Le comédien devant l’écriture1
p. 301-320
Texte intégral
1Voici d’abord une observation banale : ce que les Grecs, les Athéniens ont inventé, ce n’est pas le théâtre, mais la poésie dramatique. Autrement dit, c’est à Athènes qu’entre le sixième et le cinquième siècle, la pratique sociale du comédien accéda au statut d’écriture poétique, pratique répandue un peu partout dans le monde grec et dans le monde antique en général2. Il s’agit d’une pratique proche du rite (les gephurismoí et les skómmata ex amáxes en Attique, les skómmata achéens entre hommes et femmes, etc…) qui suggère en même temps l’existence d’une profession au sens propre du terme, bien que située dans un milieu social plutôt bas : le gelotopoiós évoqué par Xénophon dans le Banquet, un bouffon du même acabit que le saltimbanque, que l’acrobate, que le thaumatopoiós3. Le matériel documentaire se présente comme une masse nécessairement confuse et difficile à déchiffrer. Mais ce flou terminologique n’est pas pour nous surprendre. Si l’on considère que les gens du spectacle jouissaient d’une bien faible estime, il n’est pas étonnant que ceux qui jouaient des farces aient été confondus avec les saltimbanques ou les forains, confusion qui se reproduira d’ailleurs au Moyen Âge. Le témoignage de Plutarque semble du reste indiquer que cette confusion pouvait être parfois intentionnelle : « Un jour, – écrit-il dans la Vie d’Agésilas – un acteur tragique connu et réputé en Grèce, accoutumé aux honneurs, alla à la rencontre d’Agésilas, et, après l’avoir salué, se joignit à sa suite et fit comprendre qu’il s’attendait à ce que le roi lui témoigne quelque estime. Mais après avoir vainement attendu, il fut contraint de lui demander : – Roi, ne me reconnais-tu pas ? –. Agésilas se tourna vers lui et répondit : – Mais n’es-tu pas le bouffon Callipide ? –. Il est vrai que les Spartiates – commente Plutarque – appellent tout acteur un bouffon » (Ag. 21). Cet épisode témoigne d’une volonté d’offenser qui résulte du refus de reconnaître la dignité de l’art à une activité restée étrangère à son cadre culturel. C’est par les termes de deikeliktés ou de dikelistés qu’on devait aussi désigner ceux qui, selon le témoignage de Sosibe repris par Athénée (621 d-f), exécutaient à Sparte des scènes comiques sur le thème du vol des fruits ou de la visite d’un médecin étranger. Certes, il est impossible de savoir en quoi consistaient exactement ces formes de spectacle ou ce qu’on appelle la farce mégarique ; certains, comme Breitholz, sont allés jusqu’à mettre leur existence en doute. Pourtant, la quantité des sources littéraires et des témoignages figuratifs nous confirme que, bien qu’imbriquée dans différentes traditions locales, la pratique de la représentation théâtrale existait partout dans le monde grec. C’était des spectacles sans écriture, un théâtre privé de littérature dramatique4.
2C’est à Athènes, nous l’avons déjà dit, que naît la poésie dramatique, d’abord en tant que tragédie, même si elle est dans un rapport dialectique avec ce qu’on appelle le drame satirique, ensuite en tant que comédie. La comédie, on l’a dit et répété, n’existe que dans le sillage de la tragédie. Ce qui est vrai en substance, dans le sens où la tragédie a constamment été pour la comédie un terme de confrontation, un pôle d’attraction et un modèle auquel s’assimiler progressivement ; mais il serait faux de dire que tragédie et comédie puissent être considérées comme des expériences parallèles et homogènes, telles qu’elles auraient plu à Aristote, et comme celles qu’Umberto Eco et Richard Janko pensent qu’il avait décrites.
3Mais ce n’est évidemment pas de cette absence d’homogénéité que je voudrais parler. Mon propos est simplement de chercher à démontrer à quel point la différence entre ces deux formes majeures de poésie dramatique implique une façon différente de concevoir le rapport avec l’écriture.
4On sait qu’en Grèce, au moins pendant tout l’âge classique, acteurs tragiques et acteurs comiques constituaient deux professions distinctes, ce qui est un signe certain d’une différence substantielle des deux techniques de déclamation ; nous savons aussi que l’acteur comique est devenu, bien qu’avec un certain retard par rapport à l’acteur tragique, l’objet d’une importante reconnaissance sociale. La diction tragique devait être au début déclamatoire, liée aux cadences et aux formules d’un code rituel, avec très peu de mouvements mimiques fortement chargés de symbolisme. Aristote témoigne du rejet de la nouvelle déclamation, celle de Callipide mentionnée plus haut par les acteurs de la génération précédente qui la jugeaient simiesque (Poét. 1461 b 35)5. Il semble que l’origine de l’acteur comique soit différente, et que son art se rattache directement à celui du bouffon du théâtre non écrit ; il s’agit d’un art ancien bien que socialement marginal, une téchne eoúse, dirait Hippocrate. Le métier de l’acteur comique reste en outre, plus longtemps que celui de l’acteur tragique, lié au métier du poète. Cratès débuta comme interprète de Cratinos, Phérécratès comme interprète de Cratès (PCG T 3) ; quant à Aristophane, on pense qu’il a joué certaines de ses propres comédies6 ; et cela à une époque où les poètes tragiques, tout en conservant la responsabilité de la mise en scène, ne participaient plus aux représentations depuis plusieurs décennies.
5L’art du bouffon implique aussi un rapport particulier avec le public, un rapport de participation et de complicité, et parfois d’agressivité. On ne cesse d’entrer et de sortir de la fiction scénique. On pourrait même dire que la fiction scénique, l’histoire représentée n’est qu’un élément de cet art. Il n’est donc pas étonnant que l’histoire, le mûthos, n’ait commencé à caractériser la comédie attique que dans un deuxième temps, à savoir avec Cratès, qui selon Aristote, renonça à la iambikè idéa (Poet. 1449b 5) dont il réduisit la présence et le rôle. Il est vrai que selon le rédacteur anonyme d’un traité sur la comédie, l’origine de cette évolution est attribuée à Phérékratès (CGF p. 8). Pier Maria Cecchini, comédien dell’Arte, connu sous le nom de Fritellino, écrit dans son exhortation à la bonne déclamation dédiée à ses confrères : « D’abord se garder de parler au peuple, car il faut avoir à l’esprit qu’il n’y a personne en ce lieu, excepté celui avec qui on parle sur scène, et s’il arrive qu’on parle seul à soi-même, on doit continuer à discourir, si c’est de sa belle qu’on parle, on tourne les yeux vers sa maison »7. Les comédiens dell’Arte, qui ne sont pas strictement attachés à un texte écrit, sont donc accoutumés à s’adresser au public. Il en va déjà de même pour les acteurs des comédies d’Aristophane, en quête de la complicité du public ou bien pratiquant encore le traditionnel psógos, également destiné à obtenir cette complicité. Inutile de citer ici les nombreux cas d’interruption de la fiction scénique, se produisant toutes les fois qu’un acteur s’adresse au public qu’il imagine toujours présent. Il faudrait plutôt s’interroger sur le concept lui-même de rupture de l’illusion scénique. G. A. H. Chapman, au terme d’un long catalogue (bien que nécessairement incomplet), qui propose également un classement de ces interruptions, évoque à juste titre leur caractère pour ainsi dire institutionnel dans les comédies d’Aristophane8. Mais, comme je l’ai dit, il faudrait probablement remettre en question la catégorie elle-même de fiction scénique, et donc celle d’histoire, de mûthos ; elle n’est pas la même pour Aristophane que pour les tragiques, c’est évident, mais elle diffère aussi de celle de Ménandre.
