Image, didactique, mémoire : Proust à travers quelques bandes dessinées
p. 183-197
Texte intégral
1De quelle aide peut être la bande dessinée pour aborder l’étude de Proust avec des élèves ? Mais d’abord : pourquoi étudier Proust en classe et pourquoi recourir à la bande dessinée ? À la recherche du temps perdu (paru entre 1913 et 1927) est devenu le signe de distinction d’une certaine élite culturelle, davantage présent dans les conversations huppées que dans les salles de classe. Mais c’est aussi une œuvre majeure du patrimoine littéraire français, « qui contribue à la connaissance des idées et à la découverte de soi1 ». Si elle ne prétend pas au titre d’œuvre incontournable dans l’enseignement secondaire, que possèdent par exemple un roman de chevalerie ou une pièce de Molière au collège, il n’est pas inconcevable d’en donner une idée, même partielle, à des élèves du lycée, voire à des élèves de troisième, avant qu’ils ne valident le « socle commun ». L’obstacle majeur à l’appréhension de cette œuvre est bien sûr sa longueur et sa difficulté, tant à l’échelle de la phrase que du récit. D’où l’hypothèse du recours à la bande dessinée, en relation avec des extraits du texte original : ce médium réputé familier aux élèves serait susceptible de les aider à comprendre, à visualiser et à mémoriser quelques données importantes de l’œuvre à laquelle ils n’auraient pas accès autrement.
2Après le « pourquoi », il faut préciser le « quoi ». Quelle bande dessinée ? « Quoi » du texte de Proust ? Existe-t-il des adaptations d’À la recherche du temps perdu en bande dessinée susceptibles, dans leur langage propre, de traduire quelque chose du texte original ? Se pose également la question du savoir concernant Proust, dont il faudrait effectuer la transposition didactique, puisqu’il ne s’agit pas d’enseigner l’intégralité de l’œuvre ni du savoir accumulé par la critique proustienne… Le choix du support – extraits du texte original et de bandes dessinées – dépend du contenu à enseigner et de la possibilité de le transposer.
3Il existe une adaptation d’À la recherche du temps perdu qui jouit d’un succès public important, en France et à l’étranger : celle de Stéphane Heuet, composée à ce jour de cinq albums couvrant les deux premiers tomes du roman, Du côté de chez Swann et À l’ombre des jeunes filles en fleurs. Cette publication se présente comme une adaptation intégrale, sous l’intitulé général : « Marcel Proust/Adaptation et dessins de Stéphane Heuet/ À la recherche du temps perdu ». Elle a fait l’objet de commentaires critiques sérieux et de traductions dans plusieurs langues : anglais, allemand, espagnol, italien, japonais. Le Scérén (Service culture, éditions, ressources pour l’Éducation nationale), dans sa revue en ligne Présence de la littérature, propose une séquence pédagogique pour le lycée consacrée au roman de Proust, qui associe chaque extrait du texte original à son extrait correspondant dans l’adaptation de Stéphane Heuet2. Dans le souci de disposer d’un corpus3 plus représentatif du neuvième art, dans sa diversité et sa qualité, on peut associer à cet ouvrage d’autres transpositions en bandes dessinées de l’œuvre de Proust. Une adaptation intégrale : un manga japonais paru en 2009, en un seul volume, sous le titre Ushinawareta Toki wo Motomete [À la recherche du temps perdu]. Trois brèves transpositions parodiques : « Les madeleines du petit Marcel » de Régis Franc (1982) ; « Un classique digéré : À la recherche du temps perdu de Marcel Proust (début XXe siècle) en deux pages ! » de Jake Raynal et Bruno Moldave (1995) ; « Leçon 7. À la recherche du temps perdu de Proust », dans Littérature pour tous de David Vandermeulen (2002)4.
L’œuvre originale, ses principales composantes et sa parenté avec le neuvième art
4Avant d’en venir à l’usage possible de ce corpus, on peut se demander quelles connaissances relatives à l’œuvre originale il s’agit de transmettre. Trois composantes, étroitement liées, viennent à l’esprit : l’expérience du souvenir involontaire, le thème de la vocation artistique, la structure narrative de l’œuvre. La réminiscence, d’abord, car il faut bien transmettre cette référence culturelle majeure et, par la même occasion, expliquer sa signification – qui échappe le plus souvent à ceux qui y font allusion. La vocation artistique, ensuite, car le phénomène de la mémoire involontaire ne prend sa véritable signification que par rapport à l’accomplissement du désir d’être écrivain, qui anime le héros-narrateur depuis l’enfance. La structure narrative, enfin, car la valeur de l’œuvre tient à la mise en intrigue de cet accomplissement, à l’expérience du temps perdu qui s’étire presque indéfiniment et du temps retrouvé qui intervient in extremis, expérience que le lecteur ne partage véritablement que grâce à la durée de sa lecture. Cela revient également à expliquer le titre du roman, qui contient l’idée d’une quête et de son succès possible. La bande dessinée peut-elle traduire quelque chose de ces composantes d’À la recherche du temps perdu ? La réponse peut être formulée en deux temps : d’abord à partir de quelques considérations supplémentaires sur le roman, ensuite à travers l’examen du corpus envisagé.
