1 Cité par Ute Ackermann, « Le Bauhaus intime », in Bauhaus (1999), Cologne, Könemann, 2000, p. 108 (sous la direction de Jeannine Fiedler et Peter Feierabend).
2 « Les Bauhausiens avaient pour coutume de se baigner nus dans l’Ilm ou l’Elbe, ce qui ne manquait pas de leur attirer de vifs reproches », écrit Ute Ackermann, in Bauhaus, id.
3 Itten cité par Norbert M. Schmitz, « Le mazdéisme au Bauhaus : l’artiste en sauveur », in Bauhaus, ibid., p. 121.
4 Ibid., p. 122. C’est en fait le « maître » du mazdéisme, Otoman Zar-Adusht Hanisch (mort en 1936), qui formule ainsi sa conception du rôle de l’artiste dans son ouvrage Doctrine du mazdéisme : « Sa mission est de représenter des modèles terrestres de perfection spirituelle ou corporelle, ou encore d’épanouir ces qualités chez l’être humain, afin d’éveiller chez lui le besoin d’élévation et de beauté, et de l’entretenir » (cité par Norbert M. Schmitz, « Le mazdéisme au Bauhaus : l’artiste en sauveur », id., p. 122.). Ainsi que l’explique Schmitz, « l’auto-rédemption était le but suprême de la conception globale du monde des mazdéens. » (id.) À côté de ce rôle flatteur donné à l’artiste, la doctrine du mazdéisme se caractérisait également par des théories racistes prônant la supériorité des Aryens et de la race blanche.
5 Ibid., p. 124.
6 Paul Klee, Lettres de l’époque du Bauhaus, 1920-1930, Paris, Farrago, Leo Scheer, 2004, 297 p.
7 Paul Citroën, « Mazdaznan im Bauhaus », Berne, Neumann, 1971, p. 34, cité par Norbert M. Schmitz, in « Le mazdéisme au Bauhaus : l’artiste en sauveur », in art. cit., p. 120.
8 Walter Gropius, Idee und Aufbau des staatlichen Bauhauses Weimar, Bauhausverlag, Munich, 1923, traduit en français par Martine Passelaigue sous le titre Bauhaus : idée et organisation, in Art en Théorie, 1900 – 1990, une anthologie par Charles Harrison et Paul Wood, Paris, Hazan, 1997, p. 383-388.
9 Ibid., p. 383.
10 Ibid., p. 384.
11 Id.
12 Ibid., p. 386. Plus haut, Gropius explique que le but de ce cours est de « libérer les forces créatrices que possède l’étudiant, de lui rendre saisissables la nature matérielle et les lois fondamentales de la création artistique » (id.). Après l’enseignement d’Itten, dont le premier cours préliminaire tendait à la formation d’un individu « complet », et excédait donc les seules expérimentations artistiques, Lázló Moholy-Nagy puis Josef Albers, d’abord son assistant, y enseignèrent « l’observation naturelle de la couleur, des surfaces, de la forme, du matériau, de la fonction, des proportions, du volume ». Il s’agit de constituer l’art, selon les propres termes de Gropius, par « les éléments qui lui sont propres », éléments que le cours préliminaire doit faire découvrir, expérimenter et comprendre.
13 Id. Je souligne.
14 Ibid., p. 387.
15 Id.
16 Walter Gropius, Manifeste du Bauhaus, in Éric Michaud, « Œuvre d’art totale et totalitarisme », in L’Œuvre d’art totale, Paris, Gallimard, 2003, p. 46.
17 Walter Gropius, juin 1919, cité par Éric Michaud, ibid. p. 47 (reproduit dans Hans M. Wingler, Das Bauhaus Weimar, Dessau, Berlin, Gebr. Rasch & Co und DuMont Schauberg, Cologne, 1968 (2e éd.), p. 46, traduit dans Anthologie du Bauhaus, Bruxelles, Didier Devillez Éditeur, 1995, p. 51-54).
18 Cité par Eva von Seckendorff, « L’atelier de menuiserie et d’équipement », in Bauhaus, op. cit., p. 402.
19 Walter Gropius, « Deutscher Revolutionsalmanach : Almanach allemand de la révolution », Berlin, 1919, p. 136, in Bauhaus, op. cit. p. 422.
20 Frauke Mankartz, « Le Bauhaus et l’idée de corporation des bâtisseurs de cathédrales », in Bauhaus, op. cit. p. 423. Le sigle du Bauhaus inspiré de l’emblème des tailleurs de pierre du Moyen Âge devint le symbole de la « communauté de travail à venir et de ses artistes du bâtiment » (id.).
21 Lazlo Maholy-Nagy, « Produktion-Reproduktion », in De Stijl V, 7, juillet 1922, p. 98 ; Peinture, photographie, Film (1925), Nîmes, Jacqueline Chambon, 1993 (traduit en français par C. Wermester), cité par Éric Michaud, « Œuvre d’art totale et totalitarisme », art. cit., p. 187.