6Il existe un autre élément de la tradition comique dont l’importance s’avère décisive pour la dramaturgie. F. M. Cornford, dans son livre sur les origines de la comédie attique qu’on ne cite d’habitude que pour son point de vue anthropologique actuellement dépassé, esquisse une typologie des personnages de la comédie : récurrents et désormais codifiés dans la « Nouvelle Comédie », ils sont probablement les descendants de personnages du théâtre non écrit9. Cornford montre bien que nous trouvons les mêmes types dans le théâtre d’Aristophane. Les caractéristiques traditionnelles du médecin étranger (le médecin représente évidemment un érudit confus et verbeux, qu’on pense aux nombreux médecins de Molière) s’incarnent dans les personnages d’intellectuels qu’Aristophane connote systématiquement d’obscurité de langage et de vacuité théorique : Socrate dans les Nuées, Euripide dans les Acharniens, dans les Thesmophories et dans les Grenouilles, ainsi que Méton dans les Oiseaux. Le type du soldat fanfaron apparaît nettement dans le personnage de Lamachos dans les Acharniens et dans celui du dieu Polemos dans la Paix ; l’identification est plus subtile, mais non moins justifiée pour l’Eschyle des Grenouilles. Le cuisinier voleur ainsi que le parasite, de plus en plus présents sur la scène de la Nouvelle Comédie, apparaissent tous deux dans les Cavaliers, respectivement le charcutier Agorakritos et le Paphlagonien.
7Mais le type de loin le plus fréquent dans les comédies d’Aristophane est celui du vieillard balourd, bavard et grossier, à moitié gâteux, à moitié malin : Dicéopolis dans les Acharniens, Démos dans les Cavaliers, Strepsiade dans les Nuées, Philocleon dans les Guêpes, Trygée dans la Paix, Pisthétairos dans les Oiseaux, le parent d’Euripide dans les Thesmophories, Dionysos dans les Grenouilles, ainsi que Krémilos dans Ploutos sont tous des représentants de ce modèle ; ces vieillards sont donc les protagonistes de la plupart des pièces d’Aristophane que nous connaissons. Cornford sépare la définition du « vieillard » de celle du « bouffon ». Faut-il vraiment les distinguer ? La première définition n’est-elle pas simplement une connotation de la deuxième ? Il ne pourrait s’agir d’une connotation secondaire, puisqu’elle assume la plus grande partie de la charge de la dérision misonéiste qui se dégage des comédies d’Aristophane. Le rôle du bouffon est tenu par un vieillard, nostalgique du bon vieux temps, son irrévérence reste dans les limites du bon sens du public dont il est toujours solidaire. C’est lui qui domine l’histoire, qui la construit, qui en accélère ou en ralentit le déroulement, qui l’interrompt ou lui fait prendre des virages imprévisibles, selon des rythmes qu’il imprime lui-même à l’action scénique.
8On sait, d’autre part, que l’usage grec limitait le nombre des acteurs au théâtre et que chaque acteur devait donc jouer plusieurs rôles. Le protagonistés n’apparaît donc pas seulement dans le rôle principal, mais il est souvent présent au début de la comédie, revêtu du costume anonyme d’un serviteur. Le début de la pièce est en effet un moment privilégié du comique et de la bouffonnerie, c’est là qu’il importe de capter l’attention et la sympathie du public.
9Considérons rapidement trois scènes initiales présentant plusieurs caractères communs. Il s’agit toujours d’un dialogue entre deux serviteurs : ils occupent d’abord le public pendant quelques minutes en échangeant des répliques qui n’ont que très peu de rapports sinon aucun avec l’action qui va être représentée ; il s’agit surtout de jeux de mots, d’assonances, parfois d’allusions à l’actualité ou d’appels à l’un des spectateurs. Les serviteurs, nous le verrons par la suite, sont à la fois à l’intérieur et à l’extérieur de ce qu’on appelle la fiction dramatique, ils tiennent leur rôle et dialoguent avec le public, ce sont à la fois des personnages et des acteurs.
Premier Serviteur. - Aïe ! Aïe ! Aie ! hi ! Malheur de malheur ! Aïe ! Aïe ! Aïe !
Maudit soit le Paphlagonien acheté récemment, le misérable !
Avecque ses desseins que les dieux le confondent !
Depuis que le malheur a voulu qu’il entrât dans la maison,
5 il ne cesse de faire donner la raclée aux serviteurs.
Second Serviteur. - Ah ! oui, qu’il périsse le plus misérablement du monde,
avant tous les autres Paphlagoniens, avec ses diffamations !
Premier Serviteur. - Oh ! malheureux, comment vas-tu ?
Second Serviteur. -Mal, tout comme toi.
Premier Serviteur. - Avance ici, et flûtons ensemble
en gémissant sur un air d’Olympos.
10 Les Deux Serviteurs. – Mumû, mumû, mumû, mumû, mumû, mumû.
Premier Serviteur. - Pourquoi nous lamenter en vain ? Ne faudrait-il pas plutôt chercher quelque moyen de salut et cesser de gémir ?
Second Serviteur. - Quel serait donc ce moyen ?
Premier Serviteur. - Dis-le, toi.
Second Serviteur. - Toi plutôt, dis-le moi,
que je n’aie point à contester.
Premier Serviteur. - Non, par Apollon, pas moi.
15 Mais parle hardiment ; après je m’expliquerai à mon tour.
Second Serviteur. - Mais, c’est que « hardi ! » n’est point dans mes moyens.
Comment donc pourrais-je bien dire cela « euripidesquement » ?
Ah ! que ne me dis-tu ce qu’il faut que je dise ?
Premier Serviteur. - Non, non, de grâce, non, ne me sers pas de scandix ;
20 mais trouve quelque « pas de fugue » qui nous éloigne du maître.
Second Serviteur. - Eh bien, prononce « allons » tout d’un trait, comme je fais, en un mot.
Premier Serviteur. - Soit, je dis « allons ».
Second Serviteur. - Maintenant, après « allons », dis « dette ».
Premier Serviteur. - Dette.
Second Serviteur. - Parfait. À présent, comme si tu te… frottais, dis d’abord posément
25 « allons », ensuite « dette », puis l’un après l’autre en pressant le mouvement.
Premier Serviteur. – « Allons » « dette » « allons » « détalons ».
Second Serviteur. - Là, cela ne te fait-il pas plaisir ?
Premier Serviteur. - Certes, par Zeus - n’était que
pour ma peau j’appréhende ce présage-là.
Second Serviteur. - Comment cela ?
Premier Serviteur. - Hé ! quand on se… frotte, la peau s’en va.
30 Second Serviteur. - Alors le mieux pour nous, dans notre situation,
est d’aller nous prosterner devant quelque statue des dieux.
Premier Serviteur. - Que dis-tu ? Une statue des dieux ? Ah ça ? tu y crois donc, aux dieux ?
Second Serviteur. - Sans doute.
Premier Serviteur. - Sur quoi te fondes-tu ?
Second Serviteur. - Sur ce que « les dieux me sont ennemis ». N’est-ce pas conséquent ?
Premier Serviteur. - Tu me convaincs pleinement. Mais il faut aviser ailleurs.
Veux-tu que j’expose le sujet aux spectateurs ?
