La crainte de l’instruction populaire en France au xixe siècle1
p. 359-372
Texte intégral
1Le titre peut surprendre. En fait, il s’agit d’étudier non la méfiance qui a pu naître à l’égard d’une forme particulière d’enseignement, à l’égard d’une idéologie quelconque dont on soupçonnerait les professeurs de se faire les propagandistes, mais la crainte que suscite au XIXe siècle le développement éventuel de l’instruction populaire. Les classes dirigeantes sont alors convaincues qu’à trop répandre l’instruction, l’on va introduire dans la société des germes de révoltes, de revendications révolutionnaires. Elles se persuadent qu’à multiplier inconsidérément les diplômés, l’on multiplie le nombre des individus amers, des déclassés, des déracinés.
2Le sentiment est nouveau. Il s’impose au XIXe siècle. Sous l’Ancien Régime, la crainte des influences pernicieuses d’un appareil éducatif trop développé n’a guère hanté les esprits1. Il est vrai qu’avant la Révolution et sauf pour les membres du clergé, il est difficiel pour en enfant issu des classes modestes de jamais accéder à une formation théorique un tant soit peu poussée. Par ailleurs, la stabilité politique dont bénéficie le pays depuis l’arrivée sur le trône de la famille capétienne rassure les catégories dirigeantes. Enfin, les institutions d’enseignement se trouvant, sauf en ce qui concerne des Universités progressivement laïcisées, à peu près exclusivement entre les mains de l’Eglise, les professeurs distillent à la fois, si l’on peut dire, le poison et l’antidote : le poison sous forme de connaissances génératrices d’espérances sociales, l’antidote avec une religion imprégnée de l’acceptation des hiérarchies du temps, reflet d’une société imparfaite mais acceptée par Dieu et corrigée dans l’au-delà.
3C’est avec la Révolution que le branle est donné à une série d’idées nouvelles, qu’affleurent des espérances inimaginables jusqu’alors et qu’apparaissent, comme un contrefeu, des analyses en forme de mises en garde. A l’exaltation des révolutionnaires répondent la prudence des conservateurs et les ambiguïtés socialistes, annonçant une évolution libérale.
L’exaltation des révolutionnaires : l’instruction publique chargée de tous les espoirs (1789-1799)
4Au début de la Révolution, il n’est guère de têtes qui ne s’enflamment pas. Tout semble possible. Il faut fonder l’ordre nouveau et rien n’y paraît plus propre que le développement de l’instruction publique. Encore convient-il que l’enseignement soit bien orienté pour préparer les jeunes esprits au nouvel ordre des choses. A cette condition, les élus du peuple, tout pénétrés de la conviction qu’aucun motif ne peut justifier un retard dans l’expansion des Lumières, n’imaginent pas de limiter le nombre des bénéficiaires des nouvelles institutions d’enseignement public, ni de borner la durée de leur formation. Chacun doit pouvoir s’instruire et aller, dans ce domaine, aussi avant qu’il le souhaite.
5A la noble ambition de faire reculer l’ignorance s’ajoutera bientôt le souci de séparer les enfants de leurs parents pour les remettre à des pédagogues acquis aux idées progressistes, afin de former une nouvelle génération pétrie de bons principes et soustraites à des familles soupçonnées de tendances aristocratiques. Les projets de lois se succèdent, plus ambitieux les uns que les autres, imaginant des collèges qui mêleraient heureusement absence de programmes contraignants, volontariat pour la présence aux cours, interdisciplinarité, fusion des divers niveaux, animation culturelle, instruction civique, etc.2 Peu sera réalisé.
6Dès 1789, les cahiers de doléances des Etats généraux réclament le développement des écoles, la nomination d’instituteurs compétents et la prise en charge par les communes du personnel enseignant et de l’entretien des locaux3. Les imaginations s’exaltent progressivement. C’est une surenchère de propositions. Il n’est pas encore question de craindre les conséquences d’une instruction trop répandue. Le député Ducos exprime une opinion très largement admise : « Je pense que tous les enfants nés dans la République, quel que soit l’état ou la fortune de leur père, doivent être astreints, pour parvenir dans la suite aux emplois publics, à suivre pendant un certain espace de temps les écoles primaires. Cet assujettissement, va-t-on s’écrier, contrarierait trop durement nos mœurs et nos usages ! Je réponds que c’est à cause de cela que je le propose »4.
7Puisque nul n’envisage encore qu’une formation poussée présente des inconvénients en soi, il n’y a guère que l’obstacle financier qui puisse arrêter certains. Mansuyer, député de la Haute-Saône, s’inquiète de la dépense. Evaluant la population française entre 25 et 27 millions de citoyens, il considère qu’il faudrait accueillir 2,7 millions d’enfants de moins de douze ans dans les écoles primaires et 135 000 dans les écoles secondaires. Une réserve cependant : ces chiffres concernent essentiellement les garçons. « L’éducation des femmes doit être toute domestique ; une femme n’est belle que lorsqu’elle est douce et modeste »5. Sieyès lui-même, si prudent et si craintif pour sa survie, est alors favorable à un enseignement primaire pour tous6.
8De tous les plans qui fleurissent à l’époque, c’est celui de Lepeletier de Saint-Fargeau qui reçoit l’accueil le plus favorable de la part de l’assemblée, à la fois à cause du destin tragique de ce député et parce qu’il bénéficie de l’appui de Robespierre. Son programme prévoit l 225 écoles primaires en moyenne par département, à raison d’une école pour 1 500 habitants, ce qui impliquerait, en traitements, un coût de l’ordre de 7,65 millions de livres7.
