1 J. W. Goethe, Die Leiden des jungen Werther, Reclam Ausgabe, Stuttgart 1986/ Les souffrances du jeune Werther, Le livre de poche, [Traduction de P. Leroux revue par C. Helmreich, introduction et notes par C. Helmreich], Paris 1999, p. 20. [Toutes les traductions françaises de ce chapitre se réfèrent à cette édition].
2 On pourrait analyser dans un travail ultérieur l’idée d’énergie en littérature à la lumière de la pièce de Goethe Götz von Berlichingen ; le personnage éponyme de la pièce illustre l’entropie qui menace tout usage mal contrôlé de l’énergie, la perte progressive d’énergie – symbolisée notamment par sa mutilation – et l’énergie destructrice, notamment à l’acte V où est évoquée la Guerre des paysans. Ce texte, déployant une idée de l’énergie négative et destructrice, n’a pas été pris en compte dans ce travail, essentiellement centré sur « l’adret » de l’idée d’énergie.
3 Christian Helmreich : « Werther est en quelque sorte le roman de la contrariété, roman exemplaire de l’opposition entre la ‘poésie du cœur’ et ‘la prose des conditions réelles’ qui, selon Hegel, définit le roman moderne. » In : Goethe, Les souffrances du jeune Werther, p. 20.
4 Pierre Bertaux : « La publication de Werther est un événement, au-delà même de la seule histoire littéraire. C’est une date de la civilisation européenne […] Au moment où, partis de considérations bien différentes, le despote éclairé et le philosophe inconnu se rejoignent pour constater la non-existence et même l’impossibilité d’une littérature romanesque de langue allemande, précisément en cette année 1774, la littérature allemande fait sur la scène de la République universelle des Lettres une entrée fracassante, accédant d’emblée au premier rang, à côté de l’anglaise et de la française. Cette percée décisive, cet avènement a nom Werther. » In : Goethe, Die Leiden des jungen Werther/Les souffrances du jeune Werther, Édition bilingue, Gallimard, Paris 1990, « Préface », p. 9 et 14.
5 Richard Alewyn : « Klopstock ! » In : Euphorion, Bd 73, 4. Heft, Carl Winter Universitätsverlag, Heidelberg 1979, p. 357-364 ; Bruce Duncan : « ‘Emilia Galotti lag auf dem Pult aufgeschlagen’ : Werther as (Mis-)Reader » In : Goethe Yearbook 1, 1982, p. 42-50.
6 Jacques Voisine : « Des ‘délices du sentiment‘ au ‘roman de formation’. L’influence de La Nouvelle Héloïse sur la génération de Werther » In : Études Germaniques 4, oct-déc. 1950, p. 120-133.
7 Yves Chevrel : « Le ‘mythe de Werther’ dans la littérature européenne : une expérience des limites ? » In : Actes du XIIe Congrès de l’Association Internationale de Littérature Comparée, Volume 4, Munich 1988, p. 337-344 ; Erdmann Waniek : « Werther lesen und Werther als Leser », Goethe Yearbook 1, 1982, p. 51-92 ; Peter Pütz : « Werthers Leiden an der Literatur » In : Goethes’ Narrative Fiction. The Irvine Goethe Symposium [Edited by William J. Lillyman], Walter de Gruyter, Berlin/New-York 1983, p. 55-68.
8 Hans-Heinrich Reuter : « Der gekreuzigte Prometheus : Goethes Roman Die Leiden des jungen Werthers » In : Goethe Jahrbuch, Bd 89, 1972, p. 86-115 ; Herbert Schöffler : « Die Leiden des jungen Werther. Ihr geistesgeschichtlicher Hintergrund » In : Wissenschaft und Gegenwart 12, Vittorio Klostermann, Frankfurt/Main 1938, p. 5-35.
9 K. Rothmann : « James Macpherson (1736-1796), professeur à Edimbourg, écrivit des poèmes de 1761 à 1765 en ayant recours à de vieilles légendes ou ballades populaires irlandaises et écossaises, à des chants héroïques qu’il fit passer pour des traductions d’anciens fragments gaeliques. On crut longtemps qu’un poète lyrique appelé Ossian était l’auteur de ces textes. » In : Kleine Geschichte der deutschen Literatur, p. 103.