22 Sur ce concept « d’homme nouveau », voir Éric Michaud, « Déjà là, mais encore à venir. Le temps de l’homme nouveau en Allemagne », in Les Années 1930. La fabrique de « l’Homme nouveau », Paris, Gallimard ; Musée des Beaux-Arts du Canada, 2008, p. 28-35 (sous la direction de Jean Clair). Éric Michaud insiste sur le caractère insaisissable et les formes variées de ce concept de « régénération de l’espèce », qui se rejoignent cependant, dans le premier quart du XXe siècle, sur la double temporalité du modèle chrétien sur laquelle se déploie l’activité artistique : « si chaque œuvre était l’attestation sensible que le nouveau était déjà advenu, elle n’était pourtant là que pour montrer aux hommes le chemin qui devait mener à la réalisation achevée du nouveau » (ibid., p. 30). Contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’apparition de la machine dans la nouvelle mise en forme de la « vie » n’entraîna pas la disparition de la conception spirituelle de l’œuvre d’art : « La Neue Gestaltung constituait en elle-même une révolution spirituelle : jusqu’alors coupable d’aliéner l’homme lui-même et d’en précipiter la chute, la machine devenait soudainement l’instrument de sa rédemption. » (ibid., p. 31).
23 Walter Gropius, « Apollon dans la démocratie (1956, Hambourg) », in La nouvelle architecture et le Bauhaus, Bruxelles, La Connaissance, 1969, p. 16-17.
24 Sur ce caractère « organique », il faudrait ici être plus précis. En 1956, Gropius infléchit quelque peu le sens de ce terme, qui pourrait tout autant, mais ce n’est pas ce qu’il entend alors, qualifier le tout premier Bauhaus, celui pour lequel le modèle médiéval, modèle de société pensée comme organique par excellence, prévalait encore. À partir de 1922, et plus encore après la seconde guerre mondiale, la pensée de Gropius se transforme même si son analyse conserve l’opposition entre culture et civilisation typique du XIXe siècle allemand en acceptant et travaillant avec les possibilités offertes par l’industrialisation. On pourrait dire qu’on est ici passé d’un « organique » fusionnel à un « organique » contrapuntique.
25 Walter Gropius, « Apollon dans la démocratie (1956, Hambourg) », in Apollon dans la démocratie, op. cit., p. 18.
26 Walter Gropius, « Un nouveau pacte avec la vie (1963) », in Apollon dans la démocratie, op. cit., p. 64.
27 Id.
28 Gottfried Semper, Wissenschaft, Industrie und Kunst, 1852, cité par Nikolaus Pevsner, Les Académies d’art (1940), Paris, Gérard Monfort éditeur, 1999, p. 197. Semper, signalons-le, associait communément ses propres élèves à la réalisation des commandes qu’il recevait.
29 Voir Nikolaus Pevsner, Les Académies d’art (1940), op. cit., p. 204.
30 Hermann Muthesius, 1901, cité par Nikolaus Pevsner, id.
31 N’oublions pas que c’est en 1914 que Gropius fut nommé directeur de l’école de Weimar, en remplacement d’Henry Van de Velde. La guerre retarda la mise en place de son programme, qui porte, on le voit, de nombreuses traces des débats du début du siècle.
32 Walter Gropius cité par Eva von Seckendorff, « L’atelier de menuiserie et d’équipement », in Bauhaus, op. cit., p. 404.
33 Gerhard Marks, 1889-1981, Briefe und Werke, Munich, 1988, p. 40, cité par Cornelia von Buol, « L’atelier de céramique », in Bauhaus, op. cit., p. 445.
34 Walter Gropius, « Mars-avril 1925, Dessau », in Bauhaus, op. cit., p. 408. Précisons que l’atelier de poterie ne fut pas repris dans le Bauhaus de Dessau.
35 Procès-verbal de la séance du Conseil des Maîtres du 20 septembre 1920, Staatarchiv de Weimar, cité par Cornelia von Buol, « L’atelier de céramique », in Bauhaus, op. cit., p. 439.
36 Pour une réflexion contemporaine sur l’enseignement artistique, voir Thierry de Duve, Faire école (ou la refaire ?), nouvelle édition revue et augmentée, Dijon, Les Presses du réel, Collection Mamco, 2008, 227 p.
37 Parmi ces réformateurs figure également Rudolph Steiner, qui commence à mettre en pratique à partir de 1919 ses théories sur l’éducation et reprend lui aussi le motif de la cathédrale du Moyen Âge pour qualifier son entreprise. Voir à ce propos l’article de Heiner Ullrich, « Rudolph Steiner and education », in Perspectives, revue trimestrielle de l’éducation, Unesco, 1993, repris in Quinze pédagogues : leur influence aujourd’hui, Paris, Armand Colin, 1994, p. 107-123 (sous la direction de Jean Houssaye).
38 Voir à ce propos Broersma Rouke et Velthausz Freek, Petersen et Freinet. Le plan d’Iéna et l’École moderne, Mayenne, Les amis de Freinet, 2011, 121 p.
39 Fête « indienne » de l’école des Beaux-Arts du Grand-Duché de Saxe, Carnaval, Weimar, 5 février 1913.
40 Le Bal des Quat’z’arts, la grande fête thématique annuelle costumée de l’École des Beaux-Arts de Paris, par exemple, débute en 1892 pour se terminer en 1966.
