10. « Toutes les îles sont secrètes... »
p. 223-240
Texte intégral
1Cadaqués peut être une île, aussi bien que celle des Lotophages, dont ont rêvé Baudelaire et Tennyson, que Michel Tournier a associée à Djerba, dans Les Météores. Le petit livre de Joachim du Bellay fut son Ithaque, et la Membrolle d’Emmanuel Chabrier son « Ile heureuse ». Je pense encore une fois au moulin d’Alphonse Daudet, aussi à cette « grande fabrique » où est né le petit Chose, dans une ville du Languedoc, avec les ateliers de foulards seulement séparés de la maison familiale par un vaste jardin. C’était une île pour l’enfant que ce paradis trop tôt perdu à la suite de la ruine des parents. Avant d’être appelé « Chose », dans un méchant collège de Lyon, par un professeur méprisant, Daniel Eyssette s’était donné lui-même un autre nom, une autre identité. Il était Robinson, « master Crusoé lui-même », tandis qu’il faisait de Rouget, le fils du concierge, Vendredi.
La fabrique n’était plus la fabrique, c’était mon île déserte, oh ! bien déserte. Les bassins jouaient le rôle d’Océan. Le jardin faisait une forêt vierge. Il y avait dans les platanes un tas de cigales qui étaient de la pièce et qui ne le savaient pas.1
2Relisant le roman de Daniel Defoe, il le met en scène, il en fait du théâtre. Mais la robinsonnade est aussi pour lui une manière d’explorer son domaine, de chercher le secret d’une île au trésor,2 de défendre son île contre les intrus – ces étrangers auxquels on vendra la fabrique – en se cachant derrière un bouquet de lauriers-roses. Car le secret le plus important n’est pas celui d’une île, mais celui de son habitant. Il reste, lui, inaliénable. Le nouveau Robinson emportera ce secret avec lui et, s’il consent à le révéler un jour, ce sera dans un livre. « Robinson ! Robinson ! », criera pendant l’exode le perroquet jusque-là muet. Le Petit Chose ouvre la cage du secret.
3Du 25 février 1997 au 5 janvier 1998 l’exposition « îles, vivre entre ciel et mer » a été organisée à Paris par le Muséum national d’histoire naturelle, à la Grande Galerie de l’évolution du Jardin des plantes. « Les îles... », écrit Henry de Lumley, le directeur du Muséum, « il y a celles dont on rêve, et celles où l’on vit, celles d’où l’on s’évade et celles où l’on s’enferme. Grandes, petites, continentales et volcaniques, les îles ont toutes en commun d’être isolées des autres terres par la mer. C’est cet isolement qui favorise la singularité de ceux qui y vivent ».3
4Ceux qui n’y vivent pas peuvent-ils avoir accès à leur secret ? Le Bateau ivre d’Arthur Rimbaud, qui se sent lui-même « presque île », a vu des « archipels sidéraux » et « des îles / Dont les cieux délirants sont ouverts au vogueur ». Brillent-elles dans la mer ou dans le ciel ? S’agit-il toujours d’îles, ou déjà d’étoiles, – des étoiles qu’elles ont pu devenir, par une métamorphose fabuleuse que le bateau ne connaîtra pas ? La rencontre du Bateau ivre avec les îles, quelles qu’elles soient, conduit à une question qui touche au secret de la Force, le secret de la vie et du monde :
Est-ce en ces nuits sans fond que tu dors et t’exiles,
Million d’oiseaux d’or, ô future Vigueur ?4
5L’Isle joyeuse de Claude Debussy, toute pleine d’un séjour heureux et amoureux à Jersey, trouve son contraire en une Île des morts peinte par Arnold Bocklin et évoquée dans un poème symphonique par Serge Rachmaninov. Cythère peut se révéler Cérigo, et dans les prétendues Encantadas Herman Melville, après un séjour dans l’archipel des Galapagos à la fin de 1841 et au début de 1842, a vu des terres désolées et inquiétantes, marquées par la colère de Dieu. Les chemins n’y conduisent que vers des tombeaux :
Pendant des années, sur l’île de James, on trouvait un panneau indicateur sommaire dirigé vers l’intérieur des terres. Un étranger, qui y verrait la promesse d’une hospitalité éventuelle en ce lieu, par ailleurs désolé, – quelque bon ermite demeurant là avec son plat de bois d’érable-, et qui emprunterait le sentier indiqué, se retrouverait dans un recoin silencieux où il ne serait accueilli que par un mort, et pour seul signe de bienvenue une inscription sur une tombe : « Ici, en 1813, un lieutenant de la frégate américaine Essex, âgé de vingt-et-un ans, a trouvé la mort, lors d’un duel à l’aube : il a atteint sa majorité dans la mort ».5
6L’île porte en elle le secret d’une mort (ainsi l’île W de Perec, flétrie par la marque d’Auschwitz, renvoie à la disparition de la mère déportée). La vie, le tourbillon de Cythère, la joie de L’Isle joyeuse de Debussy, le bonheur de L’Île heureuse de Chabrier contiennent aussi leur propre secret. Car on peut imaginer la Parque comme une vieille, une sinistre Atropos, armée de ses ciseaux implacables. On peut aussi susciter, comme l’a fait Paul Valéry, une Jeune Parque lumineuse, « vermeille à de nouveaux désirs », même si elle est rongée par le secret de la conscience et de la nuit.