(Cavaliers, 1-36)10
Le Premier Serviteur. - He, toi ! Qu’est-ce qui te prend, malheureux Xanthias ?
Le Second Serviteur. - Je m’apprends à cesser une garde de nuit.
Le Premier Serviteur. - C’est donc que tu es en reste avec tes côtes d’une bonne volée.
Sais-tu au moins quel animal nous gardons là ?
5 Le Second Serviteur. - Je le sais, mais je désire oublier un peu mes soucis.
Le Premier Serviteur. - Eh bien, cours-en le risque ; d’ailleurs moi aussi
je sens sur mes prunelles se répandre je ne sais quelle douceur de somnolence.
Le Second Serviteur. - Mais es-tu fou, je te prie, ou pris du délire des Corybantes ?
Le Premier Serviteur. - Non pas, mais un sommeil me tient, qui vient de Sabazios.
10 Le Second Serviteur. - Alors tu sers le même Sabazios que moi.
Car moi aussi tout à l’heure j’ai senti fondre
sur mes paupières, comme un Mède, un sommeil branlant ;
et, ma foi, j’ai eu un songe merveilleux, tout à l’instant.
Le Premier Serviteur. - Et moi aussi, vrai, comme je n’en ai eu de ma vie.
15 Mais parle, toi, le premier.
Le Second Serviteur. - Il me semblait qu’un aigle
s’abattait sur l’Agora, un aigle énorme ;
ayant saisi dans ses serres un bouclier
couvert d’airain, il l’enlevait bien haut dans le ciel ;
puis, ce bouclier, je le vis jeter par Cléonymos.
20 Le Premier Serviteur. - Il n’y a donc pas de différence entre un griphe et Cléonymos.
« Devinez ce que je veux dire, proposera quelqu’un aux convives :
le même animal sur terre et dans le ciel
et sur mer a jeté son bouclier ».
Le Second Serviteur. - Hélas ! quel malheur va donc m’arriver,
que j’ai eu une pareille vision en songe ?
25 Le Premier Serviteur. - Ne t’inquiète pas.
Il n’arrivera rien de fâcheux, non, par les dieux.
Le Second Serviteur. - C’est une chose terrible, je suppose, qu’un homme qui a jeté ses armes. Mais à ton tour raconte le tien.
Le Premier Serviteur. - Ah ! c’est un grand rêve :
il concerne le vaisseau de l’État entier.
30 Le Second Serviteur. - Expose vite le fond de l’affaire.
Le Premier Serviteur. - Il me sembla, dans mon premier sommeil,
qu’il y avait dans la Pnyx une assemblée de moutons siégeant ensemble,
avec bâtons et manteaux courts.
Puis ces moutons, à ce qui me parut,
35 étaient harangués par un mastodonte prêt à tout avaler,
lequel avait une voix de truie flambée.
Le Second Serviteur. - Pouah !
Le Premier Serviteur. - Qu’y a-t-il ?
Le Second Serviteur. - Assez, assez, ne parle pas.
Ton songe pue horriblement le cuir pourri.
Le Premier Serviteur. - Ensuite cette canaille de mastodonte, avec une balance,
40 pesait de la graisse… de bœuf.
Le Second Serviteur. - Misère de moi !
C’est notre « Grèce » qu’il veut diviser.
Le Premier Serviteur. - Et il me semblait que Théôros près de lui
était assis par terre et avait une tête de corbeau.
45 Puis Alcibiade me dit en grasseyant :
« Tu vlois ? Théôlos a une tête de colbeau ».
Le Second Serviteur. - C’est avec justesse qu’Alcibiade a grasseyé cela.
Le Premier Serviteur. - N’est-ce pas là une chose étrange ? Théôros devenu corbeau !
Le Second Serviteur. - Du tout ; c’est parfait.
Le Premier Serviteur. - Comment ?
Le Second Serviteur. - Comment ?
D’homme qu’il était il devient tout à coup corbeau.
50 N’est-ce pas évident qu’il faut conclure que
s’enlevant de parmi nous il s’en ira aux corbeaux ?
Le Premier Serviteur. - Après cela, je ne te donnerais pas deux oboles de salaire,
à toi qui interprètes si habilement les songes ?
Le Second Serviteur. - Voyons maintenant, que j’explique le sujet aux spectateurs.
(Guêpes, 1-54)
10Dans les deux cas, on trouve dès la première réplique une allusion à la situation dramatique (le Paphlagonien dont il faut se méfier, le tour de garde du prisonnier Philocléon), mais on la perd aussitôt de vue et on ne la retrouvera qu’avec l’exposition de l’histoire. En fait, ces scènes sont constituées d’une suite de mots d’esprit fermés sur eux-mêmes et construits à partir du principe dialogique élémentaire de la division des rôles entre un astucieux et sa réplique. Le premier pose une question et c’est la réponse de son partenaire qui lui permet de faire un mot d’esprit. Les rôles peuvent évidemment être inversés, mais le résultat est le même. On a pu voir que la scène des Cavaliers repose essentiellement sur la virtuosité phonique (l’air d’Olympos, le jeu sur « allons-dette » (auto-molomen) l’intrusion de nombreux vers de modèle tragique ou même directement repris d’Euripide), tandis que la scène des Guêpes comporte des répliques plus longues, qui nécessitent plus d’action gestuelle, et des allusions politiques plus ouvertes et plus insistantes. La troisième séquence initiale, celle de la Paix, est un peu différente. Le thème d’ouverture, celui du scarabée stercoraire, reste présent tout au long de la scène et l’exposition de l’histoire est précédée par une sorte de devinette sur la signification symbolique du scarabée. Le public est ainsi impliqué à plusieurs reprises dans le dialogue.
Premier Serviteur. - Passe, passe au plus vite une galette pour l’escarbot.
Second Serviteur. - Voilà. Sers-la-lui, à la bête maudite,
et puisse-t-elle ne jamais manger de meilleure galette !
Premier Serviteur. - Donne-lui en une autre, faite de crottin d’âne.
5 Second Serviteur. - Voilà encore. Où donc est celle qu’à l’instant tu lui portais ?
Ne l’a-t-il pas mangée ?
Premier Serviteur. - Ce n’est pas le mot, par Zeus ; mais il me l’a arrachée
et l’a avalée tout entière, après l’avoir roulée dans ses pattes.
Allons, au plus vite broies-en beaucoup, et bien serrées.
Second Serviteur. - Ramasseurs de gadoue, aidez-moi, au nom des dieux,
10 si vous ne voulez pas me laisser asphyxier.
Premier Serviteur. - Une autre, une autre encore, d’un jeune prostitué.
Car il l’aime, dit-il, bien triturée.
Second Serviteur. - Voilà.
Il y a une chose, messieurs, dont je suis quitte, je crois :
personne ne peut dire que je mange ma pâtisserie.
15 Premier Serviteur. - Pouah ! Passe-m’en une autre, une autre encore, et une autre ;
et broies-en encore d’autres.
Second Serviteur. - Non, par Apollon, non ! car je
ne suis plus capable d’avoir le nez sur cette sentine.
Premier Serviteur. - Alors, je vais la prendre elle-même et l’emporter, la sentine.
Second Serviteur. - Oui, par Zeus, emporte-la aux corbeaux, et toi avec.
20 Et vous, si l’un de vous le sait, qu’il me dise
où je pourrais acheter un nez non troué.
Car il n’est pas de besogne plus misérable que
de pétrir de quoi donner à manger à un escarbot.
