À propos de « Stèle du chemin de l’âme »
p. 207-215
Texte intégral
Christiano amico
1Publiée dans la seconde édition des Stèles (celle de 1914), la « Stèle du chemin de l’âme » exhibe d’abord, plus que toute autre parmi ces poèmes de Segalen, son épigraphe. On la voit et on voit la triple différence qu’elle montre. La première n’a rien que d’habituel : c’est du chinois (toujours avec le même effet d’exotisme et d’opacité). Inhabituelles, en revanche, les deux autres : ce n’est pas du chinois disposé comme dans les autres épigraphes, car celle-ci, on la voit avant et non pas en même temps, sur la même ligne que le titre français ; de plus, ici, pour reprendre les mots de Segalen dans son texte liminaire au recueil, les caractères ne « pendent » pas « les uns aux autres ». Ou plutôt : même si on peut les lire deux par deux, verticalement, la colonne des caractères est nettement abrégée ; advient comme un raccourcissement de la pendaison. Ainsi, voici un poème qui est tout spécialement à voir, plus encore que d’autres dans Stèles : pas seulement à lire. Il faut apprécier visuellement, par exemple, la composition, et noter le souci d’équilibre, entre deux blocs textuels à peu près équivalents séparés par un petit cercle. Structure bipartite, qui sépare monde des vivants et monde des morts, mais qu’on peut aussi rattacher au genre du poème en prose. Que figure le petit cercle ? On y reviendra. Il convient aussi d’être sensible à la structuration : le poème joue de l’opposition entre horizontalité et verticalité. Par exemple : la verticalité de la stèle dressée n’est pas ici redoublée par la verticalité forte de l’épigraphe. Ou encore : l’horizontalité de l’épigraphe est répétée par les trois tirets… Ou tout simplement : passer de la verticalité à l’horizontalité, c’est passer de la vie à la mort.
2Que nous suggère, de son côté, le titre ? C’est un titre métatextuel. Toutes les stèles ne se nomment pas « stèles » (voir « Trahison fidèle », « Char emporté », etc.) Ici, en revanche, il est clair que la stèle va aussi (entre autres) nous parler du genre stèle, de la forme stèle. C’est le deuxième axe capital pour une lecture du poème. On repère aisément nombre d’éléments « métatextuels », qu’ils renvoient au texte lui-même (« inscription », « caractères », « signes »), à un auteur (« graveur »), à la lecture (« que l’on doit lire », « pour être lus », et entre les deux : « ne traduirez-vous pas ? »). Sur ce dernier plan – de la lecture –, il apparaît que le poème oppose le déchiffrement hâtif (une lecture qui passe trop vite) et la traduction/compréhension (la lecture qui traduit étant celle qui sait faire un pas au-delà de l’apparence immédiate, voire dans l’au-delà). Or le poème lui-même effectue une opération de traduction : de même que l’épigraphe est traduite (presque littéralement) par le titre, de même les deux premiers alinéas sont « traduits » (explicités) par les trois derniers, selon une progression antithétique (toujours le code poème en prose) qui mène de l’incompréhension à la compréhension.
3Opération de traduction, la lecture du même coup s’est révélée comme une affaire d’âme (et pas seulement de corps, voire de sexe, comme dans « Stèle provisoire », où il est question que le poème-stèle soit pris dans la bouche d’une belle lectrice-diseuse). Voilà qui pousse à s’interroger sur le complément du nom (« du chemin de l’âme ») que comporte le titre. Quel est au juste le sens de la préposition + article « du » ? Trois nuances, répond l’ancienne grammaire, se mêlent ici : du peut signifier au sujet de, à propos de (complément de propos) ; ou bien pour (complément d’attribution : stèle pour un défunt qui serait « le chemin de l’âme », expression qui figure en majuscules dans le poème, comme s’il s’agissait bien du nom du défunt, gravé sur la tombe) ; ou enfin : où s’accomplit le chemin de l’âme (complément de lieu).
