Benjamin Constant et l’acte additionnel aux constitutions de l’Empire trois idées reçues à nuancer*
p. 93-119
Texte intégral
1Parmi les douzaines de constitutions dont s’est dotée la France, l’Acte additionnel aux constitutions de l’Empire1 tient une place à part, c’est-à-dire très inférieure. Il est vrai que la durée d’application du texte a été particulièrement courte. Tout est précipitation durant cette brève période de retour au pouvoir de Napoléon, comme si chacun pressentait une issue fatale à brève échéance : l’empereur arrive à Paris le 20 mars ; il reçoit Constant le 14 avril et lui demande « des idées applicables au gouvernement constitutionnel qu’il promettait d’offrir à la France »2 ; la loi fondamentale est rédigée au cours de la semaine qui suit, à partir des propositions présentées dès le lendemain par Constant et modifiées en fonction des souhaits du chef de l’État3 ; examinée une dernière fois par les conseillers d’État le 21 avril, elle est promulguée le lendemain. Il était prévu qu’elle ne soit mise en application qu’après avoir été approuvée par la population dans le cadre d’un plébiscite organisé en avril et mai4.
2En fait, l’entourage de l’empereur l’incite à installer immédiatement les institutions prévues, sans attendre les résultats du plébiscite, donc dans des conditions d’une régularité juridique douteuse mais comme preuve de sa bonne foi. Benjamin Constant lui-même y pousse5. Il s’agit de faire élire rapidement les membres de la Chambre des représentants pour qu’elle se réunisse avant le départ de Napoléon aux armées. Le décret de convocation, daté du 30 avril, est publié le 1er mai. Les opérations électorales occupent le mois de mai. Le 1er juin, au cours d’une cérémonie un peu ridicule, l’empereur et sa famille, empanachés, en habits de satin, participent à la cérémonie de signature de la constitution et de distribution des aigles6. Le 7 juin, à l’occasion de l’ouverture de la session des chambres, le dictateur repenti annonce qu’« aujourd’hui s’accomplit le désir le plus puissant de mon cœur : je veux commencer la monarchie constitutionnelle »7. Puis tout s’effondre : le 18 juin, c’est Waterloo ; le 22 juin, c’est l’abdication de l’empereur, sommé par les députés d’abandonner ses pouvoirs dans l’heure qui suit ; le 8 juillet, c’est la dissolution des chambres, le chef de la 10e légion de la Garde nationale se bornant à fermer leur salle de réunion, mettant fin sans autre forme de procès aux dernières institutions installées en vertu de l’Acte additionnel... Il était difficile de faire davantage, notamment du point de vue constitutionnel, en si peu temps.
3En fait, à l’époque, personne n’a beaucoup cru au succès, ou même à la longévité de cette nouvelle constitution8. Les libéraux qui devraient être les premiers satisfaits, affectent une vive déception. Ils attendaient mieux d’un texte qui s’annonçait placé sous le signe de la séparation des pouvoirs et d’une large définition des libertés publiques. Ils déplorent les références à l’ancienne dictature impériale jusque dans le titre du document, impliquant qu’il ne s’agit que d’un modeste « acte additionnel ». Ils s’inquiètent du monopole de l’initiative législative conservée par le chef de l’État, des limites à la mise en œuvre de la responsabilité des membres de l’exécutif, des atteintes aux libertés que laissent craindre la peine de l’exil expressément prévue par la constitution, ou encore le refus de renoncer à la confiscation des biens des adversaires politiques.
4Constant s’efforce de les rassurer mais il ne peut aller trop loin sans risquer de mécontenter l’empereur, en faisant entrevoir toutes les virtualités de limiter les pouvoirs du chef de l’État et du gouvernement que recèlent les nouveaux articles constitutionnels. Il considère « comme un avantage prodigieux, un gain presque inespéré, une assemblée nombreuse, composée d’éléments très nationaux, et une indépendance complète dans la manifestation et la publication des pensées »9. Il se rend bien compte que les mécanismes subtils dont il a parsemé l’Acte additionnel comme autant de pièges tendus au despotisme échappent à l’opinion qui est plus sensible aux déclarations solennelles sur la résurrection de la dignité impériale. Il se lamente de n’avoir pu « mettre toute une nation dans la confidence » pour lui faire constater « à travers une forme suspecte, la libéralité des principes et l’efficacité des sauvegardes »10. Mais il est vrai qu’il écrit cela en 1819, alors qu’il sait avoir échoué dans sa tentative de séduction des libéraux.
5Les monarchistes, les vaincus de l’heure, ont des motifs encore plus sérieux de dénoncer la nouvelle loi fondamentale dont le pays s’est doté dans la précipitation d’un changement inattendu de régime politique. Les ultras y voient la confirmation de leur condamnation des idées nouvelles auxquelles le roi a eu la faiblesse de consentir d’absurdes sacrifices, inspirées en outre du modèle britannique : une constitution ne se décrète pas, elle se fait avec les siècles, il n’appartient pas plus à la nation de brider les pouvoirs d’un monarque issu d’une tradition plusieurs fois centenaire qu’au titulaire de cette dignité d’y consentir.
6Constant s’efforce de répondre à ces attaques en soulignant qu’une « Constitution, oubliée tellement qu’il faut des recherches pour la découvrir, et des arguments pour prouver son existence, une Constitution qui est le sujet du dissentiment des publicistes, et des disputes des antiquaires, n’est qu’un objet d’érudition, qui aurait dans l’application pratique, tous les inconvénients de la nouveauté »11. Bien sûr, il ne convainc pas. D’ailleurs, il n’y comptait guère. Les ultras ne voient qu’un mérite à l’Acte additionnel : il pourrait donner l’occasion de se débarrasser de tout ce fatras libéral, y compris la Charte, et de revenir aux saines traditions.
7Au-delà des deux grandes tendances entre lesquelles se partage la classe politique, les républicains et les bonapartistes, moins nombreux mais actifs, se rejoignent pour déplorer ces obstacles juridiques empilés pour faire échec à ce qui leur paraît comme la seule planche de salut face aux périls extérieurs : une dictature révolutionnaire entre les mains d’un sauveur, doté de tous les pouvoirs et dans lequel le peuple se reconnaît. Les paysans qui avaient accueilli l’empereur, tout au long de son trajet de Fréjus à Paris, en l’exhortant à les débarrasser des séquelles de l’Ancien Régime, au premier rang desquels les nobles et les prêtres, sont déçus de toutes ces garanties dont on entoure la propriété et la religion et jusque de cette nouvelle aristocratie que sous-entend le maintien d’une Chambre des pairs, tous héréditaires de surcroît. Quant aux bonapartistes, « ils avaient espéré un despote, on leur offrait une Constitution, ils s’éloignèrent »12 selon le mot de Constant.
8On comprend, dans ces conditions, que rejeté par tous, y compris par les libéraux dont il se réclame, et même par son auteur principal, Constant, qui le qualifie d’« œuvre imparfaite et rédigée à la hâte »13, n’ayant même pas pu prouver son efficacité par quelques années de mise en application, l’Acte additionnel fasse petite figure par rapport aux autres Constitutions qui ont régi la France depuis 1791. Dans cette logique, les historiens14 se bornent en général à trois constatations.
