1 Il s’agit de Winchester ’73 (Winchester 73, 1950), Bend of the River (Les affameurs, 1952), The Naked Spur (L’appât, 1953), The Far Country (Je suis un aventurier, 1954) et The Man from Laramie (L’homme de la plaine, 1955).
2 Rappelons en passant que ces cinq films ne sont pas les seuls que Anthony Mann a tournés avec James Stewart. En dehors du genre westernien, il faut mentionner trois autres œuvres, moins marquantes, sinon mineures : Thunder Bay (Le port des passions, 1953), The Glenn Miller Story (Romance inachevée, 1954), Strategic Air Command (Strategic Air Command, 1955). S’il fallait parler de genres ici, nous pourrions avancer que le premier relève du film d’aventures, le second du Biopic et le troisième du film de guerre. Nous sommes en tout cas à chaque fois très loin du western.
3 BERTHOMIEU P., Hollywood classique. Le temps des géants, Pertuis, Rouge Profond, 2009, p. 421.
4 KAUSCH F., « Deviens qui tu es. Espace de la Frontière et aporie identitaire de l’homme westernien à partir de Ford, Mann, Wellman et King », dans DE MUNTER A., PFEIFFER N. & VAN EYNDE L. (Dir.), Philosophie du western. Image, culture et création, Bruxelles, Presses de l’Université Saint-Louis, 2012, p. 101.
5 ID., p. 102.
6 R. WAGNER, Parsifal (en bilingue), Acte I, trad. de M. Beaufils, Paris, Aubier, 1964, p. 98.
7 KAUSCH F., op. cit., p. 105.
8 « Tandis que Chase affectionnait particulièrement les thèmes du déplacement et de l’itinéraire, Yordan construit plutôt des situations dramatiques resserrées sur elles-mêmes […] » (BENOLIEL B., L’homme de la plaine, Paris, Cahiers du cinéma/Scérén-CNDP, 2004, p. 10).
9 ID., p. 9.
10 « Entretien avec Hitchcock par Jean Domarchi et Jean Douchet », dans Politique des auteurs. Les entretiens, Paris, Éditions des Cahiers du cinéma, 2001, p. 170 : « Question : Quelles sont les lignes qui prédominent dans la composition ? Réponse : L’horizontale et la verticale. Au cinéma, il n’y a que deux dimensions. La profondeur de champ ne compte pour rien ».
11 MOUREN Y., La couleur au cinéma, Paris, CNRS Éditions, 2012, p. 116.
12 Insistons sur le fait que ce statut et ce rôle de l’histoire est propre au cycle Stewart. L’histoire joue un rôle bien différent, et même central, comme nous l’avons vu, dans Devil’s Doorway. Sa fonction narrative est encore différente dans The Furies (Les furies, 1950) qui n’est à dire vrai que très partiellement un western – ou alors un western qui se dilue dans une intrigue mélodramatique, au point que l’on ne sait si le mélodrame est la greffe ou si c’est le western. Quant à Cimarron (La ruée vers l’Ouest, 1960), l’histoire – notamment la colonisation de l’Oklahoma par un premier Land Run (une « course à la terre ») en 1889 – pourrait presque passer pour l’enjeu central. Mais on sait que Mann se désintéressa de cette œuvre, dont la réalisation fut en fin de compte achevée par Charles Walters.
13 Rappelons qu’un posse est un groupe d’hommes rassemblés par un shérif pour poursuivre des hors-la-loi en fuite après la commission d’un crime dans sa juridiction.
14 Le Roi Lear (Acte IV, scène 6) est cité ici dans la traduction d’Yves Bonnefoy : SHAKESPEARE W., Hamlet, Le Roi Lear, Paris, Gallimard, 1978, p. 349.
15 Nous nous permettons de renvoyer pour cette analyse à VAN EYNDE L., Shakespeare. Les puissances du théâtre. Un essai philosophique, op. cit., p. 179-192.
16 Cf. KAUSCH F., op. cit., p. 97 : « On trouvera également chez Mann un héros toujours déjà dans le négatif et le manque. Ses personnages se présentent d’abord en situation de défaut, vide dont la lente reconquête dirigera tous leurs efforts ».
17 Notons qu’il s’agit là plus largement d’un trait stylistique important de Mann. C’est notamment à l’utilisation de dévers que l’on reconnait sa « patte » dans les premières séquences de Spartacus (1960), avant que la réalisation de ce film ne lui soit retirée au profit de Stanley Kubrick.
18 Michaël Henry Wilson a noté à juste titre que « le scénariste Borden Chase reprend là la situation à laquelle il confrontait le John Wayne de La rivière rouge [Red River, Howard Hawks, 1948] » (WILSON M.H., À la porte du paradis. Cent ans de cinéma américain. Cinquante-huit cinéastes, Paris, Armand Colin, 2014, p. 164).
