Qu’est-ce qu’un système policier ? Le voyage de Raymond B. Fosdick à travers les polices d’Europe, 1913-19151
p. 63-82
Texte intégral
1Dans les années 1910, au moment où les institutions de police des principaux pays européens acquièrent un nouveau statut au sein des agences de sécurité de l’État, des experts en questions policières s’interrogent sur les formes que devrait prendre la « bonne police ». Dans ces travaux qui héritent d’une longue tradition de mémoires policiers à visée réformatrice, il est question des défauts structurels des services, des blocages institutionnels, de la composition désordonnée des responsabilités et des missions, de l’introduction des techniques de la police scientifique, d’une réforme en profondeur de l’action policière2. Les auteurs de ces ouvrages inaugurent des méthodes originales d’observation et de critique de l’activité policière, imaginent des dispositifs institutionnels intégrés et questionnent l’architecture générale des institutions. L’œuvre de Raymond B. Fosdick (1883-1972), publiée dans les années 1910 et 1920 aux États-Unis et consacrée à la police en Europe et en Amérique du Nord, représente une forme originale de cette littérature critique consacrée au fonctionnement des activités policières ; son intérêt pour la police européenne et son observation fine de la situation aux États-Unis suscitent ainsi l’une des premières entreprises de sociologie policière comparée des deux côtés de l’Atlantique3.
2Son ouvrage publié en 1915, intitulé « Systèmes policiers européens » (European Police Systems), se distingue tout particulièrement par l’originalité de ce projet visant à observer et comparer les différentes configurations européennes dans le but de favoriser la modernisation des forces de police aux États-Unis. Conçu dans le but d’importer des éléments performants repérés en Europe, cette recherche tente de déterminer la nature même des systèmes policiers européens, de définir les différences qui les séparent et les éléments communs qui les réunissent afin de dégager les parties d’un modèle jugé globalement efficace4. Précisément, ce point de vue semble résulter à la fois des recherches effectuées durant le voyage de Fosdick en Europe, entre 1913 et 1915, mais surtout des présupposés positifs à l’encontre des polices européennes qui sont à la source même de ce projet. Cette enquête, fondée sur un tour inédit de plusieurs grands services de police en Europe et sur la collecte de nombreux matériaux et sources relatives au fonctionnement des institutions, a pour ambition de dégager les éléments relatifs aux « systèmes » policiers européens qui, selon l’auteur, comportent une série d’éléments communs, et d’aboutir à une analyse approfondie de cette notion même de « système policier » : l’emploi de ce terme dans le titre même de l’ouvrage permet tout d’abord de désigner l’articulation des multiples activités de police réparties dans les organigrammes institutionnels et permet aussi de légitimer l’idée selon laquelle les systèmes policiers européens forment un ensemble paradoxalement à la fois hétérogène et homogène dont la nature composite constituerait l’originalité même du continent européen dans ce domaine.
3L’ouvrage se présente sous la forme d’une étude exhaustive des différentes activités conduites par les forces de police. En raison des conditions dans lesquelles elle fut menée, la recherche se concentre essentiellement sur les polices urbaines et en particulier sur les polices de capitales nationales et politiques ainsi que de quelques grandes métropoles. Les questions relatives au rapport des institutions de police à l’État, aux rapports de sujétion ou d’autonomie des services vis-à-vis des autorités politiques, au pouvoir hiérarchique à l’intérieur des institutions prennent donc une place centrale aux dépens d’autres dimensions complètement négligées. Ainsi l’action des polices rurales, leur activité dans les campagnes, le rôle des polices militarisées et de la gendarmerie en particulier, l’activité policière aux frontières sont pratiquement passées sous silence.
4Le plan en dix chapitres de l’ouvrage se consacre tout d’abord à une introduction sur le rôle et les fonctions fondamentales de la police (chapitre I) ; l’interaction entre la diversité des populations, notamment en terme ethnique, et les formes spécifiques de la criminalité d’un côté et les conceptions nationales de l’action policière d’un autre côté y sont particulièrement soulignées. Les chapitres suivants se consacrent à la place des institutions de police au sein de l’organisation de l’État, à l’uniformisation et au degré de centralisation des services (chapitre II), et à l’organisation même des services de police, en particulier à partir de l’exposé des organigrammes complets des services de Londres, Berlin, Vienne et Paris (chapitre III). Une deuxième partie s’intéresse d’avantage au travail des fonctionnaires de police à partir d’une étude de la catégorie des chefs de police et personnels haut gradés, aux principes qui président à leur nomination, à leur formation et leur carrière (chapitre IV et V), et, sur le même principe, des agents en uniforme (chapitre VI et VII). Ces derniers développements insistent sur les méthodes de recrutement, le port d’arme et, plus généralement, sur l’équipement des agents, ainsi que sur les formes d’organisation et de coordination des différents corps. Deux chapitres s’intéressent au rôle des « détectives », agents de la police judiciaire, aux résultats obtenus dans les enquêtes et au rôle des « méthodes de détection du crime » (Methods of Crime detection), en particulier celui des fichiers et des nouvelles méthodes anthropométriques de classification, ainsi qu’aux activités des laboratoires de police scientifique et à leur efficacité dans la résolution des affaires criminelles (chapitres VIII et IX)5. Dans un chapitre conclusif, l’auteur se penche explicitement sur la notion d « intégrité » au sein de la police européenne et s’interroge sur le degré de corruption des agents, sur le rôle de la formation dans les pratiques professionnelles et sur les standards qui différencient les pays européens au regard de cette question (chapitre X). Plus généralement, c’est le rapport de confiance entre les institutions de police et les populations qui est posé ainsi que les facteurs qui expliquent, selon Fosdick, l’importance de la moralité dans la gestion des services de police, étudiée à travers les cas avérés de corruption et les mesures adoptées pour endiguer ce phénomène6.
