« Je suis la poésie »1
p. 333-340
Texte intégral
1L’engagement poétique de Paul Celan apparaît, minutieusement décrit, dans les interprétations de Jean Bollack. Le « lieu » propre en est d’abord « l’événement », terme réservé dans la critique du philologue à l’extermination des juifs d’Europe, et à la date du 20 janvier 1942. Puis, la décision particulière du poète de faire de cet événement le point de départ d’une poésie critique de la poésie. La critique philologique détermine deux présuppositions de l’entreprise poétique de Celan :
pour que la particularité radicale surgisse dans la langue, non en tant que telle, illisible, mais contaminée par une lisibilité qui seule la fait arriver « in actu », Bollack considère l’art poétique comme autonome.
Dans le cadre de cette autonomie, l’expérience s’écrit à deux mains. Poetik der Fremdheit, c’est la reconstruction de L’écrit à deux mains, reconstruction d’une lutte et d’une réflexion sur les conditions de sa possibilité, jamais assurée d’avance, toujours et essentiellement menacée.
2Pour Bollack, l’autonomie n’est pas le dernier mot. L’art ne supplée pas le monde refusé. Aussi n’est-il pas une finalité en soi. Car par les voies de l’art une tension est maintenue. « Ce qui pourrait être appelé juif, c’est l’art de saisir l’art, la distance mise devant tout contenu »2. D’emblée hors de lui-même, l’art crée la distance. Mais la distance est, en dernière instance, elle-même à dépasser. Elle ne fait pas position, sinon la position d’une apositionnalité. Les contraires sont dissociés. L’art contredit, sans s’imposer à son tour. Mais ses réussites et ses lacunes, présentes simultanément, ne sont plus dans un rapport proprement contradictoire. « Le couple de contraires stylise une harmonisation spécieuse. L’autre pôle a son autonomie. Le terme est contre-posé, et il se détache, en s’éloignant »3. Il s’agit d’une remise en question de la tradition entière. Seule échappe à cette remise en question la tradition de remettre en question. Même la séparation constitutive et primordiale n’est pas alors un dernier mot. « Le dépassement initial qu’est la rupture reste présent dans le travail compositionnel »4.
3L’impulsion se montre dans la réflexivité de la poésie de Celan, une poésie contre une autre. C’est là l’aspect scandaleux de sa poésie : le moment où la littérature sort de la littérature par la littérature. La modernité de Celan n’est que très rarement admise par ses lecteurs, ni à Fribourg, au bord de la Forêt Noire, ni ailleurs5. Et qu’il s’agisse pour cette poésie de faire l’âme monstrueuse là où on supposait les belles âmes, était – est toujours – l’intolérable. « Aux yeux des lecteurs ou des critiques, il ne revenait pas à la poésie de perpétuer l’accusation. Elle n’en tire ni ses droits ni sa raison d’être. Qui a eu l’idée de dire, depuis trente ans, que c’est cette dénégation que Celan avait prise comme thème de ses invectives ? »6
4Une telle inclination de la modernité de l’art pour l’événement est en fait monstrueuse, une entreprise impossible. La lutte contre la tradition littéraire peut être perdue à tout moment – même pour un maître. Après avoir cité « In den Flüssen »7, Bollack parle du « Tonfall » de Celan et se demande : « Que fait-il après tout ? Que pouvait-il faire d’autre que lire les auteurs, les grands poètes ? C’est de là qu’il tire ses "ombres", déposées dans l’écrit des œuvres qu’il conteste. [...] Mais fait-il bien ? L’interrogation subsiste. La contradiction même dans les textes qu’il écrit reste imprégnée par l’événement, et la dureté de l’événement est en ce lieu même mise à l’épreuve, elle est comme entamée. L’hésitation se comprend bien. C’est comme dans les derniers vers de « Tu es couché ». Avec Karl Liebknecht et Rosa Luxemburg, on pouvait y aller, et faire du Celan, mais l’horreur peut être plus forte que la révolte, aucun "bruissement", ni de rythme, ni de vers, ne se produira. La pointe du texte tend vers un échec »8.
