La description dans les pratiques de recherche en médecine
p. 181-190
Texte intégral
1Il y a en médecine une très ancienne tradition de description : description des symptômes annoncés par le patient, des signes découverts à l'examen clinique, description de l’aspect des malades et de l'évolution des maladies. Moins la médecine dispose de moyens d'investigation complémentaire et de thérapeutiques, plus les descriptions cliniques sont littéraires et interprétatives. La médecine hippocratique qui est en partie encore enseignée aujourd'hui a atteint un niveau inégalable en matière de description sémiologique mais, comme le souligne B. Hoerni dans Histoire de l’examen clinique d’Hippocrate à nos jours, son interprétation demeure bien rudimentaire. Grâce à Claude Bernard, à la fin du XIXe siècle, la recherche médicale s’oriente vers une voie plus scientifique cherchant non plus à décrire mais à mieux comprendre les mécanismes des maladies déjà longuement décrites. L’observation médicale passive est remplacée par l’observation active des faits provoqués par l’expérimentation. C’est le triomphe de la médecine expérimentale puis de la technologie médicale. La description de malades et de maladies est remplacée par celle des techniques et des protocoles de recherche. Il persiste néanmoins une tradition de description clinique comme en témoignent ces lignes d'Henri Mondor, célèbre chirurgien du début du XXe siècle, tirées d'un chapitre de son livre Diagnostics urgents consacré à l'évolution des péritonites aiguës :
« Un jour de retard, en effet, dans l'interprétation des premiers signes ou dans l'appel du médecin et le tableau aura toutes les plus noires couleurs du tableau des descriptions d'autrefois : malade asthénique, immobilisé, inquiet des moindres ébranlements communiqués à son lit, inquiet du retour incessant du hoquet, inquiet des vomissements porracés, puis fécaloïdes, qui le secouent et exaspèrent les douleurs ; sur le visage, tout, maintenant s'inscrit : l'anéantissement des forces, l'effroi, la lucidité, la longue souffrance et les signes du faciès péritonéal : les yeux enfoncés dans les orbites, regards sans mobilité, saillies osseuses accusées, traits tirés, nez pincé, narines battantes, joues creusées déshydratées, quelquefois violacées, expression atroce ; est-ce un ventre d'occlusion ou de péritonite ? [...] Les signes généraux indiquent aussi que la toxémie et le collapsus sont réunis : cyanose, aphonie, voix cassée, pouls filiforme et de pression faible. Les douleurs spontanées ont cessé. En même temps, apparaissent l’euphorie du malade et sa condamnation à mort. »
2C’est parce que la médecine est avant et malgré tout une science humaine qu'elle n’arrive pas à abandonner cet homme malade et qu'elle continue de le décrire, la description étant un témoignage d’humanité car comme l’a écrit Michel Foucault dans la conclusion de la Naissance de la clinique :
« le sensible, inépuisable à la description et que tant de siècles ont voulu dissiper, trouve enfin dans la mort la loi de son discours. »
3Je vais tenter de montrer dans ce texte, comment l’évolution des pratiques de recherche médicale, fortement influencée par les progrès de la biologie et de la technologie, a entraîné l’apparition de nouvelles formes de description qui n’ont cependant pas encore supplanté la description clinique traditionnelle.
1. Place de la recherche clinique dans la recherche médicale. Les pratiques de recherche clinique
4Aujourd'hui, la recherche médicale recouvre un champ immense d'investigation qui comprend la recherche clinique directement appliquée à l'homme, mais aussi la pathologie expérimentale effectuée chez l'animal et la recherche fondamentale appliquée à la cellule et à la molécule. Chaque spécialité médicale comporte sa part de recherche clinique mais également de recherche fondamentale qui lui permet de progresser dans la connaissance de la physiopathologie des maladies.
5La recherche clinique concerne l'étude des maladies humaines et leur évolution sous différents traitements ou modes de prise en charge. Cette étude peut se faire à l'échelon individuel, clinique, ou à celui d'une population, épidémiologique. La recherche clinique se base sur l'évaluation clinique des patients et les résultats des examens dits complémentaires biologiques, radiologiques, anatomo-pathologiques ou pharmacologiques. Comme dans toute recherche scientifique, une hypothèse de travail est posée, basée sur des observations cliniques préalables, que l'on cherche à vérifier en établissant un protocole d'étude particulier. Les résultats sont traités par analyse statistique appropriée à la vérification de l'hypothèse puis ultérieurement communiqués dans des congrès et publiés dans des revues médicales internationales.
