Chapitre 9. Le toucher dans une visite guidée avec des enfants malvoyants : orientation, transition, expérience
p. 253-280
Texte intégral
Introduction
1Depuis les années 1960, les chercheurs travaillant dans le domaine de l’interaction se sont focalisés sur l’observation de détails multimodaux, tels que le positionnement du corps et l’orientation du regard, leur impact sur la participation (Goffman, 1974 ; Kendon, 1967, 1990) et la distribution de la parole en interaction (Goodwin, 1981, 2000). Ces études ont mis en évidence l’importance d’une analyse globale des ressources verbales et non verbales (c’est-à-dire multimodales) qui sont utilisées et prises en compte par les participants dans la compréhension et la construction de leurs activités sociales. Il s’agit notamment de ressources telles que les regards, les gestes, les mouvements du corps et l’utilisation d’objets. Ce n’est que plus récemment que les chercheurs ont commencé à s’interroger sur d’autres ressources sensorielles telles que le toucher (Nishizaka, 2007, 2011) et le goût (Liberman, 2013).
2Dans cet article, nous nous intéressons à la manière dont les ressources multimodales en général, et la tactilité en particulier, sont utilisées et coordonnées par les participants dans la réalisation d’activités proposées durant la visite d’un jardin par des enfants malvoyants et des adultes accompagnateurs. Ce contexte est caractérisé par des asymétries en ce qui concerne les compétences, les connaissances et les rôles des participants, ce qui nous amène à nous demander comment les participants font face à ces différences et comment l’adaptation aux compétences propres à chacun des interactants est accomplie. En particulier, nous étudions la place du toucher dans l’organisation des activités avec les enfants présentant des déficits visuels, et nous nous attachons à l’analyse de certains usages, modalités et configurations du toucher dans cette situation particulière.
3Nous focalisons notre attention sur deux moments où le toucher occupe une place centrale dans l’organisation et l’accomplissement des activités : la sollicitation et réorientation de l’attention de l’enfant et le passage d’une activité perceptive à l’autre. Dans l’analyse de ces deux moments, nous allons montrer comment le toucher, interactionnellement structuré, prend des formes ou configurations spécifiques selon la tâche qu’il contribue à accomplir. Nous allons également montrer certains traits caractéristiques de ce que nous appelons « gestes haptiques professionnels ».
Interaction, multimodalité, tactilité
4Les interactions sociales ont été étudiées dans plusieurs disciplines des sciences sociales. Au sein de l’approche interactionnelle, l’analyse de données enregistrées dans leur contexte d’occurrence naturelle est considérée comme le point de départ méthodologique.
5À partir de l’étude pionnière de Bateson et Mead (1942), qui ont été les premiers à avoir utilisé (et diffusé) les supports photographiques et vidéo de leurs ethnographies sur les comportements humains, les données audiovisuelles sont de plus en plus mobilisées dans les recherches en sciences humaines, notamment en sociologie, psychologie et linguistique. En ce qui concerne cette dernière, la possibilité, d’une part, d’accéder à une situation sociale de manière répétée et, d’autre part, d’observer de manière minutieuse et granulaire le déroulement des interactions sociales, ouvre de nouvelles frontières dans la compréhension du fonctionnement du langage (verbal et non verbal) dans l’organisation et la réalisation des interactions sociales (Mondada, 2005).
6Dans la perspective des Gesture Studies, Kendon (1977, 1990) est l’un des pionniers dans l’étude de la gestuelle et des mouvements du corps en tant que formes de communication sociale. Ce terrain de recherche est également pratiqué en France par Jacques Cosnier (1977) dans son approche éthologique de la communication humaine.
7L’accès aux ressources langagières et interactionnelles et à l’écologie de la situation d’interaction offerte par les données vidéo a permis une étude de plus en plus détaillée des configurations spatiales mises en place par les participants au cours d’une activité sociale, ainsi que des ressources mobilisées dans sa réalisation. C’est le cas des travaux du linguiste anthropologue américain Charles Goodwin, qui, depuis la fin des années 1970, a consacré ses recherches à la compréhension de la manière dont les actions de chaque participant sont coordonnées au sein des activités sociales ainsi qu’à l’étude du travail collaboratif qui est sous-jacent à toute activité. Dans une de ses contributions pionnières Goodwin (1981), a éclairé le rôle du regard dans la distribution et l’organisation de la participation entre locuteur et auditeur. Il montre que l’ordre de la conversation et la coordination entre les participants ne peuvent pas être limités à une simple étude de la parole. Par ses travaux, Goodwin a amplement montré la pertinence non seulement des gestes manuels ou des regards, mais aussi des mouvements du corps et des ressources matérielles. Cette vision holistique amène à reconsidérer ces éléments, qui se révèlent ainsi nécessaires pour rendre compte du caractère reconnaissable des actions (leur « accountability », selon les termes des conversationalistes anglophones)1.
