1 A. Deissmann, Licht vom Osten. Das neue Testament und die neuentdeckten Texte der hellenistisch-römischen Welt, Tübingen, Mohr, 1908, p. 195-196.
2 R. Jakobson (« Closing statements: Linguistics and poetics », dans T. A. Sebeok (éd.), Style in language, Cambridge, MIT Press, 1960, p. 353) perçoit les fonctions réferentielle, expressive, conative ou impressive, poétique, phatique et métalinguistique.
3 Nous pensons à tous les tropes ou figures de style, telles la comparaison, la métaphore ou encore la métonymie, que la critique moderne s’est plu à reconnaître, au sein des œuvres modernes notamment, et à catégoriser (voir R. Jakobson, « Closing statements », p. 356).
4 Au sujet de la littérarité de l’épître par rapport à la lettre, voir également G. Luck, « Brief und Epistel in der Antike », Altertum, 1961, n° 7, p. 77.
5 Voir P. A. Rosenmeyer, Ancient epistolary fictions. The letter in Greek literature, New York, Cambridge University Press, 2001, p. 6-7.
6 Il ressort des développements d’A. Deissmann sur le sujet la mise en exergue de trois concepts sur la base desquels s’opère la distinction entre la lettre et l’épître : le concept d’auteur, le concept de style et le concept de durée. La lettre est rédigée dans un cadre privé (auteur), ne se soucie pas de son aspect formel (style) et relève d’une occasion précise, d’un événement ponctuel (durée). L’épître tend à s’inscrire dans la sphère du public, se déploie avec art et échappe généralement à la temporalité du réel.
7 Voir K. Thraede, Grundzüge griechisch-römischer Brieftopik, Münich, Beck, 1970, p. 39, qui signale que les Grecs nomment ce motif épistolaire ὡς παρών, que les Latins désignent par la locution quasi praesens.
8 Eloc., 223-226.
9 L’emploi du terme « lettre » n’induit ici aucune différenciation entre la lettre et l’épître et renvoie indistinctement à tout écrit de facture épistolaire, quel que soit son degré de littérarité. Précisons que cette différenciation est étrangère aux Anciens.
10 Ouvrage mentionné par P. A. Rosenmeyer (Ancient epistolary fictions, p. 9), auquel nous n’avons pas eu directement accès.
11 P. A. Rosenmeyer, Ancient epistolary fictions, p. 11.
12 Voir M. B. Trapp, Greek and Latin letters: An anthology, with translation, Cambridge, University Press, 2003, p. 42.
13 Au sujet de l’attribution du Περὶ ἑρμηνείας, dont on a fait l’œuvre de Démétrios de Phalère vers 270 avant J.-C., de Démétrios de Syrie à la fin du IIe siècle avant J.-C. ou qu’on a encore placé au IIe après J.-C., voir P. Chiron (éd.), Démétrios de Phalère. Du style, Paris, Les Belles Lettres, 1993, p. xiii-xiv.
14 Cf. Eloc., 230.
15 « Aristote emploie parfois des démonstrations, mais sur un mode épistolaire. Par exemple, voulant enseigner qu’il faut rendre service autant aux grandes qu’aux petites cités, il dit : Les dieux sont égaux dans les deux cités ; aussi, puisque les Grâces sont des déesses, grâces égales te seront rendues dans les deux cités. Le point démontré convient à une lettre, et la démonstration aussi. » (Eloc., 233).
16 Cf. Eloc., 228.
17 Cf. Eloc., 235.
18 P.-L. Malosse, Lettres pour toutes circonstances : les traités épistolaires du Pseudo-Libanios et du Pseudo-Démétrios de Phalère, Paris, Les Belles Lettres, 2004, p. 11-12.
19 Les épîtres horatiennes composant le livre I sont rédigées sur ce modèle.
20 Au sujet de la présence et du développement de ces trois notions de φιλοφρόνησις, de παρουσία et d’ὁμιλία chez les théoriciens grecs, voir H. Koskenniemi, Studien zur Idee und Phraseologie des griechischen Briefes bis 400 n. Chr., Helsinki, 1956, p. 35 sqq.
21 P. Cugusi, « L’epistolografia. Modelli e tipologie di communicazione », dans G. Cavallo et al., Lo spazio letterario di Roma antica. II, La circolazione del testo, Rome, Salerno, 1989-1991, p. 383-384.