6La recherche clinique repose donc sur plusieurs étapes que l'on peut identifier comme suit :
L'observation clinique des patients et le recueil de l'information médicale.
La définition précise de la maladie ou du phénomène pathologique étudié (elle repose sur des critères positifs et/ou négatifs dont la validité a été reconnue par la communauté médicale internationale au cours de conférences de consensus réunissant des experts).
L'élaboration d'un protocole thérapeutique ou de soins.
La comparaison des résultats avec ceux d'autres équipes publiés dans la littérature.
La communication des résultats dans des congrès sous forme orale ou par voie d'affiche
La publication des résultats sous forme d'article scientifique, soumis à des revues médicales internationales comportant un comité de lecture chargé d'en apprécier le fond et la forme.
2. La description dans les pratiques de recherche clinique
2.1. L'observation médicale : une description du malade basée sur la perception
7L'observation médicale est un dossier dans lequel doit figurer la description la plus minutieuse et exacte possible des antécédents du patient, de ses symptômes, des données de l'examen clinique et des examens complémentaires. Il s'agit d'une description traditionnellement manuscrite, de forme libre, recueillie dans le dossier médical par au moins deux observateurs, habituellement un étudiant supervisé par un médecin senior et/ou par l'investigateur de l'étude.
8Le recueil des données de l'observation fait appel à la perception mettant en jeu les cinq sens :
l'écoute active et dirigée du patient à la recherche d'éléments dont celui-ci ne perçoit pas toujours l'intérêt ou l'importance. C'est presque d'une enquête policière dont il s'agit. En effet si les symptômes initiaux ne sont pas bien recherchés au cours de l’interrogatoire du patient et consignés dans le dossier, l'enquête s'embourbe et le diagnostic aussi... Il faut donc questionner, écouter mais surtout entendre puis extraire les informations pertinentes, celles que l’on inscrira dans l'observation et qui serviront de base de travail ultérieure.
l'auscultation des poumons et du cœur, écoute médiée par le stéthoscope.
l'observation visuelle du patient : son maintien, son allure générale, le ton de sa voix, l'aspect de son teint, l'allure de sa marche...
la palpation et la percussion des différents organes : le pouls, le foie, la rate, les ganglions, les touchers pelviens.
l'odorat : l'haleine du diabétique, de l'alcoolique, de l'insuffisant rénal ou hépatique sont immédiatement reconnaissables.
le goût a été abandonné au profit de techniques biologiques plus subtiles, mais n’oublions pas qu’au XIXe siècle, on goûtait encore les urines pour y reconnaître le goût sucré des urines des diabétiques.
9La description de tous ces éléments indispensables au diagnostic est consignée dans le dossier médical sous une forme bien définie, chaque élément étant présenté dans un ordre déterminé. On regroupe, organe par organe, les éléments positifs tels que l'existence de douleurs abdominales ou la découverte de ganglions inguinaux et les éléments négatifs tels que l'absence de fièvre ou d'éruption.
10Les termes utilisés pour la description sont plus sobres qu'ils ne l'étaient au XIXe siècle, encore que l'on soit encore fortement imprégné de la description hippocratique. On abandonne sans remords ce que Bachelard appelait la « suradjectivation des substantifs » : le souffle pleural lorsqu’il est entendu n'est plus doux, lointain, voilé, expiratoire, il est souffle pleural et la pleurésie qu'il révèle sera confirmée par la radio pulmonaire. Que le foie soit marronné, dur ou mou, son bord inférieur lisse ou tranchant, peu importe car l'échographie nous donnera avec précision ses dimensions, son aspect homogène ou hétérogène, en apportant l'indispensable quantification des mesures. La description clinique pure est donc rapidement complétée par la description radiologique, échographique ou scannographique qui est d'ailleurs inclue dans l'observation clinique. Mais, fait important, la sobriété des descriptions et leur caractère plus technique a remplacé les descriptions littéraires et fleuries d'antan. Les qualificatifs sont très codifiés : l'abdomen est souple, indolore, les aires ganglionnaires sont libres etc. Aucune originalité, aucune fantaisie n'est plus de mise dans le recueil des informations.