7Valéry avait envisagé quelque temps d’appeler son poème Île, et le lieu où s’éveille la Parque pourrait se confondre avec une île de la Méditerranée, dans l’un ou l’autre des archipels grecs. Mais la précision géographique disparaît au profit d’une invocation aux îles, lumineuses, vermeilles elles aussi, humaines et divines à la fois, comme la Parque, et rejoignant pourtant, dans les profondeurs glacées, le secret de la mort :
Salut ! Divinités par la rose et le sel,
Et les premiers jouets de la jeune lumière,
Iles !... Ruches bientôt, quand la flamme première
Fera que votre roche, îles que je prédis,
Ressente en rougissant de puissants paradis ;
Cimes qu’un feu féconde à peine intimidées,
Bois qui bourdonnerez de bêtes et d’idées,
D’hymnes d’hommes comblés des dons du juste éther,
Iles ! dans la rumeur des ceintures de mer,
Mères vierges toujours, même portant ces marques,
Vous m’êtes à genoux de merveilleuses Parques :
Rien n’égale dans l’air les fleurs que vous placez,
Mais, dans la profondeur, que vos pieds sont glacés !6
8Sylvie Ballestra-Puech a bien montré que ces îles servent de miroir à la Jeune Parque, qu’elles lui permettent de mieux comprendre sa structure intime, telle qu’elle est apparue déjà dans la première partie du poème : aérienne et souterraine, claire et obscure. Elle a fait observer aussi que cette structure est celle de la mythologie gréco-latine, où la Terre est une île encerclée par le fleuve Okéanos, celui-là même sur lequel s’embarque Ulysse à l’instigation de Circé quand il se rend en Cimmérie pour y évoquer les morts et essayer d’obtenir de l’ombre du devin Tirésias le secret de son propre avenir.7
9L’île n’est pas un mythe, surtout quand on peut la repérer sur une mappemonde. Elle n’a en elle-même aucune des caractéristiques du mythe. Mais elle peut être chargée de mythes (c’est le cas pour les îles odysséennes), et elle tend à devenir un « territoire mythique » quand elle est le heu d’un secret. J’emprunte cette expression à François Moureau qui, préfaçant un ensemble de onze études dues à divers chercheurs et réunies sous le titre L’Île, territoire mythique, écrivait :
L’île est une terre, qui, précisément, n’a d’intérêt que par ses limites : l’île est d’abord conscience de l’île. C’est un Heu qui échappe à l’élément aquatique, une singularité menacée. L’élément stable, prévisible d’Ulysse se trouve sur la mer : l’île est la promesse du piège, un univers femelle où le héros se laisse détourner de la seule voie où le pied, la rame, la voile progressent fermement, celle de la mer ouverte et maternelle.
Dès l’Antiquité, naît le mythe de l’île flottante, hybride qui combine la fausse élasticité du sol à l’errance de l’élément liquide. Sur ces îles vivent des êtres métissés, ni animaux, ni hommes, ni chair, ni poisson, fantasmes d’un unanimisme vivant dont l’île est le réceptacle mythique. Les îles fortunées recueillent les héros morts : Aphrodite, née de l’écume des flots, aborde à Cythère, puis à Chypre, où l’accueillent les Saisons qui la conduisent chez les Immortels : l’île est la porte de la Mort, comme la Mer est le lieu privilégié de la Vie. Les entrées de l’Enfer sont pour la mythologie romaine situées en Campanie dans des lieux marécageux près de la côte où la terre et l’eau forment le lieu indifférencié qui est comme l’esquisse de l’Achéron : rivière des Morts, barque du nocher Charon.8
10Les îles de La jeune Parque ne sont pas des îles vagabondes, comme celles qu’évoquait Edmund Spenser dans The Fairy Queen et que retrouvait à travers lui Melville en tête de la première esquisse des Encantadas,9 «terres égarées parmi les eaux nombreuses et çà et là courant ». Elles ne sont pas « démarrées », comme les Péninsules dont parle le Bateau ivre, presqu’îles devenues enfin îles, et si ivres elles-mêmes de liberté, qu’elles filent comme un bateau qui a rompu les amarres et donné congé aux haleurs. Elles ont des racines secrètes dans la profondeur des abysses, même si des fleurs qui y éclosent sont ouvertes au grand jour et se donnent à qui veut en respirer l’odeur.
11Elles ont le poids de la maternité, et pourtant elles sont, oxymoroniquement, des « mères vierges » : lourdes du poids de leur trésor, de la végétation qu’elles font naître, de la vie qui les emplit. Non point roches nues seulement, mais ruches, toutes bruissantes d’abeilles industrieuses qui restent pour Valéry des symboles de l’activité poétique.10 Non point seulement îles des Idées, comme l’île mallarméenne de la Prose (pour des Esseintes), mais chez ce disciple qui ne résiste ni à la rumeur de la vague ni au souffle du vent, îles aux bois bourdonnants « de bêtes et d’idées / D’hymnes d’hommes comblés des dons du juste éther ».