4De l’âme seulement ? Non pas, puisqu’un quadruple cheminement semble à l’œuvre. Celui de l’âme du mort, qui lit les huit caractères, inscrits en son honneur. Celui des passants qui par définition passent sur un chemin. Celui de « Vous », i. e. des lecteurs qui accomplissent des pas non vivants, mais quand même des pas, la lecture formant bien une espèce de cheminement. Enfin, celui des caractères eux-mêmes, à en croire la personnification des strophes – ou versets, ou alinéas1 – 3 et 4, qui en fait le sujet de verbes de mouvement ou les associe à des mots notant le mouvement : « rétrogrades », « guident », « ils s’enfoncent », « fuyant ».
5Notons, pour en finir avec ces préliminaires, qu’en vertu de sa culture judéo-chrétienne, le lecteur attend pour l’âme un cheminement ascensionnel – qui n’aura pas lieu. Sur ce plan métaphysique (troisième axe de lecture), la verticalité sera déjouée… conformément à ce qui s’est produit pour l’épigraphe. Il est (grand) temps de noter que cette stèle ferme l’avant-dernière section du recueil (« Stèles du bord du chemin »), en une place à méditer. À la fin du chemin (c’est-à-dire à la fin de la vie), eh bien l’homme est réduit à (transformé en)… une âme, nous disent les religions. Il faut donc se préoccuper de son chemin (du chemin qu’elle va suivre). Oui, mais ce poème qui déjoue la verticalité se ferme sur le syntagme « du mort ». Et pas sur le mot « âme ». Ajoutons une hypothèse – mais peut-être de l’ordre de la surinterprétation : le poème se compose de huit blocs typographiques. Est-ce à quoi fait allusion l’expression « huit grands caractères » ? Hypothèse qui a le mérite d’articuler le visuel et le métatextuel… Et même le métaphysique : le regard et le sens ici ne s’envolent pas, demeurent comme attachés à la matérialité typographique de ces huit blocs.
6Le premier alinéa obéit à la poétique, chère à Segalen, du choc : elle décrit la rencontre abrupte d’une inscription. Cette surprise brutale se traduit par un début averbal, à l’écriture sèche, lapidaire. Le point de vue est indéterminé : « que l’on doit lire ». Pourtant l’adjectif « insolite » suppose un observateur. Est-il chinois ou occidental ? Les deux à la fois, sans doute ! Occidental, que la langue chinoise disposée horizontalement ne peut que dérouter. Mais l’observateur est chinois aussi : en Chine, on lit verticalement, et de la droite vers la gauche. Or, ici c’est l’inverse : l’épigraphe est « horizontalisée » et se doit lire de la gauche vers la droite. C’est-à-dire à l’occidentale. Que vise ce dispositif ? À produire une inscription stélaire qui, quoique écrite en chinois, doit se lire « à l’occidentale »… C’est-à-dire à exhiber une double nature contradictoire qui, notons-le, est celle de toute stèle poétique segalenienne, dans laquelle il y a à la fois du texte chinois et du texte français, mais aussi dans laquelle le texte français évoque le monde chinois. Ainsi ce premier alinéa nous parle-t-il du texte poétique segalenien en général : de sa nature double (la dualité est au cœur de cette poésie : voir le détail « deux par deux », qui peut-être évoque aussi le phénomène poétique des rimes), et donc de son étrangeté, laquelle, en fait, tient aussi à la typographie « insolite » (ainsi l’alinéa à rebours, à l’encontre du code prosaïque, et la succession :, + majuscule à « Huit ») ; mais aussi de sa recherche de grandeur (l’adjectif « grands » sera repris au début de la deuxième partie du poème). Ces deux derniers traits (étrangeté, grandeur) valant dans l’esprit de Segalen pour toute (vraie) poésie.
7Notons enfin la stratégie du suspens final : une surenchère est annoncée, mais elle ne sera explicitée qu’après un blanc, un temps d’attente.
8Attente déçue dans le deuxième alinéa : après la répétition des mots « huit grands caractères » (nouvel effet d’attente, de retardement), nul ne comprend d’emblée ce que signifie le terme, si fortement mis en valeur, qu’est « inversés ». Voilà donc une énigme, un choc de plus.
