Chapitre 4
Perception des mathématiques et de la résolution de problèmes par les enseignant·es à Genève
p. 103-132
Texte intégral
1Comme nous l’avons vu, au niveau institutionnel, le Plan d’études romand (PER) encourage très largement un enseignement par la résolution de problèmes au niveau du primaire et du secondaire I, alors que celle-ci apparaît beaucoup moins dans les programmes du Collège de Genève (filière gymnasiale du Secondaire II1). Afin de savoir comment ces injonctions sont interprétées par les enseignant·es et comment cela se traduit dans ce qu’ils déclarent de leur pratique de la résolution de problèmes en classe, nous avons construit un questionnaire que nous analysons dans ce chapitre.
2Comme tout questionnaire reposant sur du déclaratif, nous savons qu’il existe des biais par rapport aux pratiques effectives. Pour pallier cette difficulté, nous avons donc tenté d’ancrer les questions en demandant en particulier aux enseignant·es de se situer par rapport à un niveau de classe déterminé et nous avons également veillé à poser des questions précises pour dépasser les opinions et les représentations trop générales.
3Comme pour le questionnaire élève, l’élaboration des items a été faite sur la base des expériences de formateurs et de formatrices des membres de notre équipe.
4Nous avons conçu des questions pour tenter de savoir comment les problèmes sont choisis, dans quelles ressources, sur quoi porte l’attention des enseignant·es lors de leur choix, quelle fonction elles et ils leur attribuent en vue de l’apprentissage des élèves. En outre, concernant l’organisation dans la classe de l’activité de résolution de problèmes, nous tentons de savoir quelle est sa fréquence, à quels moments elle se déroule et comment s’effectue sa mise en œuvre, mais aussi quelles compétences sont visées. Enfin, sur un plan plus subjectif, en demandant des mots-clés, nous essayons de mieux comprendre les liens affectifs qui existent entre les enseignant·es et la résolution de problèmes selon qu’elles et ils se placent en tant qu’ancien·ne élève ou en tant que praticien·ne.
5Sur ces bases, nous avons regroupé les questions selon les rubriques suivantes :
- La formation, l’expérience des enseignant·es.
- L’organisation de la résolution de problèmes dans la classe.
- Les problèmes donnés aux élèves.
- Les freins à la résolution de problèmes en classe.
- Les compétences des élèves.
- Les représentations de la résolution de problèmes qu’ont les enseignant·es.
6Dans la partie suivante, nous décrivons plus précisément ce questionnaire et sa conception avant d’expliciter le recueil de données et la méthodologie d’analyse des réponses.
Questionnaire, recueil de données et méthodologie d’analyse
7D’un point de vue pratique, nous avons limité la longueur du questionnaire afin que la durée nécessaire pour y répondre ne dépasse pas vingt minutes et nous avons utilisé le logiciel Qualtrics de façon à le rendre accessible en ligne (le questionnaire se trouve en e-Annexe 3).
8La première rubrique du questionnaire concerne la formation et l’expérience professionnelle des enseignant·es afin d’avoir une idée de la représentativité de notre échantillon. Puis nous proposons une question de l’ordre de l’affect qui est différente selon que l’on s’adresse à des enseignant·es spécialistes du secondaire ou généralistes du primaire. Pour les enseignant·es du primaire, nous leur demandons de se prononcer (selon une échelle de Likert) sur « Moi j’aime les mathématiques » et de nous dire le niveau qu’ils estiment avoir eu en tant qu’élève (« faible », « moyen », « bon2 » ou « très bon »). Pour le secondaire, nous leur demandons simplement de se prononcer sur la seule proposition : « Moi élève j’aimais résoudre des problèmes ».
9Les rubriques 2 à 5 utilisent une échelle de Likert sur quatre points en accord (Tout à fait d’accord – Plutôt d’accord – Plutôt pas d’accord – Pas du tout d’accord) ou en fréquence (Toujours – Souvent – Parfois – Jamais) et nous interrogeons les enseignant·es sur les thématiques suivantes :
- L’organisation de la résolution de problèmes en classe :
- « Dans ma classe, les élèves résolvent des problèmes… » permet d’évaluer approximativement la fréquence de la résolution de problème dans la classe de mathématiques et de déterminer si conformément au programme d’enseignement la résolution de problèmes est effective dans les classes.
- « Dans ma classe, je propose des problèmes à mes élèves… » porte sur les moments de la résolution de problèmes par rapport à un chapitre ou une séquence et sur la fonction des problèmes pour les élèves. Nous cherchons notamment à déterminer les parts respectives des problèmes de réinvestissement, d’introduction et des problèmes pour chercher.
- « Dans la mise en œuvre de la résolution de problèmes, en classe… », nous cherchons des éléments liés à l’organisation, aux interventions et aux aides possibles en résolution de problèmes.
- Le choix des problèmes :
- « Quand je donne un problème de mathématiques à mes élèves, je fais attention à ce que… » prend en considération des éléments qui ont orienté le choix des problèmes par les enseignant·es comme la formulation, la quantité de données, le contexte du problème.
- « Pour ma classe je choisis des problèmes… » permet de déterminer la provenance des problèmes ou la manière dont le choix a été fait.
- Les difficultés pour les enseignant·es :
- « Dans ma classe, des raisons freinent ma pratique de la résolution de problèmes avec les élèves… ». Par cette question nous cherchons à déterminer ce qui pourrait expliquer que les enseignant·es ne proposent pas (ou peu) de problèmes dans leurs classes.
10Les deux dernières rubriques comportent des questions ouvertes qui visent, d’une part, à déterminer quelles sont les compétences que les enseignant·es indiquent vouloir faire acquérir à travers la résolution de problèmes et, d’autre part, à mieux cerner comment elles et ils perçoivent affectivement la résolution de problèmes. Pour ce dernier point nous leur avons demandé de donner deux mots-clés, qu’elles et ils associent à la résolution de problèmes lorsqu’elles et ils se positionnent en tant qu’ancien·ne élève ou en tant qu’enseignant·e. Enfin, le questionnaire se termine en les interrogeant pour savoir si leurs réponses dépendent vraiment de la classe retenue, notre objectif étant de vérifier si les réponses sont principalement attachées au niveau choisi ou s’il est possible de généraliser les réponses données à tous les niveaux.
11Nous avons demandé à tous les directeurs et directrices des établissements primaires et secondaires I et tous les collèges (secondaire II gymnasial) de Genève, de transmettre aux enseignant·es le lien pour répondre au questionnaire sur la base du volontariat. Nous avons obtenu un total de 130 réponses réparties de façon équitable dans les trois ordres d’enseignement comme il est indiqué dans le tableau 9 ci-après.
Tableau 9. Répartition des réponses selon les ordres d’enseignement
Réponses | Primaire | Secondaire I (CO) | Secondaire II (Collège) |
Total | 43 | 41 | 46 |
Très incomplètes | 5 | 3 | 7 |
Exploitables | 38 | 38 | 39 |
12Nous avons mené l’analyse statistique des réponses avec les logiciels SPSS et Excel. Nous avons utilisé les statistiques descriptives (répartition des réponses, fréquences, moyennes, radars des moyennes, etc.) afin de faire apparaître des éléments des pratiques des enseignant·es.
13Pour traiter des compétences visées et des mots-clefs cités par les enseignant·es sur la perception des problèmes, nous avons identifié a priori (et complété a posteriori) des catégories en indiquant le nombre de fois où les termes sont apparus. Nous avons poursuivi en calculant la fréquence d’occurrence de chaque catégorie afin d’obtenir un indicateur de fréquence.
