Entre obsession et harcèlement
p. 169-182
Texte intégral
1Parmi les nombreux concepts visant à mieux appréhender la démarche de Schoenberg autour de 1910, se présente une notion qui, dans ses significations multiples, se rapporte autant à certains aspects de l’écriture nouvelle qu’au contexte littéraire et psychologique qui accompagne les œuvres : le harcèlement. Idée en apparence étrange si l’on ne se livre pas à quelques observations sémantiques indispensables, mais que l’on associera facilement, en premier lieu, aux attaques dont Schoenberg est l’objet après la « suspension » des fonctions tonales : « en 1911, nous dit ainsi Carl Dahlhaus, Schoenberg se sentait harcelé par des critiques qui lui reprochaient d’avoir violé les normes esthétiques »1. Or ce qui va nous intéresser ici n’est pas tant la situation considérée comme objective de harcèlement – le rapport d’individu à individu, et l’agression concomitante – que le harcèlement considéré sous son angle subjectif et psychique, c’est-à-dire le sentiment de harcèlement. Car c’est dans cette nuance de vocabulaire que se profile toute l’ambiguïté de l’analyse, et surtout la distance considérable qui se crée dans l’univers expressionniste entre le créateur et un monde extérieur auquel il oppose volontiers la solitude – vécue, mais surtout revendiquée – comme fin de non-recevoir.
2Comment le harcèlement va-t-il alors passer du stade de la perception à celui d’un véritable principe actif fournissant un prisme à travers lequel on peut tenter une relecture d’Erwartung ou de La Main heureuse ? Avant d’aborder cette question, il faut faire un détour par des éléments de définition dont l’évidence n’est pas aussi nette qu’on pourrait le penser.
Harcèlement et obsession : définitions
3Il est en effet intéressant de constater que l’apparition des verbes « harceler » et « obséder » se situe à des époques relativement proches, respectivement 1493 et 1590, autour d’une idée centrale très imagée qui est celle du siège et de la prise d’assaut ; tandis que « harceler », qui est une variation populaire des termes harceler et herser, signifiant au figuré tourmenter, suppose ne pas laisser de repos, ou de répit, le mot « obséder », déduit du latin obsessio (obsidere), implique une idée d’attaque systématique que l’on retrouve dans la définition de « harceler », telle qu’elle nous est donnée par le Petit Robert : « soumettre sans répit à de petites attaques réitérées, à de rapides assauts incessants ». La différenciation de ces notions au cours des siècles se fera peu à peu par l’usage et surtout l’opposition entre ce qui définit un état d’une part, et ce qui se fonde d’autre part sur une relation entre un sujet et un objet impliquant la transitivité (« harceler quelqu’un »), donc une action. Mais si une idée ne vous laisse pas de repos ou revient sans cesse, ne peut-on dire qu’elle vous harcèle ? Et dans ce que l’on va résumer désormais par « harcèlement – obsession », l’idée, l’image ou la pensée obsédante acquiert un statut actif qui la conduit à une véritable personnification.
4Or, nous avons là un ensemble d’éléments qui s’imposent de manière nette dans le texte de la première intervention du chœur de La Main Heureuse, laquelle condense en quelques lignes la problématique de l’ensemble de l’ouvrage. Quel est tout d’abord le qualificatif employé par les douze voix pour définir le protagoniste du drame ? « Tourmenté » est donné dans certaines traductions du livret pour « Ruheloser », ce que reprennent les toutes dernières phrases : « Und quälst dich ! » (Et tu te tourmentes)/« Und bist ruhelos ». Mais l’absence de repos dont il s’agit, et qui nous renvoie à la définition du harcèlement, est bien conditionnée par la soumission à une idée toute-puissante, en fait l’omniprésence du désir : « Immer wieder glaubst du dem Traum » (Toujours tu crois au même rêve) « Immer wieder hängst du deine Sehnsucht ans Unerfüllbare » (Toujours tu fixes ton aspiration sur l’irréalisable). Et si l’on reste ici dans une forme réflexive (l’Homme se tourmente), la présence du chœur, véritable jeu de miroirs psychique rétablit le harcèlement dans sa dimension de transitivité : ce n’est plus simplement la torture intérieure qui agit mais un/ou des Autres supposés qui se chargent par leur intervention de harceler le solitaire livré à son destin. La syntaxe répétitive mise à l’œuvre ici est particulièrement signifiante et mérite un examen un peu plus approfondi. Voici l’ensemble du texte de Schoenberg :
« Still, o schweige ; Ruheloser ! – Du weiβt es ja ; du wuβtest es ja ; und trotzdem bist du blind ? Kannst du nicht endlich Ruhe finden ? So oft schon ! Und immer wieder ?
