George Sand et le genre du proverbe
p. 269-283
Texte intégral
1À sa manière, George Sand est une dramaturge expérimentale. Toute sa vie elle n’a cessé de s’interroger sur le rôle du théâtre, sur le jeu, sur la mise en scène. La tentation de la théorie ne lui est pas étrangère : témoins, par exemple, l’Essai sur le drame fantastique qu’elle publie dans la Revue des Deux Mondes le 1er décembre 18391, ou le fragment intitulé Le Théâtre et l’acteur (1858). Surtout, elle s’est essayée aux genres les plus divers, d’abord sans même songer à la représentation. En 1831 elle écrit Une conspiration en 1537, qui s’inscrit dans le genre nouveau de la scène historique, a priori destiné à la lecture, et qui restera inédit du vivant de Sand, mais qui contient déjà un remarquable germe de théâtralité puisqu’il sera, par Musset interposé, à l’origine de Lorenzaccio. Suivront un « poème dialogué2 », Aldo le rimeur, un « roman dialogué », Gabriel, puis les comédies, les comédies sérieuses, les drames, sans compter le véritable laboratoire qui se met en place à Nohant, comportant scénarios, canevas pour l’improvisation, pantomimes, féeries, mélodrames3…
2De toute évidence, Sand cherche toujours plus loin, autre chose. Elle ne se contente pas de ce que lui offrent les scènes de son temps. Ni le drame romantique avec ses excès flamboyants, ni la « pièce bien faite » Second Empire avec son mécanisme bien huilé, propre à ne pas troubler les digestions bourgeoises4, ne peuvent la satisfaire. Fort critique envers la production contemporaine, elle écrit justement dans Le Théâtre et l’acteur que « le progrès qu’il […] reste à faire » au théâtre moderne « est de retrouver à force d’art et d’habileté la vérité primitive dépouillée des rudesses et du désordre inimitable de ses premiers essais5 ». Or, pour chercher cette « vérité primitive », il faut se tourner vers le passé. Non le passé historique si cher au théâtre romantique, mais le passé du théâtre lui-même, avec ses vieux genres, mineurs et populaires. Elle affirme d’ailleurs avoir acquis l’inébranlable « conviction qu’il y a dans le passé l’ébauche d’un théâtre que l’avenir réalisera », c’est-à-dire un théâtre capable de joindre à « un scénario bien médité, bien étudié6 », et à un langage raffiné, la spontanéité et l’impression de réel saisi sur le vif de l’improvisation libre. Bref, précisément ce qui manque, à son avis, aux « compositions nouvelles », dont l’« action compliquée » est surchargée « d’émotions factices, de situations embrouillées, d’événements imprévus, précipités, accumulés les uns sur les autres7 » dans l’effort d’amuser ou de surprendre un public blasé.
3À Nohant, sa table d’essai favorite, elle se tourne ainsi vers la tradition de la commedia dell’arte, avec son mélange d’écriture et d’improvisation, et vers le théâtre de société, fait par et pour des amateurs éclairés, hérité du xviiie siècle. Ce dernier lui offrait, entre autres, la pratique du proverbe, ou proverbe dramatique, un petit genre né comme divertissement sans prétentions de la bonne société d’Ancien Régime vers la fin du xviie siècle et qui connut ses heures de gloire sous le règne de Louis XVI.
4Ses origines, d’après Clarence Brenner, qui s’en est fait l’historien, seraient probablement liées à la vogue des jeux de salon où l’on pouvait « briller devant ses semblables ou mettre [son] esprit à l’épreuve », et à l’habitude prise par les cercles aristocratiques, notamment pendant les séjours à la campagne, de s’amuser avec de petits spectacles plus ou moins improvisés. « On s’habituait à tenir des rôles dans des comédies ou dans des parades. Comme délassement plus intime, on jouait depuis longtemps aux charades », et comme « on faisait bon accueil à toute sorte d’innovation », la mode des proverbes se développa rapidement8. On notera, en passant, une intime parenté avec la genèse du théâtre de Nohant, né lui aussi pour égayer la vie au château « en famille durant l’hiver », et développé d’abord sur l’impulsion d’une « charade, sans mot à deviner, laquelle charade devint une saynète, et, rencontrant au hasard de l’inspiration une sorte de sujet, finit par ne pouvoir pas finir, tant elle […] semblait divertissante9 ».
5Comme la charade en action, le proverbe dramatique du xviiie siècle tourne souvent autour d’un mot à deviner, en l’occurrence le proverbe lui-même, que l’action dramatique se doit d’illustrer et suggérer. C’est ainsi que l’entend le principal représentant et théoricien du genre, Carmontelle, auteur de plus d’une centaine de proverbes encore régulièrement réédités et fort lus au xixe siècle. Lorsqu’il publie son premier recueil de Proverbes dramatiques en 1773, il le fait précéder d’une préface en forme de lettre où il explique les caractéristiques du genre :
On choisit un sujet, qui forme plusieurs Scènes d’une action, et […] le titre de ces Scènes doit être un Proverbe. Il n’y a presque pas de Comédie à laquelle on ne pût donner un proverbe pour titre, si l’on vouloit. […] Le Proverbe Dramatique est donc une espèce de Comédie, que l’on fait en inventant un sujet, ou en se servant de quelques traits, quelque Historiette, & c. Le mot du Proverbe doit être enveloppé dans l’action, de manière que si les Spectateurs ne le devinent pas, il faut, lorsqu’on le leur dit, qu’ils s’écrient ah ! c’est vrai : comme lorsqu’on dit le mot d’une Énigme, que l’on n’a pû trouver10.