22 La fonction phatique intervient dans l’établissement, le maintien ou l’interruption du contact physique et psychologique avec le récepteur du message (voir R. Jakobson, « Closing statements », p. 355). Pour ce qui concerne les formules introductives, le verbe χαίρειν est le plus souvent convoqué dans les lettres grecques, l’expression salutem dicere ou dare dans les lettres latines. En conclusion, on trouve régulièrement ἔρρωσο au sein des premières, uale dans les secondes.
23 Voir S. K. Stowers, Letter writing in Greco-Roman Antiquity, Philadelphie, Westminster Press, 1986, p. 56.
24 Voir P.-L. Malosse, Lettres pour toutes circonstances, p. 13, qui trouve une attestation claire de cette entrée dans un passage des Προγυμνάσματα d’Aelius Théon.
25 Voir G. Luck, « Brief und Epistel in der Antike », p. 79.
26 Voir D. R. Langslow, « The Epistula in ancient scientific and technical literature, with special reference to medicine », dans R. Morello et A. D. Morrison (éds), Ancient letters. Classical and late antique epistolography, Oxford, University Press, 2007, p. 224-225.
27 Au sujet du Πρὸς Πραξιφάνην de Callimaque, voir A. Rostagni, Arte poetica di Orazio, p. 12-13. Le philologue italien pointe en la personne de Callimaque une influence possible sur le choix horatien de l’épître dans le but de délivrer un discours d’ordre poétologique. Il ajoute néanmoins que c’est sans doute Philodème de Gadara qui a le plus influé sur ce choix, non que le penseur épicurien soit lui-même l’auteur d’épîtres, mais les discussions menées à Naples au sein du cénacle littéraire réuni par ses soins ont dû avoir un impact décisif sur Horace, l’invitant à privilégier un genre proche du dialogue.
28 Voir H. W. G. Peter (Der Brief in der römischen Literatur, Leipzig, Teubner, 1901, p. 218) qui, s’appuyant sur un passage du De grammaticis et rhetoribus de Suétone (IV, 3), cite l’exemple d’une lettre de Messalla Corvinus portant sur l’équivalence sémantique du mot latin litterator et du terme grec γραμματικός pour illustrer l’habitude d’un tel procédé à Rome sous l’ère augustéenne.
29 La Lettre à Hérodote expose la physique du maître, la Lettre à Pythoclès traite d’astronomie et la Lettre à Ménécée révèle les conditions de la vie heureuse (voir B. Inwood, « The importance of form in Seneca’s philosophical letters », dans R. Morello et A. D. Morrison (éds), Ancient letters. Classical and late antique epistolography, Oxford, University Press, 2007, p. 143).
30 « Épicure à Pythoclès, salut.
Cléon m’a apporté une lettre de toi, dans laquelle tu demeures en amitié avec nous, juste retour de notre intérêt pour toi ; tu essaies, non sans succès, de te rappeler les raisonnements qui tendent à la vie heureuse, et enfin tu me demandes de t’envoyer, au sujet des météores, un exposé concis et récapitulatif, afin de t’en souvenir facilement (…). Quant à nous, nous avons reçu ta demande avec plaisir, et nous en avons conçu d’agréables espérances. Aussi, après avoir écrit tout le reste, je complète, comme tu l’as demandé, par cet exposé sommaire, qui doit être utile aussi à beaucoup d’autres, et surtout à ceux qui n’ont que récemment goûté à l’authentique science de la nature, et à ceux qui sont pris trop profondément dans le cercle de quelqu’une des occupations courantes. Tâche donc de bien saisir ce qui suit, et, le tenant en mémoire, fais-en l’objet d’une étude diligente, ensemble avec les autres points traités dans le petit abrégé envoyé à Hérodote. » (Ep. Pyth., 84-85 ; traduction de M. Conche (Épicure. Lettres et Maximes, Paris, PUF, 1987)).
31 Si la posture d’Épicure à l’égard de Pythoclès diffère de celle de Cicéron vis-à-vis de M. Brutus, le destinataire attitré de l’Orator, que le rhétoricien ne considère pas comme l’un de ses disciples mais plutôt comme son égal sur le plan de l’autorité intellectuelle, les conclusions des deux œuvres exhibent entre elles de frappantes similitudes du point de vue de la stratégie énonciative (cf. Ep. Pyth., 116 et Orat., 237-238).
