De l'identification des violences institutionnelles à la nouvelle entropie des organisations : quelles issues ?
p. 15-48
Texte intégral
1Quand on regarde le nombre de symptômes dont souffrent nos organisations aujourd'hui : stress, burn-out, addictions, violences harcèlement, on peut dire que manager les hommes est devenu un problème de société impérieux auquel il est plus que temps de faire face.
2Mais en quoi consiste cette ou ces violences dont souffrent nos contemporains dans leur travail et dont nous affirmons ici qu’elle serait massivement méconnue ?
3Les raisons du malaise sont multiples et les recherches pratiquées ces dernières années, tant en France qu’à l’étranger, révèlent derrière les vitrines du progrès social un monde de souffrance qui laisse parfois incrédule.
4Il y a ainsi selon Dejours (1998), ceux qui supportent la violence de l’organisation du travail par peur de n’être pas à la hauteur des contraintes de temps, de cadence, de formation, d’information, d’apprentissage, de niveau de connaissances et de diplômes, d’expériences, de rapidité d’acquisition intellectuelle et pratique d’adaptation à la « culture » ou à l’idéologie de l’entreprise, aux contraintes du marché, aux rapports avec les clients, les particuliers ou le public, etc.
5Une autre cause fréquente de violence vécue au travail survient alors même que la compétence et le savoir-faire sont hors de cause. Celui qui travaille sait ce qu’il doit faire, mais il ne peut pas le faire, parce qu’il en est empêché par les contraintes sociales du travail. Les rapports avec les collègues sont alors, conflictuels avec des attitudes d’entrave et de désaveu de l’action dans un climat social désastreux. Chacun travaille seul, cependant que tous pratiquent la rétention d’informations qui ruine la coopération. Les tâches dites d’exécution fourmillent de ce type de contradictions où l’on empêche, en quelque sorte, le travailleur de faire correctement son travail. D’autre fois on le coince dans des procédures et des réglementations incompatibles entre elles l’acculant dans des situations de doubles contraintes insupportables.
6Une autre manière de faire souffrir, c’est de priver l’autre de reconnaissance. En effet, les résultats des travailleurs sont obtenus en général au prix d’efforts qui engagent toute leur personnalité et leur intelligence. Il y a certes des gens malhonnêtes qui profitent du système mais, dans leur majorité, ceux qui travaillent s’efforcent de faire au mieux et pour cela donnent énormément d’eux-mêmes. Il est juste alors, que cette contribution soit reconnue. Mais elle passe inaperçue dans l’indifférence générale, il en résulte alors une souffrance dangereuse pour la santé mentale. En effet, la reconnaissance attendue par celui qui mobilise sa subjectivité dans le travail peut le conduire à une dramatique crise d’identité. Car, faute des bénéfices de la reconnaissance de son travail et de pouvoir accéder ainsi au sens de son rapport vécu au travail, le sujet est renvoyé à sa souffrance et à elle seule. Souffrance absurde qui ne génère que de la souffrance, selon un cercle vicieux déstructurant et déstabilisateur de l’identité et de la personnalité, qui conduit en fin de compte à toutes ces maladies nouvellement apparues au cours de ces vingt cinq dernières années.
7Masclet (Lemoine & Masclet 2007), constatant l’ampleur du phénomène parle de nouvelle entropie des organisations. Selon lui, la violence générée par les diverses institutions managériales a été intégrée de façon individuelle par les acteurs des différentes organisations et la conséquence c’est qu’ils doivent désormais faire face seuls à celle-ci. En effet, depuis une vingtaine d’années les collectifs sociaux se sont érodés. La montée de l’individualisme, conséquence de l’effritement du lien social à partir des années 70 est le fait de la disparition progressive de l’industrie classique qui a fait place à une activité super-technicienne « de blouses blanches » et à une à une montée croissante des emplois de services. La classe ouvrière qui jusqu’alors était le moteur des collectifs sociaux face au capitalisme sensé les aliéner de la plus value de leur travail s’est considérablement amoindrie voire a disparu. Ceci a eu pour conséquence de donner lieu à l’apparition de comportements nouveaux face à des managements où la dimension humaine avait disparu. Tout s’est alors passé comme si une compétition entre les hommes s’installait et où les meilleurs d’entre eux devaient gagner. Les solidarités des générations passées semblaient être devenues caduques pour les plus jeunes d’entre elles parce que considérées comme archaïques. Ainsi le syndicalisme et la grève devenaient même antisociaux puisque gênant les « Services » et le droit au travail de chacun. Dans cette nouvelle configuration c’est par sa seule compétence que chacun en toute autonome doit faire face à sa situation professionnelle. Certains y parviennent mais une majorité s’épuise dans l’exercice, donnant naissance à une société dont le quotidien est empreint d’une grande morosité.
8La contribution qui suit n'a pas pour objectif de donner des solutions au malaise qui s'est ainsi globalisé à notre société et aux organisations et que d'aucun appelle la crise par identification au malaise économique. Notre but est de mieux comprendre la nature du malaise, d'en saisir les fondements et de proposer quelques pistes de remédiations.
1- La position du problème
9Comme on le constate aujourd'hui, le malaise dans les organisations concernent moins le collectif des entreprises que les individus eux-mêmes et le phénomène questionne par son effet massif. Un tel phénomène ne laisse pas insensible les dirigeants d'entreprises, à la fois, pour des raisons économiques, mais aussi humaines. En effet, le coût du remplacement d'un opérateur amène l'entrepreneur aujourd’hui, pour des raisons qui ne sont plus essentiellement pécuniaires, à plus de considérations pour lui. Le portefeuille de compétences d'une entreprise est devenu ainsi, au moins, aussi important que le capital de celle-ci. Les organisations qui n'en sont pas convaincues risquent un jour d'en payer, dans tous les sens du terme, le tribut. Voyons comment le malaise se manifeste objectivement
Le stress au travail
10De nombreuses études avancent que le phénomène du stress au travail est en pleine augmentation. Déjà en 2000 une enquête réalisée par la fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail, montrait que 29 % des salariés européens souffraient de problèmes de santé liés au stress, dans leur vie professionnelle, contre 20 % en 1985. En Suède, en 1999, 14 % des travailleurs étaient en congés de maladie de longue durée, à cause du stress. Une autre enquête en France en 2000 (Enquête liaisons sociales, Manpower. CSA) montrait que 72 % des salariés français ressentaient du stress au travail, que 58 % d'entre eux estimaient ressentir plus de stress qu'il y a quelques années et que 56 % pensaient que le stress au travail allait s'aggraver. (Légeron, 2001). En 2008, un rapport sur la détermination, la mesure et le suivi des risques psychosociaux au travail de Philippe Nasse, magistrat honoraire et Patrick Légeron, médecin psychiatre remis à M. Xavier Bertrand, alors Ministre du Travail, des Relations sociales et de la Solidarité (Légeron & Nasse, 2008) signalait que le stress allait continuer à poser un ensemble de problèmes divers, complexes et importants du fait du poids de leurs conséquences. Un des motifs majeur évoqué, réside dans le fait que, les risques liés au stress, se développent à la frontière entre la sphère privée (le psychisme individuel) et la sphère sociale (les collectifs d’individus au travail), ils sont au cœur de beaucoup de conflits.