6Les petites pièces portent des titres anodins et la liste des proverbes correspondants n’est donnée que dans une table en fin de volume « pour qu’on puisse les deviner en les lisant11 ». Leur action se réduit à très peu de chose : « une série de petites scènes filées sur un brin d’intrigue », reproduisant « parfois des aventures réelles que les spectateurs reconnaissaient facilement12 ». Au dire de Carmontelle lui-même, ses compositions étaient d’abord de simples sujets destinés à l’improvisation, puis « ce que les Italiens appellent Scenario13 », et enfin, au gré de leur succès, des textes entièrement écrits. Leurs buts n’en restaient pas moins simples et sans prétentions : amuser la bonne compagnie, peindre des galeries de caractères, dans une sorte de pendant des portraits au crayon et à l’aquarelle dans lesquels Carmontelle excellait également14, et reproduire « le ton de la conversation », sans souci de « faire de belles phrases », mais avec « un grand désir d’avoir le ton de la vérité15 ».
7Si les traits distinctifs du proverbe restent la brièveté et le caractère démonstratif, la formule adoptée par Carmontelle ne vaut pourtant pas règle générale. D’un côté, la devinette disparaît la plupart du temps, la sentence devenant le titre de la pièce ou se trouvant énoncée dans les dernières répliques par les personnages comme il arrivera chez Musset et Vigny. De l’autre, parallèlement aux productions frivoles, se développe un sous-genre plus grave : le proverbe à caractère pédagogique pour l’éducation de la jeunesse, dont la fortune embrassera tout le xixe siècle, jusqu’à la comtesse de Ségur. Françoise de Maintenon en écrivit la première pour l’édification des demoiselles de Saint-Cyr, et son exemple fut suivi par de nombreux auteurs, parmi lesquels on pourra citer Moissy, Thomas Garnier et surtout Stéphanie Félicité de Genlis, auteure de deux recueils d’un immense et durable succès, le Théâtre de société (1782) et le Théâtre à l’usage des jeunes personnes (1783)16. Certaines de ces pièces étaient destinées seulement à la lecture, d’autres étaient en revanche réellement jouées par les enfants eux-mêmes, dans un cadre familial ou scolaire, pour les instruire en les divertissant.
8Sand semblait donc tout particulièrement destinée à se mesurer avec le proverbe. Non seulement, en effet, elle anime un théâtre de société qui brille par son caractère à la fois ludique, vivant et fécond, mais ses pièces, qu’elles soient destinées à la scène publique ou privée, ont très souvent un but moral, voire didactique. Comme le note justement Martine Reid, elles rappellent par certains traits « le théâtre d’éducation du xviiie siècle (notamment celui de Mme de Genlis) », avec des personnages répondant volontiers à des « types » et des dénouements exemplaires « où toujours l’emportent le bon et le bien17 ». D’ailleurs, grâce à l’éducation reçue de sa grand-mère, encore toute imprégnée d’une certaine sociabilité d’Ancien Régime, Sand connaissait bien le genre dès l’adolescence. Dans Histoire de ma vie, elle raconte avoir lu Berquin et Genlis18, et surtout avoir joué à Nohant, vers la fin de l’été 1820, un proverbe qui reste malheureusement encore à identifier. Il s’agirait, dit-elle, de « je ne sais plus quel proverbe de Carmontelle […] arrangé à notre usage », où un certain Colin, en l’occurrence la jeune Aurore en travesti, se faisait militaire « par désespoir des caprices de [s]on amoureuse Colette19 ». Or, toutes mes recherches dans les œuvres de Carmontelle, comme déjà celles de Georges Lubin, se sont révélées infructueuses. Certes, avec le recul du temps, Sand semble ne plus se souvenir des détails et du titre de la pièce, ni sans doute du nom des personnages, puisque l’amoureuse volage était nommée Lucette dans une lettre de 1820 à Émilie de Wismes20. Aurait-elle aussi attribué de mémoire au plus célèbre auteur de proverbes l’œuvre d’un autre dramaturge ? Toujours est-il qu’elle a bel et bien joué un proverbe à Nohant dans sa première jeunesse, ce qui lui offrait un rapport privilégié avec cette pratique.
9Les proverbes qu’elle écrit bien des années après sont pourtant plutôt atypiques, et semblent s’éloigner de la tradition du xviiie siècle pour rejoindre le souffle nouveau apporté au genre par Musset avec ses célèbres pièces des années 1830-1840, de On ne badine pas avec l’amour à Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée21. Comme ceux de Musset les proverbes de Sand détournent en effet avec une grande liberté les règles du genre et se présentent comme des pièces à part entière, bien distinctes des exercices privés du théâtre de société.
10On pourrait réserver un statut à part au Pavé, petite pièce en un acte sur « la morale du cœur et les délicatesses de la conscience22 », écrite d’abord pour le théâtre de Nohant avant d’être jouée au Gymnase en 1862. Pourtant, Sand elle-même écarte pour cet ouvrage la définition de « proverbe », « qui semble indiquer la mise en action d’une idée générale23 », pour lui préférer celle de « nouvelle dialoguée », qui figure en sous-titre dès l’édition préoriginale parue dans la Revue des Deux Mondes le 15 août 1861.