9Cette énigme est enregistrée, et non élucidée, par les « passants ». On s’attend à les voir surgir, d’une part puisqu’on est dans une section intitulée Stèles du bord du chemin (le chemin suppose des passants), et d’autre part, parce que, ayant des lettres, on se souvient du fameux « Passant, va dire à Sparte… » (la stèle funéraire appelle le passant). Le point de vue dès lors se précise : non plus « on », mais les « passants », et corrélativement, après une lecture relativement neutre (avant tout descriptive), voici une lecture affective (cf. la modalité exclamative) et dépréciative. Mais la différence importe-t-elle tant ? Ce qui demeure en jeu, ce sont diverses formes de l’incompréhension.
10D’une part, le poème joue sur l’incompréhension des Chinois pour une écriture « à la française » (ne supposant pas de long apprentissage, n’impliquant pas de tradition calligraphique unifiante). Incompréhension qui peut servir à Segalen de moyen détourné pour critiquer l’individualisme occidental. D’autre part, l’attitude des passants résume plusieurs types d’incompréhension à l’égard du langage poétique, comme déjà dans la stèle précédente, où « le peuple des artisans terrestres accuse les célestes d’imposture et de nullité ». On repère ainsi, en se guidant sur les attaques des deux premiers alinéas, l’incompréhension qui se bornerait à décrire et dénombrer : « Une », « Huit »… Mais il y a aussi l’incompréhension qui crie, clame : or la poésie ne suppose-t-elle pas du silence ? N’oublions pas l’incompréhension qui déprécie : au « graveur », pris en tant que Chinois, elle reproche de ne pas être un lettré, et de ne pas avoir le sens du groupe (si important, voir l’Annaliste du Fils du Ciel) ; au « graveur » pris comme figure du poète, elle fait grief d’ignorer (c’est-à-dire aussi de ne pas respecter) les règles linguistiques sociales, l’usage commun du langage ; comme tout poète (romantique), il n’aurait pour dieu que sa propre singularité. Segalen ici se sert du détour par la Chine pour blâmer la poésie romantique qu’il rejette (songeons à sa critique, même, des « ipséismes » de Rimbaud). Ajoutons encore l’incompréhension qui ne voit pas, est insensible au visuel (aux détails typographiques, par exemple), et aux images ; l’incompréhension peut-être qui n’aurait nul pouvoir de voyance : la lettre à Paul Demeny du 15 mai 1871 (« Je dis qu’il faut être voyant, se faire voyant./Le Poète se fait voyant », etc.) a été publiée dans la NRF d’octobre 1912 ; or les mots « sans voir » n’apparaissent que sur la sixième version de la stèle, datée du 20 décembre 1912… Enfin, Segalen met en scène l’incompréhension qui se hâte trop : « ils ne s’attardent point ». Or ne convient-il pas, au rebours, de savoir lire lentement la poésie, ce « discours ralenti », dira un formaliste russe (Victor Chlovski), de s’arrêter, de ne pas passer (outre)…
11L’épigraphe, et le poème, sont donc, à ce point, rejetés (par les passants). Aussi la stèle va prendre la parole (prosopopée ?) et demander de l’aide… La stèle ? Difficile à dire. Une parole sans origine assignable se fait entendre, détachée de toute personne identifiable. Elle demande un autre type de lecteur : non plus obscurantiste, mais qui apporte de la lumière. Laquelle va pointer à travers le petit cercle : celui-là même par lequel pour lire le poème (ou de la poésie) on doit passer : en se pliant au poème, à sa concentration, et à son régime verbal circulaire… Le cercle-chas de la compréhension du poème et du poétique… C’est donc aussi l’œil ouvert et attentif du (bon) lecteur de poésie qui est ainsi figuré, par ce qui est décrit dans le texte liminaire du recueil comme « l’œil » de la stèle. Et en même temps, l’œil du mort.
