Introduction
p. 5-20
Note de l’éditeur
Une nouvelle édition de ce livre a été publiée. URL : https://0-books-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/ugaeditions/27257 . DOI : 10.4000/books.ugaeditions.27257
Texte intégral
1Dans les années 1829-1830, l’érudit danois Carl Christian Rafn édita une collection de récits dont le point commun est de relater les exploits de héros nordiques censés avoir vécu avant la colonisation de l’Islande. Il intitula sa collection Fornaldarsögur Norðrlanda – littéralement « sagas des temps anciens des pays nordiques » – terme le plus souvent traduit par « sagas légendaires » et qui désigne désormais un genre littéraire comportant environ vingt-cinq sagas, une dizaine de récits plus courts nommés þáttr ou « dit », et enfin quelques fragments.1 Les auteurs, qui sont tous restés anonymes, puisaient dans différentes sources d’inspiration parmi lesquelles on peut signaler l’ancienne poésie mythico-héroïque, le folklore et les récits à caractère historique. La présence de motifs traditionnels pourrait indiquer que les sagas légendaires aient constitué une partie importante de la tradition orale, et dans la plus ancienne mention faite de sagnaskemmtun « divertissement par les sagas », un sagnamaðr, « auteur de sagas » ou « homme qui raconte/dit », amuse son public avec des sagas légendaires. Il s’agit d’un passage célèbre de la Saga de Thorgils et de Haflidi, dans la Saga des Sturlungar, où il est question d’un banquet de noces qui eut lieu à la ferme de Reykjaholar en Islande en 1119. Au cours de la fête, Hrolf de Skalmarnes raconta une saga de Hrongvid le viking, une autre d’Olaf et ses guerriers, encore une de la Violation du tertre funéraire de Thrain et, enfin, une saga sur Hromund Gripsson, accompagnées de plusieurs poèmes. Cette dernière, composée par Hrolf lui-même, avait tant plu au roi Sverrir qu’il déclara que les lygisögur, ou « sagas mensongères », de ce genre étaient les plus amusantes. Malheureusement aucune de ces sagas mensongères ne nous est parvenue mais les titres laissent deviner leur parenté avec ce que l’on appelle aujourd’hui les sagas légendaires. À côté des célèbres sagas des Islandais, connues pour leur style sobre et réaliste, les sagas légendaires se caractérisent en effet par leur aspect fictionnel, par le romanesque et par la présence de motifs traditionnels, évoquant facilement l’univers du conte.2 La frontière entre le réel et le fantastique ne se laisse pas cerner avec précision, car géants, nains et autres créatures surnaturelles font irruption dans le récit à tout moment. Originaires de Scandinavie, les protagonistes s’aventurent fréquemment dans des pays lointains, et même dans l’autre monde païen dont la géographie imaginaire fournit à l’action un cadre exotique, transportant le lecteur dans un monde inconnu et irréel.3 Non seulement l’espace mais aussi le temps déroute : la narration fournit peu d’indices temporels ou historiques à l’exception de quelques allusions aux rois norvégiens permettant d’ancrer certains récits dans le règne de tel ou tel souverain. Dans le Dit de Helgi Fils de Thorir et le Dit de Thorstein le Colosse-de-la-Ferme, les deux héros éponymes sont au service d’Olaf Tryggvason, roi de Norvège de 995 à 1000. Cependant d’autres figures royales s’y imposent davantage, à savoir les rois légendaires de l’autre monde, les géants Godmund de Glaesisvellir et Geirrod qui encadrent la narration bien mieux que le roi chrétien. Quant aux principaux protagonistes des sagas légendaires, ce sont le plus souvent des héros parfaits mais sans profondeur, simples et stéréotypés, contrairement aux personnages plus complexes et plus humains des sagas des Islandais.
2En dépit d’une allure nordique, la parenté des sagas légendaires avec la tradition européenne médiévale de la fiction romanesque est plus évidente que celle des autres sagas islandaises, si on exclut les sagas de chevaliers.4 Considérées comme plus tardives et moins sérieuses que les sagas des Islandais, les sagas légendaires furent longtemps sous-estimées et ne suscitèrent guère l’intérêt des chercheurs. Depuis quelques années on se penche davantage sur ces textes et l’on s’intéresse avant tout à la structure du genre – est-il possible ou non de dégager une unité structurale du genre ?5 – et aux conditions de l’apparition et de la fonction de cette littérature dans la société. Ces récits imaginaires, qui ne prétendent pas au réalisme sérieux des autres catégories de sagas, semblent, au premier abord et avant tout, destinés au divertissement. Comme le souligne Stephen A. Mitchell dans son importante étude sur les sagas légendaires, la critique a longtemps expliqué la genèse de la littérature islandaise tardive et non réaliste comme une simple littérature d’évasion.6 Cette explication se fonde essentiellement sur des faits historiques, à savoir la dureté de la vie en Islande à l’époque de leur composition, époque marquée par des catastrophes naturelles, des conditions climatiques défavorables, des événements politiques et divers désastres qui firent suite à la perte pour les Islandais de leur souveraineté en 1262-1264 