5Telle qu’elle est conçue dans L’écrit, l’autonomie n’est jamais pure, et toujours précaire. La détermination du sujet historique ne la contredit pas. Au contraire, l’ancrage résolu dans l’Histoire est la condition de possibilité de cette autonomie. Il n’y avait rien d’autre à faire. Et pourtant il s’agit d’un choix souverain. Toujours est-il que la relecture interne, sur le mode parodique, se trouve face à face avec le monstrueux de l’événement. Le sujet historique peut, à partir d’une décision primordiale, lier les mots aux morts. La distance nécessaire n’est jamais acquise, même dans la parodie et l’ironie. Il n’est pas gagné d’avance que les mots puissent servir à l’entreprise. Il n’est jamais assuré que le sujet lyrique soit en mesure d’assumer les conséquences de la règle du jeu imposée par le sujet historique, qui a bâti sa « maison » sur la date du 20 janvier 1942.
6La cheville ouvrière de l’interprétation de Bollack, l’autonomie toujours menacée, surgit du dédoublement du sujet, du jeu des pronoms dans les poèmes de Celan : la relation entre un « je » historique et souverain, que Bollack pose hors langage et qui n’écrit pas, et un « je » lyrique, le « tu » des poèmes qui est chargé de retravailler la langue en suivant la décision primordiale du « je » historique9. Le « je » et le « tu » se constituent par dissociation. Le rapport est essentiellement instable et connaît un grand nombre de variations. Le « tu », comme alter ego10 du « je », peut devenir un pôle d’altérité. Mais il peut aussi incorporer son alter ego, tout comme il peut être incorporé par lui. Et comme la dissociation des deux instances est constitutive de leur présence, l’incorporation de l’un dans l’autre, qui revient à un enfermement, entraîne leur disparition : « ils s’engloutissent ensemble sans laisser de traces »11.
7Cette séparation n’a rien de naturel. Dans les poèmes, elle ne reflète pas une logique philosophique de la réflexivité. Le poème, comme lieu de la séparation, n’est pas du monde. Dans son pouvoir de le nier, il postule son indépendance. Le « je » historique, hors langage lyrique, l’instance du dehors du poème dans le poème, ce « je » transformé par la dissociation, par laquelle il est déterminé dans le poème, paraît effectivement hors de tout langage. Mais la dissociation « est de caractère linguistique dans le fond, pour personnelle qu’elle soit au départ. Elle s’effectue dans la langue, s’affirme en elle, en tire son pouvoir »12. La dissociation est un fait de langage lyrique, le temps d’un poème. La force de poser un sens provient d’elle. Ce sens repose sur le pouvoir de la fiction qui elle-même reste liée à la langue.
8L’écrit à deux mains fait de l’autonomie « un espace, non clos, mais séparé »13. La formule employée par Bollack pour désigner cette autonomie – « Trennung, nicht Abkehr » – contredit les conceptions d’une autonomie de l’art que proposent maintes philosophies de l’art qui la veulent pure, et qui sont ainsi forcées de concevoir l’art comme un domaine sans lien autre qu’exclusivement négatif avec les domaines non-esthétiques14. Dans ces conceptions de l’autonomie le domaine esthétique est caractérisé par l’expérience esthétique qui, fait décisif, est absente chez Bollack ; il refuse tout résidu de l’immédiateté.
9Ce refus détermine le style du philologue. Bollack essaie d’unir l’analyse et la composition créatrice. Le style découle de la « théorie ». La précision philologique s’ajuste aux poèmes comme à l’auteur. Ce que Bollack écrivait sur Szondi vaut autant pour L’écrit : la « puissance analytique » ne s’oppose pas à la « composition créatrice »15. L’autonomie impure est liée à une réflexivité comme ultima ratio, qui définit la valeur d’une œuvre depuis l’événement et qui amène Bollack à esquisser un art futur, entièrement dénué des spéculations heideggeriennes sur le poète comme prophète. « L’analyse traite l’expérience, sans sortir de l’objet littéraire. Celle-là n’est pas moins primaire, ni moins forte, que celle-ci, que l’on croit plus immédiate. Dans une littérature plus libre encore que celle qui s’est détachée des traditions de parole, au cours des dernières générations, et qui les intégrerait sans partis pris, les frontières pourraient davantage s’estomper ou même s’effacer devant les acquis d’une réflexion théorique adéquate. On imagine un ordre de la création de plus en plus réflexif et contrôlé »16.
