Introduction. Philologie et idéologies
p. 13-20
Texte intégral
1Philologue italien, DL étudie les lettres classiques à l’université de Pavie, où il obtient sa maîtrise en 1959, sous la direction de l’helléniste Adelmo Barigazzi, élève de Giorgio Pasquali, avec un mémoire sur « L’unité de l’Oreste d’Euripide »1. Après une année de spécialisation à Munich avec l’historien de la philologie Rudolf Pfeiffer et avec le philologue Kurt von Fritz, il revient à Pavie, où il devient assistant en littérature grecque, puis, en 1968, assistant chargé d’enseignement en littérature grecque et en histoire de la langue grecque. En 1980, il est nommé professeur dans cette université où il a poursuivi ses enseignements jusques à ces dernières années.
2Sa formation initiale, marquée par l’héritage pasqualien d’une philologie qui conteste l’application mécanique de la Textkritik par la prise en compte du statut historique des sources manuscrites et par une analyse approfondie de l’histoire de la transmission, s’accompagne, dès le début, d’une réflexion sur les textes anciens en tant qu’instruments de médiation idéologique, suivant le chemin de pensée tracé par le théoricien marxiste italien Antonio Gramsci, dont l’influence a été grande pour sa formation intellectuelle et sa compréhension du métier de philologue. C’est en partant de cette double racine que l’on peut ressaisir le lien essentiel qui rattache les deux axes fondamentaux de sa recherche : d’une part, le retour critique sur l’histoire de la philologie – avec une série d’essais sur des figures majeures de l’idéologie classiciste de l’Altertumswissenschaft, comme Wolf (1981), Wilamowitz (1974), Jaeger (1972), Snell (1970) –, sur certains concepts qui ont dominé la discipline depuis le début du XIXe siècle – comme l’essai sur « La tragédie et le tragique » (1996) –, ou sur des paradigmes scientifiques qui régissent les lectures modernes et contemporaines et dont il suggère les rapports avec les pratiques de l’enseignement scolaire et avec les traditions culturelles nationales2. D’autre part, ses recherches sur le théâtre et sur la philosophie du Ve et du IVe siècle av. J. C., qu’il étudie d’abord comme des documents culturels, dans le but de montrer qu’ils ont contribué à élaborer cette « idéologie de la cité » dont il dessine les contours dans un essai significatif écrit avec Mario Vegetti (1977). D’un côté comme de l’autre, il s’agit de montrer que les textes anciens ont joué un rôle important comme support des idéologies, aussi bien dans le monde ancien qui les a produits que dans les sociétés occidentales qui les ont élus en tant qu’objets privilégiés d’étude et de réflexion. L’idée commune qui sous-tend tous ces travaux est la thèse gramscienne selon laquelle l’interprétation des textes auxquels on attache une valeur est un enjeu culturel et politique majeur, parce que c’est aussi par l’intermédiaire de ces textes que s’élaborent, au sein des institutions éducatives, les différentes formes de consensus au pouvoir dans les sociétés où les règles du jeu démocratique l’emportent sur l’exercice de la force. D’où la fonction « militante » de la pratique philologique, en tant qu’instrument de lutte pour la promotion culturelle et politique (Gramsci parle à ce propos d’« hégémonie ») des classes sociales antagonistes. Quelques corollaires importants découlent de cette proposition initiale, et il vaut la peine de les mentionner brièvement parce qu’ils ont des conséquences significatives pour la définition de la philologie telle que DL la pratique. Le premier s’exprime dans une distance affichée à l’égard de toute position théorique postulant l’autonomie intellectuelle des opérateurs culturels, à commencer par les diverses formes prises par cette attitude dans une tradition idéaliste différemment représentée dans les pays européens qui ont le plus largement contribué au développement de la discipline philologique ; et, parallèlement, dans l’affirmation du lien nécessaire entre les métiers intellectuels et des intérêts (politiques, économiques, sociaux, etc.) chaque fois déterminés. Un exemple caractéristique de cette approche est fourni par l’essai « La tragédie et le tragique » (2004), où DL met en lumière les liens entre l’élaboration du concept romantique de « tragique » et l’idéologie de la bourgeoisie du début du XIXe siècle, tout en montrant le caractère « anachronique » de cet outil théorique par rapport à l’objet dont il était censé rendre compte, la poésie dramatique du Ve siècle av. J. C.