9S’agissant des modalités de rédaction, ils soulignent le peu de renseignements à notre disposition, soit que la personnalité de Constant ait fait de l’ombre à tous ceux qui, à ses côtés, ont collaboré à ce travail de rédaction, soit plus vraisemblablement que les coauteurs ayant travaillé avec lui n’aient eu, compte tenu de l’échec final, aucune envie d’avouer qu’ils avaient pu avoir l’imprudence de s’embarquer dans cette expédition, ce qui pourrait impliquer une responsabilité dans le naufrage qui la conclut. Puisque la défaite est naturellement orpheline, il suffit d’imputer l’Acte additionnel à Napoléon et à Constant.
10S’agissant du contenu de l’Acte additionnel, des institutions prévues et des équilibres esquissés, les manuels se contentent, le plus souvent, de reprendre une formule empruntée à Chateaubriand et de parler de « Charte améliorée ». Cette appréciation présente l’avantage de situer les Cent-Jours comme une sorte de parenthèse constitutionnelle, une interruption de quelques mois dans la mise en place progressive d’une monarchie libérale en France à la faveur du régime de la Restauration, une tentative un peu vaine car vouée à l’échec, d’accélérer l’implantation du parlementarisme dans notre pays. Une telle interprétation dispense de pousser plus loin l’analyse.
11S’agissant enfin de la place de cette œuvre dans le processus d’instauration des valeurs libérales, les spécialistes dénoncent les ambiguïtés d’une expérience improvisée, conduite avec Napoléon par celui-là même qui avait promis de ne jamais se rallier. Ils y voient, en somme, une manifestation parmi d’autres, sans doute la plus spectaculaire, des hésitations et des variations de Benjamin Constant. Dans sa course aux places, il aurait commis une erreur de plus, pas la dernière d’ailleurs, toujours prêt à soutenir des régimes, puis à les abandonner après qu’ils l’aient déçu.
12Ce sont ces trois jugements, un peu trop simplificateurs pour suffire à rendre compte d’une période complexe, que nous souhaitons soumettre à la critique, et finalement nuancer.
I – Première idée reçue à nuancer : notre méconnaissance des étapes de rédaction de l’Acte additionnel15
13Parmi les indications fournies par les constitutionnalistes à propos des auteurs de l’Acte additionnel, il n’en est aucune qui revienne autant que pour souligner le rôle décisif tenu par Benjamin Constant. Outre qu’un tel parrainage présente l’avantage de placer les articles élaborés en 1815 dans l’orbite idéologique d’un personnage bénéficiant d’une forte notoriété, cette affirmation correspond aux bruits qui circulent à l’époque : ils présentent l’amant de Mme de Staël, le vieil opposant à l’Empire, comme rallié au nouveau régime. En échange, il bénéficie d’un poste de conseiller d’État. Il accepte de participer à la rédaction de la nouvelle loi fondamentale et il y prend une part si importante que l’opinion va donner à cette dernière un surnom inspiré de son prénom, avec un jeu de mot à double détente : la « Benjamine »16 à la fois la fille de Constant et la plus jeune des multiples Constitutions napoléoniennes.
14Bien que la plupart des contemporains aient tendance à minimiser leur rôle durant cette période des Cent-Jours qui met à rude épreuve tant leur loyauté que leur prescience politique, les faits sont tellement avérés en ce qui concerne Constant qu’il doit reconnaître ses responsabilités. Ses aveux figurent dans l’un des chapitres de son ouvrage justificatif, ses Mémoires sur les Cent-Jours. L’un des chapitres est consacré aux « premières discussions avec Bonaparte sur la Constitution projetée et première cause des vices de cette Constitution »17 Ainsi, le ton est donné dès le titre : il s’agit de faire alterner les révélations piquantes sur les intentions de l’empereur et la dénonciation désolée des articles critiquables dont le maître a imposé l’insertion malgré les scrupules et les protestations de son conseiller. Au-delà, Constant se montre fort discret sur sa part de responsabilité dans le texte final18.
15Il insiste surtout et avec quelques complaisances sur les défauts que l’obstination de l’empereur ne lui a pas permis de rectifier. Il affecte de regretter de n’avoir pu obtenir que la nouvelle Constitution se pose en rupture avec « l’intolérable despotisme » qui s’était imposé à la France pendant douze années19. Il souligne la détermination de l’empereur à ne pas renoncer à la confiscation des biens de ceux qui l’avaient trop ostensiblement trahi20. Il laisse entendre qu’il est tout à fait étranger à la disposition finale qui est censé dresser un obstacle éternel au retour des Bourbons sur le trône21. En revanche, il se montre plus discret sur l’identification des dispositions dont il fut l’auteur, se bornant à évoquer, dans une brochure électorale publiée quelques années plus tard, les articles sur la liberté de la presse, sur la conservation des jurys en matière de justice criminelle, sur le nombre des députés et sur la place limitée reconnue aux tribunaux militaires22. Si sa participation s’était limitée à ces aspects, elle aurait été à la fois bienfaisante et modeste et c’est bien l’impression qu’il veut donner alors.
16Pour ce qui est des autres participants à ce travail de rédaction, ils sont encore plus discrets, d’autant qu’avec le retour de Louis XVIII au pouvoir, l’Acte additionnel n’est pas une œuvre dont il soit bon pour se targuer. Constant évoque ses coauteurs avec une discrétion pleine de menaces implicites. Pour la discrétion : « Nuire aux personnes, sans utilité pour la chose publique, est non seulement déplacé mais coupable. Je n’indiquerai donc point les auteurs des articles que l’on a censuré avec justice »23 Pour les menaces : « dans le nombre des auditeurs étaient beaucoup de gens qui se proclament aujourd’hui zélés partisans de la légitimité »24. Il n’y a guère qu’un personnage à rencontre duquel il brise cette loi du silence. Il s’agit de Molé auquel il affecte d’adresser un compliment ambigu, celui de s’être opposé aux confiscations mais pour mieux l’enfoncer ensuite, soulignant qu’il a manifesté en l’occurrence « un courage d’autant plus méritoire, qu’il n’a fait d’ailleurs, contre aucun autre article de l’acte additionnel, aucune objection quelconque »25.
17Au-delà de ce petit règlement de comptes personnels, les historiens en sont réduits à effectuer des recoupements entre les témoignages, ce qui les conduit à évoquer deux étapes dans le processus de discussion collective instaurée à partir du projet rédigé par Constant et corrigé par l’empereur. Il y a d’abord l’intervention d’un « comité de la Constitution »26 composé de Carnot, Cambacérès, Boulay de la Meurthe, Maret, Merlin de Douai et Regnault de Saint-Jean d’Angély27 puis celle du Conseil d’État lors d’une ultime séance, le 21 avril, veille de la promulgation de la version définitive soumise à plébiscite. Quant aux divers points sur lesquels ont pu porter les discussions, quant aux versions successivement examinées, l’on a longtemps cru qu’il n’en restait aucune trace. Les contemporains eux-mêmes ne manifestaient que peu d’enthousiasme à rappeler les étapes de l’élaboration d’une loi fondamentale finalement compromettante et que Constant lui-même décrit comme « rentrée dans le néant et condamnée à l’oubli »28.