12Valéry ne laisse pas ce Salve insula à la Parque. Il est lui-même le célébrant des îles divinisées qui lui ouvrent moins le secret du monde des dieux que la poésie des éléments (le sel, la lumière, le feu, l’air, la mer). La ceinture dénouée de ces vierges-mères autorise de merveilleuses noces avec le cosmos. L’élargissement de l’espace va de pair avec une fulgurante traversée du temps : en treize vers, on passe des jouets de l’enfance à l’âge adulte des mères-vierges et à la mort dont les pieds glacés des Îles-Parques rappellent la nécessité. Car pas plus que les humains ou que les bateaux ivres, les îles ne peuvent se jouer de la mer, s’accorder le privilège de dérades et de dérobades. Elles seraient plutôt elles-mêmes des jouets, « les premiers jouets de la jeune lumière », les jouets du feu du ciel et de la rumeur des mers. Mais, en se prêtant à ces forces qui les environnent, elles glanent la grâce d’un éclat de rubis, d’une promesse de paradis, d’une riche fécondité, – celle dont rêve le poète après une longue période de stérilité.
13Quand Jean-Claude Renard publie, en mai 1984, Toutes les îles sont secrètes. Poèmes, il est dans la plénitude de sa force et de son art. Entre les poèmes de ses débuts, dont ce Juan (1946) longtemps renié qui rappelle beaucoup la manière de La Jeune Parque et les Dits tardifs, plus éclatés, La Terre du sacre (1966), La Braise et la rivière (1969), Le Dieu de nuit (1973), La Lumière du silence (1978) et Toutes les îles sont secrètes constituent un des massifs les plus imposants de la poésie contemporaine. Ces recueils, construits comme des cathédrales, puissants comme des symphonies, se sont organisés à partir de fragments parfois brefs, dispersés dans des revues, mais intégrés à un work in progress qui un jour aboutit. Le recueil de 1984 est remarquable à cet égard, et la note bibliographique établie par l’auteur pour l’édition originale donne le détail complexe des pré-originales qui se sont succédé de 1981 (« Pourquoi » dans Artère) à 1983 (« Énigmes » et « Dits d’alliance » dans Europe, « Langage » dans le Journal de psychologie).
14L’ambition de Jean-Claude Renard est de « donn[er] parole aux secrets » : le poème intitulé « Aussitôt » se clôt sur cette audacieuse formule qui est, elle, une annonce d’ouverture. Il est vrai que, par un autre paradoxe, il confère ce pouvoir au silence. Un tel recours vient au terme d’une série de procédés divers : l’aimant, le présage, les signes (et en particulier ceux que l’oniromancie cherche dans les songes), les « laines à capter l’énigme », elles-mêmes bien mystérieuses, les traces sur le sable. On croit deviner dans la trame du texte des éléments odysséens qui restent feutrés : la toile de Pénélope peut faire partie des « laines à capter l’énigme » ; « l’arc armé par merveilles de mains absentes » peut être celui d’Ulysse dont l’arrivée inattendue, l’irruption à son retour dans son palais serait alors exprimée dès l’« Aussitôt » du titre. Mais le rappel implicite du mythe cède la place à une autre irruption, la venue soudaine de celui que dans un recueil précédent Jean-Claude Renard appelait « le Dieu de nuit ». Seul il peut parler par le silence, seul il a le privilège de donner parole aux secrets.
15Le poète, il est vrai, ménage des silences, et il use d’une autre parole que les mots de tous les jours. Après Paul Claudel, Jean-Claude Renard connaît cette situation noble d’une parole poétique qui se veut accordée à la Parole, d’une création continuée et d’un verbe prolongé dans le silence. « Donn[er] la formule aux secrets » : la formule ne laisse pas d’être ambiguë. Ce peut être dire l’énigmatique, comme Marie-Claire Bancquart,11 dans un monde immédiatement présenté comme absence de Dieu. Ce peut être aussi découvrir et livrer le secret, donc triompher par la parole de l’énigmatique même.
16Le livre de Jean-Claude Renard me paraît osciller de l’une à l’autre de ces intentions. La première partie, « Introduction au secret», commence par des poèmes en forme de questions, où on retrouve même le Warum ? de Robert Schumann : « Comment », « Mais » (qui introduit à chaque fois une objection en forme de question), « Où », « Pourquoi ». Mais voici que, dès le cinquième poème, une affirmation tend à se mettre en place : « Si ».
17Car, ne nous trompons pas, si est bien dans ce poème, grammaticalement, la conjonction qui, à deux reprises, vient introduire une proposition hypothétique. Mais en même temps une réponse s’affirme :
Si rien n’est nul
parmi le vide,
personne est là
comme quelqu’un !
Si nul n’est rien
parmi le plein
quelqu’un est là
comme personne !12
18Un souvenir de l’Odyssée passe : celui d’Ulysse rusant avec le cyclope Polyphème quand il lui faut décliner son identité, outis (Personne) qui est pourtant quelqu’un.13 Mais le poète qui a écrit autrefois Père, voici que l’homme (1955) maintient la présence de ce Père dans le monde, même s’il est moins soucieux d’orthodoxie religieuse. L’expression de la négation y perd sa négation (« personne est là »). La proposition hypothétique elle-même se retourne en affirmation presque dogmatique. Le poème suivant, « Là », accentue encore cette présence, même si elle est présence de l’inexprimable.