11Plus récemment, encore en France, du 11 au 19 juin 2009 a lieu la "Semaine pour la qualité de vie au travail" organisée par le Réseau de l’Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail (ANACT). Cette manifestation s’adressait à tous les acteurs concernés par les questions de santé au travail (responsables d’entreprises, médecins du travail, partenaires sociaux, etc.) et avait pour thème, la prévention du stress et des risques psychosociaux au travail.
12Pour lancer cette semaine de débats et de réflexion, l’ANACT avait fait réaliser un sondage national (ANACT/CSA, 2009) auprès des salariés sur leur perception du stress au travail. Selon ce sondage, parmi les 40 % de français qui se déclaraient "stressés", 60 % disaient l’être du fait de leur travail. Les causes évoquées concernaient l’organisation du travail (surcharge, multiplication des tâches parallèles, absence de moments ce répit), le niveau des rémunérations, les relations avec la hiérarchie et les collègues, les impératifs de flexibilité liés aux changements. Ce sondage confirmait en grande partie les résultats des études publiées le 9 juin 2009 par l’Institut de veille sanitaire (INVS) sur le thème « Santé mentale et travail ».
13Lors de l’installation le 30 avril 2009 du Conseil d’orientation sur les conditions de travail (le COCT, qui remplace le Conseil d’orientation de la prévention des risques professionnels), le ministre du travail a demandé à ce nouvel organisme de mettre la lutte contre le stress et les troubles psychosociaux au travail au rang de ses priorités dans l’élaboration du nouveau « Plan santé au travail 2010-2014 » qui doit être établi d’ici à la fin de cette année. (COCT 2009).
14Il faut savoir que les conséquences du stress au travail sur les individus, sont multiples. En effet, au bout de quelques semaines de confrontation à une situation stressante, des symptômes divers peuvent apparaître, tels que :
au niveau physique, des douleurs (maux de tête, douleurs musculaires, articulaires, etc.…), des troubles du sommeil, de l’appétit et de la digestion, des sensations d’essoufflement ou d’oppression ;
au niveau émotionnel, une sensibilité et une nervosité accrues, des crises d’angoisse, une excitation, un sentiment de mal-être, de l’anxiété et une baisse d’estime de soi ;
au niveau intellectuel, des perturbations de la concentration entraînant des erreurs et des oublis, des difficultés à prendre des initiatives ou des décisions ;
au niveau comportemental, le recours à des produits excitants ou calmants (café, tabac, alcool, somnifères, anxiolytiques, etc.…), les conduites à risques, le repli sur soi, l’irritabilité et l’agressivité.
15Ces symptômes sont interdépendants, la survenue de l’un pouvant faciliter l’apparition de l’autre, au moment de la situation stressante. Si la situation de stress se prolonge, ces symptômes s’installent ou s’aggravent, entraînant des altérations de l’état de santé parfois irréversibles. Des recherches montrent que les perturbations métaboliques, causées par un état de stress, représentent des facteurs de risque pour le système cardiovasculaire, et augmentent notamment le risque de maladies coronariennes (Pepin, 1991). D’autres recherches montrent que les problèmes d’anxiété, le risque de dépression nerveuse et d’épuisement professionnel sont plus importants (Cooper et Payne, 1991 ; Arsenault, A., Dolan, S. et Van Ameringen, 1990 ; Edelwich et Brodsky, 1980). L’état de stress faciliterait également la survenue de troubles musculo-squelettiques. Enfin, l’état de stress prolongé induirait la diminution de la résistance aux infections, des maladies immunologiques, l’ulcère gastro-duodénal, des désordres hormonaux et certaines pathologies de la grossesse.
16Les effets du stress sur les entreprises peuvent être de deux types :
des conséquences au niveau de l’implication du personnel : désinvestissement, absentéisme (M. Vézina, 1999), départs volontaires, etc…
des conséquences au niveau des performances individuelles : difficultés de concentration, augmentation des erreurs, incidents et accidents, turnover, baisse de la productivité (Randal et Altmaier, 1994), baisse de la qualité des produits ou des services, etc.…
17Mais des raisons purement économiques nous incitent aussi à prendre au sérieux les nouvelles entropies, au risque de voir l'Occident payer plus pour soigner ses travailleurs que pour les rémunérer. Ainsi aux Pays-Bas, les troubles psychologiques causés par le stress au travail sont estimés à 2,26 millions d’euros par an. En Grande-Bretagne, les maladies liées au stress causent chaque année la perte de 6,5 millions de journées de travail, ce qui coûte aux employeurs environ 571 millions d’euros et jusqu’à 5,7 milliards d’euros à l’ensemble de la société. En France, les accidents et incidents techniques au travail dus au stress étaient déjà fin des années 90 responsables d'une perte de chiffre d'affaires d'environ 4 % dans l'industrie métallurgique (Stora, 1997). Enfin, au plan européen, on estime que les coûts annuels du stress s’élèvent au moins à 20 milliards d’euros.
18Des études épidémiologiques menées durant ces mêmes années montrent que les pathologies liées à l'excès de stress se développent dans les pays industrialisés et des études économiques évaluent le coût induit par ces pathologies de 2 à 3 % du PNB de l'Union Européenne (Bressan, cité par Légeron, 2001). Dans ces mêmes pays on évalue à 60 % l'ensemble des journées de travail perdues à cause du stress (Légeron, 2001). Au plan européen, on évalue à 41 millions le nombre de salariés concernés par des problèmes de santé dus au stress au travail. Et, ce coût atteindrait annuellement 20 milliards d'euros (Chouanière et al. 2003).
19Le coût du stress au travail a donc pris une ampleur considérable et ne semble pas se résorber, mais là ne sont pas ses seuls aspects négatifs. En effet, outre le fait qu'il soit à l'origine de troubles somatiques importants (anxiété, fatigue, ulcères gastriques, angine de poitrine, eczéma…) il est à l'origine de copings inadaptés que les individus développent pour faire face aux tensions auxquelles ils sont confrontés. Ainsi le burn-out, des violences, des conduites addictives de différentes natures se développent de façon dramatique dans les organisations de tous ordres.
Le burn-out et l'organisation
20Le burn-out selon Schirom (2003) peut se définir comme « une réaction affective au stress permanent et dont le noyau central est la diminution graduelle, avec le temps, des ressources énergétiques individuelles, qui comprennent l'expression de l'épuisement émotionnel, de la fatigue physique et de la lassitude cognitive ». Selon Truchot (2004), le burn-out contribue à augmenter l'insatisfaction au travail et à diminuer l'engagement et l'implication des opérateurs. Dans leur travail ces derniers commettent des erreurs qu'on ne peut attribuer ni à leur manque de connaissance ni à leur carence d'expérience. Enfin le burn-out est aussi souvent à l'origine de la détérioration des relations entre collègues, mais aussi dans celle des rapports avec les clients, les patients, les élèves… Selon Masclet et coll. (2007), il apparaît que les personnes qui développent un burn-out ont en commun initialement la quête d’un idéal professionnel dans lequel elles s'épuisent tant la réalité et leurs désirs propres les mettent dans des situations contradictoires.