10La négativité, dans les conceptions classiques de l’autonomie de l’art souvent attribuée au domaine esthétique lui-même, figure chez Bollack justement comme moment essentiel de contamination. Matière de Bretagne17 est pour Jean Bollack l’un des poèmes où la coopération des deux instances arrive à une entente absolue. Au lieu de disparaître, le « je » est cette foisci non « enfermé », mais « accueilli » dans le « tu ». « (…) le "je", épuré lui-même, refaçonné, par un déplacement dans le jeu des interactions, recouvre dans la poésie son identité hors poésie »18. Inversement cela implique qu’il s’est créé un artiste accompli. L’autonomie de l’art trouve la condition de sa possibilité dans la condition de son impossibilité. Elle advient par ce qui ne fait pas partie d’elle, par le sujet historique et les conséquences qu’entraîne son entrée dans le langage poétique. « Le sujet historique, le "je", ce n’est pas l’artiste. Or la négation n’est pas le propre de l’art. L’instance est donc requise. Si selon Le Méridien, l’art authentique n’a pas le privilège de la protestation, son pouvoir négateur et utopique est implicitement contesté »19.
11L’art qui surgit de la répartition du travail entre le « je » historique et le « tu » en tant que « je » lyrique, n’est pas pur, mais « emprunté, secondaire »20, comme le sujet, qui se trouve dans les conflits de ses instances et ne les précède pas. Pour ces instances vaut également la première règle de toute entreprise vraiment herméneutique : « La mise en relation est une mise à distance. »21 Le rapport conflictuel entre les deux pôles donne la capacité de promouvoir une séparation à la fois radicale et ouverte envers ce qui est exclu par elle. C’est cette étrange simultanéité qui structure les interprétations dans L’écrit. Bollack ne cesse de le dire : l’art de Celan est abstrait. Il se crée un monde à part, qui surgit dans le poème et n’existe qu’en lui. Il ne s’agit pourtant pas d’une auto-référence sans rapport avec le dehors des poèmes. La « réalité » qu’ils créent nie justement la réalité empirique déjà constituée. Mais dans la négation, celle-ci reste lisible dans la réalité poétique. Ainsi tous les mots font partie, simultanément, de deux langues : l’allemand et le celanien. Le second nie le premier et crée une liberté nouvelle qui est la condition pour une resémantisation sans limite. « L’annulation du pouvoir évocateur connu libère des significations, restitue l’acte initial de la signification »22. C’est le travail du « je » lyrique et autonome. Mais ce travail s’effectue selon les instructions du sujet historique, le souverain.
12« Je » et « tu » permettent donc, et cela d’une manière tout à fait inouïe, de penser la souveraineté et l’autonomie ensemble23 – à partir d’une subjectivité critique, qui n’obéit pas au sens commun du sujet métaphysique. En effet, le « je » et le « tu » réunissent souveraineté et autonomie dans le sujet24 – un espace qui n’est pas homogène, mais essentiellement dissocié, et pourtant précédé par un choix premier qui l’ouvre. La personne est identique à ce choix. Cela implique qu’elle n’est pas le sujet historique, le « je » des poèmes, dans la mesure où elle n’est pas encore sujet, mais ce qui lui arrive, et sa résistance. En effet, c’est elle, plus exactement, qui peut être située hors langage, si cela veut dire qu’elle n’est pas enfermée par la langue, qu’elle ne peut aucunement être réduite à la langue. La souveraineté est donc principalement une particularité. La première qualité de cette particularité réside dans sa vision de l’histoire. « L’histoire, chez Szondi, épouse le vécu, mais avant tout sa vérité tragique »25. C’est là un choix décisif de la personne, fait avant tout assujettissement. C’est l’unique immédiateté admise. La formule « Lui comme un Je », avant toute écriture, donc aussi avant le « je » historique dans les poèmes, attribue une liberté inconditionnelle et primordiale à la personne. Celan a pris une décision par rapport à l’événement : « il en a fait son affaire à lui. [...] Ce n’est pas une contrainte qui lui a été imposée, comme on le dit, mais une nécessité qu’il met en avant »26, et qu’il aurait pu aussi bien esquiver. Ainsi, la personne vient avant le langage en affirmant sa particularité dans une première décision. Elle ouvre le rapport entre deux ordres : entre le langage et ce qui y entre pour faire sens. La personne désigne une avance irréductible sur la langue, une différance.