18En fait, il est peu de Constitutions pour lesquelles nous disposions d’autant de précisions sur les diverses versions successivement examinées et modifiées. Certes, le fait que ce texte n’ait jamais été soumis à une assemblée politique, avec séance publique et sténographie, nous prive de ces discussions parfois si vivantes dont les comptes rendus officiels donnent quelques exemples. De toute façon, seule une minorité des textes constitutionnels ayant régi notre pays a fait l’objet d’une telle procédure d’élaboration. Au surplus, ce n’est pas nécessairement en séance plénière que se prennent les décisions et que se négocient les arbitrages les plus importants. La lecture des débats publics déçoit souvent par le sentiment que, lorsque l’on en arrive à ce stade de la procédure de rédaction, les jeux sont faits, les grands équilibres sont définis et qu’il ne reste que quelques ajustements à discuter pour amuser la galerie. Avec l’Acte additionnel en revanche, l’on dispose de quatre projets successifs qui témoignent de l’évolution de la réflexion, avec des transformations importantes d’un texte à l’autre et des modifications qui touchent au fond des questions.
19Paradoxalement du moins en apparence, la première version, en quelque sorte le document fondateur, doit être cherché bien avant le retour de Napoléon sur le trône en mars 1815. Il faut remonter près d’un an plus tôt, en mai 1814, lorsque, dans l’effervescence de la première abdication et des polémiques accompagnant l’annonce de la Charte, Constant publie ses Réflexions sur les Constitutions, la distribution des pouvoirs et les garanties dans une monarchie constitutionnelle29. En fait, c’est un véritable projet de Constitution, en cinquante articles, qu’il propose au public, avec des protestations de feinte modestie sur le risque d’être « accusé de présomption »30. Il affecte de s’interroger : alors que les délégués du trône et les organes du peuple vont délibérer de la prochaine Constitution, « appartient-il à un individu, sans mission actuelle, de mêler sa voix à ces voix imposantes ? » En fait, l’on sent bien que, pour lui, le motif d’étonnement, voire la cause de scandale, tiennent moins à ce qu’il ose participer au débat politique que de constater qu’il demeure sans mission actuelle.
20Des recherches récentes réalisées à l’occasion de la publication des Œuvres complètes de Benjamin Constant, ont montré que, si la Charte, octroyée une semaine à peine plus tard, ne doit évidemment pas grand-chose à ces Réflexions trop tardivement publiées, en revanche le projet examiné et amendé par Napoléon après son retour aux affaires en est la reprise très fidèle31. Les principes qui sous-tendent le système imaginé en 1814 sont bien ceux qui serviront de base aux discussions de 1815. Dans les Réflexions, la distinction est nette entre les pouvoirs d’un monarque irresponsable et ceux des ministres qu’il nomme et renvoie à sa guise. Le bicaméralisme repose sur la collaboration de deux Chambres, une Chambre des pairs composée de membres héréditaires, nommés par le monarque sans limitation de nombre, et une Chambre élue au scrutin d’arrondissement. Les pouvoirs reconnus au chef de l’État sont importants, avec un droit de dissolution et un droit de veto exercés sans contrôle. La proclamation d’un certain nombre de libertés individuelles complète l’ensemble, notamment en matière de religion, de presse et de justice.
21Sur les cinquante articles de 1814, vingt-cinq se retrouvent -dont quatorze intégralement repris et onze avec quelques modifications dans les termes utilisés-parmi les quarante-quatre du premier projet d’Acte additionnel32. Ce dernier fait donc figure de deuxième version puisqu’il est en majeure partie issu du texte proposé l’année précédente par Benjamin Constant, à cela près, évidemment, que le titre de Roi prévu en 1814 pour désigner le chef de l’État est remplacé, en 1815, par celui d’Empereur. Le bénéficiaire du projet de Constitution a changé sans que le contenu s’en trouve bouleversé. Ce qui aurait pu convenir à un Bourbon ira aussi bien pour un Bonaparte. Au-delà de ce changement d’interlocuteur, le journal intime de Constant révèle les problèmes rencontrés, au jour le jour, avec Napoléon. Le 14 avril, après la première entrevue, il note : « Longue conversation. C’est un homme étonnant. Demain, je lui porte un projet de Constitution »33. Le lendemain, c’est la déception : « Mon projet de Constitution a eu peu de succès. Ce n’est pas précisément la liberté qu’il veut. [...] Travail autre qu’il me demande et qui me déplaît »34. Heureusement, le 18 avril, les scrupules surmontés et les ajustements effectués : « Ma Constitution corrigée a mieux réussi »35. Enfin, le 19, un cri de victoire : « Beaucoup de mes idées constitutionnelles adoptées »36. À s’en tenir au journal intime, on devine la lutte, on en ignore les enjeux.
22Pour se faire une idée des points de divergences avec l’empereur, il faut donc compléter ce journal intime, spontané, sincère mais elliptique, par le récit plus circonstancié mais auto justificatif que fournissent les Mémoires sur les Cent-Jours. Il y apparaît que, si Napoléon affecte un ralliement résigné au libéralisme sur le thème « la nation [...] exigera de la liberté. Elle en aura »37, en revanche il n’entend pas faire de concession sur la continuité à proclamer entre le régime impérial d’avant 1814 et celui qu’il entend mettre en place une fois revenu au pouvoir : « Vous m’ôtez mon passé, je veux le conserver [...]. J’y ai quelques droits, je pense [...] Il faut que la nouvelle Constitution se rattache à l’ancienne. Elle aura la sanction de plusieurs années de gloire et de succès »38. Constant reconnaît avoir dû s’incliner devant la détermination du maître.
23Il en résulte, dans le premier projet connu, outre ce titre singulier d’« Acte additionnel aux Constitutions de l’Empire » qui ne rend pas justice à la révolution institutionnelle accomplie, un préambule dans lequel chacun reconnaît le style et la pensée de Napoléon lui-même : rappel de ses quinze années de pouvoir, justification des réformes soi-disant envisagées et non réalisées en évoquant des rêves de grand système fédératif européen, affirmation de son intention de se consacrer à la prospérité et à la liberté de la France dans une ambiance de paix désormais préservée. Autre différence importante entre les vœux de Constant et le premier projet : le refus de concéder le droit d’initiative aux Chambres en matière de confection des lois39. Pour autant, les grands équilibres du projet de 1814 sont préservés, avec même quelques accentuations par rapport aux principes présentés alors par Constant, portant surtout sur la responsabilité des agents de l’exécutif - responsabilité pénale encore mal distinguée de la responsabilité politique-40 et sur les libertés individuelles41.
24Avec le texte suivant42, celui résultant selon toute apparence du travail réalisé par la commission de la Constitution, la troisième version si l’on prend en compte les propositions de 1814, l’on est très proche du document final. Là encore les chiffres sur le nombre des modifications apportées par rapport aux propositions précédentes, donnent une idée de l’évolution, même si toutes les corrections n’ont pas la même portée. Ainsi, sur les soixante-treize articles que compte ce projet, vingt-trois sont la reprise intégrale du texte précédent, quinze en sont également la reprise mais avec des compléments et trente-cinq sont entièrement nouveaux. Il convient cependant d’ajouter, pour donner une idée précise des évolutions, que sur ce dernier chiffre, la plupart des articles qualifiés de nouveaux se bornent à développer des principes, des équilibres ou des institutions déjà présents auparavant mais dont les constituants ont voulu étendre et préciser les caractéristiques.