19 Schéma bien connu du western classique. John Ford, dans Wagonmaster (Le convoi des braves, 1950), en avait donné une illustration brillante. Cf. VAN EYNDE L., « La conquête de l’image ou comment le western institue derechef l’espace commun », dans GELY R. & VAN EYNDE L. (Dir.), Affectivité, imaginaire et création sociale, Bruxelles, Presses de l’Université Saint-Louis, 2010, p. 255-293.
20 À l’exception, cependant, du groupe d’Indiens shoshones. Mais il faut bien reconnaitre que ceux-ci ne sont ni fortement individualisés, ni présentés sous les traits d’une communauté par la mise en scène de Mann et le scénario de Chase.
21 « Entretien » dans les Cahiers du cinéma, n° 69, cité par LEUTRAT J.L. & LIANDRAT-GUIGUES S., Western(s), Paris, Klincksieck, 2007, p. 107.
22 Il faudrait sans doute quelque peu nuancer les choses pour les deux rôles féminins dans The Far Country, ce que nous nous emploierons à faire dans notre section suivante. Mais ils ne sont de toute façon pas comparables en intensité à celui de Janet Leigh dans The Naked Spur.
23 À ce moment comme à d’autres, on se dit que décidément, le Vertigo d’Hitchcock doit beaucoup à la direction d’acteurs d’Anthony Mann. L’expression de ce cauchemar comme les visages de possédé de Stewart à d’autres moments, dans ce film comme dans d’autres films du cycle, sont ceux qui donneront toute son intensité angoissante au personnage de Scottie en 1958.
24 Sur cette asymétrie du soin, voir par exemple LE BLANC G., Vies ordinaires, vies précaires, Paris, Seuil, 2007, p. 203 et svtes.
25 SHAKESPEARE W., Othello, Acte IV, Scène 1, trad. fr. de Y. Bonnefoy, Paris, Gallimard, 2001, p. 327.
26 SHAKESPEARE W., Othello, Acte II, Scène 3, op. cit., p. 221.
27 Cf. VAN EYNDE L., Shakespeare. Les puissances du théâtre. Un essai philosophique, op. cit., p. 193-205 (Chapitre VII : Le poison du langage : « Othello »).
28 MARIENSTRAS R., Le proche et le lointain. Sur Shakespeare, le drame élisabéthain et l’idéologie anglaise aux XVIe et XVIIe siècles, Paris, Éditions de Minuit, 1981, p. 200-201.
29 SHAKESPEARE W., Hamlet, Acte I, Scène 5, trad. de Y. Bonnefoy, Paris, Gallimard, 1978, p. 62.
30 Si nous nous projetons un peu plus loin dans l’histoire du western, il apparait évident que ce rôle de Ben Tatum anticipe en fait sur celui de Stumpy que Howard Hawks confiera à Walter Brennan dans Rio Bravo (1959).
31 Nous pourrions aussi évoquer le cycle de la cavalerie de John Ford, où la garnison militaire est une brillante variation sur l’idée de communauté. Cf. Fort Apache (1948), She Wore a Yellow Ribbon (1949) et Rio Grande (1950).
32 Nous avons consacré une analyse de quelques pages à cette modalité de la communauté chez Ford dans « La conquête de l’image ou comment le western institue derechef l’espace commun », op. cit., p. 272 et svtes. Remarquons que la « troupe » d’acteurs à laquelle recourt Ford est essentielle, parce qu’elle lui garantit justement des physiques très différenciés, des trognes, des corps, des styles de mouvement si singuliers qu’ils en deviennent pittoresques. Or, Anthony Mann utilise lui aussi une « troupe » pour The Far Country, et cela dans le même but que Ford, selon nous.
33 Plus tard, on retrouvera une telle attention pour une communauté multiple dans la séquence de la ruée à la terre dans l’Oklahoma que filme Mann pour Cimarron (La ruée vers l’Ouest, 1960).
34 Comme l’écrivent très justement Suzanne LIANDRA-GUIGUES et Jean-Louis LEUTRAT : « Le western peut être considéré […] comme le récit d’une disparition » (Splendeur du western, op. cit., p. 64). Voir aussi, des mêmes auteurs, Western(s), op. cit., p. 7. Nous avons nous-mêmes proposé une voie d’interprétation du western fondée sur la généralité du crépusculaire dans le genre : cf. VAN EYNDE L., « La conquête de l’image. Ou comment le western institue derechef l’espace commun », op. cit., p. 264-265.
35 Cf. notre chapitre 5.
36 Nous avons dit ailleurs ce qu’il fallait penser, selon nous, de la réapparition trop tardive de Cordélia. Cf. VAN EYNDE L., Shakespeare. Les puissances du théâtre. Un essai philosophique, op. cit., p. 173-174.