11Mon analyse se bornera donc ici aux deux proverbes nommément considérés pour tels par Sand : Les Mississipiens et Un bienfait n’est jamais perdu. Pour le premier, à vrai dire, il semble que l’écrivaine ait d’abord hésité sur l’attribution à un genre spécifique. Sa correspondance en témoigne. Le 4 octobre 1839, elle écrit à Bocage, son interprète d’élection, pour traiter des conditions à demander auprès des différents théâtres et se réfère à sa pièce en l’appelant « drame » (Corr., t. IV, p. 774). Le 31 octobre, en pleine rédaction, elle écrit à Buloz : « J’ai travaillé ce soir à ma comédie laquelle comédie sera peut-être un drame au dénouement, j’y ai repris goût et je l’ai avancée. » (Corr., t. IV, p. 785) Toutefois, dès la première publication, les 15 mars et 1er avril 1840 dans la Revue des Deux Mondes, l’œuvre porte la mention de « proverbe » qui sera maintenue dans les successives éditions en volume24. Un bienfait n’est jamais perdu, comme l’indique d’ailleurs le titre lui-même, a en revanche été conçu d’emblée comme proverbe. On le trouve ainsi désigné dans l’Agenda de Sand à la date du 1er juillet 1871 : « je travaille à mon petit proverbe25 », et le lendemain : « je lis à mes enfants le petit proverbe que j’ai retrouvé dans les cartons et recopié26 » ; puis encore dans une lettre à Christine Buloz du 6 juillet, où il est question d’une offre d’envoi : « dites-moi s’il faut vous envoyer un petit proverbe que j’ai en portefeuille et qui a le mérite d’être court » (Corr., t. XXII, p. 449).
12Ces quelques lignes suffisent déjà pour constater qu’à la manière de certains parmi les plus célèbres dramaturges de son temps – Musset, Vigny ou Scribe –, Sand accorde à ses proverbes dès la phase de rédaction la même dignité qu’à ses comédies ou à ses drames. Dans un cas comme dans l’autre, en effet, le circuit de diffusion reste le même, via la Revue des Deux Mondes et les volumes de ses Œuvres complètes, et la création est envisagée dans un cadre de théâtre professionnel, voire même avec les meilleurs comédiens du temps.
13C’est le cas, notamment, pour Les Mississipiens, qu’elle destine à Pierre Bocage, acteur romantique par excellence, le célèbre créateur d’Antony, ou, pour rester chez Sand, de François le Champi. Dans la lettre déjà citée du 4 octobre 1839, elle lui accorde « pleins pouvoirs » sur son texte, lui en assure l’exclusive (« vous seul vous pouvez le jouer parce qu’il a été fait pour vous ») et l’invite à négocier une création aux Français, à la Porte Saint-Martin ou au Gymnase, où elle prétend « les mêmes conditions que Messieurs De L[a] V[igne], Sc[ribe] et Du[mas] » (Corr., t. IV, p. 773-774). Si ce projet ne vit jamais le jour et Les Mississipiens resta une pièce pour la lecture, c’est apparemment parce que Sand elle-même, après l’avoir écrite, ne la jugea pas à la hauteur d’une représentation. En témoigne une lettre à Gustave Papet, datable sans doute du 8 novembre 1839, où elle avoue : « J’ai fait une comédie qui, une fois faite, ne m’a plus semblé bonne et que je ne veux même pas proposer au comité des Français. » (Corr., t. IV, p. 791)
14Un bienfait n’est jamais perdu connut en revanche les feux de la rampe, mais sur un mode mineur et avec un succès mitigé. Sand avait d’abord songé à le confier à Francis Berton27, mais c’est finalement Larochelle qui le monta et y tint le rôle principal de Valroger au Théâtre Cluny, une petite scène de second ordre de la rive gauche dont il était alors le directeur, et que Flaubert jugeait sans ménagements un « boui-boui28 ». Le proverbe fut joué en lever de rideau du 7 novembre au 31 décembre 1872 sans attirer particulièrement l’attention : Sand elle-même ne prit pas la peine de se rendre à Paris pour le voir, et la critique, plutôt rare et mitigée, souligna tout au plus « des conversations charmantes quelquefois, agréables toujours29 », ou un « marivaudage agréable, mais peu digne en somme de la plume illustre qui s’est amusée à broder ce mince opuscule30 ».
15Ce manque de visibilité a certainement desservi les proverbes de Sand qui ne manquent cependant pas d’intérêt et gagneraient à être mieux connus. Certes, Les Mississipiens présente quelque lourdeur et surtout un anti-judaïsme consternant dans l’accumulation des clichés sur Samuel Bourset. De son côté, Un bienfait n’est jamais perdu repose sur si peu de chose qu’il n’existe que par la grâce du dialogue. Pourtant, par leur rapport problématique au proverbe lui-même, par la construction de l’intrigue et par leur dénouement teinté d’une piquante ambiguïté, ils présentent les attraits d’une indéniable originalité et contribuent au renouveau du genre du proverbe qui, bien qu’encore sous estimé, parcourt en sourdine tout le xixe siècle, depuis les succès de Théodore Leclercq dans les salons de la Restauration à l’engouement qui touche les auteurs et les publics les plus disparates sous le Second Empire31.