5On peut observer que l’art de Proust partage avec la bande dessinée certaines propriétés communes, ou du moins comparables – coïncidence involontaire, mais qui tend néanmoins à légitimer le recours à ce médium :
- 1) Le rôle privilégié de l’image visuelle. Le « livre à images » est un modèle du livre qu’écrira le héros-narrateur, le style est une « question de vision », lit-on dans Le Temps retrouvé5. Malgré l’importance accordée aux autres sens que la vue lors du déclenchement des fameuses réminiscences, une étude statistique montre que la plupart des images évoquées dans le texte sont d’ordre visuel6. Nombre d’images littéraires, de scènes et de situations romanesques sont traduisibles visuellement.
- 2) La discontinuité de ces images. Le critique Georges Poulet a bien montré que l’espace romanesque de Proust est fondamentalement hétérogène, à l’instar des deux « côtés » qui structurent le récit, et que les passages clés du livre sont ceux qui présentent une discontinuité de la perception visuelle, révélatrice d’une discontinuité temporelle7 (L’Espace proustien). Une discontinuité comparable est au principe même de la bande dessinée, les cases étant le plus souvent séparées les unes des autres par un liséré et un espace blanc qui isolent les images, tout en les articulant.
- 3) La structure allégorique et didactique d’À la recherche du temps perdu. Le roman se présente comme une vaste galerie de portraits et de situations, qui jalonnent l’itinéraire moral du héros-narrateur et qui sont autant d’images frappantes, mémorables, destinées à l’édification du lecteur8. La bande dessinée, par les « cases mémorables9 » qu’elle contient, peut offrir au lecteur l’équivalent ou l’esquisse de ces images frappantes que seule une lecture complète et approfondie du roman permet d’assimiler normalement.
- 4) Enfin, un dernier point mérite d’être mentionné ici, quoique très peu restrictif : la diversité des registres, notamment dans les dialogues. Contrairement à ce que l’on pourrait croire de Proust, écrivain précieux et élitiste, son roman laisse une grande part au langage de personnages variés, au registre comique, à la vulgarité des caractères et des situations, ainsi qu’à la parodie et au pastiche – comme peut le faire très différemment la bande dessinée. Il ne s’agit pas de fonder objectivement ces points de convergence plus ou moins précis mais de suggérer que, s’il existe un médium susceptible de rendre par ses moyens propres une telle variété de registres, une telle expérience de l’espace et du temps, il s’agit de la bande dessinée10.
La traduction du roman en bande dessinée
6Voyons si les bandes dessinées mentionnées précédemment sont susceptibles de traduire quelque chose des principales composantes du roman. L’adaptation de Stéphane Heuet est sans doute la plus fidèle au texte, du moins à lettre du texte. L’expérience de la madeleine, par exemple, fait l’objet de trois planches qui respectent les étapes successives du processus de mémoire, ainsi que l’énigme centrale de cette expérience, qui ne sera résolue qu’à la fin du roman (Combray, Delcourt, p. 15-17). La vocation artistique, dans ce premier volume, est bien présente à travers les promenades du côté de Guermantes et la scène des clochers de Martinville (p. 68-70). La structure narrative du roman transparaît également dans la voix narrative, dans le dédoublement du héros et du narrateur ; plus difficilement dans la durée du récit, sans commune mesure avec celle du texte original. La différence avec le roman, sur ce point, peut sembler inévitable. Des réserves importantes sur la qualité du travail de Stéphane Heuet ont pu être émises par un spécialiste de la bande dessinée comme Thierry Groensteen11. En tant que lecteur d’À la recherche du temps perdu, la principale critique que l’on peut formuler concerne le style, d’une manière générale : naïveté des dessins et des couleurs qui ne correspond à rien dans l’œuvre originale ; lourdeur des récitatifs et des dialogues ; fragments ou résumés du texte qui pèsent sur le dessin sans retrouver le caractère à la fois analytique et fluide du style proustien.
7L’autre adaptation intégrale ne tombe pas sous le coup de telles critiques. Ce manga en noir et blanc, créé par une équipe rompue à l’adaptation et à la vulgarisation des classiques au profit des étudiants, n’est pas un travail d’auteur ambitieux, mais il présente un découpage narratif percutant. Les émotions du héros sont fortement dramatisées, conformément à l’esthétique du manga ; les scènes d’amour du cycle de Sodome et Gomorrhe, de nature à exciter la curiosité des jeunes étudiants, ne sont pas omises ; le dénouement du Temps retrouvé évoque librement, mais avec beaucoup d’intensité, la réalisation de la vocation artistique. La représentation même du héros-narrateur, écueil prévisible de toute adaptation d’ À la recherche du temps perdu en images12, fait l’objet d’un travail stylistique intéressant. Alors que l’adaptation d’Heuet juxtapose figures schématiques et décalques de photographies connues de Proust, le manga associe une stylisation des traits conforme à l’esthétique du manga, et des attributs plus ou moins caractéristiques : chapeau et vêtements de la Belle Époque, moustache quand il est adulte, etc. Pour le lecteur français, cette adaptation japonaise d’une œuvre du patrimoine produit un effet d’étrangeté et de familiarité à la fois, qui traduit d’une certaine manière la singularité du texte original.