Du weiβt, es ist immer wieder das Gleiche. Immer wieder das gleiche Ende. Muβt du dich immer wieder hineinstürzen ? Willst du nicht endlich glauben ? Glaub der Wirklichkeit ; sie ist so, so ist sie und nicht anders. Immer wieder glaubst du dem Traum ; immer wieder hängst du deine Sehnsucht ans Unerfüllbare ; ans Unerfüllbare ; immer wieder überlässt du dich den Lockungen deiner Sinne ; die das Weltall durchstreifen, die unirdisch sind, aber irdisches Glück ersehnen ! Irdisches Glück ! Du Armer ! Irdisches Glück ! Du, der das Uberirdiaches in dir hast, sehnst dich nach dem Irdischen ! Und kannst nicht bestehn ! Du Armer ! »
5On constate immédiatement que la phrase, ou plutôt les bribes de phrase obéissent à des phénomènes de récurrence qui sont d’autant plus intéressants qu’ils sont non seulement irréguliers, mais distribués suivant un tuilage faisant apparaître de façon croissante puis décroissante des pôles d’attraction dont « immer wieder » (toujours, mais avec l’idée de toujours encore) est le plus important, mais qui disparaît totalement dès qu’apparaît « irdisches Glück » (le bonheur terrestre) :
6Si le contenu du texte met en lumière l’obsession dans le refus du renoncement, sa forme s’inscrit dans une logique du harcèlement, où le mot perd de son sens au profit de la valeur proprement sonore – voire agressive – de la répétition. Ce phénomène est partiellement décrit par Kandinsky avec le concept de « résonance intérieure » : par la répétition fréquente, le mot peut non seulement parvenir à « l’amplification de sa résonance intérieure », mais « perdre parfois le sens extérieur de sa désignation, [...] le sens devenu abstrait de l’objet désigné, et seul subsiste, dénudé, le son du mot »2. Or l’intérêt de cette construction réside ici avant tout dans la transmission directe, par cette musique du mot et en court-circuitant le sens, de l’affect signifié, passerelle entre obsession et répétition qui harcèle3. Sans vouloir tomber dans un mécanisme simplificateur d’explication autobiographique de l’œuvre, il faut maintenant éclairer notre problématique en envisageant la question du créateur lui-même dans son rapport au monde : un Schoenberg qui s’est souvent dépeint comme luttant contre l’hostilité quasi-générale, et dont la situation dans ces années 1910 fut en effet particulièrement difficile.
Schoenberg harcelé ? Entre réalité historique et perception du réel
7Dans l’introduction de l’ouvrage remarquable qu’il a consacré à Schoenberg, Charles Rosen dresse un constat sans appel : le compositeur « continuait à la fin de sa vie à susciter une hostilité et même une haine quasiment sans exemple dans l’histoire de la musique »4. Si cette affirmation peut paraître exagérée au regard d’un certain calme qui semble s’établir lors de la période américaine, elle prend en revanche tout son sens si l’on considère la vie artistique et politique à Vienne au début du siècle. Dans cette capitale d’un empire déjà sur le déclin et qui s’accroche aux valeurs du « monde d’hier » bousculées par une explosion artistique et intellectuelle sans précédent, la bourgeoisie conservatrice et libérale voit peu à peu s’édifier un pouvoir populiste et nationaliste, personnalisé par le nouveau bourgmestre Karl Lueger, dont la politique repose essentiellement sur ce qui porte en germe la mort de l’Autriche : l’antisémitisme. Faut-il ici rappeler des signes majeurs, comme le départ de Gustav Mahler de l’Opéra de Vienne en 1907, alors qu’il jouissait d’une véritable reconnaissance artistique, ou des démarches comme celle de Karl Kraus se convertissant in extremis au catholicisme en 1911 ? C’est dans ce contexte qu’il faut situer l’ensemble des difficultés rencontrées par Schoenberg à l’époque : le fait d’être Juif joue alors incontestablement le rôle d’un véritable catalyseur de la haine mêlant considérations esthétiques et politiques. L’affaire du poste à l’Académie impériale de musique est à cet égard significative : Schoenberg, qui s’est tout d’abord donné beaucoup de mal afin d’y obtenir une fonction subalterne de Privatdozent qu’il occupera à partir de l’automne 1910, reçoit l’année suivante une offre du Président de l’Académie, Karl Wiener, concernant le poste de professeur tant convoité. Il s’agit non seulement de le soulager des difficultés matérielles considérables, mais d’obtenir une forme de reconnaissance officielle alors que les préoccupations pédagogiques sont au centre de sa démarche (c’est le moment où il rédige le Traité d’harmonie). Mais, aux attaques concernant son enseignement, déjà importantes, viennent se joindre des menées antisémites organisées contre sa nomination par quelques députés du Parlement. Schoenberg, qui a déjà quitté Vienne de 1901 à 1903, partira de nouveau à l’automne 1911 complètement dégoûté, espérant des perspectives meilleures à Berlin. La longue lettre qu’il enverra quelques mois plus tard à Karl Wiener justifie son refus en des termes sans ambiguïté :
« À l’heure actuelle, je ne peux pas vivre à Vienne. Je ne me suis pas encore remis de ce qu’on m’y a fait. Et je sais que je ne pourrais pas tenir deux ans. Je sais qu’à brève échéance, il me faudrait recommencer les mêmes combats que j’avais voulu fuir. »5
8De fait, les quelques années qui viennent de s’écouler, surtout à partir de 1906-1907, ont été pour Schoenberg des moments de lutte pratiquement sans répit. Un article étonnant de 1909 inséré plus tard dans Le Style et l’idée, et qui s’intitule « De la critique musicale », fustige en l’espèce cet adversaire privilégié, en décrivant ce qui semble constituer un véritable harcèlement par la critique :
« Aujourd’hui, tout est beaucoup plus mesquin et il est d’ailleurs à noter qu’on reçoit des coups d’épingle quand jadis on était poignardé dans le dos. Mais les choses s’ajoutent et mille coups d’épingle paralysent sans doute aussi sûrement aujourd’hui qu’un seul coup de poignard tuait jadis. Et peut-être le nouveau mode d’attaque, s’il n’est pas plus dangereux que l’ancien, est-il en fin de compte plus harassant. [...] On n’est pas nécessairement tué, mais on est jeté par terre, éliminé, ce qui est le pire de tout. »6
9Cette citation n’est pas tant étonnante par sa valeur de témoignage que par la violence du vocabulaire employé. Schoenberg se vit comme entouré d’un univers radical de haine, dont l’enjeu n’est autre que l’anéantissement, et l’image de l’artiste terrassé et voué à la destruction semble s’illustrer parfaitement dans cette vision de l’Homme, au début et à la fin de La Main Heureuse, couché au sol sous les griffes d’une créature persécutrice. Sous les traits occasionnels de l’humour, la même idée reviendra à plusieurs reprises : « en 1910 [...] on me traitait de corrupteur de la jeunesse, et lorsque certain critique me compara à Socrate, j’en fus à me demander s’il entendait me faire honneur ou suggérer au contraire que je dusse, comme Socrate, être condamné à boire une coupe de poison »7.
