Première églogue
p. 61-63
Texte intégral
1Le dialogue de deux bergers affligés par la guerre des Barons (1263-1265), sous le règne d’Henry III : guerre civile entre la faction de Simon de Montfort et le roi, à propos de promesses de réformes connues sous le nom de Provisions de Westminster (1259). Simon combattit ceux qui refusaient d’appliquer ces réformes. Battu en 1265, il fut exécuté au début d’août 1265. Le dialogue montre que la guerre n’épargne ni les pères, ni les fils.
2Lors qu’Angleterre fumait encore de sa mortelle blessure,
Arrachait de son cou les chaînes,
Voyant tous ses fils liges tomber alentour
(En nombre ils tombaient car c’est l’honneur qui menait le combat),
3Alors en un vallon sous le sombre manteau gris du soir,
Deux bergers solitaires là se réfugièrent brusquement
(La vie bruyante terrorise leur cœur blanc,)
Et au cri de la chouette ils tremblaient et pleuraient ;
Le premier Robert Neatherd se frappa le cœur lourd,
Puis tomba au sol et ainsi parla.
4Robert
Ah, Ralph ! si ces heures viennent,
Si nous les fuyons, chassés par d’autres malheurs,
Le pied nous manquera, même si nous sommes forts,
Notre allure ne sera pas rapide quand croîtra le danger.
À nos grands malheurs nous en avons ajouté d’autres,
La guerre des Barons ! Oh ! malheur à ce jour !
Je suis en vie, mais me suis échappé
De façon telle que la vie même effraie mes sens.
Oh ! Ralph, viens m’écouter, et entends ma triste histoire,
Viens ouïr le triste destin de Robin du Vallon.
5Ralph
Ne me dis rien ; je connais ton malheur par le mien ;
Oh ! j’ai une histoire que le diable pourrait conter.
Douces fleurettes, manteaux des prairies, belles forêts ;
Bosquets visibles autour de la grotte de l’ermite ;
La douceur du violon chantant dans le val ;
Les joyeuses danses dans la cour de l’auberge ;
Encore, le chant aigu et toutes joies, adieu,
Adieu l’ombre même des doux plaisirs :
Ennuis importuns sur mon chef tombent,
Nul bon saint pour éloigner le destin toujours plus lourd.
6Robert
Oh ! j’ai envie de pleurer sur mes prairies ouvertes de boutons d’or,
Mes troupeaux épars de moutons blancs comme lys,
Mes jeunes arbres greffés et les robustes troncs,
Mon droit de pâture, s’étendant à perte de vue,
Mes tendres génisses, mes taurillons forts au combat,
Mon jardin blanc de fleurs de consoude,
Mes fleurs de souci perçant avec la lumière,
Et tout ce que la bénédiction des cieux peut permettre d’accumuler.
Je suis endurci aux coups du chagrin,
Habitué à la peine, ne laisserai pas couler une larme salée.
7Ralph
Ici je demeurerai jusqu’à ce que Mort vienne,
Ici, tel un mauvais arbre empoisonné,
Qui détruit tout ce qui l’approche,
Ainsi en ce lieu attaché je pousserai.
De me plaindre j’ai plus cause que toi ;
Mort au combat mon bien-aimé père gît ;
Oh ! qu’avec joie j’occirais son meurtrier,
Et près de lui à jamais fermerais les yeux.
Privé de toute joie, ici je veux saigner ;
Du château de mon cœur la herse est tombée.
8Robert
Nos maux sont identiques, identique sera notre destin.
Mon fils, mon seul fils est mort ;
Ici je demeurerai et finirai ma vie avec toi ;
Une vie comme la mienne est devenue un fardeau.
Désormais le bonheur a fui même les chaumières,
Des monastères seuls peuvent se vanter de sainteté,
Angleterre porte aujourd’hui un vêtement sanglant
Et son visage est peint du sang de ses champions ;
Paix s’est enfuie ; Désordre montre sa face sombre,
Et fend l’air en parure maculée de sang.
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