Présentation
p. 7-9
Texte intégral
1On connaît bien Machiavel pour ses écrits politiques et historiques, le grand Machiavel du Prince, des Discours, de l’Art de la guerre et de l’Histoire de Florence. On le connaît beaucoup moins pour ses écrits littéraires. La comédie La Mandragore fait certes aujourd’hui partie du répertoire classique des chefs-d’œuvre du théâtre italien, mais ses autres écrits, mineurs, occasionnels ou d’inspiration esthétique sont souvent ignorés. Ils offrent pourtant une continuité d’inspiration et de formes expressives qui complète et confirme le portrait du Machiavel que l’on connaît mieux. Ils relèvent eux aussi d’une production littéraire grave répondant à une vocation de sérieux, ils sont eux aussi caractérisés par la profondeur de l’engagement, par le regard lucide sur les hommes et par l’amour de la patrie.
2Ces pièces en effet, pourtant passablement disparates, ne sont guère de simples distractions sans profondeur. Loin de tout détachement humaniste, elles ne sont pas nées dans l’oisiveté d’une tour d’ivoire, elles ne relèvent pas d’une littérature rêveuse, utopiste ou désengagée, destinée à oublier le moment présent. Bien au contraire le présent est toujours là, à l’affût et prêt à surgir à travers quelque trait bien senti, ou sous-jacent dans une souriante critique implicite qui ne peut donner à la passion qu’une patine de dilettantisme.
3C’est d’une propension naturelle vers le genre comique que naissent les meilleurs de ces écrits. Proche des comédies, la nouvelle de L’Archidiable Belphégor par exemple, unique témoignage écrit du Machiavel narrateur, à qui l’on donnait volontiers la parole en société pour divertir l’assistance, développe une critique pédagogique à travers une vision lucide des hommes et une satire de mœurs. Au centre de ce récit d’origine populaire, et suivant la tradition des relations tourmentées entre homme et femme du Décaméron de Boccace, la cité florentine est représentée au fil d’une réalité dilatée dans le temps, mais parfaitement reconnaissable à travers le tableau vivant des activités, des coutumes et des mœurs de ses habitants. Elle offre le tableau d’une vie citadine comiquement expérimentée par un spécimen de démon venu à Florence depuis les enfers, et qui ouvre son horizon sur le monde et le genre humain tout entier, décidément pas fait pour un pauvre diable.
4L’attachement profond de Machiavel pour sa patrie Florence informe la plupart de ses œuvres. Même quand, écarté des lieux du pouvoir, il était désespérément à la recherche d’un emploi pour satisfaire une grande volonté de servir, Machiavel a néanmoins par deux fois refusé un poste de secrétaire qui lui était offert par l’intermédiaire de son ancien maître Piero Soderini, d’abord comme secrétaire de chancellerie au service de la république dalmate de Raguse, puis au service du condottiere Prospero Colonna. C’est essentiellement sa ville Florence et le monde florentin qui est l’objet de toutes ses attentions, de ses attentes, de ses passions, en vertu de ce patriotisme municipal traditionnel dans la culture italienne depuis le Moyen Âge. Aussi la célèbre pensée sur l’histoire et sur la politique de son temps, ainsi que le rêve d’italianité, ne peuvent-ils se développer qu’à partir du profond sentiment de florentinité et de la méditation sur la petite histoire municipale de sa cité, un État qui depuis près de quatre siècles se veut riche, puissant et brillant.
5Les démonstrations d’une telle affection ne manquent pas dans cette œuvre : le simple opuscule historique passablement romancé sur La Vie et les exploits du condottiere de Lucques Castruccio Castracani pourrait bien avoir pour visée l’information, ou l’éducation militaire, sinon la mise en garde des Florentins. Quant au Discours sur la langue, qui défend contre le purisme linguistique la capacité idiomatique du florentin parlé, liée à l’essence de la comédie et du comique théâtral, il a comme motivation profonde cet attachement à la cité, à son histoire et à sa langue, au point que Machiavel peut agresser et mettre à genoux son illustre prédécesseur Dante avec virulence sur ce sujet, et lui reprocher âprement de n’avoir pas subi sans broncher les offenses autrefois reçues de sa ville, Florence.
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