16Contrairement à Leclercq, qui fait systématiquement énoncer le proverbe à la dernière réplique par l’un des personnages, Sand se plaît à compliquer les rapports entre l’intrigue et la morale qu’on pourrait en tirer. Le jeu subtil, plus fin qu’il n’y paraît, autour de la maxime proverbiale est particulièrement intéressant pour Un bienfait n’est jamais perdu. Le titre est en effet un classique du genre, maintes fois exploité par des dramaturges aux talents inégaux, et semble annoncer une bluette larmoyante, pédagogique et morale. C’est du moins le cas pour une demi-douzaine de pièces du même titre que j’ai pu répertorier, écrites entre la fin du xviiie siècle et le Second Empire, sans compter un bon nombre de petites nouvelles du même acabit32. L’intrigue, fort simple et naïve, y respecte invariablement le même schéma : un personnage, sur un élan spontané de son bon cœur, en secourt un autre qui, plein de gratitude, lui rendra avant la fin de la pièce cent fois plus qu’il n’a reçu. S’agissant d’un théâtre pour l’éducation de la jeunesse, les protagonistes y sont souvent des enfants, auteurs de petits gestes quotidiens comme offrir un goûter ou une pièce de monnaie à un pauvre nécessiteux, un autre enfant ou un vieillard. Parfois, on voit en revanche des adultes ayant fait fortune revenir assurer le bonheur des bienfaiteurs qui les avaient sauvés ou recueillis dans leurs premières années. Les ficelles dramaturgiques y sont toujours transparentes dès les premières répliques, et le message moral, tout aussi simple et rigide, s’y distingue par une certaine mièvrerie.
17Rien de tel, bien sûr, chez Sand. Sa pièce met en scène un défi de séduction entre un homme et une femme du monde, mené avec brio et en pointe de langue sur un ton de marivaudage spirituel qui, comme souligné déjà par la critique du temps, se rapproche « de ces productions légères […] dues à la plume élégante d’Alfred de Musset33 », notamment Un caprice et Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée. L’intrigue y est aussi épurée à l’extrême et repose entièrement sur un dégradé de sentiments qui se déploient et évoluent au gré du dialogue, suspendus dans un temps et un espace presque abstraits, volontairement imprécis, si bien que Francisque Sarcey a pu parler de « délicieux fantômes, éclos du fond d’une cour d’amour du temps jadis, et s’escrimant avec des épées invisibles dans des espaces imaginaires34 ». Valroger, séducteur renommé et impénitent, s’est mis en tête d’attaquer la vertu de la jeune et gracieuse Anna de Louville qui, craignant sa mauvaise réputation, refuse de le recevoir chez elle. Son amie Louise de Trémont, plus âgée et sûre d’elle, lui propose d’échanger leurs rôles et de défier le libertin, dont elle semble ne pas craindre les entreprises et ne pas croire le caractère si mauvais qu’on le dit. On découvrira qu’elle avait ses bonnes raisons : Valroger, à l’occasion d’un duel, avait sauvé la vie de son jeune frère, en vertu de quoi elle est prête en échange à lui offrir la plus pure et fraternelle des amitiés :
Ce que vous voulez, ce n’est pas l’amour, vous en êtes rassasié, vous n’y tenez pas, et c’est ma vertu, c’est-à-dire ma tranquillité seule, que vous voudriez ébranler. Eh bien ! sachez que, dans les âmes fermées aux malsaines agitations de la passion folle, il y a des émotions plus douces et plus pures qu’on peut être fier d’avoir fait naître et de conserver toujours jeunes. Il n’est pas humiliant d’être maternellement aimé par une femme mûre, et il ne serait pas du tout glorieux de lui tourner ridiculement la tête35.
18Il y a donc effectivement un bienfait qui reçoit une contrepartie inattendue, mais on pourra se demander, d’un côté, si Valroger est vraiment si ravi qu’il le déclare de se voir éconduit et sagement instauré dans le rôle de vieil ami de famille, et, de l’autre, si le proverbe du titre est au fond le plus approprié à résumer la morale de la fable qui tourne plutôt autour du séducteur séduit ou berné et pourrait ressembler à un « tel est pris qui croyait prendre ». Une certaine souplesse, et sans doute un brin d’ironie, viennent donc détourner un proverbe a priori un peu trop sage qui se transforme en joute oratoire entre un champion de la conquête libertine sans amour et une adepte de l’amitié franche et désintéressée.
19Plus déconcertant est le cas des Mississipiens, qui porte le titre de proverbe tout en ne contenant pas l’ombre d’un proverbe. Le sujet, à vrai dire, s’y prêterait : il s’agit de l’histoire d’un adroit spéculateur, Samuel Bourset, juif et roturier, qui à l’époque de la Régence entre dans la bonne société en épousant une jeune aristocrate ruinée, fait fortune avec le système de Law et réussit à tirer son épingle du jeu au moment de la crise grâce à ses talents de dissimulation et de persuasion. Les Mississipiens du titre ne sont donc pas, comme on pourrait l’imaginer, une population des Amériques, mais les investisseurs français ayant placé leur argent dans la Compagnie du Mississipi, une société en commandite chargée de fouiller le fleuve du même nom à la recherche d’or. La société, fondée par Law en 1717 et étroitement liée à sa banque, émit des actions qui s’arrachèrent sans pour autant avoir une solide contrepartie en Louisiane, ce qui entraîna une bulle spéculative et, enfin, la chute de tout le système36. Sand imagine son Bourset proche de Law et directement lié à ses affaires. Au premier acte, qui se passe en 1719, on le voit vendre des actions de la Compagnie à tous les grands seigneurs de son entourage. Une année après, au deuxième et troisième acte, il est confronté à la crise du système, avec la révélation qu’il n’y a pas de mine d’or en Louisiane et le décret du 27 février 1720 interdisant la possession de plus de 500 livres en numéraire sous peine de confiscation et d’amende. Face aux investisseurs effrayés et furieux, Bourset paye d’audace, et réussit à les renvoyer renforcés dans leur confiance au système. La pièce se termine sur ce coup de théâtre, avant la banqueroute qui dans la réalité historique survint quelques mois plus tard.
