Chapitre 1 : Les excès hydrologiques : processus, rythmes et impacts anthropiques
p. 21-53
Texte intégral
1L’inondation peut-être définie comme "un phénomène de submersion temporaire, naturelle ou artificielle, d’un espace terrestre". Face au danger réel ou potentiel, l’enjeu est donc de définir, avec le plus de précision possible, l’étendue des périmètres inondés, en vue d’intégrer l’aléa dans notre mode d’habiter l’espace. La mise en carte est l’une des démarches privilégiées pour assurer un inventaire des espaces à risque et conduire une politique de prévention ancrée sur la sensibilisation des habitants.
1. L’aléa inondation en chiffre et en carte
2L’aléa inondation, qui affecte près de 4 % du territoire national, se réparti le long des 280 000 km de cours d’eau dans l’ensemble du pays (IFEN, 2002). Un linéaire de 16 400 km est directement exposé quels que soient les régimes hydrologiques et les régions concernés. Le phénomène concerne une commune française sur trois (environ 24 000 communes) et peut ainsi toucher près de deux millions de riverains, directement exposés aux inondations. 300 villes importantes parmi lesquelles Paris, Lyon, Marseille, Bordeaux, Strasbourg, Tours, Nancy, Metz, Nîmes ou encore Montpellier, sont par ailleurs sous la menace d’inondations potentielles. L’extension probable de l’aléa a été estimée à environ 24 000 km² dont 800 km² en zone urbaine.
1.1. Une grande variabilité temporelle des inondations
3L’inventaire des communes déclarées en état de catastrophe naturelle suite à une inondation révèle une grande variabilité temporelle des inondations. Au cours de la période 1992-2003, les années 1983 et 1999 apparaissent ainsi particulièrement sensibles. En effet, de mars à mai 1983, de nombreux et importants débordements ont touché l’est de la France, entraînant dans les flots plus de 10 victimes. Plus encore, l’année 1999 enregistre dans tous le pays un grand nombre d’événements extrêmes, notamment au cours des mois de novembre et décembre : inondations violentes du 12 au 14 novembre dans l’Aude, les Pyrénées orientales, l’Hérault, l’Aveyron et le Tarn affectant 438 communes et provoquant la mort de 36 personnes ; importants dégâts suite au passage du cyclone tropical Lenny sur la Guadeloupe et la Martinique du 17 au 19 novembre 1999 ; débordement affectant le nord de la France du 25 au 29 décembre alors que les tempêtes sévissent à deux reprises au nord comme au sud du pays le 26 puis le 27/28 décembre.
4Une analyse plus fine conduite par l’IFEN sous la forme d’une chronique journalière du nombre de communes en état de catastrophe naturelle établie à l’échelle annuelle pour l’ensemble du territoire français montre, à travers l’exemple de l’année 2001, une forte variabilité saisonnière des évènements dommageables.
5Chaque pic peut correspondre à plusieurs inondations touchant chacune plusieurs dizaines de communes, mais distantes, parfois, de plusieurs centaines de kilomètres. Il en est ainsi du pic du 4 au 7 juillet correspondant aux inondations affectant des communes du département de la Corrèze, de la Dordogne, des Hautes-Pyrénées et du Lot, mais également des communes situées en Île-de-France et en Seine-Maritime.
6Les principales périodes dommageables vont :
du 4 au 7 janvier 2001 (337 communes sinistrées le 5 janvier à cause des inondations en Bretagne) ;
du 12 au 15 mars 2001 et du 19 au 30 mars 2001 (inondations sur les bassins Loire-Bretagne, Seine-Normandie et Rhône-Méditerranée-Corse ;
du 4 au 7 juillet 2001 (inondations dans la Corrèze, la Dordogne, les Hautes-Pyrénées et le Lot, ainsi qu’en Île-de-France et en Seine-Maritime) ;
du 6 au 9 octobre 2001 (inondations dans le Gard et dans l’Hérault - à partir du 29 décembre (inondations dans l’est de la France).
7A cours de la même année, les inondations par remontée de nappe sont surtout marquées par l’événement de la Somme qui s’étend surtout du 19 mars au 24 avril, englobant la date du 31 mars qui correspond à l’extension maximale de la nappe dans la vallée.
8Ainsi, le caractère aléatoire des inondations tient dans la variabilité naturelle des apports pluviométriques qui composent le paysage climatique de la France. L’irrégularité est en effet l’une des facettes, souvent mal comprise, du climat méditerranéen mais aussi du climat tempéré océanique, considéré à tort comme modéré. Qui plus est, cette variabilité temporelle climatique et hydrologique se double d’une forte hétérogénéité spatiale.
1.2. Une forte hétérogénéité spatiale
9La cartographie des occurrences1 d’inondation par département révèle par ailleurs une forte hétérogénéité spatiale à l’échelle nationale. Tous les départements français ont été concernés par des arrêtés d’indemnisation faisant suite à des inondations depuis la loi de 1982. Cependant, les départements du centre et centre-ouest de la France ont enregistré moins d’arrêtés. Le nombre des occurrences par département dépend du nombre de communes concernées dans le département comme de la fréquence des catastrophes. Si l’on s’en réfère à l’IFEN, trois départements cumulent les deux « handicaps » : la Seine-Saint-Denis, les Alpes-Maritimes et le Val-de-Marne, départements où 96 à 100 % des communes ont été touchées de façon récurrente, avec plus de 6 occurrences par commune (la moyenne nationale est de 2,7 occurrences par commune ayant fait l’objet d’un arrêté). A l’inverse, le centre de l’hexagone et le sud-est apparaissent moins exposés (IFEN, 2002). Deux facteurs expliquent donc cette hétérogénéité : d’une part la répartition spatiale des pluies intenses ou de longue durée qui est proche de celle des occurrences représentées sur la carte, d’autre part la localisation géographique de l’emprise urbaine qui accentue le nombre d’occurrence de certains départements.
10Les communes touchées de façon récurrente, cumulant ainsi le plus grand nombre d’occurrences, sont essentiellement situées dans les départements très urbanisés de la couronne parisienne ou du pourtour méditerranéen, mais aussi dans les Ardennes, l’Isère et le Maine-et-Loire ainsi que dans le sud de la Bretagne. Le département de Seine-Saint-Denis, particulièrement sensible au ruissellement urbain cumule un fort nombre d’occurrences par commune (5,5 en moyenne pour la période 1982-2001) sur l’ensemble de ses quarante communes. Enfin, certains départements (l’Ariège, la Charente-Maritime, la Saône-et-Loire, la Seine-et-Marne, la Vienne et la Seine-Saint-Denis ainsi que la Martinique et la Réunion) ont vu, depuis 1982, toutes leurs communes sinistrées au moins une fois par des inondations.
11La cartographie de l’aléa, menée aux échelles fines des vallées inondables, exprime aussi une forte hétérogénéité intrarégionale comme au sein même des vallées sujettes aux inondations.
12Les exemples tirés des applications conduites par la DIREN, l’Agence de l’Eau Artois-Picardie et le Conseil Régional du Nord-Pas-de-Calais dans le cadre de la politique d’information sur le risque d’inondation en témoignent.
13Les critères traditionnellement sélectionnés pour définir les niveaux de l’aléa sont :
la fréquence, définissant différentes zones d’extension des inondations en fonction de leur période de retour ;
la vitesse, dans la mesure où de son niveau dépend la capacité d’entraînement, de sapement de berges ou de piles de ponts et la destruction d’habitations par les flots de crue2 ;
la hauteur, parce qu’elle est un des facteurs qui détermine l’importance des dommages ;
la durée de l’inondation qui joue également sur l’ampleur des dommages tant matériels (dégâts agricoles, dommages mobiliers et immobiliers) que psychologiques.
14La crue de référence retenue dans le Nord-Pas-de-Calais est la crue centennale3 à défaut de référent historique important dans la région par manque d’information ou l’existence d’informations obsolètes en raison d’une profonde artificialisation des écoulements. Le niveau d’aléa a été défini à partir des hauteurs et des durées de submersion, les vitesses étant dans ce cas un critère secondaire pour la plupart des cours d’eau (impacts négligeables), à l’exception des fleuves côtiers du Boulonnais et des rivières plus véloces de l’Avesnois.
15Il ressort de cette analyse que les trois quarts des vallées inondables sont définis par un aléa fort à très fort sur plus de 50 % de leur surface inondable. La Liane, qui présente le plus fort débit spécifique de la région et les crues les plus rapides, est considérée comme la rivière présentant l’aléa centennal le plus faible, les critères déterminants l’aléa étant la durée et la hauteur d’inondation et non la puissance et la rapidité des vitesses d’écoulement. A l’inverse, la rivière Canche, caractérisée par de faibles débits de crue, présente, en situation d’inondation centennale, un aléa fort en raison de la longue période d’inondation qu’elle engendre (supérieure à 15 jours en beaucoup d’endroits) et des hauteurs d’eau observées.