5L’ouvrage se caractérise par un effort remarquable de synthèse de la situation observée dans chaque pays et localité et par le travail de comparaison qui permet de confronter, sur différents plans, les réalités policières décrites bien souvent à l’aide d’exemples issus de la pratique quotidienne. L’intérêt porté au rôle social des forces de police et à leur fonction comme force régulatrice que ce soit dans le domaine du maintien de l’ordre, de la circulation des véhicules et des personnes ou de la répression de la criminalité, caractérise de nombreux développements de l’ouvrage.
6Par ailleurs, cet ouvrage peut être analysé comme un témoignage précieux des transformations apportées aux institutions de police en Europe depuis les années 1880. Le voyage de Fosdick et la rédaction de son livre s’inscrivent en effet au terme d’une période déterminante qui voit s’intensifier l’intervention de l’État dans l’organisation des polices7. Même si le pouvoir des polices municipales reste immense et les différences considérables d’une ville à l’autre, l’État impose de plus en plus une centralisation de l’institution par le renforcement du ministère de l’Intérieur ou la modernisation des polices du territoire. Par le biais de la presse notamment et de questions policières exposées à la curiosité du public, l’organisation de la police, la maîtrise et l’amélioration de son fonctionnement apparaissent comme des enjeux centraux du débat public et de la réforme de l’État.
7À une époque où la question de la souveraineté nationale et les antagonismes entre pays prennent des dimensions inédites, les réformes policières répondent souvent à la volonté d’imprimer des spécificités nationales sur les institutions, conçues comme les vitrines d’une conception particulière de l’ordre public. Fosdick traduit en quelque sorte ce processus en observant ce qui divise les polices en Europe et en insistant sur les processus par lesquels les responsables policiers entreprennent de différencier leurs institutions les unes des autres. À l’inverse, il souligne aussi ce qui les rapproche, les lignes de continuité qui lient certains pays à d’autres, voire les formes embryonnaires de coopération transnationale observées entre tel ou tel pays. Mais son étude va aussi plus loin et s’appuie sur des recherches pionnières portant à la fois sur la nature des systèmes juridiques, l’état de la criminalité, les différences entre régions, provinces et villes à l’intérieur d’un même pays voire l’écart qui sépare les comportements, les mœurs, l’état des relations sociales entre individus et l’influence de tous ces facteurs sur l’organisation de la police et la qualité de son fonctionnement.
8La place accordée à Fosdick dans l’histoire de la notion de policing aux États-Unis et son rôle précurseur dans la fondation d’une théorie de la pratique policière soulignent l’importance de son ouvrage consacré aux polices d’Europe. Comme l’a souligné David H. Bayley, Fosdick peut également être considéré comme un acteur central dans l’introduction des questions policières dans le domaine des sciences sociales8. La précision des données présentées et l’ampleur de son projet comparatif en font également un travail presque inégalé dans l’analyse du fait policier à l’époque contemporaine9. Son rôle pionnier marque en effet l’avènement d’une réflexion sur la nature des formes policières et le point de départ d’une observation du fait policier en tant que construction complexe à la fois institutionnelle, sociale, culturelle, économique et politique. L’œuvre de Fosdick interroge enfin le régime historique spécifique qui contribue à l’émergence des différents rôles attribués à la police à la fin du XIXe siècle et au développement, numérique, financier, symbolique, de la fonction policière dans l’organisation de l’État. Ainsi cet ouvrage peut être considéré comme une étape déterminante dans la genèse d’une définition à la fois sociologique et historique du concept de police, dans l’usage de critères originaux d’observation appliqués au domaine policier et dans le débat centré sur les notions de contrainte et de coercition et du recours possible à la force physique10.
9En s’interrogeant sur la genèse de ce projet d’étude policière, il s’agira tout d’abord de voir dans quelles conditions un jeune juriste devient un expert en sciences policières et à quel futur prépare cette forme particulière d’expertise à une époque où les questions policières étaient loin d’être totalement admises parmi l’ensemble des savoirs juridiques. Son ouvrage, considéré ici comme un point d’observation inédit dans l’évolution d’une analyse sociale du fait policier, sera considéré comme un témoignage permettant d’accéder à une analyse marquée dans le temps de la notion de « système policier ». La recherche des termes employés pour définir cette notion et les conclusions de l’ouvrage permettront de dégager l’apport et les limites d’une analyse pionnière en matière d’histoire des polices en Europe.
Vers la police : une destination inattendue
10L’autobiographie de Fosdick, rédigée dans les années 1950, apporte des éléments essentiels sur les origines de ce voyage singulier en terres policières11. Son parcours professionnel au service des administrations publiques américaines le conduit initialement du statut de fonctionnaire de la ville de New York à celui de conseiller spécial du Bureau d’hygiène sociale de la Fondation Rockfeller, jusqu’à celui de directeur de la commission chargée de surveiller le moral des troupes et la « vitalité des hommes » dans les camps d’entraînement de l’armée américaine durant la Première Guerre mondiale12. À partir de 1919, il mène une double carrière au service de la diplomatie américaine auprès de la Société des nations et comme juriste avant de devenir président de la Fondation Rockfeller de 1936 à 194813. Dans un parcours guidé par l’ambition de contribuer aux affaires internationales et au service de la puissance publique américaine, le travail mené sur les polices d’Europe intrigue naturellement et incite à s’interroger sur les origines de cette recherche.