3On touche là un deuxième aspect essentiel de cette réflexion, plus spécifiquement lié à la question de l’interprétation littéraire : s’il est indéniable qu’il y a une différence profonde entre l’« intention » d’un auteur et la manière dont son œuvre a été lue par les générations qui lui ont succédé, il est néanmoins primordial d’examiner les multiples interprétations dont cette œuvre a fait l’objet si l’on veut aborder celle-ci avec une conscience critique de sa fonction idéologique d’instrument de médiation en vue d’un consensus. On voit aussitôt la différence qui sépare la perspective de DL de la Rezeptionsästhetik de l’École de Constance, car la prise en compte de la réception, loin de servir à promouvoir l’ouverture indéfinie du texte à ses multiples lectures, est orientée par la conviction que la lecture des œuvres a toujours eu une fonction essentielle comme support des idéologies des classes dominantes relayées par les systèmes éducatifs. Plus fondamentalement, l’insistance sur le caractère idéologique des diverses utilisations des textes, et des textes anciens en particulier, amène à redéfinir la relation entre les objets du travail philologique et les théories qui ont été élaborées pour rendre compte de leur nature, car, tout en essayant de ramener chaque paradigme interprétatif aux positions et aux intérêts concrets qu’il représente dans le champ intellectuel et social, elle remet au centre de la pratique philologique l’écriture de l’auteur, en tant que travail sur la langue, à partir de conditions matérielles (historiques, anthropologiques, sociologiques) chaque fois particulières. Aussi, la reconstruction du sens des textes, de leur mouvement interne, des rapports entre leur forme et leur contenu, de leurs relations avec l’histoire des genres littéraires, l’étude lexicale et syntaxique, s’accompagnent d’une attention constante portée aux conditions matérielles de production de l’écriture et à sa génèse. Comment naît une écriture ? Quelles sont ses conditions historiques, ses relations avec les langages sociaux et avec les écritures qui l’ont précédée, bref ses coordonnées spécifiques dans le champ de la production discursive ? C’est ainsi que les travaux de DL sur le théâtre, partant de l’histoire des genres dramatiques, de leur évolution, mais surtout de l’analyse du rôle particulier qu’y tenait l’écriture, ont apporté des contributions nouvelles et éclairantes sur le métier de l’acteur dans la Grèce classique et sur les formes spécifiques de son jeu (diction, gestes, rythmes scéniques) tant dans la comédie que dans la tragédie, tout en anticipant (dans le temps) et parfois dépassant (sur le fond) les études sur la « théâtralité » et sur la « performance » devenues à la mode dans la période récente. C’est ainsi, encore, que ses recherches sur les dialogues de Platon ont mis en lumière des analogies étonnantes entre la figure qui tient le rôle de protagoniste, Socrate, et le protagonistes, le premier acteur des comédies d’Aristophane, qui domine la scène et dirige l’intrigue, orchestrant la défaite de ses ennemis par des moyens bouffons, jouant de son apparence ridicule pour mieux accabler ses victimes. Et si le lien entre l’écriture de Platon et celle d’Aristophane se trouve dans leur configuration dramatique, les prémisses sont posées pour une relecture en profondeur de ses dialogues, car la présence du comique devient un élément structurel et informe le contenu de la pensée non moins que la forme. Mais l’écriture est aussi au centre des travaux de DL sur Aristote, avec l’attention accordée aux formes particulières de l’argumentation, notamment aux classifications, et aux relations entre ces dernières et l’objet spécifique de chaque analyse.