16Cette approche cartographique et modélisatrice est teintée parfois d’incertitudes. M. Dacharry rappelle ainsi qu’une erreur d’estimation des hauteurs d’eau de un ou plusieurs centimètres, en plus ou en moins, peut avoir, dans le cas d’une vallée très évasée et plate, des conséquences parfois significatives au niveau de l’extension de l’aléa. Le degré de précision du périmètre inondé reste en effet très dépendant des données de base à partir desquelles l’analyse hydrologique et la modélisation hydraulique ont été conduites (qualité des informations hydrométriques, qualité du fond topographique). La non prise en compte ou la mauvaise appréciation dans les modélisations de processus ou de facteurs comme la présence de digues, l’influence de la montée de nappe ou l’ampleur et l’impact de la marée pour les plaines littorales, peuvent être également sources d’erreurs. Aussi, du point de vue du concepteur, la carte des risques d’inondation, informative ou réglementaire, est souvent présentée comme une construction rassemblant des données partielles issues de mesures et de modélisations traduites sous une forme graphique après un long travail critique des données. Elle reste un document perfectible qui nécessite un contrôle dans le temps par l’analyse des inondations à venir. Par contre, du point de vue du lecteur, extérieur au processus d’élaboration, elle est généralement perçue comme un document achevé, une image de la réalité dont les échafaudages scientifiques ont disparu (Dagorne et Dars, 1999). Elle est donc forcément sujette à la critique lorsque des évènements postérieurs à son élaboration contredisent certaines des limites inscrites dans les cartes mais également au moment de leur élaboration lorsque l’objectif de la carte est d’assurer, par la voie réglementaire, la prévention des biens et des personnes. Dans le cadre d’une démarche réglementaire comme les Plans de Prévention des Risques (PPR), ces erreurs réelles ou potentielles sont alors utilisées comme prétexte, par certains élus qui s’opposent à la régulation des modes d’occupation du sol des zones inondables de leur commune comme par certains acteurs privés qui rejettent les servitudes (interdiction de construire ou autorisation de construire dans certaines conditions) appliquées à leurs propriétés, pour dénoncer les règles qui s’imposent à eux.
17Au-delà de l’approche cartographique qui permet, à partir de l’inventaire de l’aléa, de conduire une politique de gestion des vallées inondables, le projet politique de prévention est également de minimiser l’ampleur des inondations en élargissant le champs d’intervention technique aux zones productrices de l’écoulement : les versants. En effet, parce que l’inondation est liée à un enchaînement de processus, dont les précipitations constituent le plus souvent le point de départ, c’est donc le cheminement de l’eau qu’il faut suivre au sein d’un bassin versant pour comprendre la naissance de ces phénomènes et éventuellement tenter d’en limiter les effets. Mais l’élévation temporaire des eaux marines, au passage d’une dépression très creusée, est également susceptible d’envahir les plaines littorales. Autant des facteurs qu’il convient d’analyser pour saisir, avec le plus de justesse possible, la passionnante histoire de la formation des inondations.
2. L’inondation comme processus naturel
18A l’exception des rares, mais bien souvent catastrophiques conséquences hydrologiques et humaines liées aux mouvements de terrains, aux ruptures de barrages et aux inondations marines, les inondations des vallées et plaines de France sont essentiellement dépendantes de pluies intenses ou prolongées parfois concomitantes à la fonte du stock neigeux constitué en hiver sur les massifs montagneux voire sur les plaines et plateaux.
19Les processus de transfert des eaux à l’échelle des versants et des bassins versants constituent alors le moteur des inondations. La variabilité spatiale et temporelle de ces processus contribue aussi à la diversité des inondations à l’échelle du territoire français. Or l’enjeu d’une politique de gestion des extrêmes est d’appréhender la diversité du fonctionnement des hydrosystèmes de manière à adapter les modes opératoires de gestion du risque aux situations locales. Autrement dit, les crues de la Somme, lentes et durables (montée des eaux en plusieurs semaines et décrue dépassant parfois 1 mois) ne peuvent être gérées comme celles de l’Ardèche pour laquelle la montée des eaux est fulgurante (8 à 10 mètres à Vallon-Pont-d’Arc en quelques heures). Il s’agit alors de comprendre comment se forme sur les versants le ruissellement4 générateur d’écoulement de crue dans le but de limiter, par des techniques adaptées aux conditions locales, l’arrivée massive d’eau dans les talwegs.
2.1. L’origine des crues
20L’écoulement rapide de crue résulte de paroxysmes pluviaux de forte intensité, de précipitations pluvieuses remarquables par leur durée et leur extension spatiale ou de phénomènes d’embâcles, de débâcles et de la fonte des neiges.
2.1.1. Les paroxysmes pluviaux de forte intensité
21Ils apparaissent comme la cause principale des crues en France. Les quantités d’eau qui s’abattent à la surface du sol peuvent atteindre des hauteurs de l’ordre de 100 à 200 mm en quelques heures, sur des surfaces habituellement très réduites, de 50 à 200 km². Généralement, l’intensité pluviométrique décroît à partir d’un ou de plusieurs centres paroxysmiques. L’origine de ces averses est diverse. Ces pluies sont liées à des ascendances de masses d’air chaud et humide très instable renforcées parfois par la présence d’obstacles naturels (un relief) ou artificiel (des immeubles élevés) sur leur parcours. L’injection d’air froid en altitude sous la forme d’une « goutte froide » peut également renforcer ces ascendances comme le passage de la masse d’air sur une surface plus chaude (une ville par exemple). Les espaces soumis à l’influence du climat méditerranéen et plus particulièrement les espaces montagnards (Cévennes, Alpes du Sud) enregistrent ainsi les records pluviométriques de la France métropolitaine au cours de l’automne (1 000 mm en 24 heures dans le Haut Tech (Pyrénées orientales) à Saint-Laurent-de-Cerdans les 17-18 octobre 1940 ; 792 mm à Joyeuse en Ardèche le 9 octobre 1827 ; 950 mm à Valleraugue, au pied de l’Aigoual, le 29 septembre 1900)5. Mais le reste du territoire métropolitain n’est pas épargné, notamment par les précipitations orageuses estivales qui peuvent occasionner, surtout si les pluies s’abattent sur des espaces urbanisés imperméables, des crues importantes et destructrices qui constituent, pour les responsables des services techniques de l’eau des grandes villes, une difficulté en terme de traitement et d’évacuation des eaux ruisselées. Cette difficulté est d’autant plus importante que les précipitations orageuses, très localisées, se caractérisent par une très forte hétérogénéité spatiale. Par exemple le rapport entre les extrêmes au cours d’un même évènement pluvieux peut varier de 0 à 100 pour un espace comme la métropole lilloise (90 000 ha). De même, les chroniques de presse témoignent des plus violents orages, lesquels surviennent principalement au cours des mois de juillet et d’août de façon aléatoire. Ils détruisent alors les blés sur pied, engendrent de tumultueuses coulées de boues et provoquent parfois de véritables catastrophes (23 victimes consécutives à un brutal orage qui déversa près de 100 mm en l’espace d’1h30 dans le secteur du Grand-Bornand — Préalpes du Nord-le 14 juillet 1987). Malgré l’indigence des précipitations au cours des mois d’été, les mois de juillet et août arrivent au premier rang des grands abats d’eau historiques à l’échelle de la France. Ces paroxysmes découlent en effet de tous les facteurs pluviogènes qui agissent de concert et tout particulièrement de la charge hygrométrique de l’air. Cette dernière, régulatrice de la capacité pluviale de l’atmosphère, est très forte au cours des saisons chaudes. Ainsi, comme le fait justement remarquer J.-P. Trzpit6, pour toutes masses d’air confondues, la quantité d’eau précipitable, évaluée à l’échelle saisonnière pour deux stations Paris-Trappes et Nîmes-Courbessac, éclaire la distribution temporelle des forts abats d’eau (Trzpit, 2001). Le classement des saisons par ordre décroissant révèle en effet de fortes variations saisonnières de l’eau précipitable et une forte dissymétrie entre les saisons, l’été et l’automne affichant des valeurs importantes (respectivement 24,2 mm et 18,5 mm à Nîmes ; 20,5 mm et 15, 1 mm à Paris) contre des quantités d’eau précipitables plus faibles au printemps et surtout en hiver (respectivement 14,7 mm et 11,4 mm à Nîmes ; 12,3 mm et 9,8 mm à Paris). Il ne s’agit pas bien sûr du seul facteur d’explication, dans la mesure où les facteurs géographiques ou d’ordre météorologique peuvent jouer tels le passage d’une perturbation, le gradient thermique vertical, l’altitude, la position littorale ou intracontinentale, l’exposition…, mais la charge hygrométrique de l’air est indubitablement le facteur premier d’explication de la répartition temporelle des grands abats d’eau.
Tableau 1 : Maxima pluviométriques et records mondiaux dans la France d’Outre-Mer
Durée | Tahiti | Nouvelle-Calédonie | La Réunion (record mondiaux) |
1 h | 130 mm Hitiaa | 143 mm à Bopope — 4/03/92 C.T. ESAU | |
2 h | 250 mm Hitiaa | 268 mm à Bopope -4/03/92 C.T. ESAU | |
3 h | > 364 mm à Nérin -27/03/96 C.T. BETI | 422 mm à Baril- 28/02/93 | |
4 h | 425 mm Haut-Coulna 23/12/81 CT GYAN | 518 mm à Baril 28/02/93 | |
8 h | 743 mm Haut-Coulna 23/12/81 CT GYAN | 810 mm à Baril 28/02/93 | |
12 h | 1050 mm Haut-Coulna 23/12/81 CT GYAN | 1170 mm à Foc-Foc 7-8/01/66 | |
18 h | 1415 mm Haut-Coulna 23/12/81 CT GYAN | 1589 mm à Foc-Foc 7-8/01/66 | |
24 h | 1059 mm à Papenoo 19-20/12/98 | 1692 mm Haut-Coulna 23/12/81 CT GYAN | 1825 mm à Foc-Foc 7-8/01/66 |
48 h | 1862 mm Haut-Coulna 23/12/81 CT GYAN | 3001 mm à Baril — 28-29/02/93 |
22La France d’Outremer n’a rien à envier à la métropole en matière de records pluviométriques. Les pluies cycloniques à la Réunion, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie ou aux Antilles, comme les abats d’eau issus de la forte activité convective de la zone intertropicale de convergence en Guyane alimentent intensément les cours d’eau. Les précipitations maximales connues sont importantes à Tahiti (1 059 mm en 24 heures les 19-20 décembre 1998 à Papenoo) et exceptionnelles pour la Nouvelle-Calédonie puisqu’elles avoisinent les records mondiaux de 3 à 24 heures détenus par l’île de la Réunion (Danloux J. et Laganier R., 2000).