11Né en 1883, issu d’une famille modeste habitant Buffalo, ville moyenne de l’État de New York, fils d’un enseignant et directeur d’établissement scolaire, Fosdick évoque son milieu social d’origine et sa ville comme protégés de l’insécurité, de la violence et des soubresauts de l’histoire14. Étudiant tout d’abord à l’Université de Colgate, dans l’État de New York, il est attiré par les enseignements en droit délivrés à Princeton par Woodrow Wilson dont il suit les cours et devient par la suite un proche collaborateur. Le jeune Fosdick est précocément, et profondément, influencé par la conception wilsonienne à la fois libérale et moralisée de la politique, dans laquelle les relations entre la conscience individuelle et l’action sociale sont élaborées selon les principes du droit15. Attiré par les questions sociales et influencé par sa rencontre avec le maire de New York, il renonce à un parcours académique et entame une carrière dans l’administration publique.
12Tout en obtenant le titre de juriste auprès de la New York Law School, Fosdick devient en 1908 fonctionnaire chargé des comptes – Examiner of Accounts – de la ville de New York puis Officier juridique de la ville portant le titre de City Official member of the Board of Estimate. À ce titre, il participe à l’assainissement des finances et à la surveillance des dépenses, constate la corruption des fonctionnaires et peut observer, en particulier, les dysfonctionnements des services de police, dont la responsabilité particulière dans les affaires publiques et le haut degré de corruption sont soulignés a posteriori dans ses mémoires :
I was always of the opinion that the police were more gullible than any other body of public servants. They seemed to be obsessed with the idea that any measures beneficial to them as a group could not be obtained without the payement of money16.
13Son jugement sévère qui dénonce la vénalité structurelle des agents de police se fonde sur l’un des derniers rapports qui lui fut confié à son poste comme conseiller de la ville de New York et qui portait précisément sur le rôle de l’argent dans la modification des statuts et grades des agents.
14Par la suite, son intérêt semble se porter sur la nature même de l’organisation administrative municipale et sur les moyens d’en améliorer le fonctionnement17. En tant qu’observateur privilégié, il est confronté directement à l’impéritie des services municipaux et aux mécanismes défaillants de l’action municipale. Cette expérience concrète semble avoir joué un rôle majeur dans sa formation d’expert en politique publique et le prédisposa à l’étude de structures complexes comme celles de la police. En 1912, il est engagé par Wilson comme secrétaire des finances du parti démocrate durant la campagne présidentielle ; le succès de son mentor aux élections lui ouvre par la suite de nombreuses portes. Il est appelé l’année suivante par John D. Rockfeller auprès du Bureau d’hygiène sociale (Bureau of Social Hygiene), structure de recherches et fondation philanthropique nouvellement créée par le millionnaire. C’est au sein de cette institution que Fosdick accepte la mission consistant à étudier l’organisation de la police en Europe. Peu de temps auparavant, ce même bureau venait de recevoir un rapport sur la prostitution en Europe, réalisé par Abraham Flexner. Celui-ci avait démontré à la fois les liens étroits entre le contrôle de la prostitution et le fonctionnement des services de police ainsi que la nécessité d’importer aux États-Unis les méthodes employées en Europe dans la surveillance des prostituées et la répression du proxénétisme18. L’expérience antérieure de Fosdick, sa connaissance des structures municipales, son intérêt pour la question policière et son expérience directe des dérives de la police municipale new-yorkaise le prédisposaient naturellement à cette recherche. Dans ses mémoires, il affirme cependant que le choix de cette orientation et ses conséquences sur sa carrière, relevèrent pour une grande part, du hasard :
If I had known that it would take two years instead of one to finish the task, and that I would then go on for another two years to a similar study of police organization in America; if I had realized that this specialized interest would lead in turn to a governement assignment on the Mexican border, and later, by a natural step to similar duty in Washington in the First World War; if I had foreseen that the path from Washington would take me into an entirely new concept of governmental activity – the League of Nations – I doubt if I would have the courage or the desire to wander so far from my original pattern19.
15Fosdick définit donc rétrospectivement ce travail sur la police comme un événement déclencheur dans sa carrière de fonctionnaire en charge des questions de sécurité et d’immigration puis dans sa carrière de diplomate auprès de la Société des nations. Ce parcours qui conduit Fosdick vers l’analyse de la police en Europe met tout d’abord en lumière l’importance des organisations philanthropiques américaines dans l’élaboration d’un champ d’expertise des affaires publiques et le rôle fondamental d’une classe de juristes, hauts fonctionnaires des administrations municipales ou fédérales, qui ont contribué à établir une vision transnationale des affaires publiques, sous l’influence directe de Woodrow Wilson et de John D. Rockfeller20.
16L’enquête sur la police menée par Fosdick est aussi motivée par l’ambition de contribuer à la lutte contre la criminalité qui est clairement affirmée avant même son départ vers l’Europe. Dans un article publié en février 1913, le New York Times présente ainsi le Bureau d’hygiène sociale comme une institution créée pour réaliser des enquêtes exhaustives aux États-Unis et à l’étranger sur les causes et les remèdes possibles contre l’insécurité et la violence qualifiées de « démon de la société » (the social evil)21. Pour expliciter son engagement dans ce combat, Rockfeller présente la mission confiée à Fosdick et déclare son intention de contribuer à la lutte contre la criminalité et d’améliorer la qualité et l’efficacité des forces de police de New York. Dès l’origine, l’objectif assigné est donc de porter un regard lucide sur les polices européennes, d’étudier les défauts autant que le « secret de leur excellence » et de tirer les « leçons héritées de leur expérience » afin de définir les cadres d’une police idéale22.