13L’intention de l’auteur, que Bollack défend résolument, n’est pas hors jeu. Elle se constitue, bien que la décision soit prise d’avance, dans les rapports complexes entre les deux instances. Force est de se demander si on peut encore parler d’intention. Elle semble être aussi dépassée que le sens, au moins dans ses implications philosophiques, contre lesquelles Bollack garde les anciens termes pour les resémantiser : intention en tant que « sens inscrit dans la matière »27. Dans l’emphase de l’extase, on voit à quel point l’intention dépasse le primat d’une conscience à soi. « L’extase crée les conditions du vrai ; c’est une affaire de justesse »28. Elle paraît dans la poésie de Celan comme extase essentiellement érotique. L’amour donne la force de transgresser la réalité29. « Le "je" sait qu’il va retrouver son "tu" dans ces parages extatiques »30, auxquels appartiennent essentiellement la dépendance et l’oubli de soi et de ses intentions31. Par conséquent, l’intention se transforme. Il serait plus approprié de parler d’effets d’intentionnalité. Ils déterminent le début, à savoir le choix, ainsi que la fin, la saisie de l’inconnu. Mais l’espace intermédiaire appartient au « je » lyrique.
14La méfiance envers l’intention dans ses implications idéalistes se reflète dans la critique et le refus de la représentation. La poésie de Celan ne représente rien pour Bollack. Les mots dans les poèmes de Celan ne représentent pas une réalité préexistante. Au prime abord ils n’expriment même pas une perception quelconque de cette réalité. D’abord, ils créent une réalité dans leur langage, différente et « contredisante ». « L’objet de l’interprétation n’est pas le sens, mais la capacité des œuvres à faire sens. (…) Le sens [...] est un instrument qui permet au texte de lutter contre d’autres sens »32. Ainsi, dans l’herméneutique critique ou matérielle de Bollack, la resémantisation n’aboutit pas simplement à un autre sens parce que le sens des termes décisifs pour la réfection n’est jamais fixé pour toujours, mais se constitue et se reconstitue à vif dans le poème : un sens autre, non présent à lui-même, mais essentiellement marqué par ce qu’il n’est pas. Effet de sens, pourrait-on dire, ce qui n’implique pas, justement, un manque de détermination. « L’œil » ne dit pas quelque chose, mais figure comme organe de processus. Il est cet organe. Et dans la temporalité du poème, « être » n’implique plus ni la présence ni la visibilité. Le sens n’est pas là, mais surgit dans la négation et ne peut paraître autrement. « Le contexte permet de cerner le mouvement de négation qui fixe le sens, posant pour déposer ; ce mouvement est un »33.
15Ainsi, le sens n’est pas vraiment déchiffrable. L’expérience herméneutique est mise en question. « Un monde qui se met en place pour la première fois est plus fort que tout autre ; il n’est pas proprement à déchiffrer, mais à découvrir. On voit un monde singulier se constituer par le pouvoir du sens, en suivant ses lignes. Le mouvement de resémantisation s’est emparé de la langue »34. Non une fois pour toutes mais toutes les fois une seule fois et jamais d’une manière définitive, puisque « le débat et le dialogue des langages stratifiés se poursuivent »35. Le « sujet » des poèmes celaniens devient de plus en plus ce « dialogue », jusqu’à dire que la réflexion sur leurs conditions de possibilité est leur seul contenu36.