2.1.2. Des averses remarquables par leur durée et leur extension spatiale
23Elles peuvent également engendrer des crues dommageables. Parmi les crues mémorables, celles du Rhône en 1856, de la Loire en mai-juin 1957, de la Garonne au printemps 1930 et celle de la Seine en janvier 1910 sont toutes liées à une abondance pluviométrique sur l’ensemble du bassin au cours des jours voire des mois qui précèdent l’événement. Plus récemment, l’inondation très médiatisée de la Somme au cours du mois d’avril 2001 résulte du cumul des précipitations entre octobre et avril, période pendant laquelle l’évapotranspiration7 est faible, et de l’extension à l’ensemble du bassin de ce cumul. Le régime de la Somme est en effet peu sensible à des évènements pluviométriques isolés. Les crues de printemps dépendent essentiellement de l’alimentation du cours d’eau par la nappe de la craie, suite à la recharge hivernale. La crue cinquantenale enregistrée à Abbeville avec un débit journalier moyen de 104 m3/s en avril 2001 découle d’une séquence pluvieuse caractérisée par des apports doubles par rapport à la moyenne saisonnière sur l’ensemble du bassin (entre + 180 % et + 200 % selon les stations pluviométriques du bassin), soit 700 mm à plus de 1 000 mm d’eau. Le mois de mars précédent l’événement enregistrera un record pluviométrique avec un rapport des précipitations mensuelles par rapport à la moyenne mensuelle établit à + 318 % à Amiens-Glisy et + 330 % à Abbeville. Or, au début du mois d’octobre 2000, la nappe de la craie, alimentée par ses pluies, était déjà à un niveau relativement haut, dû à deux années précédentes humides (Lefrou, 2001)8. Il s’ensuit des débordements auxquels il faut rajouter des émergences de la nappe par des puits artésiens alimentant en permanence certains étangs et par-là des inondations dépassant le précédent record de 1994 où le débit de la Somme avait atteint 74 m3/s.
2.1.3. Surcotes et marées de tempête
24Elles engendrent des inondations marines de façon rare mais significative, parce que touchant généralement des espaces littoraux fortement anthropisés. La surcote est déterminée par la conjonction d’une marée de tempête accompagnée de vents violents et d’une dépression atmosphérique très creusée qui favorise temporairement une élévation du niveau de la mer. Une diminution de pression de 1 hPa se traduit en effet par une élévation du niveau marin de 1 cm, et inversement. Occasionnellement, le phénomène est amplifié par des inondations de débordement des cours d’eau dont l’écoulement est retardé par l’élévation du niveau marin, comme ce fut le cas lors des inondations de 1984 sur la Canche (Pas-de-Calais). Sur ce littoral où le marnage peut être de 7 à 8 mètres, le blocage de l’écoulement en temps de crue par les marées crée de vastes inondations comme en attestent, par exemple, les inondations du cours inférieur de la Liane à l’automne 1974. Pour en limiter l’impact, des stations de pompage à fort débit ont dû être installées pour évacuer les eaux de l’Aa en crue. Le secteur des Bas-Champs picards est également concerné par ce type d’événement ainsi que la Flandre maritime (secteur des Wateringues), comme les basses vallées de la Canche et de l’Authie en cas de rupture de digue. Les inondations côtières, d’extension limitée, se retrouvent aussi sur les côtes méditerranéennes. La présence d’une profonde dépression sur la mer Méditerranée implique souvent une élévation du niveau de la mer. Si le système dépressionnaire s’accompagne d’un fort vent orienté SE-NO, les conditions météorologiques, provoquant là encore des surcotes dues à des marées de tempête et un vent violent, sont alors favorables à l’apparition d’inondations sur les basses plaines littorales du Languedoc et du Roussillon. En 1982, un fort vent de 150 km/h a ainsi balayé la Camargue et le Languedoc, conduisant au recul des plages de plusieurs mètres et à l’inondation des basses plaines. En automne 1994, la coïncidence de la marée de tempête et d’une crue du Lez a provoqué une inondation de la plaine de Lattes, entre Montpellier et Palavas. Un phénomène semblable s’est également produit le 18 décembre 1997 dans la basse plaine de l’Hérault aux environs d’Agde. Les Départements et Territoires d’Outre Mer plus encore que la métropole sont, pour beaucoup d’entre eux, également concerné par ce phénomène. L’activité cyclonique s’accompagne en effet de vents violents qui peuvent atteindre des vitesses de plus de 300 km/h et d’une onde de tempête particulièrement importante en raison de la faiblesse de la pression au cœur des cellules cycloniques (pression inférieure à 960 hPa). La conjugaison de cette onde et de la marée astronomique donne une « marée de tempête » qui envahissent les régions littorales basses. Son amplitude dépend, outre la pression atmosphérique, de la topographie et de la bathymétrie des espaces littoraux concernés comme de l’intensité et de la trajectoire du cyclone. Les îles ou les littoraux les plus exposées demeurent ceux qui ne possèdent de barrière de corail.
2.1.4. Embâcles, débâcles et fonte des neiges
25Ils peuvent exceptionnellement provoquer une élévation des eaux dans le lit des fleuves et rivières et l’inondation du lit majeur. Le phénomène d’embâcle correspond à l’édification d’un barrage de glace au cours des hivers exceptionnellement froids à l’arrière duquel s’élève le plan d’eau qui engendre une submersion à l’amont. L’accumulation des radeaux de glace se manifeste généralement dans les zones d’écoulement à faible vitesse (embouchures des fleuves par exemple à ou dans les zones de rétrécissement naturel (gorges). Jean Loup cite l’exemple du Rhin sur lequel un bouchon de glace a progressé vers l’amont jusqu’à 25 km par jour durant l’hiver 1939-1940, provoquant une élévation du niveau d’eau de 4,9 m à Baccharach et une inondation de la plaine (Loup, 1974). Le redoux brutal des températures est aussi susceptible de libérer brutalement les eaux accumulées à l’amont et provoquer, par rupture du barrage, une débâcle capable d’engendrer de fortes crues. La formation d’embâcles peut également être liée au blocage d’arbres déracinés des berges ou des bancs végétalisés par des ponts ou tout autre obstacle linéaire ou ponctuels (chaussées, clôtures, plantation de peupliers…). Les répercussions hydrologiques sont alors aggravantes en période de crue. Les eaux, qui s’accumulent en amont des embâcles, peuvent subitement, sous la poussée et la surcote des eaux, se libérer par rupture d’embâcle, en prenant la forme d’une vague destructrice comme le rappelle François Gazelle à propos du pont de la Treille sur le Gers en juillet 1977, du vieux pont de Vaison-la-Romaine sur l’Ouvèze le 22 septembre 1992 ou encore à travers l’exemple de Brive-Charensac, sur la Haute-Loire, en septembre 1980 (Gazelle, 2003).
26La fonte des neiges constitue en général un phénomène progressif dans les zones de montagne en raison de l’énergie considérable nécessaire pour assurer la fonte du manteau neigeux. La neige ne constitue donc pas un facteur déterminant dans la genèse des crues violentes de haute montagne. A l’inverse, elle apparaît déterminante dans les zones de plaines et plateaux où la brutale remontée des températures provoque la fonte en masse de la neige accumulée et engendrent des crues considérables, surtout si la fusion du manteau neigeux est accompagnée d’averses de pluies. Dans ce cas, la conjugaison des deux processus donne lieu à des débits exceptionnels. L’exemple le plus remarquable, à ce titre, est sans doute celui de la crue de la Seine du 28 janvier 1910 qui atteignit 8,62 m au Pont d’Austerlitz, soit un débit estimé à 2 310 m3/s, inondant 473 ha dans Paris.
27Quelle que soit son intensité, sa durée ou son extension spatiale, la pluie, généralement à l’origine des inondations, doit encore circuler à la surface du sol ou dans le sol avant de rejoindre les talwegs et d’alimenter l’écoulement de crue. Le fondement historique de la pensée contemporaine dans le domaine de l’explication de la formation des crues a été notamment développé par Horton qui considère que la crue est associée au ruissellement de l’eau à la surface du sol, sur l’ensemble du bassin versant. Cependant, le lien ruissellement de surface/crue n’est pas aussi simple. Il peut en effet se produire un ruissellement qui n’aboutit pas au talweg comme il existe aussi des crues sans ruissellement sur les versants.
2.2. Les processus élémentaires de l’écoulement rapide de crue
28Trois types de processus hydrologiques peuvent expliquer la formation directe de l’écoulement rapide de crue (i.e. le gonflement rapide des débits) et les différents comportements hydrologiques des bassins. Le ruissellement de surface jusqu’à un axe de drainage peut contribuer à l’alimentation directe de l’écoulement de crue à partir du moment où :
l’intensité pluviométrique dépasse la capacité d’infiltration des sols (principe Hortonien) ;
la modification mécanique des états de surface imperméabilise les sols : L’impact des gouttes de pluie peut en effet engendrer le tassement de la surface du sol, l’éclatement des agrégats et la redistribution des particules fines qui obstruent les pores. La formation d’une croûte sédimentaire limite alors fortement l’infiltration des eaux et rend possible le ruissellement de surface (principe des Organisations Pelliculaires de Surface – OPS) ;
les sols sont saturés en eau : ces surfaces saturées peuvent contribuer directement à l’écoulement dès lors qu’elles sont connectées à un axe de drainage secondaire ou principal (principe des aires contributives). Toutefois, perchées sur un versant, elles peuvent faciliter le transfert des eaux vers l’aval par ruissellement de surface sans pour autant contribuer au ruissellement si les surfaces situées immédiatement en aval permettent à nouveau l’infiltration des eaux. C’est pourquoi l’observateur averti constatera, dans certains bassins, des formes de ruissellement sur les versants et l’absence de crue dans les talwegs. On désigne alors ces surfaces sous le vocable de zones actives. Les aires contributives saturées tout comme les zones actives se caractérisent par une grande variabilité temporelle et spatiale. Elles dépendent en effet du niveau de recharge de la nappe d’eau souterraine au moment de l’événement pluvieux, des conditions de ressuyage9 des sols, des formes spécifiques des versants. En voie de conséquence, leur extension varie au cours d’un événement pluvieux en raison de la recharge progressive de la nappe tout comme au cours de l’année hydrologique en fonction de l’évolution saisonnière des réserves en eau souterraines.