12La construction d’ensemble de la seconde partie inverse celle de la première. Dans le premier temps, il est question d’abord des caractères, puis des passants ; dans le second, de « vous » (sujet humain), puis des « signes ». Ce chiasme (d’usage fréquent dans l’ordonnancement des stèles) produit un double effet : d’une part, il inscrit la fixité qu’évoquera le dernier adverbe du poème (« où cheminent fixement les yeux du mort »). D’autre part, le chiasme étant retour, le poème réalise un significatif mouvement rétrograde en même temps qu’il parle de « signes rétrogrades ». Ce n’est ni la première ni la dernière fois que le poème segalenien se montre capable de faire ce qu’il dit.
13Le troisième alinéa s’ouvre par un appel à l’aide pressant (vocatif redoublé, question négative fermée, à laquelle on ne peut répondre que par oui). Comme si Segalen l’avouait : la poésie porte une demande d’attention… Aussi bien, on est passé de « inscription » à « caractères » puis à « signes », c’est-à-dire à un mot qui fait sens à la fois pour désigner l’écriture chinoise et l’écriture française – ou les éléments du poème. Car ces signes sont « rétrogrades », et cet adjectif glose un peu l’énigmatique participe-adjectif « inversés ». Il s’agit donc de signes qui ne se tournent pas vers le ciel, mais vers la terre, vers le tombeau – le chemin de l’âme (du mort) – et Segalen y met des majuscules, ne la conduit pas au ciel, mais sous terre. N’insistons pas sur cette dimension anticatholique, évidente pour tout lecteur d’Équipée. Remarquons plutôt que si les signes « rétrogrades » impliquent un « retour », ce sont bien des signes poétiques (la prose va de l’avant, etc.). Le poème, d’ailleurs, répète comme à l’envi le préfixe -re : « rétrogrades », « retour », « revers »… Notons enfin que ces signes sont inversés en ceci qu’ils guident les pas de morts : à la fois ceux des cadavres (de leurs yeux, du moins), et des lecteurs. Transparaît ici, qui modèle l’expérience de la lecture poétique, un schème orphique : on se souvient de l’importance de ce mythe pour Mallarmé, et aussi que Segalen eut avec Debussy le projet d’un Orphée-Roi.
14Selon le quatrième alinéa, les signes « inversés » ou « rétrogrades » ont la face tournée non point vers « l’air », mais vers « la pierre » (entendons comment les deux mots phoniquement se répondent), non pas vers la lumière (symbole usuel du divin, voir le Fiat Lux de la Genèse), mais vers la terre, « la profondeur solide » : manière de dire que le divin ou le céleste, lui, n’est que spéculation superficielle et fragile ; et façon de nuancer ou même de contredire, selon le principe du Divers, le poème précédent, qui reprenait le motif de l’inscription céleste de la poésie, la plume qui vole au ciel pour y être quelque signe. Ces « huit grands signes » obéissent à un mouvement descendant (au rebours de ce que dira le titre d’André Breton, Signe ascendant) : ils « s’enfoncent dans la pierre », ils « donnent dans la profondeur solide ». Les signes poétiques selon Segalen n’ont guère à voir avec le souffle (« l’air doux aux poitrines »), à la différence de ce qui se passe chez Claudel (pensons aux Cinq Grandes Odes), guère à voir avec « la lumière » (la transparence du sens). Aussi bien, la lecture de poésie supposerait une absence au monde : on ne prend pas l’air, on fuit la lumière, on se concentre et se replie sur un livre.
15Néanmoins, cette fuite vers l’ombre du tombeau produit un effet paradoxal : elle amène à une autre clarté – comme le suggère l’intervention de l’adverbe « clairement » dès le début du dernier alinéa. Le paradoxe (« fuyant la lumière », mais « clairement ») permet de recréer de la tension dans le poème, de produire et de faire circuler de l’énergie. De plus – si l’on fait porter l’adverbe sur l’énonciation –, il sert, avec un humour discret, à annoncer l’explication, la clarification finale. En effet, le poème en vient à marquer le terme du chemin (de la vie, et de la lecture poétique). Ce terme n’est autre que le « revers de l’espace », un monde de la mort et du mort, monde étrange, qu’on ne peut décrire qu’à l’aide de paradoxes et d’alliances de mots : « lieu sans routes », « cheminent fixement », « les yeux du mort ». Cette dernière expression ne manque pas d’être curieuse et inquiétante, car ne sont-ils pas fermés, en principe, ces yeux ? En tout cas, voilà des yeux qui ne visent pas le ciel, qui ne se sauvent pas vers le ciel, qui cheminent dans ou selon une horizontalité que figurait d’emblée la disposition atypique des caractères de l’épigraphe.