Un voyage policier : itinéraire et méthode
17Le voyage de Fosdick en Europe débute en janvier 1913 et dure dix mois durant lesquels il séjourne dans vingt et une villes situées dans huit pays23. Près des deux tiers de ces villes appartiennent cependant à la Grande-Bretagne et à l’Allemagne. Globalement, toutes les métropoles européennes du Centre et du Nord de l’Europe sont visitées et seule Rome figure sur un itinéraire qui évite à la fois le Sud et l’Est du continent, les autorités de Moscou et Saint-Pétersbourg ayant apparemment refusé de l’accueillir.
18Les séjours de Fosdick dans ces métropoles suivent un modèle identique : reçu par les chefs des services centraux, il est admis à accompagner certaines équipes de policiers sur le terrain, et bénéficie d’un exposé général consacré à l’organisation administrative des structures de police. À chaque étape, il reçoit de nombreuses pièces documentaires, ouvrages, brochures, manuels de formation des agents et notes internes, qui lui permettent d’établir des descriptions précises des cadres matériels des services et des organigrammes complets pour quatre villes visitées (Berlin, Londres, Paris et Vienne).
19Si la documentation de Fosdick est donc déterminée par ses contacts personnels avec les responsables des services, comme en témoigne la bibliographie très sélective placée en fin d’ouvrage, il recourt également à des rapports municipaux sur les activités de police de certaines villes (Londres, Paris, Berlin, Hambourg) et aux statistiques criminelles éditées annuellement24. Ces collections de données représentent un vaste ensemble de matériaux qui lui permettent de fournir des tableaux comparés sur des sujets aussi divers que le salaire des commissaires, les conditions physiques requises pour devenir agent de police ou le rapport entre le nombre d’agents et les chiffres de la population25.
20Une présence longue sur le terrain, une série de visites approfondies et la conduite de multiples entretiens, le traitement sériel de nombreuses données statistiques et la synthèse d’une importante bibliographie forment le socle d’une étude présentée comme une entreprise originale d’observation participante des institutions policières. Peu avant son retour aux États-Unis, Fosdick confie d’ailleurs à un journaliste le contenu essentiel de son étude et les éléments qui la distinguent d’autres entreprises similaires. Une recherche concurrente conduite à la même période par un commissaire de New York, Rhineander Waldo, est particulièrement visée par les propos de Fosdick :
He said that, although Commissioner Waldo found it necessary to spend only a week each in London, Paris and Berlin, he took six weeks to cover the system at Scotland Yard, and equal period in Berlin, and four weeks in Paris.
He said he had gone into every detail of police organization, methods of control, training of recruits and education of officers, and that he had practically lived with the police and had sat in police stations for hours at a time in order to make a comprehensive report on his return26.
21Ce témoignage est précieux car il indique les méthodes d’enquête adoptées par Fosdick fondées sur une plongée au cœur de l’institution et basées sur l’observation des pratiques et des gestes des agents au quotidien, des liens entretenus avec les administrés et de la place de l’action policière au sein de la vie économique, sociale et culturelle d’une ville ou d’un pays.
22Un dossier de correspondance entre la direction de la Sûreté publique (Pubblicca Sicurezza) du ministère de l’Intérieur italien et le Département de police (Police Department) de la Ville de New York éclaire un autre aspect du voyage de Fosdick. Cet échange de courriers, entre juillet et août 1914, suit de peu la visite de Fosdick à Rome et traduit certaines conséquences directes de son itinéraire européen. Dans un premier courrier, le service américain adresse une demande pour recevoir régulièrement une copie du « Bulletin des recherches » (Bollettino delle ricerche) émis régulièrement depuis 1913 par la direction de la Sûreté publique en Italie. Ce journal réunissait l’ensemble des avis de recherches et des demandes d’identification des criminels en fuite, échappés ou recherchés par la justice ou la police italienne27. Le retour de Fosdick à New York et les premiers éléments de son rapport suscitent donc l’idée de pouvoir suivre, repérer et arrêter les criminels italiens émigrés aux États-Unis :
Monsieur Fosdick est revenu avec la nouvelle encourageante qu’une telle communication directe était parfaitement possible et que la Direction générale de la Sûreté publique du Ministère de l’Intérieur accueillerait avec plaisir la coopération que nous désirons tant28.
23La direction de la police de New York demande aussi à obtenir une copie des volumes des années précédentes dans le but de renforcer la collaboration entre les deux pays, comme le déclare dans son courrier le Police Commissioner Arthur Woods :
Notre désir à New York est de coopérer le plus possible avec les autorités de la police italienne […]. Je suis sûr que vous conviendrez que la coopération mutuelle [en matière de lutte contre la criminalité] profitera à nos deux institutions […]29
24Les autorités de New York proposent alors de communiquer directement à Rome des fiches d’identité portant photographies et reproduction des empreintes digitales, en vue d’obtenir les antécédents criminels des individus appréhendés. Dans ses réponses conservées dans les archives, la direction de la police italienne permet de nuancer cependant la réalité d’une telle coopération. En effet l’envoi du bulletin de recherches paraît superflu aux autorités de Rome qui ne jugent pas nécessaire d’étendre les recherches au-delà des pays frontaliers même si la communication de fiches d’identité au cas par cas n’est pas écartée30. Quoi qu’il en soit, le rôle de Fosdick dans l’élaboration d’un projet de coopération fondé sur l’échange de données apparaît clairement. Sa visite semble donc avoir provoqué directement la discussion de pratiques inédites de coopération policière entre les États-Unis et certains pays d’Europe. Cette conséquence, certainement imprévue, peut aussi être analysée comme le produit d’une recherche singulière qui se démarquait très nettement des enquêtes antérieures.