Résultats et discussion
14Dans cette partie, nous commençons par décrire, analyser et discuter les résultats des premières questions par des méthodes de statistiques descriptives. Puis, nous présentons et analysons les tableaux de compétences et de mots-clés obtenus.
Formation et expérience professionnelle
15L’expérience professionnelle des enseignant·es interrogé·es varie sur tout le spectre proposé (de moins de 1 an à plus de 10 ans), mais avec davantage d’enseignant·es expérimenté·es : plus de 10 ans pour 66 %, comprise entre 5 et 10 ans et entre 1 et 5 ans pour 16 % dans les deux cas, et inférieure à 1 an pour 3 %. Tou·tes déclarent avoir suivi une formation professionnelle dans un établissement de formation d’enseignant·es.
16Au primaire, 42 % sont issu·es de la Formation des enseignant·es du primaire3 (FEP), 26 % de la Licence mention enseignement (LME), 11 % ont suivi des Études pédagogiques et 21 % ont suivi une autre formation, par exemple dans un autre canton ou un pays étranger (tableau 10).
Tableau 10. Tableau croisé formation et expérience des enseignant·es du primaire
Moins d’un an | Entre 1 et 5 ans | Entre 5 et 10 ans | Plus de 10 ans | ||
Formation suivie | Études pédagogiques | 0 | 0 | 1 | 3 |
LME | 0 | 0 | 2 | 14 | |
FEP | 1 | 6 | 2 | 1 | |
Autres | 0 | 0 | 1 | 7 |
17De même au secondaire I, l’expérience professionnelle est de plus de 10 ans pour 50 % d’entre elles et eux, comprise entre 5 et 10 ans pour 13 % et entre 1 et 5 ans pour 32 % et elle est inférieure à 1 an pour 5 %. 63 % sont issu·es de la Formation universitaire des enseignant·es du secondaire4 (MASE), 29 % de l’Institut de Formation des maîtres de l’enseignement secondaire (IFMES) et 8 % ont suivi une autre formation, par exemple dans un autre canton ou à l’étranger (tableau 11). Environ 60 % enseignent au moins une autre matière en plus des mathématiques.
Tableau 11. Tableau croisé formation et expérience des enseignant·es du secondaire I
Formation suivie | Moins de 1 an | 1 à 5 ans | 5 à 10 ans | Plus de 10 ans |
IUFE (MASE) | 2 | 12 | 5 | 5 |
IFMES | 0 | 0 | 0 | 11 |
Autres | 0 | 0 | 0 | 3 |
18Enfin au secondaire II, qui ne concerne dans notre étude que la filière gymnasiale, c’est-à-dire le Collège de Genève (comme pour le questionnaire élève), l’expérience professionnelle est de plus de 10 ans pour 46 % des enseignant·es, comprise entre 5 et 10 ans pour 21 % et entre 1 et 5 ans pour 33 %. 62 % sont issus de la Formation universitaire des enseignant·es (MASE), 28 % de l’IFMES et 10 % ont suivi une autre formation (tableau 12).
Tableau 12. Tableau croisé formation et expérience des enseignant·es au secondaire II
Formation suivie | 1 à 5 ans | 5 à 10 ans | Plus de 10 ans |
IUFE (MASE) | 13 | 8 | 3 |
IFMES | 0 | 0 | 11 |
Autres | 0 | 0 | 4 |
Relation des enseignant·es avec les mathématiques et la résolution de problèmes
19Au primaire, très majoritairement (92 %) les enseignant·es déclarent aimer les mathématiques (29 % sont « plutôt d’accord » et 63 % « tout à fait d’accord », tableau 13).
Tableau 13. Tableau croisé, pour les enseignant·es du primaire, entre les rubriques « Moi et les mathématiques » et « Moi élève »
Moi élève – J’estime que mon niveau en mathématiques était | Total | |||||
Faible | Moyen | Bon | Très bon | |||
J’aime les mathématiques | Pas du tout d’accord | 1 | 0 | 0 | 0 | 1 |
Plutôt pas d’accord | 1 | 1 | 0 | 0 | 2 | |
Plutôt d’accord | 0 | 4 | 5 | 2 | 11 | |
Tout à fait d’accord | 0 | 4 | 9 | 11 | 24 | |
Total | 2 | 9 | 14 | 13 | 38 |
20Par ailleurs, en pourcentage, seulement 5 % estiment que leur niveau de mathématiques en tant qu’élève (rubrique « Moi élève ») était faible, 24 % moyen, 37 % bon et 34 % très bon. Ainsi, environ 70 % des enseignant·es du primaire interrogé·es semblent avoir un rapport plutôt positif avec les mathématiques (on ne peut pas exclure que les enseignant·es qui aiment bien les mathématiques soient sur-représenté·es dans celles et ceux qui ont bien voulu répondre à notre questionnaire). De plus, comme nous pouvions nous y attendre en comparant les réponses des deux rubriques (tableau 13), nous constatons que plus le niveau estimé est faible, moins les enseignant·es sont en accord avec le fait d’« aimer les mathématiques ».
21Au secondaire, sachant que les enseignant·es de mathématiques ont choisi d’enseigner cette discipline, nous les avons interrogés plus particulièrement pour savoir si elles et ils aimaient la résolution de problèmes. Quasiment trois quarts des enseignant·es du secondaire I (71 %) et du secondaire II (74 %), déclarent avoir, soit plutôt ou tout à fait, aimé résoudre des problèmes en tant qu’élève.
22Avant de passer à l’analyse des rubriques suivantes, signalons que concernant le degré choisi par chaque enseignant·e pour répondre au questionnaire, nos données montrent que les choix effectués représentent tous les degrés de tous les ordres d’enseignement. Les réponses couvrent donc l’ensemble de la scolarité à Genève.
Organisation de l’activité de résolution de problème
23Les résultats montrent (figure 18) que la fréquence moyenne de la résolution de problèmes en classe diminue au fil des ordres d’enseignement, passant d’une majorité de « au moins une fois par semaine » au primaire, à un fléchissement vers « au moins deux fois par mois » au secondaire I, et à une majorité de « quelques fois dans l’année » au secondaire II (voir détails ci-dessous).
24Ce résultat semble étonnant dans la mesure où il va à l’encontre de l’idée que la résolution de problèmes est une compétence qui devrait se développer avec la maturation des élèves. Une explication peut venir de la nature des ressources à disposition des enseignants à Genève. En effet, au primaire et au secondaire I, les moyens d’enseignement romands, essentiellement constitués de problèmes, sont les seules ressources officielles et sont très utilisés, surtout au primaire. On retrouve également cette culture de la résolution de problèmes dans les intitulés du PER qui régit la scolarité du primaire et du secondaire I. Au secondaire II, il n’existe pas de manuel officiel et les programmes mettent moins l’accent sur la résolution de problèmes (voir chapitre 2 de ce livre).
25Par ailleurs, ceci se reflète également dans les évaluations officielles. En effet, les évaluations communes au primaire « sont composées pour moitié de situations-problèmes, et pour moitié des exercices d’application » (Directive sur l’évaluation des compétences et des connaissances des élèves, école primare5, p. 8), c’est donc un choix propre à inciter les enseignant·es à faire résoudre des problèmes à leurs élèves. Au secondaire I, pour les évaluations communes, il est précisé qu’« on veillera non seulement à tester les outils mais aussi à les mobiliser dans le cadre de problèmes plus complexes » (Clarification sur les évaluations au cycle d’orientation6, p. 3). Enfin, au secondaire II, où il n’existe pas d’évaluations communes, l’épreuve écrite de la maturité est constituée de questions/exercices et ne contient pas toujours de problèmes. Ces raisons peuvent expliquer la plus faible fréquence obtenue au secondaire II.