lorsque l’île passa sous la domination norvégienne.7 Dans cette période de déclin et d’humiliation, les sagas légendaires auraient eu une forte valeur compensatoire pour le public, non seulement en apportant un soulagement instantané – grâce à leur caractère divertissant et souvent humoristique – mais aussi en offrant aux habitants de l’île une vision idéalisée de leur passé héroïque, période dont ils pouvaient encore être fiers et qui leur permettait d’espérer un avenir meilleur.8 Régis Boyer semble partager cet avis et souligne la capacité de ces récits des époques glorieuses d’offrir à une population éprouvée une « affirmation de soi », la rendant ainsi plus apte à affronter le colonisateur.9 Un point de vue intéressant est émis par Torfi H. Tulinius qui souligne la nécessité de situer ces compositions non seulement dans le contexte de la production littéraire fictionnelle en Islande au XIIIe siècle mais aussi dans le contexte culturel et socio-historique de l’époque qui a donné naissance à ces textes pour comprendre les motivations de l’auteur et ce que les textes pouvaient signifier pour le public.10 L’Islande du XIIIe siècle était une société en profonde mutation en raison de l’influence exercée par le modèle aristocratique monarchique depuis le dernier tiers du siècle précédent. Ce processus, qui devait aboutir à la soumission du pays à la couronne norvégienne, imposait notamment une modification importante dans le domaine de la transmission du pouvoir et du partage de l’héritage. Tulinius estime en effet que, grâce à l’image fictionnelle que donnent les sagas légendaires du passé païen des pays scandinaves, elles pouvaient traiter des mêmes problèmes que les sagas des Islandais mais d’une façon différente et même plus directe. Si la tradition manuscrite des sagas légendaires ne remonte pas au-delà du début du XIVe siècle, la date de composition des plus anciennes pourrait, selon lui, être située dans la seconde moitié du XIIe siècle. Les sagas légendaires – notamment celles dont la composition remonterait au XIIe XIIIe siècle – seraient non seulement un lieu d’expression de fantasmes compensatoires mais aussi des documents historiques exceptionnels. On pourrait ainsi les considérer comme « une réponse originale à des problèmes qui étaient à la fois semblables et différents des problèmes qui se posaient ailleurs en Europe ».11
3Les textes présentés ici sont plus tardifs et font partie de ce que l’on appelle les sagas légendaires merveilleuses. Contrairement aux sagas légendaires héroïques inspirées de la poésie ancienne mythico-héroïque et souvent tragiques dans leur dénouement, les sagas légendaires merveilleuses se terminent bien et sont davantage influencées par les contes populaires, le fantastique et la courtoisie bien que ces distinctions ne soient pas toujours très nettes. Leur structure est le plus souvent stéréotypée et comporte les éléments suivants : enfance, départ de la maison parentale, suite d’aventures/quêtes plus ou moins longues et périlleuses, récompense, installation sur un territoire/royaume.12 Le Dit de Thorstein le Colossede-la-Ferme en offre une illustration parfaite. Bien que Thorstein soit présenté comme « homme du roi Olaf fils de Tryggvi », ce personnage n’apparaît nulle part ailleurs et ne semble pas avoir de modèle historique. Cette courte saga, qui date probablement de la fin du XIIIe siècle ou du début du siècle suivant, nous est parvenue dans quarante-huit manuscrits. Elle comporte le récit des quatre aventures du héros éponyme précédé d’une introduction. Dans la première de ses aventures, Thorstein, accompagné d’un elfe, se rend à un somptueux festin qui a lieu dans l’autre monde. Dans la deuxième, il secourt un nain et l’aide à récupérer son enfant que le dieu Odin a enlevé. En signe de reconnaissance, le nain lui fait cadeau de plusieurs objets magiques. La troisième aventure est la plus longue et la plus importante. Seul dans une forêt, Thorstein rencontre Godmund de Glaesisvellir, roi de l’autre monde et vassal du roi géant Geirrod auprès duquel Godmund doit se rendre pour la cérémonie d’allégeance. Le père de Godmund est mort lors d’un voyage au domaine de Geirrod et Godmund craint le pire de le part de Geirrod. Thorstein l’accompagne et, grâce à une pierre que le nain lui a offerte, il se rend invisible. Il intervient ainsi lorsque Geirrod tente de trahir Godmund et ses hommes, d’abord au cours d’un jeu de balle, ensuite en luttant et finalement en leur faisant boire dans des cornes qu’il est quasiment impossible de vider. Thorstein tue finalement le géant perfide et met le feu à sa demeure. Avant de quitter l’autre monde, Thorstein fait la connaissance d’une jeune femme qui accepte de le suivre, de se convertir à la foi chrétienne et de l’épouser. Thorstein s’empare de deux cornes à boire qui appartiennent au père géant de la jeune femme et les offre au roi Olaf qui devra affronter le géant lorsque celui-ci viendra les reprendre. La quatrième aventure correspond au voyage de Thorstein qui ramène les cornes de l’autre monde au roi Olaf avant d’y retourner et s’y installer définitivement avec son épouse.