La violence au travail
21La violence au travail est un phénomène préoccupant partout dans le monde et en forte progression. Ses répercussions sur la santé inquiètent à la fois les médecins du travail et les psychiatres. Elle s'origine le plus souvent dans l'organisation inadaptée du travail. Ainsi, la violence institutionnelle exercée par une personne ou un groupe de personnes rassemble aussi bien le mobbing que le harcèlement moral et sexuel. Ce sont des agressions répétées et durables, auxquelles on ne peut attribuer un mobile.
22Le harcèlement moral est une technique de destruction consciente ou inconsciente de la personne visée. C'est une violence psychologique, qui peut comporter une variété d'expressions. Injures, propos humiliants, isolation forcée en sont les manifestations les plus courantes. Parmi les principales formes de violence psychologique nous retiendrons pour étude ici, le bullying, le mobbing.
23Le bullying est une forme de harcèlement, qui s'exprime dans le milieu du travail, par un ensemble de pressions. Elles consistent en « des comportements offensants, toujours imprévisibles, irrationnels et injustes par lesquels une ou plusieurs personnes, souvent des gestionnaires, visent à rabaisser de façon persistante un ou plusieurs salariés par des moyens malveillants et humiliants » (Chappell et Di Martino, 2000).
24Le mobbing selon Leymann (1996) est un processus de harcèlement d'une victime par un ou plusieurs persécuteurs à la suite d'un conflit banal. Il s'agit d'un processus auto-entretenu et répété sur une longue période qui se manifeste notamment par des paroles, des gestes, des écrits unilatéraux, de nature à porter atteinte à la personnalité, à la dignité ou à l'intégrité physique ou psychique de l'autre.
25Mais, l'institution elle-même, peut être génératrice de violence. Ainsi le harcèlement institutionnel participe d'une stratégie de gestion de l'ensemble du personnel. Dans ce cas précis la violence ne relève pas d'un problème épisodique ou individuel mais bien d'une réalité structurelle et stratégique (Dejours, 2000). Le harcèlement professionnel, est parfois organisé à l'encontre d'un ou plusieurs salariés précisément désignés. Cette stratégie managériale est destinée à contourner les procédures légales de licenciement (Dejours, 1998).
Les addictions en milieu professionnel
26Plusieurs facteurs favorisent la prise de psychotropes sur le lieu de travail. D'une part, le monde de l'entreprise valorise une certaine attitude, celle de l'homme sociable, sûr de lui, boute-en-train. D'autre part, les notions de performance et de compétition poussent certains salariés à utiliser des produits psychoactifs pour faire face aux contraintes de leurs tâches, gérer la pression... pour tenir le coup.
27Aussi, le milieu professionnel expose-t-il les personnes à des pressions psychologiques qui peuvent inciter à fumer, consommer de l'alcool ou se droguer. Ces comportements à risques constituent pour elles un système de défense face au stress, aux tâches répétitives et peu motivantes, aux changements de l'organisation du travail, aux horaires perturbés, à l'absence de reconnaissance, à l'insatisfaction au travail, aux harcèlements, à la peur de perdre son emploi, aux objectifs non atteignables, à la dégradation des relations au travail, aux problèmes de communication, à l'isolement...
28Les conséquences de ces comportements à risques sont dramatiques. Ainsi rien que la prise d'alcool (Garnier 2006) sur le lieu de travail serait à l'origine de 15 à 20 % des accidents du travail et d'un taux similaire d'absentéisme, de conflits au travail et de licenciements. Les conséquences économiques ne sont pas moindres et se traduisent par des pertes de productivité, des baisses de la qualité, des risques d'incidents, des erreurs, des risques pour les outils de production, des retards, des dégradations de l'image de l'entreprise, des risques pénaux et civils pour l'employeur…
29Toutefois, il est à noter que si la consommation d'alcool diminue ou se stabilise, l'usage de cannabis et de produits psychoactifs est en forte hausse. Désormais dans le monde du travail comme dans le milieu sportif, la recherche de performance entraîne l'utilisation de produits qui y participent. On peut remarquer de manière générale, une augmentation des pressions et du stress ressenti par les travailleurs. En effet, depuis 5 à 10 ans, les médecins du travail voient arriver des salariés qui consomment des substances psychoactives à des fins de dopage.
30Selon Hautefeuille (ANPAA, 2005) médecin du travail, « les personnes qui viennent nous voir ne sont pas toxicomanes, elles sont tout simplement piégées à l'intérieur d'un système de dopage… » En effet, les salariés qui présentent des conduites addictives partagent avec les non-usagers, une image très négative de la toxicomanie. L'intégration économique et le maintien d'un statut social restent chez eux une préoccupation majeure.
31Cette manière nouvelle depuis une trentaine d'années, de considérer l'activité comme une dimension centrale de sa vie, a entraîné des formes de dépendances contradictoires : le workaholisme ou l'addiction au travail. Celle-ci se définit comme une relation pathologique d'un sujet à son travail. Elle est caractérisée par une compulsion à lui consacrer toujours plus de temps et d'énergie. Le sujet se dévoue entièrement à son travail en excluant toute autre activité ou investissement (familial par exemple). Il s'identifie à son rôle professionnel et sa carrière prend une importance exorbitante. Le phénomène de dépendance est durable. Il persiste en dépit des conséquences négatives sur la santé physique et psychologique et sur la vie sociale. Ce trouble est plus souvent le lot des classes sociales moyennes ou supérieures.
32Fassel (1992) dit de l'addiction au travail, que c'est la plus "clean" de toutes les addictions. Mais c'est aussi une des plus difficiles à combattre du fait de l'importance de la pression sociale qui la renforce. Elle est encouragée par la société parce qu'elle semble être socialement productive. En effet, le travail et l'auto esclavagisme du workaholique n'ont jamais suscité d'objections de la part des dirigeants ni même de la société. Pour comprendre cette dépendance, il faut la comparer au travail des artisans et des commerçants qui de tous temps ont travaillé beaucoup sans pour autant être workaholiques. Comprenons que pour ces derniers, l'outil de travail et sa pérennisation imposait le débord. Mais pour le workaholique, le travail n'est pas motivé par des causes ou des conséquences matérielles ou économiques, ni par la réalisation d'une œuvre quelconque. C'est l'exécution elle-même et ses propres procédures qui constituent l'objet de la dépendance. On peut ainsi établir un parallèle entre le workaholisme et d'autres conduites addictives telles que les jeux d'argent, les troubles alimentaires, le sport ou l'hypersexualité.