20Y aurait-il un proverbe à deviner et à retenir de cette histoire ? C’est ce que se demande Regina Bochenek-Franczakowa dans un article où elle se prend au jeu suggéré jadis par Carmontelle :
Comme l’indique le titre, le proverbe serait à chercher du côté du personnage de Bourset et des autres actionnaires. Si l’on s’arrêtait au protagoniste, l’on pourrait appliquer : « Bien fin qui pourra l’attraper, Dans sa peau mourra le renard, Le renard cache sa queue, Qui veut la fin veut les moyens, Qui ne hasarde rien n’a rien ». Si c’est du côté des actionnaires dupés par Bourset, ce serait : « Abondance de biens ne nuit pas, L’appétit vient en mangeant », mais encore, « Sot qui s’y fie et On n’est jamais trahi que par les siens »37.
21Aucun proverbe ou trop de proverbes, peu importe, cela revient au fond au même. D’autant plus qu’aucune maxime ne saurait rendre pleinement compte de la complexité des enjeux de la pièce. Toutes celles qu’on vient de citer, par exemple, forcent à choisir entre le point de vue du spéculateur qui manœuvre les ressorts de l’action, et celui des investisseurs, parmi lesquels on retiendra notamment le vieux duc libertin qui convoite la fille de Bourset.
22D’ailleurs, tous les proverbes cités ne s’appliquent qu’à une partie des personnages de la pièce et qu’au problème de la spéculation financière. La référence à la fable de La Fontaine « Le laboureur et ses enfants », relevée par Marie-Claude Schapira, est plus intéressante38. Elle a le double avantage de prendre en compte l’apport à la pièce de Georges Freeman, le personnage positif qui a réellement fait fortune en Amérique grâce à son travail, et d’avoir été suggérée par Sand elle-même. Au deuxième acte, en parlant des prétendues mines d’or en Louisiane, Freeman dit en effet : « […] c’est absolument la fable du trésor caché dans le champ du laboureur. En le cherchant, on remue la terre, on la fertilise, et c’est ainsi, et non pas autrement qu’on s’enrichit en Amérique39. » Ainsi, on est sans doute invité à reconnaître comme « proverbe » sous-entendu et morale de la pièce l’adage « le travail est un trésor » qui clôt la fable40.
23Même cette proposition, si pertinente soit-elle, ne rend pourtant compte que d’une partie du contenu des Mississipiens. Elle laisse en effet de côté l’autre intrigue, familiale et amoureuse, qui est en réalité encore plus développée que l’intrigue financière. Le pivot en est toujours Samuel Bourset, ce qui assure un lien étroit entre les deux et une intime cohérence de la pièce, mais le personnage central en est plutôt sa femme, Julie de Puymonfort. Dans le prologue, qui se passe en 1703, elle est contrainte à sacrifier l’amour pur et partagé qui la lie à son cousin Léonce, gentilhomme criblé de dettes, pour épouser le financier, qui a le triple avantage d’être riche, créancier du cousin et porteur d’une lettre de cachet contre lui. Seize ans plus tard, au premier acte, on la retrouve lancée dans le grand monde, de moitié dans les spéculations de son mari, et en apparence attachée à lui de manière si exclusive qu’elle néglige sa fille Louise. Celle-ci, une jolie ingénue de quinze ans, est ainsi livrée à elle-même, ou plutôt aux sordides spéculations de son père qui n’hésite pas à la promettre à ses actionnaires en garantie des investissements les plus risqués.
24Surgit alors George Freeman, un austère philosophe antiesclavagiste venu de Louisiane, simple, droit, doué d’un franc-parler redoutable et quasiment chargé d’un rôle de justicier : c’est lui qui enlève la jeune Louise, la convainquant de se réfugier dans un couvent pour se soustraire aux spéculations paternelles, et gagnant en échange l’amour mêlé d’adoration de l’adolescente ; lui qui est choisi par Julie comme amant potentiel pour se venger de seize ans de soumission et de souffrances conjugales ; lui, enfin, qui dévoile le pot aux roses de l’affaire du Mississipi, mettant Bourset au pied du mur face à ses actionnaires. Dès les premières répliques qu’il prononce, on soupçonne d’ailleurs aisément ce qui sera confirmé au deuxième acte, à savoir qu’il n’est autre que le cousin Léonce ayant fait une modeste, mais solide fortune en Amérique. Si l’on veut, il est une deuxième sorte de Mississipien, diamétralement opposé aux spéculateurs oisifs et cupides. Inspiré probablement de Franklin, que Sand lisait et admirait41, il est le défenseur des valeurs positives telles que la liberté, l’égalité, le mépris du luxe inutile et la force patiente du travail et de la probité42. Valeurs qu’il a apprises et cultivées au Nouveau Monde, qui dans cette pièce représente beaucoup plus que le ressort galvaudé d’un ailleurs où l’on va faire fortune. En effet, entre les idéaux démocratiques du self-made man Freeman d’un côté, et les risques des spéculations boursières les plus louches de l’autre, Sand en fait ici une véritable source de renouveau et de modernité, pour le meilleur et pour le pire, qui anticipe presque la Révolution et qui n’a pas perdu de son actualité. Enfin Léonce/Freeman, grand amour de jeunesse de Julie, est aimé aussi de Louise, ce qui introduit dans la pièce l’enjeu de la rivalité amoureuse entre une mère et une fille qui s’aimaient déjà fort peu. Comme l’a souligné Regina Franczakowa, cet élément renvoie à un autre sujet possible de proverbe et, qui plus est, à une pièce de Genlis, La Mère rivale, dont la situation initiale rappelle celle des personnages de Sand, même si le dénouement en est tout autre.