25Il n’est donc touché ni aux principes de base qui inspirent le régime, placé sous le signe d’un compromis caractéristique du bonapartisme, entre les légitimités démocratique et monarchique, ni aux grands équilibres qui organisent la séparation des pouvoirs, marquée par l’exaltation des valeurs libérales dont Napoléon se réclame désormais. En revanche, un certain nombre d’inflexions sont révélatrices des discussions et des préoccupations du moment. De ce point de vue, c’est le souci d’implantation du libéralisme qui paraît le plus prégnant avec toute une série de dispositions nouvelles, visiblement destinées à mieux protéger les Chambres tant pour ce qui est de l’immunité de leurs membres43 que de l’éventuelle mise en jugement des pairs44. Le travail parlementaire sera facilité par la présence de ministres chargés d’expliquer la politique gouvernementale45, tandis que la liste des questions relevant nécessairement de la compétence législative est allongée46.
26La principale nouveauté tient à ce que quatorze articles nouveaux, donc près de la moitié de ceux qui ont été introduits à cette étape, portent d’une part sur la mise en œuvre par les Chambres de la responsabilité des ministres, auxquels l’on ajoute les commandants d’armée pour faire bonne mesure, d’autre part sur les éventuelles poursuites dont l’ensemble des agents publics peuvent faire l’objet devant les tribunaux ordinaires et de la part des citoyens47. Même si, s’agissant des ministres, cette responsabilité de droit commun est limitée aux cas d’atteintes aux libertés individuelles et subordonnée à un accord du président de la Chambre des pairs, il y a là une innovation considérable48 qui aurait pu se révéler fort dangereuse pour les membres du gouvernement si cette disposition n’avait disparu du texte définitif, de même d’ailleurs que plusieurs autres articles organisant la responsabilité de l’exécutif, moins importants mais révélateurs. Autre bloc d’articles nouveaux, également d’inspiration libérale et dont la portée va être atténuée dans la version finale, ceux qui limitent de façon drastique la place des juridictions d’exceptions49. Finalement, c’est à ce moment de la rédaction que l’Acte additionnel se présente sous sa forme la plus conforme aux principes libéraux dont le régime, sous l’influence de Benjamin Constant, se réclame désormais.
27Pour autant, les modifications et les adjonctions apparues dans cette version témoignent de deux autres logiques, même si les auteurs n’en parleront plus guère, par la suite. Ces deux logiques conduisent d’une part à affirmer l’autorité de l’empereur notamment au niveau de la Chambre des pairs50 par l’apparition du droit de grâce et par le rejet des Bourbons51 d’autre part à introduire des éléments démocratiques supplémentaires, notamment avec l’annonce du plébiscite d’approbation de la Constitution et surtout avec toute une série de dispositions en faveur de la Chambre des représentants, protégée tant dans ses modes de recrutement que dans la priorité qui lui est accordée pour l’examen des lois les plus importantes52.
28Regrouper ces deux logiques, bonapartiste et démocratique, peut paraître artificiel, voire contradictoire. En fait, elles reflètent dans une certaine mesure l’influence de Napoléon qui se veut essentiellement populaire : « Le goût des Constitutions, des débats, des harangues paraît revenu... Cependant ce n’est que la minorité qui les veut, ne vous y trompez pas. Le peuple, ou si vous voulez mieux la multitude, ne veut que moi [...] mais je ne veux pas être le roi d’une jacquerie »53. Ces développements sur le rôle des masses ne séduisent guère Constant qui a abandonné nombre de convictions démocratiques de sa jeunesse54
29Pour ce qui est, enfin, du texte définitif, la quatrième version selon notre décompte, publié après examen par le Conseil d’État et soumis à plébiscite, il ne diffère que très peu du projet précédent : quarante-huit articles demeurent inchangés et, sur les dix-huit qui sont modifiés, la plupart ne font l’objet que d’améliorations, par des adjonctions ou des simplifications. Enfin, pour atteindre le nombre de soixante-sept articles, il faut mentionner un article 66 qui apparaît de façon un peu inattendue comme s’il avait été oublié et que l’on se soit convaincu de son utilité au tout dernier moment, tendant à réglementer la déclaration de l’état de siège, ouverte au gouvernement en cas d’invasion étrangère, normalement réservée aux assemblées en cas de guerre civile.
30Si l’on met de côté cette dernière adjonction qui traduit un certain maintien du souci de protection des libertés dont se réclament officiellement les constituants, les transformations des articles finalement publiées ne susciteraient guère d’intérêt s’il ne se trouvait que la plupart figurent, sous forme de mentions manuscrites, sur l’un des exemplaires de la version précédente. Or sur les dix-huit modifications, douze sont de la main de Constant. Si l’on met à part une insertion étendant l’immunité des membres des assemblées au domaine correctionnel et non pas seulement criminel55, les autres adjonctions manuscrites sont d’ordre technique, au point que l’on peut se demander si, pour certaines d’entre elles, Constant n’était pas simplement le porteplume du comité de Constitution. Pour autant, ces insertions ne sont pas sans intérêt puisqu’elles témoignent de son implication jusqu’au bout du processus de rédaction. Parfois, la démonstration va au-delà de l’image qu’il souhaiterait laisser dans la mesure où l’on trouve son intervention sous forme de mention manuscrite dans l’ultime article du texte, celui qui exclut tout retour au pouvoir des Bourbons, disposition dont il laisse entendre, dans ses Mémoires, qu’il y est totalement étranger56.
31Le jugement que l’on peut porter sur cette dernière version de l’Acte additionnel ne serait pas complet si l’on ne rappelait que six articles ont disparu par rapport à la rédaction précédente, ce qui aboutit à limiter les conditions de mise en cause de la responsabilité des ministres et des agents publics et à abandonner l’interdiction des confiscations, ce dernier point sur intervention personnelle de Napoléon au Conseil d’État57. Ces disparitions ne suffisent pas à faire perdre son caractère libéral à la Constitution des Cent-Jours. Du moins montrent-elles que, jusqu’au bout, le combat de Constant pour la protection des droits individuels a rencontré des adversaires déterminés.
II - Deuxième idée reçue à nuancer : une simple « Charte améliorée »58
32La formule vient de Chateaubriand. Pendant les Cent-Jours, nombre d’ultras, stupéfaits de l’effondrement rapide d’une monarchie qui se croyait durablement réinstallée en France après un absurde intermède d’un quart de siècle, se complaisent dans une critique sans nuance du système impérial. Ils condamnent tout, pêle-mêle, tant la tentative criminelle et usurpatrice de retour aux affaires de Napoléon, que, même, les concessions libérales effectuées par Louis XVIII dans sa déclaration de Saint-Ouen puis dans la Charte59. Dans ces conditions, l’Acte additionnel ne peut trouver aucune grâce à leurs yeux et son auteur présumé, Benjamin Constant, aucune indulgence. C’est dans cette ambiance que Chateaubriand qui a suivi le roi à Gand, rédige un « Rapport sur l’état de la France [...] »60 où il prononce un éloge à la fois méritoire et ambigu de l’Acte additionnel. En fait, ses propres convictions libérales le poussent à convaincre le roi que son éventuel retour au pouvoir ne doit pas être l’occasion d’une remise en cause de l’expérience parlementaire esquissée sous la première Restauration.