26Il semble donc qu’il y ait des cultures assez distinctes par rapport à la résolution de problèmes entre les trois ordres d’enseignement. Rappelons que ce résultat est également apparu dans le questionnaire élève où nous avons vu dans le chapitre précédent que la résolution de problèmes était de moins en moins présente au fil des ordres d’enseignement. On peut donc faire l’hypothèse d’une certaine robustesse de ce résultat même si ce ne sont que des déclarations.
27À présent, examinons les réponses relatives aux moments de la classe où les enseignant·es proposent de la résolution de problèmes. Nous commençons par regarder la répartition des réponses en fonction de l’ordre d’enseignement (figures 19, 20 et 21), puis le radar des moyennes (figure 22).
28Ces réponses montrent que l’activité de résolution de problèmes semble avoir lieu le plus fréquemment à la fin d’un chapitre/séquence et le moins souvent en dehors des chapitres, quel que soit l’ordre d’enseignement. Si la résolution de problèmes est souvent ou très souvent utilisée en début de chapitre par la moitié des enseignant·es du primaire, cela tombe à un tiers au secondaire I ou II. Autrement dit les problèmes proposés aux élèves sont avant tout des problèmes d’application permettant de mobiliser, de réinvestir des connaissances, et minoritairement des problèmes d’introduction d’une notion ou d’entraînement à la résolution de problème hors chapitre. Néanmoins, ces faits sont à nuancer selon les ordres d’enseignement. En effet, au primaire, la résolution de problèmes est aussi fréquente tout au long d’un chapitre/séquence, ce qui semble dénoter un enseignement par la résolution de problèmes et vient corroborer ce que nous avons vu plus haut. Globalement, les résultats sur les moyennes montrent la même tendance que le résultat de l’item précédent sur la diminution au fil de la scolarité de l’usage de la résolution de problèmes, à tous les moments de l’étude et en particulier en introduction d’un nouveau concept.
29Ces résultats sont très semblables à ceux obtenus dans une étude à large échelle menée en France sur les pratiques enseignantes en fin de primaire en 2019 par la Direction de l’évaluation de la prospective et de la performance (Allard et coll., 20217) où environ la moitié des enseignant·es proposent des problèmes en introduction ou pour apprendre à chercher.
30Nous nous sommes également intéressé·es à la fonction de cette activité pour les élèves à travers la rubrique « Dans ma classe, je propose des problèmes à mes élèves pour… ». Afin de mener notre analyse, nous avons classé dans le tableau 14 ci-dessous les réponses par fréquences décroissantes et mis entre parenthèses le résultat de la somme des pourcentages pour « souvent » et « toujours ».
Tableau 14. Répartitions des réponses de la rubrique « Dans ma classe, je propose des problèmes à mes élèves pour… »
Primaire | Secondaire I | Secondaire II |
Pour les habituer à chercher (95 %) | Pour donner du sens aux concepts mathématiques (85 %) | Pour donner du sens aux concepts mathématiques (67 %) |
Pour réinvestir des connaissances mathématiques (89 %) | Pour les habituer à chercher (74 %) | Pour les habituer à chercher (57 %) |
Pour donner du sens aux concepts mathématiques (81 %) | Pour réinvestir des connaissances mathématiques (73 %) | Pour les motiver (47 %) |
Pour évaluer leurs connaissances (61 %) | Pour les motiver (71 %) | Pour réinvestir des connaissances mathématiques (41 %) |
Pour les motiver (56 %) | Pour évaluer leurs connaissances (55 %) | Pour évaluer leurs connaissances (26 %) |
31Ce tableau montre des différences sensibles entre les ordres d’enseignement. Le classement au primaire est différent de celui aux secondaires I et II qui eux, par contre, sont très semblables. Toutefois les fréquences au secondaire I, sont toutes supérieures à celles du secondaire II.
32Le résultat le plus probant est le score très élevé qu’obtient « Les habituer à chercher » au primaire (95 %) qui tombe à 74 % au secondaire I et 57 % au secondaire II. Ce résultat est assez surprenant, car on pourrait penser au contraire qu’apprendre à chercher est d’autant plus important qu’on avance dans la scolarité. « Donner du sens aux concepts mathématiques » est globalement le plus uniformément mis en avant dans tous les degrés avec, cependant, un taux beaucoup moins élevé au secondaire II qu’au secondaire I (et même au primaire), ce qui est aussi assez surprenant puisque les connaissances mathématiques sont plus élaborées au secondaire II et pourraient justement bénéficier d’une approche par la résolution de problèmes. Ces résultats sont à corréler avec le faible pourcentage obtenu au secondaire II de la fonction « Réinvestir des connaissances mathématiques dans les problèmes » et avec le fait que les problèmes sont peu utilisés en évaluation.
33Enfin, l’usage des problèmes pour motiver les élèves est plus fréquent au secondaire I qu’au primaire et au secondaire II. Ceci atteste sans doute du fait que les enseignant·es du secondaire I ont davantage besoin de motiver leurs élèves en mathématiques. En effet les élèves en début d’adolescence n’ont plus l’enthousiasme des élèves du primaire et tou·tes ne seront pas sélectionné·es pour aller au collège (secondaire II). Par ailleurs, l’ensemble de ces résultats semblent mettre en évidence qu’alors que les élèves ont été habitué·es à la résolution de problèmes au primaire, celle-ci est moins utilisée dans les autres ordres d’enseignement.
34Ensuite, nous avons proposé dans la rubrique « Dans la mise en œuvre de la résolution de problèmes, en classe… » six items visant à mieux cerner comment les activités de résolution de problèmes sont gérées par les enseignant·es. Là encore, le radar des moyennes sur cette mise en œuvre dans la classe (figure 23), montre des pratiques déclarées au primaire légèrement différentes de celles aux secondaires I et II qui se ressemblent beaucoup. Les valeurs des moyennes sont comprises entre 1,5 et 3,5, entre « presque jamais » et « très souvent », mais elles ne permettent pas de rendre compte de la proportion d’enseignant·es concerné·es.
35C’est pourquoi, pour affiner notre analyse, nous donnons ci-dessous la répartition des réponses (tableau 15). Nous les avons classées en fonction de leur fréquence décroissante, avec entre parenthèses la somme des pourcentages des réponses « souvent » et « toujours ».