8Les ressources auditives et visuelles auxquelles les participants ont recours dans l’organisation de la participation sont au centre de nombreuses études issues de l’approche de l’analyse multimodale de l’interaction. Mondada a réalisé à l’aide de cette approche de nombreuses études sur différents contextes situationnels. Elle s’est notamment intéressée à la notion d’espace interactionnel (2005) constitué par l’activité et, plus précisément, à l’organisation de l’espace dans lequel l’activité se déroule, ainsi qu’à l’organisation des participants dans cet espace. Ces questionnements sur la coordination des ressources présentes dans un espace occupé par les participants se sont nourris plus récemment des recherches qui observent des situations où les « corps » en interaction sont en mouvement (à pied, en voiture, en avion, etc., voir parmi d’autres Haddington, Mondada & Nevile, 2013). Elles s’interrogent, par exemple, sur la manière dont les participants montrent leur engagement dans des actions collectives qui ne sont pas réalisées en situation statique, comme dans la plupart des études précédentes, mais dans des trajectoires qui se déploient à travers l’espace. Ainsi, la reconstitution des espaces interactionnels dans des visites guidées est obtenue à travers un travail collectif de réorientation des participants et de refocalisation vers un nouveau foyer d’attention. Cela peut être accompli à travers le mouvement du corps, l’utilisation de marqueurs d’actions et formats de tours spécifiques, des références déictiques adaptées, etc. (De Stefani, 2010 ; De Stefani & Mondada, 2007 ; Mondada, 2009 ; Traverso, 2012, 2014 ; Ticca & Traverso, 2016 ; Ticca, Traverso & Ursi, 2017). L’étude des visites guidées de musées et d’expositions artistiques a mis en évidence le travail collaboratif des participants dans l’expérience muséale (vom Lehn, Heath & Hindmarsh, 2001 ; Heath & vom Lehn, 2004 ; vom Lehn, 2006), en décrivant la conduite verbale et corporelle des visiteurs et leur réorientation réciproque vers les œuvres, et l’un vers l’autre. Ces recherches ont le mérite de montrer que l’expérience des objets artistiques n’est pas un accomplissement individuel, mais le fruit d’une expérience collective, interactionnellement organisée et structurée.
9Dans ces études, l’attention est portée principalement sur les ressources verbales et visuelles, et sur la manière dont les comportements corporels (gestes de pointage, mouvements du corps et des regards, etc.) peuvent avoir un impact sur l’action des coparticipants. D’autres modalités ont toutefois été étudiées par de nombreux chercheurs, par exemple ceux qui ont investigué l’expérience artistique. C’est le cas de vom Lehn (2010) qui étudie la place du toucher dans la compréhension et l’expérience de l’œuvre artistique. De même, Kreplak et Mondémé (2014) étudient la construction de l’objet artistique en tant que tel à travers l’expérience tactile de celui qui s’en approche et qui entre en contact avec cet objet. L’analyse minutieuse de l’expérience du visiteur face à l’œuvre d’art permet de la décliner en plusieurs actions séquentiellement et temporellement organisées, et d’identifier un procédé de découverte tactile, que les auteures appellent « toucher esthétique » (« aesthetic touch », 2014, p. 306). Dans un autre contexte, Nishizaka (2007, 2011), à partir de consultations gynécologiques, montre le rôle primordial du toucher pour définir la référence à une partie du corps, sans avoir recours à la technologie.
10En outre, l’expérience tactile est au centre de l’interprétariat avec des personnes atteintes de handicap sévère, comme les personnes sourdes et aveugles. Dans ce type d’interactions, la mobilisation de signes tactiles s’avère primordiale pour la réussite des échanges. Ces signes fournissent les éléments pour transmettre le contenu informationnel du message, mais ils sont accompagnés de signes haptiques, désignant des référents environnementaux concernant l’espace où l’interaction a lieu et véhiculant des informations conversationnelles, par exemple la prise de tour, des signaux de réception et des indices émotionnels (Raanes & Slettebakk Berge, 2017). Cette attention aux différentes modalités du toucher est également répandue dans les neurosciences, qui considèrent la tactilité humaine en tant que système complexe et spécialisé (Linden, 2015). C’est l’interaction entre deux systèmes sensoriels différents, par exemple, qui permet à l’individu de percevoir de manière spécifique le toucher affectif provenant d’une caresse et de le distinguer de contacts plus agressifs (Gopnik, 2017).
11Ces observations issues de contextes et d’approches épistémologiquement si différents révèlent l’importance de l’expérience tactile dans la perception humaine et soulignent l’importance d’étudier davantage le fonctionnement et l’organisation du toucher dans l’interaction sociale. C’est ce que nous nous proposons de faire dans cette contribution, en analysant dans le détail des actions tactiles spécifiques et en décrivant leurs usages et fonctionnalités au sein de l’activité dans laquelle elles s’inscrivent.
12Dans les sections qui suivent, nous allons d’abord présenter ce que l’on sait sur la place du toucher dans l’interaction adulte-enfant telle qu’elle a été abordée par les études interactionnistes. Ensuite, après avoir présenté notre corpus de données, nous nous pencherons sur l’analyse des extraits avec l’identification et la description de certains usages et configurations du toucher selon l’action que les participants accomplissent.
Le toucher dans l’interaction adulte-enfant
13Ce sont les recherches issues de l’anthropologie linguistique qui ont contribué le plus à la compréhension de la place et du fonctionnement du toucher dans l’interaction adulte-enfant.
14Plusieurs études se focalisent sur le toucher en tant que ressource utilisée par les adultes et en tant que pratique de contrôle social, qui leur permet d’agir sur l’attention de l’enfant, en orientant son corps selon le cadre participatif (mono- ou multiactivité), à travers le contact sensoriel et corporel. Goodwin (2015) examine l’interaction des corps au cours de différentes séquences, pendant les interactions parents/enfants. Elle considère ces moments d’« intercorporéité » (voir Merleau-Ponty, 1945) comme des moments très importants pour la construction identitaire des participants, surtout pour leur intimité relationnelle. De même, lors des instructions initiées par les parents, le recours au toucher s’avère primordial dans la sollicitation des réponses, dans la mesure où il permet de déployer un accompagnement guidé des enfants (« shepherding »). L’adulte réalise par le toucher le déplacement et le positionnement du corps de l’enfant vers une destination finale (Cekaite, 2010, 2012 ; Goodwin & Cekaite 2013). Ainsi, un toucher plus intense est utilisé pour produire un effet disciplinant sur les enfants dans les interactions en famille (McIlvenny, 2009).