33Ces intentions permettent de prendre la mesure du jugement porté dans le « Rapport » à l’égard de « la nouvelle Constitution de Bonaparte » : elle « est encore un hommage à votre sagesse ; c’est, à quelque différence près, la Charte constitutionnelle. Bonaparte a simplement devancé, avec sa pétulance accoutumée, les améliorations et les compléments que votre prudence méditait »61. Dans ses Mémoires sur les Cent-Jours, Constant s’enorgueillit de ce qualificatif de « Charte améliorée »62 accordée à son œuvre, d’autant que son combat pour le libéralisme rejoint celui de Chateaubriand et qu’en ces temps de persécutions larvées contre tous ceux qui ont participé à la tentative napoléonienne de 1815, le parrainage d’un royaliste indiscutable est le bienvenu. En fait, et avec le recul, quelle que soit la façon dont on interprète un tel jugement, qu’on le considère comme laudateur par cette référence à la loi fondamentale qui, en 1814, a installé durablement le parlementarisme en France, ou qu’au contraire, il semble méprisant par le refus adressé à Constant d’avoir su réaliser un texte original, de toute façon cette soi-disant inspiration puisée dans la Charte paraît fort exagérée.
34Il est, en effet, difficilement soutenable que la Charte promulguée le 4 juin 181463 ait servi de modèle à un projet dont la première version est, comme on l’a vu, une proposition de Constitution publiée par Constant le 25 mai 181464. En fait, on est en présence de deux documents élaborés de façon quasi simultanée, du 22 au 27 mai pour la Charte, du 24 avril au 24 mai pour le projet appelé à servir de base à l’Acte additionnel65. La parenté des deux textes s’explique tout simplement par la prise en compte commune des idées à la mode à l’époque, des idées favorables, après huit siècles de monarchie capétienne et vingt-cinq ans de régimes révolutionnaires et bonapartiste, à une expérience parlementaire à laquelle le moment paraît venu de donner sa chance. Après cinq tentatives constitutionnelles, toutes fondées sur la séparation ou la confusion des pouvoirs, les contemporains trouvent un certain pouvoir de séduction à un système de collaboration des pouvoirs, pour employer un terme d’une autre époque, en tout cas un équilibre des institutions combinant la possibilité pour les assemblées de mettre en cause la responsabilité des ministres et le droit pour le chef de l’État de dissoudre le législatif.
35Au-delà de ces idées à la mode, deux sources d’inspiration s’offrent alors auxquels tant les rédacteurs de la Charte que Benjamin Constant dans ses Réflexions rendent un hommage nuancé. Il s’agit d’abord des institutions britanniques, référence ambiguë et qui choque le patriotisme français dans la mesure où l’on sort d’une guerre qui a opposé les deux nations, presque sans interruption, pendant plus de vingt ans. Malgré l’impopularité de ce modèle, Louis XVIII a expressément invité la commission chargée de rédiger la Charte, à s’en inspirer d’autant qu’il en a observé le fonctionnement lors de son exil en Grande-Bretagne66 et qu’il a donc pu en mesurer les avantages pour un monarque ne désirant pas gouverner personnellement mais soucieux de préserver la dignité et la longévité des prérogatives léguées par ses ancêtres. Avec des motivations et des objectifs différents, Constant se réclame également des institutions fonctionnant outre-Manche : « Je n’ai point cherché l’originalité : je ne me suis, sur beaucoup de points, écarté en rien de la Constitution anglaise ; j’ai plutôt expliqué pourquoi ce qui existait en Angleterre était bon, que je n’ai proposé quelque chose de nouveau »67
36La deuxième source d’inspiration doit être cherchée dans un texte maintenant fort oublié et dont l’influence est généralement sous-estimée : le projet de Constitution rédigé par le Sénat, publié le 8 avril 181468. Ce texte accumule le maximum de handicaps : il émane du Sénat qui, après avoir prodigué tous les témoignages de courtisanerie et de flagornerie imaginables à Napoléon et avoir bénéficié de toutes ses largesses, vient, sans aucun scrupule, de voter sa déchéance ; il correspond à la volonté des sénateurs de conserver leurs privilèges matériels au point d’oser insérer un article 6 par lequel ils s’approprient collectivement la dotation attribuée à leur assemblée et en excluent à l’avance tous les nouveaux venus, ce qui vaudra à leur projet le titre de « Constitution de rente »69; il proclame enfin leur ralliement à Louis XVIII sans parvenir à séduire le nouveau maître qui objecte, dans sa déclaration de Saint-Ouen, « qu’un grand nombre d’articles portant l’empreinte de la précipitation avec laquelle ils ont été rédigés, ils ne peuvent, dans leur forme actuelle, devenir lois fondamentales de l’État »70.
37En fait, ce projet demeure une référence. Dans l’ambiance d’urgence qui règne alors, il présente l’avantage d’exister et de proposer un équilibre susceptible de satisfaire le plus grand nombre, avec un législatif bicaméral, avec un exécutif confié au roi qui bénéficie du droit de veto et peut dissoudre la chambre basse, avec un pouvoir judiciaire dont l’indépendance est proclamée, enfin avec la reconnaissance d’un certain nombre de libertés individuelles qui doivent paraître d’autant plus désirables que le pays en a été longtemps privé. Tout en incriminant certaines maladresses de rédaction, Louis XVIII reconnaît que « les bases en étaient bonnes »71. De toute façon, compte tenu de la composition de la commission chargée de rédiger la Charte, avec neuf sénateurs sur vingt-et-un membres, auxquels s’ajoutent des personnalités comme Montesquieu et Beugnot, le texte final est largement inspiré, parfois dans les termes, plus encore dans l’équilibre général des pouvoirs, de la Constitution sénatoriale72. Il en va de même du projet de Constant qui, dans les commentaires des articles proposés dans ses Réflexions, cite effectivement les dispositions préconisées par le Sénat73. Finalement, c’est par l’organisation de la responsabilité pénale des ministres que la Charte et le projet de Constant se distinguent le plus nettement du projet sénatorial. C’est également la différence qui est la plus riche de conséquences pour l’avenir dans la mesure où elle annonce, selon le schéma britannique, une responsabilité politique74. Du moins le Sénat a-t-il ouvert la voie en précisant que les ministres peuvent être membres de l’une ou l’autre des chambres ce qui annonce un principe à la base de la collaboration des pouvoirs75
38Pour autant, il est clair qu’en 1815, dans le premier projet d’Acte additionnel, les éléments empruntés à la Charte ne sont pas tout à fait absents, pas plus qu’on ne l’oubliera au cours des discussions qui suivront. Dans ce premier projet, celui que nous qualifions de deuxième version puisque l’on a constaté que la moitié des articles -soit vingt-cinq sur cinquante- sont empruntés aux propositions présentés par Constant en 1814, il n’en est que deux qui sont repris de la Charte76 et apparemment contraires aux idées de Constant. L’un des deux semble de médiocre importance : il concerne la nécessité d’un vote annuel de l’impôt, prérogative que Constant affecte, avec un peu de coquetterie, de considérer comme un leurre dans la mesure où il y a là une arme très difficile à mettre en œuvre par les députés sauf à accepter de braver l’impopularité, et très facile à contourner pour le gouvernement, pour autant que cela ne dure pas trop longtemps77.