8La planche de Didier Vandermeulen consacrée à La Recherche du temps perdu, dans Littérature pour tous, se présente comme un condensé du roman de Proust, puisqu’elle s’inscrit dans une série de « leçons » destinées à initier les élèves aux chefs-d’œuvre de la littérature française13 . Chaque œuvre est présentée sur un mode différent, censé séduire les adolescents : Emma Bovary est raconté en langage argotique, Eugénie Grandet avec des personnages empruntés à Walt Disney, L’Étranger comme un film d’action américain, etc. La charge polémique vise parfois l’œuvre et son auteur (Céline, Gide), mais le plus souvent, ce sont l’enseignant et les méthodes pédagogiques, l’élève lui-même et son manque de culture, qui sont tournés en dérision. En ce qui concerne Proust, le mode de présentation se distingue des autres « leçons » à plus d’un titre. Non seulement la présentation de l’œuvre revient à une élève14, mais le pacte instauré précédemment, qui suppose que l’histoire soit restituée d’une manière ou d’une autre, qu’elle soit du moins reconnaissable pour le lecteur qui connaît l’œuvre originale, semble ici rompu. En effet, on comprend vite que l’étudiante en question n’a pas lu le quart du premier volume. Tout le roman de Proust est censé tenir ici dans une planche unique et seulement quatre cases, en noir et blanc (fig. 14). D’emblée, dans la première case, un fort contraste apparaît entre d’une part le dessin, qui reproduit les traits méditatifs de Marcel Proust sur une célèbre photographie, et d’autre part le récitatif où l’on peut lire, entrecoupé de « heu » et de points de suspension : « j’ai dû lire un livre », « c’est l’histoire de… », « en fait y a pas d’histoire ». La deuxième case présente le même dispositif, avec d’une part le dessin des nombreux volumes de l’édition de la NRF disposés sur une table, que le contour de la case ne peut contenir tous, et d’autre part le récitatif où Adeline dit que « ça commence par un type qui est dans son lit » mais qu’elle ne « [s]e souvien[t] plus très bien ». La troisième case représente une tasse et des madeleines, tandis qu’Adeline fait un grossier contresens : « Y a une histoire avec une certaine Madeleine aussi… une bonne femme que le mec trempe dans son café. » La quatrième et dernière case ne comporte pas de dessin : elle est entièrement blanche, à l’exception de la partie supérieure occupée par le récitatif où Adeline explique qu’elle a préféré aller à la piscine plutôt que lire le livre.
9On peut lire cette planche de bande dessinée comme une plaisanterie pure et simple, qui ne laisse aucune place à la transposition, même parodique. Mais la case blanche finale évoque visuellement, de manière radicale, l’impossibilité de transposer le roman, et certains éléments attirent l’attention du lecteur averti : « je me souviens plus très bien » fait allusion au thème de la mémoire ; la préférence d’Adeline pour la piscine (plutôt que pour la lecture) suggère le thème du temps perdu ; la scène de la madeleine fait l’objet d’un contresens, notion chère à Proust15 ; « y a pas d’histoire » rejoint le jugement de certains parmi les premiers lecteurs de Du côté de chez Swann16 ; les deux premières cases mettent en regard une figuration matérielle, de type documentaire, de l’auteur et de son œuvre : le dessin d’une photographie et des différents volumes du roman, où l’on remarque la couverture différente du premier volume, qui a été publié effectivement par Grasset tandis que les volumes suivants l’ont été par Gallimard. Une certaine connaissance de l’œuvre, de sa réception et des enjeux de sa transposition, n’est donc pas absente de cette bande dessinée.
10La double planche signée Jake Raynal et Bruno Moldave (fig. 15) figure en bonne place entre les Bidochon et un Litteul Kévin dans le n° 234 de Fluide Glacial (déc. 1995) – revue où le nom de Proust apparaissait dès les années 1980 grâce à la plume de Gotlib.
11Contrairement à la planche de David Vandermeulen, qui déçoit intentionnellement l’attente du lecteur, il s’agit bien d’un résumé du roman de Proust, résumé parodique qui tient en deux planches et dix cases, comme l’annonce un titre accrocheur : « Un classique digéré : À la recherche du temps perdu de Marcel Proust (début XXe siècle) en deux pages ! » Qu’il soit représenté en costume ou en maillot de bain17, le personnage-narrateur fait l’effet d’un dandy ridicule, qui vit par procuration, perd son temps et passe à côté de sa vie. L’entreprise finale qui est la sienne, de raconter son existence en 7 645 pages, apparaît comme le sommet comique d’un comportement d’anti-héros. La première case de la planche 1 résume Du côté de chez Swann : on y voit le personnage adulte, assis de face, mâchant ostensiblement une madeleine (sa joue droite est déformée par le gâteau), avec une paire de jumelle à la main, dans un décor mi-intérieur (lampe, horloge, fauteuil, plateau du goûter), mi-extérieur (fleurs qui évoquent le lieu de villégiature à la campagne, remémoré grâce à la madeleine). Les deux cases suivantes résument Le Côté de Guermantes et la fréquentation des salons, puis À l’ombre des jeunes filles en fleurs et Sodome et Gomorrhe : les jeunes filles à Balbec et la mort de la grand-mère mentionnée dans le récitatif.