10 C. Helmreich : « Cette hypertrophie de la passion est déjà inscrite dans le titre : l’histoire sera centrée non pas sur les actions de Werther, mais sur ce qu’il endure, sur les sentiments qui l’agitent. Le protagoniste du roman de Goethe apparaît moins comme un élément actif que comme un personnage passif. », p. 8.
11 J. W. Goethe : « Je me sens mal en l’écrivant et je crains d’éprouver à nouveau l’état pathologique dont il est issu. » In : Conversations avec Eckermann, « 2 janvier 1824 », p. 91.
12 Lettre du 20 juillet 1771 : « Ma mère, dis-tu, voudrait me voir une occupation : cela m’a fait rire. Ne suis-je donc pas occupé à présent ? », p. 84.
13 C. Helmreich : « À plusieurs reprises, il fuit les lieux où il pourrait rester sédentaire. Contradiction du caractère de Werther : un nomade qui désire la stabilité. », p. 15.
14 Lettre du 4 mai 1771, p. 41.
15 Lettre du 11 juin 1772, p. 127.
16 En allemand, « das Heim » signifie « le foyer, le chez-soi » et « die Wahl » signifie « le choix ».
17 Lettre du 4 mai 1771, p. 7.
18 Lettre du 26 mai 1771, p. 51.
19 Lettre du 16 juin 1772 : « Oui, sans doute, je ne suis qu’un voyageur, un pèlerin sur la terre ! », p. 128.
20 Lettre du 22 août 1771, p. 101.
21 Nous empruntons ce terme à Pierre Bertaux.
22 Lettre du 24 décembre 1771, « Ce qui me vexe le plus, ce sont ces misérables distinctions sociales. », p. 114.
23 Roland Barthes : « Ce que l’amour dénude en moi, c’est l’énergie. » In : Fragments d’un discours amoureux, « L’Intraitable », Seuil, Paris 1977, p. 30.
24 Dans la lettre du 13 mai, Werther écrit « […] ce cœur fermente assez de lui-même », p. 45 ; ou plus loin « Je traite mon cœur comme un petit enfant malade. Ne le dis à personne, il y a des gens qui m’en feraient un crime. », p. 46.
25 C. Helmreich : « La description que Werther donne du jardin « fort simple » indique qu’il s’agit d’un jardin à l’anglaise. Le goût du jardin paysager (landscape garden) commence en effet à se répandre sur le continent à partir de 1760. L’apparente liberté de ce type de jardin, réputé plus naturel, s’oppose à la construction géométrique (Werther se défie des « dessinateurs savants ») du jardin classique, à la française. », p. 42.
26 J. Möser, p. 13-14.
27 Alain Finkielkraut, Un cœur intelligent. Lectures. Éditions Stock/Flammarion, Paris 2009. Dans la lettre du 4 mai 1771, on lit : « Ce jardin est fort simple ; on sent dès l’entrée que ce n’est pas l’ouvrage d’un dessinateur savant, mais que le plan en a été tracé par une âme sensible désireuse d’y jouir de son reflet. », p. 42.
28 Lettre du 29 juin 1771, p. 71. Notons ici que C. F. D. Schubart emploie lui aussi le terme « Drahtpuppe » (poupée en fil de fer) pour désigner les précepteurs auxquels la noblesse confie l’éducation de ses enfants : « J’ai vu à quelle sorte de misérables gens notre noblesse confie l’éducation de ses enfants. Le gaillard n’a qu’à être une poupée en fil de fer (« Drahtpuppe »), se pavaner dans des habits à la mode, avoir des cheveux bien bouclés, applaudir aux bêtises d’un maître de maison paternaliste, lire à la maîtresse de maison un conte de fées à la table de la cuisine et fréquenter sa femme de chambre et il passera pour le meilleur précepteur du monde […]. » In : « Chronik 1774 », 75 Stück, 29 septembre, p. 24.
