1 Cf. supra, Figuration/Présentation, à propos de Valse avec Bachir.
2 Nous laissons de côté les images de synthèse, dont la fabrication n’est pas frappée de cette limite. À propos de cette question, J.-L. Comolli écrit :
« Le cinéma se fait en présence. Les images dites « de synthèse » appartiennent plutôt au monde du cartoon, dont elles seraient les formes actuelles. D’un côté, cinéma : il y a le face-à-face non toujours contrôlable des corps humains ou animaux et des machines (plus ceux qui les servent). De l’autre côté, dessin animé : contrôle de bout en bout. » Cinéma, mode d’emploi. De l’argentique au numérique, Éditions Verdier, Lagrasse, 2015.
3 Essais sur la signification au cinéma II, « Problèmes actuels de théorie du cinéma », Paris, Klincksieck, 2003, p. 43-44.
4 Entretiens avec Chris Rodley, films, photographies, peintures, Paris, Cahiers du cinéma, 1998, traduit par Serge Grüneberg, p. 21.
David Lynch écrit aussi dans Mon histoire vraie :
« Un film devrait tenir tout seul. Il est absurde qu’un réalisateur soit obligé de recourir aux mots pour dire ce que signifie le film. Le monde du film est une création, et les gens aiment parfois pénétrer dans ce monde. Pour eux, ce monde est réel. Or si les gens apprennent comment telle ou telle chose a été faite, ou entendent dire ce que ceci ou cela est censé signifier, la prochaine fois qu’ils verront le film, leur vision en sera altérée. » Mon histoire vraie, Méditation, conscience et créativité, traduit de l’anglais par Nicolas Richard, Paris, Sonatine éditions, 2008, p. 27. Titre original : Catching The Big Fish, Bobkind, Inc., 2006.
5 Le minutage indiqué correspond à l’édition Twin Pics du DVD.
6 Elle est composée par David Bowie et Brian Eno en 1995 pour l’album Outside. Les paroles sont les suivantes :
Funny how secrets travel/I’d start to believe if I were to bleed/Thin skies, the man chains his hands held high/Cruise me blond/Cruise me babe/A blond belief beyond beyond beyond/No return/No return
I’m deranged/Deranged my love/I’m deranged down down down/So cruise me babe /Cruise me baby/And the rain sets in/It’s the angel-man/I’m deranged/The clutch of life /and the fist of love/Over your head/Big deal Salaam/Be real deranged Salaam/Before we reel/I’m deranged.
7 In « Lost Highway de David Lynch », Cahiers du cinéma, N° 509, janvier 1997.
8 Médecin physiologiste, Jules Marey se sert dans un premier temps de la photographie pour l’étude des mouvements des animaux, affirmant contre l’opinion de l’époque que le galop du cheval comporte un temps durant lequel les quatre jambes sont suspendues sous le poitrail, sans pose sur le sol. Eadweard Muybridge met au point en 1879 le zoopraxinoscope qui permet de recomposer par la succession de photographies d’un galop de cheval, le mouvement tel qu’il est décrit par Marey.
9 David Lynch écrit à propos de la fragmentation :
« Pour moi un mystère est comme un aimant. Dès qu’une chose est inconnue, elle attire. Si vous êtes dans une pièce, qu’il y a une porte ouverte sur des escaliers et que la lumière s’éteint en bas, vous serez très tenté de descendre. Ne voir qu’une partie, c’est encore plus fort que de voir le tout. Le tout peut avoir une logique, mais en dehors de son contexte, le fragment prend une incroyable valeur d’abstraction. » Entretiens avec Chris Rodley, op. cit. p. 174.
10 Selon le titre que lui donne le co-scénariste du film, Barry Gifford. Cf. Entretiens avec Chris Rodley, op. cit., p. 166.
11 Il s’agit du procès très médiatisé de ce sportif et acteur américain, qui a été accusé d’avoir tué sa femme et son amant.
12 David Lynch, op. cit., p. 105.
13 Ce travail, qui est poursuivi tout au long du film, illustre bien ce que Luc Vancheri définit comme une spécificité formelle du cinéma :
« Si le cinéma commence là où s’annule la dette photographique <à l’égard d’un référent>, la figuration cinématographique naît véritablement lorsque des corps se mettent en quête d’échapper à la fiction de leur personnage, lorsque leur réalité figurative cesse d’être leur seule réalité filmique, lorsque se dessinent les agencements de leur réalité figurale qui commandent d’autres plans de signification. » Les pensées figurales de l’image, Paris, Armand Colin, 2011, p. 16.