12Au plan stylistique, les traits des personnages évoquent l’expressionnisme allemand, pour les mondains, et le style Art déco pour la jeune fille nue de la troisième case qui semble citer un tableau de Klimt. Il y a là un décalage, puisque ce sont les noms de peintres germaniques qui viennent à l’esprit ; mais aussi une certaine cohérence stylistique qui tient à la contemporanéité de l’esthétique convoquée pour transposer visuellement le style proustien. Il n’y a pas de dialogue dans cette bande dessinée, mais des récitatifs qui reprennent la voix du narrateur au présent de narration. La seconde planche revient sur la rencontre entre Charlus et Jupien dans Sodome et Gomorrhe, avant de condenser La Prisonnière et Albertine disparue en une seule case, de manière judicieuse18 : on note ici la présence du héros-narrateur, à la fois comme personnage passé, à gauche de la case, et comme narrateur présent se remémorant, à droite, de part et d’autre du personnage d’Albertine. La dernière bande présente un aspect spécifique : c’est une série de cinq cases étirées verticalement, toutes consacrées au Temps retrouvé. La dernière case montre le héros et le narrateur ayant fusionné en une seule personne, en train d’écrire les « 7 645 pages » de son roman. Son aspect rappelle celui de Proust mais ses traits sont fort stylisés et transformés – de même que Proust transforme sa biographie dans le roman.
13Les cinq planches intitulées « Les madeleines du petit Marcel », de Régis Franc, peuvent être considérées, quant à elles, comme une autre transposition parodique d’À la recherche du temps perdu. L’histoire se situe dans un temps peut-être postérieur au Temps retrouvé : le héros, qui a les traits d’un lapin fort civilisé, séjourne dans une luxueuse maison de bord de mer pour écrire un roman (fig. 16 et 17). Le parti pris audacieux de l’auteur est de présenter presque toujours le même point de vue19 dans les vingt cases au format panoramiques de l’histoire : quatre cases par page, qui occupent toute la largeur de la page et qui témoignent d’un usage savant de la couleur. Des variations minimes (un peu plus importantes dans les dernières cases) s’observent dans le paysage maritime de l’arrière-plan et dans le cadrage. Apparaissent ainsi un thème et ses variations qui font écho très précisément à un principe important de l’écriture proustienne et qui placent la transposition sous le signe d’une double exigence : différence et répétition.
14Le caractère parodique réside dans l’aspect animalier des personnages mais aussi en ce que le héros n’apparaît pas à son avantage : il peine à écrire, il réclame du thé à sa servante Françoise qui lui propose également des madeleines, non pas de manière inattendue, de sorte qu’elles produisent un souvenir involontaire, mais comme une nourriture habituelle et un procédé mnémotechnique destiné à stimuler l’écrivain en manque d’inspiration. Les madeleines, dont l’usage diffère ici sensiblement de celui du texte original, n’en sont pas moins efficaces : à mesure que le héros les mange, des images-souvenirs qui remontent à l’enfance du personnage lui viennent à l’esprit et sont insérées dans l’histoire. Non sans pertinence du point de vue de l’adaptation, les images en question insistent sur l’obsession érotique de l’enfant, puisque dans les deux premières cases, on voit le jeune lapin, derrière un buisson, en compagnie d’une petite fille oiseau qui rappelle Gilberte Swann et qui l’invite à lui montrer son « zizi ». Dans la troisième case, la tante du héros le surprend dans sa chambre en train de manipuler ses petites culottes. Bien plus, le lapin adulte rapetisse et redevient le lapin enfant qu’il était, non seulement dans les images-souvenirs insérées mais aussi dans les cases qui correspondent au présent de la narration : cet élément traduit visuellement la résurgence de l’ancien moi dans la scène de réminiscence originale. L’effet comique coexiste ici avec un usage subtil des récitatifs, évoquant la vie du héros à la troisième personne, faisant écho au texte original sans en être la transcription littérale ou abrégée20.