29 R. Barthes, op. cit., « Tutti sistemati », p. 55.
30 Lettre du 22 mai 1771 : « […] quelque bornée que soit sa puissance, il entretient dans son cœur le doux sentiment de la liberté ; il sait qu’il peut quitter ce cachot quand il lui plaira. », p. 50. L’image du cachot et du carcan est récurrente chez Herder comme chez Goethe et s’inscrit dans une opposition à l’apologie que les deux auteurs font de la Nature qui n’est pas, comme l’art, enfermée dans l’artifice des règles.
31 Lettre du 12 décembre 1772 : « Ah ! les bras étendus, j’étais là devant l’abîme, et je brûlais de m’y jeter ! de m’y jeter ! Je me perdais dans l’idée délicieuse d’y précipiter mes tourments, mes souffrances ! de déferler et de mugir comme les vagues ! », p. 159.
32 Comme le rappelle C. Helmreich, l’idylle est antithétique de l’idée d’énergie : « […] l’idylle, on le sait, est avant tout un univers qui proscrit l’excès de mouvement. », p. 15.
33 Rappelons que le cœur est chez Goethe l’organe central à partir duquel toute vie et toute action s’organisent : « Comme le cœur nous intéresse toujours plus que l’esprit et nous donne de l’occupation, quand l’esprit sait bien se tirer d’embarras, les affaires du cœur m’avaient toujours paru les plus importantes. Je ne me lassais pas de méditer sur le caractère passager des amours, l’inconstance des êtres humains, la sensualité morale, sur tout ce qu’il y a d’élevé, de profond, et dont la combinaison dans notre nature peut être considérée comme l’énigme de la vie humaine. » In : Souvenirs de ma vie, « Livre VII », p. 187.
34 Lettre du 21 juin 1771, p. 69.
35 Nous empruntons cette image à l’écrivain voyageur S. Tesson., op. cit., p. 30.
36 Lettre du 17 mai, p. 47.
37 « Il était étendu près de la fenêtre, sur le dos, sans force. Il était entièrement habillé et botté ; en habit bleu, en gilet jaune. », p. 188.
38 Lettre du 9 mai : « […] ce cœur qui fait ma seule fierté et qui est seul la source de tout, de toute force, de tout bonheur et de toute misère. Ah ! Ce que je sais, tout le monde peut le savoir – mais mon cœur n’est qu’à moi. », p. 127.
39 Dans la lettre du 20 décembre 1772, Werther rapporte à Wilhelm ces mots de Charlotte : « Soyez homme ! », p. 163.
40 Lettre du 15 novembre 1772, p. 144.
41 Lettre du 27 octobre 1772 (le soir), p. 140.
42 Lettre du 17 février 1772, p. 119. Notons ici que le verbe « überspannen » – qui signifie « exagérer », mais littéralement aussi « tendre à l’extrême » – a déjà été utilisé par Albert : « Voilà encore de tes extravagances ! dit Albert. Tu exagères tout […] » In : Lettre du 12 août 1771, p. 94.
43 Lettre du 24 décembre 1771, p. 112.
44 R. Barthes : « D’un côté, c’est ne rien dire, de l’autre, c’est dire trop : impossible d’ajuster. Mes envies d’expression oscillent entre le haïku très mat, résumant une énorme situation, et un grand charroi de banalités. Je suis à la fois trop grand et trop faible pour l’écriture : je suis à côté d’elle, qui est toujours serrée, violente, indifférente au moi enfantin qui la sollicite. L’amour a certes partie liée avec mon langage (qui l’entretient), mais il ne peut se loger dans mon écriture. » In : Fragments d’un discours amoureux, « Inexprimable amour », p. 113.