Un porc ou un chien prend les matières comme on les rend
25 et se les appuie sans façons ; mais lui, par fierté,
fait des manières et ne veut rien manger,
si je ne lui sers sa pâture moulue pendant un jour entier,
comme à une femme une galette pétrie en boule.
Mais je vais voir s’il a fini sa mangeaille,
30 par ici, en entrebâillant la porte, pour qu’il ne m’aperçoive pas.
Ferme, n’arrête pas un instant de manger
jusqu’à ce qu’à ton insu tu en crèves.
Comme il mange, l’exécrable animal, penché en avant
comme un lutteur, jetant de côté ses pattes dentelées,
35 et cela tout en tournant en cercle sa tête et ses bras,
tenez, comme ceci, à la façon de ceux qui tordent
les gros câbles destinés aux vaisseaux de transport !
L’immonde bête, et puante, et vorace !
De quelle divinité nous vient cette plaie ?
40 Je ne sais. Pas d’Aphrodite, toujours, à ce qu’il me semble ;
pour sûr, pas des Charites.
Premier Serviteur. - De qui donc ?
Second Serviteur. - Il ne se peut que ce ne soit un
signe de Zeus Merdoyant.
Premier Serviteur. - Il se pourrait bien dès lors qu’un des spectateurs dise
(un jeune homme qui se croit malin) : « Qu’est-ce que ce sujet-là ?
45 À quoi rime cet escarbot ? ». Puis un Ionien,
assis à ses côtés, de répondre :
« À mon avis, c’est une allusion à Cléon,
la façon sans vergogne dont cet animal mange l’ordure ».
Mais je rentre pour donner à boire à l’escarbot.
50 Second Serviteur. - Et moi je vais expliquer l’histoire.
(Paix, 1-50)
11D’autres séquences initiales confiées à un seul acteur répondent d’une manière analogue à la fonction de distraction. C’est le protagonistès qui interprète alors son rôle principal, comme Dicéopolis dans les Acharniens, Strepsiade dans les Nuées ainsi que Praxagora dans l’Assemblée des femmes. Le monologue permet (ou exige) des mouvements plus complexes et de véritables morceaux de virtuosité vocale ou mimique. Le début est en général paratragique : « Ah, combien de fois mon cœur m’a-t-il déjà mordu ! » s’exclame Dicéopolis ; et Strepsiade : « Hélas, hélas, ô Zeus souverain, comme cette nuit est infinie » ; on arrive avec Praxagora à une véritable paraphrase d’Euripide : « Œil splendide de la ronde lampe ».
12La paratragédie, élément fondamental de la comédie, n’a rien à voir avec l’art subtil de l’allusion littéraire à la Callimaque : elle est au contraire entièrement confiée à l’oreille, à la familiarité, commune à celui qui parodie et à son public, avec le ton sublime et solennel de la tragédie, avec son lexique et plus encore avec son rythme métrique et avec les gestes qui accompagnent la déclamation. Un vers « tragique », c’est-à-dire conforme au rythme plus fermé du trimètre tragique et faisant appel à un lexique étranger au langage ordinaire, lorsqu’il est récité par un acteur comique au ventre et au derrière rembourrés et au phallus pendant est déjà en soi un morceau de bravoure bouffonne. Il y a cependant dans le monologue de Dicéopolis un autre élément de virtuosité qu’il est utile de noter :
Et moi, toujours le tout premier, j’arrive à l’assemblée
je m’assieds ; puis, comme je suis seul,
je geins, je baille, je m’étire, je pète,
je ne sais que faire, je dessine sur le sol, je me gratte, je fais mes comptes.
Je regarde au loin du côté de mon champ, parce que j’aime la paix
et que j’ai horreur de cette ville, je regrette mon village
qui ne m’a encore jamais dit : « Achète du charbon,
du vinaigre, de l’huile ». Il ignorait « Achète »,
mais de lui-même m’apportait tout. Il n’y avait pas d’Achète.
(Acharniens, 28-36)
13La séquence « je geins, je baille, je m’étire, etc. » rappelle les « tirades » de la Commedia dell’Arte, à savoir des séquences très longues, peu à peu canonisées au profit des comédiens qui les introduisaient chaque fois qu’ils le jugeaient opportun11. La séquence, certainement mimée, est pour ainsi dire ouverte : elle peut être, selon la circonstance, étendue ou abrégée, comme on verra bientôt.
14Les procédés de bouffonnerie ne sont pas, bien entendu, employés uniquement au début des comédies. On retrouve par exemple la même technique dans le dialogue entre Strepsiade et le disciple anonyme de Socrate qui l’arrête à l’entrée du « pensoir ».
Le Disciple. - Allez aux corbeaux ! Qui frappe à la porte ?
Strepsiade. - Le fils de Phidon, Strepsiade, du dème de Cycynna.
135 Le Disciple. - Malappris que tu es, par Zeus, pour
avoir avec un pareil sans-gêne heurté si fort la porte et
fait avorter une idée toute trouvée.
Strepsiade. - Excuse-moi : j’habite loin dans la campagne.
Mais dis-moi la chose avortée.
140 Le Disciple. - Il n’est permis de la dire qu’aux disciples.
Strepsiade. – Dis-la-moi donc sans crainte, car tel que tu me vois,
c’est pour être disciple que je suis venu au pensoir.
Le Disciple. - Je te la dirai. Mais il faut tenir ces choses-là pour des mystères.
Socrate demandait tout à l’heure à Chéréphon
145 combien de fois une puce saute la longueur de ses pattes ;
elle avait mordu Chéréphon au sourcil
et sauté sur la tête de Socrate.
Strepsiade. - Comment donc a-t-il mesuré cela ?
Le Disciple. - Fort ingénieusement.
Il a fait fondre de la cire ; ensuite, prenant la puce,
150 il en a trempé les deux pattes dans cette cire ;
la puce une fois refroidie fut chaussée de bottines persiques.
Il les détacha et avec elles mesura la distance.
Strepsiade. - O Zeus souverain ! Quelle subtilité d’esprit !
Le Disciple. - Que serait-ce, si tu savais une autre
conception de Socrate ?
155 Strepsiade. - Laquelle ? Je t’en supplie, dis-la-moi.
Le Disciple. - Chéréphon, de Sphettos, lui demandait
si son opinion était que les cousins
bourdonnent par la trompe ou par le derrière.
Strepsiade. - Et qu’a dit Socrate des cousins ?
160 Le Disciple. - Il affirmait que le cousin a l’intestin
resserré ; or, ce canal étant grêle, l’air y passe avec force
droit jusqu’au derrière ;
puis, s’évasant à la suite de cette étroitesse,
le derrière résonne par la violence du souffle.
165 Strepsiade. - C’est donc une trompette que le derrière des cousins !
O trois fois heureux l’auteur de cette intest… igation.
Certes il lui serait aisé, s’il était accusé, d’échapper à une condamnation,
celui qui connaît à fond l’intestin du cousin.
(Nuées, 133-168)
15Le dialogue se poursuit avec le récit d’autres prouesses de Socrate. Il est clair qu’il n’a aucune fonction dramatique de type structurel. L’interruption de l’action ne sert qu’à raconter quelques historiettes sur Socrate, selon une série de modalités qu’on retrouve pratiquement telles quelles dans les historiettes sur Mussolini, sur De Gaulle ou sur les policiers. La technique du dialogue n’est autre que celle, élémentaire, que nous avons déjà décrite : un astucieux qui donne le thème, une réplique qui mord à l’hameçon et pose la question, la réponse à la question. Voici un exemple très voisin, bien que plus fonctionnel du point de vue dramatique : les mots d’esprit de Philocléon à ses débiteurs dans la dernière partie des Guêpes.