33Il est évident que dans bien des cas, cette pathologie, surtout au début, ne dérange pas les dirigeants des entreprises qui voient là du dévouement, de la conscience professionnelle et bien d'autres alibis organisationnels. Il faut quand même avoir à l'idée que l'intoxiqué du travail finit par être source de conflits et de discriminations. Le workaholique finit par irriter tout le monde et générer des conflits de tous ordres. Il est continuellement occupé, constamment accaparé par son travail. Il évite ses collègues tant sur le registre relationnel institutionnel que sur le plan humain. Il effectue régulièrement des heures supplémentaires sans rémunération. Il rechigne souvent à prendre ses jours de congés. Sa vie personnelle n'est pas non moins affectée. Il néglige puis fuit ses relations personnelles. Sa vie hors travail n'existe plus et ne constitue plus un coping face au stress généré par le travail. Les retentissements somatiques ne se font souvent pas attendre. Ce sont d'abord des céphalées chroniques, puis des lombalgies. À l'extrême, des troubles dépressifs apparaissent puis des ulcères, de l'hypertension voire des infarctus et souvent le bum-out (Fassel, 1992).
34Selon Masclet (2008), les personnes qui versent dans la dépendance ou l’addiction présentent souvent la caractéristique d’avoir eu dans l’enfance, des difficultés à établir des relations interpersonnelles où les émotions positives dominent. En conséquence de quoi, elles vont privilégier des relations avec des objets inanimés qui leur donnent des sensations qu’elles peuvent contrôler. Le problème c’est que certains objets ou produit peuvent après une utilisation répétée les rendre dépendants. C’est le cas de la drogue notamment.
2- L'origine du malaise : la libéralisation des managements
35Comme on le constate le stress ambiant et permanent auquel, nos contemporains ont à faire face, engendre divers malaises qui s'apparentent à des violences subies par manque de copings adaptés à la nouvelle donne organisationnelle. Masclet (Lemoine & Masclet, 2007) origine le malaise dans l'inadaptation à la "Modernité" que les organisations tentent d'introduire dans leur philosophie managériale.
36La première phase du libéralisme organisationnel fut initiée par Maslow (1946) dès les années 50 aux États Unis. Ce courant a cherché à intégrer l’individu à l’organisation en tentant de modifier les structures formelles et le fonctionnement qu’elles induisaient, pour qu’ils répondent aux besoins de l’homme en général et des travailleurs en particuliers. Il fallait pour cela (Masclet, 2000) une théorie capable de dépasser la simple reconnaissance des besoins économiques (théories classiques) et des besoins sociaux (théories du courant des relations humaines).
37Maslow (1946) propose un modèle hiérarchique qui distingue cinq types de besoins : les besoins physiologiques, les besoins de sécurité, les besoins sociaux, les besoins d’estime, les besoins de réalisation. Sans négliger les autres niveaux, le courant des néo-relations humaines s'est surtout intéressé aux besoins d’estime (être considéré de façon positive par les autres et par soi-même), et aux besoins de réalisation (atteindre ses propres buts et développer l’ensemble de ses potentialités). Toutefois, ce sont D. Mc Grégor (1974), C. Argyris (1970) et R. Likert (1974) qui ont tenté de voir comment les organisations pouvaient aller à la rencontre de ces besoins.
38Parmi les principes traditionnels de fonctionnement des organisations, Mc Grégor (1960, trad. Franç. 1974).) mis particulièrement en question celui de l’autorité conçue comme unique moyen de contrôle du comportement humain. Pour étayer son argumentation, il distingua deux conceptions de la nature humaine qui pouvaient sous-tendre les théories organisationnelles : la théorie X qu’il rejette, et la théorie Y.
39Selon la théorie X, qui inspire l’organisation classique, l’individu moyen n’aime pas le travail : c’est une punition divine (on rappelle ici le mythe d’Adam et Eve) à laquelle il essaie de se soustraire. Si l’organisation veut atteindre ses objectifs, elle doit contraindre, contrôler et menacer de sanctions les travailleurs qui préfèrent le contrôle et la sécurité aux responsabilités.
40Pour la théorie Y, l’individu moyen ne répugne pas au travail qui est une situation de la vie comme une autre, tel le jeu ou le repos. Le travailleur peut s’autocontrôler lorsqu’il se sent responsable de l’atteinte de certains objectifs et celle-ci lui permet de satisfaire ses besoins d’estime et de réalisation. Pour peu que les circonstances soient favorables – et il ressort de l’œuvre de Mc Grégor (1974) que c’est à la direction de l’organisation de les susciter – l’individu moyen apprend à accepter voire à rechercher les responsabilités. La théorie Y considère enfin que la créativité est une qualité partagée par un grand nombre de personnes mais que les capacités intellectuelles des travailleurs sont sous-employées par les organisations.
41Toute mise en pratique de la théorie Y suppose un degré satisfaisant d’intégration des besoins (particulièrement des besoins sociaux, d’estime et de réalisation) et des buts de l’individu aux objectifs de l’organisation. Mc Grégor propose dans cette perspective des analyses et des recommandations concernant notamment la direction par objectifs, l’appréciation des performances, les relations hiérarchie-services fonctionnels et la formation des dirigeants.
42C. Argyris (1957, 1964, trad. Franç. 1970), pensait que toute organisation a besoin pour fonctionner efficacement de l’énergie psychologique qui s’accroît ou décroît suivant que ses membres connaissent ou non le succès psychologique. Trois conditions sont nécessaires pour parvenir à celui-ci :
que les individus s’accordent de la valeur et aspirent à éprouver un sentiment croissant de compétence.
que l’organisation fournisse à ses membres des occasions de faire la preuve de leur efficacité dans l’atteinte des objectifs.
que la culture dans laquelle baignent les individus et l’organisation valorise l’estime de soi et la compétence.
43Rensis Likert (1961 trad. franç. 1974) pensait lui que le management de type participatif est le plus à même d’entraîner des résultats. Pour cela il traça d’abord le profil psychologique des organisations en distinguant quatre systèmes de management :
Le style autoritaire exploiteur : le management par la peur et la contrainte.
Le style autoritaire-paternaliste : le management par la carotte plutôt que le bâton, mais les opérateurs restent soumis.
Le style consultatif : la direction se sert à la fois de la carotte et du bâton et s’efforce de communiquer avec les employés. La communication est ascendante et descendante. Les décisions sont prises par la hiérarchie.
Le style participatif : dans cette forme managériale les employés participent à des groupes de décisions. Ces derniers sont à même de prendre des décisions quand le cas se présente. La direction fixe des objectifs à atteindre et travaille étroitement avec les opérateurs pour les stimuler dans la réalisation de leurs performances. La communication est horizontale et verticale entre pairs et supérieurs qui sont proches psychologiquement. Les prises de décisions s’effectuent selon un mode participatif.
