Pour aller plus loin
p. 149-152
Texte intégral
Développements et approfondissements linguistiques
Paramètre mouvement et iconicité
1Il est important de rappeler que le paramètre mouvement est toujours présent dans la formation du signe. Néanmoins, il existe des mouvements qui sont dits « iconiques » dans la mesure où ils imitent un mouvement présent dans le réel : l’envol de la fusée, le vol du papillon, l’action de balayer par exemple dans les exemples donnés pour les signes [fusée] [papillon] et [balai]. Parmi tous les autres mouvements, on trouve des mouvements dits « articulateurs » comme dans [maison] qui sont des mouvements ininterprétables en tant que mouvement, car ils ne portent aucune iconicité et des mouvements qui tracent des formes dans l’espace comme pour [ballon].
Interprétation de l’iconicité
2L’iconicité est une question culturelle. Elle ne sera donc pas la même selon les cultures environnant les différentes langues signées. Par ailleurs, même dans un espace culturel commun, la perception du lien iconique dans la formation du signe peut varier d’un locuteur à l’autre et varier dans le temps. Ainsi, pour interpréter l’iconicité du signe [Marseille], il faut connaître le geste lié à la fabrication du savon, dont Marseille est la ville emblématique. C’est en effet ce geste qui est à l’origine du signe.
Par ailleurs, il existe des degrés dans l’iconicité. Certains signes sont pratiquement transparents, c’est-à-dire qu’on peut en comprendre le sens sans les avoir appris, tandis que d’autres sont parfaitement opaques et nécessitent un apprentissage. Entre les deux on peut parler de signes « translucides » qui peuvent être compris d’emblée par certains locuteurs, mais pas par d’autres, ou dont on ne peut comprendre et apprécier l’iconicité qu’une fois les avoir appris, c’est par exemple le cas du signe [chien] dont la configuration de la queue remuante n’est pas évidente au premier abord. Le schéma suivant rend compte de ces phénomènes de perception de l’iconicité et de l’appréciation des liens de motivation des signes qui en découle.
3De tous les exemples que l’on donne dans ce chapitre, dans cette section linguistique ou dans la section « pistes pédagogiques », on pourra considérer comme :
- transparents : [ballon], [sapin], [champignon] ;
- translucides : [avocat], [ananas], [cerise] ;
- opaques : [Marseille], [fraise], [toilettes].
Comme il s’agit d’une interprétation de l’iconicité, chaque lecteur pourra bien sûr en avoir une autre.
Iconicité et homonymie
4Malgré l’iconicité qui ne s’y prête guère, on trouve en lsf des homonymes. Il s’agit de signes qui sont identiques par la forme, mais dont les sens respectifs n’ont rien à voir les uns avec les autres. C’est le cas par exemple de [association] et de [ranger].
Il s’agit là de deux formes identiques qui ont deux sens très éloignés. Le contexte permettra de savoir de quel signe il s’agit.
Iconicité et transparence
5On notera, pour terminer, que pouvoir « deviner » le sens d’un signe isolé grâce à son iconicité est une chose, comprendre un discours ou une conversation en est une autre. Celui qui n’a pas appris la lsf et est confronté à l’usage ordinaire de la lsf par des locuteurs la maitrisant le sait bien : on ne comprend rien… et comme pour toute langue, même en l’ayant apprise, selon son niveau, on ne comprend pas toujours tout ! Ainsi la transparence de certains signes ne signifie absolument pas la transparence de la langue.
Bibliographie
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LSF, grammaire pratique
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