Philocléon. - Écoute, femme ; je veux te raconter
1400 une gentille histoire.
La Femme. - Non, par Zeus ; à d’autres, mon cher.
Philocléon. - Comme Ésope revenait de dîner un soir,
voilà qu’une chienne impudente et ivre se mit à aboyer après lui.
L’autre alors lui dit : « Chienne, chienne,
si, par Zeus, en échange de ta méchante langue, tu pouvais
1405 acheter quelque part du froment, tu ferais sagement, je crois ».
La Femme. - Et encore, tu te moques de moi ? Je t’assignerai, qui que tu sois,
devant les agoranomes pour le dégât de ma marchandise ;
j’ai comme témoin Chéréphon que voilà.
Philocléon. - Non, par Zeus, mais écoute pour voir si je te dis quelque chose de bien.
1410 Lasos un jour disputait le prix à Simonide ;
et Lasos dit : « Peu me chaut ».
(Guêpes, 1399-1411)
Philocléon. - Un Sybarite tomba d’un char
et d’aventure se fendit la tête très grièvement ;
car il se trouvait n’être pas expert dans l’art hippique.
1430 Un de ses amis survint et lui dit :
Que chacun fasse donc le métier qu’il sait faire.
Pareillement, toi aussi, cours à la clinique de Pittalos.
(Guêpes, 1427-1432)
Philocléon. - Écoute, au lieu de te sauver. À Sybaris une femme un jour
brisa un hérisson.
L’Homme. - De tout cela je prends témoin.
Philocléon. - Le hérisson donc, ayant quelqu’un, le prit à témoin.
Alors la Sybarite dit : « Par Coré, si,
laissant là ce témoignage, tu avais vite
acheté une ligature, tu aurais eu bien plus de sens ».
(Guêpes, 1435- 1440)
16Le schéma, comme on peut voir, est fixe : il dit alors (épeita eîpe). C’est la parodie du répertoire des apophtegmes et des sentences qui restitue à la réplique comique sa charge originelle de violence sarcastique.
17Autre type de bouffonnerie : celui qui s’insère dans un discours d’apparence sérieuse et qui joue souvent sur un double sens obscène, s’adressant essentiellement au public. On peut citer comme exemple les répliques d’Evelpidès, commentaire bouffon du discours persuasif de Pisthétairos aux oiseaux, du parent en marge du dialogue entre Euripide et Agathon (Thesmophories), de Dionysos juge et bouffon du duel entre Eschyle et Euripide, ou de Kléonice dans le prologue de Lysistrata. Citons quelques vers de cette comédie :
85 Lysistrata. - Et d’où est-elle, cette autre jeune femme ?
Lampito. - Une personne de qualité, vois-tu, par les Dioscures,
une Béotienne, qui vous arrive.
Lysistrata. - Par Zeus, une vraie Béotienne !
car elle possède une belle plaine.
Cléonice. - Oui, par Zeus, et très joliment le pouliot en a été arraché.
90 Lysistrata. - Quelle est cette autre enfant ?
Lampito. - D’une « ample » famille, par les Dioscures ;
mais une Corinthienne, elle.
Cléonice. - Ample, oui, par Zeus,
elle le paraît bien du côté que voilà.
(Lysistrata, 85-92)
18Dans presque tous ces cas on trouve, comme ici, une annulation obscène de répliques qui ne sont pas comiques en elles-mêmes. C’est une technique dont les comédiens dell’Arte devaient abuser, puisque Cecchini, que nous avons déjà cité, éprouve le besoin de les mettre en garde :
Ceux-ci doivent aussi se garder de ne pas interrompre (pour
donner lieu à leurs facéties) quelque beau discours ou mot
d’esprit qu’une partie sérieuse aura commencée.
19Mais que penser d’Aristophane ? Que le texte que nous possédons est conforme à la copie confiée aux acteurs (mais y avait-il des copies, les acteurs n’apprenaient-ils pas leur texte pendant les répétitions à partir de la lecture directe du poète ?) ou bien que le poète n’écrivait sa version définitive qu’après le spectacle en tenant compte des suggestions proposées par la représentation, ou bien encore que les interprètes n’étaient pas strictement tenus de respecter absolument le texte ?
20Nous avons vu que de nombreuses comédies s’ouvrent avec des procédés de dialogue calqués sur ceux de l’improvisation. Les bouffonneries du début sont structurellement nécessaires mais il est indifférent pour l’histoire que ce soient celles-ci plutôt que celles-là. Cela signifie-t-il qu’Aristophane imite, inconsciemment peut-être, les procédés du comique d’improvisation ?
21On peut, à condition de prendre les précautions requises, recourir à une expérience qui, bien qu’elle fasse partie d’un contexte socio-culturel différent, présente certains traits significatifs de ressemblance avec le théâtre d’Aristophane.
22Tout le monde connaît à présent Le serviteur de deux maîtres de Goldoni ; mais tout le monde n’a peut-être pas lu la brève introduction dont Goldoni lui-même a fait précéder l’édition de sa comédie :
Lorsque j’ai composé la présente Comédie, en l’an 1745,
à Pise, entre mes démêlés avec la justice, pour le divertis-
sement et le plaisir, je ne l’ai pas écrite comme on peut la
voir maintenant. À l’exception de trois ou quatre scènes
par acte, les plus intéressantes pour les rôles sérieux, tout
le reste de la Comédie n’était qu’indiqué de la manière que
les comédiens ont coutume d’appeler « a soggetto », c’est-à-
dire qu’il y avait un scénario où j’avais indiqué le thème,
le plan, la conduite de l’action et la fin des raisonnements
que les Acteurs auraient à faire ; ceux-ci étaient ensuite
libres de compléter en improvisant les phrases et les lazzi
appropriés ainsi que les idées spirituelles. De fait, ma Co-
médie fut si bien exécutée par les premiers Acteurs « à
l’improvisation » qui la représentèrent que j’en ai été plei-
nement satisfait, et je ne doute pas qu’ils l’ont en impro-
visant mieux ornée que je n’eusse pu le faire en l’écrivant.
Les astuces de Truffaldino, les facéties, les mots d’esprit
sont plus réussis lorsqu’ils sont le produit improvisé de la
vivacité d’esprit, de l’occasion, du brio. Le célèbre Acteur
comique connu dans toute l’Italie, justement sous le nom
de Truffaldino, a une telle vivacité, il est si prodigue en
mots d’esprit et si naturel dans le choix de ses termes qu’il
surprend et si je voulais me pourvoir pour les rôles comiques
de mes Comédies, je ne saurais mieux faire que de l’étudier
lui-même. C’est expressément pour lui que j’ai conçu cette
Comédie, ou plutôt c’est lui qui m’en a proposé le sujet,
sujet un peu difficile en vérité, qui a mis à l’épreuve tout
mon talent et mon ingéniosité pour le scénario et tout le
sien pour l’exécution.
Je l’ai vu jouer ailleurs par d’autres Comédiens et il m’a
semblé qu’elle avait beaucoup perdu de son aspect premier,
non peut-être faute de mérite de leur part, mais de connais-
sances que le scénario seul ne pouvait leur fournir. C’est ce
qui m’a conduit à l’écrire en entier, nullement pour obliger
ceux qui tiendront le rôle de Truffaldino à dire exactement
mes paroles lorsqu’ils en sauront de meilleures, mais pour
faire connaître mon intention et les conduire à la fin par
une route assez droite.