10Il est très intéressant, pour faire la part des choses, d’examiner différents articles de presse de l’époque concernant les œuvres de Schoenberg. Il existe en ce sens un dossier très complet rassemblant les critiques publiées dans différents journaux européens et américains concernant le Pierrot lunaire8. Si l’on constate avec un certain étonnement que nombre de réactions sont tout à fait positives, et ce, sans aucune réserve et dès le moment de la création de l’œuvre, on y trouve par ailleurs de véritables perles, monuments de la calomnie et de la dénégation dont la tonalité serait tout à fait impensable de nos jours. Ainsi dans le Musical America du 16/11/1912, berlinois malgré son nom, le critique caché derrière le pseudonyme de Der Wanderer donne à son article un titre dans lequel on savourera la substitution déjà injurieuse du « qui » par le « quoi » : « WHAT IS ARNOLD SCHOENBERG ? ». Suit une élaboration laborieuse d’allégations telles que « l’altruiste travaillant pour les générations futures », le « colossal saltimbanque », ou le « prophète inspiré » auquel il sera finalement décerné le titre de « Master of the Ugly » (Maître de la laideur...). Mais le piment de ces quelques colonnes provient avant tout des réactions du public, censées être prises sur le vif, et qui donnent en tout cas un bon aperçu de ce que pouvait être parfois le climat dans lequel était entendue une œuvre de Schoenberg. De la salle fusent des injonctions telles « Hérésie ! Ignoble hérésie ! » ou « Je ne sais pas maintenant si je dois rire ou pleurer ? », « Moi aussi, je peux jouer du piano, alors », avant le jugement conclusif d’un des critiques présents : « Eh bien ça, c’était vraiment le pire que j’ai entendu dans toute ma vie ! »9
11De fait, la question du harcèlement mérite d’être de nouveau posée dans la relation d’hostilité réciproque entre Schoenberg et un public qu’il a délibérément choisi de provoquer – même si cela n’est pas un but en soi, mais bien la conséquence de la fameuse « Nécessité Intérieure » dont parle également Kandinsky – à partir de la véritable implosion stylistique constituée par le Deuxième Quatuor. Si l’on écoute aujourd’hui cette œuvre étonnante en songeant à la surprise qu’elle a pu produire chez l’auditeur de 1908, on ne peut s’empêcher de remarquer que le fossé séparant déjà le Scherzo du premier mouvement va s’aggraver dans le finale d’une manière qui ne pouvait susciter que l’incompréhension. Après avoir entendu au début du quatuor un thème relativement traditionnel et encore proche de Brahms, le public était pris dans une sorte de « machine à accélérer l’histoire » qui voyait l’œuvre lâcher sans concession les amarres de la tonalité, et pratiquement tourner en dérision son propre propos initial. Il ne pouvait que se sentir violemment floué, ce que Schoenberg rapportera lui-même à nouveau dans Le Style et l’idée : « pour autant qu’il m’en souvienne, le plus affreux scandale est lié à mon Deuxième Quatuor. L’auditoire resta passif pendant le premier mouvement [...]. Mais dès qu’on attaqua le deuxième, une partie du public se mit à éclater de rire aux dessins qui la déconcertaient et continua d’exploser bruyamment pendant presque tout le mouvement. »10
12Doit-on voir dans les rires hostiles qui tout à coup se déchaînent en présence de l’Homme de La Main heureuse une résurgence cauchemardesque de cet incident ? En tout état de cause, il apparaît que le drame remet en scène des figures de la persécution qui deviennent, à tort ou à raison, peu à peu essentielles dans la manière dont Schoenberg perçoit sa relation au monde extérieur. À propos toujours du Deuxième Quatuor, il écrira d’ailleurs plus loin dans le même article (1937) : « bien des années plus tard, j’appris que cette réaction du public avait été en partie fomentée par l’intrigue d’un de mes puissants ennemis... ». Ce n’est que dans un deuxième temps que Schoenberg songe à la simple mais énorme difficulté qu’avait son message à être perçu : « j’ai fini par comprendre qu’on acceptait ni mes idées ni la façon dont je les exprimais »11. Ce mécanisme subtil de brouillage des rapports avec autrui est perceptible dans de nombreux passages de la Correspondance, mais il interviendra surtout de façon significative dans le grave malentendu qui surviendra en 1923 avec Kandinsky, séparant les deux hommes pour de nombreuses années.