15La chute de l’histoire consiste en l’émergence à l’arrière-plan, pendant que le héros est occupé par ces pensées, du dialogue de deux pêcheurs, personnages minuscules situés au loin, sur un bateau qui rentre de la pêche :
16– Père Antoine, je sais que nous sommes de pauvres pêcheurs… mais j’aimerais vous poser une question… Dites père Antoine… vous auriez aimer péter dans la soie… vous ?…
17– ??? Et bien… À vrai dire mon garçon je… crois que tout le monde aimerait péter dans la soie… je peux répondre (je crois) la tête haute moi aussi j’aimerais ça ! (p. 7)
18Loin de trahir l’esprit de l’œuvre originale, ce dialogue fait écho au langage des personnages du peuple, langage qui occupe une place importante dans le roman. Il attire également l’attention sur les conditions de production de l’œuvre, dont Proust était bien conscient : une vie entièrement consacrée à l’art, détachée de toute contrainte matérielle. La bande dessinée condense ainsi, en une série d’images singulières, de manière à la fois parodique et sérieuse, un certain nombre de composantes de l’œuvre originale. Le lien étroit imaginé entre l’expérience de la madeleine et l’acte d’écriture, notamment, permet de condenser en quelques pages toute la « recherche », de « Combray » au Temps retrouvé.
Proposition de mise en œuvre pédagogique
19Il est temps d’en venir au « comment », à la question de la mise en œuvre, dans un enseignement, du corpus cité précédemment, en rapport avec une connaissance du roman de Proust. Les pistes de réflexion qui suivent s’organisent en quatre étapes, sans constituer une séquence pédagogique à proprement parler. Comme Frédéric Maget, on peut limiter le corpus étudié à des extraits qui correspondent à la première partie du premier tome d’À la recherche du temps perdu – « Combray » –, mais en les choisissant de telle sorte qu’ils rendent compte, dans la mesure du possible, des caractéristiques de l’œuvre entière. Cette limitation est d’autant plus commode qu’il existe une édition scolaire de « Combray » (par Stéphane Chaudier, coll. « Petits Classiques Larousse »).
20La première étape peut donner un aperçu de l’ensemble du roman, de son sujet, de sa structure narrative, et évoquer sur un mode plaisant sa longueur déconcertante. À partir d’un questionnement sur le sens du titre, À la recherche du temps perdu, et sur l’histoire contenue dans un livre aussi long, les élèves sont invités à lire l’intégralité des volumes… ou bien à trouver la réponse dans les bandes dessinées de Fluide glacial ou de Littérature pour tous . Prenons le cas de cette dernière. Intentionnellement décevante, elle peut susciter l’envie, sinon de lire le roman entier, du moins d’en savoir davantage et de clarifier cette histoire confuse. Elle peut introduire à la lecture de la première page du roman, qui contient le célèbre incipit, « Longtemps je me suis couché de bonne heure », et présente le héros-narrateur, avec son mode d’expression à la première personne, son activité de lecteur et son sens de l’introspection (Combray, Larousse », p. 5). On reviendra à la planche de David Vandermeulen après cette lecture, et au cours des étapes de travail suivantes, pour déchiffrer ses allusions au contenu réel du roman. À la fin de la première étape, on peut donner un résumé très général et concis du roman entier, par exemple : « c’est l’histoire d’un enfant qui voudrait devenir écrivain21 ».
21La deuxième étape consiste à aborder le thème de la mémoire involontaire et la célèbre scène de la madeleine. On étudie cette fois le texte original (Combray, Larousse, p. 66-71) avant de travailler sur un extrait de bande dessinée. L’étude du texte original a pour objectif de dégager les étapes successives du processus de mémoire : l’état de lassitude du héros-narrateur adulte, les petites madeleines dont l’idée et la vue le laissent d’abord indifférent, la joie intense procurée par la sensation de goût, le questionnement du héros qui ne comprend pas ce qui lui arrive, et enfin le souvenir de son enfance, de ses vacances à la campagne. Au terme de ce travail, on lit – pour ainsi dire, puisque le texte est en japonais – l’extrait correspondant dans l’adaptation d’À la recherche du temps perdu en manga (p. 10-11, fig. 18a et 18b22). L’intérêt de ce support est d’abord d’aider à visualiser une scène peut-être encore floue, en raison de la relative difficulté du texte. Le texte se prête d’autant mieux à cette transposition visuelle que, comme on l’a dit, la vision y occupe une place particulièrement importante. Certes, ce n’est pas la vue des madeleines qui déclenche le souvenir, c’est leur goût. Mais le souvenir lui-même est d’ordre visuel : « […] ce qui palpite au fond de moi, ce doit être l’image, le souvenir visuel, qui, lié à cette saveur, tente de la suivre jusqu’à moi » (Combray, Larousse, p. 68-69). Et le même souvenir est comparé au jeu japonais qui consiste à plonger dans un bol d’eau des petits papiers qui, une fois mouillés, se déploient en un riche faisceau de motifs colorés. La bande dessinée peut aider les élèves à visualiser concrètement, d’une vision empirique, les images mentales – images au second degré, si l’on peut dire – évoquées dans le texte, ainsi que le reste du texte bien entendu. Surtout, la lecture du manga peut donner lieu à un travail de reconnaissance des différentes étapes identifiées au cours de l’analyse de l’extrait original. Ce travail aurait un double objectif : approfondir la compréhension du texte et du phénomène de mémoire involontaire et expliciter le mode de lecture spécifique à la bande dessinée. Le manga étant lu dans l’édition originale (il n’en existe pas de traduction), il est nécessaire d’expliciter son sens de lecture spécifique qui, on le sait, est inverse de celui des bandes dessinées occidentales : de droite à gauche, et non de gauche à droite. De ce point de vue, une comparaison peut être faite avec la bande dessinée lue lors de la première étape. Cette difficulté supplémentaire n’est pas purement négative : elle permet d’approfondir le travail sur les étapes successives du processus de mémoire en recherchant leur ordre bouleversé par l’adaptation japonaise. Ce travail peut donner lieu également à une production d’écrit : « traduire » le contenu des récitatifs japonais (les pensées du héros-narrateur durant la réminiscence) en se référant au texte original et en effectuant soi-même un travail d’adaptation textuelle.