19Dès lors le secret devient « Arcanes », série de 1 à 9 qui se constitue dans les pages 25 à 33. La possibilité d’une réponse est laissée au terme d’un long travail de déchiffrement, de décryptage. L’image du labyrinthe apparaît dans le premier poème de cette série. L’écriture, chargée de découvrir le secret des arcanes, est peut-être arcane elle-même (p. 25).
20Jean-Claude Renard peut bien s’enchanter de ces noces qu’il voit célébrées dans le monde, mais cette célébration prend forme de question et aboutit à une question.
Est-il plus parfaite noce,
dans le matin vert,
que celle, sur la lise,14
d’une roche noire,
du sable blanc
et d’un coquillage rose ?
Le sens
éludant toute langue,
annulant tout leurre
s’y lit intact.
Mais quelle profondeur
honore-t-il ?
(« Arcanes 3 », p. 27)
21Le poète sait bien qu’au-delà de l’énigme du monde se situe l’énigme plus angoissante encore de la mort (« Arcanes 5 ») et il veut être persuadé qu’« À chaque mort, nulle part et partout, débute quelque chose » (« Arcanes 6 »). Ce « quelque chose », même pas nommé, à peine exprimé, reste énigmatique. Il y a une énigme de là-bas comme il y a, en deçà, une énigme du non-né (p. 31). Car nous sommes sans cesse délogés d’ici par là : « être est exode » (« Arcanes 8 »). Et rien n’est plus mystérieux, dans l’ordre du langage, que le plus simple en apparence de tous les mots, le verbe être qui, selon « Arcanes 9 », viendrait « avant tout nom » (p. 33). Descartes en faisait une conséquence, Jean-Claude Renard en fait un préalable.
22Quelle est la conduite à tenir dans l’ici mystérieux ? Jean-Claude Renard propose le rite dans un nouveau novénaire, une nouvelle neuvaine qui se constitue dans les pages 38 à 49. Or dès « Rites 1 », ces rites, au lieu de se laisser réduire à n’importe quel geste pieux, à une quelconque pratique routinière de dévotion, prennent la forme du il y a :
la nudité que l’un à l’autre n’oppose plus dedans et dehors mais brusquement, par baies du lierre au bec d’une fauvette, fonde il y a. (p. 38)
23Ce rite, qu’on pourrait considérer comme antipoétique, ou du moins a-poétique, – catalogue vain, énumération fastidieuse à partir d’une formule neutre –, a pourtant fait ses preuves dans la poésie moderne et contemporaine : émerveillement assombri d’« Enfance III » dans les Illuminations de Rimbaud, forme litanique du Psalm de Georg Trakl, Il y a d’Apollinaire, Simultanéités de Paul Eluard. La « lista » poétique tente, non seulement d’épuiser l’inépuisable, – Ce puits que rien n’épuise, beau titre choisi par Jean-Claude Renard pour un recueil postérieur de poèmes et de proses, en 1993 –, mais de suggérer que tout ce que le texte énumère existe ensemble, au même moment, compose.
24L’in-fini étant un risque pour la poésie, Jean-Claude Renard, sans avoir pour lui l’horreur proclamée par Coventry Patmore ou par Paul Claudel, choisit délibérément le fini, l’île. Un peu comme Daudet quittait l’hydre Paris pour élire domicile dans « son » moulin. L’île, avec son contour net et ses dimensions limitées, donne l’impression, – l’illusion –, qu’on peut en épuiser la forme et le contenu : Spetsai pour promeneurs du dimanche, île d’Elbe pour conquérants en exil...
25Or toutes les îles sont secrètes. Secret même le moindre îlot. Dans la nouvelle de Maupassant, La Femme de Paul, le « Pot à fleurs », le « Camembert », en pleine Seine, est tout aussi secret, tout aussi porteur d’un mystère inépuisable que l’île mallarméenne de la Prose (pour des Esseintes), où ce mystère devrait être élucidé :
Oui, dans une île que l’air charge,
De vue et non de visions
Toute fleur s’étalait plus large
Sans que nous en devisions.
Telles, immenses, que chacune
Ordinairement se para
D’un lucide contour, lacune,
Qui des jardins la sépara.
26L’écriture est l’un des rites qui constituent le second novénaire de Toutes les îles sont secrètes. Elle trouve donc naturellement sa place dans « Rites 2 », mais assortie d’une mise en garde contre son « zèle perfide », « Car elle s’écarte du sens / – se vide de plus en plus de sang » (p. 41). Jean-Claude Renard pense-t-il par exemple à la Prose (pour des Esseintes), quand l’île est le support d’une allégorie plus qu’un territoire mythique ? Incrimine-t-il les excès d’intellectualisme qu’on reproche parfois à une certaine poésie contemporaine ? Quand elle tourne au jeu verbal, la poésie risque de devenir exsangue. Et pourtant le jeu de mots, même systématique, peut être le support de plus de sens et de plus de sang. Je pense au jeu entre île / il / elle, justement signalé par Claude Burgelin dans le W de Perec,15 ou, plus encore peut-être, à île / ils, quand la nouvelle île de Robinson, l’île W, devient le lieu d’une collectivité de type si oppressif qu’elle finit par ressembler à l’organisation nazie. L’île est la proie des ils.