9A l’époque de la Terreur, comme la situation politique est particulièrement tendue, l’intérêt d’une généralisation de l’instruction publique apparaît aux hommes politiques avec une évidence accrue, constatée par de nombreux orateurs : il faut arracher les enfants à leurs parents, les extraire d’un milieu souvent infecté de préjugés et de fanatisme pour qu’ils adhèrent entièrement aux principes nouveaux. Le but suprême de l’instruction, « c’est de former des républicains »8. Certains révolutionnaires proposent même, dans les journaux, que les enfants soient obligatoirement tenus en pension de six à dix-huit ans. Les ambitions augmentant, le coût s’alourdit. Le député Petit le chiffre à cinquante millions pour le seul premier degré d’instruction et fait valoir que c’est peu, comparé aux 170 millions que coûtaient le roi et la cour. A l’époque, bien loin d’effrayer, le développement de l’instruction publique paraît aux dirigeants comme le meilleur moyen d’ancrer les nouvelles institutions et de façonner un peuple correspondant à leurs vues.
10Les années 1793-1794 marquent de ce point de vue, une apogée dans les ambitions. La prolongation de la Terreur, la dictature politique, la crise économique dissipent un certain nombre d’espoirs. Les plans de généralisation de l’enseignement primaire sont mis en cause. On s’éloigne d’une conception des écoles primaires chargées de délivrer un enseignement général très poussé. Le député Pison Dugalland se plaint de cette conception : on voulait faire des écoles primaires « de petites écoles de docteurs, de petites Universités au raccourci ». C’est inutile ; une formation générale peut se borner à convaincre les jeunes qu’ils doivent être « laborieux, francs, désintéressés, courageux ». Ces idées font à ce point leur chemin qu’un personnage aux opinions aussi avancées que Gracchus Babeuf affirme qu’une « vaste instruction » ne convient pas au peuple. Il suffit de lui fournir quelques éléments pour n’être pas « la proie des rusés et des prétendus savants »9.
11Finalement peu d’écoles primaires seront créées alors. Sous le Directoire, l’attention du législateur se concentre sur les écoles centrales. L’on envisage bien d’établir des « écoles primaires renforcées », destinées aux enfants des artisans aisés et des cultivateurs-propriétaires10 mais l’idée d’une instruction pour tous s’éloigne peu à peu. Les élus s’inquiètent davantage du mauvais esprit des instituteurs en place que d’en augmenter le nombre ou d’améliorer leur situation matérielle. L’enseignement primaire commence à effrayer et, comme il se doit lorsqu’une idée fait peur, ses adversaires se réfugient derrière les arguments financiers. Les discours soutiennent désormais l’idée que l’Etat ne peut prendre en charge les écoles primaires. Andrieux, député de la Seine, refait les comptes et conclut qu’un instituteur et une institutrice pour 1 000 à 1 200 habitants coûteraient quinze millions par an, ce qui est hors de portée du budget.
La prudence des conservateurs : l’instruction publique sévèrement contrôlée (1800-1850)
12Pendant la première moitié du XIXe siècle, un sentiment se développe dans les classes dirigeantes, un sentiment qui en étouffe beaucoup d’autres et que nourrit et aggrave chaque mouvement populaire, chaque émeute, chaque révolution. Comme l’a décrit Ferrero, les classes dirigeantes prennent peur du peuple ; ils y voient une masse indifférenciée, toujours prête à prendre feu, très difficilement contrôlable, dont les imprévisibles mouvements d’humeur peuvent ébranler non seulement le gouvernement en place, non seulement le régime politique installé, mais les équilibres sociaux, voire la civilisation elle-même. Cette peur étreint les dirigeants et leur fait poser sur les institutions d’enseignement un regard soupçonneux. Nombreux sont ceux qui appréhendent de ne voir sortir de l’appareil éducatif, si l’on commet l’erreur de l’ouvrir aux catégories inférieures, que des parasites, des déclassés, des révoltés. Dans leurs cauchemars, les honnêtes gens tremblent en imaginant le déferlement de « ces rustres ambitieux qui ont changé la blouse du laboureur contre le frac du citadin (...), ces écoliers pédants, vains, indomptés, contempteurs que tous les ans l’Université et ses mille écoles secondaires versent à grands flots sur la France (...), ces politiciens imberbes qui délibèrent, qui jugent, qui pérorent, et dont plusieurs même savent lire, du moins à peu près »11. Des images d’apocalypse hantent jusqu’aux imaginations en apparence les plus pondérées. En un siècle où les exemples tirés de l’Antiquité sont de mise, avec un style volontiers flamboyant, l’on se promet le destin de l’Empire romain, l’on s’imagine succombant sous les hordes des nouveaux barbares vomis par toutes les écoles de France. A une époque où les débuts du démarrage industriel ne favorisent encore que rarement les enrichissements individuels, il semble à beaucoup qu’instruire un enfant du peuple ne lui garantit aucune promotion sociale mais fera naître chez lui une amertume d’autant plus dangereuse que les espoirs suscités auront été plus vifs.