29A ces processus de contribution directe à l’écoulement rapide de crue s’ajoute un dernier processus qui participe indirectement à cet écoulement : l’exfiltration. Les transferts d’eau en jeu s’opèrent dans ce cas au sein des nappes d’eau souterraines qui alimentent le cours d’eau au moment de l’épisode pluvieux sous l’effet de la pression (effet piston) engendré par les eaux de pluies qui s’infiltrent et rejoignent la nappe. Ce sont alors les eaux « anciennes » de la nappe et non les eaux de pluie qui contribuent à l’écoulement rapide de crue10.
30Sur le plan fondamental et opérationnel, la difficulté réside à comprendre, à l’échelle d’un bassin versant, quelle est la part et la forme du ruissellement direct par rapport au ruissellement indirect dans la formation des crues. De cette connaissance dépend en effet le type d’aménagement à envisager pour limiter ou retarder la concentration rapide des eaux vers les talwegs afin d’atténuer l’ampleur de la crue et des inondations. Ce temps de transfert des eaux est lié notamment à la complexité de la dynamique hydrologique à l’échelle d’un bassin versant, c’est à dire à l’organisation spatiale et aux interconnections des « terroirs hydrologiques » qui composent le bassin. Si l’on suit R. Lambert, le terroir hydrologique peut être défini comme un « portion d’espace géographique homogène, par sa pente, sa couverture végétale, son sol, son manteau, son substratum et son site (position, exposition) et en conséquence homogène dans son comportement hydrologique » (Lambert, 1996). De ce point de vue, l’écoulement de crue trouve généralement son origine dans la combinaison des processus décrits ci-dessus qui se succèdent dans le temps comme dans l’espace selon un enchaînement très variable d’un terroir hydrologique à l’autre.
2.3. De l’organisation des terroirs hydrologiques à l’échelle d’un bassin versant dépend la vitesse de transfert des eaux
31A l’échelle d’un bassin versant, l’écoulement rapide de crue est contrôlé par les divers terroirs hydrologiques qui le composent.
32Ces derniers génèrent, selon la nature de l’occupation du sol, de la pente ou du type de substrat, différentes formes de ruissellement ou à l’inverse favorisent l’infiltration des eaux.
33L’organisation spatiale de ces terroirs fait que, d’une part, ces processus se succèdent dans l’espace en se relayant, auquel cas le ruissellement peut s’accroître d’un terroir à l’autre. Ils peuvent aussi se neutraliser lorsque les eaux d’un terroir producteur de ruissellement se déversent sur une surface favorable à l’infiltration des eaux.
34D’autre part, les connections spatiales qui s’établissent entre les différents terroirs hydrologiques varient aussi dans le temps. Autrement dit, le changement de saison comme la modification de l’occupation du sol entraînent un changement de processus. A partir de l’exemple de petits bassins versants du Mont Lozère, Claude Cosandey montre comment l’écoulement de crue, engendré par le ruissellement à partir de surfaces saturées, n’est pas ou peu dépendant du type d’occupation du sol lors des pluies abondantes d’hiver (bassins boisés, pâturés ou dénudés produisent en effet des crues identiques) alors que les orages estivaux, caractérisés par des intensités pluviométriques bien souvent supérieures à celle de l’hiver, ont peu de conséquences sur les bassins boisés en raison de la sécheresse hydrique des sols (Cosandey, 1987). A l’inverse, ces pluies d’été provoquent, sur les terroirs dénudés, un ruissellement selon le principe des OPS qui est à même de façonner des rigoles d’érosion et des ravines.
35En conséquence, le diagnostic à conduire à l’échelle d’un bassin versant, dans la perspective d’une limitation des écoulements de crue, doit caractériser les diverses formes de processus élémentaires de ruissellement, en déterminer le poids dans l’écoulement de crue ainsi que leur agencement spatial et temporel à partir d’une analyse fine des terroirs hydrologiques. L’enjeu est en effet de limiter, le plus en amont possible, la production de ruissellement susceptible de contribuer au gonflement du volume d’eau dans les cours d’eau ou encore de ralentir le transfert des eaux vers les zones vulnérables.
36Ainsi, dans le cas d’un bassin versant dominé par un ruissellement de type « Horton » ou de type « Aires contributives », la stratégie à conduire sera de retarder ou de ralentir la circulation des eaux vers l’aval en stockant les eaux de ruissellement dans des champs d’expansion de crue prévus à cet effet ou dans des bassins d’orage. L’objectif ne visera pas à réduire le volume d’eau correspondant à l’écoulement de crue, mais à écrêter la pointe de crue (ou la montée des eaux) en étalant le volume à écouler dans le temps. Ce stockage des eaux s’appuiera alors sur la mise en place de barrages prévus à cet effet (bassins d’orage, bassins écrêteurs de crue) ou sur l’utilisation de retenues d’eau construites pour d’autres fonctions (hydroélectricité notamment mais également fonction récréative associée à une retenue). La gestion des inondations rentre alors en concurrence avec d’autres usages comme l’hydroélectricité ou l’activité touristique. Il en découle des tensions qui apparaissent entre les usages marchands associés à un barrage (chaque m3 d’eau a un coût pour EDF ; une retenue pleine favorise le développement de l’activité touristique) et la gestion des inondations qui suppose la vidange de la retenue en période de crue afin de stocker temporairement les eaux de ruissellement. Or le poids économique des grands groupes comme la nécessité de maintenir une activité économique dans certaines régions rurales en déprise font que l’on ménage bien souvent ces activités au dépend de la gestion des inondations. Ainsi, la centrale d’éclusée de Grangent, sur la Loire, est généralement pleine de juin à septembre et pas suffisamment vide au moment où surviennent les abats d’eau d’origine méditerranéenne qui touchent le haut bassin de la Loire. Cet exemple rappelle, si besoin en est, ô combien la gestion territorialisée du risque d’inondation n’est pas qu’affaire technique mais également intégration de logiques économiques et politiques. Elle suppose donc la construction de solidarités entre l’amont et l’aval des bassins comme la volonté de concilier des usages concurrentiels.
37Les espaces sujets à saturation peuvent aussi être reboisés (peupleraies en zones de marais ou de fond de vallées humides par exemple) afin de limiter, notamment en période estivale en raison des forts prélèvements racinaires dans la nappe, l’extension des zones saturées. Toutefois, ce procédé reste peu efficace dans la lutte contre le ruissellement au cours de la période hivernale compte tenu de la faible demande en eau végétative et de la remontée des nappes d’eau alluviales.
38Par ailleurs, l’usage du drainage aérien ou souterrain contribue, sous certaines conditions, à limiter le développement des aires contributives saturées mais il peut, a contrario, accélérer le transfert des eaux vers les cours d’eau (Nedelec Y., 1999 ; Cosandey et al, 2003). Ces effets contradictoires dépendent pour beaucoup :
du type de drainage (à ciel ouvert ou enterré ; dimensionnement des drains) et de sa densité ;
de la capacité de stockage des sols ;
de la localisation des espaces drainés au sein du bassin versant (le drainage aval peut évacuer les eaux de pluies avant l’arrivée du flots de crue formé dans la partie amont du bassin versant dans le cas où la pluie génératrice s’étend simultanément à l’ensemble du bassin ou remonte le bassin depuis son exutoire) ;
des conditions hydriques préalables ;
des caractéristiques de l’événement pluvieux (intensité, durée).
39Les terroirs marqués par la formation d’organisations pelliculaires de surface devront faire l’objet d’une attention particulière quant à la protection du sol par l’adaptation des pratiques et du calendrier culturaux comme par la revégétalisation capables de limiter le ruissellement et l’érosion pluviale.
40Enfin, dans la mesure où l’organisation spatiale des terroirs hydrologiques au sein du bassin versant joue un rôle dans le transfert des eaux, la mise en place de zones de rupture favorables à l’infiltration entre deux terroirs sensibles au ruissellement constitue une pratique qui peut s’avérer efficace pour rompre la continuité hydraulique et favoriser en même temps la sédimentation des matériaux en transit sur les versants. Les bandes enherbées constituent l’exemple le plus emblématique de ces techniques, mais elles impliquent, le plus souvent, une restitution de l’espace cultivé, pour la lutte contre les inondations. Aussi, les contractualisations engagées avec les agriculteurs, dans le cadre de la politique des mesures agri-environnementales et des contrats territoriaux d’exploitation paraissent être un outil utile, par la compensation financière accordée en raison de la perte de l’usage agricole de ces terres, pour s’assurer d’une prise en compte, au sein des espaces agricoles, des enjeux liés au ruissellement, à l’érosion des sols et à la formation des crues. Mais là encore, la gestion du risque implique une appropriation, par les agriculteurs, de nouvelles pratiques comme d’anciennes techniques redécouvertes et les négociations engagées dans ce sens avec les acteurs du monde agricole ne sont pas toujours acceptées. La dimension socio-économique et politique du risque rejaillit ainsi à nouveau lors de la mise en œuvre d’actions techniques territorialisées impliquant une fine négociation avec les agriculteurs. La solidarité urbain-rural est pourtant au cœur de cette politique.