27Dans « Arcanes 4 », Jean-Claude Renard, tout en suivant l’ordre voulu par Rimbaud, pratiquait l’oeuvre des couleurs d’où naît le sens sans indiquer les voyelles correspondantes :
Le noir dissout.
Le blanc coagule.
Le rouge unit.
Le vert réalise.
Le bleu rayonne, (p. 28)
28Dans « Rites 8 », même s’il ne remonte pas qu’aux lettres qui ont donné naissance à ces couleurs, celles en tout cas auxquelles il les associe, Jean-Claude Renard fait place au travail de la langue, travail sans fin, avec « les mêmes mots faits neufs par chaque regard nu ». L’écriture poétique est une perpétuelle cure de jouvence pour le langage. Il fait mieux que rajeunir, il renaît, comme une île fouettée par la pureté de la vague.
29Au moment même où il décidait de se passer de la voyelle e dans La Disparition, Georges Perec la retrouvait en introduisant dans son texte lipogrammatique l’image des « Rois blancs » auxquels Rimbaud associait la lettre manquante.16 Jean-Claude Renard ne néglige aucune des possibilités offertes par l’usage plein des vingt-quatre lettres de l’alphabet. Il mettrait même une certaine insistance sur e, qui n’a pas ici besoin de disparaître pour revenir. Le premier vers de « Rites 8 », « Sache-le », pourrait se lire « Sache l’e ». Et la voyelle, associée à l’énigme, l’est aussi à l’écriture, et à la neige blanche, aux « indéchiffrables neiges » qui « imprègnent l’écriture » (p. 48).
30Jean-Claude Renard ne cède pas à la tentation du cryptogramme. Mais, comme beaucoup d’écrivains contemporains, il est fasciné par le mystère de l’initial, par le point où commence le nom. Non qu’il évolue vers une quasi-neutralité de la personne, 1’A. de Robbe-Grillet dans La Jalousie, l’O. de Claude Simon dans La Bataille de Pharsale, qui ne sont plus noires ou bleues, mais désignent une ombre, peut-être plus charnelle d’ailleurs qu’il n’y paraît d’abord. À première vue, son usage de l’initiale rappellerait plutôt celui du xixe siècle, quand Balzac ne parle que de Mme de F... dans la première version de Sarrasine ou même quand Edgar Poe met en place le préfet de police G... ou le ministre D...
31On aurait tort pourtant de le réduire à cela. « Dits d’un été », dans Toutes les îles sont secrètes, fournit un exemple simple, qui est loin d’être unique, et à lui seul révélateur. Je tiens du poète que ce poème est lié au troisième séjour qu’il fit au Canada, en 1979 :
Nul ne s’illumine soi-même.
Chaque soir, vers sept heures, bordé de forêts et de roches, le lac Meach était bienfaisant.
Comme deux Indiens d’avant l’histoire, nous y nagions, P. et moi, dans une solitude verte et fraîche.
Les différences s’ajoutent – elles ne s’opposent pas.
(P. 63)
32Qui saurait, sous une confidence de Jean-Claude Renard, que P. désigne Philippe Marandot, qui était alors conseiller culturel à l’ambassade de France au Canada ? Qui fera la recherche pour, plus haut dans ce même poème, « H. et B. » qui « riaient sur la pelouse » ? La poésie ne cherche nullement, ici, à se charger d’énigmes. Elle réserve le droit de l’écrivain à la pudeur, au secret sur sa vie personnelle. Elle marque la différence entre ce qui serait le simple compte rendu, dans un journal intime, fût-il le journal d’un poète, « dans des Mémoires, d’une après-midi de juillet 1979 dans une ferme de l’Ontario ». Elle esquisse des présences que le poète sait fugitives, même si elles laissent une trace dans son texte et dans son cœur. Alors que tout semble en place pour le dit d’un été, pour le dit d’un moment heureux, s’amorce une rêveuse remontée du temps, pour une identification avec « deux Indiens d’avant l’histoire », deux bons sauvages à la Rousseau. Les personnes importent moins que la relation qui les unit. Jean-Claude Renard n’a pas besoin d’écrire « Philippe et moi », même pas comme Juan Ramon Jimenez écrivait Platero et moi. Il lui suffit de « P. et moi », dans une évocation de l’amitié comme appel à la lumière de l’autre, à la nécessité des différences et de la complémentarité. Je disais : Rousseau. Mais nous sommes bien plus près de Michel de Montaigne et d’Etienne de La Boétie : « Parce que c’était lui, parce que c’était moi ». Et si je devais entendre un vocable dans la vibration de cette initiale P., ce serait moins Philippe que ce Parce que...
33Le rite de l’écriture, s’il est che2 Jean-Claude Renard inséparable du secret, ne recouvre pas du vide, du plein. Il est un geste de plénitude, et il l’est d’une manière exemplaire dans une telle évocation de l’amitié. Rien, dont le glas sonne si souvent dans la littérature française contemporaine, n’est jamais ici un terme. Ou bien il devient quelque chose, comme personne devient quelqu’un (et quelqu’un peut désigner Dieu). Ou bien il est évoqué comme exclu au profit de la plénitude de l’être, – d’un être qui, pour être plein, n’en reste pas moins mystérieux.