25On est donc face à une pièce complexe, à la construction solide et infiniment plus raffinée que celle des proverbes d’Ancien Régime, trop mécaniquement liés à l’illustration d’un seul propos. Comme chez Musset, le proverbe prend ici des allures de grande comédie de mœurs et de caractères. Amour et argent, analyse des sentiments et critique de la société se soutiennent et s’interpénètrent de la première à la dernière scène. Les tons aussi déploient une palette fort variée, « a bitter blend of Marivaudage and Robert Macaire43 », selon le mot de Gay Manifold. Quant aux personnages, la qualité et la profondeur de leur analyse va bien au-delà de la galerie de caractères avec leurs vices ou leurs ridicules à la manière de Carmontelle. Pour Bourset, on pensera aux grands modèles de Turcaret et du Mercadet de Balzac. Mais c’est surtout le cas de Julie, qui connaît une véritable évolution au cours de la pièce : jeune amoureuse timide et soumise aux devoirs qu’on lui impose dans le prologue, femme du monde apparemment intrigante, coquette et presque froide au premier et deuxième acte, elle est fortement ébranlée par la souffrance de sa fille, qui fait ressurgir la sienne, et par la découverte des manèges douteux de son mari. Authentique héroïne sandienne, elle trouve alors la force de choisir son destin dans l’indépendance et dans un idéal de maternité qui lui apparaît soudain comme « une idée de bonheur44 » injustement méconnue jusque-là. Ce nouveau rôle lui donne le courage et en quelque sorte l’autorité pour affronter son mari et lui soustraire non seulement tout pouvoir sur leur fille, mais aussi sur elle-même :
J’ai appris des choses que je n’avais jamais soupçonnées. […] Si je restais votre dupe un jour de plus, je serais forcée de me regarder comme votre complice, car je sais que nous ne sommes plus que des spoliateurs. Souffrez que, sans manquer à mes devoirs et sans rompre le lien qui m’attache à vous, je sépare mes intérêts, mes vœux et mes habitudes des vôtres45.
26La fidélité de Sand au genre du proverbe serait donc à chercher dans la défense de certains principes moraux plutôt que dans une simple « moralité » sous forme d’aphorisme ? La fonction sociale que Sand attribuait au théâtre pourrait suffire à l’indiquer. C’est d’ailleurs ce qui me semble ressortir de l’analyse des deux pièces, qui se rejoignent notamment dans le rejet de toute histoire d’intrigue ou d’adultère pour proposer un noble et simple idéal de fidélité et de tranquillité domestique, dans une sorte de féminisme serein, courageux et maternel. Le spéculateur sans scrupules Bourset et le Don Juan endurci Valroger sont percés à jour et dénoncés par une femme sensible et volontaire, qui revendique le droit à une indépendance du cœur et de l’esprit dans la tranquillité des affections pures de la maternité et de l’amitié. Le rapport moins immédiat avec une formule qui résumerait l’action participe en ce sens du projet moral sandien, le public étant appelé à s’impliquer dans une quête du sens à donner au spectacle. Ainsi, à travers cette idéale réunion participative des spectateurs autour du proverbe, Sand reprend et renouvelle le projet de sociabilité inscrit dans le genre depuis ses origines.
27Le dénouement des deux pièces ne s’enferme pourtant pas dans le didactisme d’une moralité. Il a au contraire le mérite de rester ouvert, suspendu, laissant le champ libre à quelque ambiguïté. Dans Les Mississipiens, Bourset, qu’on croyait vaincu et condamné par l’histoire comme il l’est par sa femme, se redresse par un coup de génie à la dernière scène, et tire sa révérence, plus arrogant, mystificateur et triomphant que jamais. Dans Un bienfait, Mme de Trémont, soudain espiègle, embrasse Valroger et se sauve en riant, lui laissant le désir, inédit pour lui, de l’épouser, « eût-elle cinquante [ans]46 ». Ouverture qui nous charme aujourd’hui, mais qui était sans doute déroutante pour le public du xixe siècle.