44Les styles managériaux qui ont inspiré ce courant de pensée des années 70 se fondaient sur l’idée que pour être efficaces, les organisations devaient être comprises comme étant formées d’un ensemble cohérent de groupes interactifs, composés d’individus se soutenant mutuellement. Dans l’idéal le but était donc de construire des organisations dont les objectifs concernaient chacun personnellement. Nous étions en plein libéralisme humaniste. Hélas l’utopie ne dure guère quand il s’agit de servir le capitalisme ou la chrématistique.
45En effet, dans ce contexte, deux maîtres mots semblaient devoir organiser les hommes : « l’Autonomie et la Compétence ». Ils étaient devenus les outils conceptuels pour que chacun vive sa liberté, tant au travail, que dans la société. Hélas, les idées évoluent plus vite que les comportements humains. On ne change pas les rapports sociaux, les modes de communications, les relations interindividuelles d’un coup de baguette magique (Masclet, 2000). Dans les organisations classiques, chacun savait en arrivant à l’usine, au bureau, les formules qu’il devait employer : « bonjour Monsieur… Il fait beau… Comment vont les enfants… » chacun connaissait le rôle qu’il avait à jouer de par le statut qui lui était dévolu. Chacun manipulait les quelques zones d’incertitudes du système pour ne pas être complètement aliéné par lui. Chacun appartenait à un groupe de pression officiel ou officieux… Les règles étaient connues de tous. Pour « exister » dans l’entreprise il suffisait de se les approprier. Plus rien de tout cela ne fonctionne en système libéral. Les chefs enragent de ne plus être reconnus et obéis. Ils se sentent niés, incompris, inconsistants, inutiles… Quant aux opérateurs à qui on a donné la liberté, ils se sentent de plus en plus mal à l’aise, et démotivés. Que signifie cette liberté ? N’est-elle pas un piège ? Eston vraiment libre se demandent-ils ? Libre de quoi ? Pourquoi, ces chefs sans pouvoir tentent-ils d’exister au travers de prises de positions fantaisistes ou de nouvelles formes de harcèlement moral ?
46Une bien dure époque où les modèles de comportements du passé n'avaient plus cours, et où les nouveaux n'étaient pas encore rodés ou inventés.
47Il est évident, que les entreprises libérales ne pouvaient s'accommoder de cette réalité. Le capitalisme se veut libéral tant que la production reste à la hauteur de ses attentes de production ou les dépassent. Ce ne fut pas le cas et la crise des années 70 désignée par « choc pétrolier » entraîna une réorientation des conceptions managériales. Il s'est agi alors selon Masclet (2004) de mobiliser chez les individus les dimensions narcissiques les plus élémentaires et de les mettre en compétitions, comme ils y sont accoutumés depuis leur enfance à l'école.
3- Les fondements des “News Managements”
48Nicole Aubert (1991) nous décrit comment les nouveaux managers s'y prennent pour mobiliser les individus par devers eux.
49Les techniques sont variées et peu étudiées par les psychologues en France. Ces derniers ont en effet, deux attitudes humanistes vis à vis d’elles. Soit ils les rejettent au nom de la déontologie, soit ils en étudient les effets pour mieux les dénoncer par exemple dans les études sur le burn-out ou sur le stress.
50Une première méthode consiste à mettre l’individu en tension sur le plan narcissique :
par une forte sélectivité au niveau de l’embauche
par une politique active de gratifications
par une image de toute puissance
par une ambiance élitiste…
51Une deuxième consiste à faire en sorte que l’individu mobilise ses mécanismes de défenses contre l’angoisse pour renforcer l’investissement au travail :
par une mobilité et une flexibilité des structures
par des emplois du temps très chargés
par la résolution des problèmes dans l’urgence
par la survalorisation de l’action…
52Une troisième tend à canaliser l’énergie libidinale sur des objectifs productifs :
par des possibilités de promotions rapides
par l’exigence du toujours plus
par la domination des exigences commerciales…
53Une quatrième encore prône la production et encourage l’adhésion :
par l’excellence
par l’image de perfection
54Une cinquième enfin procède en favorisant l’identification et la prise en charge psychologique des exigences de l’entreprise :
par les entretiens de carrières
par l’individualisation des performances
par l’autonomie dans l’organisation du travail
par l’auto-actionnariat…
55Ces principes managériaux reposent en fait sur un ensemble de représentations (des images, des valeurs, une culture d’entreprise, une éthique, une philosophie basée sur un idéal commun) et un modèle de personnalité (fondé sur le désir de réussite, d’aimer la compétition et le challenge, la réalisation de soi dans le travail, l’accomplissement personnel, le goût de la communication). Ils se fondent sur l’idée de la mobilisation des ressources humaines et font de l’implication des hommes avec eux ou malgré eux, le facteur essentiel de l’efficacité des entreprises. Dès lors, les dimensions psychologiques du management prennent une importance considérable. Il se noue en effet une relation interactive entre la structure psychique et la structure organisationnelle, qui suppose une adéquation entre le profil structurel et fonctionnel de l’organisation et la personnalité des salariés. Ce système « socio-mental » du management moderne se paie d’un fort coût humain. Les bénéfices psychologiques : accomplissement personnel, narcissisme, plaisir, créativité… sont contrebalancés par des brûlures psychiques comme le stress, la dépression et la désillusion. On ne reste compétitif qu'un temps. Les individus s'usent très vite à ce jeu.
56Masclet (2004) décrit les techniques managériales issues de ces principes. En voici quelques unes :
57Le downsizing : cette pratique consiste à réduire de manière drastique les effectifs d’ouvriers et d’employés). Objectif : « débureaucratiser » l’organisation en la rendant « lean and mean » (maigre et méchante) et par là même plus compétitive. Ces types de pratiques ont fini par toucher les cadres intermédiaires et un ministre célèbre souhaitait même l’appliquer à l’Education Nationale. Son équivalent français est le « dégraissage ». Il ne doit pas être confondu avec le re-engineering.
58Le benchmarking est une méthode de management consistant à introduire la comparaison de sa propre performance, avec celle de ses concurrents dans le même métier. Le détour par la comparaison est considéré comme un facteur dynamisant.
59Le re-engineering (re-engineering ou Business Process Redesign, BRP). Hammer (1993), ingénieur en informatique au MIT, fit du Re-engineering ou le Business Process Redisign (BRP) la grande idée du début des années 1990. Le re-engineering est un mélange de techniques allant du juste-à-temps jusqu’aux études du temps et du mouvement initiées par Taylor. La méthode est destinée à fluidifier les processus de travail à travers les différentes divisions de l’entreprise, pour réduire les coûts et augmenter la productivité. En pratique, cette forme managériale est utilisée par les organisations, pour réduire leurs coûts opérationnels, en particulier les coûts en personnel. La conséquence la plus négative de cette forme de gestion, c’est la perte de potentiel qui a laissé plus d’une entreprise incapable de saisir les opportunités de croissance, dès les années 1990, quand l’économie eut repris une phase de croissance.