39Les conséquences du second emprunt à la Charte paraissent de plus grande portée puisqu’il aboutit à refuser le droit d’initiative aux assemblées, sauf supplications adressées au roi et accord de sa part78 En fait, la procédure imaginée par les auteurs du texte de 1814 et reprise par celui de 1815 aboutit à ressusciter, au profit du chef de l’Etat, une sorte de droit de veto comparable dans ses résultats à celui institué par le constituant de 1791 et préconisé par Constant dans ses Réflexions79. La procédure imaginée en 1814 et reprise en 1815, tend à éviter l’impopularité, constatée à rencontre de Louis XVI, d’une décision de veto qui peut être interprétée par l’opinion comme un défi au pouvoir législatif. Avec ce refus du droit d’initiative, les assemblées savent à l’avance, lorsqu’elles discutent d’un texte non proposé par le chef de l’État, qu’elles courent le risque d’une non promulgation du résultat de leur travail.
40Avec le projet suivant, la troisième version, qui précède immédiatement le texte définitif, la première impression est celle d’emprunts plus nombreux à la Charte, avec six articles où l’influence est perceptible, quoique partielle. En fait, pour cinq d’entre eux, il s’agit d’aspects qui ne touchent pas à des problèmes de fond mais qui complètent des dispositions déjà existantes sans modifier les grands équilibres. Il en va ainsi d’éléments concernant la composition de la Chambre des pairs80, les immunités dont bénéficient les représentants élus81, enfin l’obligation d’un vote annuel de l’impôt qui ne s’applique pas aux contributions indirectes82. La seule nouveauté importante empruntée à la Charte concerne l’interdiction des confiscations83 utilisées dans le passé comme moyen de représailles politiques : on sait que, bien loin de déplaire à Constant, cette insertion lui apparaît comme extrêmement souhaitable mais qu’elle va se heurter à l’opposition de l’empereur.
41La rédaction définitive de l’Acte additionnel, la quatrième version, permet de dépasser les images partielles fournies jusqu’à présent : elle aboutit à donner l’impression d’un texte qui s’élabore sur une base différente de la Charte de 1814 mais sans que ses rédacteurs la perdent de vue, sachant qu’ils seront jugés par rapport à elle et par des censeurs rien moins que bienveillants, peu disposés à leur savoir gré d’avoir imposé un équilibre de type parlementaire à un empereur dont ce n’était pas les habitudes de gouvernement. Finalement la caractéristique essentielle de l’Acte, caractéristique commune avec la Charte, tient à un équilibre des pouvoirs fondé sur le modèle ancien et prestigieux que constituent les institutions britanniques et sur le texte récent et décrié qu’a fourni le Sénat impérial.
42Au-delà de cette constatation à caractère général, le lecteur qui veut comparer les deux textes est d’abord frappé par la parenté de ton des préambules, d’autant plus proches qu’ils se veulent opposés. Ils se présentent comme la quintessence, rédigée en termes élégants et noblement balancés, de l’état d’esprit des deux groupes politiques qui s’affrontent alors au nom de légitimités irréconciliables mais qui se rejoignent dans des références unissant, dans un habile équilibre, le passé et l’avenir. Ils s’efforcent de mêler harmonieusement gloires nationales anciennes et volonté actuelle de paix et de prospérité. Ils proclament leur attachement à d’audacieuses réformes libérales d’autant plus souhaitables qu’elles sont présentées, sans état d’âme, comme se situant dans la logique d’évolution de régimes rien moins que libéraux. Jusque-là, l’Acte n’est en rien une imitation améliorée de la Charte, c’est bien plutôt une réponse à la Charte.
43L’on ne peut non plus parler de « Charte améliorée » sur les points où l’Acte se situe en retrait par rapport aux avancées de 1814. Il s’agit d’abord de cette absence d’engagement à ne plus mettre en œuvre la procédure de confiscation dont les assemblées révolutionnaires ont fait un usage massif à rencontre des émigrés et des condamnés et qui touche les libéraux en un point particulièrement sensible puisqu’elle s’attaque à la propriété elle-même, puisqu’elle étend la rigueur des lois au patrimoine des familles des proscrits, crime majeur. C’est au nom d’une singulière conception de fidélité à son passé et à son image dans le peuple que l’empereur a imposé la soustraction de cette disposition introduite par ses conseillers et reprise de la Charte. Évidemment Constant juge sévèrement cette décision de se priver d’une garantie utile : « un tort grave en morale et une haute imprudence en politique »84.
44L’autre disposition médiocrement libérale, formulée dans un article 67 qui clôt le document et que Constant qualifie de « ridicule et impuissant »85 consiste en une sorte de malédiction éternelle adressée à la dynastie des Bourbons : dans un texte plus incantatoire que réaliste86, le peuple français est censé renoncer à jamais à faire appel à cette famille qui a dominé la France pendant huit siècles, même en cas d’extinction de la dynastie impériale. Pour faire bonne mesure, l’article vaut aussi renonciation pour toutes les calamités qui seraient censées accompagner un éventuel retour du roi : droits féodaux et seigneuriaux, dîmes, religion dominante, mise en cause de la vente des biens nationaux... On pressent que l’ordre de classement de ces périls majeurs se veut croissant, allant du moins dangereux au plus catastrophique, celui qui menace la propriété elle-même. Waterloo fera justice de cette disposition. Louis XVIII remontera sur le trône sans que son retour ramène toutes les désastreuses institutions dont on le prétendait solidaire et auxquelles les libéraux ne croyaient guère. En fait, il s’agissait, pour Napoléon, de paraître donner satisfaction aux cris qui avaient entouré son retour de l’îlle d’Elbe, dirigés contre les Bourbons, contre les nobles et contre les curés, souhaitant les « lanterner » tous.
45Il est enfin nombre de questions auxquelles l’Acte apporte des réponses apparemment plus satisfaisantes que la Charte, sans que l’on puisse d’ailleurs parler tout à fait d’améliorations mais plutôt de principes de base différents. Une première série de divergences peut être recherchée dans la volonté d’améliorer le travail législatif. Encore que Constant ne soit pas arrivé à imposer le droit d’amendement auquel il tenait, il parvient du moins à donner un contenu au principe de liberté de délibération qu’il énonce dans ses Réflexions87. Un tel objectif suppose d’abord des assemblées composées de membres qui, par leur recrutement, soient les plus indépendantes possible de l’autorité monarchique. Dans cet esprit, les pairs sont tous héréditaires88 ce qui implique qu’à terme, la plupart ne devront plus leur place à la faveur du prince mais au prestige de leur famille.