13Sous le Consulat et l’Empire, une distinction s’impose aux bons esprits. Elle conduit à opposer deux écoles, sans guère de passage de l’une à l’autre car destinées à des publics différents : l’école des classes dirigeantes vouées à la culture classique ou scientifique, et l’école du peuple qui travaille, auquel suffisent quelques rudiments, des exhortations à la moralité et à l’obéissance. Destutt de Tracy donne son soubassement idéologique à cette distinction. Dans toute société civilisée, explique-t-il, il y a deux catégories d’individus. « Les hommes de la classe ouvrière ont bientôt besoin du travail de leurs enfants ; et les enfants eux-mêmes ont besoin de prendre de bonne heure la connaissance, et surtout l’habitude et les mœurs du travail pénible auquel ils se destinent. Ils ne peuvent donc pas languir longtemps dans les écoles ». C’est un service à leur rendre que de leur assurer une formation courte, adaptée, abrégée. Au contraire, la classe qui vit du revenu de ses propriétés ou de « certaines fonctions »-et Destutt de Tracy les regroupe tous sous l’appellation valorisante et justificatrice de « classe savante »- a droit à un enseignement développé, de qualité, s’élevant jusqu’aux causes premières. La grande erreur consisterait à ne pas voir qu’il y a là « deux systèmes complets d’instruction qui n’ont rien de commun l’un avec l’autre »12. Il ne faut surtout pas considérer les écoles primaires comme le vestibule des écoles centrales. Ces distinctions imprègnent tout l’édifice napoléonien d’éducation, mis en place pendant les dix premières années du XIXe siècle.
14Des idées si saines traversent les régimes, survivent aux effondrements de constitutions et se retrouvent, à l’époque de la Restauration, y compris chez les auteurs les plus distingués et, d’apparence ouverts. On en déduira les autres. En 1818, dans le Conservateur, Lammenais, alors tout à fait à sa place là, s’élève contre l’idée que l’instruction permettra aux enfants du peuple d’accéder à un meilleur sort. « Elle leur en donnera un inutile désir, qui fera leur tourment ; elle les dégoûtera de leur état, et c’est le seul fruit qu’ils en retireront ». Grave erreur que de vouloir remplacer les bons principes de la religion par les constatations de la science. L’instruction n’apprend pas aux hommes leur véritable intérêt mais incite le pauvre à s’approprier les biens du riche. Elle ne permet pas au défavorisé d’améliorer sa position sociale car la proportion des pauvres et des riches ne peut varier. Il y a presque du sadisme, encore que Lammenais n’utilise pas ce mot, à enseigner à ceux qui travailleront de leurs mains les éléments d’une science qui ne peut faire que leur malheur. Il faut se limiter à une « éducation sociale » mais renoncer à « un train superflu de science, luxe dangereux de l’esprit »13. Chateaubriand fait une démonstration très proche. Pour lui comme pour Lammenais, la déchristianisation rend le développement de l’enseignement extrêmement périlleux pour la société. Encore que l’auteur des Mémoires d’Outre-Tombe ait pressenti l’avènement d’un monde nouveau sans en connaître exactement les contours, son inquiétude semble réelle : « A mesure que l’instruction descend dans les classes inférieures, celles-ci découvrent la plaie qui ronge l’ordre social. Essayez de persuader le pauvre, lorsqu’il saura lire, et ne croira plus, (...) qu’il doit se soumettre à toutes les privations tandis que son voisin possède mille fois le superflu ! Pour dernière ressource, il vous faudra le tuer »14. L’on ne peut s’empêcher d’en rapprocher la formule de Napoléon : « Les hommes qui ne croient pas en Dieu, on ne les gouverne pas, on les mitraille »15. Avec la Monarchie de juillet, la France entre dans la série des lois scolaires, œuvres d’hommes politiques comme Guizot, Falloux et Duruy, aux idées pas forcément très avancées mais lucides ou emportés par le mouvement du temps. Il ne faut pas croire que, pour autant, toute crainte ait disparu dans la classe dirigeante. Présentant son texte, la future loi de 1833, Guizot s’efforce de rassurer en précisant bien que l’effort proposé en faveur des tout jeunes enfants n’est pas le début d’un plan ambitieux de développement de l’ensemble des établissements d’enseignement : « Le minimum de l’instruction primaire est la dette étroite du pays envers ses enfants ». Il ajoute à cette affirmation une série de formules lénifiantes pour convaincre que, contrairement à ce que prétendent beaucoup, « propager les lumières, c’est assurer l’empire et la durée de la monarchie constitutionnelle », c’est « une des garanties de l’ordre et de la stabilité sociale »16.
15Les dirigeants politiques de l’époque ne sont guère persuadés. A fortiori la petite bourgeoisie provinciale, chez laquelle une certaine jalousie à l’idée que les nouvelles générations en sachent plus, le dispute à la crainte de voir déserter les campagnes. Dans son Tableau de l’instruction primaire en France, Lorrain peint avec réalisme les réactions des notables de village qui ne savent que parler le patois et signer. Peu s’en faut qu’ils se montrent choqués de cette prétention d’instruire leurs enfants, de les rendre plus savants qu’eux. Quant aux paysans, ils jugent plus utile que leurs rejetons se mettent aussitôt que possible au travail de la terre. « Quand tous les enfants du village sauront lire et écrire, où trouverons-nous des bras ? Ils iront dans quelque fabrique et déserteront nos campagnes, ou bien ils feront comme les séminaristes de Servières, ils se dégoûteront des travaux manuels auxquels les destinaient leurs pères, et ils augmenteront le nombre de fainéants et des avocats de village qui déjà pullulent dans nos hameaux ».