Ne cherche rien. Ne vise à rien.
Apprends seulement, quand l’île finit par cacher l’île,
à être toi – non pas à toi.
Et dans les contours de la mer d’où monte, avec d’inaudibles vents,
l’odeur vanillée des jacinthes,
hors péril, hors salut,
juste au for de l’immédiat,
découvre ce qui revient au même...
(« Rites 1 », p. 40)
34L’écriture, et tout particulièrement l’écriture poétique, est une longue litanie, mais constamment renouvelée, constamment inventive, pour parler « chaque fois autrement » de « chaque unicité », de « chaque énigme » (« Rites 8 », p. 48). Elle aborde le mystère des choses à partir de la monade ou d’un ensemble, blanc comme e, et blanc comme les « indéchiffrables neiges », – « l’abîme blanc du mystère » (« Rites 9 », p. 49). Pour cela, il suffit à Jean-Claude Renard, comme à Rilke, comme à Yves Bonnefoy, d’être là, « Simplement-là » (p. 50-58). Ce long poème, séquence de vingt fragments, est dédié à Alain Bosquet.
35Le novénaire des « Rites » appelle, dans la suite de Toutes les îles sont secrètes, une neuvaine de « Mythes » (p. 68-77). Jean-Claude Renard ne se prive nullement de puiser dans le dictionnaire de la fable (le mot fable même passe plusieurs fois, comme inutile et presque dévalué). Il ne sollicite guère le panthéon gréco-latin : tout au plus la pythie (« Mythes 3 »), des dieux, et de « jeunes dieux » (« Mythes 5 »), comme Apollon non nommé, qui seraient les dieux de Hölderlin plutôt que ceux d’Homère. Le labyrinthe n’a guère à voir ici avec celui qui abrita le Minotaure : il désigne, dans « Mythes 1 », la substance énigmatique du monde, sol lézardé d’où s’envolent des signes.
36Il n’est pas de mythes plus purs que les mythes de genèse. Avec une sobriété exemplaire, « Mythes 4 » énonce, parmi d’autres phrases brèves : « La mer enfante une île sacrée » (p. 71). Et ces six mots valent bien de longs récits cosmogoniques. Mais les phrases précédentes ne sont-elles pas porteuses de la même charge sacrée : « L’escalier s’enfonce dans l’arbre. L’arbre débouche sur la mer » ?
37Est-il besoin des fragments qui suivent, d’un voyage à la manière de Bougainville, d’un supplément minuscule, pour aboutir à une nuit essentielle qui est le « lieu du dieu », mais d’abord le lieu du vivant ?
38La série des « Mythes » s’achèvera sur « la porte ». Et en effet, Jean-Claude Renard retrouve l’Ouvert rilkéen17 dans « Mythes 7 », où il est mis tin aux questions qui se pressaient dans « Énigmes » (p. 59-61) et où le nouveau Voyant rend grâce au non-voir, plus proche en cela d’Œdipe, aveugle volontaire, que du Rimbaud de 1871, tendu dans sa volonté d’être Voyant :
Rien n’immobilise le mystère
: il se longe partout lui-même.
Voyant
grâce à ce que tu ne vois pas,
sois avec lui
– sans questionner.
Non point en face
mais au-dedans
indéfiniment ouvert sur l’ouvert.
Le réel n’advient
que par l’irréel,
et l’écart
révèle l’union.
Sur le gui frais,
écoute en toi parler le dieu. (p. 75)
39On peut rêver, pour cela, d’une enfance (« Mythes 2 »). Mais elle s’est continuée en une vie d’adulte, comme la série des « Récits », commencée dans La Braise et la rivière, se poursuit dans Toutes les îles sont secrètes, avec un « Récit 5 », plein d’images du Nord et du « pays des riens », un « Récit 6 » qui renvoie au Sud, cette fois, au Toulon familial avec au large des îles, – « mes merveilles, mes demeures indéchiffrables » –, et évoque un voyage du poète au Sénégal (avec l’île de Gorée), à la fin de l’année 1980. Plus loin, le « Récit » rappellera le voyage en Irak d’avril 1982.
40Il faudra attendre Sous de grands vents obscurs (1990) pour que se complète le novénaire des « Récits ». En revanche, après « Emblèmes d’un double », la série des « Textes » 1 à 9 est complète et continue. La nouvelle alchimie du verbe, « la grande alchimie magicienne» (« Textes 4 ») ne cherche pas à obtenir d’autre or que l’or du texte, que l’oxymore fondamental d’une présence fondée par le mystère de l’absence (« Textes 5 »), que l’assurance
... qu’à la lisière de l’été
toutes les îles sont secrètes, (p. 113)
41Au-delà des « Vingt galets rouges et gravés », semés par un autre « Petit Poucet rêveur »,18 mais porteurs d’une inscription comme Pierre écrite, le troisième recueil d’Yves Bonnefoy (1965), au-delà des « Dits d’un livre du tarot » où, plus rigoureusement que Nerval et que Breton, Jean-Claude Renard respecte le chiffre des vingt-deux arcanes majeurs correspondant aux vingt-deux strophes du poème, l’ultime série de « Langage » va aussi jusqu’au déroulement complet d’un novénaire (p. 157-166).