13Cet épisode mérite d’être cité car sa portée se situe au-delà de l’anecdote, l’enjeu en étant également historique. D’après Jelena Hahl-Koch, c’est Alma Mahler-Werfel, la femme du fondateur du Bauhaus, qui mit le feu aux poudres en rapportant des propos prétendument antisémites tenus par Kandinsky à Weimar :
« sans vouloir reconstruire les propos de Kandinsky, cosmopolite toute sa vie durant et bien loin de toute pensée discriminatoire, on est en droit de voir la cause objective du conflit dans les expériences différentes de Schoenberg et Kandinsky ; celui-ci [...] généralisait et minimisait le “problème juif” [...], n’en prévoyant pas encore les conséquences fatales. »12
14Schoenberg, qui vient de recevoir une courte lettre amicale de Kandinsky lui proposant de venir diriger la Musikhochschule de Weimar, refuse le 19 avril, déclarant avoir « entendu dire que même un Kandinsky ne voit que mal dans les actes des Juifs ». Celui-ci, se déclarant « bouleversé et blessé » mais sans renier plus précisément ses propos que par le terme de « ragots », et en réaffirmant son indifférence aux « nationalités » tout comme son amitié profonde avec de nombreux juifs, répond d’une façon maladroite : « Vous avez une image effroyable du Kandinsky d’aujourd’hui ; je vous rejette en tant que Juif, mais malgré cela je vous écris une bonne lettre et vous assure que j’aimerais tellement vous avoir ici afin que nous travaillions ensemble ! »13. La formule du « rejet » est-elle à prendre au pied de la lettre ou n’est-elle qu’une provocation involontaire (et néanmoins étrange), destinée simplement à dénoncer une image devenue caricaturale de l’ami de toujours, pour en montrer l’absurdité ? S’il est permis aujourd’hui de pencher plutôt pour la seconde hypothèse, celle-ci n’effleurera pas Schoenberg qui, se fondant sur un « vous me rejetez en tant que Juif », enverra une longue réponse enflammée, scellant la rupture entre les deux hommes. Ainsi apparaît une part de la logique implacable résumée par Schoenberg lui-même dans la formule qu’il donne en titre à l’article de 1937 cité plus haut : « comment on devient un homme seul ». Dans ce système de pensée dont La Main heureuse contribue à l’élaboration, se forge ce que l’on pourrait appeler une véritable « idéologie de la solitude », et ce, dans l’optique tracée déjà par Marx en 1848, lorsqu’il donnait la définition suivante dans L’Idéologie allemande :
« Toute idéologie représente, dans sa déformation nécessairement imaginaire, non pas les rapports de production existants (et les autres rapports qui en dérivent), mais avant tout le rapport imaginaire des individus aux rapports de production et aux rapports qui en dérivent ; c’est-à-dire non pas le système des rapports réels qui gouvernent l’existence des individus, mais le rapport imaginaire de ces individus aux rapports réels sur lesquels ils vivent. »
15Or, nous avons chez Schoenberg une double illustration de ce phénomène de l’imaginaire comme fabricateur de matériau « idéologique » ; il est à l’œuvre, ainsi que nous l’avons montré plus haut, dans la déformation qui s’opère ici vis-à-vis du monde extérieur (ce que l’on pourrait intégrer ici dans le cadre des rapports sociaux dont l’histoire avec Kandinsky est un exemple), tout en reposant d’ailleurs en partie sur la confrontation avec une autre idéologie, « réelle » celle-ci, au sens où nous l’entendons habituellement et qui est celle de l’antisémitisme. Mais il est surtout frappant de constater que La Main heureuse met justement en scène, dans l’épisode avec les ouvriers, l’impossible adéquation de l’artiste solitaire au système de production du monde supposé « réel » – en tout cas au modèle de production dominant – même s’il tente avec son geste d’esquisser la possibilité d’une autre démarche. Autrement dit, la confrontation s’effectue ici entre un monde de la création, supposé non productif, et un monde de la production supposé non créatif (ce en quoi il y a d’ailleurs un discours fortement idéologique quant à la condition de l’artiste et à sa place élitaire). C’est là l’instant crucial choisi par Adorno comme étant le plus significatif de l’œuvre, là où elle « produit » elle-même ce discours :
« Le discours solitaire, nous dit-il, dit plus de la tendance sociale que le discours communicatif. En insistant sur la solitude jusqu’au paroxysme, Schoenberg en a révélé le caractère social. [...] L’homme qui ne voit pas les travailleurs est aliéné, étranger au processus réel de la production sociale, et n’est plus capable de reconnaître le rapport entre le travail et la forme de l’économie [...]. L’aveuglement qui fait que le sujet ne voit pas est lui aussi de nature objective, c’est l’idéologie de classe. »14
16La conclusion d’Adorno reprenant la terminologie marxiste pourra sembler réductrice, mais la notion d’imaginaire – d’un imaginaire social – est pourtant intégrée à son raisonnement.