22La troisième étape concerne le thème de l’écriture et de la création, qui est au centre d’À la recherche du temps perdu – au centre du roman et de la « recherche » en question. Sans sauter d’un coup jusqu’au Temps retrouvé, où l’énigme de la réminiscence est résolue et où cette résolution permet au héros d’accomplir sa vocation d’écrivain, on peut s’intéresser à un célèbre passage du premier tome – le seul passage de tout le roman qui montre véritablement le héros en situation d’écriture. Il s’agit de la scène dite « des clochers de Martinville » (Combray, Larousse, p. 256-260). Au retour d’une longue promenade en famille du côté de Guermantes, le jeune héros et ses parents montent dans la voiture (à cheval) du Dr Percepied qui passe par là ; assis à l’avant du véhicule, seul avec le cocher, le héros écrit presque sur le vif une description desdits clochers qui, observés depuis la voiture en mouvement, au soleil couchant, lui font une très forte impression. Le passage peut être lu dans le texte original puis dans l’adaptation de Stéphane Heuet (Combray, Delcourt, p. 68), ou inversement. La planche de la page 68 de la bande dessinée est une transposition en image plutôt simple et efficace : on observe, du point de vue du héros, le déplacement relatif des deux clochers sur la ligne d’horizon, ainsi que l’assombrissement du ciel et le mouvement du soleil couchant (fig. 19). L’adaptation est plutôt en deçà de ce que le texte évoque : dans ce dernier, les variations de perspective sont plus fortes, et les clochers sont comparés successivement à des oiseaux, des fleurs, des jeunes filles. Mais ce manque apparent peut servir à mettre en évidence les particularités du texte puis à réfléchir sur la possibilité de les transposer sous forme de bande dessinée. La métaphore – équivalent textuel de la réminiscence vécue – relie deux choses apparemment éloignées, dont le rapprochement révèle l’essence commune. La bande dessinée doit pouvoir, par ses moyens propres, reproduire un tel procédé d’écriture qui a un caractère visuel : par la simple indexation de l’image et du récitatif, par la juxtaposition de deux images dans deux cases contiguës, ou encore par la superposition de deux images dans la même case. Cette réflexion pourra déboucher sur une tentative de réalisation graphique de la part des élèves.
23La quatrième et dernière étape consiste à s’affranchir du texte original, à récapituler et à approfondir les acquis antérieurs, pour développer finalement un mode de lecture spécifique à la bande dessinée. Sans détailler sa mise en œuvre, qui dépasse les compétences du proustien, gageons qu’elle pourrait s’appuyer sur l’adaptation de Régis Franc et s’attacher en priorité à l’un ou l’autre des objets suivants : l’analyse du discours dans les récitatifs et dans les bulles, la temporalité du récit et particulièrement l’insertion des images-souvenirs, l’identification d’un style original chez l’auteur de bandes dessinées, ou encore la transformation d’un stéréotype littéraire. Sur ce dernier point, citons Régis Franc dans une interview : « Je sais, c’est un cliché, mais c’est tout ce que les gens qui n’ont pas lu Proust connaissent de lui. Puisque la plupart sont comme ça, parlons de la madeleine, et voyons ce qu’il reste de Proust23. » Ce reliquat peut s’avérer riche et fécond, s’il est mis en perspective avec l’œuvre originale et redéployé à l’issue de l’observation d’une série de créations variées et singulières.
24En conclusion, il faut revenir sur l’hypothèse formulée initialement : la bande dessinée aiderait les élèves à comprendre, visualiser et mémoriser certaines composantes du roman de Proust. On peut douter de la légitimité et de l’efficacité de cet usage de la bande dessinée au service du texte littéraire. Celle-ci exige un mode de lecture spécifique et la découverte d’un univers différent de l’univers romanesque, contrairement à ce que pourrait laisser croire une adaptation naïve et faussement fidèle. C’est à travers une création originale que le texte de Proust est transposé avec le plus d’exactitude. Mais usage ne signifie pas réduction et asservissement. Le supplément que constitue la bande dessinée par rapport à l’œuvre originale peut donner au jeune lecteur la possibilité de pénétrer un texte difficile d’accès, de se l’approprier par une voie détournée et de se créer ainsi une case, une bande ou une planche « mémorables » qui rendent l’œuvre de Proust elle-même mémorable – avant, éventuellement, de maîtriser tous ses codes et de pouvoir la lire intégralement. Dans cette perspective, l’image dessinée, en vertu même de son caractère exogène et dissemblable, permet de condenser le texte littéraire, ouvre la possibilité d’une connaissance partielle mais intime et d’une remémoration future. L’image mémorable n’est pas le privilège du lecteur adulte, elle ne renvoie pas forcément à une expérience passée24. C’est aussi l’ambition de l’œuvre de Proust, et du thème de la mémoire dans cette œuvre, que de ne pas être seulement un cliché littéraire ou un monument du patrimoine, mais de vivre dans l’esprit des jeunes lecteurs.