60L’avantage concurrentiel ou competitive advantage est l’un des facteurs résultant de la mise en œuvre d’une stratégie concurrentielle, qui permet à une entreprise de gagner des parts de marché sur ses concurrents. C’est Porter (1986) qui a mis au point cette formule très perfectionnée pour déterminer comment les entreprises et les pays peuvent obtenir des avantages concurrentiels.
61La responsabilisation – ou délégation – (empowerment) : Kanter (1992) est la principale instigatrice de ce mouvement, très à la mode dans le monde du management au début des années 90. Le principe de responsabilisation, ou de délégation, qui doit permettre de libérer les facultés d’innovation et de changement des individus à l’intérieur d’une entreprise, implique généralement une participation accrue des employés, dans l’organisation, pour stimuler leur esprit d’initiative et d’entreprise.
62Les champions (champions) : Dans Le prix de l’excellence, Peters et Waterman (1982) appellent « champions » ces individus influents que l’on rencontre généralement dans des entreprises tournées vers la recherche, dont le soutien peut assurer la réussite d’un projet ou d’une invention. Une entreprise possédant de tels champions a toutes les chances d’obtenir un brevet d’« excellence ».
63En fait, dans ces différents styles managériaux, la participation des travailleurs à l’organisation du travail dans les entreprises reflète l’estompement de la différenciation entre production et gestion et préside à une fusion désocialisante et désobjectivante de l’organisation du travail. Pourquoi ? Tout simplement parce que le capitalisme a phagocyté le libéralisme à ses fins chrématistiques (Masclet 2004). En effet, le régime néo-libéral se caractérise selon Coutrot (1998) par le concept paradoxal de « coopération forcée ». Les dirigeants d’entreprises y sont soumis à une pression extrême des marchés financiers mondialisés. Cette pression est répercutée sur les salariés par l’intermédiaire des nouveaux modes de gestion du personnel, comme nous avons pu le constater. Les directions décentralisent l’organisation, accordant aux équipes de travail une grande autonomie. Les organisations par projets, les équipes autonomes imposent aux salariés une mobilité interne extrême, qui limite les possibilités d’émergence de collectifs de travail stables. La coopération est alors forcée directement par l’accentuation des contraintes systémiques, en provenance des marchés financiers et du marché du travail, où règne un chômage important. L’autonomie accordée aux équipes est contrôlée par le jeu des contraintes et par la pénétration des exigences de la clientèle dans le cœur de la production.
64Ce modèle est très cohérent avec le modèle anglo-saxon du « corporate governance », qui organise la prise de pouvoir dans les entreprises. Il est d’une redoutable efficacité dans la performance financière de cours et moyen terme, qui est le critère exclusif d’efficience reconnu par les marchés financiers. L’analyse de ses contradictions laisse cependant sceptique sur sa capacité à assurer la croissance et à préserver la démocratie sur le long terme. Une reprise de la réflexion sur la gestion des entreprises, trop vite interrompue en France, sur des bases plus démocratiques et plus responsables s’avère plus que jamais nécessaire.
4- Quelques pistes de réflexion : la nouvelle entropie des organisations
65Le concept d'entropie en « systémique » désigne le degré de désordre dans l'arrangement des éléments du système qu'elle constitue. Selon Masclet (Lemoine & Masclet, 2007), cette vision est dépassée au regard de la nouvelle symptomatologie des organisations. L'expression psychosomatique a remplacé le conflit social dans bien des cas. Le mal-être des opérateurs ne s'externalise plus de façon collective dans les entreprises comme par le passé, il est intériorisé par ceux-ci. La conséquence comme, nous le constatons c'est le stress, le harcèlement moral, les conduites addictives, le burn-out… Et, si cette nouvelle forme d'entropie, à première vue, ne menace plus la production, les entreprises restent toujours, et au premier chef, concernées. Cette entropie, en effet, met en péril la santé physique et mentale des opérateurs et à terme cela ne peut qu'avoir des répercussions sur la bonne marche des organisations. Toutefois, des raisons purement économiques incitent aussi à prendre au sérieux ces nouvelles entropies au risque de voir l'Occident, un jour, payer plus pour soigner ses travailleurs que pour les rémunérer. Comme on a pu le constater précédemment les opérateurs non préparés à l'avènement de la « Modernité » comme nouvelle référence de pensée, et les valeurs individuelles qui y sont attachées : « autonomie et compétences » n'ont pu s'inscrire dans un tel système de références. La rentabilité des entreprises n'étant alors plus assurée, de nouvelles Gouvernances ont créé de nouveaux managements, sources de stress certes, mais efficaces quant à la production. Le coût humain de leur utilisation, est maintenant, devenu saisissant. L'intervention, pour stopper ce drame humain dans les organisations, doit se concevoir comme un réel changement de type II, selon la terminologie des systémiciens et notamment de Watzlawick (1975). L'écoute des individus, tant aux niveaux individuels que collectifs et la prise en compte de cette écoute dans le changement deviennent alors fondamentales.
66Le terme d'entropie est une notion abstraite empruntée au courant systémique (Lemoine, Masclet, 2007) pour qualifier le disfonctionnement d'une organisation. Il désigne le degré d'incertitude ou de désordre dans l'arrangement des éléments du système qu'elle constitue. On l'appréhendait classiquement, il y a encore une quinzaine d'années, au travers d'indicateurs concrets tels que : le taux d'absentéisme, le nombre d'accidents de travail, le taux de rebuts, les conflits, l'insatisfaction du personnel, le turnover, le manque de communication… (Masclet, 2001).
67Cette approche est désormais insuffisante au regard de la nouvelle symptomatologie des organisations. On constate aujourd'hui en effet, que l'expression psychosomatique a remplacé le conflit social dans bien des cas. Le mal-être des opérateurs ne s'exprime plus de façon collective et conflictuelle dans les entreprises, il est intériorisé par ceux-ci. La conséquence au faire face au stress induit par la situation c'est la violence, le harcèlement moral, les conduites addictives, le burn-out…
68Toutes ces nouvelles « maladies » de la désorganisation du « Soi » et des liens sociaux se sont développées au moment où le modèle disciplinaire de la gestion des conduites, des règles d’autorité et de conformité aux interdits se sont déliquéfiés. Les normes qui assignaient aux classes sociales comme aux deux sexes leur destin ont cédé devant des normes qui incitent chacun à l'initiative individuelle en l'enjoignant à devenir lui-même. La conséquence de cette nouvelle normativité, c'est que la responsabilité entière des vies de tous se loge non seulement en chacun de nous, mais également dans l’entre-nous collectif. Ainsi le burn-out est une manière « d'être » qui se présente comme une maladie de la responsabilité et dans laquelle domine le sentiment d’insuffisance. L’« épuisé » n’est plus à la hauteur, il est fatigué d’avoir à devenir lui-même (Ehrenberg, 1998).