15Quant aux situations avec des enfants présentant des troubles, Ochs, Solomon et Sterponi (2005) ont étudié des interactions avec des enfants autistes et montré les bénéfices apportés par une approche basée sur des modifications du modus operandi dans la pratique interactionnelle, un modus typique de la culture d’origine (p. 566). Parmi les modalités interactionnelles utilisées lors d’une activité focalisée, le geste et le toucher occupent, dans ce contexte aussi, une place centrale dans la focalisation attentionnelle de l’enfant autiste.
16La situation que nous allons analyser offre un contexte idéal pour l’étude de la dimension interactionnelle du toucher, en tant que ressource utilisée dans la construction de pratiques sociales telles que l’organisation de la participation, l’individualisation d’une activité, la réorientation de l’attention, la sélection de la partie du corps à activer dans l’activité expérientielle proposée au cours d’une visite guidée avec des enfants malvoyants. Alors que la tactilité chez les personnes atteintes d’un déficit visuel a fait l’objet de plusieurs études dans différents domaines (sciences cognitives, psychologie, etc.) – qui montrent par exemple la manière dont la tactilité se développe chez les enfants aveugles par rapport aux pratiques verbales (Saccà & Falzone, 2015), ou bien sa place dans la reconnaissance d’objets (Davidson, Abbott & Gershenfeld, 1974) –, moins nombreuses sont les études qui s’intéressent à explorer l’activité tactile exercée sur le sujet handicapé par des voyants dans la perspective des sciences sociales.
17Dans la suite de cette contribution, nous allons, d’une part, décrire le format du tour durant lequel le toucher a lieu, et, d’autre part, détailler la manière dont l’activité tactile est accomplie, en décrivant, quand cela est pertinent, les différentes configurations de la main qui touche (voir Streeck, 2009). Cette approche descriptive contribue de manière décisive à la compréhension du lien entre « activité » et « ressource », et permet également de rendre compte du sens localement attribué au geste et à l’action tactile en cours de réalisation.
Corpus de données
18Le corpus analysé a été enregistré lors d’une matinée de visite dans un complexe muséal. Quatre élèves de 8 à 10 ans, issus de la même classe, sont accompagnés par deux enseignantes formées dans le domaine des handicaps. La guide fait partie du personnel du musée, elle est spécialisée dans l’animation d’ateliers et de visites pour enfants.
19Dans notre enregistrement, les enfants sont tous déficients visuels mais un seul, Kevin, a commencé à étudier le braille et à pratiquer la lecture manuelle, qui fait l’objet de plusieurs séquences de lecture. D’autres enfants, que nous appellerons Abderrahim et Ahmed, présentent des troubles associés : des problèmes de motricité, des déficits cognitifs et d’articulation de la parole. Dans cet article, Kevin uniquement fera l’objet de nos analyses.
20Pour ce qui concerne le dispositif d’enregistrement, deux caméras ont été utilisées : l’une focalisée sur la guide et l’autre sur le groupe des participants. Deux micros-cravates ont été placés, l’un sur la guide et l’autre sur l’une des enseignantes. La visite du groupe s’articule en trois moments : une courte visite de l’apothicairerie du musée (15 minutes), la visite du jardin avec l’exploration sensorielle des plantes et la récolte de feuilles et fleurs (25 minutes), enfin l’atelier de poterie où les enfants réalisent les pots où ils vont déposer les fruits de leur récolte (30 minutes environ).
21La collection que nous avons constituée contient des extraits de la visite à l’intérieur et à l’extérieur du musée. Dans le jardin, un panneau présente le nom courant et le nom botanique de chaque plante en deux systèmes d’écriture, c’est-à-dire en caractères latins et en braille. Ces derniers détails sont très importants pour nos analyses.
Analyses
22Cette section est dédiée à l’étude de certains usages du toucher que nous avons trouvés de manière récurrente dans notre corpus de données : le toucher dans la réorientation attentionnelle et le toucher en tant que geste haptique professionnel.
Toucher et réorientation attentionnelle
23Dans cette section, nous allons nous concentrer sur la place du toucher dans l’orientation du focus attentionnel de l’enfant vers un « objet » spécifique (verbal ou matériel). Il s’agit de situations où l’adulte interagit directement avec l’enfant en vue de la réalisation d’une tâche, d’écoute, d’observation ou d’interaction directe avec l’objet cible.
24Dans la plupart des cas, l’orientation attentionnelle de l’enfant se construit, au niveau verbal, avec des directifs (regarde, écoute, sens), ce qui n’est pas surprenant étant donné les participants (enfants et adultes) et les activités (pédagogiques) observés. Sur le plan gestuel, contrairement à ce que l’on observe dans des visites guidées avec des adultes (non handicapés), où ce sont souvent les gestes déictiques et les mouvements du corps qui signalent l’objet d’attention et indiquent la réorientation des participants (De Stefani, 2013 ; Mondada, 2015), dans notre cas, c’est le fait de toucher l’enfant qui prédomine dans la focalisation attentionnelle sur l’objet cible2. Nous montrons cette configuration multimodale dans l’extrait 13.
25Le groupe se trouve à l’intérieur du musée, et les participants sont en train d’entrer dans une vieille apothicairerie, avec des vitrines contenant des pots. La guide (GUI) et l’une des enseignantes (ENS) sollicitent l’attention des enfants en les orientant vers les objets présents dans la salle4.
Extrait 1. Enfants musée_Vitrine (00:03:18 – 00:03:42)
26La guide annonce ce que les enfants vont voir dans la pièce, puis elle modifie son cours d’action pour avertir les enfants de la présence de vitres et d’autres objets fragiles dans la petite pièce (lignes 01 à 04)5. Ligne 03, elle commence à s’éloigner de Kevin. Il est donc seul face à la vitrine quand la guide produit le déictique spatial « ici », ligne 04. Kevin réutilise le même référent pour vérifier le lieu indiqué, en se déplaçant vers la vitrine à sa gauche (ligne 05). À la suite de ce mouvement de Kevin, c’est l’enseignante qui intervient. Ligne 06, elle utilise deux fois le directif « regarde bien » et, pendant la répétition de ce verbe, elle réoriente avec sa main la tête de Kevin vers la vitrine, qui se trouve initialement derrière lui (images 3 à 4)6.