Tableau 15. Répartition des réponses sur la mise en œuvre de la résolution de problèmes en classe
Primaire | Secondaire I | Secondaire II |
J’organise une mise en commun pour que les élèves… (86 %) | Je garde un temps pour conclure et mettre en avant… (92 %) | Je garde un temps pour conclure et mettre en avant… (77 %) |
Je garde un temps pour conclure et mettre en avant… (78 %) | Je fais travailler les élèves en groupes (60 %) | Je laisse au moins 10 min sans intervenir (67 %) |
Je laisse au moins 10 min sans intervenir (73 %) | Je laisse au moins 10 min sans intervenir (50 %) | Je fais travailler les élèves en groupes (62 %) |
Je fais travailler les élèves en groupes (58 %) | J’organise une mise en commun pour que les élèves… (47 %) | J’organise une mise en commun pour que les élèves… (49 %) |
Au cours de la recherche, c’est moi qui valide… (43 %) | Au cours de la recherche, c’est moi qui valide… (37 %) | Au cours de la recherche, c’est moi qui valide… (24 %) |
Je donne des aides dès le début de la recherche (11 %) | Je donne des aides dès le début de la recherche (13 %) | Je donne des aides dès le début de la recherche (8 %) |
36Dans tous les ordres, on note un très fort pourcentage indiquant que les enseignant·es gardent du temps pour pouvoir conclure et mettre en avant ce qui est important. Néanmoins, au primaire on remarque qu’arrive en tête l’organisation d’une mise en commun pour permettre aux élèves de présenter leur travail qui, avec 86 % de réponses « souvent » et « toujours », est quasiment le double des mêmes réponses aux secondaires I (47 %) ou II (49 %). Ce dernier résultat peut laisser penser qu’au primaire les élèves ont davantage la parole lors de la mise en commun. Il faut toutefois se garder de conclusions trop hâtives, car il se peut qu’au secondaire les enseignant·es laissent les élèves prendre la parole à d’autres moments de la recherche. Ce résultat est à mettre en rapport avec le pourcentage décroissant de la validation assumée par l’enseignant·e lors de la recherche, en diminution du primaire (43 %) au secondaire II (24 %). Ces différences peuvent peut-être s’expliquer par la vision de la résolution de problèmes comme outil (donner du sens aux contenus) au secondaire I et II, ce qui invite les enseignant·es à mettre davantage en avant des savoirs mathématiques alors qu’au primaire, comme la résolution de problèmes a comme but principal d’« habituer les élèves à chercher » (voir l’item précédent), il y aurait alors moins d’éléments à institutionnaliser.
37Par ailleurs, on peut constater trois caractéristiques communes : le travail de groupe est plébiscité à environ 60 % ; les enseignant·es (entre la moitié et les trois quarts) laissent au moins 10 minutes sans intervenir et très peu donnent des aides dès le début de la recherche.
Freins potentiels à la pratique de résolution de problèmes
38Nous nous intéressons maintenant aux freins éventuels à la pratique de la résolution de problèmes en classe. Commençons par donner le radar des moyennes des réponses (figure 24) :
39Comme nous pouvions le prévoir, le frein le plus fort en moyenne est celui du temps disponible, au secondaire I et encore plus au secondaire II. Cependant, au primaire, la contrainte du temps semble être un frein pour moins d’un tiers des répondant·es et c’est la difficulté à gérer l’hétérogénéité des élèves qui apparaît en tête. Par ailleurs, au primaire, les valeurs des moyennes obtenues sont toutes au-dessous de 2,5 ce qui semble attester qu’il n’y pas d’énormes freins à la résolution de problèmes à ce niveau d’enseignement à Genève, en tout cas pour les enseignant·es qui ont répondu à notre enquête.
40Environ un tiers des enseignant·es du secondaire II interrogé·es semblent penser que la résolution de problèmes est moins efficace pour faire passer les notions, bien plus qu’aux autres ordres. Cela semble traduire le sentiment que le contenu mathématique à enseigner au secondaire II peut moins facilement se comprendre par la résolution de problèmes, peut-être parce qu’il est plus formel avec une part importante de définitions, théorèmes, etc.
41Enfin, contrairement à ce que l’on aurait pu craindre, il est à noter que les items sur des comportements négatifs d’élèves ne sont pas majoritairement choisis, ce qui est un point positif. Mais il y a tout de même environ un quart des enseignant·es des secondaires I et II qui mettent en avant que les élèves ne produisent rien et ne s’impliquent pas dans la résolution de problèmes, proportion assez élevée. Au secondaire I, cette proportion est renforcée par le fait que 21 % des enseignant·es déclarent que les élèves sont trop dissipé·es, trop inattentifs et inattentives, alors qu’elles et ils ne sont que respectivement 11 % au primaire et 13 % au secondaire II à sélectionner cette réponse. On reconnaît là une des difficultés du public du secondaire I, déjà adolescent et pas encore motivé pour des études comme peuvent l’être les élèves qui continuent au collège (secondaire II).
Choix des problèmes
42Nous avons ensuite tenté de mieux comprendre comment et où les enseignant·es choisissent les problèmes. Pour notre analyse, nous avons classé la répartition des réponses des rubriques « Dans ma classe, je choisis des problèmes… » et « Quand je donne un problème de mathématiques à mes élèves, je fais attention à ce que… » en fréquence décroissante à l’intérieur de deux tableaux, un par rubrique. La fréquence a été établie en groupant le pourcentage des réponses « souvent » et « toujours » que nous avons fait apparaître entre parenthèses dans le tableau 16 et le tableau 17 ci-après.
Tableau 16. Répartitions des réponses de la rubrique « Dans ma classe, je choisis des problèmes… »
Primaire | Secondaire I | Secondaire II |
1. dans les MER (87 %) | 1. dans les MER (55 %) | 1. dans des ressources locales collectives (70 %) |
2. que j’invente (42 %) | 2. que j’invente (50 %) | 2. sur des sites internet (41 %) |
3. en collaboration avec mes collègues (39 %) | 3. sur des sites internet (32 %) | 3. dans Sésamaths ou d’autres manuels étrangers (38 %) |
4. sur des sites internet (32 %) | 4. dans des manuels étrangers (29 %) | 4. provenant de ma formation (18 %) |
5. dans des manuels étrangers (18 %) | 5. en collaboration avec mes collègues (29 %) | 5. que j’invente (8 %) |
6. provenant de ma formation (5 %) | 6. provenant de ma formation (21 %) |
43Au primaire comme au secondaire I, ce sont les ressources officielles, à savoir les moyens d’enseignement romands (MER) qui arrivent en tête, avec cependant un pourcentage nettement plus grand au primaire. Ceci ne nous étonne pas, car on sait qu’à Genève les MER, seule ressource officielle, sont populaires au primaire, mais un peu moins au secondaire I, où depuis leur rénovation en 2011 ils ont toutefois été mieux acceptés par rapport à la situation précédente. Au secondaire II, où il n’y a pas de manuel officiel, on voit que les ressources collectives locales sont plébiscitées. Ces ressources sont en général des polycopiés créés collectivement, ce qui explique peut-être au moins en partie le fait que seuls 8 % des enseignant·es du secondaire II disent inventer les problèmes, car leur activité créatrice a éventuellement pu s’exercer dans la production avec des collègues de ces ressources. Mentionnons aussi que suivant les contenus à enseigner, la création de problèmes peut s’avérer plus ardue. Au primaire et au secondaire I, l’invention est la deuxième source, ce qui montre une bonne implication des enseignant·es. Les sites internet recueillent un large suffrage, autour du tiers (et même davantage au secondaire II) à tous les ordres d’enseignement. Les manuels étrangers sont aussi populaires et en hausse avec l’ordre d’enseignement, surtout Sésamaths au secondaire II qui possède une édition spécifique romande. La collaboration avec les collègues est assez présente au primaire et au secondaire I pour au moins un tiers des enseignant·es. Au secondaire II cette composante est certainement incluse dans l’utilisation des ressources locales collectives.
44Ensuite, nous avons proposé dans la rubrique « Quand je donne un problème de mathématiques à mes élèves, je fais attention à ce que… » toute une variété de critères dépendant du texte et de la forme de son énoncé.