32 Au sujet de cette tradition épicurienne de l’épître philosophique, voir R. K. Gibson et A. D. Morrison, « Introduction: What is a letter ? », dans R. Morello et A. D. Morrison (éds), Ancient letters. Classical and late antique epistolography, Oxford, University Press, 2007, p. 9.
33 À propos de l’influence d’Épicure sur Sénèque, voir B. Inwood, « The importance of form », p. 136.
34 Sénèque convient lui-même de la longueur de sa lettre au moment où il s’apprête à y mettre un terme (cf. Epist., VI, 58, 37).
35 Cf. Sen., Epist., VI, 61, où l’épistolier expose la conception stoïcienne de la vieillesse et de la mort en s’impliquant personnellement dans la réflexion.
36 « S’il pouvait nous être donné de pénétrer du regard l’âme de l’homme de bien, quel air de beauté en elle, de sainteté, quel effet lumineux de majesté paisible se manifesteraient à nous, la justice, le courage, la tempérance, et la prudence faisant le jour autour d’elle de tous côtés. (…) Si quelqu’un voyait cette grandiose, cette éclatante figure sans parallèle dans l’ordre familier à nos yeux des choses humaines, ne demeurerait-il pas, comme à l’apparition d’une divinité, frappé d’extase, immobile ; ne la supplierait-il pas en son cœur de “se laisser voir impunément” ? Puis, enhardi, – simplement par l’expression d’engageante bonté répandue sur ses traits, – ne se mettrait-il pas à l’adorer, à la prier ; et, après avoir longtemps contemplé cette sublime prestance, hors de mesure avec tout ce qu’il voit parmi nous, ce regard d’une si singulière douceur où brûle néanmoins une flamme si vive, alors enfin dans son religieux enthousiasme, ne pousserait-il pas ce cri, celui de notre Virgile : “Ah, quel nom te donner, vierge ? Car tes traits ne sont pas ceux d’une mortelle ; ta voix ne sonne pas comme une voix humaine. Montre-toi favorable et, qui que tu sois, allège le poids de nos travaux.” » (Sen., Epist., XIX, 115, 3-5).
37 Voir R. G. Coleman, « The artful moralist: A study of Seneca’s epistolary style », Classical quarterly, 1974, n° 24, p. 285-286.
38 Cf. Sen., Epist., XIX, 115, 8-9.
39 L’intérêt que les poètes latins portent à la forme épistolaire semble remonter au milieu du IIe siècle avant J.-C., Cicéron rapportant l’écriture par Spurius Mummius de lettres satiriques en vers (cf. Att., XIII, 6, 4) ; à ce sujet, voir L. Vaillancourt, La lettre familière au XVIe siècle. Rhétorique humaniste de l’épistolaire, Paris, Champion, 2003, p. 48.
40 Deux observations doivent ici être faites. D’abord, les six dernières lettres du recueil imaginent un échange épistolaire entre les héros mis en scène, ce que ne proposent pas les quinze premières pièces, toutes unilatéralement adressées au héros masculin. Ainsi, Pâris écrit à Hélène, Léandre à Héro, Acontius à Cydippe, et chacun reçoit la réponse de la femme aimée ; de ce fait, trois couples de lettres terminent le recueil. Il convient également de préciser que tous les personnages ne sont pas empruntés à l’univers du mythe, puisque la quinzième Héroïde est adressée par Sappho à Phaon.
41 Voir à ce sujet l’ouvrage de J.-C. Jolivet Allusion et fiction épistolaire dans les Héroïdes : recherches sur l’intertextualité ovidienne (Rome, École Française, 2001).
42 « Ce que tu lis, Thésée, je te l’envoie de ce rivage, d’où, sans moi, tes voiles emportèrent ton navire, où je fus indignement trahie et par mon funeste sommeil et par toi, qui tendis un piège à mon sommeil. » (Ov., Epist., X, 3-5).
43 Les Pontiques, autre recueil épistolaire ovidien, présentent aussi un caractère poétique évident, mais sont bel et bien sous-tendues par une situation de communication, toujours la même, en prise directe avec la réalité : l’exil du poète à Tomes, sur les bords du Pont-Euxin.