4. Virgile et Ovide dans les Épigrammes de Martial

Alain Deremetz

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4. Virgile et Ovide dans les Épigrammes de Martial

Alain Deremetz

p. 95-110

Extrait

1Parmi les innombrables sujets que Martial aborde dans ses Épigrammes, ceux qui portent sur la littérature, celle du passé comme celle du présent, occupent une place de choix. La plupart des écrivains grecs mais surtout latins, les bons comme les mauvais, ceux dont nous avons conservé les œuvres et ceux dont il ne nous reste que le nom, défilent sous nos yeux en un cortège ininterrompu ; et, parmi ces derniers, figurent aussi bien les prosateurs que les poètes, comme le montre l’épigramme I, 61, inspirée d’Ovide2, qui se termine par une énumération flatteuse d’écrivains d’origine ibérique dont Martial lui-même :

Verona docti syllabas amat uatis,
     Marone felix Mantua est,
censetur Aponi Liuio suo tellus
     Stellaque nec Flacco minus,
Apollodoro plaudit imbrifer Nilus,
     Nasone Paeligni sonant,
duosque Senecas unicumque Lucanum
     facunda loquitur Corduba,
gaudent iocosae Canio suo Gades,
     emerita Deciano meo :
te, Liciniane, gloriabitur nostra
     nec me tacebit Bilbilis.

Vé

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2 Cf. Ovide, Amours III, 15, 7-9, Mantua Vergilio, gaudet Verona Catullo / Paelignae dicar gloria gentis ego, / quam sua libertas ad honesta coegerat arma… ; « Mantoue est fière de Virgile, Vérone, de Catulle ; on m’appellera, moi, gloire de cette nation pélignienne, que le souci de sa liberté fit se lever jadis pour une guerre honorable ».

3 Les traductions citées sont empruntées à la Collection des Universités de France – ici Martial, Épigrammes, texte établi et traduit par H. J. Izaac, Paris, Les Belles Lettres, 1969 pour le t. I, livres I-VIII, 1973 pour le t. II, 1^re partie (livres VIII-XII), 2^e partie (livres XIII-XIV), à l’exception de celle de l’Énéide, empruntée à la Bibliotheca Classica Selecta (traduction Boxus-Poucet).

4 Martial, Épigrammes I, épître liminaire.

5 Ép. I, 29 ; 38 ; 52 ; 53 ; 113…

6 Virgile, Buc. I, 6, O Meliboee, deus nobis haec otia fecit, « Mélibée, c’est un dieu qui nous a donné ces loisirs ».

7 Ovide, Mét. XV, 876-879 : nomenque erit indelebile nostrum ; / quaque patet domitis Romana potentia terris, / ore legar populi perque omnia saecula fama, / siquid habent ueri uatum praesagia, uiuam, « et mon nom sera impérissable ; aussi loin que la puissance romaine s’étend sur la terre domptée, les peuples me liront et, désormais fameux, pendant toute la durée des siècles, s’il y a quelque vérité dans les pressentiments des poètes, je vivrai ».

8 Martial, Ép. I, 107, 1-6. Voir aussi l’épigramme XI, 3, 7-10 (At quam uicturas poteramus pangere chartas / quantaque Pieria proelia flare tuba, / cum pia reddiderint Augustum numina terris, / et Maecenatem si tibi, Roma, darent ! ; « Mais comme j’aurais pu composer des vers immortels, quelle bataille j’aurais pu, d’un souffle puissant, célébrer avec la trompette des Piérides, si, après avoir rendu Auguste à l’univers, les dieux bienveillants, ô Rome, t’avaient encore donné un Mécène ») et l’épigramme VIII, 55, qui est citée infra.

9 Sur Valérius Flaccus voir Ép. I, 61 et 76, si l’on admet qu’il s’agit de lui.

10 É. Prioux lui fait une place importante dans le chapitre suivant.