14 Sur ce travail d’analyse cinématographique, il faut lire également ce qu’en écrit Robert Bresson :
« DE LA FRAGMENTATION
Elle est indispensable si on ne veut pas tomber dans la REPRÉSENTATION.
Voir les êtres et les choses dans leurs parties séparables. Isoler ces parties. Les rendre indépendantes afin de leur donner une nouvelle dépendance. » Notes sur le cinématographe, op. cit., p. 93-94.
15 « Nous, jury, déclarons l’accusé coupable de meurtre avec préméditation. »
16 « Le jury vous a reconnu coupable de meurtre avec préméditation. Je vous condamne à la peine de mort sur la chaise électrique. »
17 « Fais comme chez toi, mec. »
18 « Si t’as besoin de quelque chose, demande le concierge. »
19 « Passe tes mains à l’extérieur, chef. »
20 David Lynch a été peintre avant de devenir cinéaste. Il continue de porter un regard de plasticien dans son travail cinématographique et avoue une fascination pour la texture des corps, dès lors qu’ils cessent d’être vivants :
« Je n’aime pas nécessairement les corps en putréfaction, mais il y a dans un corps en putréfaction une texture incroyable. Avez-vous déjà vu un petit animal en train de pourrir ? J’adore les observer, de même que j’aime regarder de près l’écorce d’un arbre, un petit insecte, une tasse de café ou une part de tarte. En observant de près, on apprécie la subtilité des textures. » Mon histoire vraie, op. cit., p. 113.
21 « Quelque chose ne va pas ? »
22 « Vous dormez bien ? »
23 « Non, je n’arrive pas à dormir. »
24 « Vous allez dormir maintenant. »
25 « Ramenez-le en cellule. »
26 « Merde ! Le type qui a tué sa femme a l’air plutôt flippé. »
27 « Lequel ? »
28 « J’ai fait un rêve la nuit dernière… »
29 « Tu étais dans la maison… »
30 « Tu m’appelais… »
31 « Je ne te trouvais pas… »
32 « Et te voilà allongée dans le lit. Ce n’était pas toi. Cela ressemblait à toi. »
33 « Mais ce n’était pas toi… »
34 « Le caractère esthétique se révèle toujours par les mêmes signes : il est créé consciemment pour libérer la perception de l’automatisme ; sa vision représente le but du créateur et elle est construite artificiellement, de manière à ce que la perception s’arrête sur elle et arrive au maximum de sa force et de sa durée. » « L’art comme procédé », cité par T. Todorov, Théorie de la littérature, Paris, Seuil, p. 76-97.
35 On ne peut manquer d’évoquer, à ce propos, Eraserhead, bien évidemment, mais aussi Elephant man, ou encore la famille à tête de lapin d’Inland Empire. Nous reviendrons plus en détail, en troisième partie, sur l’apparition monstrueuse de l’homme innommable, dans Mulholland Drive, car il est clairement associé à la logique du rêve.
36 Le troisième chapitre reviendra longuement sur cette question.
37 Chez cet auteur, le concept de « figural » est en intime relation avec le désir au sens freudien. Ainsi le figural résulte-t-il des traces que laisse l’énergie du désir dans les objets artistiques. Le désir « déconstruit » la mimèsis en faisant apparaître une modalité poétique de la figure selon trois modalités : la « figure-image », qui révèle le désir comme transgression d’une figuration mimétique traditionnelle, la « figure-forme », qui porte atteinte à la possibilité même de la figuration, et enfin la « figure-matrice ». L’intérêt de cette analyse réside dans l’affirmation d’une force poétique plastique autonome par rapport à la mimèsis. Nous ne rentrerons pas dans la question de savoir s’il faut l’interpréter, c’est-à-dire la mettre en regard avec les formes fantasmées du désir.
38 Jacques Aumont le définit ainsi : « Le figural, c’est donc dans l’image <…> ce qui vit sa vie, de manière inattendue, irréductible à toute narration et à toute représentation, la part d’opsis pure de toute mimesis. » Matière d’image, redux, Paris, La Différence, 2009, p. 25.