Tableau 17. Répartition des réponses de la rubrique « Quand je donne un problème de mathématiques à mes élèves je fais attention à ce que… »
Primaire | Secondaire I | Secondaire II |
1. l’énoncé soit en lien avec la vie courante/réelle (79 %) | 1. la méthode de résolution ne soit pas immédiate (74 %) | 1. la méthode de résolution ne soit pas immédiate (72 %) |
2. l’énoncé soit ludique et attractif (76 %) | 2. l’énoncé soit en lien avec la vie courante/réelle (71 %) | 2. l’énoncé soit en lien avec la vie courante/réelle (59 %) |
3. s’il y a plusieurs questions, l’énoncé soit bien découpé (75 %) | 3. l’énoncé soit ludique et attractif (63 %) | 3. l’énoncé soit ludique et attractif (57 %) |
4. la méthode de résolution ne soit immédiate (52 %) | 4. s’il y a plusieurs questions, l’énoncé soit bien découpé (47 %) | 4. s’il y a plusieurs questions, l’énoncé soit bien découpé (33 %) |
5. l’énoncé contienne aussi des données inutiles (42 %) | 5. l’énoncé contienne aussi des données inutiles (24 %) | 5. L’énoncé contienne aussi des données inutiles (13 %) |
45Le classement au primaire est différent de ceux aux secondaires I et II qui, eux, sont identiques, mais avec des fréquences assez différentes. Nous pouvons faire le même constat en nous appuyant sur le radar des moyennes pour cette rubrique (figure 25).
46Le lien avec la vie courante ainsi que l’aspect ludique et attractif sont bien représentés, avec toutefois un pourcentage décroissant surtout entre les secondaires I et II, ce qui peut sembler surprenant avec ce qu’en perçoivent les élèves (voir chapitre précédent). Au secondaire, le caractère non immédiat de la méthode de résolution est un critère essentiel (cité par presque les trois quarts des enseignant·es) alors que cela est moins net au primaire (à peine plus de la moitié). Ceci peut aller de pair avec l’intérêt très nettement décroissant pour le fait que l’énoncé soit bien découpé avec plusieurs questions.
47On voit donc qu’entre le primaire d’une part et les secondaires I et II d’autre part, la résolution de problèmes passe d’une activité avant tout ludique et attractive en lien avec la vie courante, à une activité visant la mise en œuvre de connaissances mathématiques.
Compétences visées par la résolution de problèmes
48Il s’agissait ici d’une question ouverte puisque nous avons demandé aux enseignant·es de citer les deux compétences principales qu’elles et ils visent dans la résolution de problèmes avec leurs élèves. Parmi l’ensemble des réponses, nous avons identifié trois grandes catégories sachant que nous avons considéré le terme « compétence » dans son sens le plus large. Néanmoins, un pourcentage non négligeable de réponses n’a pas pu être exploité, car les termes cités ne se rattachaient en rien à une compétence (à tous les ordres d’enseignement). Une fois ces cas exclus, on trouve :
- des éléments en lien avec les notions et outils mathématiques ; la mise de sens des concepts, l’établissement de liens entre les notions, le choix, l’application et l’entraînement d’outils et de notions mathématiques, ou encore le développement de la logique. On trouve par exemple : « être en mesure de mobiliser les outils théoriques vus en classe », « mise de sens des notions : dimension outil du nouveau savoir », « utiliser la bonne opération ».
- des éléments centrés sur la résolution de problèmes, en lien notamment avec la compréhension et la représentation du problème, au sens de Julo (1995) : « se représenter la situation », « comprendre l’énoncé » ; mais aussi en lien avec la modélisation, le raisonnement et les stratégies comme « recherche de stratégies », « structurer un raisonnement », « modéliser », etc.
- et enfin des éléments associés à des compétences transversales relevant de nombreux aspects : la réflexion, la persévérance, la collaboration, l’organisation, l’autonomie, la communication, la créativité, etc.
49Sur la base de ces catégories, nous donnons dans le tableau 18 une vue d’ensemble des types de réponses obtenues avec leurs fréquences (pourcentages calculés sur le nombre de réponses donc deux fois celui des enseignant·es ayant répondu).
Tableau 18. Tableau de synthèse des compétences visées par les enseignant·es en résolution de problèmes, par ordre d’enseignement
Primaire | Secondaire I | Secondaire II | |||||
Éléments centrés sur la résolution de problèmes | Se représenter, comprendre le problème | 14,7 % | 39,7 % | 5,8 % | 30,4 % | 5,4 % | 23 % |
Modéliser | 1,5 % | 5,8 % | 9,5 % | ||||
Raisonner | 7,3 % | 10 % | 4 % | ||||
Mettre en œuvre une démarche, une stratégie de résolution de problèmes | 16,2 % | 8,8 % | 4,1 % | ||||
Éléments en lien avec les notions et outils mathématiques | Mettre du sens sur les notions mathématiques | 4,4 % | 30,7 % | 1,5 % | 24,5 % | 6,8 % | 21,7 % |
Faire des liens entre les concepts | 0 | 7 % | 4 % | ||||
Choisir les bons outils | 4,4 % | 3 % | 1,4 % | ||||
Appliquer, réinvestir, construire, entraîner les notions et outils | 19 % | 11,6 % | 9,5 % | ||||
Développer la logique | 2,9 % | 1,4 % | 0 % | ||||
Éléments en lien avec les compétences transversales | Recherche | 3 % | 25,2 % | 3 % | 43,7 % | 6,8 % | 47,2 % |
Réflexion | 4,4 % | 5,8 % | 5,4 % | ||||
Persévérance | 3 % | 1,5 % | 4 % | ||||
Organisation | 1,5 % | 5,8 % | 2,7 % | ||||
Communication | 1,5 % | 4,4 % | 2,7 % | ||||
Autonomie | 2,9 % | 10 % | 13,5 % | ||||
Lecture | 2,9 % | 0 % | 0 % | ||||
Collaboration | 0 % | 4,4 % | 5,4 % | ||||
Originalité, créativité | 0 % | 2,9 % | 4 % | ||||
Réflexivité | 0 % | 1,5 % | 2,7 % | ||||
Autres compétences | 6 % | 4,4 % | 0 % | ||||
Autres (inclassables) | 4,4 % | 1,4 % | 8,1 % |
50L’analyse par ordre d’enseignement montre qu’au primaire, les enseignant·es accordent pour beaucoup de l’importance à la représentation et la compréhension du problème (14,7 % des réponses), à la mise en œuvre d’une démarche ou d’une stratégie de résolution (16,2 %), et à l’application et au réinvestissement de notions et d’outils mathématiques (19 %).
51Au secondaire I, il y a moins de consensus des enseignant·es répondant·es sur les compétences visées. Seules ressortent un peu plus largement l’autonomie (10 % des réponses), le raisonnement (10 %) et, comme au primaire, la mise en œuvre d’une démarche ou d’une stratégie de résolution (8,8 %), et l’application et le réinvestissement de notions et d’outils mathématiques (11,6 %). On retrouve, en quatrième élément le plus cité, avec 7 % des réponses, l’idée d’amener les élèves à faire des liens entre les concepts, les notions mathématiques, ce qui n’apparaît pas du tout au primaire et moins au secondaire II (4,1 %).
52Au secondaire II, la compétence la plus largement plébiscitée par les enseignants (13,5 % des réponses) est l’autonomie qui serait travaillée via la résolution de problèmes. La modélisation apparaît aussi comme un enjeu important (9,5 %), plus qu’au secondaire I (5,8 %) et largement plus qu’au primaire (1,5 %). Comme dans les deux autres ordres d’enseignement, l’application et le réinvestissement de notions et d’outils mathématiques restent un objectif central (9,5 %).
53Certaines différences entre les ordres d’enseignement ressortent de ce tableau et nous semblent significatives. De manière générale, les éléments en lien avec la résolution de problèmes perdent de l’importance au fur et à mesure de l’avancée dans la scolarité. C’est aussi, bien que dans une moindre mesure, le cas pour ce qui touche au lien avec les notions et outils mathématiques. Enfin, ce sont les compétences transversales qui gagnent quant à elles en importance avec l’avancée de l’ordre d’enseignement.