J’ai pris la peine de développer tous les lazzis les plus
nécessaires et les moindres observations pour rendre ma
comédie plus facile, autant que je l’ai pu, et si elle ne vaut
pas par la critique, la morale et l’instruction, on y trouvera
au moins le mérite d’une conduite raisonnable et d’un jeu
passablement raisonnable.
Je prie pourtant ceux qui joueront le rôle de Truffaldino
de s’abstenir, chaque fois qu’ils voudront y ajouter du leur,
de mots obscènes et de lazzi cochons ; ils peuvent être sûrs
qu’il n’y a que la populace pour se réjouir de ces choses et
que les honnêtes gens en sont offensés12.
23Cette page montre bien que, dans sa transformation en comédie écrite du scénario du Serviteur qui connut immédiatement un immense succès, c’est l’intention moralisatrice qui prédominait, à savoir éviter la vulgarité, les propos insolents et obscènes. Ce qui est intéressant, c’est ce que Goldoni dit de sa façon de procéder et que confirme l’élaboration du scénario de la Bague magique. Le processus de transformation du scénario en comédie part des scènes et des rôles secondaires, tandis que le rôle du protagoniste, celui de Truffaldino dans le Serviteur reste ouvert jusqu’à la fin. C’est aux interprètes de Truffaldino, c’est-à-dire aux premiers acteurs qu’il s’adresse dans la préface, alors que les autres interprètes sont censés rester attachés au texte écrit. Ainsi, il est possible d’engager une réflexion plus générale sur la conception même du texte impliquée par cette page de Goldoni. Nous sommes évidemment assez loin du credo flaubertien en la justesse d’un mot propre et irremplaçable ; on peut dire au contraire que le texte du Serviteur de deux maîtres est proposée par l’auteur pour ainsi dire à titre d’exemple, comme point de référence, tout au plus comme un seuil de sécurité au-dessous duquel il ne convient pas de descendre sous peine de compromettre le caractère de la comédie. Il dit qu’il a consigné par écrit tous les lazzis les plus importants, mais dans le fameux lazzi de la mise du couvert, où Truffaldino déchire la lettre de change que Béatrice lui a donnée, pour montrer à Brighella comment il faut disposer les assiettes, le texte goldonien se prête à des variantes et à des enrichissements ; les didascalies suggèrent et ne prescrivent pas les jeux de scène : « il indique une disposition quelconque ». L’auteur est toujours soucieux de l’effet d’ensemble de la scène, et non des mouvements particuliers, qui sont institutionnellement confiés à l’exécution de l’interprète.
24Ce caractère de simple indication, de suggestion apparaît particulièrement marqué dans ce que la tradition de la Commedia dell’Arte appelle un lazzi, une bouffonnerie confiée habituellement à un acteur comique et à sa réplique ou à l’acteur comique seul, qu’on peut étendre ou réduire à volonté13. Le lazzi de la mise du couvert représente plus du double dans la réalisation de Strehler que dans le texte de Goldoni. Le lazzi présente en effet, par sa nature, un caractère infiniment répétitif et il se construit suivant un effet d’accumulation et donc de crescendo de la tension scénique. Plusieurs cas similaires peuvent être identifiés dans les pièces d’Aristophane. Je me bornerai à rappeler deux exemples assez connus.
25Dicéopolis se rend chez Euripide pour se munir des vêtements de Télèphe dont il a besoin pour remporter sa bataille verbale avec le choeur :
Dicéopolis. - C’est cela ! Télèphe.
Donne-moi, je t’en supplie, la guenille de Télèphe.
Euripide. - Esclave, donne-lui les loques de Télèphe.
Elles sont au-dessus des haillons de Thyeste,
au-dessous de ceux d’Ino. Tiens, les voilà ; prends.
435 Dicéopolis. - O Zeus, dont le regard perce tout et d’en haut observe toutes choses,
fais que je revête le costume le plus propre à exciter la pitié.
Euripide, puisque tu m’as fait cette grâce,
donne-moi aussi le reste, ce qui va avec les haillons,
et d’abord, pour ceindre ma tête, le petit bonnet mysien !
440 Car je dois aujourd’hui me faire mendiant,
Être bien qui je suis etne point le paraître.
Le public peut me connaître,
mais le Chœur, présent à mon discours, doit être assez sot
pour se laisser faire la figue par mes… « petites phrases ».
445 Euripide. - Je te le donne. « Car fort est ton esprit, et fines tes idées ».
Dicéopolis. - Sois heureux ! « Que Télèphe ait le sort que je pense » !
Bien ! Comme je me remplis déjà de « petites phrases » ! …
Mais il me faut un bâton de mendiant.
Euripide. - Voilà, prends ; et va-t-en de ce seuil de pierre.
450 Dicéopolis. – « O mon cœur, tu me vois chassé de ces demeures »,
quand tant d’accessoires me manquent encore ! Plus que jamais
fais-toi collant, obsédant, pressant. Euripide,
donne-moi un corbillon tout brûlé par une lampe.
Euripide. – « Quel besoin, malheureux, as-tu de… cet osier ? ».
455 Dicéopolis. - Quel besoin ? Mais aucun ; je ne l’en veux pas moins.
Euripide. - Tu m’ennuies, entends-tu ? Quitte ces demeures.
Dicéopolis. - Hélas ! « Heureux sois-tu comme jadis ta mère ! ».
Euripide. - Va-t-en enfin, je te prie.
Dicéopolis. - Ne dis pas cela, mais donne-moi encore un objet, un seul :
une petite écuelle ébréchée.
460 Euripide. - La peste t’étouffe ! … Prends ceci. Sache que tu importunes ma demeure.
Dicéopolis. - Non, vois-tu, par Zeus, toi-même tu ne sais pas le mal que tu commets. Voyons, ô mon très doux Euripide, plus rien que ceci :
donne-moi une petite cruche bouchée avec une éponge.
Euripide. - Eh, l’homme ! tu vas me ravir toute ma tragédie !
465 Prends, et va-t-en.
Dicéopolis. - Je m’en vais.
Et pourtant que faire ? Une chose encore me manque ;
sans elle, je suis perdu ! Entends-moi, ô mon très doux Euripide,
donne-moi encore cela, et je pars, je ne reviens plus :
pour mettre dans le corbillon, de vieilles épluchures.
470 Euripide. - C’est ma mort que tu veux. Voilà. C’en est fait de mes drames.
Dicéopolis. - Je ne te demande plus rien, je pars. Car je suis vraiment trop
Importun Et ne m’aperçoispoint que lesrois m’ont en haine.
Ah ! malheureux ! Je suis perdu ! J’ai oublié
l’objet unique dont dépend tout mon sort.
475 Mon petit Euripide, ô mon très doux et mon chéri,
que je meure de male mort si jamais plus je te fais une demande,
sauf un seule, celle-ci seule, seule :
donne-moi du cerfeuil « que t’a Iégué ta mère ! ».
Euripide. - L’insolent ! Ferme la porte aux ais solides.
(Acharniens, 431-479)
26L’accent paratragique mis à part, très marqué dans ce passage et en harmonie avec le personnage d’Euripide, les éléments structurants de la scène apparaissent très clairement : le recours à des formules fixes « donne-moi » (dos moi) chez Dicéopolis et « Va-ten » (ápelthe) chez Euripide, le jeu manifestement flatteur des vocatifs et des diminutifs : Euripide, Euripide, mon petit Euripide, mon très cher, et, parallèlement, l’exaspération progressive de l’antagoniste.