25Si l’on confronte l’étude de Fosdick aux travaux similaires publiés en Europe à la même époque, son approche se distingue tout particulièrement. Jusque-là, seuls des sujets extrêmement précis, comme la répression de la prostitution ou les méthodes de la police scientifique ou de l’identification des récidivistes avaient mobilisé l’intérêt de quelques recherches très peu nombreuses31. De fait, les entreprises produites en Europe et similaires à celle de Fosdick se distinguent par leur modeste volume et une envergure très relative des conclusions au regard du sujet traité32. L’ambition fixée par Fosdick d’analyser le système européen des polices dans leur globalité rejoint celle de l’ouvrage publié en 1908 par un juge allemand, Karl Weidlich33. Celui-ci avait cependant limité son terrain d’étude à une analyse de la police britannique (Angleterre, Écosse et Irlande) et à une comparaison de fait avec l’activité policière en Allemagne. Par ses méthodes et surtout par l’échelle de la comparaison et de l’observation, l’étude de Fosdick se distingue tout particulièrement des travaux réalisés à la même période et aboutit à une analyse particulièrement originale du « modèle policier » autant sur le plan de la pratique des agents sur le terrain que sur le plan des théories relatives à l’objet et à la fonction de la police à l’époque contemporaine.
L’analyse des systèmes policiers européens.
26La thèse fondamentale défendue par Fosdick, et synthétisée dans un article paru peu après la publication de son ouvrage, réside dans l’opposition entre la police anglaise et la police continentale, opposition soulignée à maintes reprises et tempérée toutefois par de nombreux passages qui viennent souligner les différences qui séparent le fonctionnement et l’organisation des polices continentales, entre la France, l’Allemagne ou l’Italie. Cette opposition distingue essentiellement un modèle britannique dans lequel l’action de la police résulterait des demandes sociétales, mettant en œuvre une « autorégulation » des activités de police (self-policing), une application consensuelle des mesures de police (policing by consent), une intériorisation par la communauté elle-même de la nécessité de recourir à la force, résumée en ces termes :
In Great Britain the police are the servants of the community. Their official existence would be impossible if their acts persistently ran counter to the expressed wishes of the people34.
27Dans ce cadre, la protection de la liberté individuelle prime sur le pouvoir de l’agent de police soumis à un ensemble de restrictions qui limitent l’étendue de son autorité et l’exercice de la force.
28En revanche, le modèle continental est élaboré suivant des considérations politiques liées à la construction de l’État, à la lutte menée par les autorités aux forces politiques dissidentes, donnant ainsi à la fonction policière un aspect beaucoup plus violent. Suivant cette opposition tranchée, Fosdick poursuit une ancienne tradition remontant au début du XIXe siècle qui opposait le modèle anglais de « police du peuple » aux pratiques françaises jugées autoritaires observées sous la monarchie absolue et l’Empire. Pour Fosdick, qui achève ses recherches au tout début de la Première Guerre mondiale et semble clairement influencé par les sentiments anti-allemands très répandus alors, notamment en France et en Angleterre, le modèle anglais s’oppose davantage à celui qu’incarne à l’extrême la police allemande. Le « système allemand » est ainsi décrit sous les contours les plus négatifs, l’auteur multipliant les exemples d’interventions arbitraires, abusives et excessives des officiers de police contre les simples citoyens par ailleurs habitués à l’imposition d’une contrainte permanente :
The country is placarded from end to end with “Verboten” signs; the things forbidden cover almost every phase of human activity. In all public conveyances and in stations, on the streets and in the parks, the citizen is informed by sign and official warning not only as to actions prohibited but as to actions mandatory35.
29Au-delà de l’anecdote, Fosdick considère les citoyens des pays d’Europe continentale comme soumis à l’autorité suprême du pouvoir politique voire dominés à l’excès par la force publique :
The Continental policeman is the servant of the Crown or the higher authorities; the people have not share in his duties, nor, indeed, any connection with them. He possesses powers greatly exceeding those of the citizen36.
30Cette condition accorde aux agents de police un pouvoir excessif qui se transforme souvent en un exercice abusif ou arbitraire de la force. L’absence d’interrogatoire lors d’une arrestation en Angleterre est choisie comme exemple pour souligner l’usage courant de la pression physique, voire de la torture, en Allemagne, en Italie ou en France où la durée excessive des détentions provisoires manifeste un usage immodéré de la contrainte.
31Cette opposition structurelle qui s’explique, suivant Fosdick, par l’histoire politique heurtée du continent européen et par la pérennisation des pratiques d’Ancien Régime ne se limite pas cependant au degré variable de coercition exercée sur les individus confrontés aux agents de police. Le nombre limité des tâches confiées à la police anglaise (le maintien de l’ordre, la recherche des criminels et la régulation de la circulation) s’oppose nettement aux multiples fonctions des polices en Allemagne ou en France, où la complexité des structures et l’addition des taches incombant aux services centraux imposent un éparpillement jugé excessif des fonctions de police. Cependant cette opposition est nuancée par Fosdick qui estime que la complexité de la machinerie administrative ne peut être retenue comme un facteur déterminant pour juger de l’efficacité de la police :
Obviously, therefore, other factors than the type of organization must bear vitally upon the police problem. […] A peaceful, law-abiding population presents to the police a comparatively simple problem which even faulty administrative machinery may not seriously complicate. Or again, grave defects in the type of organization may be balanced by the superior personnel of the force. Indeed, intelligent commissioners and well-trained subordinates, obtaining and holding office on proper conditions, and carefully selected patrolmen, appear to be of even greater consequence than any particular variety or type of administrative machinery37.