42Après le charmeur de vipères et l’hypnotiseur d’arbres, le poète se présente en charmeur d’îles, en charmeur par le langage et en charmeur de langage. On pense au recueil poétique de Valéry, Charmes (1922-1926), à l’œuvre délicate confiée au piano par Federico Mompou (1920-1925). Mais à la fin du livre, et plus encore dans les recueils qui suivront, se resserre l’angoisse de la mort qui n’a d’égale que l’angoisse de la vie (« Langage 8 »), et à laquelle tente de s’opposer une volonté de sérénité. On ne se transforme pas soi-même en ténèbres, surtout si on ne perd pas l’espoir d’accéder à une vérité plus haute. Car, dans cette série finale, le poète se confirme dans la tâche de « cherch[er] d’abord le secret du vide qui comble l’absence » (« Langage 1 », p. 158). Le paradoxe se renouvelle une dernière fois en un suprême appel :
Mais puisque rien n’abolira l’ultime question sans réponse
ne cesse point,
surtout à l’heure où tout se brise,
de te souvenir que, peut-être, la seule chance d’espérer
viendra de cette absence dont le secret défie
l’incertitude du néant !
(« Langage 9 », p. 167-168)
43Au cours de cette longue analyse, j’ai rapproché à plusieurs reprises Jean-Claude Renard d’Yves Bonnefoy. J’étais heureux de saluer ensemble deux poètes majeurs d’aujourd’hui dont la lecture, illuminée pour moi d’une longue et précieuse amitié, m’a constamment enrichi. Les différences entre eux sont trop éclatantes pour que j’aie besoin d’y insister ici.
44Le motif de l’île n’est pas étranger à Yves Bonnefoy. Même s’il a préféré à la côte varoise la Provence intérieure, celle de la maison de Valsaintes (simplement désignée par V. dans le quatrième recueil Dans le leurre du seuil, en 1975), l’ancienne abbaye patiemment restaurée pourrait bien être son moulin de Daudet, son île à lui. Dans Dévotion, en 1959, il s’adressait, entre autres, « Aux chapelles des îles ».19 «Le Canot de Beckett », écrit après la mort de Samuel Beckett en 1990, et inséré dans La Vie errante en 1993, est inséparable de « L’Irlande des années 40 et 50, aussi mystérieuse qu’un bateau cherchant le rivage ».20 Beckett qui, comme Joyce, s’est éloigné de son île d’origine, autre Stephen Dedalus s’envolant du labyrinthe, s’est dirigé vers une autre île, l’île des morts. Le canot qui le porte, autre barque de Charon, est lui-même une île errante, comme celles qu’évoquait Spenser.
45Derrière 1 évocation du canot funèbre, on devine le souvenir de 1’excursion aux îles, dans Malone meurt, qui, avec à son bord l’ineffable Macmann et Mme Pédale, avait des allures de plaisanterie (« Une femme dit cependant, Ils t’emmènent en bateau, ce qui déclencha une tempête de rires »21), mais pour dire quelque chose de grave et suggérer une nouvelle Descente aux enfers (« C’est sans doute le week-end de Pâques, passé par Jésus aux Enfers »). L’île de Malone meurt, avec ses vestiges druidiques (p. 213), était encore l’Irlande, et pourtant n’était pas l’Irlande : verte Erin et île de Morholt, île de la vie et île de la mort. Le départ final de Mme Pédale et de ses compagnons correspondait à l’entrée de Malone solitaire, one comme Beckett, dans la mort. Mme Pédale devenait une autre Parque involontaire.
46Dans L’Arrière-pays, en 1972, Yves Bonnefoy pouvait un instant donner l’impression qu’il mettait à distance le mystère de l’île. Elle serait presque trop nette en ses contours, comme celle de la Prose (pour des Esseintes). Ainsi dans l’invocation à l’île de Capraia :
Capraia, tu appartiens à l’ici du monde, comme nous. Tu souffres de finitude, tu es dessaisie du secret, recule donc, efface-toi dans la nuit qui tombe.22
47En va-t-il ainsi, pour Bonnefoy, d’un monde sans Dieu dont nul seuil ne permettra de franchir la limite ? S’il est des limites pour lui, ce sont tous ces écrans : la notion de Dieu, aux exigences trop fortement morales, le concept, qui masque l’accès au monde sensible, tout ce que le poète appelle « un pouvoir de nuit ».