4Il arrive souvent dans les récits légendaires, comme dans le Dit de Thorstein le Colosse-de-la-Ferme, que le héros soit, d’une façon ou d’une autre, conduit dans l’autre monde de la Scandinavie païenne.13 Cependant le Dit de Thorstein le Colosse-de-la-Ferme est particulièrement riche en motifs folkloriques et mythologiques. La première aventure de Thorstein a de nombreux parallèles dans les contes folkloriques scandinaves : un garçon qui passe près d’une montagne entend les géants demander leur couvre-chef rendant invisible. Le garçon imite les géants et les suit à un mariage d’humains où les géants volent de la nourriture. Il finit par être découvert et parfois il aide à chasser les géants.14 Certains contes populaires islandais mettent en scène un humain qui s’introduit dans l’autre monde. Il y est invisible pendant son séjour mais en ramène un objet qui prouvera son voyage.15 Quant à la rencontre avec le nain, ces créatures sont bien connues dans les contes folkloriques ainsi que dans les sagas légendaires où elles portent souvent secours aux hommes, en guise de reconnaissance comme ici ou bien en échange d’un cadeau adressé à l’enfant du nain comme dans la Saga d’Egil le Manchot et d’Asmund Tueur-de-Guerriers-Fauves.16 Rien de surprenant non plus dans les objets magiques, que l’on trouve facilement dans la littérature médiévale et les contes populaires, si ce n’est le dernier cadeau que le nain offre à Thorstein : un caillou capable de jeter du feu et des flammes et de déclencher une tempête de neige. Ce petit objet, qui retourne entre les mains de Thorstein lorsque celui-ci le lance, ressemble au marteau du dieu Thor, doté justement de la qualité de revenir entre les mains de son propriétaire. Comme le rappelle Jacqueline Simpson, Thor règne sur les mouvements atmosphériques, ce qui pourrait expliquer l’association entre le caillou et les phénomènes météorologiques dans la saga.17 La quatrième et la dernière aventure de Thorstein a lieu lorsque le héros, revenu dans l’autre monde, pénètre dans le tertre funéraire de son beau-père et en ressort avec les cornes à boire. Cet événement évoque d’autres récits de violations semblables où un être vivant affronte un occupant décédé mais parfois extrêmement dangereux et malveillant, comme Aran dans la Saga d’Egil le Manchot et d’Asmund Tueur-de-Guerriers-Fauves.18
5La troisième aventure est la plus complexe et s’apparente clairement aux épisodes relatés par l’écrivain, historien et homme politique islandais Snorri Sturluson (1179-1241) ainsi que par l’historien danois Saxo Grammaticus (ca 1160-1208) sans que l’on puisse dire que l’auteur de la saga s’inspire directement de ces sources. Dans l’Edda, Snorri Sturluson relate le voyage du dieu Thor au domaine de Geirrod où le dieu brise le dos des deux filles de Geirrod avant de transpercer le géant lui-même d’un morceau de fer, rougi par le feu.19 La source principale de ce passage chez Snorri semble être le poème obscur Thorsdrapa, « Chant à la louange de Thor », du poète Eilif Gudrunarson qui date de la fin du Xe siècle. Un autre épisode de l’Edda raconte la visite de Thor chez le géant Utgarda-Loki qui soumet ses invités à différentes épreuves.20 Au livre VIII du Gesta Danorum de Saxo Grammaticus, on trouve une version de ce voyage mais ce récit diffère à plusieurs points de vue de ceux de Snorri Sturluson.21 Ici le héros Thorkillus guide un groupe de trois cents Danois jusqu’au royaume de Gudmundus dans le but d’acquérir des trésors.22 Gudmundus les accueille amicalement mais Thorkillus conseille aux Danois de ne manger que la nourriture qu’ils ont apportée eux-mêmes et de ne pas se laisser séduire par les filles de leur hôte Gudmundus au risque de perdre la mémoire et de ne plus pouvoir repartir. Ensuite la compagnie traverse le fleuve qui sépare le royaume de Gudmundus de celui de son frère Geruthus. La demeure de Geruthus est délabrée et fantomatique et les habitants sont tous gelés. Cependant le danger guette les Danois car, en dépit des avertissements de Thorkillus, ils ne peuvent résister aux tentations de l’autre monde : lorsque les voyageurs touchent les trésors présents dans la demeure, les membres de la cour de Geruthus se raniment et attaquent les Danois ; une vingtaine de ces derniers seulement échappera au massacre. En moralisateur, Saxo signale les effets néfastes de l’avidité. À l’occasion d’un autre voyage, non moins périlleux que le premier, Thorkillus rend visite à la divinité Utgarthilocus, attachée dans une caverne empestée. Si l’on trouve ici une allusion au mythe de Loki enchaîné23, il est certain, en ce qui concerne la description de la première destination de Thorkillus, que Saxo a eu connaissance de la Thorsdrapa ainsi que des récits oraux des voyages du dieu Thor, comme celui préservé dans le Dit de Thorstein le Colosse-de-la-Ferme, qui circulaient déjà à son époque.24
6Chez Saxo, le personnage à la fois bienveillant et dangereux de Gudmundus (Godmund/Gudmund de Glaesisvellir dans le dit) est le frère du géant Geruthus (Geirrod). Godmund apparaît dans plusieurs récits légendaires mais son rôle est changeant : amical dans le Dit de Thorstein le Colosse-de-la-Ferme, il est l’ennemi du roi chrétien Olaf Tryggvason dans le Dit de Helgi Fils de Thorir.25 Godmund règne sur un endroit nommé Glaesisvellir (ou Glasisvellir) « Plaines lumineuses/étincelantes/splendides » et, bien que l’image qu’en donne le Dit de Helgi Fils de Thorir ne soit guère rassurante, ce domaine ressemble à un monde surnaturel, à une sorte de Paradis ou bien à l’autre monde tel que ce dernier est décrit dans les récits celtiques.26 Il semble en effet que l’influence celtique sur les récits islandais soit incontestable lorsqu’il est question de l’autre monde27 et, selon Einar Ó. Sveinsson, l’origine de Godmund de Glaesisvellir serait celtique tandis que Geirrod serait issu de la mythologie scandinave.28 Les voyages dans l’autre monde sont courants également dans la tradition celtique, la Navigation de