32De fait, Fosdick prête une grande attention au profil des chefs des services centraux et il demeure particulièrement frappé par le haut degré de professionnalisme de ces personnalités qui les distingue de leurs collègues américains pour qui cette fonction reste, suivant ses termes, un simple « job ». Fosdick souligne ainsi l’importance accordée au recrutement de ces hauts dirigeants et aux critères retenus (force et détermination, intelligence, intégrité, dévouement), la formation militaire partagée par un grand nombre d’entre eux étant reconnue comme un facteur positif dans la prise de décision et la direction des services de police. Globalement, il reste ainsi frappé par le haut degré de professionnalisme des cadres mais aussi des agents de police dont il a observé attentivement les lieux de formation et les méthodes d’apprentissage, largement plus développées qu’aux États-Unis à la même période, en particulier en ce qui concerne la durée des formations et l’alternance entre périodes d’exercice et apprentissage théorique. Dans ce domaine, un certain retard est d’ailleurs observé en Angleterre où la majorité des agents recrutés sont choisis parmi les classes populaires (« Miners, chauffeurs, plumbers and clerks are taken, but farmers are preferred »38) tandis qu’en Italie, en Allemagne ou en France, le passé militaire des agents joue un rôle important dans leur recrutement et le déroulement de leur carrière. Outre ces capacités spécifiques déterminant l’accès aux fonctions de policiers, Fosdick souligne l’importance des liens directs qui lient les citoyens aux institutions.
33La question de la confiance s’impose comme un élément déterminant de son analyse. Il s’agit tout d’abord d’envisager la relation au public, cʹest-à-dire la perception des activités policières par le public, d’une part, et la relation physique et la nature de liens de confiance établis entre policiers et citoyens, d’autre part. L’autorité importante représentée par la direction des services de police des grandes villes impressionne Fosdick et traduit selon lui un haut degré d’autonomie qui est la clef d’une action à la fois forte et rapide. Par ailleurs, le terme de confiance est employé au premier sens du terme. L’importance donnée à l’intégrité des chefs de police paraît ainsi être un élément commun fondamental des polices en Europe :
«Choose the head of your force with scrupulous care; clothe him with full power; make him responsible.» This maxim was repeated by officials all over Europe39.
34Cependant, le mode de recrutement des agents, et le socle militaire de formation de nombre d’entre eux en Allemagne ou en France, détermine aussi, selon Fosdick, un usage immodéré de la force, symbolisé par le port d’armes employées, suivant le témoignage même de Fosdick, abusivement :
Nor are these weapons merely ornamental. The writer has himself seen more than one poor wretch bleeding from saber cuts brought into a Berlin police station for a misdemeanor40.
35À cet usage excessif de la force, l’auteur oppose des éléments singuliers observés en Grande-Bretagne : la courtoisie, la patience, le calme, l’attitude imperturbable des agents sont décrits comme des éléments structurants de la police britannique. L’« esprit de la force » (Spirit of the force) prévaut dans ce cas et la seule présence physique de l’agent garantit le respect dû à sa personne et à sa fonction. Suivant le raisonnement de Fosdick, ce pouvoir particulier repose en grande partie sur la séparation structurelle entre les pouvoirs politiques locaux et la direction des institutions de police. Cette distance garantit en effet l’absence d’interférence dans le contrôle de cette activité sensible confiée au pouvoir stable et durable de l’État. Dans ce cas…
No machinery exists by which the police can be popularly controlled or the preference of the people in respect to them effectively expressed41.
36Ce transfert est interprété comme une substitution délibérée du pouvoir autocratique au profit d’un pouvoir plus ou moins démocratique afin d’éliminer le caractère partisan d’un contrôle placé aux mains d’intérêts locaux ou des partis politiques. Ces réformes en vue de rapprocher l’intérêt de la police et celui des citoyens constituent pour l’auteur l’un des éléments importants permettant d’évaluer positivement la nature des systèmes policiers européens, fondés sur une même intelligence d’esprit :
it must be clear that the European police department is on the whole, an excellent piece of machinery. To its construction a high order of creative intelligence has been devoted; in its operation an equally high order of intelligence is constantly employed. In the laste resort, the police problems of a modern city make a large demand upon intelligence, and Europe has succeeded in formulating and solving its police problem because, discarding all inferior persons and agencies, it has utilized in this work a superior type of intelligence42.
37Malgré les nombreuses approximations qui émaillent l’étude de Fosdick, et que l’historiographie récente peut permettre de corriger, cette étude constitue une remarquable tentative pour cerner la complexité et l’intérêt de la question policière dans une histoire de l’État43. La recherche de Fosdick peut ainsi être considérée comme une étape fondamentale dans la genèse d’une définition sociologique du concept de police qui intègre les notions de contrainte, et du recours possible à la force physique, en considérant l’action des agents de police comme l’expression d’une forme spécifique de l’autorité. En effet, Fosdick considère l’usage de la force comme un critère central d’observation mais son jugement et sa définition de différents modèles policiers s’inspirent d’autres éléments : il prend ainsi en compte la nature complexe des relations entre public et forces de l’ordre et utilise très fréquemment la notion de confiance qui n’est pas sans rappeler la description wéberienne des relations entre administrés et administrateurs dans un régime bureaucratique44. Le respect imposé par la confiance ou le respect imposé par la crainte lui semblent ainsi un élément décisif dans l’évaluation de l’efficacité des polices et de leur fonction sociale. La confiance qui lie entre eux les agents de police et les citoyens devient alors un facteur central qui détermine d’un côté la possibilité d’un usage arbitraire de la force en raison du climat de défiance qui traverse cette relation, ou, au contraire, le respect d’une autorité jugée légitime.