4Cet intérêt constant pour l’écriture, lié au regard critique de l’historien de la culture, a constitué un point de rencontre entre la philologie de DL et les préoccuppations pratiques et théoriques qui sont à l’origine de la création par Jean Bollack de l’école philologique de Lille, dans la mesure où, selon le point de vue qui caractérise celle-ci, la critique textuelle, la traduction et le commentaire ne peuvent être séparés d’une problématisation de l’histoire des interprétations. En effet, au sein de l’école de Lille, l’analyse critique des traditions de lecture et des interprétations savantes a pris deux orientations distinctes mais complémentaires : d’une part, l’étude des commentaires anciens et des corpus doxographiques, considérés en eux même, comme objets d’intérêt à part entière, révélait la distance entre les textes et les significations qui leur avaient été attribuées au cours de leur histoire, de manière à dégager la lecture de tout préjugé ; d’autre part, l’histoire de la philologie, en objectivant les préalables des interprétations autorisées, offrait un instrument critique essentiel dans une lutte, plus politique en un sens particulier de l’expression, conduite au sein de l’institution pour libérer des espaces de pensée que le fonctionnement ordinaire de celle-ci interdisait.
5D’où les recherches sur l’histoire sociale de la philologie menées pendant les années ‘60 et ‘70, dans un dialogue suivi avec Pierre Bourdieu, et visant à mettre en évidence les relations entre la philologie académique et le fonctionnement de l’institution universitaire et à dévoiler les racines et les mécanismes de la censure que l’ordre intellectuel établi exerçait à l’égard des pratiques d’interprétation qui lui étaient extérieures. L’idée sous-jacente était que les discours autour de l’écriture ne sont pas liés seulement à la position sociale de celui qui les produit mais aussi à sa fonction dans l’institution. L’explicitation des modes d’acquisition du savoir philologique devenait un outil efficace pour combattre « la mécanique de l’éloquence universitaire », et créait les conditions de l’exercice d’une lecture plus démocratique, donnant la préférence à la structure du séminaire plutôt qu’à la leçon traditionnelle et mettant au centre du travail sur les textes la lecture partagée dans une discussion ouverte mais réglée par le caractère vérifiable des observations et par la confrontation des arguments. Cette pratique importait plus que les discours théoriques qu’elle mettait en question, avec la conviction que la primauté accordée à la lecture en commun était la condition de l’élaboration de schémas théoriques plus justes, dans un va-et-vient rigoureux et virtuellement illimité entre le texte et les hypothèses de sens construites au fil de l’interprétation. Priorité de la pratique de la lecture critique par rapport à la théorie du fait littéraire, mais aussi priorité de la langue en tant que « possibilité de dire », ouverte aux mouvements de la création verbale, et enfin priorité du faire artistique, déterminé par son historicité propre. Le but que se fixait cette philologie était de produire un savoir critique à la fois exigeant et démocratique, conforme à la visée universaliste revendiquée par l’institution, et de transformer ainsi l’université de l’intérieur, par elle-même. Comme pour DL, mais selon des parcours différents, le moment de la pratique précédait, par une prise de position préalable que l’on peut rattacher à un intérêt profond pour la culture, le moment de l’élaboration théorique, et la pratique philologique s’accompagnait d’une ambition de transformation culturelle et de progrès social. La réflexion critique sur l’histoire de la discipline en était le préalable.
6Convergences intéressantes, donc, dans le passé comme dans le présent, en dépit des tours et des retours de l’histoire. Des manières de lire que leurs exigences respectives rendent capables de dialoguer. Mais des différences aussi, nettement accusées, et fécondes dans leur rencontre, entre la manière de constituer les textes en objets dans les lectures pratiquées. La philologie critique de l’École de Lille se comprend de fait comme une science des œuvres dans leur singularité. Herméneutique dans sa méthode, elle s’applique à reconstruire par des procédures rigoureuses et vérifiables « le » sens de chaque œuvre, refusant du même geste l’abandon de la connaissance du particulier à l’intuition inspirée, le relativisme épistémologique et l’autorité dogmatique des interprétations sédimentées dans la tradition académique. Reconstruire, voire reproduire, et non extraire du texte, ce sens qui coïncide hypothétiquement avec le mouvement par lequel à un moment particulier de l’histoire l’œuvre s’est elle-même constituée en interprétant et en recomposant des formes et des contenus culturels du monde au sein duquel, et contre lequel, elle a été écrite. Sur ce point, on le voit, les manières de lire de Jean Bollack et des ses élèves, et celles du maître de Pavie, se distinguent nettement. Mais l’expérience, jusque dans le colloque qui a servi de point de départ à l’élaboration de ce livre, a prouvé que leurs divergences ne les empêchaient pas de dialoguer fructueusement.