11Dans certains services de spécialité, le cahier d'observation classique, vierge par définition à l'entrée du patient, est remplacé par un fascicule imprimé regroupant dans un ordre particulier la liste de signes ou symptômes à rechercher. Il suffit de cocher la bonne case : oui/non, présent/absent. L'écriture manuscrite disparaît peu à peu des dossiers, remplacée par une sorte d'écriture minimale spécifique de chaque spécialité.
12Quelle que soit sa forme, la qualité de cette description dépend de l'expérience de l'observateur, de son sens perceptif, appelé souvent esprit d'observation, et de son degré d'empathie avec le patient. Celui-ci reste le plus souvent en dehors du champ de l'observation, objet d'étude passif, n'ayant que très peu de relations avec l'observateur pour donner le plus d'objectivité possible à l'observation.
13Néanmoins, certains symptômes ressentis par le patient peuvent ne pas être suffisamment perçus par le médecin et donc mal- ou indescriptibles. C'est le cas de la douleur ou de la tristesse lorsqu'elles ne sont pas exprimées verbalement chez les enfants ou les patients ayant des troubles cognitifs. Et même lorsque la douleur est dite, personne ne peut réellement en percevoir l'intensité. La recherche d'éléments témoignant indirectement d'une souffrance peut la faire soupçonner mais jamais la faire ressentir. Elle n'est donc pas mesurable par l'observateur extérieur ce qui est très gênant pour apprécier l'efficacité d'un traitement. C'est pourquoi, plutôt que de tenter de s'en faire une idée très subjective ou de projeter le symptôme en dehors du patient pour mieux le décrire, on préfère réintégrer le patient dans le champ de l'observation en le faisant participer à l’évaluation de sa douleur. On utilise des échelles d'intensité de douleur qui sont remplies par le patient, échelle visuelle analogique, par exemple qui lui permet d'attribuer une note de 0 à 10 à sa douleur et de suivre ainsi l'évolution sous traitement.
14On est ainsi bien loin de la description faite par Bouchard, au XIXe siècle, de la douleur de la migraine, description très interprétative et dans laquelle la maladie devient une entité autonome, douée de vitalité, et dont l'intérêt aux yeux du médecin de l'époque est bien supérieur à celui du malade. :
« Dans l'enfance la douleur est contusive, nauséeuse et porte aux défaillances. Dans l'adolescence elle est gravative, congestive, avec des sensations de battements. Dans la jeunesse et dans la première période de la virilité, elle est plus localisée, plus exquise, les symptômes oculaires dominent ; les vomissements sont fréquents. Elle est alors unilatérale. Dans les périodes de la virilité qui avoisinent l'âge mûr, elle redevient bilatérale, frontale et occipitale ou simplement occipitale. La migraine peut vieillir plus vite que le migraineux. »
15Comme les ethnologues le font depuis longtemps (Laplantine, 1996), certaines spécialités médicales utilisent les techniques de l’image et notamment la vidéo pour analyser a posteriori les attitudes ou les comportements que l'observateur pourrait ne pas saisir en temps réel. Ces techniques sont utilisées en recherche clinique en psychiatrie notamment pour l'analyse sémiologique des dépressions, des comportements alimentaires, des relations mère-enfant. Elles permettent d'améliorer la description de phénomènes difficilement perceptibles dans l'instant, de les nommer et surtout de les quantifier (nombre de sourires ou de regards qu'adresse le nourrisson à sa mère pendant l'entretien, nombre de réponses de la mère à l’enfant).
16Plus qu'à objectiver un état de fait, à figer une attitude, elles servent à élaborer et valider des outils permettant la quantification des comportements : échelles de dépression, de douleur, du comportement alimentaire. Ces techniques très intéressantes permettent d’établir une transition permanente entre le vu et l'écrit, le montré et le dit ou le non-dit car comme le souligne Michel Foucault dans Les mots et les choses :
« On a beau dire ce qu’on voit, ce qu’on voit ne tient jamais dans ce qu’on dit. »
2.2. Description des maladies : de la dénomination à la classification
17Comme la recherche scientifique, la recherche clinique est devenue internationale. Chaque maladie, quelle qu'ait été sa description initiale, fait l'objet d'un consensus international, et est définie par des critères validés par un groupe d'experts qui se réunissent régulièrement au cours de conférences de consensus ou de « workshops ». Pour pouvoir être utilisés par tous, ces critères doivent être le plus objectifs possible, leur importance relative doit être validée statistiquement. Une évolution de ces définitions est rendue possible par une révision régulière en fonction des données apportées par de nouvelles techniques d'exploration et de nouveaux concepts physiopathologiques.