Bran fils de Febal en fournit un bon exemple et montre bien le rôle joué par les femmes qui sont souvent à l’origine du départ d’un humain vers l’autre monde comme dans le Dit de Helgi Fils de Thorir.29 C’est une femme qui invite Bran et ses compagnons à se rendre à la Terre de Promesse où ils croient séjourner pendant trois ans. Au retour, ils découvrent que trois siècles ont passé et, lorsqu’un membre de l’équipage met pied à terre, il est aussitôt réduit en cendres. Jacqueline Simpson a signalé la présence d’autres éléments celtiques dans le Dit de Thorstein le Colosse-de-la-Ferme, notamment en ce qui concerne la corne à boire du roi Geirrod, Grim le Bon. Selon elle, l’auteur du dit, ou l’un de ses prédécesseurs, aurait connu des récits sur la tête coupée de Bran le Béni (du Mabinogi de Branwen) ainsi que sur une corne d’abondance qui lui aurait appartenu. Cette connaissance serait arrivée en Islande avec le roman médiéval européen.30 Mais la tradition celtique a aussi bien pu pénétrer en Islande oralement par exemple avec les esclaves irlandais pendant la période de la colonisation (fin IXe-Xe siècle), avec des colons en provenance des Orcades et des îles Shetland qui auraient pu connaître la tradition celtique, ou simplement au contact des peuples celtiques au cours des siècles. R. Power signale qu’en ce qui concerne le motif du voyage dans l’autre monde, les analogues irlandais se trouvent dans des œuvres écrites en irlandais qui n’ont pas beaucoup circulé. Il faudrait donc plutôt imaginer une transmission orale qu’écrite.31 Bien que l’on puisse aussi évoquer la possibilité d’un héritage commun, il convient sans doute de voir un mélange de traditions dans une scène comme celle qui a lieu dans la halle du roi Geirrod, car certains éléments y sont clairement de source nordique. On pourrait notamment y faire remonter l’importance des cornes à boire à l’occasion de la cérémonie d’allégeance, importance présente dans tout le récit qui se clôt sur une remarque au sujet des cornes offertes par Thorstein au roi Olaf.32
7Le roi Olaf Tryggvason apparaît également dans le Dit de Helgi Fils de Thorir dont la composition est située à la fin du XIIIe siècle ou au début du siècle suivant. Ce court récit partage plusieurs éléments avec le Dit de Thorstein le Colosse-de-la-Ferme bien que l’on ne puisse pas signaler une quelconque relation littéraire entre les deux dits. Il relate l’histoire de Helgi, fils d’un paysan norvégien influent, et de sa rencontre avec Ingibiorg, la fille de Godmund de Glaesisvellir. Cette rencontre semble s’inspirer largement du Lai de Lanval de Marie de France, traduit en norrois avec une collection de lais au XIIIe siècle.33 R. Power estime que l’auteur du dit aurait utilisé le lai, peut-être de mémoire, tout en omettant certains détails et en insérant l’épisode dans un cadre bien connu ailleurs, celui d’un voyage au royaume de l’autre monde.34 Le puissant roi de l’autre monde est ici l’ennemi du roi chrétien Olaf Tryggvason qui, comme dans le Dit de Thorstein le Colosse-de-la-Ferme, se voit offrir deux cornes à boire de provenance surnaturelle qui disparaissent à sa mort.35 Pendant son court règne, qui commença en 995 et se termina avec la bataille de Svold en 1000, Olaf Tryggvason ne réussit pas à convertir tous ses sujets. Néanmoins son influence fut grande en matière de religion non seulement en Norvège mais aussi dans les Orcades, les îles Féroé, en Islande et au Groenland. L’Islande se convertit au christianisme sous son règne, ce qui explique la place accordée à Olaf Tryggvason dans plusieurs textes où le roi christianisateur affronte les représentants du paganisme.36 Les deux dits traduits ici font partie de ces textes : dans le Dit de Helgi Fils de Thorir, c’est grâce aux prières du roi Olaf que Helgi est relâché par la princesse Ingibiorg tandis que les actes du roi païen Godmund et de sa fille sont marqués par la méchanceté et la cruauté. Dans le Dit de Thorstein le Colossede-la-Ferme, où Godmund est amical et tolérant envers la foi de son accompagnateur, c’est grâce à la « bonne fortune » ou à la bénédiction du roi chrétien que Thorstein décide d’affronter le redoutable roi Geirrod et sa cour.
8L’influence du folklore se fait aussi sentir dans le Dit de Helgi Fils de Thorir. On peut par exemple signaler la récurrence du chiffre trois, très fréquent dans la tradition folklorique, dans ce dit : Helgi passe trois nuits avec Ingibiorg, les êtres de l’autre monde interviennent trois fois à l’occasion de la fête de jól (première disparition de Helgi, premier retour de Helgi, deuxième retour de Helgi aveuglé), et ce sont trois hommes (Helgi et les messagers) qui se présentent devant le roi Olaf.37 Stephen A. Mitchell souligne également la popularité, dans les légendes folkloriques norvégiennes, suédoises et islandaises, du motif de l’enlèvement d’un être humain par une créature de l’autre monde.38 Il cite deux récits islandais : « Trunt trunt et les géants dans les montagnes » et « L’Enfant et la femme elfe ».39 Dans ce dernier il est question d’une femme de l’autre monde qui enlève un enfant humain et le garde jusqu’à ce qu’elle soit obligée de le rendre, ce qu’elle fait, non sans défigurer l’enfant. Dans Trunt trunt et les géants dans les montagnes, une femme géante attire un humain par magie et s’en va avec lui. Un an plus tard, l’homme retourne mais n’est guère bavard lorsqu’on lui adresse la parole. À la question « En qui crois-tu ? », il répond toutefois : « Je crois en Dieu. » L’année suivante il revient à nouveau et cette fois-ci il fait peur aux gens, tellement il ressemble à un géant ; il garde le silence lorsqu’on lui pose la même question que l’année précédente. Une année plus tard il revient encore, enlaidi et d’allure gigantesque. Un homme rassemble son courage et lui demande en qui il croit. Il répond : « En trunt trunt et les géants des montagnes », et disparaît une bonne fois pour toutes, évoquant ainsi la fin tragique du Dit de Helgi Fils de Thorir.
