en 14 volumes des Gesammelte Werke de Paracelse due à K. Sudhoff (Munich, 1922-1933) ; voir aussi F. Darmstaedter, « Paracelsus De natura rerum, Eine kritische Studie », Janus, XXXVII (1933), pp. 1-18, 48-62 et 109-115.
42 Ces trois autres Quœstiones portent les numéros 29, 33 et 34 et traitent respectivement des pierres, des plantes et de la génération des animaux (cf. op. cit., pp. 263 sqq., 337 sqq. et 352 sqq.).
43 Qu. phys. 30, p. 276 : « Omnium principia nascentium sunt phlegma, pinguedo et cinis : phlegma est Mercurius, pinguedo Sulphur, cinis est Sal. Nam omne quod igni fumat et evaporat est Mercurius ; omne quod flagrat et comburitur est sulphur et omnis cinis est sal. » La citation de Campanella ne comporte que des variantes minimes (cf. De nat. rer., pp. 441-442).
44 De nat. rer., lib. 6, p. 439.
45 Cf. Metaphysica, I, lib. 2, cap. 5, art. 5 (titre) p. 187 : « Materia Anaxagoreis infmitarum esse specierum minimarum, et bas omnes in omnibus [...]. Item Paracelsistas omne elementum in omni ponere, et tria corpora sal, sulfur et Mercurium elementorum elementa, et omnia in omnibus [...] ». C’est là en tout cas une thèse revendiquée en toute clarté par les auteurs des thèses de 1624 : cf. la thèse 14, in J. de Launoy, op. cit., p. 134.
46 Qu. phys. 29, pp. 276-277. Un tel enchaînement d’idées, pour nous surprenant, est dans la logique – dont participe aussi bien la pensée de Paracelse – d’une vision vitaliste qui interprète de façon unitaire tous les faits naturels en termes « biologiques ».
47 Qu. phys. 30, p. 285 : « Nec Paracelsi experientiæ sunt negligendæ, sed reficiendæ volenti ipsum emendare, aut commendare. »
48 La formulation de l’auteur est plus ambiguë, et même contradictoire dans les termes car s’il écrit bien : « Hoc iam est unum ex maximis secretis quæ Deus mortali et peccatis obnoxio homini patefecit. Est enim miraculum et magnale Dei et arcanum super omnia arcana », il ajoute : « et merito in secretis debet seruari vsque ad extrema tempora, quando nihil erit reconditi, sed omnia manifestabuntur » (cf. De nat. rer., lib. I, p. 378).
49 Cf. SR, IV, 19, App., p. 207. En dépit des guillemets, la citation de Paracelse n’est pas littérale. D’après le médecin suisse les homunculi pleinement développés deviendraient des géants ou des pygmées, ou encore des hommes dotés de pouvoirs et de connaissances extraordinaires. Capacités qui les apparentent à des esprits et font qu’on les tiendrait pour les rejetons de nymphes et de sylvains, eux-mêmes produits d’une génération artificielle.
50 Nous avons analysé en détail l’intégralité du texte de Paracelse dans notre thèse (cf. op. cit., pp. 1633-1643).
51 Ibid., pp. 207-208. Sur le rejet par Campanella de la génération spontanée des grands animaux et a fortiori de l’homme, voir les textes rassemblés par A. Gliozzi dans Adamo e il nuovo monde, Florence 1977, pp. 356 sq. Notons toutefois que dans le SR, IV, 19, p. 205, le dominicain n’exclut pas complètement cette possibilité.
52 Cf. Aristote, Métaphysique, VIII 5, 1044b 33-1045a 6. Comme Campanella le dit ailleurs, seul Dieu peut de privatione vera ad habitum res reducere Theologia, liber XIV (« Magia e grazia »), éd. R. Amerio, Padoue, 1957, p. 244.
53 SR, loc. cit. p. 208 : « Negare tamen non audeo ; ubi enim est quid simile vuluæ, & intelligentia, si fiat humanum corpus, Deus non negat infundere mentem. Si Deus non reuelat, ego taceo. »
54 Op. cit., lib. i, p. 377 : « [...] non parua dubitatio et quæstio inter aliquos ex antiquis philosophis fuerit. Ad hoc respondeo quod id arti spagiricæ et naturæ nullo modo repugnet, imo bene possibile sit ; ut id fiat hoc modo procedendum est : Sperma viri per se in cucurbita sigillata [etc.] »
55 Voir P. Kraus, Jābir ibn Hayyān. Contribution à l’histoire des idées scientifiques dans l’Islam. Jābir et la science grecque (Le Caire, 1942), réimp. Paris, 1986, pp. 103-134.
56 Voir sur ce point les remarques de W. Pagel, qui s’appuie sur des travaux de G. Sholem, dans son Paracelse, op. cit., pp. 240-241.
57 Cf. L’opere di M. Giulio Camillo, Venise, 1579, p. 154. Sur G. Camillo, voir l’étude de C. Vasoli dans le présent recueil.
58 Cf. Disc. XLI, Venise, 1587, p. 418. Pour une réévaluation de la personnalité de cet auteur et de son œuvre, voir P. Cerchi, Enciclopedismo e politica délia riscrittura : Tommaso Garzoni, Pise, 1980.
59 Cf. Il monde magico degli Heroi, Milan, 1605, p. 190 (cité par F. Secret dans une étude intitulée « Les cheminements de la kabbale à la Renaissance. Le ‘Théâtre du monde’ de Giulio Camillo Delminio et son influence », Rivista critica di storia délia filosofia, XIV (1959), pp. 418-436).
60 Cf. Délia magic’arte ovvero délia magia naturale, Venise, 1614, p. 106.
61 Cf. op. cit., « Diceria prima », la parte, éd. G. Pozzi, Turin, 1960, p. 114 : Marino fait référence au fanciullo anelante de Camillo.
62 Cf. op. cit., lib. I, cap. 5, q. 4 : Licitane an illicita sit alchymia ?, vol. 1, pp. 94-101 : voir p. 100.
63 Cf. Mundus Subterraneus in XII libros digestus, lib. xi, sect. 2, cap. 7, t. 2, Amsterdam, 1678, pp. 297b-298 : pour Kircher, cette stulta chymiurgia de Paracelse est d’inspiration satanique. Du reste, Satan a également inspiré les Rosicruciens, Cornelius Agrippa, Sendivogius, Robert Fludd et « Marchio de Villena », l’inquiétant marquis espagnol cité dans le De sensu rerum.
64 Voir sur ce point R. Lenoble, op. cit. note 20, pp. 145-150 ; voir aussi l’étude de A. Beaulieu dans le présent recueil.
65 On trouvera sur ce thème général des éléments intéressants dans l’étude de C.B. Schmitt (mais le problème particulier du statut de l’expérience en alchimie y est complètement ignoré) : « Expérience and Experiment : A Comparison of Zarabella’s View with Galileo’s in ‘De Motu’ », Studies in the Renaissance, XVI (1969), pp. 80-138.
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