54Plus précisément, concernant les aspects relatifs à la résolution de problèmes, on remarque que la représentation et la compréhension du problème constituent un enjeu d’enseignement et d’apprentissage souvent cité au primaire, mais largement moins au secondaire. De même, la mise en œuvre d’une démarche ou d’une stratégie de résolution semble être un enjeu central au primaire, significatif au secondaire I et peu cité au secondaire II. À l’inverse, la modélisation prend davantage d’ampleur au secondaire I et encore plus au secondaire II.
55Concernant les éléments en lien avec les notions mathématiques, on peut noter que les enseignant·es cherchent à s’appuyer sur la résolution de problèmes pour introduire, réinvestir, appliquer des notions, des outils ou des concepts mathématiques, de manière significative à tous les ordres d’enseignement, et de manière encore plus marquée au primaire. Ce résultat est certainement à rapprocher de ce qui est indiqué dans le PER, où il est explicitement écrit que la résolution de problèmes est le point d’ancrage de la démarche mathématique pour donner du sens aux notions.
56Les enseignant·es visent à développer de nombreuses compétences transversales chez les élèves via la résolution de problèmes, et cela, encore plus largement au secondaire qu’au primaire. En particulier l’autonomie est de plus en plus plébiscitée au fur et à mesure de l’avancement des élèves dans la scolarité. Les compétences de collaboration, d’originalité, et de réflexivité ne sont citées qu’au secondaire. Or ce sont justement des compétences transversales stipulées dans les objectifs généraux du programme de mathématiques8 du Collège de Genève (p. 80) :
Au cours des quatre années d’études, l’élève développe les attitudes et aptitudes suivantes :
Aptitudes
Il est attendu de l’élève qu’il fasse preuve d’autonomie, de curiosité, de rigueur, de sens critique, du goût de l’effort.
Attitudes
Par l’étude des mathématiques, l’élève développe les capacités de poser et résoudre un problème, faire la synthèse, calculer et quantifier, décrire, analyser et modéliser, conjecturer, argumenter et démontrer.
57Au primaire, ce sont davantage les aspects liés à la lecture qui sont mis en avant. Cette tendance peut s’expliquer par le fait que tout au long du primaire, l’apprentissage de la lecture et la compréhension de textes sont des enjeux importants, dont les enseignant·es généralistes à ce niveau ont autant la charge que celle des mathématiques. De plus, souvent les enseignant·es pensent que les difficultés en résolution de problèmes viennent de difficultés en lecture et compréhension de l’énoncé, ce qui est certainement discutable.
Mots-clés pour caractériser la résolution de problème vue en tant qu’élève puis en tant qu’enseignant·e
58Il s’agit ici à nouveau d’une question ouverte puisque nous avons demandé aux enseignant·es de donner deux mots-clés qu’elles et ils associent à la résolution de problèmes, tout d’abord en tant qu’élève, puis en tant qu’enseignant·e. L’analyse des réponses nous a permis de dégager les cinq catégories suivantes (la dernière ne s’applique qu’à la rubrique : « en tant qu’enseignant ») :
- des mots qui renvoient à des compétences générales ou transversales (implication, logique, autonomie, etc.) ;
- des termes qui désignent des éléments d’un problème (énoncé, question, etc.) ou des verbes qui décrivent des éléments de la résolution (chercher, calculer, etc.) ;
- des termes qui renvoient à des sentiments positifs ;
- des termes qui renvoient à des sentiments négatifs ;
- des termes qui se réfèrent à l’activité de l’enseignant·e lors de la résolution de problèmes en classe.
59Nous donnons les résultats dans les trois tableaux ci-dessous, par ordre d’enseignement. À côté de chaque terme, entre parenthèses, nous donnons le nombre d’occurrences, puis dans la colonne à droite le pourcentage calculé sur deux fois le nombre d’enseignant·es interrogés et arrondi à l’entier le plus proche (le total n’atteint jamais 100 %, car il manquait des réponses).
Résultats au primaire
Tableau 19. Mots-clefs liés à la résolution de problèmes pour les enseignant·es du primaire
En tant qu’élève | En tant qu’enseignant·e | |||
Compétences générales ou transversales | Réflexion (4), rigueur (1), persévérance (1), collaboration (1) | 9 % | Réflexion (5), implication (1), persévérance (3), organisation (1), patience (1), anticipation (1), méta-connaissances (1), entraide (1), autonomie (1), logique (2), apprentissage (2) | 25 % |
Des termes liés au problème ou à sa résolution | Compréhension du problème (1), chercher (7), rechercher des stratégies (2), calculer (1), résoudre (1), dessiner le problème (1), se mettre en situation (1), énoncé (1) | 20 % | Stratégie (1), démarche (2), compréhension (2), réinvestissement (1), recherche (2), représentation(s) (6), utiliser les bons outils (1), manipulation (1), analyse (1), lecture (1), validation des résultats (1) | 25 % |
Aspects positifs | Plaisir (2), amusant (2), intéressant (1), implication (1) énigme (2), défi (10), stimulation (1) | 25 % | Plaisir (1), intérêt (1), attractif (1), stimulation (1), varié (1), challenge (1), défi (2), détective (1), enjeux (1), sens (1) | 15 % |
Aspects négatifs | Angoissant (3), perdu·e (1), difficulté (6), découragement (1), éloigné de la réalité (5), cauchemar (1), stress (1), compliqué (1), pas de sens (1), problèmes improbables (1) | 28 % | Difficile (2), fastidieux (1), long (1), complexe (3) | 9 % |
Ce que nécessite la résolution de problèmes pour l’enseignant·e | Erreur à imaginer (1), bonne vision de l’objectif (1), accompagnement (1), relance (1), catégoriser (1), expliquer (1) | 8 % | ||
Autres | Problème (1), formation (1), peu fréquent (2), jamais (1), désorganisation (1), basique (1), décontextualisé (1) | 11 % |
60Pour les enseignant·es du primaire (tableau 19), les mots-clés les plus fréquents en tant qu’élève portent sur les aspects émotionnels de la résolution de problèmes. Ils sont négatifs à 28 %, ce qui représente un pourcentage relativement important, incluant de nombreuses émotions soulignées par des mots très forts comme « stress », « cauchemar » ou « angoissant ». Mais ils sont aussi positifs à 25 %, avec la moitié des réponses qui mettent en avant l’aspect « défi » ou « énigme ». Sur un autre plan, seulement 9 % reconnaissent des intérêts d’ordre transversal tels que la réflexion, la rigueur, la persévérance et la collaboration. On note également un nombre important d’occurrences de « chercher » dans les mots-clefs en tant qu’élève. Ce terme disparaît dans les mots-clés en tant qu’enseignant·e, peut-être au profit de termes tels que « démarches », « stratégies ».
61En tant qu’enseignant·e, ces deux catégories de sentiments sont nettement moins mises en avant et il ressort alors de façon égale les compétences d’ordre général et les termes associés au problème ou à sa résolution pour un quart des réponses chacun. On constate donc que les enseignant·es du primaire interrogé·es distinguent nettement leur ressenti personnel, assez partagé entre des sentiments positifs et négatifs, et leur position institutionnelle dans laquelle elles et ils mettent en avant des compétences de réflexion et des attitudes de persévérance.