16Même si l’autorité propose aux villageois des cours gratuits, des livres offerts, voire une indemnité pour compenser l’absence des enfants aux champs, l’hostilité à l’instruction se maintient. Tous les arguments sont bons pour justifier une méfiance confuse : « Nous avons mangé du pain sans savoir lire et écrire, nos enfants feront de même. Voyez un tel qui sait lire, il est pourtant moins riche que nous qui ne savons pas ». Etroitesse d’esprit des paysans jaloux, dira-t-on ? A cela près que le vicomte de Bonald, qui n’avait rien de rustique, en était arrivé à soutenir que les agriculteurs alphabétisés faisaient de moins bonnes affaires que les autres17.
17Notables parisiens et provinciaux, propriétaires fonciers et paysans aisés se rejoignent dans la même analyse : la société future, telle qu’ils l’appréhendent en cas de développement de l’instruction publique, serait peuplée d’intellectuels amers et inoccupés, suscitant au mieux des chicanes judiciaires, au pire des guerres civiles, pour utiliser et justifier leur formation, vivant en parasites du travail de paysans de moins en moins nombreux dans des campagnes désertées.
Les ambiguïtés socialistes : l’instruction publique dans la société future
18Que les dirigeants réactionnaires ou conservateurs aient freiné la création de nouvelles écoles et de nouveaux collèges au XIXe siècle, nul ne peut s’en étonner beaucoup. Il est plus surprenant de constater que, même dans des milieux aux opinions avancées, il n’existe pas une unanimité en faveur de l’instruction des classes défavorisées. Au point que certains auteurs que l’on peut classer comme socialistes ou, à tout le moins, pré-socialistes, ont préconisé une grande prudence dans l’extension de l’enseignement, considérant que la multiplication des écoles n’est souhaitable qu’une fois réalisé l’avènement d’une société vraiment égalitaire. Avant, ce serait prématuré, peut-être dangereux.
19Bien sûr, cette circonspection à l’égard de l’instruction n’est pas le sentiment le plus répandu à gauche. Pendant la première moitié du XIXe siècle, les ouvriers les plus conscients, ceux qui animent des associations plus ou moins clandestines ou qui écrivent dans des journaux, demandent en général un minimum d’instruction pour tous, ainsi que la possibilité, pour ceux qui le veulent et qui en ont les capacités, de s’élever plus haut dans l’enseignement. Pour ce qui est des débouchés, certains, tel Greppo dans son Catéchisme social, affirment avec confiance que « la République aura des fonctions pour tous les talents et des récompenses pour tous les services ». Il ajoute que les professions rebutantes feront l’objet d’une activité alternative et que les métiers dangereux seront protégés18. D’autres auteurs d’origine ouvrière ne partagent pas cette assurance et exigent qu’en tous cas, l’accès à un enseignement plus élevé, par exemple au-delà de quatorze ans, soit soumis à concours.
20Le journal La Fraternité publie, en mai 1845, un article sur « l’étude comme moyen d’affranchissement ». Les ouvriers qui rédigent cette publication expliquent que celui qui veut empêcher les ouvriers de bénéficier d’un enseignement sur les questions de philosophie sociale est « aristocrate secret ou patent »19. Ils s’inquiètent cependant que l’ouvrier instruit soit tenté de considérer ses camarades moins formés avec dédain ; il devra au contraire se faire leur éducateur.
21Une autre crainte se fait également jour vis-à-vis de certaines formes d’enseignement trop poussées. Emile Aubry, lithographe, animateur de l’Internationale dans la Seine-Inférieure, explique dans son Mémoire rouennais de 1868 que les fils de travailleurs doivent se méfier des études de droit, que « l’étudiant à long stage et le militaire, autre désœuvré, vrai parasite social » sont « les deux plaies, les deux fléaux des familles pauvres »20.
22Cette méfiance confuse des milieux ouvriers à l’égard des diplômés d’origine modeste rejoint celle des paysans. Il s’agit d’un sentiment mal exprimé, peu argumenté mais réel. Il est explicité par les théoriciens de l’époque. Chantre des producteurs, adversaire de l’héritage, Saint-Simon se montre, à l’égard de l’instruction, partisan de solutions progressives. Par tactique, parce qu’il est plus facile de commencer par cela et d’y obtenir de bons résultats, il souhaite que les premières expériences d’enseignement primaire conforme à ses idées soient tentées sur des enfants non pas « pris dans la classe la plus pauvre mais choisis parmi ceux des ouvriers qui jouissent de quelque aisance »21. Prophète moins inspiré mais témoin lucide du régime de juillet et surtout agitateur fort actif, Louis Blanc explique, à propos de la loi de 1833, que le gouvernement bourgeois ne pouvait accorder l’instruction obligatoire « sans toucher à l’organisation du travail ». Le pauvre, ajoute-t-il, a besoin que ses enfants lui apportent un supplément de salaire. Dans ces conditions, le priver de ce supplément par l’obligation scolaire « n’eût été qu’une dérision cruelle »22.