Notes de bas de page
1 Je remercie Peter Becker pour m’avoir signalé pour la première fois l’œuvre de Raymond Fosdick.
2 Voir par exemple Rodolphe A. Reiss, Contribution à la réorganisation de la police, Paris, Payot, 1914 ; Henri Chardon, Études sur l’organisation de la République nouvelle. L’organisation de la police, Paris, Brossard, 1917 ; Edmond Locard, La police ce qu’elle est, ce qu’elle devrait être, Paris, 1re éd., B. Grasset, 1918, 2e éd., Payot, 1919. Sur l’histoire de ce genre littéraire, voir Vincent Milliot (éd.), Les mémoires policiers, 1750-1850. Écritures et pratiques policières du siècle des Lumières au Second Empire, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2006.
3 L’œuvre de Fosdick consacrée à la question policière est constituée d’une série d’articles publiés dans le Journal of the American Institute of Criminal Law and Criminology et de quatre ouvrages publiés entre 1915 et 1921 : Raymond B. Fosdick, European Police Systems, New York, The Century Co, 1915 (réed. Montclair, Patterson Smith, 1969) [désormais EPS], 442 p. ; Raymond B. Fosdick, American Police Systems, New York, The Century co, 1920, 408 p. ; Raymond B. Fosdick, Crime in America and the Police, New York, The Century co, 1920, 57 p. ; Raymond B. Fosdick, Police Administration, Part III of the Cleveland Foundation Survey of Criminal Justice, Cleveland, The Cleveland Foundation, 1921, 80 p.
4 Voir la conclusion de l’ouvrage, EPS, p. 369-385.
5 Fosdick développe par ailleurs une réflexion spécifique sur cette question, voir Raymond B. Fosdick, « The Modus Operandi System in the Detection of the Criminals », Journal of the American Institute of Criminal Law and Criminology, 6, 4, 1915, p. 560-570 ; Raymond B. Fosdick, « The Passing of the Bertillon System of Identification », Journal of the American Institute of Criminal Law and Criminology, 6, 3, 1915, p. 363-369.
6 Voir le sommaire de l’ouvrage, EPS, p. V-IX. L’ouvrage s’achève par un dossier de documents annexes portant essentiellement sur les budgets et les dépenses des services de police étudiés, en particulier Londres, Paris, Berlin et Vienne, et sur le nombre d’agents de police en rapport avec la population pour une trentaine de grandes agglomérations d’Europe, EPS, p. 389-405.
7 Pour une perspective générale sur cette période voir Clive Emsley, Barbara Weinberger (éds.), Policing Western Europe : Politics, Professionalism, and Public Order, 1850-1940, Wesport, Greenwood Press, 1991. ; Mark Mazower (éd.), The Policing of Politics in the Twentieth Century. Historical Perspectives, Oxford, Berghahn Books, 1997 ; Clive Emsley, Crime, Police, and Penal Policy. European Experiences, 1750-1940, Oxford, Oxford University Press, 2007.
8 Voir David H. Bayley, « The Police and Political Change in Comparative Perspective », Law & Society Review, 6, 1, 1971, p. 91-112 ; David H. Bayley, « The Police and Political Development in Europe », dans Charles Tilly (éd.), The Formation of the National States in Western Europe, Princeton, Princeton University Press, 1975, p. 328-379 ; David H. Bayley, Patterns of Policing. A Comparative International Analysis, New Brunswick, Rutgers University Press, 1985.
9 À propos des travaux de Fosdick sur la police, David H. Bayley note : « They are comparative in the international sense, apt at tracing evolutionary changes, precise and careful conceptually, persistent in providing explanations, and pointed in making recommendations. They set a standart that has yet to be approached. ». Voir David H. Bayley, « Police Function, Structure, and Control in Western Europe and North America : Comparative and Historical Studies », Crime and Justice, 1, 1979, p. 109-143, cit. p. 138. Voir également les usages des travaux de Fosdick dans James F. Richardson, « Berlin Police in the Weimar Republic : A Comparison with Police Forces in Cities of the United States », Journal of Contemporary History, 7, 1-2, 1972, p. 261-275.
10 Voir par exemple Jean-Louis Loubet Del Bayle, Police et politique. Une approche sociologique, Paris, L’Harmattan, 2006, p. 31-33.
11 Raymond B. Fosdick, Chronicle of a Generation. An Autobiography, New York, Harper & Brothers Publishers, 1958.
12 À ce sujet voir Weldon B. Durham, « “Big Brother” and the “Seven Sisters” : Camp Life Reforms in World War I », Military Affairs, 42, 2, 1978, p. 57-60.
13 Raymond B. Fosdick, The Story of the Rockfeller Foundation, New York, Harper & Brothers, 1952. Son rôle très important au sein de la fondation Rockfeller place Fosdick en bonne place dans les théories conspirationnistes qui voient dans le « Rockfeller Internationalism » la première marche d’un « Nouvel Ordre mondial » auquel se seraient consacrées les élites américaines dès la Première Guerre mondiale ; dans ce sens voir par exemple Will Banyan, The Invisible Man of the New World Order : Raymond B. Fosdick (1883-1972)… Or Why the Rockefellers Aren’t Reptilians, 2008, (http://www.martinfrost.ws/htmlfiles/third_section/Fosdick_2008.pdf). Plus sérieusement, sur le rôle de la fondation Rockfeller dans le développement des institutions sociales en Europe et le développement des sciences sociales, voir Lion Murard, Patrick Zilbermann, « La mission Rockfeller en France et la création du Comité national de défense contre la tuberculose (1917-1923) », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 34, 1987, p. 257-281 ; Pierre-Yves Saunier, « Paris in the Springtime : un voyage de sciences sociales en 1929 », Revue d’histoire des sciences humaines, 11, 2004, p. 127-156.