Résultats au secondaire I
Tableau 20. Mots-clés donnés en tant qu’élève et en tant qu’enseignant·e par les enseignant·es du secondaire I
En tant qu’élève | En tant qu’enseignant·e | |||
Compétences générales ou transversales | Curiosité (3), créativité (1), motivation (1), persévérance (2), effort (2), imagination (1), investissement (1), intuition (1), logique (1), rapidité (1), synthèse (1) | 20 % | Autonomie (2), motivation (3), implication (1), engagement (1), persévérance (1), concentration (1), effort (1), communication (1), réflexion (2), créativité (2), curiosité (1), confiance en soi (1), compétences analytiques (1), raisonnement (1), logique (2) apprentissage (1) | 28 % |
Des termes liés au problème ou à sa résolution | Opérations à trouver (1), traduction (1), tâtonnement (1), hypothèses (1), tests (1), mise en pratique de notions (1) méthode (1), stratégie (1), compréhension (1), échange (1), recherche (1), modélisation (2), solution (1) | 17 % | Recherche (2), stratégie (1), démarche (1), s’organiser (1), développer (1), formaliser le problème (1), s’approprier le problème (2), schématisation (1), expliciter son raisonnement (1), rédaction (1), simplifier (1), présentation (1), modélisation (1), compréhension (1), consigne(s) (3) | 25 % |
Aspects positifs | Satisfaction (1), plaisir (2), concret (4), jeu (3), énigme (1), défi (4), challenge (1), compétiteur (1), progression (1) | 24 % | Plaisir (1), ludique (1), important (1), nécessaire (1), application des maths (1), concret (3), différent (1), mise en contexte (1), porteur de sens (1) | 15 % |
Aspects négatifs | Difficile (5), pénible (1), plus dur (1), frustration (1), énervement (1), long (1), comment y arriver ? (1) | 15 % | Difficile (2), chronophage (2) | 5 % |
Ce que nécessite la résolution de problèmes pour l’enseignant·e | Observer (1), explication (1), droit aux erreurs (1), retrait (2), pédagogie (1), variables didactiques (1), étayage (1), institutionnalisation (1), diagnostic (1) | 13 % | ||
Autres | Problème (1), préparation (1), groupe (1), tissage (1) | 5 % | Essence (1), liens (1), tissage (1) | 4 % |
62Au secondaire I (tableau 20), la différence la plus frappante avec les réponses des enseignant·es du primaire, est que si les émotions positives sont quasiment au même niveau (avec également des mots qui font référence au jeu ou au défi), les émotions négatives sont bien moins représentées (14,5 %) et avec des termes moins forts : la difficulté et la pénibilité ont remplacé la peur ou l’angoisse des enseignants du primaire. Ce résultat est certainement lié à la spécialisation des enseignant·es du secondaire qui ont choisi les mathématiques dans leurs études. On note ensuite le même phénomène sur l’augmentation des réponses faisant appel aux compétences générales pour les mots-clefs en tant qu’enseignant·e. Et là ce sont les attitudes comme l’autonomie ou la persévérance qui sont souvent citées (près de la moitié des réponses).
Résultats au secondaire II
Tableau 21. Mots-clés donnés en tant qu’élève et en tant qu’enseignant·e par les enseignant·es du secondaire II
En tant qu’élève | En tant qu’enseignant·e | |||
Compétences générales ou transversales | Persévérance (1), autonomie (2), raisonnement (1) | 5 % | Organisation (3), compétence (1), ne pas baisser les bras (1), raisonnement (2), mise de sens (1), synthèse (2), être méthodique (1), prise d’initiative (1), oser (1), idées (1), compréhension (1), motivation (1), curiosité (1), transversalité (1), réflexion (1), critique (1), rigueur (1), découverte (1) | 33 % |
Des termes liés au problème ou à sa résolution | Contextualisation (1) chercher (8), méthode (1), calculer (1), résoudre (1), lire (1), représenter (1), déchiffrer (1), imaginer (1), comprendre un énoncé (1), vérification des solutions (1), modélisation (1), résultat (1), optimisation (1), application (1) | 28 % | Application (3), réinvestissement (2), contextualisation (1), recherche (3), appropriation (1), résoudre (1), questionner (1), expérimenter (1), méthodes (1), modélisation (1), représentation (1), essayer (1), communiquer (1) | 23 % |
Aspects positifs | Stimulant (1), plaisir (4), curiosité (5), fierté (1), dépassement (1), défi (4), jeu (8), challenge (4), intérêt (1) | 31 % | Intéressant (4), motivant (1), important (2), nécessaire (1), utile (1), mise en situation (1), challenge (1), jeu (2) | 17 % |
Aspects négatifs | Horreur (1), blocage (1), frustration (1), peur (2), difficulté (3), toujours faux (1), ennuyant (1), résistance (1) | 14 % | Peur des élèves (1), difficile (1), chronophage (3), pas le temps (1), obstacles (1) | 9 % |
Ce que nécessite la résolution de problèmes pour l’enseignant·e | Analyse a priori (1) | 1 % | ||
Autres | Travail de groupe (1), lien (1) | 2 % | Jugement différent (1), diversité (1), notion (1), groupe (1), nouveaux savoirs (1) | 6 % |
63Pour cet ordre d’enseignement, ce sont les aspects positifs et les termes qui se réfèrent à la résolution de problèmes qui arrivent en tête pour les mots-clefs en tant qu’élève puis, comme précédemment, pour les mots-clefs en tant qu’enseignant·e, ce sont ceux qui font référence aux compétences générales (tableau 21). Pour la résolution de problèmes, on trouve notamment le verbe « chercher » qui est cité dans plus d’un tiers des réponses de cette catégorie en tant qu’élève alors qu’en tant qu’enseignant·e il ne représente plus qu’un sixième et apparaît à égalité avec le terme « application », qui est assez contraire à l’idée de recherche. Ceci semble vouloir dire que le potentiel de recherche, vu comme élève, peine ensuite à être mis en œuvre par les enseignant·es. Une nouvelle fois on retrouve le même phénomène qu’entre le primaire et le secondaire I, avec un nouvel accroissement des aspects positifs, et les termes défi et énigme largement représentés, alors que pour les aspects négatifs, le pourcentage ne baisse plus par rapport au secondaire I. Enfin on retrouve, comme pour les enseignant·es de l’école primaire, la peur et l’horreur. Enfin, on peut noter que certains termes soulignant l’aspect chronophage de la résolution de problèmes apparaissent peu fréquemment au secondaire I, mais davantage au secondaire II.
64Même si pour chaque ordre d’enseignement, seuls 38 enseignant·es ont répondu au questionnaire, ces résultats nous paraissent intéressants et significatifs de différences entre les enseignant·es de différents ordres. En effet, là encore nous pouvons trouver une explication en lien avec la formation mathématique de ces enseignant·es, mais sûrement aussi en lien avec leurs pratiques.
65En conclusion de cette partie, si dans ce qui précède nous avons surtout pointé des différences entre les ordres d’enseignement, il apparaît cependant des similitudes dans chaque catégorie de réponses. Tout d’abord, il faut souligner qu’il existe toujours une variété de sentiments caractéristiques de chaque ordre d’enseignement. Ainsi, nous avons noté une association de la résolution de problèmes à des termes relevant du champ lexical du jeu, du défi et renvoyant à des qualifications positives comme « intérêt », « motivation » ou « plaisir ». Comme nous l’avons dit, les termes négatifs peuvent être forts et renvoient certainement à de mauvais souvenirs en tant qu’élève. Dans les mots-clefs de la catégorie des compétences générales, on retrouve ce que nous avons dit dans la partie précédence sur les compétences. Enfin, dans la catégorie des mots-clefs sur l’activité de résolution de problèmes, on trouve à la fois des termes en lien avec la recherche, mais aussi avec l’application ou le réinvestissement.