3. L’amplification des processus naturels par les sociétés
41Les changements de l’usage des sols affectent les processus hydrologiques par la modification des facteurs d’infiltration, d’évaporation, de ruissellement comme par la modification des charges sédimentaires et de la morphologie des cours d’eau. S’il n’est pas envisageable d’aborder en quelques pages l’ensemble de ces impacts, un éclairage à partir de quelques types d’usages illustrera le rôle de l’urbanisation ou de certaines pratiques agricoles sur la modification du volume et de la fréquence des crues.
3.1. Une agriculture pas toujours soucieuse des impacts sur les inondations
3.1.1. Influence des pratiques agricoles au niveau de la parcelle
42Les pratiques agricoles susceptibles d’influencer l’évolution de l’état de surface du sol sous l’action des gouttes de pluie et de favoriser la genèse du ruissellement sont à prendre en compte au niveau de la parcelle. Cette unité spatiale est en effet un élément constitutif de 2 sous-systèmes : l’hydrosystème et le bassin versant d’une part (système fonctionnel), l’exploitation agricole d’autre part (système décisionnel). Aussi vouloir limiter le ruissellement à l’échelle d’un bassin versant suppose que l’on traite, dans ce cas précis, le ruissellement à l’échelle de la parcelle, dans le cadre d’un accord passé avec l’exploitant agricole. Les pratiques agricoles ont en effet, comme le rappelle Bruno Ludwig, une triple influence à l’échelle de la parcelle (Ludwig, 1999) :
Modification de la couverture du sol
Ameublissement du sol
Compactage des sols
43La modification de la couverture du sol se traduit par une protection variable dans l’espace et dans le temps selon les modalités d’implantation des plantes, leur vitesse de croissance et la disposition du feuillage. Ainsi les parcelles de prairies permanente comme celles mises en place progressivement au cours de l’automne et de l’hiver (céréales, colza) sont davantage protectrice des sols que les cultures annuelles sarclées (maïs, betterave sucrière) semées au printemps et à faible densité de couverture. Ces dernières sont caractérisées, sous nos latitudes tempérées océaniques, par deux périodes à hauts risques de ruissellement : en automne et en hiver par l’absence d’une couverture du sol, et au printemps, avec un couvert végétal en général peu dense associé à un risque d’orage relativement élevé.
44L’ameublissement du sol constitue un deuxième effet lié aux pratiques agricoles (individualisation des agrégats, dont la distribution des tailles est déterminée par le type d’outil, la vitesse de travail et la cohésion globale du sol). Cette action se traduit par une forte macro porosité qui augmente instantanément la capacité d’infiltration. Le travail du sol modifie aussi la rugosité de la surface du sol qui détermine la capacité de stockage d’eau à la surface du sol sous la forme de flaques. Si l’émiettement du sol est très poussé, la surface devient ainsi très sensible à la battance et à la formation de croûtes qui favorisent l’apparition du ruissellement.
45Le compactage du sol est lié au passage d’engins agricoles dans les parcelles. Ils peuvent imprimer à la surface du sol des traces de roues marqué par un fort degré de compactage qui a pour effet de diminuer la capacité d’infiltration de la couche compactée, augmentant ainsi le ruissellement de surface. Ces traces peuvent aussi canaliser le ruissellement contribuant ainsi à l’aggravation du ruissellement vers l’aval. Dans la Brie, le poids des engins crée une semelle de labours vers 30-40 cm de profondeur que les agriculteurs doivent détruire tous les 4-5 ans par un sous-solage.
46La modification des pratiques culturales est à l’origine de l’augmentation très forte des inondations boueuses qui affectent les régions de grande culture (Nord-Pas-de-Calais, Haute-Normandie, Ile-de-France, Picardie, Midi-Pyrénées).
3.1.2. Influence des pratiques agricoles à l’échelles du bassin versant
47Toutefois, les conséquences aval varient également selon la position de la parcelle dans le bassin versant, en particulier par rapport au réseau des collecteurs du ruissellement. Il est donc important de connaître la structure hydrographique du bassin versant agricole pour bien évaluer l’aléa ruissellement. Cette structure est déterminée par :
La distribution spatiale des surfaces émettrices de ruissellement ;
La localisation du réseau de collecteurs de ruissellement ;
Les connexions entre les surfaces et les collecteurs.
48Or, cette organisation varie avec les pratiques agricoles et plus particulièrement avec les remembrements qui se traduisent par une augmentation de la taille des parcelles, la suppression des haies qui peuvent favoriser l’infiltration des eaux de ruissellement, et une réorganisation des collecteurs. A cette recomposition spatiale des parcelles se surimposent aussi des motifs linéaires d’origine agraire comme les traces de roues qui modifie la forme et la surface des bassins versants et donc le sens des écoulements.
49Limiter l’aléa inondation revient donc à réfléchir à l’échelle des parcelles agricoles comme à celle des terroirs hydrologiques qui composent les bassins versants, à leur contribution à l’écoulement rapide de crue et par conséquent à la manière d’assurer le transfert le moins rapide des eaux vers les rivières. Penser la protection des villes contre les crues ne se cantonne donc pas à gérer le linéaire fluvial par la mise en œuvre de digues ou par la rectification des cours d’eau, d’autant que ces techniques induisent de profondes modifications de l’hydrosystème (incision du lit, report des inondations vers l’aval) ; la protection des cités invite à réfléchir, à l’échelle du bassin versant, aux actions de lutte portant sur la genèse comme sur le parcours des eaux de ruissellement. Elle suppose la construction de solidarités entre villes et campagnes, entre l’amont et l’aval du bassin. Elle exige aussi une réflexion sur la ville elle-même et sur son rôle dans la production de risques hydrologiques spécifiques au système urbain.
3.2. Des villes qui engendrent leur propre risque
50La ville modifie profondément le cycle naturel de l’eau. La particularité des hydrosystèmes urbains découle en effet de trois caractéristiques (Dacharry, 1984 ; Chocat, 1987) :
la première est relative aux conséquences de l’urbanisation sur l’ensemble des termes du bilan hydrologique (évapotranspiration, précipitation, infiltration, ruissellement) et plus particulièrement sur les conditions de ruissellement ;
la deuxième est inhérente à la circulation de deux flux hydriques, séparés ou unis au sein des mêmes réseaux selon les cas et ayant au final le même exutoire, le cours d’eau. Ces flux correspondent d’une part, à l’eau distribuée qui répond aux besoins domestiques ou industriels et à l’eau usée, résidus de l’usage urbain de l’eau, d’autre part à l’eau pluviale, plus aléatoires et variables selon les régions françaises ;
la troisième résulte du caractère évolutif des villes qui entraîne, par l’étalement des zones de bâties et des infrastructures imperméables comme par la densification du tissu urbain, une modification progressive des termes du bilan de l’eau.
51L’emprise spatiale des zones imperméabilisées, qui limite fortement la capacité d’infiltration des eaux dans le sol, favorise ainsi le ruissellement des eaux de surface au cours des épisodes pluvieux. L’imperméabilisation contribue en effet à accroître le volume de l’écoulement rapide de crue, y compris pour des précipitations de faible intensité. Selon le niveau d’imperméabilisation, le volume ruisselé augmenterait de 500 à 800 % ! Qui plus est, la nature des réseaux d’évacuation des eaux pluviales, conçus pour évacuer rapidement les eaux de pluies et les eaux usées en dehors de l’espace urbain selon les principes édictés par les hygiénistes du XIXè siècle, accélère le transfert des eaux de crue dans les réseaux d’eau peu rugueux et imperméables. Les surfaces imperméabilisées conduisent ainsi à une réduction considérable des temps de réponse des bassins versants et au transit de volumes ruisselés plus importants. Les coefficients d’apports varient ainsi entre 30 et 80 % selon le type d’urbanisation, bien plus qu’en milieu rural ou naturel11. La forme de l’hydrogramme de crue s’en trouve alors changée : montée des eaux plus rapide, pointe de crue plus précoce, volume ruisselé plus important.