Corpus des œuvres étudiées
Œuvres de Marcel Proust
25Contre Sainte-Beuve, édition de Pierre Clarac avec la collaboration d’Yves Sandre, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1971.
26À la recherche du temps perdu, édition sous la direction de Jean-Yves Tadié, 4 vol., Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1987-1989.
27Combray [première partie de Du côté de chez Swann, 1913], édition de Stéphane Chaudier, Paris, Larousse, coll. « Petits Classiques Larousse », 2002.
28Lettre à Jacques Rivière du vendredi 6 février 1914, dans Lettres, anthologie de Françoise Leriche avec la collaboration de Caroline Szylowicz, Paris, Plon, 2004, p. 667-668.
Bandes dessinées
29Franc Régis, « Les madeleines du petit Marcel », dans Nouvelles histoires, Neuilly-sur-Seine, Dargaud, coll. « Pilote », 1982, p. 3-7.
30Heuet Stéphane, À la recherche du temps perdu, d’après Marcel Proust, couleurs de Véronique Dorey, 5 vol., Paris, Delcourt, t. 1, Combray, t. 2, À l’ombre des jeunes filles en fleurs (1re partie), t. 3, À l’ombre des jeunes filles en fleurs (2e partie), t. 4, Un amour de Swann (1re partie), t. 5, Un amour de Swann (2e partie), 1998-2008.
31Raynal Jake et Moldave Bruno, « Un classique digéré : À la recherche du temps perdu de Marcel Proust (début XXe siècle) en deux pages ! », Fluide glacial, n° 234, décembre 1995, p. 10-11.
32Ushinawareta Toki wo Motomete [ À la recherche du temps perdu], d’après Marcel Proust Tokyo, East Press, coll. « Manga de Dokuha [Tout lire en manga] », 2009.
33Vandermeulen David, « Leçon 7. À la recherche du temps perdu de Proust », dans Littérature pour tous. Synthèse, vulgarisation et adaptation en bande dessinée des grands romans français à l’usage de l’adolescent contemporain, Montpellier, 6 pieds sous terre, « coll. du Monotrème », 2002, [p. 30].
Notes de bas de page
1 Le Socle commun de connaissances et de compétences (décret du 11 juillet 2006), MEN, « La culture humaniste », p. 18. Le roman de Proust fait partie également des « lieux de mémoire » recensés par Pierre Nora. Voir A. Compagnon, « À la recherche du temps perdu, de Marcel Proust », dans P. Nora (dir.), Les Lieux de mémoire, 3 vol., Paris, Gallimard, coll. « Quarto », t. 3, Les France, 1997.
2 « Proust en bande dessinée » par Frédéric Maget. Consultable sur : www.cndp.fr/presence-litterature/fileadmin/fichiers/Proust/Proust_en_bande_dessinee.pdf [consulté le 24 janvier 2012].
3 Voir le corpus des œuvres utilisées en fin d’article.
4 Je suis redevable pour ces références à Hiroya Sakamoto, Youmna Tohmé et Pyra Wise, ainsi qu’à une personne non identifiée présente dans l’assistance du colloque « Lire et produire des bandes dessinées à l’École », à Grenoble, le 19 mai 2010. On peut se reporter également aux dessins et caricatures reproduits et commentés par M. E. Gray, Postmodern Proust, Philadelphie, University of Pennsylvania Press, 1992, chap. VII, p. 152-178.
5 À la recherche du temps perdu, t. 4, p. 466 et 474.
6 V. E. Graham, The Imagery of Proust, Oxford, Blackwell, 1966, p. 8.
7 G. Poulet, L’Espace proustien, Paris, Gallimard, coll. « Tel », 1982.
8 Je condense ici, en quelques mots, l’apport de divers travaux critiques, notamment : F. A. Yates, The Art of Memory, Chicago, University of Chicago Press, 1966 ; T. Johnson Jr., « Proust and Giotto : Foundations for an Allegorical Interpretation of À la Recherche du temps perdu », dans Marcel Proust : A Critical panorama, Urbana, University of Illinois Press, 1973 ; ainsi que les déclarations de Marcel Proust dans une célèbre lettre à Jacques Rivière datant de février 1914 (Lettres, p. 667-668).