Isolement de l’être, isolement du style
17Il n’est peut-être pas inutile de rappeler ici la conjonction troublante de faits personnels, relationnels et de choix esthétiques qui allaient s’opérer chez Schoenberg à partir de la période du Premier Quatuor. À côté des rapports de plus en plus houleux avec le public, il devait perdre ses appuis parmi les plus importants, et en premier lieu celui de Richard Strauss. Vers 1907, les relations commencent à se dégrader à propos de la Première symphonie de chambre, op. 9, et l’année suivante, lorsque Strauss lui commande « quelques pièces, pas trop longues » pour un public « hélas, terriblement conservateur », il ne s’attend pas à la nouvelle « bombe » que seront les Cinq Pièces pour orchestre, op. 16, qui déclencheront une crise grave et définitive. Schoenberg écrit simplement à Strauss que ce qu’il lui propose « devrait répondre, quant à la longueur, à ses demandes »15. Par ailleurs, les autoportraits peints par Schoenberg autour de 1910 sont souvent troués par des regards aveugles, qui ne peuvent plus voir : l’Homme ne réalise pas que la Femme est partie. À ce désespoir de l’échec sentimental (« Profond est le deuil qui m’assombrit », dira le premier vers de Litanei, le texte de Stefan George sur lequel est composé le 3e mouvement du Deuxième Quatuor), s’ajoute le choc provoqué par le départ de Mahler pour l’Amérique, en décembre 1907. Selon Hans Heinz Stuckenschmidt, cet événement devait être suffisamment important pour contribuer « à l’état de confusion intérieure et d’inquiétude psychique » du compositeur et le pousser vers une peinture dans laquelle il se « détournerait des réalités de la vie et se retirerait dans un isolement total »16. La solitude qui est exprimée dans La Main heureuse, en dehors de son caractère social largement souligné par Adorno, a peut-être de plus marquant le fait qu’elle annihile toute possibilité de communication avec un autrui qui est pourtant matériellement présent, mais impossible à percevoir dans son existence réelle. Le déni de la Femme vis-à-vis de l’obsédante adoration de l’Homme, stylisé par l’opposition du silence à l’exclamation réitérée tout autant que par le jeu de la fuite et des regards, est encore plus radical que l’absence d’un partenaire auquel on est censé s’adresser : un fantasme conserve la valeur potentielle de l’amant mort, vivant ou halluciné, mais toujours intègre. Dans le Du auquel s’adresse l’héroïne d’Erwartung, le spectateur peut un instant vivre l’illusion du discours amoureux, même s’il se sait dans le macabre et l’imaginaire, alors que le face-à-face (ou plutôt le côte à côte) dérisoire de La Main heureuse renvoie à la réalité d’un monde désespérément clos dans lequel ne subsiste même plus l’espoir d’une apparition. D’une certaine manière, si cette obturation était matérialisée par le cadre forestier encore hérité du post-romantisme (Erwartung s’inscrivant en ce sens dans la lignée de La Nuit transfigurée), elle est ici rendue plus radicale par l’absence de cadre au sens traditionnel, le cadre n’étant plus qu’une mise en scène kaléidoscopique du fantasme, où l’image du ravin occupe une place prépondérante.
18Dans cette modernité devenue sans concession, la « solitude comme style » est parvenue à son étape la plus aboutie. La référence au phrasé du passé, hérité de Strauss et s’exprimant lors de la première scène d’Erwartung dans l’illusion d’un univers champêtre où subsisteraient des bruits de la nature, est ici oubliée. L’isolement de l’artiste, thème porteur à l’époque si l’on songe par exemple à une œuvre comme Gertrude de Hermann Hesse (1910), a pour pendant celui de la démarche créatrice qui s’est séparée des modèles antérieurs pour construire un monde nouveau. Mais il existe néanmoins une filiation par laquelle, en l’espace de quelques années seulement, la peinture du solitaire livré à la tyrannie de son monde intérieur s’est imposée à l’Opéra, révolutionnant les canons dramatiques et les lois de l’équilibre vocal. Le grand monologue de Clytemnestre, dans Elektra, précède de très peu la composition d’Erwartung. Mais il n’est qu’une parenthèse dans la tragédie et la description du cauchemar (« Ich habe keinegute Nächte... ») est atténuée par la présence d’un interlocuteur, en l’occurrence la mère de Clytemnestre. De même, le discours est encore contenu dans des cadres rythmiques réguliers et une progression dans l’ouverture de la tessiture, par laquelle l’auditeur est préservé d’une irruption subite dans le chaos de l’aliénation. Si La Main heureuse nous semble franchir la dernière étape de cette filiation, il appartient à Erwartung d’avoir ouvert la voie dans la recherche de moyens nouveaux par lesquels peut se profiler une esthétique du harcèlement. Au-delà de la thématique du Ich-Drama, faisant de l’obsession et de l’auto-persécution un point central des deux œuvres, il faut reposer la question d’une relation de transitivité restituant directement les affects à l’auditeur par des moyens musicaux, sans nécessairement passer par la relation au texte.