48S’il n’est pas d’autre monde derrière ce monde, un arrière-pays est au cœur de ce pays même. Au voyageur de le chercher, au poète de le trouver. Avec ou sans île, Yves Bonnefoy est resté fidèle au projet qu’il exposait dès 1959 dans L’Improbable :
Je ne prétends que nommer. Voici le monde sensible. Il faut que la parole, ce sixième et ce plus haut sens, se porte à sa rencontre et en déchiffre les signes. Pour moi je n’ai de goût qu’en cette tâche, recherche du secret que Kierkegaard n’avait plus.23
49Cette recherche du secret, elle est celle de la poésie contemporaine, de Philippe Jaccottet à Marie-Claire Bancquart ou à Salah Stétié, de Jean-Claude Renard dans La Terre du sacre : « Un corps secret, dans l’iode, annonce le futur »,24 ou dans La Lumière du silence (« Dits du secret »), à Yves Bonnefoy, inquiet de voir Paul Celan ne sondant l’amande, la mandorle, que pour y trouver du vide. Lui, il veut espérer encore que « le fleuve en tant que vide réel [puisse] s’élever à la puissance d’une réponse, et, nommé au suspens du dernier mot, porter du réel dans ce dire où toute caution manquait».25
Notes de bas de page
1 Alphonse Daudet, Le Petit Chose. Le livre, commencé après les premières Lettres de mon moulin, a paru en feuilleton dans Le Moniteur universel du soir, du 27 novembre 1866 à octobre 1867. Le volume, publié par Hetzel, a été mis en vente le 1er février 1868. Je cite la réédition dans la collection Folio, no 979, texte établi et annoté par Patrick Berthier, Paris, Gallimard, 1977, p. 24.
2 Treasure Island, de Robert-Louis Stevenson, d’abord publié dans la revue Young Folks, a paru en volume en 1883.
3 Préface pour la traduction par Bernard Hoepffner des Îles enchantées de Melville, Paris, Mille et une nuits, 1997, p. 7.
4 Collection Bouquins, p. 92-95.
5 Trad, citée, p. 120. Les dix esquisses des Encantadas ont été publiées dans les numéros de mars, avril et mai 1854 de Putnam’s Monthly Magazine, sous la signature de Salvador R. Tarnmoor. Elles ont été reprises en 1856 dans le recueil des nouvelles Piazza Tales, cette fois sous la signature de Melville.
6 Paul Valéry, Œuvres, édition de Jean Hytier, Paris, Gallimard (Pléiade), tome I, 1957, p. 106.
7 Sylvie Ballestra-Puech, Lecture de La Jeune Parque, Paris, Klincksieck, 1993, p. 87.
8 Aux amateurs de livres (Littératures des voyages), no 3, 1989, p. 7.
9 Edmund Spenser, The Fairy Queen / La Reine des fées (de 1590 à l’éd. posthume de 1609), Livre II, chant XII, strophes 11 et 12. Herman Melville, Encantadas / Les Îles enchantées, trad, citée, p. 11. Melville place ces deux strophes en épigraphe de cette première esquisse, « Les Îles dans leur ensemble ».
10 Voir « L’Abeille », dans Charmes, éd. citée, p. 118.
11 Énigmatiques, recueil de poèmes publiés aux Éditions Obsidiane, en 1995.
12 Toutes les îles sont secrètes, Paris, Seuil, 1984, p. 15. C’est à cette édition que renverront désormais les références.
13 Odyssée, chant IX. Fernando Pessoa a accentué ce paradoxe dans son poème « Ulysse » (« Ulisses », dans Mensagem, 1934) sur lequel Roman Jakobson a attiré notre attention.
14 Lise désigne des sables mouvants dans la région du Mont-Saint-Michel.
15 Georges Perec, par Claude Burgelin, Paris, Seuil (Les Contemporains), 1988, p. 153.
16 « Voyelles », dans Œuvres complètes de Rimbaud, Bouquins, p. 96, vers 5 et 6 :
« ... E, candeurs des vapeurs et des tentes, / Lances des glaciers fiers, rois blancs, frissons d’ombelles » et voir Georges Perec, La Disparition, p. 112 : « Voyl citait aussi Kafka, puis parlait du “vol du bourdon”, puis d’un Roi blanc, ou parfois d’Arthur Rimbaud ». « Rois blancs » est maintenu, alors que E est toujours exclu, dans sa réécriture lipogrammatique de « Voyelles », « Vocalisations », p. 125.
17 Duineser Elegien, VIII, dédiée à Rudolf Kassner : « Mit allen Augen sieht die Kreatur das offene » (« Par tous ses yeux la Créature voit l’ouvert »).
18 Rimbaud, « Ma Bohême ».
19 Yves Bonnefoy, Poèmes, Paris, Gallimard (Poésie), 1982, p. 180.
20 La Vie errante, Paris, Mercure de France, 1993, p. 121 et suiv.
21 Samuel Beckett, Malone meurt, Paris, Minuit, 1950, p. 202.
22 Yves Bonnefoy, L’Arrière-pays, Genève, Skira (Les Sentiers de la création), 1972, p. 15-17.
23 « Les Tombeaux de Ravenne », dans L’Improbable, Paris, Mercure de France, 1959, rééd. Gallimard (Idées), no 489, p. 23.
24 « Et les îles feront silence », paru en 1964 dans La Nouvelle Revue Française, repris dans La Terre du sacre, Paris, Seuil, 1966, p. 10.
25 « Paul Celan », texte publié à Genève, en 1972, après la mort de Celan, et repris dans Le Nuage rouge, Paris, Mercure de France, 1977, p. 304. « Mandorla » fait partie du recueil Die Niemandsrose [La rose de personne], 1963.
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