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Chapitre 7. Systèmes d’échanges locaux en Kabylie

p. 203-214

Résumés

Pour Marx, « l’être générique de l’homme, son Gattungswesen, c’est la socialité et non l’économicité » tandis que pour Weber, dans les ordres sociaux traditionnels, l’appât du gain et la soif de la richesse « se trouvent limités par l’ethos de la réciprocité qui imprègne les rapports de voisinage et les relations familiales » (Caillé et Laville, 2007, p. 80). Polanyi va, lui, plus loin dans la déconstruction de l’hypothèse de la naturalité de l’Homo œconomicus, cet individu calculateur ne songeant qu’à maximiser son utilité. Selon lui, les échanges pratiqués sur les marchés ne se déroulent pas nécessairement selon le mécanisme marchand théorisé par la science économique : il ne faut pas confondre commerce et marché (Caillé et Laville, 2007, p. 80) ou circulation et échange marchand (Testart, 2007).
Les échanges entre les personnes sont régis par trois modes distincts : le marché, la redistribution et la réciprocité qui agit pour entretenir la relation (Lavoué, Jézequel et Janvier, 2010, p. 34). S’il est notable que l’économie sociale et solidaire connaît un regain d’intérêt dans les périodes de crise financière, mais également de crise morale accompagnée d’une perte de confiance dans les institutions, il n’en reste pas moins que les pratiques solidaires sont vieilles comme le monde et qu’elles ont permis de financer les activités économiques des personnes exclues du système bancaire dans de nombreux pays (tontines en Afrique sub-saharienne par exemple) ou œuvrer pour le bien collectif (tiwiza en Algérie (voir Perret et Paranque, 2014)). Les types de liens (liens horizontaux de type communautaire ou liens verticaux intergroupes) et la nature des solidarités mises en œuvre doivent donc être examinés (solidarité institutionnelle, solidarités de proximité, solidarité formelle ou informelle, solidarité intergénérationnelle…). La période actuelle est caractérisée à la fois par un épuisement des utopies et par un foisonnement des initiatives, voire la survivance de pratiques semblant dépassées mais qui ont toujours cours dans certaines régions comme en Kabylie et qui échappent aux échanges marchands visant l’accumulation du capital.

We should not mix trade and market (Caillé and Laville, on 2007, p. 80) or goods’ circulation and trade exchange (Testart, on 2007). The exchanges between the people are governed by three different modes: the market, the redistribution and the reciprocity which acts to maintain the relation (Lavoué, Jézequel and Janvier, 2010, p. 34). In a period of moral and economic crisis all the alternative solutions to finance economic activities are interesting to study, specifically those embedded in solidarity practices. The nature of the ties (bonding ties, linking ties or bridging ties) and solidarities (institutional solidarity, formal or informal solidarity, intergenerational solidarity) must then be examined.
The exchanges are not only of economic order and also participate in the symbolic world. Our main question is: can the relations of exchange become emancipated from the reification? We illustrate this paper with the case of the Kabylian traditional society and market (Benet, 1957) where the practices of exchanges are not only of economic order (redistribution…) but also matter with the symbolic world (honor). Even today, in Kabylia, the survival of an ancestral social organization (tajmaat) which has anchored in tradition and rooted values (tirugza) and practices (tiwiza) sometimes allows the local populations to offer the missing public goods or the solidarity towards those who need help (elders, orphans).


Extrait

Introduction

1Pour Marx, « l’être générique de l’homme, son Gattungswesen, c’est la socialité et non l’économicité » tandis que pour Weber, dans les ordres sociaux traditionnels, l’appât du gain et la soif de la richesse « se trouvent limités par l’ethos de la réciprocité qui imprègne les rapports de voisinage et les relations familiales » (Caillé et Laville, 2007 : 80). Polanyi va, lui, plus loin dans la déconstruction de l’hypothèse de la naturalité de l’Homo œconomicus, cet individu calculateur ne songeant qu’à maximiser son utilité. Selon lui, les échanges pratiqués sur les marchés ne se déroulent pas nécessairement selon le mécanisme marchand théorisé par la science économique : il ne faut pas confondre commerce et marché (Caillé et Laville, 2007 : 80) ou circulation et échange marchand (Testart, 2007).

2Les échanges entre les personnes sont régis par trois modes distincts : le marché, la redistribution et la réciprocité qui agit pour entretenir la relation (Lavoué, Jézequel

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