Le harcèlement comme esthétique
19Le phénomène le plus marquant dans la suspension des fonctions tonales n’est peut-être pas tant l’abandon d’une notion de consonance dont la validité n’était alors que très relative, que la remise en cause de la syntaxe tout entière à travers les notions simples de tension et de détente. Dans les années d’avant-guerre, le recours à des supports extra-musicaux permettait de traiter la question à l’aide d’un pathos. Avec Erwartung, l’idée du choc devient l’une des clés du discours, et la fonction du choc est d’autant plus importante qu’il s’agit non seulement de surprendre en permanence en empêchant l’installation d’un quelconque confort d’écoute, mais surtout d’ériger un nouveau repère mnésique : l’élément thématique, devenu quasi-indiscernable, est remplacé par l’élément traumatique. Or celui-ci, constitué par le cri instrumental et/ou vocal, figure par excellence de l’expressionnisme, devient non seulement l’objet d’une véritable stratégie, étalant par exemple les explosions vers un maximum dans la tessiture et la durée, mais un pôle d’attraction autour duquel s’organisent des phénomènes de remplissage de la masse orchestrale, ou d’accélérations des tempi pris dans une gravitation infernale jusqu’à un maximum. À l’idée ancienne de repos sur la tonique se substitue celle d’une tonique du discours, élargie à plusieurs paramètres, mais qui est devenue explosion.
20Il est frappant de constater que, si la forme générale de La Main heureuse diffère notablement de celle d’Erwartung, le mécanisme de stratification du discours par le choc va s’y trouver à nouveau mis à l’œuvre, comme s’il y avait là une irrépressible « compulsion de répétition » de l’écriture à reproduire ce phénomène, et que tout soit dit dans les mots-clés qui sont adressés à l’Homme par le chœur : « Ruheloser... immer wieder... ». Si le cri vocal proprement dit n’occupe plus une place de choix dans cette stratégie, largement contenue dans les soubresauts de l’orchestre, un temps fort apparaît, qui polarise le discours sur un « avant et après » cyclique et persécutoire : celui des rires. La séquence des mesures 25 à 3017 offre l’exemple d’une des explosions les plus ramassées et les plus brutales de l’ouvrage, dans lesquelles on retrouve certains procédés déjà employés dans Erwartung : extrême déchirement des dynamiques et des registres bien sûr, mais aussi usage de l’ostinato comme accumulateur de tensions, et des accélérations par les tempi ou les dessins rythmiques. Enfin, la stratégie de l’agression est largement résumée dans ce « toujours plus » mélodique qui affecte des timbres censés présenter la limite de l’insoutenable (ici les violons dans l’extrême aigu, doublés par le piccolo et la petite clarinette), en créant une « ligne de reconnaissance » chromatique ascendante vers le cri. Car cette logique, qui n’est autre que celle de l’attraction vers la résolution par le total chromatique dont Charles Rosen a parlé à propos d’Erwartung18, « ne peut faire autrement » que se reproduire, y compris dans les interventions principales du chanteur, et quels que soient les paliers de tessiture ou de dynamique. L’accélération du discours est mise en relief et en même temps imagée par la graduation des couleurs. Dans la séquence instrumentale qui suit la confrontation avec les ouvriers (« c’est ainsi que l’on fait des bijoux »), la progression de la dynamique, de la tessiture et des tensions est colorée en : brun/verdâtre/gris-bleu/violet/rouge sombre intense devenant rouge sang (ici l’indication de cri est clairement mentionnée dans la partition, mes. 143), puis se mêlant à de l’orange et au jaune éclatant accompagnant l’apparition de la grotte19. Bien que la tentation soit grande d’invoquer ici un certain systématisme, on ne peut que rappeler la position singulière de Schoenberg à l’époque, selon laquelle « l’art appartient à l’inconscient20, d’où Philippe Albèra déduit l’absence de « progressions logiques » dans une démarche fondée, selon lui, avant tout sur l’instant : « la dimension du temps n’est plus seulement linéaire, mais elle est en quelque sorte verticalisée, elle devient espace de temps ; les analogies avec le travail du rêve sont ici très tentantes »21. Il faut ajouter, malgré toute la pertinence de ce point de vue, que même dans le cadre de cette expérience onirique de l’écriture, une logique tend à se réinstaller qui donne à l’expression du choc la valeur d’un instant privilégié voué à structurer les directions d’une telle expérience. À cet égard, l’on pourrait invoquer que le seul moment de redite dans l’œuvre est constitué par la réapparition à la mesure 202 du motif initial des bassons, précédé par la séquence violente aboutissant aux rires et qui a déjà été énoncée, mes. 26 à 28. Pourquoi ces deux éléments présentés auparavant sans lien apparent font-ils maintenant l’objet d’un seul et même rappel thématique ? En fait Schoenberg nous donne ici à penser que les trente premières mesures de l’ouvrage ont la valeur d’un phénomène de condensation, résumant, en ce qui tient lieu de prologue, sa trame cauchemardesque. L’obsession morbide du premier chœur22 s’articule tout autant avec l’explosion des rires qu’avec un motif qui, comme ceux-ci, assume une fonction persécutoire tout à fait identique à celle que Schoenberg assignera à l’appel des trompettes débutant, en 1947, Un Survivant de Varsovie.