23Cette défiance devant la perspective d’un développement de l’instruction qui interviendrait sans modification profonde et préalable des rapports sociaux se retrouve chez Victor Considérant, dans Destinée sociale. Il explique que le système social en honneur ne permet pas de répandre une instruction de masse. « Il n’y a pas, il ne peut y avoir, à parler vrai, d’instruction réelle, solide, utile, pour les classes privées du nécessaire. Je dis plus : L’instruction et l’éducation sont le plus funeste des cadeaux que l’on puisse faire à un paria. Il faut être aveugle pour ne pas voir qu’aujourd’hui, dans cette société qui sue le malheur par tous ses pores, la classe la plus malheureuse, la classe pour laquelle la vie est toute de torture, c’est celle des hommes sans fortune, mais dégrossis et raffinés par une éducation qui a élargi leur esprit et leur cœur, qui les a initiés aux jouissances de l’opulence, qui a développé en eux des besoins ardents, une ambition dévorante : pour ceux-là, quand ils ne parviennent pas à s’ouvrir une porte de fortune -et ce n’est pas chose très facile aujourd’hui- pour ceux-là, dis-je, la vie n’est qu’une déception amère, elle s’égare souvent dans l’abjection et se termine par le suicide... »
24On croirait lire l’un des tenants du conservatisme le plus frileux, obsédé par l’appréhension de l’effondrement de la société et de l’arrivée des barbares : « Ce développement intellectuel, ajoute Considérant, ces raffinements hors de proportion avec les moyens de satisfaction des besoins qu’ils créent, sont la grande maladie de toutes les civilisations avancées, et l’une des causes les plus énergiques de leurs névralgies politiques »23. Il convient donc de réformer d’abord la société, d’assurer à chacun un travail lucratif, honorable, attrayant en même temps que doivent être mis en place les moyens d’instruire le peuple. Et Considérant, propagandiste de la doctrine de Fourrier, décrit en détail ce que sera l’éducation idéale dans un monde rénové. Cette idée que la société contemporaine est incapable de promouvoir un véritable enseignement populaire se retrouve chez Proudhon. Cette société se suiciderait en développant une instruction qui, accordée à un trop grand nombre, « deviendrait inharmonique et, par l’encombrement des capacités, constituerait un grave péril pour la société et le travail même ». Celui qui aura reçu un bon enseignement primaire ne consentira pas « à rester simple journalier dans son village ou à se faire domestique ». En effet, « il reste prouvé, par le plus simple calcul, que dans l’état actuel de notre société, l’instruction de la jeunesse, à l’exception d’une élite de privilégiés, est un rêve de la philanthropie ; que, de même que le paupérisme, l’ignorance est inhérente à la condition du travailleur ; que cette infériorité intellectuelle des classes laborieuses est invincible ; bien plus que dans un régime politique hiérarchisé, avec une féodalité capitaliste et industrielle, un mercantilisme anarchique, cette instruction, en elle-même désirable, serait en pure perte, même dangereuse ; et que ce n’est pas sans raison que les hommes d’Etat, tout en s’occupant de l’instruction du peuple, l’ont de tout temps réduite aux simples éléments »24. Donc la réforme de l’enseignement par création d’un apprentissage polytechnique, unissant l’atelier et l’école, est inséparable d’une réforme des rapports sociaux. Il n’y a que pour l’éducation des filles que Proudhon reste, de toutes façons, très réticent : elles ne sont guère dignes que de recevoir un enseignement ménager. D’autres auteurs socialistes ou anarchistes reprendront certaines de ces idées en leur donnant une direction différente. Pour Blanqui, « développer l’enseignement, c’est former les futurs révolutionnaires. Ils n’accepteront plus leur situation inférieure, ils seront donc aptes à se rebeller contre les rapports de classes. Ce calcul conduit à considérer que la généralisation de l’instruction n’a guère d’autre avantage que de favoriser la multiplication des travailleurs revendicatifs, conscients de leur position exploitée, amers de leurs espoirs déçus, agents efficaces de la Révolution. Ce calcul ne peut qu’ancrer les responsables bourgeois du milieu du XIXe siècle dans leurs craintes.
Le point culminant de la grande peur : la préparation de la loi Falloux (1850)
25Lors des discussions qui précèdent le vote de cette loi, la crainte à l’égard du développement de l’enseignement connaît à la fois son apogée et le début de son déclin. L’exaspération des peurs découle des mouvements populaires de 1848 et des réformes envisagées quelques temps, dont l’ampleur épouvante beaucoup. C’est le regroupement des hommes politiques affolés. Les libéraux, les anticléricaux, jusque-là considérés comme d’idées plutôt audacieuses, se retrouvent au créneau social, coude à coude avec les divers monarchistes. Thiers va donner à cette grande peur son expression la plus éclatante, la moins hypocrite. Aucun responsable politique de premier plan n’osera plus se montrer si clair par la suite.
26Au début de la Seconde République, les projets les plus audacieux fleurissent librement. Ils n’auront pas le temps de porter des fruits mais leur souvenir servira d’épouvantail, propre à effrayer la bourgeoisie. Dès le 30 juin 1848, Carnot, ministre du gouvernement provisoire puis de la commission exécutive dépose un projet de loi prévoyant l’instruction gratuite et obligatoire jusqu’à quatorze ans, assortie de sanctions contre les parents négligents. C’est l’enthousiasme des débuts. Au fil des travaux de commissions, les audaces seront limées, les nouveautés atténuées. Ainsi, en avril 1849, une commission parlementaire présidée par Barthélémy Saint-Hilaire dépose un projet de décret qui marque un premier recul. Sauf pour les indigents, la gratuité est supprimée. « On invoquait le manque d’argent ; en réalité, on redoutait surtout le danger social »25. L’obligation est encore maintenue comme un mal nécessaire. Une nouvelle commission, dont Adolphe Thiers est vice-président et l’un des membres les plus actifs, va se charger de remettre en cause ce dernier apport encore survivant du projet de 1848.