16Dans cette vérification les menaces sont mises à jour impitoyablement. Même la pire d’entre elles est envisagée clairement : l’imitation faussée, un parasitage qui ne peut être refoulé sans détruire le projet de cette écriture même. « La menace d’une annulation qui prenait le visage de l’imitation. La contrefaçon de sa langue forme la matière de plusieurs poèmes. La mécanique peut tourner à vide et susciter le sarcasme de son inventeur. « Du semblant de main » dans La rose de personne en fournit le modèle. L’effacement de l’idiome par son expansion, la contradiction mimée grossissent les rangs ennemis »37. Mais il faudrait déjà savoir où se trouve l’adversaire. Qu’il puisse être dans le poète lui-même augmente les difficultés. Quoi qu’il en soit, « imitation » et « expansion » font partie des caractéristiques de l’écriture dans sa signification conventionnelle. Encore faut-il ici comprendre que la contingence empirique qu’elles impliquent contamine la structure transcendantale. C’est grâce à cette contamination que « réussir » est possible. Et c’est grâce à cette contamination que l’écrit du poème détourne toutes les qualités constitutives de l’archi-écriture générale. Il surgit sur son fond, mais dans la temporalité propre aux poèmes. L’idiomatique d’une langue singulière dans la langue naît au moment où l’écriture poétique arrive à la langue « pour que l’individu soit le plus fort, que l’idiotisme soit le plus fortement accentué »38.
17L’herméneutique critique, telle que la propose Jean Bollack, affirme ainsi une contradiction. À partir d’une contamination généralisée, elle immunise contre toute relève (Aufhebung) de la différence entre poème et interprétation, sans que cette dernière renonce pour autant à dire le sens du poème. La justesse n’est pas énonçable. Elle résonne entre deux manières de viser l’universalité dans une poétique singulière. L’herméneutique critique ou matérielle montre « comment une chose a pu être écrite. La question conduit donc au-delà de l’œuvre. Elle en respecte scrupuleusement la particularité et revendique néanmoins une pertinence plus générale, partant de la conviction que l’un est la condition de l’autre »39. Mais « une langue poétique particulière, pour riche qu’elle soit, ne sera jamais universelle »40.
Notes de bas de page
1 Paul Celan, cité par Jean Bollack, Pierre de cœur, p. 9. Le présent article est la version raccourcie et modifiée d’un texte paru dans : Kultur & Gespenster 3 (2007), 302-331.
2 L’écrit, p. 67; Poetik der Fremdheit, p. 103 (les références sont données dans cet ordre).
3 Op. cit., p. 47 ; p. 77.
4 Op. cit., p. 31 ; comme le souligne notamment le texte allemand : « Der Versuch, selbst noch die anfängliche Trennung zu überwinden, äußert sich bereits im kompositionellen Impuls », p. 54.
5 Cf. Op. cit, p. 82 ; p. 121
6 Ibid., p. 151-152 ; p. 225. Il s’agit d’un reniement voilé souvent sous le manteau de la modernité. Chez Gert Mattenklott, figurant parmi les éditeurs de l’œuvre de Peter Szondi, on peut lire sur le poème « Todesfuge » : « […] eines der schwächsten von Celan […], eine Vergangenheitsbewältigung […] die eher metaphorische Überwältigung heißen sollte [...] eine Aufwertung des durch politisches Kalkül, industrielle Interessen und pathologische Dispositionen bestimmten Antisemitismus durch theatralische Mythologisierung. Angemessen wäre 1945 wohl eine äußerste Ausnüchterung der poetischen Sprache gewesen. [...] Hier hören wir sie statt dessen in visionärer Trunkenheit, die zu dem Geschehen in den Kloaken der Geschichte in bizarrem Kontrast steht ; als wollte der Autor die Kränkung abwehren, die in der Einsicht liegt, daß es kein Holocaust, kein Opfer, sondern nur Mord war. » (G. Mattenklott, « Zur Darstellung der Shoah in deutscher Nachkriegsliteratur », Jüdischer Almanach 1993, 1992, p. 27sqq., ici p. 30sq.) Cf. à ce sujet l’interprétation de Todesfuge par Jean Bollack, « La musique des camps », Poésie contre poésie, p. 13 sqq.