18C'est ainsi que la description des maladies a suivi l'évolution des idées médicales dont elle est le reflet.
19Ce tournant s'est effectué en France au milieu du XXe siècle. Avant cette époque, les maladies étaient considérées comme des entités autonomes, douées d'une forte individualité, évoluant à leur gré, et avec lesquelles les médecins entretenaient des relations compliquées, parfois coupables... La maladie devenait la propriété de celui ou ceux qui la décrivait en premier et dont elle servait la carrière en portant le nom : maladie D'Alzheimer, syndrome de Flessinger-Leroy-Reitter. Les symptômes étaient classés par ordre de fréquence mais cet ordre dépendait essentiellement de l'observateur. Ainsi Bouchard, dans son traité des Maladies par ralentissement de la nutrition écrit en 1890, après avoir montré des tableaux où les symptômes étaient classés par ordre de fréquence, se contente de présenter ses propres observations rechignant à intégrer à sa série d'autres cas analogues décrits dans la littérature :
« Si j'avais puisé dans la littérature médicale, dit-il, j'y aurais trouvé des faits en très grand nombre à ajouter à mes 31 observations. Mais il m'a semblé que telle ou telle idée doctrinale n'emporterait pas la même conviction que l'exposé de la totalité des cas relevés par un seul observateur. »
20La deuxième moitié du XXe siècle a vu naître la pensée statistique qui a constitué une véritable révolution dans la pensée et les pratiques de recherche médicale en limitant la subjectivité de l'observateur.
21Tel signe est spécifique de la maladie s'il peut être retrouvé constamment par des observateurs différents (fidélité ou sensibilité inter-juges) et par un même observateur à des périodes différentes (fidélité ou sensibilité intra-juge). Par ailleurs, les observations des autres collègues au lieu d'être rejetées sont ajoutées aux nôtres pour renforcer la puissance des analyses statistiques basées sur le nombre de patients étudiés. C'est ainsi le règne de la méta-analyse, analyse statistique basée sur la prise en compte de tous les résultats d'essais thérapeutiques positifs ou négatifs, publiés dans la littérature médicale.
22Cette nouvelle rigueur dans la description a permis d'aboutir à une classification internationale des maladies CIM-10, sorte de dictionnaire de sémiologie, comportant des critères dont certains sont utilisés pour le diagnostic et d'autres pour la recherche. Cette classification est réévaluée tous les cinq ans environ et sert de base à l'inclusion des patients dans les essais thérapeutiques. Elle est reconnue internationalement et utilisée par tous. Une variante a été développée par les psychiatres pour mieux individualiser les troubles du comportement. Il s’agit du DSM (Diagnostic and Statistical Mannal). Ces classifications sont conçues avec un codage numérique des critères permettant un classement précis de l'information médicale. A l'heure où l'on parle de supprimer tout support papier au bénéfice d'une gestion informatique des dossiers, il n'est pas exclu que l'information médicale ne se traduise plus que par une liste de codes dont on aura intégré, habitude oblige, la signification.
23Il n’est d’ailleurs pas impensable que ce langage codé puisse envahir le champ de la description provoquant une mutation de la description littéraire en description numérique, en parallèle de la profonde mutation que la médecine est en train d'accomplir passant de l'ère du diagnostic clinique des maladies à celle du diagnostic génomique, pré-clinique, et de la thérapeutique classique à la thérapie génique, grâce au décodage direct du génome de l'individu, celui-ci étant nommé par une succession kilométrique de lettres et de chiffres correspondant aux différentes paires de bases dont est constitué l’ADN. Ainsi
24« 5’ACTCGCATTAGGCCAACGAG3’ » est, par exemple, le nom d'un fragment de gène (« primer ») utilisé pour l'analyse d'autres parties du génome.
2.3. La description au service de la communication scientifique
25La description des travaux de recherche médicale joue un grand rôle dans la progression des connaissances à l'échelon international. Dans un but d'universalisation et de meilleure compréhension par tous du travail présenté, cette description doit se maintenir dans des formes très codifiées.