9C’est encore un élément du folklore qui ouvre la Saga de Sturlaug l’Industrieux dont la composition est située autour de 1300.40 Comme dans le Dit de Thorstein le Colosse-de-la-Ferme où le jeune Thorstein, dur et inamical, devient populaire et puissant par la suite, nous suivons ici le héros éponyme dès sa jeunesse à la ferme paternelle jusqu’à ce qu’il s’établisse dans son royaume. Sturlaug est décrit comme un beau jeune homme, grand et fort, calme, généreux et bien élevé. Cependant il est un kolbítr, « mord-braises », c’est-à-dire l’équivalent du « cendrillon » qui passe son temps au coin de l’âtre car, au lieu de quitter la maison parentale comme un adulte, il s’y plaît à jouer avec ses compagnons à des jeux d’enfants.41 La nature de la paresse de Sturlaug est soulignée lorsqu’il demande la main d’Asa l’éblouissante qui le refuse en lui reprochant de ne rien faire pour accroître son mérite. Le kolbítr, en revanche, est le plus souvent appelé à devenir un héros accompli, ce qui sera le cas de Sturlaug après l’accueil humiliant d’Asa. Une grande partie de la saga est consacrée à la rivalité des trois prétendants de la jeune fille, le vieux roi Harald, Kol le Redouté et Sturlaug, qui l’épouse après avoir tué Kol. Mécontent de voir son rival épouser celle qui lui était promise, le roi Harald l’envoie chercher une corne d’aurochs qu’il a perdue sans lui dire où elle se trouve.42 Commence ici le récit de la longue et périlleuse quête de Sturlaug, désormais appelé l’industrieux, qui le conduira finalement en Bjarmie, pays mythique où il trouvera la corne, remplie de poison, à l’intérieur d’un temple consacré aux dieux païens Thor, Odin, Frigg et Freyr. Cette dangereuse quête de la corne qui mène Sturlaug et ses compagnons dans l’autre monde semble construite sur le même schéma que le voyage de Thorstein le Colosse-de-la-Ferme au domaine de Geirrod, de Thorkillus auprès du géant Geruthus et du dieu Thor dans les récits mythologiques bien que le dieu, aidé par une géante épouvantable, joue ici le rôle ingrat de l’hôte déterminé à mettre à mort l’intrus. La présence des dieux païens est fréquente dans les sagas légendaires mais, comme le note Margaret Schlauch, l’intérêt que les Islandais pouvaient avoir pour les dieux de leurs ancêtres était d’ordre « antiquaire ».43 L’auteur de la Saga de Sturlaug l’Industrieux précise par ailleurs que Odin était le chef du peuple turc et des hommes d’Asie, faisant preuve d’un évhémérisme que l’on trouve aussi chez Snorri Sturluson et Saxo Grammaticus, sans doute soucieux de mettre en évidence que les dieux du paganisme ne sont pas de vrais dieux. Le reste de la saga est composé d’épisodes qui découlent de la prestation de serments lors d’un banquet de jól où Sturlaug fait le vœu de découvrir la vérité sur l’origine de la corne d’aurochs. À cette occasion son frère juré Framar déclare qu’avant que trois ans ne se soient écoulés il aura embrassé la princesse Ingigerd. Il va sans dire que les deux hommes réussissent dans leurs entreprises.
10Si la fête de jól correspond aujourd’hui à Noël, elle désignait autrefois l’un des temps forts du paganisme scandinave. Elle était à l’origine liée au solstice d’hiver mais probablement associée également à la fertilité.44 Elle donnait lieu à des banquets et à des beuveries qui duraient plusieurs jours et auxquels étaient invitées un grand nombre de personnes. L’une des coutumes associées aux banquets de jól consistait à prêter des serments, parfois en posant simultanément les mains sur les soies d’un verrat.45 Dans le folklore islandais, la période de jól est particulièrement chargée et c’est surtout pendant le sombre mois de décembre que l’on court le risque d’entrer en contact avec les fantômes, les revenants et les habitants de l’autre monde, comme dans le Dit de Helgi Fils de Thorir.46 La période de jól correspond ainsi à Samain, la fête du 1 er novembre – devenue Halloween dans le folklore et la Toussaint dans le calendrier liturgique – dans la tradition celtique qui coïncide non seulement avec le début de la saison sombre mais aussi avec l’ouverture des portes de l’autre monde.47 Depuis le XIIIe siècle, l’épouvantable géante Gryla, déjà citée parmi les géantes dans l’Edda de Snorri Sturluson mais devenue par la suite une terrible dévoreuse d’enfants et mère des « Pères Noël » islandais, est associée à cette période. Pour les géants de la Saga d’Egil le Manchot et d’Asmund Tueur-de-Guerriers-Fauves, qui enlèvent la princesse Bekkhild le jour de jól, cette période est également propice aux événements importants car ils la choisissent pour célébrer leurs mariages.48 Cette saga, qui date du XIVe siècle, met en scène les frères jurés Egil et Asmund partis à la recherche de deux princesses enlevées après que le père de celles-ci a promis de les donner en mariage à quiconque les trouvera.49 La technique narrative de l’entrelacement – très habilement mise en place par l’auteur – permet de lier le destin des deux protagonistes Egil et Asmund à celui de la géante Arinnefia qui les accueille dans sa grotte où Arinnefia et ses invités, pour tuer le temps, se racontent leur vie autour du chaudron de la géante. La Saga d’Egil le Manchot et d’Asmund Tueur-de-Guerriers-Fauves repose ainsi sur deux cadres qui se confondent : la quête des princesses enlevées et le « tour de table » chez Arinnefia. On apprend ici les exploits et les aventures des frères jurés antérieurs à leur rencontre, Asmund fournissant l’image du héros traditionnel, normal, tandis qu’Egil ressemble plus à un kolbítr.50 Asmund fait d’abord le récit de sa rencontre avec Aran, où il convient sans doute de voir la traduction du nom Arawn, porté par le roi d’Annwyn dans le Mabinogi de Pwyll, prince de Dyved.51 Cette rencontre, ainsi que le serment prononcé par les deux hommes, présente quelques ressemblances avec celui de Pwyll et d’Arawn dans le mabinogi, qui pourrait être la source de cet épisode.52 Après la mort d’Aran, Asmund est fait prisonnier par deux guerriers-fauves qui réclament la souveraineté du pays d’Aran dont la moitié appartient désormais à Asmund.53 Prêts à le sacrifier à Odin en remerciement de leur victoire, les deux guerriers-fauves seront tués par Asmund qui obtient ainsi son sobriquet. À son tour, Egil narre ses aventures et, en premier lieu, son service auprès d’un géant qu’il finit par aveugler pour retrouver la liberté. Cet épisode évoque la rencontre d’Ulysse avec le cyclope Polyphème, récit bien connu en Islande du Moyen Âge.54 Devenu chef d’une troupe de vikings, Egil intervient dans le combat d’un géant et d’une géante, malmenée par son adversaire. Grâce à Egil, elle réussit à s’échapper mais Egil y laisse la main, d’où son sobriquet. Souffrant, il gagne la bienveillance d’un nain en offrant un anneau d’or à son enfant ; en guise de reconnaissance le nain guérit le moignon et forge une épée permettant à Egil de se battre comme auparavant. Les nains sont de célèbres forgerons dans la mythologie et le folklore et l’on en trouve de nombreux exemples dans les sagas.55 La façon dont Egil gagne l’amitié du nain a également des parallèles dans les sagas légendaires et dans les contes populaires. Un exemple se trouve dans un conte intitulé « L’histoire de Sigurd, Hring et du chien Snati ».56 Une nuit où le héros Sigurd ne dort pas, il vient à terre et marche jusqu’à ce qu’il arrive devant un ruisseau. Assis dans l’herbe, il voit une petite fille venue chercher de l’eau dans un seau. Sigurd enlève un anneau d’or de son doigt et le laisse tomber dans le ruisseau en sorte que l’anneau est emporté jusque dans le seau de l’enfant qui s’en réjouit vivement. La fille rentre aussitôt et, peu de temps après, un nain se présente devant Sigurd, le remercie pour son enfant et lui offre son soutien.