52Dans ces conditions, l’aléa inondation apparaît amplifié, d’autant plus qu’au ruissellement pluvial urbain se conjuguent, dans les réseaux, les rejets d’eaux usées domestiques. L’exemple des inondations de Nîmes du 3 octobre 1988 est à ce titre très révélateur des dysfonctionnements des réseaux urbains, sous-dimensionnés face à un événement hydrologique rare sans pour tant être exceptionnel (période de retour estimée à 100 ans). Le phénomène convectif pluvio-orageux a déversé sur un peu plus de 6 heures 311,5 mm d’eau à Nîmes-Courbessac et au moins 420 mm sur les hauteurs de Nîmes, le maximum horaire enregistré étant de 47,5 mm entre 6 et 7 heures du matin (Davy, 1989 ; Laganier et Davy, 2000). Le ruissellement va très rapidement se concentrer dans les cadereaux, petits organismes torrentiels à écoulement intermittents, longs de 3 à 7 km. Ces torrents ont fait le jeu de tous les aménagements : réduits à l’état de fossé en amont, transformés en rue dès leur arrivée en zone urbanisée, encombrés par de multiples aménagements, comme les ponts qui les enjambent. Enfin, à leur arrivée en ville, ils sont pris en charge par un réseau souterrain complexe, sensé amené des eaux pluviales usées plus celles de la source de la Fontaine, vers le Vistre, petit cours d’eau qui circule en aval de l’agglomération. Or, c’est à ce niveau que les choses s’aggravent. Les deux cadereaux qui se réunissent à l’entrée nord-ouest de la ville ont dû apporter en période de pointe environ 500 m3/s. Cet important écoulement s’est retrouvé face à deux buses de 2 m de diamètre chacune, lesquelles d’ailleurs ont été rapidement en partie neutralisées par un amoncellement de matériaux hétéroclites charriés par les eaux. L’essentiel du débit est sorti de son lit. Or, pendant ce temps, des phénomènes semblables se produisaient dans la partie nord-ouest de la ville. Ainsi s’explique, la pente aidant, la formation de ces vagues successives qui, en quelques minutes, ont déferlé dans les rues de la ville, y causant des dégâts qui s’élèvent à environ 600 millions d’euros. A l’extrême nord du pays, les agglomérations du Nord-Pas-de-Calais connaissent des phénomènes de même nature. Les pluies d’assez forte intensité, qui surviennent plus particulièrement au cours des orages estivaux, peuvent localement entraîner l’inondation de bas-quartiers à l’image de la cité Frais-Marais ou de la cité du Godion dans le nord Douaisis au cours de l’orage du 6 juillet 1991 et celui du 25 août 1990 où la station de Pecquencourt, proche de la zone touchée, a enregistrée 70 mm de pluie en 24 heures (Laganier, 2003). L’événement pluvio-orageux des 6-7 juillet 1991 n’épargne pas non plus le Valenciennois et la région lilloise où 32 mm d’eau tomberont en 10 minutes à Lambersart. Les intensités pluviométriques non rien de comparable avec l’exemple nîmois, mais elles apparaissent suffisantes, dans ces espaces peu pentus, pour mettre en lumière la fragilité de ces espaces urbanisés puisque, en dehors du milieu urbain, la vulnérabilité est réduite. Les inondations des chaussées comme des habitations résultent alors d’un engorgement et d’un débordement des réseaux d’assainissement, ou encore d’un arrêt de stations de relèvement des eaux des points les plus bas comme ce fut le cas sur la métropole lilloise le 3 juillet 1986 suite aux impacts de foudre.
53Nous touchons là à quelques facettes des modifications engendrées systématiquement par la croissance urbaine sur le cycle de l’eau. A celles-ci, il convient de rajouter l’impact des villes sur l’évapotranspiration. En effet, cette dernière est fortement atténuée en raison de la faiblesse des surfaces végétalisées. Enfin de nombreuses observations, menées notamment à l’échelle de grandes métropoles, montrent que les villes contribuent à l’accroissement des précipitations pour diverses raisons :
les noyaux de condensation, nécessaires à la formation des gouttelettes de pluies, sont en effet plus nombreux au dessus des villes en raison de l’importance des émissions de particules fines par les activités urbaines et plus particulièrement le transport routier ;
dans certaines conditions climatiques, les centres urbains enregistrent des températures plus élevées que les zones périphériques. L’instabilité de masses d’air est alors accrue au-dessus de cet îlot de chaleur (ascendances thermiques), notamment lors des orages d’été ;
la rugosité de certains quartiers, caractérisés par le développement vertical de grandes tours et immeubles, peut renforcer l’instabilité des masses d’air et entraîner une recrudescence des précipitations à l’image de l’effet de lisière observé au niveau des forêts.
54Ces effets, parfois conjugués à l’échelle d’une même ville, se font ressentir au cours d’un épisode pluvieux (un orage estival par exemple) et parfois même à l’échelle mensuelle. G. Escourrou a ainsi remarquablement montré, à l’échelle de l’agglomération parisienne, l’influence du quartier de la Défense comme des espaces centraux de fortes densités de Paris et des effets de site (butte Montmartre, butte Chaumont) sur l’augmentation des totaux pluviométriques par rapport à la banlieue. Si les espaces pavillonnaires provoquent un premier accroissement estimé à 8-10 % des précipitations, la construction de grands ensembles entraîne une augmentation supplémentaire d’environ 8 %. Ainsi, au cours du mois de juillet 1994, le cumul des précipitations révèle un rapport de 1 à 6 entre les espaces périphériques d’une part, le centre de Paris et sa banlieue proche d’autre part (Comité National Français de Géographie, 1996).
55L’urbanisation engendre par conséquent ses propres risques. Elle entraîne une augmentation des précipitations et renforce notamment les épisodes pluvieux issus des masses d’air les plus instables. Elle accentue les excès climatiques par le renforcement des phénomènes convectifs et l’imperméabilisation des surfaces réceptrices.
56Or, en milieu urbain, la particularité du flux d’eau issu du ruissellement pluvial est d’être non seulement dévastateur sur le plan des dommages matériels ou humains, comme en témoignent les nombreux exemples catastrophiques qui jalonnent l’histoire récente de très nombreuses villes françaises, mais également un vecteur très efficace de polluants variés, progressivement accumulés au fil du parcours de l’eau pluviale en ville. L’enjeu de la gestion du ruissellement pluvial urbain est donc double : atténuer l’effet dommageable des inondations d’une part, limiter le transfert de polluants vers les cours d’eau et les nappes d’autre part. Cette double problématique, quantitative et qualitative, amène à reconsidérer le principe hygiéniste fondateur de la gestion des eaux pluviales urbaines : l’évacuation rapide des eaux. En effet, la croissance des villes est telle que l’étalement urbain conduit à saturer les réseaux existants au cours des épisodes pluvieux et à augmenter très fortement les volumes d’eau à assainir au niveau des stations d’épuration. L’un des enjeux de la gestion des eaux pluviale est en effet d’assurer le traitement des eaux de ruissellement et notamment les premiers flots d’orage particulièrement pollués. Aujourd’hui, 80 % de la population française est rassemblé sur près de 20 % du territoire. Le rapport était inverse au lendemain de la seconde guerre mondiale. Les seules surfaces associées à l’habitat individuel consomment aujourd’hui encore 330 km² par an depuis 1992 pour atteindre 18 600 km² en 2001. Cette évolution, en nette progression (12 %) par rapport à la période précédente (275 km²/an entre 1982-1990), est associée à un accroissement de superficie de 10 % entre 1992 et 2 000 des réseaux routiers permanents (soit 10 700 km² en 2001)12. Cet étalement urbain s’accompagne d’une extension des réseaux de collecte des eaux usées et pluviales et d’une difficulté croissante à gérer des volumes de crue de plus en plus importants (réseaux anciens sous-dimensionnés notamment). Intégrer la gestion des eaux pluviales à l’aménagement urbain revient à limiter le transit des eaux en ville, à se rapprocher des cycles de la nature en favorisant l’infiltration ou la rétention des eaux et finalement à revisiter les fondements de l’hydrologie urbaine. Ce changement de paradigme de l’assainissement, provoqué par l’urbanisation galopante des années 1950-1970 et l’ampleur des coûts induits nécessaires à la construction de canalisations de grand diamètre sur des distances de plus en plus importantes, se concrétise plus particulièrement lors de la construction des grands ensembles et des villes nouvelles. Bassins d’orage, parkings et autres trottoirs filtrants se développent pour stocker ou ralentir l’écoulement au sein de l’espace urbanisé. Cependant, l’ancrage de cette nouvelle orientation dans la sphère de décision technico-politique ne va pas de soi. Les urbanistes et les aménageurs des années 1960-1980 sont pour beaucoup dans le registre de la négation de tout ce qui pourrait rappeler l’eau dans la ville. La logique est encore celle du recouvrement des rus urbains et de leur intégration au réseau d’assainissement comme celle du drainage des zones humides pour servir le besoin d’espaces à équiper et à urbaniser. Et lorsque ces techniques se mettent en place, des logiques d’acteurs parfois divergentes font que la gestion technique de ces ouvrages n’est pas toujours très efficiente. Les différences de formation et de démarches professionnelles entre le maître d’ouvrage, d’étude et de réalisation des bassins d’orage et l’exploitant de ces retenues peuvent conduire à des dysfonctionnements. De même, les communes ou les syndicats intercommunaux, qui ont la responsabilité de la gestion et de l’entretien des ouvrages, peuvent avoir des difficultés à définir, qui, du service d’assainissement ou du service des espaces verts auront à gérer ces retenues. Enfin, l’appropriation par les usagers de l’aspect plurifonctionnel des ouvrages (bassins d’orage mais aussi espaces récréatifs) n’est pas toujours au rendez-vous. Ainsi, certains habitants s’interrogent ou critiquent vivement les pouvoirs publics lorsqu’une aire de jeux s’inonde à la suite d’un orage, d’autres s’émeuvent fortement à l’occasion d’un agrandissement des bassins d’orage, considérant seulement le caractère ludique, paysager voire « naturel » du site ! Cette incompréhension révèle, encore une fois, la nécessité d’accompagner toute politique de prévention ou de lutte contre l’inondation d’une démarche forte d’information et de sensibilisation des usagers.
3.3. Le cas particulier des ruptures de barrage
57“De tous les ouvrages construits de main d’homme, les barrages sont les plus meurtriers”. Ces mots, rappelé par Franck Bruel, sont ceux du constructeur du barrage de Malpasset, l’ingénieur André Coyne, président de l’Association internationale des grands barrages en 1959 et spécialiste de la construction des barrages-voûtes (Bruel, 2003). Ces mots sont ceux d’un homme meurtri par la plus grande catastrophe de ce genre que la France ait jamais connue. Après des pluies torrentielles qui remplirent le nouveau barrage de Malpasset implanté sur le torrent du Reyran (Var) en amont de Fréjus, celui-ci céda brutalement le 2 décembre 1959 à 21 h 13. Près de 50 millions de mètres cubes d’eau déferlèrent à 70 km/h sous la forme d’une vague de 40 mètres de hauteur, ravageant campagnes et villages jusqu’à la mer atteinte 20 minutes plus tard. La catastrophe a fait 423 victimes, arraché 2,5 km de voies ferrées, détruisant 50 fermes, tuant 1 000 moutons et engloutissant 80 000 hectolitres de vin.