27La scène de Myrrhine et Cinésias dans Lysistrata est analogue par sa construction, bien que la fonctionnalité dramatique y soit différente. La technique du « lazzi » est ici utilisée pour donner une représentation, on pourrait dire emblématique, de la frustration masculine :
Cinésias. - Au moins couche avec moi, depuis le temps.
905 Myrrhine. - Ah ! non ! et pourtant je ne nierai pas que je t’aime.
Cinésias. - Tu m’aimes ? Alors, pourquoi n’es-tu pas déjà couchée, ma
Myrrhinette ?
Myrrhine. - Tu es plaisant ! Devant ce petit ?
Cinésias. - Non, par Zeus. - Porte-le à la maison, Manès –
Là, le petit, tu vois, ne te gêne plus.
910 Tu ne te couches pas ?
Myrrhine. - Mais, pauvre, où pourrait-on faire cela ?
Cinésias. - Où ? La grotte de Pan serait bien.
Myrrhine. - Et comment ensuite entrerai-je pure à l’Acropole ?
Cinésias. - Fort bien, je suppose : tu te laveras dans la Clepsydre.
Myrrhine. - Et puis, mon serment ? Faut-il me parjurer, malheureux ?
915 Cinésias. - Que la faute retombe sur moi. Ne t’inquiète pas de ton serment.
Myrrhine. - Allons, je vais nous chercher une couchette.
Cinésias. -Du tout. Par terre, cela nous suffit.
Myrrhine. - Non, par Apollon, je ne veux pas,
Même méchant comme tu es, te faire coucher par terre.
Cinésias. - Elle m’aime, voyez-vous, ma femme ; c’est bien clair.
920 Myrrhine. - Voilà. Couche-toi vite ; moi, je me déshabille.
Mais, sapristi, il faut chercher une natte.
Cinésias. - À quoi bon une natte ? Pas pour moi du moins.
Myrrhine. - Si, par Artémis ; ce serait honteux,
sur des sangles.
Cinésias. - Laisse-moi donc te baiser.
Myrrhine. - Tiens.
Cinésias. - Ah ! la, la, la. - Reviens à toute vitesse.
925 Myrrhine. - Voilà une natte. Couche-toi ; à l’instant je me déshabille.
Mais, sapristi, tu n’as pas d’oreiller.
Cinésias. - Mais je n’en ai pas besoin, moi.
Myrrhine. - Par Zeus, moi bien.
Cinésias. - Décidément, ce pauvre membre, c’est Héraclès qu’on régale !
Myrrhine. - Debout, lève-toi d’un saut. Cette fois, j’ai tout.
930 Cinésias. - Tout, bien sûr. Ici donc, mon trésor.
Myrrhine. - Voilà, je détache mon soutien-gorge.
Souviens-toi : ne va pas me tromper au sujet de la paix.
Cinésias. - Non, par Zeus, ou je meure.
Myrrhine. - Allons, bon, tu n’as pas de couverture.
Cinésias. - Par Zeus, je n’en ai nul besoin. Je veux faire l’amour.
935 Myrrhine. - Sois tranquille, tu le feras. Je reviens vite.
Cinésias. - Cette femme me fera mourir, avec ses couvertures.
Myrrhine. - Mets-toi droit.
Cinésias. - Mais il est droit, celui-ci.
Myrrhine. - Veux-tu que je te parfume ?
Cinésias. - Non, par Apollon, pas moi.
Myrrhine. - Si, par Aphrodite, que tu veuilles ou non.
(Elle part encore.)
940 Cinésias. - Ah ! puisse-t-il être répandu, le parfum, ô puissant Zeus !
Myrrhine. - Avance ta main ; prends et frotte-toi.
Cinésias. - Pas agréable, par Apollon, ce parfum-la.
Il est tout juste bon à retarder, et ne sent pas le mariage.
Myrrhine. - Malheureuse ! C’est le baume de Rhode que j’ai apporté.
945 Cinésias. - C’est bon ; laisse-le, que diantre !
Myrrhine. - Tu plaisantes tout de bon.
Cinésias. - La peste soit de celui qui le premier distilla un parfum !
Myrrhine. - Prends cette fiole.
Cinésias. - Mais j’en tiens une autre. Allons, cruelle,
couche-toi et ne m’apporte plus rien.
950 Myrrhine. - C’est ce que je vais faire, par Artémis.
Ainsi, je me déchausse. Mais, mon chéri,
songe à voter pour la pax.
(Lysistrata, 904-951)
28Peu importe donc le procédé comique : itération d’un motif unique avec des retours lexicaux : « couche-toi » d’un côté, « et pourtant » de l’autre, ainsi que l’effet d’accumulation qui peut être produit comme dans les Acharniens par une multiplication matérielle d’objets inutiles ; peu importe le crescendo scénique marqué par l’exaspération de l’un des deux adversaires. Si le temps le permettait, nous pourrions considérer d’autres lazzis ; il y en a de plus brefs, mais tous sont construits suivant la même technique : celui de la route de l’Hades (Gren., 120 ss.), celui des serviteurs bons à rien (Gren., 738 ss.), celui du tirer de la corde (Paix, 459 ss.), celui du sacrifice (Paix, 923 ss.) ou encore, avec un seul acteur, celui de la constipation de Blépyros (Assemb., 313 ss.) ou de la maladie de Philocléon(Guêpes, 67 ss.).
29Aristophane utilise constamment les procédés comiques de l’improvisation et pourtant il les critique à plusieurs reprises et va jusqu’à se vanter de ne pas en faire un usage grossier. C’est de grossièreté justement qu’il accuse ses rivaux, enclins selon lui à recourir à des effets de bouffonnerie trop faciles, aux stéréotypes les plus connus de la farce. On se souvient qu’il se vante, dans la parabase des Nuées de ne pas recourir à des moyens tels que les bastonnades et les hurlements de vieillards, les répliques faciles sur les défauts physiques. Dans le prologue des Guêpes, après les pitreries initiales que nous avons déjà vues, le premier serviteur continue :
Voyons maintenant, que j’explique le sujet aux spectateurs,
55 après les quelques mots de préambule que voilà.
Qu’on n’attende de nous rien de trop relevé,
ni non plus des plaisanteries dérobées à Mégare.
Nous n’avons en effet, ni une paire d’esclaves prenant dans une corbeille
des noix pour les jeter aux spectateurs,
60 ni Héraklès frustré de son dîner,
ni Euripide à nouveau houspillé ;
et même, si Cléon a brillé grâce à sa chance,
nous n’allons pas le mettre de nouveau en capilotade.
Mais nous avons un petit sujet ayant du bon sens,
65 qui est bien à votre portée,
mais plus sensé qu’une comédie grossière.
(Guêpes, 54-66)
30En réalité, on vient précisément de faire allusion à Cléon, Euripide n’est pas absent du reste de la comédie et, à défaut de noix, ce sont des grains d’orge qui, dans la Paix, sont envoyés par un esclave au public. Aristophane serait-il donc en contradiction avec lui-même ? Si contradiction il y a, est-elle subjectivement le fait d’Aristophane, ou n’est-elle pas plutôt objective, celle d’un théâtre comique écrit qui, tout en subissant la fascination de la poésie tragique désormais dominante, n’a pas rompu les liens avec une tradition comique qui a fait ses preuves ? Le début des Grenouilles me semble symbolique à cet égard. La comédie commence avec les procédés comiques typiques que nous venons de voir, mais dès la première réplique, la densité allusive s’avère bien différente :
Xanthias. –Dirai-je maître, un de ces mots coutumiers
qui toujours font rire les spectateurs ?