41 Tut Schlemmer, « …Vom lebendigen Bauhaus und seiner Bühne », in Eckard Neuman, Bauhaus und Bauhaüster, Cologne, 1985, p. 226, traduit dans Ute Ackermann, « Les fêtes du Bauhaus – Pathétiques, entre danse excentrique et théâtre animalier », in Bauhaus, op. cit., p. 127.
42 Koke Kokk, « Das Bauhaus tanzt… », in Hans M. Wingler, Das Bauhaus 1919-1933, Bramsche, 1962, p. 98, cité par Ute Ackermann, art. cit., p. 128.
43 Émile Durkheim, Les Formes élémentaires de la vie religieuse (1912), Paris, Presses Universitaires de France, 1960, p. 307-310. Le terme de corrobori est emprunté aux Aborigènes australiens (chez lesquels il désigne une danse) mais Durkheim lui donne le sens plus large de rite, tout en l’utilisant également pour parler de moments festifs hors de toute dimension sacrée.
44 Jean-Jacques Rousseau, Lettre à d’Alembert sur les spectacles. Rousseau répond ici à d’Alembert, qui, à l’article Genève de l’Encyclopédie, propose d’établir un « Théâtre de comédies », ce que refuse Rousseau avec vigueur.
45 Goethe, « Voyage en Italie, Le Carnaval de Rome en 1788 », traduction de Maurice Mutterer, 1931, cité par Daniel Fabre, Carnaval ou la fête à l’envers, Paris, Gallimard/Découvertes, 1992, p. 133.
46 Ute Ackermann, « Le Bauhaus intime », in Bauhaus, op. cit., p. 130.
47 Roger Caillois, « La fête », mardi 2 mai 1939, repris in « Le Collège de sociologie, 1937-1939 », sous la direction de Denis Hollier, Paris, Gallimard, Folio/Essais, p. 646-647.
48 Voir Marcel Mauss, Sociologie et anthropologie (1950), Paris PUF, Coll Quadrige, 2006, p. 274.
49 Roger Caillois, « La fête », art. cit., p. 652.
50 Ibid., p. 690.
51 Cette conception dionysiaque de la fête n’est pas non plus celle qu’évoque ensuite René Girard lorsqu’il en fait une crise sacrificielle permettant de réconcilier la communauté et d’apaiser la violence fondatrice. Voir à ce propos René Girard, « Dionysos », in La Violence et le sacré, Paris, Grasset, 1972, p. 200-212. Dans ce face-à-face empli d’allégresse avec la nature, on reconnaît le Nietzsche de la Naissance de la tragédie, dont on sait combien il est lu par cette génération du début du XXe siècle : « (L’homme dionysien) éprouvait un ravissement sublime à contempler dévoilés et inaltérés les traits grandioses de la nature ; en face du type primordial de l’homme, l’illusion de la civilisation s’effaçait ; ici se révélait l’homme vrai, le satyre barbu, exultant d’allégresse pour son dieu. Devant lui, l’homme civilisé s’effondrait jusqu’à ne plus sembler qu’une menteuse caricature. » in Nietzsche, La Naissance de la tragédie, Paris, Librairie Générale Française, p. 80.
52 Oskar Schlemmer, « Regard rétrospectif sur mon Ballet triadique » (vers 1935), in Oskar Schlemmer, L’Homme et la figure d’art, Paris, Centre national de la danse, 2001, p. 12.
53 Ute Ackermann, « Le Bauhaus intime », in Bauhaus, op. cit., p. 138.
54 Oskar Schlemmer, Idealist der Form, Briefe, Tagebücher, Schriften, 1912-1943, Leipzig, 1990, p. 205, cité par Ute Ackermann, id.
55 Félix Klee, « Sur le désir de renouveau et les fêtes du Bauhaus », in Bauhaus, op. cit., p. 172.
56 « Dans l’un des plus anciens récits de fête que l’on connaisse, les Babyloniaka, écrit Daniel Fabre, la description de la fête des Sacées fait de ce principe d’inversion un point des plus importants : pendant cinq jours en effet, les hiérarchies sociales sont inversées, au sens par exemple où les ordres sont donnés par les serviteurs et où un prisonnier tient le rôle du roi, occupe son trône, mange à sa table, couche avec ses femmes jusqu’à ce qu’il soit mis à mort le soir du dernier jour. D’autres rites inversent les rôles du roi et des prêtres, en des fêtes rituelles qui permettent de ré-instituer après les avoir confondus la séparation des mondes humains et divins. À la fin du XIXe siècle, plusieurs auteurs virent dans ces moments l’origine des carnavals du Moyen Âge, lesquels mettent également en jeu ce principe d’inversion de bien des manières. » Daniel Fabre, Carnaval ou la fête à l’envers, op. cit., p. 12.
57 Walter Gropius, « Apollon dans la démocratie » (1956, Hambourg), La nouvelle architecture et le Bauhaus, op. cit., p. 18-19.