58Ce type d’inondation brutale, par rupture de barrage résulte de défaillances techniques graves (faiblesse du substrat faillé sur lequel reposait le barrage-voûte dans le cas de Malpasset). La rupture d’un barrage est un phénomène rare mais pas exceptionnel (Sigma, 2002). Un ou deux barrages cèdent en effet chaque année à l’échelle globale. Mais la petitesse des retenues d’eau fait que ces ruptures ne provoquent que rarement des catastrophes. Les barrages-poids demeurent statistiquement les plus fragiles. Parmi les plus tristement célèbres, citons le barrage de Puentes (région de Murcie-Espagne) dont la rupture provoqua la mort de 600 personnes en 1802, ou encore un barrage-poids de Los Angeles qui céda en 1928, entraînant le décès de 420 personnes ou plus récemment la rupture du barrage de Morvi en Inde le 11 août 1979 (15 000 morts).
59La rupture de barrages-voûtes comme celui de Malpasset, est beaucoup plus rare. Des facteurs « externes » au barrage comme la faiblesse de l’assise pour Malpasset ou la violence d’un glissement de terrain à Vaiont, dans les Alpes italiennes, le 9 octobre 1963, sont le plus souvent à l’origine des catastrophes (2 600 victimes liées au débordement du barrage dans la vallée de Vaiont).
60Si l’on fait abstraction de ces cas extrêmes et rares liés à des insuffisances techniques, le territoire français est caractérisé par une grande diversité de crues inondantes dont les rythmes, leurs fréquences comme leurs puissances permettent d’établir un tableau général.
4. Rythmes, fréquences, puissances
61L’histoire des rapports des sociétés et de la nature est peuplée d’accidents de toute sorte, que notre logique considère souvent comme échappant « au cours normal des choses », et qui paraissent défier toute prévision. Si la France n’a jamais rien connu de comparable aux 300 000 morts laissés par l’onde de tempête du 14 novembre 1970 au Bangladesh, aux 138 000 morts liés au passage du cyclone tropical Gorky le 29 avril 1991 dans la même région ou aux 10 000 victimes survenues en décembre 1999 au Venezuela et en Colombie à la suite d’inondations et de glissements de terrains, elle n’ignore pas pour autant le risque d’inondation. Etablir un tableau des inondations en France suppose que soient connus les rythmes et les fréquences des aléas, leur amplitude, leur extension spatiale, leur durée comme les régimes hydrologiques dans lesquels ils s’inscrivent. Décrire l’aléa consiste à caractériser par un jeu d’indicateurs une menace potentielle, définie indépendamment des impacts qu’elle peut occasionner aux biens et aux personnes. Parmi les indicateurs fréquemment évoqués retenons plus particulièrement :
L’ampleur du phénomène ou sa magnitude : celle-ci exprime l’importance de la crue à travers la mesure du débit maximum brut (m3/s), du débit spécifique maximal (l/s/km²), du volume d’eau écoulé pendant l’événement ou de la hauteur d’eau atteinte au cours de l’épisode ;
L’extension spatiale : elle permet de délimiter l’espace effectivement concerné par l’inondation ;
La fréquence : cet indicateur traduit l’occurrence du phénomène ;
Le rythme temporel : il complète la notion de fréquence en mesurant l’espacement (aléatoire, cyclique, saisonnier…) entre deux évènements de même type.
La durée : elle témoigne de la persistance de l’inondation, sur une période donnée ;
La vitesse de propagation : elle relate la rapidité du phénomène à travers la mesure de l’intervalle de temps séparant l’apparition du phénomène de son maximum d’intensité, i.e. la pointe de crue ; elle donne indirectement une mesure du délai de réaction que la société doit mettre en œuvre pour assurer une bonne gestion de la crise comme le calage des systèmes d’alerte de crue.
4.1. Les rythmes saisonniers moyens
62Les variations saisonnières des cours d’eau sont définies par des moyennes qui servent à définir le régime hydrologique d’un cours d’eau. Ainsi classiquement, la France recouvre une grande diversité de régimes.
63Certains dessinent deux saisons hydrologiques, l’une de hautes eaux, l’autre de basses eaux. Cette simplicité indique alors la prépondérance d’un mode d’alimentation et très souvent une homogénéité climatique à l’échelle du bassin versant. La Somme et la Seine représentent ainsi le régime de type pluvial-océanique (ou pluvial-évaporal) ; ce régime se caractérise par des hautes eaux de saisons froides (maximum de janvier, février ou mars) et des basses eaux estivales (minimum d’août ou septembre lié à l’évaporation). L’Averole et l’Arve illustrent, dans la partie supérieure de leur cours, un autre type de régime simple : le régime glaciaire. Ce dernier développe une période de hautes eaux, nette et régulière, en été (maximum d’août) liée à la fonte des glaciers et des basses eaux franches de la fin de l’automne au début du printemps qui correspondent à l’immobilisation des précipitations neigeuses sur les massifs. Proche du régime glaciaire par l’abondance de l’écoulement de saison chaude et l’indigence des débits au cours de la période froide, le régime nival (l’Isère à Moûtiers, la Romanche à Champeau) s’en distingue par la fonte plus précoce du manteau neigeux situé à des altitudes plus basses.
64Si les petits cours d’eau appartiennent tout entier à un mode d’alimentation (pluie, neige ou glacier), les cours d’eau et les grands fleuves, dont le bassin comprend des régions de relief et de climat variés, décrivent plusieurs maxima et minima qui résultent des effets combinés et souvent successifs, de deux ou plusieurs modes d’alimentation. Ces régimes, appelés complexes, recouvrent des combinaisons diverses : régime pluvio-nival océanique, régime nivopluvial, régime méditerranéen et régimes complexes changeants le long des grands cours d’eau. L’Ain, le Lot à Cahors, le Tarn à Albi ou encore le Doubs inférieur comporte deux périodes de hautes eaux, l’une en mars-avril relatif au faible apport dû à la fonte des neiges, l’autre en automne lié à des apports pluviométriques et deux périodes de basses eaux, l’une en été dépendante de l’évaporation, l’autre moins nette en hiver correspond à la rétention nivale. La plupart des petits cours d’eau Préalpins (le Fier, le Chéran, la Bléone, le Verdon…) comme les Gaves pyrénéens se rapproche du régime précédent mais l’influence nivale est plus marquée (minimum hivernal plus creusé, maximum de printemps lié à la fonte des neiges plus marqué que le maximum d’automne. Ce régime est qualifié de nivo-pluvial. Le régime de type méditerranéen, très contrasté, se caractérise de son côté par une sécheresse d’été très soutenue et deux maxima : l’un au printemps, consécutif aux averses et à la fonte des neiges si le cours d’eau naît en montagne, l’autre en automne résultant des forts abats d’eau caractéristiques du climat méditerranéen. Enfin, les grands fleuves français sont soumis à plusieurs influences de long de leurs cours. Ainsi, le régime de la Garonne change de l’amont vers l’aval en raison de trois influencent climatiques qui se succèdent le long du cours d’eau. Ainsi la partie orientale du bassin (les zones amont du Tarn, de l’Aveyron ou du Lot) est sous influence méditerranéenne (fortes crues d’automne et de printemps) ; les torrents pyrénéens se confondent avec les régimes océaniques de montagne (nivo-pluvial ou pluvionival) alors que la partie centrale et aval du bassin, lorsque la Garonne devient fleuve de plaine dans le bassin Aquitain, est sous influence océanique. Les hautes eaux moyennes sont centrées sur l’hiver et le printemps. Elles affectent surtout le cours moyen du Tarn et du Lot tout comme la Garonne dans son cours situé en aval de sa confluence avec le Lot. Le Rhône est également souvent cité comme exemple de régime complexe changeant. Original par sa direction nord-Sud, il est aussi par sa puissance (module de 1 720 m3/s à son embouchure) qui l’acquiert par la conjugaison de plusieurs influences. La Saône lui apporte surtout des eaux pluviales de saison froide liées au régime océanique ; La zone montagnarde qui l’enserre de tous côtés lui assure une alimentation copieuse au printemps et en été (fonte des neiges et des glaciers) ; les rivières cévenoles et la Durance apportent, dans leur cours aval, des hautes eaux de printemps et d’automne caractéristiques de la province hydrologique méditerranéenne.
4.2. Fréquence et puissance des crues
65Cependant, les régimes hydrologiques ne doivent pas cacher une certaine variabilité annuelle, ni l’existence d’épisodes hydrologiques exceptionnels dont les crues. Ces dernières peuvent être définies comme des hautes eaux exceptionnelles ou des montées soudaines du niveau d’eau, susceptible d’entraîner des inondations.
66Beaucoup de ces crues ont pour origine des averses anormales par leur intensité, leur extension et/ou leur durée. Elles peuvent aussi correspondre à la superposition de deux facteurs climatiques (averses importantes et fonte des neiges) qui coïncident ou non avec la période normale des hautes eaux.