69Mais que signifie devenir soi ? La question n’est simple qu’en apparence. Elle soulève d’épineux problèmes de frontières : entre le permis et le défendu, le possible et l’impossible, le normal et la pathologique. Car l’intime, dans ces conditions, joue des rapports instables entre culpabilité, responsabilité et pathologie mentale. L’action s’est en effet aujourd’hui individualisée. Elle n’a alors plus d’autre source que l’agent qui l’accomplit et dont il est le seul responsable. L’initiative des individus passe au premier plan des critères qui mesurent la valeur de la personne.
70Ce changement, c’est-à-dire cette manière « d'être au monde », a pendant longtemps été une chose désirable parce qu’il était lié à l’horizon d’un progrès qui devait se poursuivre indéfiniment et garanti, en partie, par une protection sociale qui ne pouvait que s’étendre. Il est vécu aujourd’hui de façon ambivalente, car la crainte de la chute et la peur de ne pas s’en sortir l’emportent nettement sur l’espoir d’ascension sociale. Tout se passe comme si les individus n’avaient plus que les méfaits du changement, méfaits que les mots « vulnérabilité », « fragilité » et « précarité » résument. Nous changeons, certes, mais nous n’avons plus le sentiment de progresser. Combinée à tout ce qui incite aujourd’hui à s’intéresser à sa propre intimité, la « civilisation du changement » stimule une attention massive à la souffrance psychique. Elle sourd de partout et s’investit dans les multiples marchés de l’équilibre intérieur. C’est dans les termes de l’implosion, de l’effondrement dépressif ou, au contraire de l’explosion – de violence, de rage ou de recherche de sensations dans des addictologies de toutes sortes ou des prises de risques extrêmes – que se manifeste aujourd’hui une large part des tensions sociales. La psychologie contemporaine nous l’enseigne, l’impuissance personnelle peut se figer dans l’inhibition, exploser dans l’impulsion ou connaître d’inlassables répétitions comportementales dans la compulsion. L'épuisement est ainsi au carrefour des normes définissant l’action, d’un usage étendu de la notion de souffrance ou dans l’abord des problèmes sociaux.
71Mais pourquoi autant de mal-être dans un monde qui prône la liberté comme valeur sublime ?
5- Les Motifs de la nouvelle entropie
72En quarante ans, si l'on prend 1968 comme date charnière, le monde a changé plus qu'il ne l'avait fait durant les 10000 années précédentes.
73Un changement technologique sans précédent et un concept philosophique « La Modernité » tendant à s'actualiser dans la vie quotidienne ensuite, ont bouleversé les schèmes adaptatifs de nos contemporains, les plongeant par corollaires dans un stress permanent.
74Nous sommes entrés en effet aujourd'hui dans une ère où les systèmes de communication interactifs permettent aux individus d'échanger, de communiquer, de travailler en temps réel avec n'importe quel point de la planète. Les hommes peuvent ainsi se regrouper dans des réseaux de sensibilité. Et de même que la vague Industrielle-Commerciale avait transformé dans le sens de l'industrie et du commerce l'agriculture et l'élevage, la nouvelle vague de Communication-Service est en train de radicalement changer l'industrie et le commerce eux-mêmes. L'industrie, en se robotisant, se libère de la main-d'œuvre humaine et acquiert une souplesse qui amène une croissance constante des postes de services et de communication.
75L'usine qui n'était qu'un organe massivement transformateur, devient un système nerveux qui pilote une production de plus en plus diversifiée et subtile. À mesure que la production matérielle est prise en charge par des robots sophistiqués et souples, l'activité dominante de l'homme se réfugie dans les domaines qui lui sont spécifiques c'est-à-dire les Services et la Communication où l'innovation devient primordiale. Ainsi., notre époque recèle à elle seule plus de savants que toute l'histoire humaine n'en a connus. La création de produits à la valeur essentiellement immatérielle et leur communication sont appelées à devenir les grandes occupations humaines. L'interactivité permet aujourd'hui aux consommateurs, par exemple, de dessiner un objet sur mesure et de le commander directement à une usine qui, grâce à la souplesse de ses robots, peut fournir cet objet unique. De même dans le domaine de la communication, l'interactivité permet une liberté d'expression des individus de plus en plus grande. Ils ne sont plus des récepteurs passifs d'un message, mais peuvent à chaque instant intervenir, se constituer eux-mêmes comme émetteurs d'un message. Les mass-medias qui consistent en l'arrosage à partir d'un point d'une multitude de consommateurs passifs sont remplacés à terme par le réseau où tous les consommateurs sont connectés entre eux d'une manière non hiérarchique, chacun pouvant choisir d'être émetteur ou récepteur. L'âge Industriel et Commercial a été à travers la duplication de masse, des objets, des messages, de la musique, une époque d'uniformisation sans précédent. Cette uniformisation est à mettre en correspondance avec l'idée d'universalisme et d'une réalité mécanique dans un espace-temps linéaire et homogène.
76Aujourd'hui, les tendances s'inversent et cela est difficile à accepter et à comprendre car l'ensemble du système éducatif dont nous sommes issus date de l'âge Industriel-Commercial. Notre formation ne nous transmet pas les outils conceptuels adaptés à la compréhension de l'âge de la Création et de la Communication dans lequel nous basculons. Ce qui s'affirme aujourd'hui, c'est la découverte d'un univers qui n'est pas homogène et uniforme mais constitué d'une multitude de ruptures et de micro-réalités incomparables. La réalité sociale aujourd'hui est éclatée : chaque individu déraciné, nomade, se désolidarise des groupes préétablis. Ceci explique sans doute les crises des collectifs : des nationalismes, des religions mais aussi des solidarités et par corollaire la montée des individualismes.
77Mais la technologie a changé aussi notre espace-temps, loin de nous le temps des matines qui régulait le temps des agriculteurs, dépassé le temps des horloges. Nous sommes aujourd'hui dans l'ère du technocosme qui relie entre eux tous les appareillages informatiques et qui à travers les réseaux internationaux de données informatisées tel Internet, s'affirme comme un cadre mental commun à tous les hommes de la planète. C'est un temps tout à fait nouveau, sans durée, virtuel, général et abstrait. Et, dans cet hyper espace-temps, dans lequel nous évoluons, par l'accessibilité directe, immédiate et généralisé qu'il procure désoriente notre perception du réel et notre sens social.
78C'est aussi dans ce nouvel espace-temps, que s'actualise aujourd'hui la modernité. En effet, cette pensée qui met l'homme au centre du dispositif organisationnel et non plus au service de celui-ci, née de l'esprit des philosophes grecques et cultivée par la plupart des philosophies depuis la Renaissance, cette pensée est en passe de devenir le moteur de la relation humaine. Hélas comme le dit Masclet (2000), les hommes n'y ont pas été préparés socialement. Ici encore la formation n'a pas eu d'effets comportementaux, ce qui entraîne des ambiguïtés et des conflits de rôles qui polluent les relations humaines.
79Y a-t-il des remèdes ? Sans doute, mais encore faudrait-il des volontés qui comprennent ce qu'Aristote prônait déjà, à savoir qu'une économie se bâtit pour les hommes et non contre eux. La perspective ouverte par Condorcet peut s'avérer alors une issue qui consisterait dans l'actualisation des compétences de chacun qu'ils auraient à mettre au service de tous.