Le jeu de l’ostinato et la question de la répétition
21Rappelons que la notion de harcèlement se fonde sur une forme de répétitivité irrégulière, imprévisible et donc déstabilisante, en un mot inconfortable. Ce type de fonctionnement peut très bien s’appliquer à des mécanismes, que nous avons évoqués, de retours du choc définissant des repères dans la structure globale (ce qu’Adorno qualifie d’« enregistrement sismographique » à propos d’Erwartung23). Mais une difficulté demeure quant au concept de répétition. Peut-on employer ce concept à propos de phénomènes qui mettent en jeu, non l’identique, mais l’assimilation à des instants irréguliers de « gestes » semblables, ce que Bachelard nommait « séries homologues »24 ? Pour sa part, Gilles Deleuze nous y autorise quand il observe que « la répétition n’est vraiment que ce qui se constitue en se déguisant », mettant en avant la qualité troublante de « masque » induite par la répétition25. De fait l’ambiguïté de la répétition constitue un enjeu essentiel pour Schoenberg, même si sa musique est intrinsèquement « anti-répétitive » (ce qui est évident à l’écoute de La Main heureuse), profession de foi qu’il a d’ailleurs dû affirmer à plusieurs reprises, et sur laquelle devait se fonder l’interdit majeur de l’écriture nouvelle.
22Mais à l’échelle de la microstructure, la répétition prend une place centrale dans les années de la première atonalité, à travers la figure de style constituée par l’ostinato (et ceci, même d’une manière plus large dans le cas des Cinq Pièces pour orchestre, op. 16). Dans le texte de la conférence de Breslau où il est question de La Main heureuse, Schoenberg soulignera l’importance de ce procédé, dépassant cette fois la musique, car étendu aux regards « fixes et immuables » dirigés sur l’Homme : « l’ostinato de la musique rend évident que les regards, de leur côté, forment un ostinato »26. Il met ainsi en lumière la valeur psychologique du phénomène, qui range l’ostinato du côté de l’obsession, pour reprendre l’un des termes de notre hypothèse hybride de travail. Par ailleurs, sa valeur dramatique et technique est largement connue, que ce soit par le jeu des petites formules répétées dont la durée va croissant à l’approche des chocs, ou par celui de cette grande séquence à ostinato initiale.
23Mais dans tous les cas, l’ostinato expressionniste possède une caractéristique dont il tire toute sa force : l’instant de la répétition, des micro-répétitions, existe encore plus profondément parce qu’il est unique et donc privilégié. Un exemple frappant en est fourni dans Erwartung par les quelques mesures accompagnant le changement scénique27, séquence éphémère dont la rigidité s’oppose à tout ce qui la suit et la précède, laissant une marque profonde à l’auditeur ramené pour quelques secondes dans un univers presque thématique. Dans la « musique de la mémoire », Schoenberg ne harcèle pas par l’omniprésence d’une répétition basée sur la durée, ce que fera Stravinsky quelques années plus tard, mais par l’omniprésence du souvenir que doit laisser – ou suggérer – la répétition irremplaçable, celle qui ne se répètera jamais. Au-delà de sa fonction dramatique, la répétition vaut alors ainsi comme métaphore de l’Unique et de ce qui en fonde la puissance : « Ne peux-tu enfin renoncer ? ». L’enjeu de la répétition est mortifère mais la logique du renoncement l’est plus encore. C’est en quelque sorte à l’intérieur de cet espace étroit que l’Homme de La Main heureuse devient un héros tragique, isolé du monde qui l’entoure par le chœur, véritable « muraille vivante » pour reprendre l’expression de Nietzsche28 (et même si le « mur » est ici totalement hallucinatoire). L’étau qui se referme sur lui fait écho à la situation du créateur poussé par la Nécessité Intérieure, et contraint donc à en subir tous les sacrifices s’il veut conserver l’éclat du diadème, mais peut-être aussi à celle d’une civilisation qui, dans son aveuglement malgré sa brillance, ne pressent pas – ou ne veut pressentir – les échos d’une destruction prochaine. Derrière les strass de la valse, se cache l’inquiétude de la vraie destinée.
24Car si l’idée du harcèlement transparaît à travers tout un pan de l’esthétique des années 1910 – et sans vouloir donner ici d’autres exemples relatifs au cinéma ou à la peinture expressionniste, on mentionnera ce modèle magistral et unique qu’en fournit le Sacre du Printemps29 –, c’est qu’elle dénote l’agitation d’une époque tout autant secouée par les bouleversements intellectuels, politiques (au centre desquels, bien sûr, la guerre et la fin des empires), que par l’irruption d’un mode de vie nouveau, voyant s’affirmer l’industrialisation, l’avènement du machinisme et plus généralement de la grande ville, de la Metropolis tentaculaire et aliénante. Ce qui menace le plus l’intégrité de l’individu d’hier en le harcelant sous la forme effective d’une agression rythmique et répétitive, c’est l’automatisme sous toutes ses formes : « la structure de l’automatisme, nous dit d’ailleurs Hugues Dufourt, ne se prête que trop bien à l’exploitation organisée des types de régression qu’elle suscite, [...] engendrant des personnalités vacillantes et insensibles, tenaillées par l’angoisse [...], privilégiant les attitudes d’échec et de repli, laissant libre cours à l’appétit de destruction et faisant prédominer l’instinct de mort »30. De fait, ce constat étonnamment pessimiste (mais d’une grande lucidité) concerne de nombreux personnages de l’imagerie expressionniste – personnages contre lesquels notre héros et sa main s’inscrivent en faux. Et peut-être aussi, des créatures, mi-êtres vivants, mi-marionnettes, mises en mouvement par un Nijinsky pour ce qui devait constituer l’une des plus radicales explosions de l’art chorégraphique.