26La publication des travaux de recherche clinique dans des revues de haut niveau se fait obligatoirement en langue anglaise. La forme de la rédaction est imposée par le comité scientifique de chacune des revues. Pour la plupart d'entre elles, il doit apparaître en marge, l'exposé des raisons qui ont conduit à élaborer le travail, le résumé des résultats et une conclusion brève. Le texte lui-même doit être rédigé selon le même plan : introduction – matériel et méthodes incluant la description des populations de patients étudiés, le schéma de l'étude, l'analyse statistique – résultats - discussion – conclusion.
27Les parties purement descriptives du travail concernent les rubriques : matériel – méthodes et résultats.
28La description est en premier celle de la méthodologie de recherche. Les termes utilisés sont les plus normatifs et référencés possible. Cette normalisation de la description est censée en servir son intelligence par tous. Les phrases doivent être courtes, les adjectifs peu nombreux, les termes précis, définis et reconnaissables par tous, le texte limité au minimum indispensable.
29La description des résultats doit également être la plus brève possible et épurée de toute interprétation. L'introduction de tableaux ou de figures est très appréciée, permettant à chaque lecteur de court-circuiter en quelque sorte la pensée de l'auteur et de se faire sa propre idée des données, toujours dans un louable souci d'objectivité. Les courbes permettent également d'exprimer les résultats dans un système à plusieurs dimensions incluant le temps ce qui permet de visualiser, plus facilement que ne le permet le texte, la relation entre présent, passé et futur. Les courbes, figures et tableaux permettent de livrer au lecteur l'information brute, non retouchée par l'observateur. La description est donc limitée à un simple rapport des faits expérimentaux tels qu'ils apparaissent après le traitement statistique. La sévérité de la forme imposée à la description interdit toute interprétation, toute pensée originale. Celle-ci pourra largement s'exprimer dans la discussion, qui sort du champ de la description.
30Cette rigueur dans la forme de l’écriture scientifique, admise et respectée par tous de manière consensuelle, est peut-être beaucoup plus importante que les faits scientifiques qui sont rapportés. Latour, dans son livre La science en question émet l’hypothèse que c’est le texte scientifique lui-même, grâce à sa valeur reconnue par tous, qui permet la validation des hypothèses posées et est à l’origine de l’élaboration des faits et non simplement au service de leur communication. Cette hypothèse forte est confortée en pratique par la confiance que l’on accorde volontiers à certains faits expérimentaux publiés dans les revues de forte notoriété scientifique dans lesquels la forme obligatoirement très rigoureuse de l’article donne une certaine garantie de véracité des faits.
31La communication des travaux dans les congrès scientifiques peut se faire sous deux formes : communication orale d'une dizaine de minutes ou affiche résumant l’essentiel du travail. Dans la première forme, la communication est limitée dans le temps, dans la seconde elle est limitée dans l'espace.
32La description du travail de recherche au cours d'une communication orale est toujours illustrée par un support visuel constitué de diapositives qui permet à l'auditoire de fixer plus rapidement son attention pour mieux comprendre dans un temps limité les travaux exposés. Ce support visuel n'est pas soumis à des normes particulières. L'originalité de certains supports visuels (couleur, motifs de présentation, dessins...) que permettent les techniques informatiques enrichit les présentations en leur donnant un caractère plus convivial.
33Je dirai pour conclure que, même si sa forme a beaucoup évolué, la description reste, me semble-t-il un processus essentiel et constitutif de la recherche médicale actuelle. Le fossé qui s’est creusé entre la description clinique traditionnelle et les nouvelles formes de description – classifications des maladies, texte médical scientifique – reflète la double polarité qui caractérise la médecine d’aujourd’hui : d’une part une pratique humaniste globale dont l’objet est avant tout de soigner si ce n’est de guérir l’homme malade, qui nécessite une écriture libre, porteuse d’une certaine sensibilité et d’autre part une pratique plus spécialisée, centrée sur la maladie de l’organe, de la cellule, de la molécule, du chromosome, lancée dans la quête éperdue de la découverte de l’infinitésimal et dont le caractère se voulant délibérément scientifique nécessite des modes d’expression plus stricts, plus objectifs, qui la fondent et la valorisent.
Bibliographie
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Adam, J-M., (1993), La description, Paris, PUF, Coll. Que sais-je ?, no 2783.
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Latour, B., (1995), La science en questions, Paris, Gallimard, Folio/Essais.
Mondor H., 1928, Diagnostics urgents, Paris, Masson & Cie
Auteur
Médecine interne-Gériatrie
Université Victor Ségalen - Bordeaux 2
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