46Pour ce qui est des représentants élus, le fait qu’ils soient choisis par les électeurs dans le cadre de collèges électoraux qui ne sont plus entièrement contrôlés par des présidents et vice-présidents choisis pour la circonstance par l’exécutif89 devrait également aller dans le sens d’une plus grande indépendance. La présence de représentants de l’industrie et du commerce90 contribue aussi à une autorité accrue des élus. Par ailleurs, le renouvellement en bloc et non plus par cinquième est conçu comme plus favorable à des changements de majorité en fonction des évolutions de l’opinion91. Enfin et pour ce qui est des débats, la présence des ministres aux séances des assemblées pour expliquer et justifier la politique gouvernementale est désormais présentée comme une obligation à la charge du chef de l’État, dans un article92 où l’indicatif doit, comme il convient en droit constitutionnel, être interprété comme un impératif. Sur tous ces aspects, l’Acte se veut dans une logique différente de celle de la Charte, moins méfiante à l’égard du travail des assemblées.
47Une deuxième série de différences prolonge et développe les dispositions de la Charte sur la question de la responsabilité pénale des ministres puisque, tandis que la Charte, pour sa part, n’organise cette responsabilité que pour les seuls « faits de trahison ou de concussion »93, laissant au surplus à des lois à venir le soin d’en déterminer les limites, l’Acte additionnel adopte une incrimination plus ample en invoquant les atteintes à « la sûreté ou l’honneur de la nation ». Il se montre, par ailleurs, plus précis et développé dans la détermination des modalités de mise en œuvre de cette responsabilité ministérielle. Dans les deux textes, le soin de l’accusation revient à la Chambre élue et celui du jugement aux pairs94 mais l’Acte prévoit, avec beaucoup plus de détails, la procédure à respecter dans une telle occurrence, ce qui peut en faciliter la mise en œuvre. Ainsi, au niveau de la Chambre des représentants, ce ne sont pas moins de trois commissions qui doivent être successivement installées, avec des délais strictement imposés à chacune pour effectuer son travail, la première de soixante membres pour étudier s’il faut sommer le ministre de donner des explications, la seconde également de soixante membres pour examiner s’il faut décider qu’il y a lieu de mettre en examen le ministre, la troisième de cinq membres seulement pour poursuivre l’accusation devant la Chambre des pairs. Évidemment, à chaque étape de la procédure, c’est la Chambre entière qui vote pour prendre les décisions...95
48À noter que l’étude des diverses versions par lesquelles est passé l’Acte additionnel avant publication sous sa forme définitive, éclaire un point qui a laissé perplexe plusieurs commentateurs. Dans le texte final, l’article 39 affirme le principe de la responsabilité des ministres, en termes assez généraux pour laisser supposer plusieurs formes de responsabilités. Après quoi, les articles 41 à 51 ne prévoient que la responsabilité pénale devant les pairs. Les auteurs contemporains ont donc été conduits à se demander si l’article 39 ne sous-entendait pas l’existence d’une autre forme de responsabilité, politique celle-là96 ce qui conduirait à considérer l’Acte additionnel comme assez en avance sur son temps puisqu’à l’époque, même en Grande-Bretagne, la notion de responsabilité politique est encore mal définie. Cette interprétation paraît d’autant plus légitime que l’on présente l’Acte comme une reprise de la Charte : dans cette perspective, l’article 39 sur la responsabilité des ministres en général renverrait à l’article 13 de la Charte (les « ministres sont responsables ») qui a effectivement fini par être interprété comme impliquant une responsabilité politique.
49En fait, s’il est vrai que la présence de cette disposition très générale ne débouchant sur rien de précis conduit à juger, sur ce point, l’Acte additionnel comme « finalement assez mal rédigé »97, la cause ne vient pas d’une velléité de mise en place d’une responsabilité politique mais du souhait de Constant d’instituer une deuxième forme de responsabilité, également pénale. Il s’en explique dans plusieurs commentaires publiés en 181598. Selon lui, la responsabilité (pénale) des ministres peut être invoquée dans deux cas et selon deux types de procédures : soit devant la chambre haute en cas de mauvaise application de la loi, soit devant les tribunaux de droit commun en cas de violation de la loi. Si la première hypothèse se retrouve dans les article 41 à 51 de la version finale de l’Acte additionnel, la seconde hypothèse, fort audacieuse et qui figurait explicitement dans les article 54 à 56 de l’avant-dernière rédaction, disparaît dans le texte définitif sans que la disposition à caractère général qui l’annonçait, soit également retirée.
50Une autre différence avec la Charte tient à l’apparition, dans l’Acte, du terme de « gouvernement »99 désignant évidemment les ministres en bloc puisque Constant se veut très attentif à distinguer le monarque de l’exécutif strictement entendu100. À plusieurs reprises, ce gouvernement se voit substitué, d’une version à l’autre, à l’empereur dans l’exercice de prérogatives importantes101. Sans que l’on puisse déterminer dans quelle mesure les contemporains -et Napoléon lui-même- en ont eu une exacte conscience, c’est la notion de ministère qui est en train d’apparaître... Ici, la formule de Chateaubriand se vérifie, annonçant des améliorations à la Charte, des compléments que la prudence royale méditait102. On peut même, à cet égard et en employant un terme un peu anachronique, parler, à propos de l’Acte additionnel, de « prophétie créatrice » puisqu’il va, dans une certaine mesure, influencer l’application de la Charte. Rappelé sur le trône après Waterloo, Louis XVIII n’aura rien de plus pressé que d’annoncer, comme une concession essentielle de sa part et la garantie d’une application plus libérale de la Charte, la mise en place d’un vrai ministère que dirigera Talleyrand103.
51Pour être tout à fait complet, il faut encore citer, comme éléments figurant dans l’Acte additionnel, une protection beaucoup mieux assurée de certaines libertés fondamentales, telle la liberté religieuse puisque n’est mentionnée aucune supériorité du catholicisme104, telle la liberté de la presse puisque le texte influencé par Constant prévoit explicitement le principe du contrôle a posteriori et la compétence exclusive du jury105. Enfin, s’agissant de l’interdiction des juridictions exceptionnelles, la Charte fait explicitement une exception pour les justices prévôtales, ce qu’exclut l’Acte additionnel106.
III – Troisième idée reçue à nuancer : la rédaction de l’Acte additionnel comme témoignage des variations de Benjamin Constant
52Une réputation dévalorisante poursuit Benjamin Constant, celle d’avoir accumulé les volte-face tout au long de sa vie, notamment en matière politique107. Lui-même se défend à peine de cette accusation, avec une devise « sola inscontantia constans » qui résonne comme un aveu108. Il en a même fait le thème central de son livre le plus connu, ce roman Adolphe qui décrit les hésitations sentimentales d’un jeune homme qui lui ressemble comme un frère. Il est vrai que sa liaison avec Mme de Staël, son mariage avec Charlotte du Tertre, son attachement à Mme Récamier -tout ceci quasi simultanément- et l’image que donne son journal intime de ses continuelles interrogations quant à ses véritables attachements, ne plaident pas en faveur d’une personnalité déterminée dans ses choix. Il paraît parfois se complaire dans cette éternelle indécision, toujours entre deux ruptures et deux réconciliations.