9 Notion discutée par Benoît Peeters au début de Lire la bande dessinée, p. 17-19. Il s’agit du titre d’une rubrique initiée par Pierre Sterckx dans Les Cahiers de la bande dessinée (n° 56, 1984). Benoît Peeters insiste sur l’enchaînement des cases pour définir objectivement la bande dessinée, tandis que Pierre Sterckx isolait subjectivement une case unique pour développer ses qualités intrinsèques. En cela, Pierre Sterckx appliquait à la bande dessinée l’opération effectuée auparavant par Roland Barthes dans le domaine cinématographique (notamment dans « Le troisième sens. Notes de recherche sur quelques photogrammes de S. M. Eisenstein », Cahiers du cinéma, n° 222, juil. 1970). L’opposition case/bande dessinée reproduit l’opposition photogramme/film.
10 S. Houppermans propose une analyse très subtile du motif de la « bande » dans À la recherche du temps perdu (« Pas mon genre. Swann en BD », p. 160-162).
11 « L’affaire Heuet », trois articles publiés en mai 2010 sur son blog intitulé Neuf et Demi :http://neuviemeart.citebd.org/spip.php?page=blog_neufetdemi [consulté le 24 janvier 2012]. Je suis globalement convaincu par l’argumentaire de Thierry Groensteen – malgré son caractère polémique à l’encontre des spécialistes de Proust et des professeurs de lettres…
12 En effet, la difficulté est double : celle de donner une représentation figée du héros-narrateur, lequel est à la fois omniprésent dans le roman et quasiment jamais décrit (à la fois source et point aveugle du récit) ; celle d’identifier le héros-narrateur.
13 Comme l’indique pompeusement le sous-titre du volume : Synthèse, Vulgarisation et Adaptation en Bande Dessinée des Grands Romans Français à l’Usage de l’Adolescent Contemporain.
14 « Quelle meilleure démonstration pouvions-nous proposer à nos jeunes étudiants que ce témoignage d’Adeline, 18 ans, venant d’achever pour nous la lecture d’un des plus flamboyants chefs-d’œuvre de la littérature du XXe siècle. C’est, la larme à l’œil que nous t’écoutons Adeline. »
15 « Mais dans les beaux livres, tous les contresens qu’on fait sont beaux » (célèbre citation de Proust dans Contre Sainte-Beuve, p. 305). Sur l’analogie entre la madeleine et le prénom Madeleine, voir J. Kristeva, Le Temps sensible, Paris, Gallimard, 1994, p. 20-36.
16 Voir les comptes-rendus de lecture des maisons d’édition sollicitées par Proust avant qu’il ne publie chez Grasset à compte d’auteur, cités dans la plupart des éditions savantes, ainsi que les jugements critiques cités par Frédéric Maget dans sa proposition de séquence pédagogique pour le lycée : « Proust en bande dessinée ».
17 On pense à la réplique cinglante et comique de Charlus sur la plage de Balbec, dans À l’ombre des jeunes filles en fleurs (À la recherche du temps perdu, t. 2, p. 126), après avoir pincé le cou du héros et l’avoir traité de « petite fripouille » : « Si vous aviez pris cette précaution, il y a un instant, vous vous seriez évité d’avoir l’air de parler à tort et à travers comme un sourd et d’ajouter par là un second ridicule à celui d’avoir des ancres brodées sur votre costume de bain. »
18 Les spécialistes de Proust se souviennent ici que ces deux titres correspondent, dans le projet de Proust, aux deux parties d’un volume unique intitulé Sodome et Gomorrhe III.
19 À trois exceptions près : la dernière case de la troisième planche et les deux premières cases de la quatrième planche sont des images-souvenirs et représentent un autre décor, emprunté à l’enfance du héros : un jardin à la campagne et la chambre d’une tante.
20 Par exemple : « Il se rendit compte qu’il avait fermé les yeux, et lorsqu’il les rouvrit rien autour de lui n’avait bougé… Alors il prit conscience du temps passé… Le goût des gâteaux sur sa langue l’entraînant dans un doux souvenir, il en mangea un autre, puis un autre, puis un autre… » (p. 7)
21 Résumé inspiré de celui proposé par Gérard Genette : « Marcel devient écrivain » (Figures III, Seuil, 1972, p. 75). Résumer Proust semble avoir été une grande préoccupation de l’année 1972, puisque cette même année, les Monthy Python ont créé leur sketch « 1972 All-England Summarize Proust Competition », où trois candidats finalistes s’efforcent de raconter À la recherche du temps perdu en moins de quinze secondes, à côté d’un « Proustomètre » qui mesure la quantité de texte résumée.
22 La double page en question est disponible sur Internet, sur le site de l’éditeur East Press, à l’adresse suivante :http://www.eastpress.co.jp/manga/shosai.php?serial=913 [consulté le 24 janvier 2012].
23 « Entretien avec Régis franc », Les Cahiers de la bande dessinée, n° 57, avril-mai 1984, p. 6-10.
24 Dans l’expression de Pierre Sterckx, le plus important n’est pas le souvenir personnel des cases que les auteurs de la rubrique expriment, mais les qualités intrinsèques de la case et son évocation par ces auteurs, qui la rendent mémorable pour le lecteur, dans l’avenir.
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