7 Paul Celan, GW II, p. 14.
8 L’écrit, p. 60 ; Poetik der Fremdheit, p. 94
9 « Une relation primordiale se précise dans l’enceinte du soi. Elle découvre ses pôles dans la tension entre le "je" et un autre, ouvert sur l’altérité, et pourtant entièrement modelé sur les expériences les plus personnelles du "je", qui de son côté, les vit de plus en plus comme étant celles de son partenaire poète – il voit tout ce que voient les mots » (ibid., p. 4 ; p. 17).
10 Poetik der Fremdheit, p. 153
11 L’écrit, p. 99 ; Poetik der Fremdheit, p. 153.
12 Ibid.
13 Op. cit., p. 28 ; p. 48
14 Cf., par exemple, Christoph Menke, La souveraineté de l’art. L’expérience esthétique selon Adorno et Derrida, Paris, Armand Colin, 1993.
15 Jean Bollack « Un futur dans le passé », dans La Grèce de personne, p. 117-127, ici p. 125.
16 L’écrit, p. 76 ; Poetik der Fremdheit, p. 117.
17 Paul Celan, GW I, p. 171 sq.
18 L’écrit, p. 102 ; Poetik der Fremdheit, p. 157.
19 Poetik der Fremdheit, p. 191. Chez Christoph Menke, on peut lire : « La marque (Besonderheit) de l’art réside dans sa démarcation (Sich-Besondern). [...] L’autonomie esthétique est [...] contradiction, refus, négation ». (La souveraineté de l’art, p.18) Pour Menke, toute fonction dictée de l’extérieur (« von außen vorgegebene Zwecke » – ibid.) détruit d’avance la possibilité d’une conception de l’autonomie de l’art.
20 L’écrit, p. 71 ; Poetik der Fremdheit, p. 108.
21 Ibid., p. 6 ; p. 20.
22 Ibid., p. 27 ; p. 47.
23 Selon Christoph Menke c’est ce qui définit la tâche d’une philosophie de l’art à la hauteur de la modernité (cf. La souveraineté de l’art, p. 9). La contamination ouvre la possibilité de concevoir un art autonome sans pourtant se plier au refus du sens comme il se manifeste dans les réflexions de Menke où l’expérience esthétique reste indissociablement liée à la crise du sens. D’ailleurs, l’ouvrage de Menke ne porte, comme tant d’autres, aucune attention à une herméneutique matérielle.
24 Cf. Poetik der Fremdheit, p. 129.
25 « Un futur dans le passé », p. 123.
26 L’écrit, p. 112 ; Poetik der Fremdheit, p. 172.
27 Op. cit., p. 199 ; p. 299 (je souligne).
28 Op. cit., p. 56 ; p. 89.
29 « Le passage à ce qui transperce la réalité s’opère dans l’amour » (Op. cit., p. 103 ; p. 158).
30 Op. dit., p. 52 ; p. 83.
31 Cf. Ibid., p. 87.
32 P. Judet de La Combe, « Interprétation et poésie critiques », Critique 672 (2003), p. 317-331.
33 L’écrit, p. 28 ; Poetik der Fremdheit, p. 49.
34 Op. cit., p. 61 ; p. 97 (je souligne).
35 Op. cit., p. 29 ; p. 52.
36 « Le poème n’a d’autre contenu que l’étude transcendantale de la langue employée. » (Op. cit., p. 90 ; p. 139).
37 Op. cit., p. 32 ; p. 56.
38 Op. cit., p. 20 ; p. 37.
39 Op. cit., p. 12 (préface de l’édition allemande, datée du 17 juin 2000. Traduction de l’allemand par Werner Wögerbauer).
40 Op. cit., p. 31 ; p. 55.
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