27En termes d’organisation du toucher, nous pouvons constater que l’action manuelle de l’enseignante sur Kevin est structurée en plusieurs moments.
- Moment 1 : déplacement de la tête du point de départ. Ici, le toucher de l’enseignante est ponctuel, limité à un contact entre les bouts des doigts et la tête de l’enfant (image 4).
- Moment 2 : stabilisation du mouvement. Dans ce cas, la main est à plat sur la tête de Kevin (image 5). L’enseignante semble exercer une pression et avec la paume ouverte stabilise la direction de la tête de Kevin7.
28Cette configuration du toucher nous montre donc le caractère praxéologique et local de l’activité, c’est-à-dire un « geste » haptique, où la main s’articule et se modifie selon que le toucher est utilisé pour orienter la tête (bout des doigts) ou pour stabiliser l’orientation attentionnelle (main à plat) dans ce moment précis de l’activité. Dans le second cas, la durée du contact est majeure, ce qui nous permet de souligner la dimension temporelle du toucher dans l’accomplissement de ces actions manuelles.
29Toujours dans la même salle du musée, l’extrait 2 fournit un exemple de geste qui oriente l’attention de l’enfant. Léa, une des enfants, vient de nommer le lieu suite à une question précise de la part de la guide (« comment on appelle cet endroit où on va acheter des médicaments », données non montrées). La réponse de Léa, « la pharmacie », représente la dénomination actuelle du lieu, qui est validée par la guide (« bravo », ligne 01).
Extrait 2. Enfants musée_Apothicairerie (00:12:23 – 00:12:50)
30La réponse donnée par Léa est reprise par la guide (« donc ici nous sommes dans une ancienne pharmacie », lignes 01 à 02), cette reformulation introduit une nouvelle dénomination. Elle est annoncée par une unité introductive (ligne 04), accompagnée d’un geste spécifique de la guide. En effleurant le visage d’Abderrahim, qui est penché vers le bas à ce moment-là, la guide cherche à solliciter l’attention de l’enfant (image 1), sans succès. Ensuite, elle s’adresse à tous les enfants par un directif (« e- e- écoutez-moi », ligne 05). Ici, le rôle de l’enseignante est encore une fois central, tout en s’inscrivant dans la ligne actionnelle de la guide. Elle lui fait écho (ligne 06), puis elle formule une tâche spécifique à effectuer (« retenez le mot ») et produit une véritable complétion syntaxique du tour précédent, annonçant la difficulté du nom (« c’est difficile hein », ligne 09). Pendant la production du directif, elle touche la main à plat la tête de Kevin, qui est à sa droite (image 2). Ce geste se configure donc comme un geste haptique qui oriente l’attention de l’enfant vers la tâche en cours. La sélection de Kevin en tant que destinataire de cette tâche n’est pas seulement verbale (son nom figure à l’initiale du tour de l’enseignante, ligne 11), mais aussi multimodale. L’enseignante réalise d’abord un geste ponctuel (le doigt touchant l’épaule de l’enfant, image 3), ensuite un geste plus étendu (paume détendue, image 4). La mobilisation de la main de l’adulte sur l’enfant revêt une grande importance : ces deux configurations manuelles sont également associées à deux unités de construction du tour différentes, la première visant à sélectionner l’enfant comme interlocuteur et destinataire de la tâche (« Kevin t` as une mission »), le deuxième accompagnant la formulation de cette tâche pendant toute sa durée (« tu dois retenir le mot ») et au-delà, pendant la demande ultérieure (« tu es prêt », ligne 13). Encore une fois, on remarque l’orientation des participants vers la temporalité du geste. L’enfant produit ainsi l’acceptation de la tâche (ligne 14) et l’enseignante garde toujours le contact avec lui, en sollicitant ultérieurement son attention (« mets ton enregistrement en route dans ton cerveau », lignes 15 et 17). Cette fois, la configuration manuelle est différente (paume fermée, image 5). La répétition de « tu es prêt » est encore une fois suivie d’une réponse verbale (« mh mh », ligne 20). L’enseignante prépare donc soigneusement le terrain pour assurer la réussite de la tâche de mémorisation du mot. Dans ce cas, l’orientation attentionnelle est dirigée vers une entité abstraite, une dénomination.
31Dans ces deux premiers extraits, la main paume ouverte est associée à l’initiation d’une activité spécifique, en exerçant une pression sur la tête de l’enfant l’enseignante sollicite son attention. D’autres configurations manuelles peuvent être mobilisées pour cette finalité (extrait 2). Ces « gestes haptiques » acquièrent un certain niveau de spécificité et de précision selon l’action à réaliser et la partie du corps touchée. Nous allons revenir sur ce point grâce à l’analyse d’un moment de lecture en braille, qui nous en fournit un cas éclairant.
Le geste haptique professionnel
32La présence de deux adultes ayant des compétences et des rôles différents dans le cadre de la visite guidée observée nous a permis de remarquer des caractéristiques dans la réalisation de certains gestes haptiques, que nous appelons ici « gestes haptiques professionnels8 ». Dans ce type d’interaction, leur fonction ne se réduit pas à faciliter les échanges pédagogiques dyadiques (entre l’enseignante et l’élève auquel elle s’adresse par des tours directifs), mais, comme nous le montrons à l’aide d’une analyse fine de l’activité multimodale, elle s’inscrit dans un processus de découverte multisensorielle collaborativement réalisée et, ensuite, socialement partagée.