11Si le parcours des frères jurés Egil et Asmund est essentiellement victorieux, le récit de la géante – narré à la première personne – est fortement teint d’un érotisme grotesque dont elle sera victime plus d’une fois. On trouve ici la même frénésie du désir que chez Hornnefia dans la Saga de Sturlaug l’Industrieux, mais, tandis que cette dernière le paye de sa vie, c’est en vraie héroïne que la géante Arinnefia réussira l’expédition périlleuse vers le monde souterrain qui lui est imposée pour avoir tenté de tuer l’épouse de l’homme qu’elle désire. Magicienne et guérisseuse, elle permettra ensuite aux frères jurés de mener à bien leur quête. Les géants et notamment les géantes jouent un rôle important dans les quatre récits présentés ici. Bien que ces habitants de l’autre monde, figures du paganisme censées incarner le mal, aient souvent des soucis et des occupations proches des nôtres, les auteurs tendent à souligner leur taille ainsi que leur monstruosité. Le déguisement caricatural de Hrolf au-Gros-Nez, pourtant admiré par la géante Hornnefia, est destiné à rappeler cette différence ainsi qu’à ridiculiser la géante et son amour. Les géantes sont en effet particulièrement maltraitées dans les sagas légendaires où elles sont souvent décrites de façon grotesque et vulgaire, comme dans la Saga d’Egil le Manchot et d’Asmund Tueur-de-Guerriers-Fauves qui met en scène un combat féroce entre Arinnefia et trois femmes, sans doute plus géantes encore puisque Arinnefia est comme un enfant à côté d’elles. D’après Helga Kress, l’image agressive et répugnante de la géante symboliserait la peur de l’homme face à un pouvoir féminin plus fort que le sien.57 On a vu que parmi les géantes se trouvent cependant des personnages sympathiques : la fille du comte Agdi est moitié géante, ce qui n’empêche pas Thorstein le Colossede-la-Ferme de l’épouser, les trois sœurs géantes, Torfa, Hild et Hornnefia ont des échanges honnêtes avec Sturlaug l’Industrieux et ses compagnons tandis que la géante Arinnefia se montrera extrêmement reconnaissante envers Egil le Manchot et d’un grand secours pour lui et son frère juré dans leur expédition aux Iotunheimar, « le pays des géants ». Arinnefia évoque ainsi Vefreyia, la vieille nourrice d’Asa l’Éblouissante, qui protège et guide Sturlaug dans ses quêtes et combats. On remarque en effet que le pouvoir féminin, représenté par des géantes redoutables et une vieille sorcière, apparaît comme l’équivalent de la protection ou la « bonne fortune » du roi chrétien Olaf Tryggvason dont jouissent Thorstein le Colosse-de-la-Ferme et Helgi fils de Thorir.
12Marqués par le folklore et le fantastique, amusants et anecdotiques, les sagas et les dits légendaires connurent un grand succès auprès du public médiéval. En témoigne non seulement le grand nombre de manuscrits dans lesquels ces textes sont conservés mais aussi les rímur, genre réservé à l’Islande et qui correspond à une narration versifiée, le terme ríma (de rím) étant sans doute emprunté à l’ancien français rime. Ce genre nouveau, encore vivant au XXe siècle, remonte à la seconde moitié du XIVe siècle. Il permit un véritable renouveau dans la production littéraire en Islande qui ne disposait pas auparavant d’une forme narrative versifiée qui convienne à une longue narration. Ce sont non seulement des œuvres comme la Chanson de Roland, traduite en prose au XIIIe siècle, qui furent une source d’inspiration pour les poètes mais aussi, et surtout, les sagas de chevaliers et les sagas légendaires qui sont à l’origine de plusieurs des plus anciennes rímur, composées entre le XIVe et le XVIe siècles. La Saga de Sturlaug l’Industrieux et la Saga d’Egil le Manchot et d’Asmund Tueur-de-Guerriers-Fauves ont toutes les deux inspiré des poètes qui ont composé les Sturlaugsrímur, les « rímur de Sturlaug » et Egils rímur einhenda, les « rímur d’Egil le Manchot ». Si le choix des poètes reflète la popularité de ces récits, nous ne pouvons qu’espérer que le lecteur francophone y trouvera le même agrément que le public islandais depuis des siècles.58
Notes de bas de page
1 Le « dit » (þáttr) renvoie à une narration brève, centrée autour d’un personnage. Les « dits » peuvent constituer un genre à part mais parfois il s’agit simplement d’une version courte d’un autre genre, ce qui est le cas pour les deux « dits » présentés ici, le Dit de Helgi Fils de Thorir et le Dit de Thorstein le Colosse-de-la-Ferme C’est la raison pour laquelle nous avons retenu le terme de « sagas » qui est familier au lecteur français dans le titre de l’ouvrage bien que deux des textes soient des « dits ». Sur les « dits », voir R. Boyer, Les Sagas miniatures (Þættir), p. 9-22. Les textes ainsi que les ouvrages et les articles critiques qui figurent en bibliographie ne seront pas entièrement référencés.