Dionysos. – Dis ce que tu voudras, par Zeus, sauf « Je suis excédé ».
De ce mot-là garde-toi bien ; la plaisanterie est devenue tout à fait écœurante.
5Xanthias. – Et quelque autre drôlerie, non plus ?
Dionysos. – Si – sauf « Que je suis accablé ! ».
Xanthias. – Quoi donc ! dirai-je la grande facétie ?
Dionysos. – Par Zeus, oui, vas-y carrément.
Aie seulement soin de ne pas me dire une chose.
Xanthias. – Laquelle ?
Dionysos. – En changeant ton bâton d’épaule, que tu en es « pris d’un besoin ».
Xanthias. – Ni que, chargé d’un tel fardeau,
10 si on le décroche, je vais lâcher un pet ?
Dionysos. – Non pas, je t’en supplie ; à moins que tu ne veuilles me faire vomir.
Xanthias. – Pourquoi alors me fallait-il porter ce bagage,
si je ne peux rien faire de ce qu’ont coutume de faire les Phrynichos,
les Lycis, les Amipsias, quand ils portent des bagages,
à tout coup, dans une comédie ?
(Grenouilles, 1-15)
31Il s’agit là d’un véritable « lazzi » sur la bouffonnerie. L’objet de la parodie est précisément la farce d’ouverture, telle que nous l’avons vue dans les Cavaliers, dans les Guêpes, dans la Paix, etc… Ce procédé est utilisé également ici, mais l’art d’Aristophane consiste précisément dans le fait d’utiliser une réplique grossière tout en montrant qu’il la méprise, de faire rire le public tout en se moquant de lui parce qu’il rit. Cela va même plus loin, puisque c’est Dionysos lui-même, alors qu’il affirme ne pas supporter ce genre de vulgarité qui anticipe sur le serviteur en les débitant l’une après l’autre (une seule de ces répliques est, à la fin, mise dans la bouche de Xanthias). Cette scène de critique de la grossièreté comique atteint ainsi le comble de la concentration scatologique. Il s’agit d’un morceau de bravoure où la farce est à la fois objet et instrument de la parodie. Mais on pourrait même dire que dans cette scène, l’écriture comique désormais arrivée à maturité se moque d’elle-même.
Bibliographie
Des DOI sont automatiquement ajoutés aux références bibliographiques par Bilbo, l’outil d’annotation bibliographique d’OpenEdition. Ces références bibliographiques peuvent être téléchargées dans les formats APA, Chicago et MLA.
Format
- APA
- Chicago
- MLA
Apollonio M. (1930), Storia della commedia dell’arte, Milan, 1930.
Breitholtz L. (1960), Die dorische Farce im griechischen Mutterland vor dem 5. Jhdt. Hypothese oder Realität?, Stockholm.
Cantarella R. (1949), Aristofane, Le commedie, vol. I, Prolegomeni, Milan.
Chapman G. A. H. (1983), « Some notes on Dramatic Illusion in Aristophanes », American Journal of Philolology 104, p. 1-23.
10.2307/293756 :Cornford F. M. (1961), The Originof Attic Comedy, éd. avec une préface et des notes par T.H. Gaster, New York.
Goldoni C. (1936), Tutte le opere, éd. par G. Ortolani, Milan, vol. II.
Lanza D. (1985), « Le regole del gioco scenico nell’Ateneantica. Primeannotazioni », dans Mondo classico: percorsi possibili, CIDI-Centro Romano di Semiotica, Ravenne, 1985, p. 109-117.
Nicoll A. (1965), Il mondo di Arlecchino, Milan, 1965.
Pandolfi V. (1957-1960), La commedia dell’Arte, Florence, vol. IV.
Russo C. F. (19842), Aristofane autore di teatro, Florence.
Notes de bas de page
1 Ce texte est extrait de M. Detienne (éd.), Les savoirs de l’écriture en Grèce ancienne, Villeneuve d’Ascq, 1988, p. 359-384. Nous remercions les Presses Universitaires du Septentrion de nous en avoir permis la publication.
2 En attendant le vol. I des PCG, on trouvera beaucoup de matériel dans Cantarella 1949.
3 Xénophon, Banquet, 11, 1 et VII, 3. Outre les représentations citées, il est aussi question de marionnettes et de mime (ou peut-être de pantomime).
4 Le livre de Breitholtz 1960, malgré l’insuffisance de ses conclusions, reste important grâce à l’ampleur de son enquête et à sa critique pointilleuse des lieux communs. Il contient en outre d’intéressantes indications sur le problème complexe des comédies d’Épicharme qui n’est pas abordé ici, pas plus que celui, malgré son importance, des mimes de Sophron.
5 Pour ces considérations sur les modes de déclamation de la tragédie, voir Lanza 1985, p. 109 ss.
6 Pour l’apprentissage d’Aristophane, cf. la minutieuse enquête de Russo 19842, chap. 1.
7 « Discours sur l’art comique avec la manière de bien déclamer de Pier Maria Cecchini comico Acceso dit Fritellino », publié dans Pandolfi 1957-60, p. 78 ss.
8 Chapman 1983, p. 1 ss.
9 Cornford 1961.
10 Ici et dans les pages suivantes, on reprend les traductions d’Aristophane par H. van Daele, dans Aristophane, texte établi par V. Coulon et traduit par H. van Daele, Paris, 1923-1930, 5 voll.
11 La « Tirade » est au sens propre une suite d’expressions homogènes construites selon la technique du chapelet. Certaines ont été conservées dans la « Selva ovvero Zibaldone di concetti comici raccolti del P.D. Placido Adriani di Lucca MDCCXXXIIII » publiée par Pandolfi, 1957-1960, p. 242 ss.
12 Goldoni 1936, p. 8 ss.
13 Pour le lazzi dans la Commedia dell’Arte, cf. Apollonio 1930, p. 158 ss. et Nicoll 1965. On en trouvera aussi un catalogue bien fourni dans la « Selva » d’Adriani citée plus haut.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Le visage qui apparaît dans le disque de la lune
De facie quae in orbe lunae apparet
Alain Lernould (dir.)
2013
Commenter et philosopher à la Renaissance
Tradition universitaire, tradition humaniste
Laurence Boulègue (dir.)
2014
Diego Lanza, lecteur des œuvres de l'Antiquité
Poésie, philosophie, histoire de la philologie
Rossella Saetta Cottone et Philippe Rousseau (dir.)
2013
Figures tragiques du savoir
Les dangers de la connaissance dans les tragédies grecques et leur postérité
Hélène Vial et Anne de Cremoux (dir.)
2015
La représentation du « couple » Virgile-Ovide dans la tradition culturelle de l'Antiquité à nos jours
Séverine Clément-Tarantino et Florence Klein (dir.)
2015
Hédonismes
Penser et dire le plaisir dans l'Antiquité et à la Renaissance
Laurence Boulègue et Carlos Lévy (dir.)
2007
De l’Art poétique à l’Épître aux Pisons d’Horace
Pour une redéfinition du statut de l’œuvre
Robin Glinatsis
2018
Qu'est-ce que la philosophie présocratique ?
What is presocratic philosophy ?
André Laks et Claire Louguet (dir.)
2002