33Il s’agit de gestes qui accompagnent l’activité de lecture en braille de l’enfant malvoyant, et qui guident sa main sur les panneaux des plantes. Nous rappelons ici que, dans cette interaction, les adultes ont des rôles différents au sein de la visite. L’enseignante est la personne qui est responsable du groupe et conduit avec les élèves des activités pédagogiques pendant l’année, tandis que la guide est en charge de l’organisation et réalisation des activités pédagogiques dans le cadre de la visite du musée. Elle accueille donc un public varié et n’a pas des compétences spécifiques dans la lecture en braille à notre connaissance (ce qui est corroboré par l’analyse des données ci-dessous).
34Dans l’extrait 3, le groupe se trouve dans le jardin et vient de découvrir les caractéristiques tactiles et olfactives de la menthe. La guide invite Kevin à lire le nom de cette plante, en posant la main de l’enfant sur le panneau9. Après un premier refus de l’élève, qu’il justifie par le fait qu’il sait lire le braille et qu’il connaît déjà la plante, données non montrées, la guide insiste et encourage Kevin à trouver la lettre m dans le panneau.
Extrait 3. Enfants musée_Menthe (00:30:15 – 00:30:36)
35Lignes 01 à 04, la guide ne s’aligne pas au refus de Kevin qui ne veut pas lire : elle produit un tour de parole contenant des directifs (« attends attends vas y trouve moi la lettre em en braille », ligne 02) et elle prend le poignet de Kevin pour positionner sa main sur le panneau (images 1 et 2). L’intervention de réparation10 de l’enseignante, qui a lieu juste après est intéressante, car elle nous permet d’observer deux aspects saillants pour notre analyse, l’un concernant le geste professionnel et l’autre la configuration du geste haptique. D’abord, si l’on observe les images 1 et 2 et si on les compare aux images 3 à 5, on constate que la prise de main de l’enseignante n’est pas tout à fait la même que celle de la guide. Sa main se positionne sur celle de Kevin (images 3, 4 et 5), tandis que celle de la guide saisit le poignet de l’enfant en dessous (images 1 et 2). Cette nouvelle configuration de la « prise de main », ainsi que l’explication de la réparation accomplie (lignes 05 à 10), exhibe l’expertise de l’enseignante et son autorité épistémique concernant trois aspects principaux : premièrement, la connaissance du niveau de compétence du braille possédé par l’enfant (« il y a une majuscule que Kevin ne sait pas lire », ligne 15) ; deuxièmement, sa propre connaissance à la fois encyclopédique et opérationnelle de l’alphabet braille, concernant les matrices qui correspondent aux caractères (« là en fait c’est le numéro », ligne 10) et la manière d’effectuer la lecture manuelle, avec une configuration et des mouvements spécifiques des doigts ; enfin, son expertise pédagogique sur la manière de toucher et saisir la main de l’élève et de la guider sur le panneau (images 1 à 7). L’exécution de la lecture requiert donc un accompagnement tactile expert. Ceci est le rôle de l’enseignant qui saisit la main de l’élève d’une façon particulière et conduit ses doigts sur les zones pertinentes situées dans une section déterminée du panneau, où se trouvent les caractères en braille. Cette opération implique également que l’enseignante opère une sélection au sein de cette zone puisqu’elle tient compte des compétences spécifiques de l’enfant (dans ce cas, en effet, l’élève n’est pas encore capable de déchiffrer les matrices correspondant à des caractères alphabétiques majuscules, voir ligne 15).
36Le répertoire des gestes qui s’inscrivent dans des activités pédagogiques n’est pas seulement constitué de gestes de précision (professionnels) s’appuyant sur des compétences spécifiques comme la lecture du braille, une activité récurrente au cours de la visite, mais aussi, plus largement, de gestes qui sollicitent et accompagnent l’orientation de l’enfant dans l’espace, ce qui fait l’objet de la section suivante.
Toucher et orientation spatiale
37Pendant la visite dans le jardin, les enfants découvrent les plantes par plusieurs moyens : ils les touchent de manières différentes, hument leurs feuilles, lisent les panneaux métalliques qui présentent leurs noms en braille. Dans cette section, nous nous concentrons sur la transition d’une modalité d’appréhension de la plante, à travers l’écriture de son nom sur le panneau11, à une autre, concernant d’autres ressources sensorielles chez l’enfant.
Extrait 4. Enfants musée_Ciboulette(a) (00:21:50 – 00:21:57)
38Nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer le fait que, dans le jardin, un panneau présente pour chaque plante le nom courant en français et le nom botanique, en caractères latins et en braille. Au début de cet extrait, après avoir terminé la lecture des différentes matrices braille associées aux lettres du mot « ciboulette », l’enseignante guide le doigt de Kevin sur le panneau en lui faisant parcourir de nouveau les matrices. Parallèlement, elle prononce le mot, lentement, avec une scansion en syllabes (ligne 01). Ensuite, elle produit le mot en entier avec un débit normal (ligne 03). Les deux participants sont bien focalisés sur cette activité, l’enseignante regarde Kevin qui se tient au poteau du panneau12 (l’image 3 montre sa main droite) et produit en chevauchement avec l’enseignante la dernière syllabe du mot (ligne 02), la tâche est ainsi réalisée collaborativement, sous le contrôle de l’enseignante. Si l’on considère la configuration manuelle de l’adulte et que l’on compare les deux premières images à l’image 3, on note un changement dans la manière de saisir la main de l’élève. En particulier, les doigts de l’adulte se détendent et la main retourne à plat pour prendre la main de Kevin et la déplacer vers le bas (images 3 et 4).