28On pourra donc dire que dans ses proverbes, Sand réussit à faire du nouveau avec du très vieux. Elle se souvient du babillage mondain rehaussé de satire sociale inventé par Carmontelle, ainsi que du théâtre à visée didactique et morale pratiqué par Genlis et ses épigones, mais elle affine ce double héritage à la lumière de la conception romantique du proverbe, plus libre par rapport à l’intrigue et au dénouement, et finalement plus proche de la grande comédie de caractère. Le schéma désuet du proverbe, assoupli et rajeuni à la manière de Musset, lui sert ainsi de support pour défendre avec brio ses convictions personnelles. Si elle fait preuve d’un certain anachronisme assumé, en décalage par rapport aux genres à la mode de l’époque, c’est sans doute pour essayer de se rapprocher du spectateur, pour défendre un théâtre plus simple et « artisanal », comme préconisé dans l’« Avertissement » de La Nuit de Noël47. D’ailleurs, ce décalage, la délestant de tout effet de mode, confère à son écriture un caractère moins daté, délicatement intemporel. Le résultat, notamment pour Un bienfait n’est jamais perdu, est d’une agréable modernité qui mériterait l’épreuve des planches.
Notes de bas de page
1 Repris dans GSC, avec une introduction d’Olivier Bara, Michèle Fontana et Merete Stistrup Jensen, p. 53-117.
2 La définition apparaît dans la préface écrite en 1843 aux Œuvres complètes, t. XVI, Mélanges, Paris, Perrotin, 1843, p. 1.
3 Sur le théâtre de Nohant voir, notamment, R. Cuppone, Le Théâtre de Nohant, 2 vol., et O. Bara, Le Sanctuaire des illusions. George Sand et le théâtre.
4 Le mot est d’Octave Mirbeau dans « Auteur et critiques ».
5 Le Théâtre et l’Acteur, dans OA, t. II, p. 1242.
6 Ibid.
7 « Préface à Werther » (1845), p. 297.
8 C. D. Brenner, « Le développement du proverbe dramatique en France et sa vogue au xviiie siècle », p. 10.
9 Le Théâtre et l’Acteur, dans OA, t. II, p. 1240. Le récit se retrouve aussi dans Le Théâtre des marionnettes de Nohant (1876) où il est dit de plus que « le tout avait commencé par la pantomime », avec Chopin qui « tenait le piano et improvisait, tandis que les jeunes gens mimaient des scènes » (dans OA, t. II, p. 1249).
10 Carmontelle, Lettre de l’Auteur à Madame de…, dans Proverbes dramatiques, t. I, p. vi-vii.
11 Ibid., p. x.
12 C. D. Brenner, « Le développement du proverbe dramatique en France et sa vogue au xviiie siècle », p. 17. Le principe de l’intrigue minimale fondée sur un fait connu sera d’ailleurs repris et sublimé par Vigny en 1833 pour son unique proverbe Quitte pour la peur.
13 Carmontelle, Lettre de l’Auteur à Madame de…, dans Proverbes dramatiques, t. I, p. ix.
14 Portraits fort ressemblants et très prisés à l’époque. Voir, notamment, l’avis de Grimm, Correspondance littéraire, philosophique et critique, Paris, Garnier, 1877, t. V, lettre du 1er mai 1763, p. 282-283.
15 Carmontelle, Lettre de l’Auteur à Madame de…, dans Proverbes dramatiques, t. I, p. ix.
16 Sur le théâtre d’éducation et, en particulier, sur Félicité de Genlis, voir M.-E. Plagnol-Diéval, Madame de Genlis et le théâtre d’éducation au xviiie siècle.
17 M. Reid, « George Sand et le théâtre », p. 144.
18 HV, t. II, p. 627, 630 et 1036. Tous deux étaient auteurs de nombreux proverbes pédagogiques pour la jeunesse, même si, à vrai dire, Sand ne mentionne explicitement que leur œuvre narrative. Pour les lectures du xviiie siècle de Sand, voir l’article de G. Lubin, « Les auteurs du xviiie siècle dans la bibliothèque de George Sand ».
19 HV, t. II, IVe partie, chap. iii, p. 1020.
20 « Nous avons joué la comédie. J’étais Colin, Pauline, Lucette, force sentiment, qui nous/donnait grande envie de rire » (Corr., t. I, p. 34-35).
21 Rappelons qu’une version primitive de la première scène de Badine figurait parmi les papiers de Musset à Venise. Sur le sujet, voir J. Pommier, Autour du drame de Venise, p. 90-101.
22 Le Pavé, sc. xxi, p. 206.
23 « Avant-propos », dans Théâtre de Nohant, p. 159.
24 Au tome III des Œuvres illustrées de George Sand (Paris, Hetzel, 1853) et à la suite du Château des Désertes dans l’édition Michel Lévy de 1862.
25 Agendas, t. IV, p. 399.
26 Ibid.
27 Voir ses lettres du 22 juillet, 30 juillet et 8 octobre 1871 (Corr., t. xxii).
28 En 1874, Flaubert faisait représenter Le Sexe faible au Théâtre Cluny. Le 2 septembre, il écrivait à Sand : « Il va sans dire que tout le monde me blâme de me faire jouer dans un pareil boui-boui. Mais puisque les autres ne veulent pas de cette pièce, et que je tiens à ce qu’elle soit représentée […], je suis bien obligé d’en passer par là. » (G. Flaubert, Correspondance, t. IV, p. 867)
29 V. Lagoguée, Revue et gazette des théâtres, dimanche 10 novembre 1872.
30 P. de Saint-Victor, Le Moniteur universel, feuilleton du 11 novembre 1872.
31 Initié par Stéphanie Félicité de Genlis en personne à la pratique du proverbe, Théodore Leclercq en fut au xixe siècle le représentant le plus prolifique et le plus joué sur les théâtres de société. Il animait notamment celui des parents de Marie d’Agoult, tant dans leur château en Touraine que dans leur salon parisien, comme elle le raconte dans ses Souvenirs (Paris, Calmann Lévy, 1877, chap. ix, p. 124-126). Il est l’auteur de 75 proverbes, plusieurs fois réédités au cours du siècle. Quant au succès du proverbe sous le Second Empire, il semble effectivement toucher toutes les scènes et tous les publics, de la Comédie-Française, qui connaît le triomphe tardif des proverbes de salon de Musset, aux pensionnats de jeunes filles, où se jouent des proverbes moraux à l’occasion des remises des prix annuelles, en passant par le théâtre de la Présidence du Corps législatif, où le duc de Morny fait représenter un proverbe de son cru en 1861 et une adaptation de Leclercq en 1862.