67Dans le cas des paroxysmes pluviaux de forte intensité, la montée des eaux sera fulgurante (de 8 à 10 m en quelques heures) et le débit spécifique maximum très important (plusieurs mètres cube par seconde et par kilomètre carré). Les maxima de crues consécutifs aux cyclones tropicaux comme aux averses cévenoles atteignent ainsi sur certains bassins des valeurs énormes : le cyclone Gyan qui toucha la Nouvelle-Calédonie le 23 décembre 1981 engendra un débit spécifique maximal de 7 140 l/s/km² sur la Thio à Saint-Michel (350 km²) et un débit de 6 780 l/s/km² sur la Ouenghi à la RT1 (245 km²). La Dumbea est au barrage (56 km²) écoula en son maximum 21 430 l/s/km² au cours du cyclone Colleen. Les volumes considérables de crue peuvent encore être appréhendés sur un bassin comme celui de la Pouembout, rivière de versant ouest, contrôlée à l’issu d’un bassin de 176 km². Pour le cyclone Gyan, le bassin de la Pouembout a évacué en moins de 48 heures plus de 60 millions de m3, soit plus que l’écoulement de deux années sèches successives (Laganier, 1994 ; Danloux et Laganier, 2000). Sur l’Ardèche à Sauze, au-delà des gorges et à quelques kilomètres de la confluence avec le Rhône (bassin versant de 2 240 km²), la crue du 21 au 24 octobre 1977 a roulé un débit spécifique maximum qui atteignit 1 487 l/s/km² ; la reconstitution du débit de l’événement remarquable du 22 septembre 1890 atteint, à Vallon-Pont-d’Arc un débit de pointe de 6 500 m3 /s soit 3 350 l/s/km². La vitesse de translation de l’onde de crue est également très rapide. Le Dauphiné Libéré témoigne ainsi de la crue du 30 septembre1958 : « Le filet d’eau est devenu torrent déchaîné… Les eaux furieuses accouraient des célèbres gorges, à la vitesse d’un cheval au galop » (Dauphiné Libéré du 2 octobre 1958). Le temps de propagation est en effet considérable atteignant fréquemment les 10 km/h voire dépassant 20 km/h notamment entre Vogüe et Sauze (Laganier, 1990).
68Ces crues à cinétique rapide peuvent être regroupées en trois classes distinctes qui dépendent de l’intensité des pluies comme de la structure hydrologique du bassin versant (surface réceptrice, pente, forme du bassin, structure du réseau hydrographique, nature de la couverture pédologique et des formations végétales…).
69Les crues instantanées ont ainsi pour origine des pluies d’orage présentant des intensités de quelques dizaines à plus de 100 mm/h tombant pendant une à deux heures sur quelques hectares ou quelques km². Ces précipitations peuvent passer à travers le réseau de mesure au sol de Météo France en raison de la très faible extension de la zone pluvieuse. Leur rapidité d’évolution est d’autant plus importante que la surface est imperméabilisée.
70Les crues subites dites « crues éclair » se produisent sur des surfaces comprises entre quelques km² et 100 km². Elles sont également liées à des paroxysmes de forte intensité donnant un cumul pluviométrique compris entre 100 et 300 mm en quelques heures. Il en résulte des débits de pointe de crue important pouvant se situer, selon la taille et les composantes physiques du bassin, entre 50 et 1 000 m3/s pour une crue centennale.
71Les crues rapides se développent sur des surfaces comprises entre 200 et 5 000 km². Elles se déroulent sur un laps de temps relativement cours (entre 6 et 36 heures) avec un temps de concentration de moins de 12 heures pour des bassins de 1 000 km². La rivière Ardèche à Sauze comme les bassins néocalédoniens décrits ci-dessus sont à inscrire dans cette catégorie. Les débits de pointe se situent dans une fourchette allant de 500 à 5 000 m3/s pour une crue centennale selon les bassins versants. Les intensités pluviométriques horaires sont de plusieurs dizaines voire centaines de mm (cyclones tropicaux) et les cumuls au cours des épisodes pluvieux de plusieurs centaines de mm.
72Ces différents types de crues favorisent des inondations rapides par débordement de cours d’eau comme des inondations par ruissellement urbain, non absorbé par les réseaux de collecte des eaux pluviales.
73Dans le cas des averses pluviométriques extensives et de longue durée, la montée des eaux comme la décrue sont lentes et progressives et donc prévisibles. Elles permettent généralement de prendre les dispositions nécessaires de prévention auprès des populations directement concernées par le phénomène. Les crues lentes durent, selon les bassins, de plusieurs jours à quelques semaines et se caractérisent par des débits de pointe en crue centennale pouvant se situer entre 2 500 et 12 000 m3 /s pour des bassins de 15 000 à 100 000 km². Ainsi, le débit de pointe du Rhône à Givors (bassin versant de 51 000 km²), consécutif à des pluies de plusieurs jours comprises entre 100 et 230 mm et ne dépassant pas une intensité maximale horaire de 10 mm, s’établit à 4 500 m3 /s le 16 février 1990 (Dauge, 1999). Le volume écoulé au cours de l’événement représente 2 300 millions de m3. Plus modeste par sa superficie, la Vilaine à Le Boël (bassin versant de 3 298 km²) atteint un débit de pointe de 405 m3 /s le 23 janvier 1995 à la suite de précipitations de faible intensité (maximum horaire de 15 mm) dont le cumul est compris, selon le secteur, entre 150 et 250 mm. Le volume écoulé atteint cependant 1 100 millions de m3. Ces crues lentes donnent naissance, par débordement des cours d’eau, à des inondations de plaine. Les pluies de longue durée qui permettent la saturation des sols favorisent également le gonflement des nappes phréatiques voire l’apparition de la nappe en surface. Des inondations par remontée de nappes d’eau souterraine s’étendent alors dans les points bas.
74Les évènements des dernières années permettent ainsi d’identifier 3 types d’inondations :
Les inondations de plaine à montée lente par débordement ou par remontée de nappes qui laissent le temps de prendre des mesures de protection et d’évacuation et font, en général, peu de victimes ;
Les inondations rapides par débordement de cours d’eau qui se propagent à vitesse élevée et demeurent très dangereuses pour les personnes ;
Les inondations urbaines, extrêmement véloces, qui empruntent les rues et réoccupent les anciens lits urbanisés (Nîmes en 1988). Elles résultent des difficultés d’évacuation des eaux de ruissellement et de l’accroissement du volume d’eau ruisselé sur les surfaces imperméabilisées.
75L’aléa inondation désigne finalement un processus physique lié à la dynamique atmosphérique et terrestre, parfois influencé par les aménagements humains. Il présente de multiples facettes à l’échelle de la France et constitue des épisodes « normaux », dans le sens où les fluctuations hydroclimatiques sont inhérentes au système naturel. Néanmoins, ces inondations correspondent à des épisodes qui représentent une source de dangers potentiels et donc de risques pour une population ou un individu. Ces évènements peuvent prendre, lorsqu’ils se déclenchent, la dimension de crise voire de catastrophe pour les évènements les plus graves. Diverses par les facteurs de déclenchement, leur rapidité d’évolution, leur fréquence comme leur puissance, les inondations demeurent un élément de contrainte difficile à intégrer dans le développement des territoires.
Notes de bas de page
1 Occurrence : correspond au dénombrement, par commune, du nombre d’arrêtés de déclaration de catastrophe naturelle. Une commune inondée « x » fois aura ainsi « x » occurrences.
2 Le terme de « crue » correspond à une forte augmentation, plus ou moins brutale et aléatoire, du débit d’un cours d’eau et, par conséquent, du niveau (i. e ; de la hauteur) de l’eau dans le celui-ci. Il en résulte des débordements dans le lit majeur (i.e. les inondations), dommageables par leur extension spatiale, leur durée et/ou par la violence des écoulements.
3 Les pluies comme les crues sont souvent définies, en dehors de leur puissance ou de leur intensité, par leur récurrence qui se définit en selon leur période de retour. Une crue dite « centennale » correspond ainsi à un évènement dont la période de retour (ou la récurrence) est de 100 ans. Il faut toutefois garder à l’esprit que lorsqu’une crue "centennale" vient de se produire, cela ne veut pas dire qu’on est "tranquille" pendant 100 ans, mais qu’en fait cette même crue a, dès l’année suivante, une chance sur 100 de se reproduire. Deux crues centennales peuvent donc se produire deux années consécutives.
4 La notion de « ruissellement » correspond à la circulation de l’eau sur les versants, que cette circulation soit connectée ou non à un drain permanent.
5 Laganier R. et Davy L. (2000) : La gestion de l’espace face aux risques hydroclimatiques en région méditerranéennes, pp. 13-38, in Bravard J.P. Les régions françaises face aux extrêmes hydrologiques, SEDES.
6 Trzpit J.P. (2001) : A l’origine des grands abats d’eau diluviens, in Eaux sauvages, eaux domestiquées, Hommage à Lucette DAVY, Publications de l’Université de Provence, pp. 25-39.
7 L’évapotranspiration, exprimée généralement en hauteur d’eau, traduit la quantité d’eau évaporée physiquement et transpirée, notamment par les végétaux. Elle dépend à la fois de facteurs locaux (nature des états de surface) mais également de facteurs climatiques (vent, température, humidité relative de l’air, degré d’ensoleillement…).
8 J. Mania a également montré l’influence de la nappe de la craie sur les débits et les crues de la Canche, petit fleuve côtier situé au nord de la Somme, au cours de l’année hydrologique 1969-1970 (Mania, 1979)
9 Le ressuyage correspond à la circulation, sous l’effet de la gravité, de l’eau libre contenue dans le sol
10 Pour plus de détails sur l’analyse de ces processus élémentaires, voir l’ouvrage de Claude Cosandey et Mark Robinson, Hydrologie continentale, Colin, 2000, 360 p. ou l’ouvrage collectif dirigé par Claude Cosandey, Les eaux courantes, Belin, 2003, 240 p.
11 Cependant, les différences urbain-rural peuvent diminuer pour des pluies de très fortes intensités en fonction de la capacité d’infiltration des sols.
12 L’ouvrage « L’environnement en France » de l’IFEN (éditions 2002 – La Découverte) pose clairement, dans une perspective plus systémique, le problème de l’étalement urbain, tant sur le volet hydrologique que sur le plan de la qualité de l’air ou des paysages.
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