11 Dans la Vie de Virgile de Donat, on lit que le Thyeste publié sous le nom de Varius était en fait de Virgile (Vitae Vergilianae antiquae, Vita Donatiana, § 47-48 Brugnoli-Stok). L’explication de Martial n’est peut-être pas liée à ce détail biographique, mais rapprochée du v. 8 de l’épigramme V, 5 (grande cothurnati pone Maronis opus, où cothurnati semble gloser et spécifier grande), elle suggère que Virgile a atteint les hauteurs de la tragédie dans son œuvre, ce qui est en fait une interprétation possible du maius opus commencé en Énéide VII et ce qui s’appuie, d’ailleurs, sur une évaluation traditionnelle de l’épopée homérique (l’Iliade étant considérée comme étant à l’origine de la tragédie). Sur ces interprétations et Maro cothurnatus, voir S. Clément-Tarantino, « Melpomène et Calliope : ennemies ou alliées ? », Mosaïque, 1, 2009, http://revuemosaique.files.wordpress.com/2010/01/mosaique-1-3_clement-tarantino.pdf, p. 7 et passim ; un traitement complet de cette qualification de Virgile a été donné par M. Fernandelli, « Maro coturnatus and the imaginary life and works of Virgil », lors du colloque The Ancient Lives of Virgil, 5-7 septembre 2013, Oxford University, dont la publication (Ph. Hardie et A. Powell dir.) est en cours.

12 Martial, Ép. XI, 48.

13 Ibid. XI, 50.

14 Il s’adresse à Julius Cerialis.

15 Martial, Ép. XI, 52, 16-18.

16 Pour lequel on possède un excellent commentaire, pourvu de nombreux indices : C. Schöffel, Martial, Buch 8. Einleitung, Text, Übersetzung, Kommentar, Stuttgart, Franz Steiner, 2002.

17 Martial, Ép. V, 5.

18 Ibid., XIV, 185.

19 Ibid., Ép. VIII, 55.

20 Mais Martial parle de rura à propos des Bucoliques.

21 P. Howell, A Commentary on Book One of the Epigrams of Martial, London, Athlone Press, 1980.

22 Ovide, Trist. IV, 10, 1-2.

23 Ovide, Trist. IV, 10, 121-132.

24 Ovide, Pont. IV, 5, 1-29.

25 Ovide, Trist. III, 1, 27-40.

26 Ovide, Trist. II, 352-354.

27 Virgile, Én. VII, 483-492.

28 Ovide, Mét. X, 109-125.

29 En l’occurrence, le cerf de Virgile peut paraître supérieur à Martial parce qu’il est, comme nous l’avons souligné, moins paré. Le passage qui porte sa description est en outre largement écrit dans une clé bucolique ; il semble que, assez tôt dans l’Antiquité, toute la séquence de mise en place de la guerre au Latium a suscité de vives critiques, à cause de son excès d’originalité et, s’agissant de l’épisode du cerf, de sa trop grande légèreté. Or il n’est pas impossible que ce dernier épisode ait conquis Martial précisément pour cela, qui le rendait compatible avec sa propre poétique.

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La représentation du « couple » Virgile-Ovide dans la tradition culturelle de l'Antiquité à nos jours

Ce livre est cité par

Goldschmidt, Nora. (2019) Afterlives of the Roman Poets. DOI: 10.1017/9781316847879

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Deremetz, A. (2015). 4. Virgile et Ovide dans les Épigrammes de Martial. In S. Clément-Tarantino & F. Klein (éds.), La représentation du « couple » Virgile-Ovide dans la tradition culturelle de l’Antiquité à nos jours (1‑). Presses universitaires du Septentrion. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.septentrion.9019

Deremetz, Alain. « 4. Virgile et Ovide dans les Épigrammes de Martial ». In La représentation du « couple » Virgile-Ovide dans la tradition culturelle de l’Antiquité à nos jours, édité par Séverine Clément-Tarantino et Florence Klein. Villeneuve d’Ascq: Presses universitaires du Septentrion, 2015. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.septentrion.9019.

Deremetz, Alain. « 4. Virgile et Ovide dans les Épigrammes de Martial ». La représentation du « couple » Virgile-Ovide dans la tradition culturelle de l’Antiquité à nos jours, édité par Séverine Clément-Tarantino et Florence Klein, Presses universitaires du Septentrion, 2015, https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.septentrion.9019.

Référence numérique du livre

Clément-Tarantino, S., & Klein, F. (éds.). (2015). La représentation du « couple » Virgile-Ovide dans la tradition culturelle de l’Antiquité à nos jours (1‑). Presses universitaires du Septentrion. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.septentrion.9011

Clément-Tarantino, Séverine, et Florence Klein, éd. La représentation du « couple » Virgile-Ovide dans la tradition culturelle de l’Antiquité à nos jours. Villeneuve d’Ascq: Presses universitaires du Septentrion, 2015. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.septentrion.9011.

Clément-Tarantino, Séverine, et Florence Klein, éditeurs. La représentation du « couple » Virgile-Ovide dans la tradition culturelle de l’Antiquité à nos jours. Presses universitaires du Septentrion, 2015, https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.septentrion.9011.

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