14 R. B. Fosdick, Chronicle…, op. cit., p. 31 : « The great storms of insecurity and violence which burst upon the twentieth century were already in the making, but we were not aware of them ; they were being built up in a Sargasso Sea far beyond our horizons, and there were no hurricane warnings to alert us. Our lives were untouched by any influences from abroad ; indeed, as far as we knew or cared, they were untouched by influences outside of Buffalo ».
15 Voir entre autres Ronald J. Pestritto, Woodrow Wilson and the Roots of Modern Liberalism, Oxford, Rowman & Littlefield, 2005.
16 R. B. Fosdick, Chronicle…, op. cit., p. 105.
17 R. B. Fosdick, Chronicle…, op. cit., p. 111 : « The real leak in the public treasury is not the result of peculation but of defective standards of work, poor methods, inadequate supervision and inefficient organization ».
18 Abraham Flexner, Prostitution in Europe, New York, The Century Co, 1914. Cet ouvrage fut traduit quelques années plus tard en français : Abraham Flexner, La prostitution en Europe, trad. H. Minod, Lausanne, Payot, 1919.
19 R. B. Fosdick, Chronicle…, op. cit., p. 125.
20 Sur le rôle particulier de Fosdick dans ce domaine et dans le contexte de la Première Guerre mondiale, voir Allen F. Davis, « Welfare, Reform and World War I », American Quarterly, 19, 3, 1967, p. 516-533 ; sur le rôle de la fondation Rockfeller voir Ludovic Tournès, « La fondation Rockfeller et la naissance de l’universalisme philanthropique américain », Critique internationale, 35, 2007, p. 173-197.
21 « Fosdick to Report on European Police », The New York Times, 27 février 1913.
22 Ibid.
23 La liste des pays visités est présentée dans cet ordre : Angleterre (Londres, Liverpool, Manchester, Birmingham), Écosse (Glasgow et Edinburgh), France (Paris et Lyon), Allemagne (Berlin, Hambourg, Brême, Dresde, Munich, Stuttgart, Cologne), Autriche-Hongrie (Vienne et Budapest), Italie (Rome), Belgique (Bruxelles) et Hollande (Amsterdam et Rotterdam). Cf. EPS, p. XI.
24 EPS, « Bibliography », p. 407-420.
25 EPS, p. 178-179, 210 et 401-402.
26 « Studied European Police. Fosdick Has Many Suggestions for Improvements in New York », The New York Times, 24 juillet 1913. À propos de la recherche menée par Waldo : Edward Marshall, « Prouf of our Police, says Waldo, fresh from Abroad. Compares Them with Forces of Foreign Cities - Courts, Co-operation London’s Best Influence - Paris, Too, Suffers from Scandals - Berlin’s Guardians Busy Largely with Reports », The New York Times, 31 août 1913.
27 Voir à ce sujet Ilsen About, « Naissance d’une science policière de l’identification en Italie (1902-1922) », Les Cahiers de la sécurité, 56, 2005, p. 167-200.
28 ACS, PS, divisione polizia, polizia giudiziaria, 1913-1915, b. 109, fascicolo 8, « Accordi fra polizia italiana e quella di New York », Courrier daté du 14 juillet 1914. [traduction de l’auteur].
29 ACS, PS, divisione polizia, polizia giudiziaria, 1913-1915, b. 109, fascicolo 8, « Accordi fra polizia italiana e quella di New York », Courrier non daté. [traduction de l’auteur].
30 ACS, PS, divisione polizia, polizia giudiziaria, 1913-1915, b. 109, fascicolo 8, « Accordi fra polizia italiana e quella di New York », Courriers du 27 juillet, 4 et 7 août 1914.
31 Voir par exemple Louis Flaux, La police des mœurs en France et dans les principaux pays de l’Europe, Paris, E. Dentu, 1888 ; Alfredo Niceforo, La police et l’enquête judiciaire scientifiques, Paris, Librairie universelle, 1907 ; Edmond Locard, L’identification des récidivistes, Paris, Maloine, 1909.
32 Voir par exemple Émile Massard, « La police en Europe (Belgique, Hollande, Allemagne, Autriche) », Revue municipale, 12, 443, 1er au 15 janvier 1909, p. 6-10.
33 Karl Weidlich, Die Polizei als Grundlage und Organ der Strafrechspflege in England, Schottland, und Irland, Berlin, J. Guttentag, 1908.
34 Raymond B. Fosdick, « European Police Systems », Journal of the American Institute of Criminal Law and Criminology, 6, 1, 1915, p. 28-38, cit. p. 28.
35 EPS, p. 9.
36 R. B. Fosdick, « European Police Systems », art. cit., p. 29.
37 EPS, p. 148.
38 R. B. Fosdick, « European Police Systems », art. cit., p. 33.
39 R. B. Fosdick, « European Police Systems », art. cit., p. 32.
40 idem, p. 34.
41 idem, p. 36.
42 EPS, p. 384.
43 Clive Emsley, « A Typology of Nineteenth-Century Police », Crime, Histoire & Sociétés/Crime, History & Societies, 3, 1, 1999, p. 29-44 ; Jean-Marc Berlière, Catherine Denys, Dominique Kalifa, Vincent Milliot (éds.), Métiers de police. Être policier en Europe, XVIIIe-XXe siècle, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2008.
44 Voir Max Weber, Économie et société 1. Les catégories de la sociologie, (1921, ouvrage posthume), trad. Jacques Chavy, Éric de Dampierre, Paris, Pocket, 1995, en particulier la deuxième partie du chapitre 3, « La domination légale à direction administrative bureaucratique », p. 291-300.
Auteur
Maison Méditerranéenne des Sciences de l’Homme, Aix-Marseille
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