I
p. 103-105
Texte intégral
1Icare. Maître Manole construisit l’église du monastère de Curtea de Argeş ; elle était si belle que le prince Negru Vodă craignit qu’il en construisît une seconde plus belle pour un autre prince. Il fit enlever les échafaudages, laissant maître et maçons sur le toit afin qu’ils y meurent. Manole* et les siens se firent des ailes de bois pour s’enfuir, mais leur vol fut malheureux : ils tombèrent dans un fleuve proche, sur des espaliers de vigne ou à côté de l’église où Manole se transforma en une fontaine curative et ses hommes en pierres.
2Ignace, saint (Sf Ignat). On le fête le 20 décembre, en même temps que l’abattage des porcs. Les femmes respectent ce jour afin de ne pas mettre au monde des enfants hideux. Ignace qui était pauvre, allait au marché annuel peu avant Noël, afin d’acheter un cochon pour sa nombreuse famille. En chemin, il rencontra un seigneur avec neuf porcs, qui lui en offrit un à une condition : il viendrait, trois nuits plus tard, lui poser plusieurs questions ; si Ignace pouvait y répondre, il conserverait le cochon, sinon, il le payerait avec l’« inconnu » de sa maison. Ignace pensa que c’était bien peu de chose et accepta le contrat. À ce moment, sa femme accoucha d'un nouvel enfant et Ignace comprit que c’était l’inconnu. Au soir du troisième jour. Dieu et saint Pierre vinrent demander l’hospitalité à Ignace. La nuit survint le diable qui posa ses questions, mais c’est Dieu qui fournit les bonnes réponses, et le diable périt de rage.
3Ileana Cosânzeana. C’est le prototype de la beauté féminine, la plus belle des fées : ses yeux sont semblables au soleil, son corps à la mer, ses vêtements aux fleurs. La fleur de ses cheveux chante si bien que sept royaumes entendent son chant, et de sa bouche tombent des perles et de l’or. Ileana Cosânzeana donne aux fleurs leur parfum mais peut le leur reprendre. Elle est la reine des fleurs et celle des plus belles vaches à lait. Elle ne se montre aux hommes qu’une fois l’an, à la Saint-Jean.
On raconte que le vent s’éprit d’elle, mais que son rival l’enleva ; ou encore que son frère l’aimait, et que pour éviter l’inceste, elle se mutila ou plongea dans la mer, devenant poisson puis lune. Parfois, un enfant pleure dans le sein de sa mère et ne s’apaise que lorsqu’on lui promet Ileana pour femme. Quelquefois, elle ôte un anneau du doigt d’un jeune homme endormi qui part à sa recherche puis l’épouse. Ce mariage est le but suprême de bien des héros des contes.
Ileana est aussi présentée comme une jeune femme qui n'épouse que celui qui la bat, c’est-à-dire se montre plus fort qu’elle – ce qui rappelle la légende de Brynhild –, ou bien qui se cache si bien qu’elle ne le peut trouver. Un méchant empereur la veut pour femme, elle accepte sa demande à condition qu’il lui prépare un bain au lait de juments sauvages ; le serviteur de l’empereur réussit à les traire et le bain est prêt. Le souverain y entre le premier, mais le cheval du serviteur souffle de l’air chaud sur le lait qui se met à bouillir et le tue. Alors, le cheval souffle un air agréablement tiède et Ileana se baigne avec le serviteur qu’elle épouse.
Ileana est parfois la souveraine guerrière du Pays des Femmes. D’autres fois, elle enlève les fonts baptismaux du Jourdain* au moment où son gardien, un ermite, s’assoupit. Il maudit le voleur à être femme s’il est homme, et inversement. C’est ainsi que Ileana change de sexe et peut être empereur.
4Ilie Pălie. C’est le cocher de saint Élie. On le fête le 21 juillet pour se protéger de la chaleur, de la grêle et des incendies de forêt.
5Inhumation dans l’air (Înmormântarea suspendată). Les variantes transylvaniennes du chant profane de Noël (Agnelle voyante*) renferment le motif de l’inhumation dans l’air. Le berger menacé d’une mort violente demande qu’on n’enterre pas son corps sous terre dans le cimetière, mais qu’on le laisse dans sa bergerie, enveloppé d’une peau de mouton, afin qu'il puisse continuer à entendre ses bêtes et ses chiens. Un autre chant de Noël répandu en Moldavie méridionale, décrit l’inhumation d’une nonne dans un berceau accroché à un sycomore*. Ce rite préchrétien a des échos en Eurasie du Nord, dans le Caucase, en Lycie, en Inde, en Indonésie, en Australie, en Amérique du Nord et du Sud. Les Romains semblent avoir pratiqué l’inhumation d’animaux dans les arbres. Une pensée sous-tend ce rite : les morts peuvent ainsi être rappelés à la vie.
6Invulnérable (Invulnerabilul). Georges le Vaillant se baigne dans le sang d’un scorpion qui rend invulnérable, mais une feuille d'arbre colle à son corps qui reste vulnérable à cet endroit. On reconnaît là le thème de la légende de Siegfried : le héros se baigne dans le sang de Fafnir, mais une feuille de tilleul tombe entre ses épaules, et c’est là que Hagen plantera son épieu. Le Haidouk Pintea* le Brave n’était vulnérable que sous le bras dit-on.
7Iorgovan. C’est le nom d’un jeune homme courageux dont le cheval pouvait bondir d’un mont à l’autre. Il poursuivit, au-delà du Cerna ou du Danube, et tua un dragon qui dévorait un homme chaque jour. Il cacha sa tête dans un trou de la rive, et il en sort chaque année les Mouches goloumbaques* qui, par leurs piqûres, tuent les animaux domestiques. On raconte aussi qu’il aimait passionnément sa sœur et, pour éviter un inceste, il fut pétrifié, ou qu’ils se noyèrent tous les deux (voir aussi Hercule*).
8Iov. C’est, ou l’un des sept sages que Dieu avait placés sur terre, ou encore un empereur marié, père de deux enfants. Il souhaitait être heureux dans sa vieillesse plutôt que dans sa jeunesse. Ses bêtes moururent et son corps se couvrit de pustules. Sa femme le déposa sur le fumier et se divertit chez elle avec des diables. L’un voulut l’épouser, mais Iov lui recommanda de se signer et les diables disparurent. Dès lors, elle œuvra à la guérison de son mari. Puis Iov voulut gagner la Turquie avec sa famille, mais en traversant un fleuve, un Turc ravit sa femme tandis qu’un loup et un poisson mangèrent ses deux enfants. En Turquie, il fut élu empereur d’une merveilleuse façon. Il donna un bal auquel il invita bien des gens y compris le ravisseur de son épouse. Il le démasqua. Un chasseur et un pêcheur lui ramenèrent ses enfants indemnes, et la famille se retrouva dans le bonheur.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
L’enfant-dieu et le poète
Culte et poétiques de l'enfance dans le roman italien du XXe siècle
Gilbert Bosetti
1997
Montagnes imaginées, montagnes représentées
Nouveaux discours sur la montagne, de l'Europe au Japon
André Siganos et Simone Vierne (dir.)
2000
Petit dictionnaire de mythologie populaire roumaine
Ion Taloș Anneliese Lecouteux et Claude Lecouteux (trad.)
2002
Le Sphinx et l’Abîme
Sphinx maritimes et énigmes romanesques dans Moby Dick et Les Travailleurs de la mer
Lise Revol-Marzouk
2008
Babel : ordre ou chaos ?
Nouveaux enjeux du mythe dans les œuvres de la Modernité littéraire
Sylvie Parizet
2010