27C’est là que Thiers présente son argumentation. Après quelques précautions oratoires pour se défendre de vouloir « couper l’arbre de la science », il s’empresse d’y porter la hache : « Je dis qu’il faut bien regarder avant d’étendre démesurément partout l’obligation scolaire, et surtout avant de lui donner une extension trop grande ; lire, écrire, compter, voilà ce qu’il faut apprendre ; quand au reste, cela est superflu ». Il explique que le fermier aisé dispose à la fois du moyen et du désir de faire bénéficier ses fils d’une formation étendue. Pour lui, nul besoin d’obligation, ni de gratuité. « Quant au paysan, j’en conviens, il ne témoigne pas le même désir d’envoyer son enfant à l’école, et il n’a peut-être pas tort : car l’enfant qui a suivi l’école, trop souvent ne veut plus tenir la charrue (...). Oui, je veux restreindre cette extension démesurée de l’instruction primaire, qui serait d’ailleurs la négation de la liberté de l’enseignement : oui, je dis et je soutiens que l’enseignement primaire ne doit pas forcément et nécessairement être mis à la portée de tous ; j’irais même jusqu’à dire que l’instruction est suivant moi un commencement d’aisance et que l’aisance n’est pas réservée à tous ». Il ajoute, utilisant un procédé oratoire éprouvé, l’antithèse : « Je suis hardi, très hardi, j’en conviens : mais que voulez-vous ; je considère les choses telles qu’elles existent : je ne puis consentir à mettre du’feu sous une marmite sans eau’ ! »26.
28Ses propos sont à ce point restrictifs qu’ils étonnent jusqu’à certains membres de la commission, pourtant composée de personnages fort modérées : « Mais, à vous entendre, il faudrait posséder 10 000 livres de rente pour avoir le droit d’apprendre à lire »27. Cependant, l’analyse de Thiers finit par s’imposer, dans sa robuste simplicité. Sans oser le dire, chacun considère que la pauvreté suppose l’ignorance et que l’ignorance justifie la pauvreté. Boucle de régulation bien lisse.
29La cause est provisoirement entendue : pas de gratuité ni d’obligation scolaire. La loi de 1850 reflétera ces prises de position. La présentant à l’assemblée, Falloux va jusqu’à s’inquiéter de la formation des instituteurs : « On a dit que des jeunes gens au-dessus de 20 ans ne devaient point passer dans une fermentation commune leurs plus difficiles années ; qu’ils ne pouvaient voir de près les villes que la plupart n’habiteront pas, toucher à toutes les connaissances et n’en approfondir aucune, sans prendre un sentiment exagéré de leur situation, une trompeuse idée de leurs devoirs ; qu’ils ne se voyaient pas décorés de titres superficiellement acquis, sans en garder une ambition inquiète, et qu’il était d’une souveraine imprudence de ramener à la vie des champs des esprits qu’on avait d’avance préparés à la prendre en dégoût ou en haine »28. Donc, chez certains hommes politiques, la crainte de pervertir les pauvres par l’éducation s’étend aux instituteurs. A ces inquiétudes répond, comme en écho, la formule de Victor Hugo : « Ouvrir une école, c’est fermer une prison ». Ici, le poète visionnaire anticipe seulement sur l’opinion publique.
L’évolution libérale : la réhabilitation de l’enseignement populaire (1850-1900)
30Le progrès des idées démocratiques, malgré les contraintes du Second Empire, conduit à considérer avec moins de résignation l’image de classes populaires totalement incultes, n’ayant bénéficié d’aucune formation pour leur éviter la tentation de quitter le travail manuel. En même temps, la croissance économique faisant de plus en plus appel au machinisme et à un personnel compétent, justifie, y compris du point de vue de l’efficacité, l’organisation d’un minimum de formation pour des ouvriers susceptibles d’accéder à certaines fonctions d’encadrement. Les grands principes et les grands intérêts se rejoignent vers le milieu des années cinquante. La classe dirigeante se convainc progressivement que la généralisation de l’instruction mène moins aux désordres sociaux qu’au développement économique. Ce sentiment se répand sous le Second Empire, exprimé par un certain nombre de textes, d’abord œuvres de libellistes, puis émanant des autorités officielles.
31Dans un mémoire de 1853, E. Rendu présente l’obligation scolaire comme un moyen d’apaisement social. Il s’agit, pour l’auteur, de « revendiquer au profit des intérêts conservateurs le principe dont un malentendu a fait une arme de guerre »29. Le ministre de l’Instruction publique, Duruy, souhaite l’obligation scolaire mais il se heurte à la mauvaise volonté du Corps législatif. En 1866 et pour préparer les esprits, il encourage donc en sous-main les publications en faveur de l’obligation scolaire. Le Belge Agathon de Potter signe un texte au nom évocateur : « De l’instruction obligatoire comme remède aux maux sociaux ». Il y explique que les masses populaires vont s’apercevoir rapidement qu’elles sont à la fois les plus nombreuses et les plus malheureuses. « Que faut-il faire ? Apprendre tous à lire, écrire et calculer est-ce suffisant pour remédier aux maux de la société ? Non. Il faut trouver l’instruction réelle, et organiser la société au moral et au matériel, conformément à cette instruction »30.