45 C. Jürgensen/I. Irsigler : « À cette aliénation par la culture, Werther oppose l’autonomie de la nature absolue. » In : Sturm und Drang, p. 63. (en italique dans le texte)
46 Lettre du 10 septembre 1771, p. 107.
47 Lettre du 24 juillet 1771, p. 84.
48 Lettre du 16 juin 1771, p. 57-67.
49 Pierre Grappin : « On n’imite plus la nature, on l’aime ; on ne la copie plus, on communie avec elle. Le divorce est total entre les « règles », c’est-à-dire la poétique du siècle passé et le « génie » qui n’a d’autre règle que son bon plaisir. » In : La théorie du génie dans le préclassicisme allemand, PUF 1952, p. 15.
50 Lettre du 17 mai 1771, p. 48.
51 Ibid., p. 48.
52 Lettre du 26 mai 1771 : « O mes amis ! pourquoi le torrent du génie déborde-t-il si rarement ? pourquoi si rarement soulève-t-il ses flots et vient-il secouer vos âmes surprises ? », p. 52.
53 Lettre du 26 mai 1771, p. 67.
54 Lettre du 16 juin 1771, p. 67.
55 Lettre du 26 mai 1771, p. 52.
56 Lettre du 22 mai 1771, p. 49.
57 Lettre du 16 juin 1771, p. 63.
58 Lettre du 1er juillet 1771, p. 75.
59 Werther compare dans cette lettre les lois à de froids pédants.
60 Lettre du 12 août 1771, p. 91.
61 Lettre du 20 octobre 1771, p. 110.
62 Lettre du 6 décembre 1772, p. 152.
63 Lettre du 20 décembre 1772 : « Werther […] seulement modérez-vous ! Oh ! pourquoi êtes-vous né avec cet emportement, avec cette passion indomptable que vous mettez à tout ce que vous faites ! Je vous en prie, ajouta-t-elle en lui prenant la main, modérez-vous ! », p. 163.
64 Lettre du 12 août, p. 95.
65 Lettre du 12 août 1771 : « […] bis seine Kräfte sich erholt, seine Säfte sich verbessert. », p. 58.
66 Lettre du 17 mai, p. 47.
67 Lettre du 22 mai, p. 49.
68 Julien Gracq : « Et c’est par là que le panthéisme naturaliste à peine dissimulé qui fait le climat du livre donne un retentissement, une profondeur admirable à ce fait-divers bourgeois d’une petite campagne. » In : En lisant, en écrivant, « Allemagne », José Corti, Paris 1981, p. 226.
69 J. W. Goethe, Gedichte, « Ganymed », p. 37.
70 Lettre du 10 mai 1771, p. 43-44.
71 Le panthéisme goethéen et l’idée du Dieu-Nature sont évoqués dès le livre premier de son récit autobiographique : « Le Dieu qui est en relation directe avec la nature, qui la reconnaît et qui l’aime comme son ouvrage, c’est celui-là qui lui paraissait le Dieu véritable, qui peut entrer en rapport plus intime avec l’homme, comme avec tout le reste, et qui veillera sur lui comme sur le mouvement des étoiles, sur les heures du jour et les saisons de l’année, sur les plantes et les animaux. » In : Souvenirs de ma vie, « Livre I », p. 34.
72 P. Pénisson, Johann Gottfried Herder. La raison dans les peuples, p. 86.
73 Lettre du 18 août 1771, p. 100-101.
74 À cet égard, Christian Helmreich voit dans l’acerbe critique de la société qui parcourt le roman une coloration très fortement prérévolutionnaire.
75 J. W. Goethe : « Si les enfants continuaient à se développer comme ils s’annoncent, nous n’aurions que des génies : mais la croissance n’est pas un simple développement ; les divers systèmes organiques, qui composent l’unité de l’homme, sortent les uns des autres, se succèdent les uns aux autres, se transforment les uns dans les autres, se supplantent et même se dévorent les uns les autres, en sorte que, de certaines facultés, de certaines manifestations de forces, il reste, au bout de quelque temps, à peine trace. Lors même que les dispositions de l’homme ont, dans leur ensemble, une orientation décisive, il est néanmoins difficile au connaisseur le plus habile et le plus expérimenté de le prédire d’avance avec certitude, mais, après coup, il est très possible de signaler ce qui a été une indication de l’avenir. » In : Souvenirs de ma vie, « Livre II », p. 52.