Conclusion
66Tout comme pour le questionnaire destiné aux élèves nous sommes bien conscient·es que même si nous avons un nombre conséquent de réponses, nous n’avons certainement pas pu obtenir un échantillon représentatif (nous avons eu des difficultés pour diffuser ce questionnaire lors de la crise sanitaire) ce qui indique que nos résultats pourraient être affinés. Cependant, malgré les biais que comportent des questionnaires évoquant des pratiques déclarées, nous pensons pouvoir dégager des tendances intéressantes, dépassant certainement le seul cadre genevois, qui nous amènent à différentes questions. Dans cette conclusion, nous mettons également en lien l’analyse des évolutions des plans d’études faite au chapitre 2 et celle des questionnaires élèves du chapitre 3.
67De la même façon que pour le questionnaire élève, nous constatons une assez nette différence entre les résultats pour le primaire et pour les secondaires I et II qui, eux, se ressemblent assez. Cet état de fait nous semble avoir diverses sources comme les injonctions des programmes sur la résolution de problèmes, les contenus mathématiques à enseigner à différents niveaux, les directives et le contenu des évaluations institutionnelles, mais aussi la formation et l’expérience personnelle des enseignant·es, les habitudes culturelles et les usages.
68Au chapitre 2, nous avons vu que les évolutions des plans d’études pour les trois ordres d’enseignement étaient assez nettement différentes, on peut donc penser que cela se retrouve dans les pratiques (déclarées) différenciées que nous avons mises à jour entre le primaire et le secondaire. Ce phénomène est sûrement renforcé puisque les deux types d’enseignant·es n’ont pas la même formation, ni peut-être le même goût pour les mathématiques. En revanche, les différences relevées entre les enseignant·es interrogé·es des secondaires I et II peuvent s’expliquer par des différences de culture professionnelle. On aurait donc ici un effet lié à l’ordre d’enseignement que la formation n’arrive pas à atténuer, alors qu’à Genève les enseignants des ordres secondaires I et II ont la même formation (ce qui n’est pas le cas dans la plupart des autres cantons suisses). Ainsi deux résultats nous questionnent sur le développement de la résolution de problèmes dans les pratiques enseignantes : la fréquence moyenne de mise en œuvre de la résolution de problèmes en classe qui diminue au fil de la scolarité et la place de la résolution de problèmes le plus fréquemment à la fin d’un chapitre/séquence (comme application de connaissances) et, le moins souvent, hors chapitre/séquence.
69Les résultats sur les objectifs visés par les enseignant·es en résolution de problèmes ont mis en avant qu’au primaire, elle sert très majoritairement à habituer les élèves à chercher (ceci est à mettre en relation avec la conception expérimentale qui ressort du questionnaire élève) alors qu’au secondaire, c’est en premier lieu pour donner du sens aux concepts mathématiques, avec un plus fort accent au secondaire I qu’au secondaire II. Ce dernier résultat semble assez surprenant, puisque les connaissances mathématiques sont plus élaborées au secondaire II et pourraient justement bénéficier d’une approche par la résolution de problèmes, mais paraît cohérent avec le fait que réinvestir des connaissances mathématiques dans les problèmes a recueilli un faible pourcentage et que les problèmes sont peu utilisés en évaluation au secondaire II.
70Au secondaire I, l’usage des problèmes pour motiver les élèves est plus fréquent qu’au primaire et au secondaire II, montrant sans doute que c’est à cet ordre d’enseignement que les enseignant·es ont le plus besoin de motiver leurs élèves en mathématiques. Par ailleurs, l’ensemble de ces résultats semblent mettre en évidence qu’alors que les élèves ont été habitués à la résolution de problèmes au primaire, ce qui peut être lié à une forte influence des ressources et des évaluations institutionnelles, l’enseignement au secondaire I devient plus technique, mais c’est surtout au secondaire II que cette tendance s’affirme et que la résolution de problèmes semble se cantonner aux applications.
71Par ailleurs, nous avons pu voir que plusieurs freins à la résolution de problèmes étaient évoqués. Au secondaire I et encore plus au secondaire II, un premier frein est le temps, en raison du caractère chronophage attribué à la résolution de problèmes, auquel s’ajoute le fait qu’environ un tiers des enseignant·es au secondaire II semblent penser que la résolution de problèmes est moins efficace pour faire acquérir les notions (beaucoup plus qu’aux autres ordres), et enfin le fait que 21 % des enseignant·es du secondaire I déclarent que les élèves sont trop dissipé·es, trop inattentifs et inattentives. En revanche au primaire, c’est plus nettement la difficulté à gérer l’hétérogénéité des élèves qui se place en tête des freins, sans être majoritaire (45 %) alors qu’aux secondaires I et II, elle arrive en seconde position (respectivement 29 % et 41 %). De plus, nous avons relevé qu’environ un quart des enseignant·es de tous les ordres ont l’air d’estimer que les élèves ne produisent rien et ne s’impliquent pas en résolution de problèmes, ce qui peut ne pas les encourager à la pratiquer en classe. Ainsi, les freins déclarés semblent plus importants au secondaire qu’au primaire.
72Finalement, il ressort aussi de nos résultats qu’entre le primaire et le secondaire, la résolution de problèmes passe d’une activité avant tout ludique et attractive en lien avec la vie courante, à une activité plutôt d’entraînement pour la mise en œuvre des notions mathématiques. Ceci peut marquer une tendance à la spécialisation disciplinaire encore peu marquée au primaire et qui s’accentue au secondaire I puis II. Néanmoins, la place de la modélisation ou du raisonnement ne semble pas très importante au secondaire, alors que ces deux aspects pourraient être de nouveaux ressorts pour la résolution de problèmes dans un contexte disciplinaire plus marqué.
Notes de bas de page
1Comme dans le chapitre précédent, quand nous parlons de Secondaire II, il s’agit en fait seulement de la filière gymnasiale, le Collège de Genève. Pour éviter des confusions, nous avons toutefois évité d’utiliser le terme de Collège qui réfère au secondaire I en France.
2Dans nos questionnaires, nous avons utilisé le masculin générique, donc dans ce texte quand nous nous référons au libellé d’une question nous gardons cet usage.
3Formation universitaire en quatre ans mise en place à partir de la rentrée 2010-2011, qui a remplacé la Licence mention enseignement (LME), https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/rechercheformation/203 [consulté le 13/05/2024], qui avait elle-même, en marquant le début de la formation à l’université des enseignant·es du primaire, remplacé en 1996 l’ancien modèle des Études pédagogiques.
4La Formation universitaire du Master disciplinaire en enseignement secondaire (MASE) a remplacé en 2007, la formation de type compagnonnage de l’IFMES qui se faisait hors université après la maitrise disciplinaire.
5https://www.ge.ch/document/11430/telecharger [consulté le 13/05/2024].
6https://edu.ge.ch/co/sites/default/files/atoms/files/clarifications_evaluation_co_2020_2020.11.17_modifs.pdf [consulté le 13/05/2024].
7https://www.education.gouv.fr/premiers-resultats-de-l-enquete-sur-les-pratiques-d-enseignement-des-mathematiques-praesco-en-classe-309564 [consulté le 13/05/2024].
8https://www.ge.ch/document/14869/telecharger [consulté le 13/05/2024].
Le texte seul est utilisable sous licence Creative Commons - Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International - CC BY-NC-ND 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
La résolution de problèmes en mathématiques
Si vous avez des questions, vous pouvez nous écrire à access[at]openedition.org
Référence numérique du chapitre
Format
Référence numérique du livre
Format
1 / 3