39Ci-dessous nous reproposons les images 1 et 2 ainsi qu’une une nouvelle image (#I), capturée quelques instants avant au cours de la même activité (00:21:13), qui montre plus clairement la position de la main de l’enseignante durant l’activité de lecture :
40Afin de visualiser le moment de la transition, où l’on voit la main de l’enseignante à plat au-dessous de la main de Kevin, nous avons encore une fois introduit une image supplémentaire (#II) qui montre plus clairement la position de la main de l’adulte.
41Ensuite, une nouvelle phase de l’activité est introduite par l’enseignante. Sur le plan verbal, le tour ligne 05 présente deux connecteurs et un verbe de monstration (« et donc je t’explique »), des caractéristiques qui projettent une nouvelle phase de l’activité pédagogique. Sur les plans gestuel et corporel, l’enseignante lâche la main d’Abderrahim, l’enfant qui est derrière Kevin, et pose sa main sur l’épaule de ce dernier (images 6 et 7). Elle initie ainsi une torsion du buste, qui accompagne le mouvement du corps entier de l’enfant (Cekaite, 2010, 2016). Le foyer d’attention de Kevin est ainsi déplacé par l’enseignante qui recourt à plusieurs ressources multimodales pour accompagner le mouvement corporel de l’élève (images 7 et 8).
42L’extrait 5 nous permet de montrer l’aboutissement de cette transition, qui conduit à une autre activité.
Extrait 5. Enfants musée_Ciboulette(b) (00:21:58 – 00:22:12)
43Ligne 08, l’enseignante revient sur l’activité de lecture qui vient de se terminer, puis elle accompagne le mouvement de la main de Kevin, qui est déplacée vers le haut, et touche de nouveau le panneau (image 9). Nous observons ici, à nouveau, le passage d’un geste haptique professionnel – la prise de main qui caractérise la lecture – à un geste orienté vers l’organisation de la transition d’une activité à l’autre. Cela est visible sur les images 10 et 11, où la prise de la main change pour accompagner l’enfant vers l’activité suivante, de la même manière que celle observée dans l’extrait 4. Dans ce cas, la main reste la partie du corps sélectionnée, car ce sera elle qui permettra à Kevin d’accomplir l’activité suivante. Ensuite, l’enseignante sollicite un mouvement général du corps par sa propre posture et, en particulier, à l’aide de la pression vraisemblablement exercée par sa main sur l’épaule de Kevin (images 10 et 11). Ce changement dans l’organisation spatiale est verbalement signalé par une première construction (« et si tu te baisses », ligne 09), qui verbalise la réorientation corporelle et annonce une prochaine activité à suivre. Ligne 11, l’objet de cette nouvelle activité est introduit de manière verbale (« la plante qui est là c’est la ciboulette13 »). Cette nouvelle configuration spatiale des participants présente des similarités avec ce que Goodwin (2006) et McIlvenny (2009) appellent « C-formation14 », dans la lignée de Kendon (1990). Selon Cekaite (2010), il s’agit d’une « embodied formation of control » (p. 7), où l’adulte positionne son corps de sorte qu’il puisse guider l’enfant dans l’accomplissement d’une tâche et contrôler efficacement ses mouvements, dans une posture participationnelle asymétrique (versus la disposition en face à face, qui implique un statut égalitaire entre les participants). Avant de terminer son tour, l’adulte lâche la main de l’enfant et le libère ainsi du lien intercorporel qui liait les deux. Elle déplace sa main droite et saisit de nouveau la main d’Abderrahim (image 12).
44Une nouvelle expérience sensorielle de la plante, cette fois en s’appuyant sur l’odorat (« sens-la d’abord (0.3) sens »), est introduite à la ligne 13 à l’aide de deux directifs. Le mouvement vers le bas du corps de Kevin a donc pour but de sentir la ciboulette (image 13). La guide produit juste après un compliment, qui vaut aussi comme évaluation de l’activité de découverte de la plante15 et clôture l’échange pédagogique ternaire (« bravo: Kevin », ligne 17).
45L’enseignante opère sur le corps des enfants un rôle de guide et d’accompagnatrice, elle jette un pont entre deux expériences distinctes qui sont reliées à un même référent, ici la ciboulette. Ses tours verbaux formulent les tâches à accomplir (« sens-la »), mais cherchent aussi à fixer le résultat des activités avec une finalité pédagogique qui s’inscrit dans un parcours de découverte des plantes du jardin, en mobilisant plusieurs ressources sensorielles. Par ailleurs, cette activité ne se limite pas au seul aspect de découverte individuelle, mais elle est recontextualisée dans une dimension collective. Lorsque l’enseignante demande « ça sent bon/ » (ligne 18), elle sollicite une verbalisation qui permet de restituer l’expérience sensorielle de la plante, dans ce cas associée à l’odorat, et de la partager avec le groupe16.