16Tout cela s’applique aussi à la lecture de poésie en général : elle s’opère « au revers de l’espace », c’est-à-dire dans l’espace de l’imaginaire ; elle s’effectue dans un « lieu sans routes » : il n’y a pas de routes sur ce lieu qu’est une page de poésie, et l’on s’y égare facilement ; elle implique elle aussi une cécité (« les yeux du mort »), cécité non plus au texte mais au monde ; elle n’est pas une résurrection : elle suppose une plongée au tombeau, selon un schème anti-lazaréen, original en ceci que souvent le mythe de Lazare sert à penser la lecture (voir Blanchot dans La Part du feu, Sartre dans L’Idiot de la famille), et peu original dans la mesure où il reconduit au mythe orphique.
17Concluons, par deux remarques.
18On l’aura compris : cette stèle esquisse une définition de la lecture de poésie. C’est d’abord savoir pratiquer les « signes rétrogrades » (par exemple, la rime, ou le chiasme). Riffaterre théorisera un jour la notion de lecture rétroactive : Segalen l’avait écrite, déjà, et mieux. En ce sens, lire de la poésie, c’est toujours-déjà la relire. D’autre part, la lecture de poésie serait aussi un « retour au tombeau ». Pourquoi « au tombeau » ? Parce que – Christian Doumet l’a très bien montré –, Segalen a été très marqué par l’esthétique mallarméenne. Mallarmé ne définissait-il pas le Livre comme « tombeau de l’âme » (dans « Le Livre, instrument spirituel ») ? Non seulement le maître est aller puiser des pleurs au Styx, mais c’est là-bas aussi (sur les rives du Styx, qui après tout se trouvent peut-être en Chine) que le lecteur va s’installer pour lire. En ce sens, le poème construit un lieu de lecture idéal et impossible : aucun de nous ne peut lire cette stèle, car nous ne sommes pas morts… À cette conception de la lecture on pourra opposer celle d’Yves Bonnefoy : lire, ce serait aussi savoir « Lever les yeux de son livre2 », pour les rouvrir sur le monde vivant.
19Par ailleurs, cette stèle expose au mieux ce profond refus de la métaphysique ascensionnelle (prévalente de Platon au christianisme) qu’on repère également dans Équipée. Le refus donc de ce que Georges Bataille, une quinzaine d’années plus tard, dans sa polémique avec André Breton, nommera l’idéalisme icarien, qui va si souvent de pair avec la poésie (ou la Poésie). Ce refus ici se traduit d’emblée par la mise à l’horizontale des caractères chinois. Le texte/poème, chinois ou français, ne doit pas s’organiser selon une verticalité ascendante, renvoyer au ciel ou à l’infini. D’ailleurs, inversons le symbole de l’infini (∞), appliquons-lui une torsion verticalisante : on obtiendra… 8, huit (grands caractères). On dira que le symbole de l’infini est horizontal, et le 8 vertical ? D’accord : mais les caractères chinois sont quand même, dans « Stèle du chemin de l’âme », dé-verticalisés. Au reste Segalen, fidèle au Divers, fait de son poème un lieu de tensions, et par là même un espace qui suscite notre attention.
Notes de bas de page
1 Pour ces problèmes de terminologie qui sont aussi des questions de genres, voir l’édition de Stèles par Christian Doumet, Le Livre de Poche, Paris, 1999, et notre étude d’une autre stèle, « Traces alternées », dans Sans protocole, « L’Extrême contemporain », Belin, Paris, 2003.
2 Article de 1988, repris dans Entretiens sur la poésie, Mercure de France, Paris, 1990.
Auteur
Université Lyon II
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