2 On regroupe sous le terme de sagas islandaises les catégories suivantes (voir la sélection bibliographique) : les sagas royales (konungasögur) qui retracent la vie d’un roi ou d’un jarl, les sagas des Islandais (Íslendingasögur) qui se déroulent généralement entre 930 et 1050 et dont les héros sont souvent des colonisateurs importants ou leurs descendants, les sagas de contemporains (samtíðarsögur) censées être écrites par des auteurs contemporains des événements relatés, les sagas légendaires (fornaldarsögur Norðurlanda), et les sagas de chevaliers (riddarasögur), fortement inspirées par le roman chevaleresque. Pour une bonne présentation des sagas islandaises, voir R. Boyer, Les Sagas islandaises Pour une présentation sommaire des sagas légendaires, voir E. Ó. Sveinsson, « Fornaldarsögur Norðrlanda » et S. E. Mitchell, « Fornaldarsögur ». Une bonne présentation du genre se trouve également dans Íslensk bókmenntasaga, II, p. 167-245, Boyer, Deux Sagas légendaires islandaises et Les Sagas légendaires.
3 Sur le monde mythique de la fiction légendaire, voir H. Pálsson, P. Edwards, Legendary Fiction in Medieval Iceland, p. 26-35.
4 On distingue les sagas de chevaliers (riddarasögur) traduites des sagas de chevaliers composées en Islande sous l’influence des premières.
5 Voir par exemple R. Righter-Gould, « The Fornaldar Sögur Norðurlanda. A Structural Analysis ».
6 S. A. Mitchell, Heroic Sagas and Ballads, p. 130.
7 S. A. Mitchell, Heroic Sagas and Ballads, p. 128-130, P. Hallberg, Den isländska saga, p. 131.
8 « [...] in the vision of the past lay also a vision of the future and a justification for the present », S. A. Mitchell, Heroic Sagas and Ballads, p. 135.
9 R. Boyer, Les Sagas légendaires, p. 262-263.
10 T. H. Tulinius, La « Matière du Nord ». Cette étude ne porte pas sur les textes traduits ici.
11 T. H. Tulinius, La « Matière du Nord », p. 168.
12 Voir, en outre, la liste des thèmes principaux que l’on trouve dans les sagas légendaires établie par R. Boyer dans son ouvrage, Les Sagas légendaires, p. 111-245.
13 Sur les voyages dans l’autre monde dans les sagas légendaires, voir M. Ciclamini, « Journeys to the Giant-Kingdom » et R. Power, « Journeys to the Otherworld in the Icelandic Fornaldarsögur ».
14 Voir J. Simpson, « Otherworld Adventures in an Icelandic Saga », p. 2-4. Pour plus de détails sur le Dit de Thorstein le Colosse-de-la-Ferme nous renvoyons le lecteur à cet article qui est une étude des quatre aventures.
15 Voir R. Power, « Journeys to the Otherworld in the Icelandic Fornaldarsögur », p. 169. Elle cite l’exemple de « Hildur álfadrottning » ; voir Íslenzkar þjóðsögur og ævintỳri, safnað hefur Jón Árnason, Reykjavik, 1956, vol. I, p. 105-109.
16 Voir plus bas.
17 J. Simpson, « Otherworld Adventures in an Icelandic Saga », p. 7-8. On notera que le prénom du héros est un nom composé de Thor-et de-stein (steinn) « pierre ».
18 Voir le chapitre 7 de cette saga. Pour d’autres exemples, voir M. Schlauch, Romance in Iceland, p. 140-143.
19 S. Sturluson, L’Edda, p. 115-117.
20 S. Sturluson, L’Edda, p. 81-87.
21 Les neuf premiers livres de la Geste des Danois sont consacrés au passé légendaire et mythique du Danemark. Saxo reconnaît sa dette envers les historiographes islandais ; voir surtout les livres V, VI et VIII de son ouvrage pour une comparaison avec les récits islandais.
22 On retrouve le nom du dieu Thor dans le premier élément du nom Thorkillus.
23 L’Edda, p. 94.
24 Voir R. Power, « Journeys to the Otherworld in the Icelandic Fornaldarsögur », p. 163-166.
25 Voir par exemple R. Boyer, Les Sagas légendaires, p. 231-234. Sur Godmund de Glaesisvellir, voir aussi E. O. G. Turville-Petre, Myth and Religion of the North, p. 32, 80.
26 . Voir H. R. Ellis Davidson, « Gudmund of Glasisvellir : Did he Originate in Ireland ? », p. 15.
27 Voir G. Sigurðsson, Gaelic Influence in Iceland, p. 56-60.
28 . E. Ó. Sveinsson, « Celtic Elements in Icelandic Tradition ».
29 « La Navigation de Bran fils de Febal », traduit par C. -J. Guyonvarc’h, Ogam, n° 9, 1957, p. 304-309.
30 J. Simpson, « Otherworld Adventures in an Icelandic Saga », p. 18-19 ; voir aussi du même auteur, « Mímir : two myths or one ? », Saga-Book of the Viking Society, n° 16, 1962-1965, p. 41-53, et surtout « Grim the Good, a Magical Drinking-Horn ».