80Mais est ce aussi simple ?
6- Conclusion
81Dans cet exposé, notre but n’était pas de faire un énième constat du climat de violence qui règne dans nos organisations françaises. Notre volonté était de lui donner un sens : essayer de comprendre pourquoi certains de nos compatriotes n’hésitent pas à se droguer pour devenir fort ou au contraire pour fuir leurs difficultés ? Pourquoi d’autres encore se résignent et se réfugient dans le burnout ? Pourquoi certains enfin en viennent à « l’acting-out » pour exprimer leurs limites face à des hiérarchiques dont le mobile ne semble pas être le travail bienfait, mais l’atteinte d’objectifs illusoires. La réponse à ce constat est claire. La modernité, prônée par les philosophes depuis la Renaissance, qui jusqu’alors ne faisait que l’objet de discussions parmi les plus lettrés de nos sociétés occidentales s’est imposée aux plus humbles grâce aux médias et aux nouvelles technologies. Et, dans ce contexte la centralité du travail, qui devait être libératrice conformément à l’article 23 de la déclaration des droits de l’homme (Verselle, 2008), est devenue source de compétition et d’aliénation. Le paysage capitalistique dans lequel la modernité s’est actualisée n’a hélas pas pu donner naissance à « l’Individu » attendu par les philosophes. La liberté s’est accommodée de la consommation que lui offrait le système marchand devenu dominant sur la planète. L’individualisme a supplanté l’individualisation. Travailler plus et plus vite, pour consommer plus, telle est devenue la devise de nos temps actuels. Le règne de la compétition a érodé les collectifs. Les grèves sont désavouées, les rassemblements déconsidérés. « Chacun pour soi » s’est imposé comme règle générale de l’adaptation au système. Dans ce contexte, il y a ceux qui font face et ceux qui n’ont pas les « copings ». C’est ce que nous avons appelé la « nouvelle entropie des organisations ». C'est-à-dire cette façon qu’ont eu les Hommes de notre temps d’intérioriser dans les symptômes décrits plus avant, des manières inadaptées de faire front à cette donne sociétale nouvelle.
82Alors faut-il en revenir à la tradition et au pyramidalisme (Masclet, 2004) quand on constate les effets négatifs de la Modernité ? Certes non, l'idéologie de la « liberté » se doit de s'actualiser. Mais il est clair que ce n’est pas en nous apitoyant sur notre ego et notre passé, que l'on sortira de ses problèmes organisationnels. Il est évident qu’à l’heure où toute la planète semble choisir le libéralisme comme voie économique, camper sur nos positions serait suicidaire. Et pourquoi nous saborder alors que l’histoire nous ouvre les voies, pour ne pas perdre notre âme ? Le libéralisme condorcéen (Masclet, 1995) offre sans conteste des idées pour devenir libéral et rester humaniste. Mettre « la compétence » au service du bien de tous, selon les vœux de Condorcet, n’est-il pas un moyen de préserver l’individu pour enrichir le groupe ?
83C’est donc moins d’une position affective que d’une position réaliste dont nous avons besoin pour organiser les entreprises de tous ordres dans notre pays. C’est bien plus de la compréhension du fonctionnement des systèmes économiques, que de leur choix qui importe. Or il semblerait bien que les politiques actuelles (Masclet, 1995), conduisent plus à une démarche alternative entre l’un ou l’autre système, qu’à une éducation des choix. Les sciences humaines et la psychologie particulièrement, devaient nous aider dans cette voie. En effet notre science a joué un rôle important dans les économies de ce début de siècle pour permettre l’adaptation de l’homme aux sociétés pyramidales, Masclet (1998a).
84Cette contribution a d’ailleurs souvent fait l’objet de prises de positions idéologiques notamment, à partir des années 60, dans plusieurs travaux d’obédiences sociologiques (Snyders, 1970, Bourdieu et Passeron, 1964, Romian, 1974). Que fallait-il faire ? Sous prétexte que la recherche en psychologie et ses applications contribuaient, en plaçant l’homme qu’il faut à la place qu’il faut, à l’essor du capitalisme, fallait-il stopper toute investigation scientifique en sciences humaines ? Le débat de l’utilisation humaniste des produits de la recherche, n’est hélas, pas de seul fait des scientifiques. Certains travaux des pionniers de la psychologie ont sans doute contribué à la croissance économique et au développement du capitalisme. Ce qu’on peut reprocher à la psychologie du début du siècle c’est peut-être de n’avoir pas pris suffisamment de précautions déontologiques dans ses applications. C’est la remarque qu’on peut faire à toute science naissante et qu’on aurait pu faire à la physique nucléaire, à l’informatique et qu’on semble faire avec le génie génétique.
85Il est toutefois à remarquer, qu’à une époque : où l’on manque de gens qui entreprennent, où tous les hommes aspirent à la liberté, et où chacun veut vivre sa propre spiritualité, la psychologie a sûrement encore beaucoup de chose à apporter. Il y a fort à penser que cette fois la dimension humaniste sera présente, le dernier code de déontologie des psychologues en est, et c'est à espérer, l’un des garants.
86L'heure n'est donc pas au refus du marché, mais à comment l'apprivoiser. Pour cela l'organisation ne doit plus être le lieu de l'urgence (Aubert, 2003) et de l'aliénation. Au contraire, elle doit devenir un des lieux privilégiés de l'échange, de l'épanouissement et de la créativité. Pour cela, il est d'abord nécessaire de retrouver le « Sens » de ce que veut dire être ensemble et pourquoi. Car à l'heure où 73,2 % d'entre nous mènent leur activité dans les services, il est plus qu'urgent de se garantir contre deux dangers. Le premier c'est celui de la vente des services. Le service çà se rend, çà ne se vend pas, sinon l'essence humaine est pervertie. Ainsi dans les premières sociétés de type cynégétique les individus s'organisaient pour chasser pour ensuite manger. Par contre quand l'argent devient le moteur de l'organisation, la perversion n'est plus loin (Masclet, 2000). Pour exemple regardons, ce que l’Angleterre a fait de ses services de santé. Le deuxième danger qui menace une société de services c'est la création de services artificiels pour occuper les personnes. Ainsi à une époque où les services d'orientation sont pléthores, les français n'ont jamais été aussi désorientés. Sans compter que certains de ces services arbitrairement construits, en voulant justifier leur existence (associations et services d'allocations), contribuent, souvent plus à maintenir des personnes dans la précarité qu’à les en sortir (Le Poultier, 1990).
87Le temps est à l’imagination.
Bibliographie
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Auteur
Professeur émérite des Universités, Titulaire de la chaire de Recherche « Travail, Clinique et Santé », FLSH, Département de Psychologie ICL.
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Y-a-t-il (vraiment) des technologies de l’information ?
Nouvelle édition revue et corrigée
Yves Jeanneret
2011