32Duruy utilise un argument comparable lors d’un discours prononcé à Lyon l’année suivante. Il se fonde, pour prouver un lien entre désordre et ignorance, sur l’étude de la population pénitentiaire de Toulon : « Sur 2 218 forçats que renfermait au 1er janvier 1865 le bagne de Toulon, plus de la moitié, 1 330, ne savaient ni lire ni écrire. 31 seulement possédaient une instruction supérieure »31. L’argument de Victor Hugo a fait son chemin. Par rapport aux dirigeants conservateurs de la première moitié du XIXe siècle, la démonstration est, en quelque sorte, renversée. Ce n’est plus l’analphabétisme qui est présente comme la garantie des équilibres sociaux mais une formation suffisante et adaptée, fixant à chacun ses devoirs et l’y préparant. La chute du Second Empire ne met pas fin à ce mouvement des idées, d’autant moins que la défaite de 1870 conduit à s’interroger sur la responsabilité des enseignants français face à l’instructeur allemand considéré comme le principal responsable des sentiments nationalistes et belliqueux de la jeunesse d’outre-Rhin. La nouvelle direction des esprits est si nettement affirmée que les événements de la Commune qui, en d’autres temps, n’auraient pas manqué de provoquer un phénomène de repli de la part des classes dirigeantes, se traduisent par des analyses favorables aux effets de l’enseignement.
33Un ouvrage commencé par le baron Daru et terminé, après sa mort, par Victor Bournat, se plait à constater la bonne mentalité et la convenable insertion sociale de ceux qui ont bénéficié d’une formation. A propos des écoles du soir fondées à Paris à partir de 1862 pour les enfants travaillant en manufactures, les auteurs notent avec satisfaction que ceux qui les ont suivies ont fait preuve de modération lors des troubles liés à la Commune : « Ils ne se sont pas laissés entraîner dans l’insurrection, et ils ont, par leurs conseils autant que par leur exemple, retenu beaucoup d’hommes autour d’eux »32. Encore que les faits soient difficilement vérifiables, il est révélateur que l’argument puisse être utilisé alors avec vraisemblance. Toute méfiance ne disparaît pas pour autant à l’égard de l’enseignement. Simplement, le cas d’anciens élèves tournant à l’anarchie, se vengeant de leurs espoirs déçus en devenant des révolutionnaires ou des clochards, est considéré comme marginal, ne remettant pas en cause globalement la bienfaisance de l’institution éducative. En 1892, l’Univers peint le destin de jeunes paysans instruits : au mieux, ils oublieront à peu près tout ce qui leur a été enseigné et qui ne leur servirait à rien, mais « quelques-uns veulent devenir des messieurs, tournent la tête à leur famille, obtiennent leur certificat et rêvent de gloire. Les voilà clercs d’huissier à vie ou secrétaires d’agents voyers. Les plus intrépides partent pour Paris : faites vous-même leur histoire, vous connaissez le monde des déclassés »33.
34Voilà le grand mot de « déclassés », prononcé de nouveau. Encore ne s’agit-il plus, pour ceux qui brandissent cette menace d’un péril social, d’une tentation à laquelle vont succomber toutes les malheureuses victimes d’un enseignement générateur d’illusions ; seuls quelques éléments s’y laisseront prendre. Ils ne sont pas un fait social numériquement important mais seulement un sujet pour les romanciers. Le livre Les Déracinés de Barrès suit la destinée d’un petit groupe de jeunes gens quittant leur province pour les mirages de l’enseignement dispensé dans la capitale. L’un des chapitres, description du Quartier latin, s’intitule « un prolétariat de bacheliers et de filles. »
*
35Les lois Ferry consacrent, en quelques années de travail législatif, les nouvelles analyses. Sauf exception, il n’y a plus guère que les problèmes financiers pour retarder l’allongement de la scolarité obligatoire ou pour limiter sa gratuité. Chaque orateur brode sur le thème de l’instruction universelle et la plus longue possible, acquis de la démocratie et du progrès, garantie de croissance économique et d’ordre social.
36Alain met son talent à la disposition du consensus radical de l’époque. Il exprime avec élégance ce que la plupart des hommes politiques ressentent confusément et expliquent de leur mieux. Il soutient qu’il ne faut pas se limiter à former une élite. La nécessaire sélection des plus aptes est contrebalancée par la formation humaine des moins aptes. Les balayeurs, selon l’expression d’Alain, n’ont pas à être étrangers à la culture, à Euclide ou à Homère. Il faut « ouvrir à tous non pas l’accès des places mais l’accès aux Lumières Humaines ; chacun servira humblement à sa place »34.
37Ce passage date du milieu de l’entre-deux guerres. La confiance dans l’enseignement public atteint son apogée. Il est présenté comme la meilleure garantie de la stabilité politique dans la démocratie, la voie la plus normale de la promotion sociale, la condition indispensable de la croissance économique.
Notes de bas de page
1 Cf. cependant le Testament politique de Richelieu : « le commerce des lettres (...) ruinerait l’agriculture, vraie mère nourrice des peuples, et il déserterait en peu de temps la pépinière des soldats, qui s’élèvent plutôt dans la rudesse de l’Ignorance que dans la politesse des sciences ; il remplirait la France de chicaneurs » (Cardinal de RICHELIEU, Testament politique, Paris, 1947, p. 204). Cf. aussi J.-J. Rousseau expliquant que son élève, Emile, a « de la naissance » ; en effet « le pauvre n’a pas besoin d’éducation ; celle de son état est forcée ; il ne saurait en avoir d’autre (...) il est moins raisonnable d’élever un pauvre pour être riche qu’un riche pour être pauvre (...) choisissons donc un riche » (Emile ou de l’éducation, Paris 1954, p. 27).