Conclusions
46Dans cette étude, nous nous sommes intéressés à analyser la place du toucher dans l’accomplissement et l’organisation d’activités proposées par des adultes à des enfants ayant des déficits visuels et corporels. Nous avons d’abord pu observer l’omniprésence du contact physique parmi les participants, justifié, à notre avis, par les conditions contextuelles mentionnées plus haut. Notre regard analytique, qui considère la parole-en-interaction comme un système de ressources sémiotiques (comprenant les ressources verbales, les regards, les gestes, le corps avec ses orientations et ses déplacements, etc.) organisées et séquentiellement structurées, nous a amenés à décrire les activités en donnant une place centrale au toucher en tant que ressource. Nous avons donc focalisé notre étude sur deux aspects du toucher, strictement liés, qui semblent jouer un rôle important dans les interactions observées. Un premier aspect fait référence aux modalités du toucher, un deuxième à l’activité dans laquelle le toucher s’inscrit. Les configurations manuelles observées en situation, illustrent la complexité du toucher, où les changements dans le positionnement de la main sur le corps cible ne sont pas aléatoires, mais, au contraire, adaptés à l’action (par exemple, la pression exercée par la main ouverte de l’enseignante sur la tête de l’enfant pour solliciter une réorientation attentionnelle) et à l’activité en cours (entendue au sens large, par exemple la découverte d’une plante qui passe par plusieurs modalités sensorielles). La position des mains et les différentes configurations manuelles de l’enseignante par rapport aux mains des enfants, mais aussi par rapport aux supports matériels (les panneaux informatifs, voir en particulier les extraits 3, 4 et 5), permettent d’étudier temporellement et séquentiellement le déploiement de ces ressources corporelles, qui sont à la fois des organes d’action et de perception (Streeck 2009, p. 52-54). Elles peuvent également être associées à l’exercice d’un contrôle sur l’activité en cours, qui concerne plusieurs parties du corps comme la tête, les épaules (extraits 1 et 2). En ce sens, la fonction d’orientation attentionnelle s’explique dans la possibilité de diriger le foyer attentionnel des enfants par des touchers différents qui ne se configurent pas comme des simples contacts corporels, mais comme des véritables gestes « haptiques ». Par ailleurs, les différentes réalisations du toucher et la possibilité de naviguer dans l’espace entre plusieurs foyers d’attention permettent à l’enseignante d’accompagner l’élève dans les différents moments d’exploration sensorielle. La réalisation de l’activité n’est donc pas le résultat d’une expérience individuelle, mais l’aboutissement d’un processus temporellement organisé et accessible à tous les participants (comme le montre la contribution d’Abderrahim, ligne 14 extrait 5).
47D’un point de vue analytique, nous n’avons pas présenté des corrélations systématiques en associant un certain format (forme et position de la main) du toucher à une action spécifique. Toutefois, certaines ressources manuelles, comme la paume ouverte et la pression exercée sur la tête de l’enfant, sont utilisées de manière récurrente dans nos données pour solliciter l’orientation attentionnelle. Nous avons également analysé le degré d’expertise qui caractérise le geste haptique professionnel de l’enseignante, par exemple quand elle manifeste son savoir-faire tactile dans l’accompagnement de son élève au cours de la lecture braille (extrait 3). Concernant la construction verbale des activités dans lesquelles les ressources tactiles s’inscrivent, elles sont caractérisées par l’utilisation massive de directifs (extraits 1, 2, 4 et 5).
48Cette étude nous permet également d’élargir notre réflexion sur la place des gestes haptiques dans le contexte observé. En effet, ils contribuent au développement des compétences des jeunes participants, en stimulant l’intercorporéité comme dimension de construction sociale (Merleau-Ponty 1945), pour se confronter avec leur expérienciation d’objets divers, et même pour réaliser une pratique interactionnellement partagée, voire socialisée, du monde extérieur. Bien que le toucher soit une des ressources à disposition des adultes pour faire accomplir une action par l’enfant, comme Cekaite et Goodwin 2012 le soulignent, dans le cas ici étudié, le toucher opère un accompagnement attentionnel qui semble être adapté au déficit perceptif des participants. Downing et Chen (2003), par exemple, soulignent l’importance de cette pratique haptique (« tactile mutual attention ») dans la réalisation d’actions communes entre apprenants sans et avec déficit visuel. Ainsi, la collaboration entre apprenants qui ont différentes voies d’accès au monde extérieur se traduit par un ajustement mutuel et un processus de « modulation » (Anzalone & Lane 2011). Cela permet non seulement d’avoir accès à des détails pertinents pour l’appréhension sensorielle, mais aussi de produire des réponses appropriées dans un cadre pédagogique informel et partagé.
49Notre travail nous permet également de souligner la spécificité de la conduite de l’enseignante, dans son efficacité pédagogique, et d’éclairer son statut spécifique en termes épistémiques. Sa compétence d’interaction émerge comme temporellement située dans des contextes séquentiels différents, avec d’autres adultes (la guide notamment) et plusieurs enfants (ses élèves). En revanche, la guide du musée apparaît comme une accompagnatrice non experte. Le repérage de « gestes haptiques professionnels » (extrait 3) chez l’enseignante nous a amenés à souligner cette disparité de rôles, qui est une caractéristique émergeant dans l’interaction, visible et donc analysable (« accountable ») à l’aide d’une analyse multimodale fine. La prise en compte des positionnements mutuels des interactants dans les transitions d’activités et, plus en général, au cours des différentes phases de la visite, pourraient fournir d’ultérieurs éclairages sur le rôle des adultes dans le cadre des différentes activités. Autrement dit, l’étude multimodale systématique des configurations et reconfigurations des cadres participatifs (Goodwin & Goodwin 2004) constitue un outil précieux pour questionner l’organisation des domaines épistémiques et la dimension intersubjective de l’exploration sensorielle dans les interactions adultes-enfants.
Bibliographie
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10.1525/si.2001.24.2.189 :Annexe
La version complète des conventions ICOR est consultable sur le site CORINTE <http://icar.univ-lyon2.fr/projets/corinte/>.
Conventions de transcription (1)
[ ] | début et fin du chevauchement | xxx | segment inaudible |
par‐ | troncation | / \ | intonation montante/ descendante\ |
: | allongement | .h | aspiration |
(.) | pauses non chronométrées (<0.2s) | (il va) | transcription incertaine |
(2.2) | pauses chronométrées (en sec.) | °bon° | voix basse ou très basse (°°bon°°) |
& | continuation du tour de parole | ALORS | volume augmenté ou autre marque d’insistance |
((rire)) | phénomènes non transcrits, commentaires | […] | coupure due au transcripteur |
Les conventions pour la notation des gestes sont consultables sur le site CORVIS <http://icar.univ-lyon2.fr/projets/corvis/>.