7Aussi, c’est pour rendre hommage au travail de DL, dans l’esprit de la tradition de discussion ouverte et exigeante cultivée au sein des séminaires lillois, que l’UMR STL a décidé de lui consacrer ce volume d’essais, en rassemblant pour l’occasion des chercheurs venus d’horizons théoriques différents.
8Ce dialogue ouvert s’est noué autour d’aspects de la recherche de DL qui recoupaient des intérêts passés ou présents des chercheurs de Lille.
9Du côté des Présocratiques d’abord : les premiers travaux de DL, parus au cours des années ‘60, ont porté sur Anaxagore, avec une édition importante des Témoignages et des fragments (1966) et plusieurs articles sur les théories du Clazoménien et la place des homéomeries dans la tradition doxographique (voir, ci-dessous, l’article de Claire Louguet).
10DL a publié en 1987 une traduction annotée de la Poétique d’Aristote, qui est un ouvrage de référence, notamment par la longue introduction où sont présentés de manière simple et rigoureuse les problèmes de la transmission du texte, les contenus manifestes et les contenus cachés, et les stratégies théoriques et argumentatives ; s’ajoute à cet ouvrage majeur une série d’études importantes, publiées dans les années ‘80 et les années ‘90, dans lesquelles DL approfondit des notions difficiles de la réflexion aristotélicienne sur la poésie, comme le mûthos et la kátharsis, ou réexamine la généalogie des genres poétiques dont il a souligné l’asymétrie conceptuellement irréductible – car fondée sur l’histoire des genres dramatiques – entre traitement de la tragédie et traitement de la comédie (voir dans ce volume les contributions de Claudio Veloso, Ioanna Papadopoulou, Claude Calame et Giulia Sissa).
11Aristophane constitue, avec Euripide, l’objet privilégié des recherches de DL sur le théâtre. Une place notable revient dans cet ensemble aux travaux sur l’acteur comique. DL y a mis en évidence le caractère central de la figure du protagonistés dans la comédie ancienne, à la fois dans l’organisation de l’action dramatique et dans la gestion de l’espace scénique (voir la discussion de Xavier Riu).
12Cette réflexion trouve son couronnement dans l’essai Le Sot. De Socrate, Eulenspiegel, Pinocchio et d’autres transgresseurs du sens commun, paru en 1997, où DL reconstruit la figure culturelle du « sot », paradigme du transgresseur du sens commun, avec ses traits comiques, répugnants, grossiers, déraisonnables, inquiétants, en parcourant un corpus très vaste de textes littéraires, religieux et philosophiques de la culture occidentale, mais dont le point de départ est une méditation sur la relation entre la figure de l’acteur comique et le personnage de Socrate dans les dialogues platoniciens. Empruntant un chemin à contre-courant de la démarche anthropologique, le choix de DL a consisté à mettre l’accent, non pas tant sur les caractères constants du modèle culturel du sot, que sur la spécificité des adaptations et des élaborations dont ce modèle a fait l’objet. Le sot, donc, non pas comme un topos persistant de notre culture et que l’on pourrait définir clairement, mais comme une énigme à laquelle on prête, de manière chaque fois différente, les traits de « ce qui dérange » le sens commun (voir les articles de Philippe Rousseau et de Massimo Stella).
13Dans le domaine de la tragédie, deux ouvrages représentent mieux que d’autres son intérêt pour le théâtre tragique comme producteur d’idéologie et comme médiateur politique : ce sont ses contributions au volume collectif L’Idéologie de la cité, paru en 1977, et le livre Le Tyran et son public, de la même année, où DL reconstruit la figure idéologique du tyran, en portant la même attention à la définition des contenus culturels et aux idéologies qu’il manifestera vingt ans plus tard dans l’étude de la figure du « sot ». Se distinguant d’autres lectures marxistes du théâtre ancien qui se sont bornées à projeter dans l’histoire grecque des catégories marxiennes, comme celle de la lutte des classes, sans les problématiser, les analyses de DL se nourrissent d’une réflexion poussée sur le rôle des institutions culturelles et des « intellectuels » dans la diffusion de l’idéologie destinée à assurer le maintien de l’ordre socio-économique à Athènes, « l’idéologie de la cité ». DL procède, nous l’avons dit plus haut, à une relecture gramscienne de l’histoire de la démocratie athénienne (voir les essais d’Anna Beltrametti et de Marella Nappi).