2 A. CABANIS, « Cent-cinquante ans de formation continue dans l’enseignement public », dans La Formation continue, enjeu de société, Toulouse 1976, p. 17 à 20.
3 J. PALMERO, Histoire des institutions et des doctrines pédagogiques par les textes, Paris 1972, p. 243 à 248.
4 Archives Parlementaires de 1787 à 1860, 1e série, t. LV, Paris 1899, p. 141.
5 L’instruction publique en France pendant la Révolution. Débats législatifs publiés et précédés d’une introduction par C. Hippeau, Paris 1883, p. 42-43.
6 P. BASTID, Sieyès et sa pensée, Paris 1939, p. 490 à 499.
7 Archives Parlementaires, 1e série, t. LXVIII, Paris 1905, p. 661 à 675.
8 L’instruction publique en France pendant la Révolution, p. 94. Cependant, même en 1793, des opinions différentes : cf. Abbé GREGOIRE, Œuvres, Nendeln (Liechtenstein), Paris 1977, p. 29 et s.
9 L’instruction publique en France pendant la Révolution, p. 268 ; M. DOMMANGET, Les grands socialistes et l’éducation, Paris 1970, p. 85.
10 L’instruction publique en France pendant la Révolution, p. 301.
11 Comte O’MAHONY, Souvenirs politiques, Avignon 1831, p. 115.
12 Antoine PROST, L’enseignement en France 1800-1967, Paris 1968, p. 13. A noter qu’à la fin du XVIIIe et au début du XIXe siècle, les économistes anglais s’accordent généralement à constater l’utilité de l’éducation. Selon Adam Smith, l’Etat doit se préoccuper des institutions d’enseignement « afin d’empêcher la corruption complète et la dégénérescence d’une grande partie du peuple ». Malthus et Ricardo octroient à l’éducation un rôle correspondant à leur préoccupation principale, à la surpopulation : pour eux, l’éducation est un moyen de contracter des habitudes qui doivent conduire à limiter les naissances. Selon Stuart Mill, l’enseignement inculquera des habitudes de prudence, d’économie ; il fera « naître une opinion publique qui considérerait comme honteuse toute intempérance ou toute imprévoyance ». Avec ces auteurs, le problème est donc renversé : l’éducation est moins soupçonnée de susciter une masse d’oisifs déclassés que chargée de jouer un rôle pour diminuer l’excédent de population (citations extraites de John VAILEY, Economie de l’éducation, Paris 1964, p. 17 à 19).
13 Le Conservateur, t. I, p. 148 à 151.
14 R. de CHATEAUBRIAND, Mémoires d’Outre-Tombe, Lausanne 1963, t. IV, p. 86.
15 A. CASSAGNE, La vie politique de François de Chateaubriand, Paris 1911, p. 93.
16 P. CHEVALIER, B. GROSPERRIN et J. MAILLET, L’enseignement français de la Révolution à nos jours, Paris-La Haye 1968, t. I, p. 70 ; L.-H. PARIAS, Histoire générale de l’enseignement et de l’éducation en France, t. III : de la Révolution à l’Ecole républicaine (par François MAYEUR), Paris 1981, p. 314-315.
17 LORRAIN, Tableau de l’instruction primaire en France, Paris 1837, p. 15 et s. Citation de BONALD : « J’ai remarqué en général que chez les paysans, il n’y a que ceux qui savent signer leur nom qui fassent de mauvaises affaires, parce que les fripons leur font souscrire des actes clandestins et sous-seings privés » (Le Conservateur, t. V, p. 304-305).
18 G. DUVEAU, La pensée ouvrière sur l’éducation pendant la Seconde République et le Second Empire, Paris 1948, p. 72.
19 Id., p. 49-50.
20 Id., p. 206.
21 M. DOMMANGET, Les grands socialistes et l’éducation, Paris 1970, p. 162-163.
22 Louis BLANC, Histoire de 10 ans 1830-1840, Paris 1843, t. IV, p. 93.
23 DOMMANGET, ouvr. cité, p. 220-221.
24 P.J. PROUDHON, De la capacité politique des classes ouvrières, Paris 1924, p. 341.
25 P. BASTID, Doctrines et institutions politiques de la Seconde République, Paris 1945, t. II. p. 245.
26 H. de LACOMBE, Les débats de la Commission de 1849, Paris 1879, p. 37.
27 P. de la GORCE, Histoire de la Seconde République, Paris 1904, t. II, p. 277.
28 E. GOSSOT, Essai critique sur l’enseignement primaire en France de 1800 à 1900, Paris 1901, p. 242-243.
29 J. ROHR, Victor Duruy, ministre de Napoléon III. Essai sur la politique de l’instruction publique au temps de l’Empire libéral, Paris, 1967, p. 135.
30 Id., p. 144.
31 G. DUVEAU, La pensée ouvrière sur l’éducation, p. 40.
32 Baron C. DARU et V. BOURNAT, Adoption, éducation et correction des enfants pauvres, abandonnés, orphelins ou vicieux, Paris 1875, p. 327
33 M. OZOUF, L’école, l’Eglise et la République 1871-1914, Paris 1963, p. 164.
34 O. REBOUL, L’élan humain ou l’éducation selon Alain, Paris-Montréal 1974, p. 41 et s.
Notes de fin
1 Article publié dans Mélanges offerts à Max Cluseau, Presses de l’Institut d’études politiques de Toulouse, Toulouse 1985, p. 85 à 100.
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