Conventions de transcription (2)
ENS | Dans la colonne des pseudonymes, l’usage des caractères grisés indique que la ligne est consacrée à une description de gestes. |
* * | Dans la transcription, indique le début et la fin du geste décrit à la ligne suivante. |
+ + | Dans la transcription, indique le début et la fin d’un regard ou d’un geste décrit à la ligne suivante. |
… | Indique la préparation d’un geste. |
,,, | Indique la rétractation d’un geste. |
(( )) | Description de geste. |
--> | Indique que le geste continue jusqu’à la borne suivante. |
# | Situe l’emplacement d’une image tirée de la bande vidéo. |
Notes de bas de page
1 Pour une revue détaillée du parcours scientifique de cet auteur, voir les contributions réunies dans le dossier thématique « Autour de l’anthropologie linguistique de Charles Goodwin », paru dans la revue Tracés (Charbonnier, Festa, Kreplak, Rabier & Saint-Germier, 2016).
2 Cette ressource est utilisée de manière récurrente par l’enseignante (ENS) dans son interaction avec Kevin (KEV). Nos analyses sont essentiellement qualitatives du fait qu’elles se basent sur l’enregistrement d’une seule journée et ne permettent actuellement pas d’établir des généralisations quantitatives (notamment, par la comparabilité des stratégies mobilisées par d’autres enseignant.e.s accompagnant des enfants malvoyants).
3 Sur les contraintes inhérentes à la transcription du toucher, nous renvoyons à Greco et coll. (à paraître).
4 Une autre personne est présente dans la pièce mais elle ne contribue pas (de manière visible à nos yeux) à la construction de l’activité observée.
5 Nous n’allons pas nous intéresser ici à l’échange dyadique entre la guide et Kevin, lignes 02 à 04.
6 En effet, il est difficile de dire qui entre les deux participants oriente définitivement la tête vers la vitrine arrière. Il se peut que le mouvement initié par l’enseignante soit ensuite dirigé par Kevin vers la cible finale.
7 Nous retrouvons ce geste haptique ailleurs dans la visite, notamment durant l’activité de lecture avec Kevin (analysé plus haut), mobilisé par l’enseignante à la suite d’une question spécifique sur les lettres de l’alphabet braille.
8 Ici, nous faisons écho à la notion de « professional vision » utilisée par Charles Goodwin (1994) dans son étude sur le travail de terrain des archéologues.
9 Pour des raisons d’espace, nous ne pouvons pas analyser dans le détail cette partie de l’interaction, où la guide essaie de mobiliser la main droite de Kevin, qui en revanche répond à cette première sollicitation de lecture en mettant sur le panneau sa main gauche. Cette action montre son manque de compétences à elle dans la lecture braille et le manque de connaissances des niveaux de compétences des enfants qui participent à la visite (dans ce cas, la configuration manuelle propre à l’activité de lecture du braille et l’emplacement de la main sur le panneau représentent deux exemples en ce sens).
10 L’enseignant accomplit également une action de remédiation (« repair work ») dans le sens proposé par Goffman (1971), où l’« offence » est celle de la guide (« offender »), qui fait réaliser à l’enfant (la victime) une activité pour laquelle il n’a pas les compétences.
11 Les séquences de lecture du braille, avec l’accompagnement tactile de l’enseignante, ne sont pas analysées dans ce travail. Elles pourront faire l’objet de contributions ultérieures.
12 Nous rappelons que Kevin est l’un des enfants qui ne présente qu’un handicap visuel, contrairement à Abderrahim (l’enfant qui est derrière Kevin, voir les images 5 à 11 de cet extrait), qui présente un important déficit visuel, des troubles cognitifs et des problèmes de motricité. En effet, il s’appuie au dos de son camarade lorsque l’enseignante lâche sa main (voir plus loin).
13 La focalisation sur le nouveau référent est réalisée à l’aide d’une dislocation à gauche (« la plante qui est là c’est la ciboulette »).
14 Dans sa forme prototypique, telle qu’elle est décrite par M. Goodwin (2006) et Cekaite (2010), entre autres, la « C-configuration » prévoit que l’adulte se trouve exactement derrière l’enfant. Dans cet extrait, l’enseignante n’est pas à proprement parler derrière l’enfant, Kevin ne lui tourne pas son dos. Mais, par rapport au corps de l’enfant, l’adulte se situe légèrement en retrait et à côté (à sa gauche). Cette position est maintenue pour accompagner l’élève pendant l’activité de lecture et, en particulier, permet à l’enseignante d’avoir accès aux détails visuels du panneau en braille. Ensuite, lorsque l’enseignante demande à Kevin de sentir la ciboulette, elle sollicite une importante réorientation corporelle, en le poussant vers le bas (image 11 de l’extrait 5). Dans les deux cas, le rôle pédagogique de l’adulte se reflète dans des postures participationnelles asymétriques. L’appréhension expérientielle des objets de la visite guidée, médiée par l’enseignante, s’avère ainsi moins problématique pour l’enfant malvoyant.
15 Cette appréciation est prononcée après le tour verbal de l’enseignante qui porte sur l’activité de lecture (« il a lu ciboulette », ligne 14), mais la guide produit son tour après avoir suivi du regard l’action de sentir la plante (accomplie par Kevin après les tours directifs de l’enseignante). Ligne 16, le tour de la guide réfère donc à l’activité de découverte multi-sensorielle de la plante (voir plus loin).
16 Par ailleurs, Abderrahim répète le mot qui a fait l’objet de l’activité de lecture (ligne 13), en montrant un rôle de participant (ré)actif dans le processus de découverte de son camarade. Et l’enseignante se réfère au résultat de l’activité quand elle dit « il a lu ciboulette », un tour qui ne s’adresse pas à Kevin mais à Abderrahim.
Auteurs
Laboratoire LIDILEM, Université Grenoble Alpes, laboratoire ICAR (UMR 5191)
Laboratoire ICAR (UMR 5191), École normale supérieure de Lyon
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