14À l’horizon de son analyse, l’idée que la construction politique – confiée à Solon et définitivement accomplie par Clisthène – qui aboutit à la création de la polis classique avait été conçue comme une réponse à la crise économique et sociale de la fin du VIIe siècle, avec pour objectif de restaurer l’homogénéité du corps social et le consensus autour du pouvoir de l’aristocratie, sans pour autant mettre fondamentalement en question celui-ci. En posant l’égalité des citoyens au delà des différences patrimoniales qui s’étaient creusées progressivement par suite de la privatisation du territoire par les grandes familles aristocratiques, la politique se faisait médiatrice de la crise du tissu social. C’est dans ce cadre que devait naître l’« idéologie de la cité », que l’on peut identifier avec l’ensemble de la production culturelle nécessaire au maintien de la construction politique qu’était la polis, une production extrêmement variée, discordante, dialectique, exprimant un foisonnement de points de vue sur les problèmes de l’homme et de la société, mais unifiée par la position centrale qu’elle réservait à la figure « idéologique » de la cité. « Idéologique » au sens où elle permettait le maintien de « ce » modèle politique, où les intellectuels jouaient un rôle de premier plan, diffusant et ancrant l’image de la cité dans le discours publique, par des langages « politiques » (le théâtre, l’historiographie, la philosophie) et par des formes d’organisation de la culture elles aussi « politiques ». Le cadre était ainsi posé pour une relecture critique du théâtre athénien, qui pouvait prendre en compte la spécificité de son contexte social, économique et culturel, sans réduire la singularité des œuvres par l’application de schémas théoriques préconstitués.
15Tout le travail de DL, que ce soit sur la philosophie, sur le théâtre, ou encore sur les textes biologiques, psychologiques et médicaux, auxquels nous n’avons pas pu malheureusement réserver une place, s’accompagne depuis le début d’une interrogation sur la discipline philologique, sur ses méthodes et sur ses idéologies, manifestes ou cachées (voir l’article d’Andrea Cozzo). Sans jamais faire l’objet d’une grande synthèse3, sa réflexion s’est développée dans une série d’articles consacrés à des figures majeures de la discipline, ainsi qu’à des moments théoriques significatifs pour l’évolution des paradigmes en cours dans l’exégèse des textes anciens. Parmi les fils conducteurs de ces recherches, on rappelera son insistance sur l’importance de la transmission, depuis les Alexandrins jusqu’à nos jours, dans le processus de transformation, voire de construction, des textes anciens, tels que nous les lisons aujourd’hui ; la mise en lumière des manipulations auxquelles ces textes ont été soumis au cours de l’histoire, dans la formation de l’idéologie classiciste de l’Altertumswissenschaft, mais aussi dans les lectures modernes et contemporaines, relayées par les pratiques de l’enseignement scolaire ; son insistance enfin sur l’importance de la contextualisation, anthropologique, sociale et politique, dans l’approche des œuvres de l’Antiquité, afin de mieux comprendre ces Autres qu’étaient les Grecs.
16Cette réflexion aboutit à une pratique philologique, entièrement soutenue par une véritable pensée de la « relation au différent », comme condition indispensable à toute tentative de compréhension des textes. Son attention constante pour les contenus culturels et idéologiques, ainsi que le choix tout à fait particulier de ses objets d’étude, en sont, nous semble-t-il, un témoignage.
Notes de bas de page
1 Pour une présentation de la figure d’Adelmo Barigazzi et de son magistère à Pavie, voir D. Lanza, « Adelmo Barigazzi maestro a Pavia », Prometheus 22, 1996, p. 11-16 (tout le numéro de la revue lui est consacré).
2 Voir respectivement « Dimenticare i Greci », dans S. Settis (éd.), I Greci, vol. 3, I Greci oltre la Grecia, Turin, 2001, et « Vernant et l’Italie », Europe 964-5, août-septembre 2009.
3 Mais voir maintenant le recueil Interrogare il passato. Lo studio dell’antico tra Otto e Novecento, Rome, 2013, qui rassemble les principaux travaux de DL sur l’histoire de la philologie classique.
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