32 J.-L. Gabiot de Salins, Le Goûter, ou Un bienfait n’est jamais perdu, proverbe dramatique, [1785] (s. l. n. d.) ; M. Dumersan, Le Pauvre Diable, ou Un bienfait n’est jamais perdu, comédie-vaudeville en deux actes, à Paris, chez Mme Masson, 1808 ; A. Barrière, La Sainte-Catherine, ou Un bienfait n’est jamais perdu, à-propos-vaudeville en un acte, dédié à Mlle Honorine Hart, institutrice, Paris, Person, [1851] ; M. Bourdon, Un bienfait n’est jamais perdu, proverbe, suivi de La Rosière, ou Trop parler nuit, Lille, Lefort, 1852 ; Anonyme, Un bienfait n’est jamais perdu, comédie en trois actes, dans Comédies enfantines, Paris, Narçon, 1869, p. 1-21 ; P. Lenoir, Un bienfait n’est jamais perdu, pièce dramatique en un acte pour jeunes filles, Le Mans, Répertoire des cercles, (s. d.).
33 . V. Lagoguée, Revue et gazette des théâtres, 10 novembre 1872.
34 F. Sarcey, Le Temps, 11 novembre 1872.
35 Un bienfait n’est jamais perdu, p. 928-929.
36 Voir C. Dutot, Histoire du système de John Law, 1716-1720.
37 R. Bochenek-Franczakowa, « Les Mississipiens de George Sand », p. 87.
38 Voir M.-C. Schapira, « George Sand et l’Amérique », p. 157-171. Je remercie l’auteure de m’avoir communiqué son article.
39 Les Mississipiens, acte II, sc. vi, p. 77.
40 C’était d’ailleurs pratique courante parmi les auteurs de proverbes dramatiques de se servir de vers de fables de La Fontaine en guise de proverbe. Théodore Leclercq a même transposé une fable pour la scène : Le Savetier et le financier, ou Contentement passe richesse (dans Proverbes dramatiques, nouvelle édition augmentée de proverbes inédits et précédée de notices par MM. Sainte Beuve et Mérimée, 1re série, Paris, Lebigre-Duquesne et Lecou, [1852], p. 113-133).
41 . Voir ce qu’elle écrit à Sainte-Beuve le 4 avril 1835 : « J’aurais dû m’en tenir à Franklin dont j’ai fait mes délices jusqu’à vingt-cinq ans et dont le portrait suspendu près de mon lit, me donne toujours envie de pleurer comme ferait celui d’un ami que j’aurais trahi. » (Corr., t. II, p. 861) Bernard de Mauprat aussi exprime son admiration pour Franklin et imite « la mise et les allures du bonhomme Richard » (Mauprat, édition de N. Mozet, p. 189). La description de George Freeman abonde dans le même sens : « Costume philosophique, cheveux noirs […] peignés naturellement, habit brun uni sans broderie, épée à poignée d’acier : une simplicité dans les manières qui contraste avec le ton du jour […]. » (Les Mississipiens, acte I, sc. ii, p. 45)
42 Les Mississipiens, acte II, sc. vi, p. 78.
43 G. Manifold, George Sand’s Theatre Career, p. 25.
44 . Les Mississipiens, acte II, sc. vii, p. 82.
45 Ibid., acte III, sc. vi, p. 96.
46 Un bienfait n’est jamais perdu, ouvr. cité, p. 931.
47 Théâtre de Nohant, p. 214-215.
Auteur
Chercheuse au Fonds national de la recherche suisse, et collaboratrice scientifique à l’université de Genève. Ses recherches portent sur Alfred de Musset, George Sand, et le genre du proverbe dramatique ; elle est notamment l’auteur de Musset ou la nostalgie libertine (Droz, 2007). Elle s’intéresse surtout au rapport des écrivains romantiques avec l’héritage du xviiie siècle. Sur George Sand, elle a publié : « Margherita di Navarra e George Sand » (Quaderni del CRIER, no 4, 1999) ; « Altérité et ailleurs. L’Italie dans Gabriel de George Sand » (dans Présences de l’Italie dans l’œuvre de George Sand, Moncalieri, CIRVI, 2004) ; « En marge de Byron avec les pirates : L’Uscoque » (dans La Marginalité dans l’œuvre de George Sand, PUBP, 2012) ; « Du salon à la scène : métamorphoses du proverbe chez George Sand » (dans Les Amis de George Sand, nouvelle série, no 34, 2012). Elle est chargée des éditions critiques des Mississipiens, du Pavé et d’Un bienfait n’est jamais perdu pour la réédition des Œuvres Complètes de Sand chez Honoré Champion.
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