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Schoenberg Arnold, Le Style et l’idée, Paris, Buchet-Chastel, 1977.
Stuckenschmidt Hans Heinz, Schoenberg, Paris, Fayard, 1993.
Notes de bas de page
1 Carl Dahlhaus, Schoenberg, Genève, Contrechamps, 1997, p. 168.
2 Wassily Kandinsky, Du Spirituel dans l’Art et dans la peinture en particulier, trad. Philippe Sers, Paris, Denoël/Folio, 1989, p. 82-83.
3 On trouvera déjà ce type de procédé expérimenté dans Le Horla de Maupassant, Paris, Gallimard/Folio, 1986, p. 33-34 et 42.
4 Charles Rosen, Schoenberg, Paris, Éditions de Minuit, 1979, p. 11.
5 Lettre à K. Wiener en date du 29 juin 1912, dans : Correspondance 1910-1951, trad. Dennis Collins, Paris, J.C. Lattès, 1983, p. 27.
6 Arnold Schoenberg, Le Style et l’idée, Paris, Buchet-Chastel, 1977, p. 150-151.
7 Il s’agit d’un article de 1937 au titre sans concession de « Comment on devient un homme seul », où Schoenberg parle entre autres – c’est le cas ici – des difficultés relatives à son enseignement. Voir Le Style et l’idée, op. cit., p. 29.
8 Dossier de Presse sur Pierrot lunaire, ouvrage collectif publié sous la direction de François Lesure, Genève, Minkoff, 1985.
9 Op. cit., p. 14-16.
10 « Comment on devient un homme seul », Le Style et l’idée, op. cit., p. 33.
11 Op. cit., p. 35.
12 Cf. Jelena Hahl-Koch, « Kandinsky et Schoenberg : Documentation sur une amitié artistique », Contrechamps no 2, 1984, p. 99.
13 « Schoenberg-Kandinsky : correspondance », Contrechamps no 2, op. cit.. p. 66.
14 Theodor W. Adorno, Philosophie de la nouvelle musique, Paris, Gallimard, 1962, p. 54-55.
15 Voir à ce propos le chapitre « Schoenberg et Strauss » dans : Hans Heinz Stuckenschmidt, Schoenberg, Paris, Fayard, 1993, p. 72-79.
16 Op. cit., p. 102.
17 Voir partition (1er Tableau).
18 Cf. son Schoenberg, op. cit., p. 61.
19 C’est ce même jaune qui selon Kandinsky « énerve l’homme, le pique, l’excite et manifeste le caractère de violence exprimée dans la couleur, qui agit finalement sur l’âme avec une insolence insupportable », cf. Du Spirituel dans l’art, op. cit., p. 148.
20 Voir l’article de Carl Dahlhaus, « La construction du disharmonique », Schoenberg, op. cit., p. 240.
21 Philippe Albèra, « À propos de Die Glückliche Hand », Contrechamps n o 2, op. cit., p. 160.
22 Au-delà du rapport au texte, il y aurait ici tout un travail d’analyse à faire sur la fonction assumée par la texture polyphonique et des intervalles restreints (notamment les tierces), par opposition aux séquences de cri évoquées plus haut.
23 Cf. Theodor W. Adorno, Philosophie de la nouvelle musique, op. cit., p. 53.
24 Gaston Bachelard, L’Intuition de l’instant, Paris, Le Livre de poche-Stock, 1992, p. 85.
25 Gilles Deleuze, Différence et répétition, Paris, PUF, 1968, p. 28.
26 Arnold Schoenberg, « Conférence de Breslau sur Die Glückliche Hand », Contrechamps n o 2, 1984, p. 84-88.
27 Il s’agit du passage intitulé « Verwandlung », mes. 114 à 119.
28 Friedrich Nietzsche, La Naissance de la tragédie, Paris, Denoël-Gonthier, 1964, p. 49.
29 Un développement plus conséquent de cette thématique relativement à Stravinsky autant qu’à Schoenberg est donné dans mon mémoire de maîtrise, Pour une Esthétique du harcèlement. Maîtrise sous la direction de Jean-Marc Chouvel, Université Charles De Gaulle, Lille III, octobre 1998.
30 Pour cette analyse remarquable de l’automatisme qui s’appuie sur les travaux de Valéry, voir Hugues Dufourt, Musique, Pouvoir, Ecriture, Paris, Christian Bourgeois, 1991, p. 224-225.
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