31 R. Power, « Journeys to the Otherworld in the Icelandic Fornaldarsögur », p. 167.
32 Sur le rite qui consiste à vider une corne à boire après avoir prêté un serment, voir M. Cahen, Études sur le vocabulaire religieux du vieux scandinave. La libation, Paris, Champion, 1921 ; G. Dumézil, Le Roman des jumeaux et autres essais, 25 esquisses de mythologie (76-100) publiées par Joël H. Grisward, préface de Joël H. Grisward, Paris, Gallimard, 1994, p. 311-316 ; Á. R. Magnúsdóttir, La Voix du cor. La relique de Roncevaux et l’origine d’un motif dans la littérature du Moyen Âge (XIIe-XIVe s.), Amsterdam, Atlanta, Rodopi, 1998, p. 291-297.
33 Strengleikar, an old Norse translation of twenty-one old French lais, edited from the manuscript Uppsala De la Gardie 4-7, AM 666 b 4to for Kjeldeskriftfondet by Robert Cook and Mattias Tveitane, Oslo, Norsk historisk kjeldeskrift-institutt, coll. Norrøne tekster n° 3, 1979.
34 Sur les nombreux parallèles dans les deux textes, voir R. Power, « Le Lai de Lanval and Helga þáttr Þórissonar ».
35 D’après J. Simpson, une légende attribuant des cornes à boire surnaturelles au roi Olaf aurait existé selon laquelle la vie et la chance du roi auraient dépendu de ces cornes ; J. Simpson, « Otherworld Adventures in an Icelandic Saga », p. 20.
36 J. Simpson, « Olaf Tryggvason versus the Powers of Darkness ».
37 Voir S. A. Mitchell, Heroic Sagas and Ballads, p. 53-54.
38 S. A. Mitchell, Heroic Sagas and Ballads, p. 50-53.
39 ML 5089* « Release from Fairyland ». Dans le deuxième cas, il s’agit probablement du conte type ML 5095 « Fairy woman pursues man ». Régis Boyer a traduit « Trunt trunt et les géants dans les montagnes » en français dans son recueil Contes populaires d’Islande, Reykjavik, Iceland Review, 1983, p. 38.
40 Deux versions de la Saga de Sturlaug l’Industrieux nous sont parvenues. Nous avons choisi la plus vieille, A, dont le plus ancien manuscrit date d’environ 1400. Le plus ancien manuscrit de la version B remonte à la seconde moitié du XVIIe siècle.
41 Voir R. Boyer, Les Sagas légendaires, p. 115-117.
42 Une corne à boire figure parmi les objets que le jeune Kulhwch doit obtenir avant de pouvoir épouser Olwen, fille d’Yspaddaden Chef des Géants dans le récit gallois Kulhwch et Olwen, dans Les Quatre Branches du Mabinogi et autres contes gallois du Moyen Âge, traduit du moyen gallois, présenté et annoté par Pierre-Yves Lambert, Paris, Gallimard, coll. L’aube des peuples, 1993, p. 144.
43 M. Schlauch, Romance in Iceland, p. 18-41, ici p. 18 (« but that interest was already an antiquarian one »).
44 Á. Björnsson, « Jól », Saga daganna, Reykjavik, Mál og menning, 1993, p. 314-392.
45 Il s’agit d’une coutume attestée dans quelques textes, voir M. Cahen, Études sur le vocabulaire religieux du vieux scandinave. La libation, p. 174, et H. Beck, Das Ebersignum im Germanischen. Ein Beitrag zur germanischen Tier-Symbolik, Berlin, Walter de Gruyter, 1965, p. 177-182.
46 Voir par exemple la Saga de Grettir (chap. 32-33), et la Saga de Snorri le Godi (chap. 54), dans Sagas islandaises.
47 Sur la fête de Samain voir F. Le Roux, Ch. -J. Guyonvarc’h, Les Fêtes celtiques, Rennes, Ouest-France, p. 35-82.
48 Sur cette saga, voir l’édition d’A. Lagerholm, Drei Lygisoĝur, « Einleitung », xviii-li.
49 La Saga des frères jurés (chap. 2) et la Saga de Gisli Sursson (chap. 6) décrivent les rites d’institution de fraternité jurée (fóstbræðralag) : les participants mêlaient leur sang avant de passer sous un collier de terre (jarðarmen), symbolisant une sorte de retour à la terre mère suivi d’une seconde naissance, voir Sagas islandaises, p. 1713-1714, R. Boyer, Les Sagas légendaires, p. 137-139. L’enlèvement d’une jeune fille est un motif bien connu dans les contes (AT 310).
50 Íslensk bókmenntasaga, p. 226-228.
51 Traduction de P. -Y. Lambert dans Les Quatre Branches du Mabinogi et autres contes gallois du Moyen Âge, p. 31-56.
52 Voir N. K. Chadwick, « Literary Tradition in the Old Norse and Celtic World », p. 175-176.
53 Nous traduisons par « guerrier-fauve » le terme berserkr qui pourrait signifier « un homme qui porte une chemise (serkr) d’ours (ber-) ». Ce terme désigne un guerrier ou un champion capable d’entrer dans un état de fureur lors des combats, ce qui en fait un adversaire particulièrement redoutable. Pour une courte présentation des guerriers-fauves, voir R. Boyer, Les Sagas légendaires, p. 133-137.
54 L’Odyssée I, 71 et suiv., IX, 187 et suiv. Voir par exemple D. Fry, « Polyphemus in Iceland » ; H. -P. Naumann, « Das Polyphem-Abenteuer in der altnordischen Sagaliteratur ». Cet épisode correspond au conte type AT 327a.
55 I. Boberg, Motif-Index of Early Icelandic Literature, F 451.3.4.2.
56 Íslenzkar þjóðsögur og ævintýri, vol. IV, p. 504-512. Voir aussi Drei Lygisągur, p. xxxv-xxxvii.
57 H. Kress, Máttugar meyjar. Íslensk fornbókmenntasaga, Reykjavik, Háskólaútgáfan, 1993, voir surtout p. 119-135.
58 Le Fonds scientifique du Conseil islandais de la recherche, RANNÍS, a soutenu la traduction de ces récits.
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