53Sa carrière politique semble, dans une certaine mesure, refléter les mêmes atermoiements109. Ses biographes en donnent une présentation bienveillante en le peignant, chaque fois qu’un nouveau régime s’installe -le Directoire, le Consulat et l’Empire, la première Restauration, les Cent-Jours, la seconde Restauration, la Monarchie de juillet- en train de déployer son programme libéral, proposant ses services, généralement agréé mais démissionnant promptement dès que la liberté subit des atteintes. De fait, la conscience de sa valeur, le désir de prouver sa capacité à jouer un rôle politique, le spectacle de la médiocrité de ses rivaux et le sentiment de l’injustice de leur réussite, sans doute aussi quelques soucis d’argent le poussent à souhaiter une place à sa mesure et chaque changement politique paraît lui en fournir l’occasion.
54Il se lance dès le Directoire, avec une détermination que certains biographes malveillants ont dénoncé sans indulgence110. Il recommence avec le Consulat. Une formule de Napoléon est souvent citée pour peindre son accession au Tribunat fin 1799 : « À onze heure du soir, il suppliait encore à toute force ; à minuit et la faveur prononcée, il était relevé jusqu’à l’insulte »111. Avec la chute de Napoléon en 1814, il cherche fébrilement un protecteur puissant : il songe à Bernadotte, à Murat, au tsar Alexandre... Une formule de son journal intime claque comme une devise : « Servons la bonne cause et servons-nous »112. Finalement, il se résigne à la Restauration qui lui permet de peaufiner son image de rallié au régime et d’opposant à sa politique. Il n’est jusqu’à ses derniers jours, au début de la Monarchie de juillet, où il joue un rôle dans l’accession au trône de Louis-Philippe qui aurait consenti à payer ses dettes sans qu’il accepte pour autant d’aliéner sa liberté politique. Lors de son enterrement, une formule court Paris : « il s’est vendu mais il ne s’est pas livré »113.
55En aucune occasion, il ne paraît plus conforme à cette image d’indécis prêt à tous les ralliements et à tous les revirements que pendant les Cent-Jours. L’annonce du débarquement de Napoléon à Fréjus le trouve déterminé à défendre le régime en place. Il y voit l’occasion de montrer ses talents et, peut-être, d’obtenir un poste. Il ne veut pas s’engager pour rien : « Idée de la pairie. Si elle réussit, je consacre et risque volontiers ma vie pour repousser le tyran »114. En même temps, il s’indigne de l’inefficacité des royalistes : « Tout se remet toujours au lendemain [...] Poltronnerie universelle »115. Finalement, il se lance. Il publie un article d’une extrême brutalité, comparant l’empereur à Attila et à Gengis-Khan, en « plus terrible et plus odieux », paraissant se fermer toute possibilité de ralliement en cas de victoire de l’usurpateur : « Je n’irai pas, misérable transfuge, me traîner d’un pouvoir à l’autre, couvrir l’infamie par le sophisme, et balbutier des mots profanés pour racheter une vie honteuse »116. Le lendemain, l’empereur entre à Paris et se réinstalle aux Tuileries.
56Tout semble basculer dans l’opinion publique et Constant va suivre le mouvement général. Il affecte de quitter Paris pour se soustraire à d’éventuelles persécutions. Il revient précipitamment. Il sollicite les membres de l’entourage du nouveau maître. Il en reçoit des assurances d’impunité et même de bienfaits. Il est convoqué pour une entrevue avec l’empereur. Il rêve d’un poste : « Arriverai-je enfin ? »117. Cette fois-ci c’est une nomination au Conseil d’État qui est en point de mire. Comme un mois plus tôt avec la perspective d’une pairie, il craint de se laisser duper par des promesses, de se compromettre avec le nouveau régime sans rien obtenir en échange de son ralliement. Il veut être rémunéré de ses services au préalable : « Si ma nomination a lieu, je me lance tout à fait », ajoutant il est vrai « sans abjurer aucun principe »118. C’est chose faite, le lendemain et il en tire les conséquences : « Le saut est fait, j’y suis tout entier ». Il joue un rôle essentiel dans la rédaction de l’Acte additionnel. Il se lamente du mauvais accueil que lui réserve l’opinion119. Il défend le nouveau régime dans les journaux et dans un livre destiné à rétablir sa réputation et constater ses principes120120. Il prend très au sérieux son travail de conseiller d’État. Il se rend aux Tuileries, faire sa cour à l’empereur. Waterloo met fin à tout. Il va reprendre ses entretiens et ses sollicitations, cette fois auprès de l’entourage de Louis XVIII...
57Chateaubriand affecte de déplorer l’épreuve subie par Constant au cours de cette période riche en rebondissements et en reniements. Il en exagère les conséquences : « Depuis ce moment il porta au cœur une plaie secrète ; il n’aborda plus avec assurance la pensée de la postérité ; sa vie attristée et défleurie n’a pas peu contribué à sa mort ». Encore que cette mort ne soit intervenue que quelques quinze ans plus tard mais avec l’assurance que donne le talent, Chateaubriand en rajoute dans l’évocation du poids de cet épisode sur la carrière et même sur la personnalité de l’auteur de l’Acte additionnel. Il y met une compassion un peu trop marquée pour être tout à fait sincère : « Dieu nous garde de triompher des misères dont les natures les plus élevées ne sont point exemptes ! [...] les faiblesses d’un homme supérieur sont ces victimes noires que l’antiquité sacrifiait aux dieux infernaux, et pourtant ils ne se laissent jamais désarmer »121.
58L’acte additionnel est donc souvent présenté comme le point culminant de cette période riche en trahisons et en ralliements, même si Constant prend beaucoup de soin à justifier ses volte-face dans une série de lettres publiées par la Minerve, puis regroupées au sein d’un ouvrage, Mémoires sur les Cent-Jours. Il a beau faire et beau dire, les commentateurs voient dans sa participation à l’élaboration de la loi fondamentale destinée à organiser le nouveau régime, le plus bel exemple de variations politiques... En fait, il faut nuancer une image si dévalorisante. Comme on l’a vu, l’Acte reprend si étroitement des propositions de 1814 qu’il y aurait quelque injustice à le présenter comme une pure et simple œuvre de circonstances. Mieux : le livre présentant alors le projet de Constitution, les Réflexions, s’accompagne de justifications et de commentaires qui reprennent largement, et parfois mot à mot, des analyses effectuées par Constant dès 1806 et rassemblées pour un projet d’ouvrage non publié de son vivant122. Ici encore, les chiffres donnent une idée des filiations : sur cinquante articles que compte donc son projet de Constitution, vingt-huit font l’objet d’explications et d’argumentations ; sur ces vingt-huit commentaires, six sont largement empruntés aux analyses de 1806 et dix partiellement empruntés. On en arriverait ainsi à réhabiliter l’Acte additionnel en le présentant comme une exceptionnelle manifestation de fidélité politique, la mise en œuvre d’idées formulées près de dix ans plus tôt, conservées en mémoire et expérimentées à la première occasion.
59À s’en tenir aux Principes de 1806, repris en 1814 et expérimentés en 1815, Constant apparaît comme animé d’une remarquable fixité dans ses analyses et dans les valeurs dont il se réclame, malgré toutes les variations politiques qui affectent le pays durant cette période. C’est à ces éléments, jetés sur le papier au début de l’Empire et jugés par Constant assez importants pour être recopiés après dix années de maturation, que nous entendons consacrer les lignes qui suivent. On peut évidemment s’interroger sur la pertinence de la méthode, sur le caractère éventuellement accidentel du fait qu’il ait recopié tel passage plutôt que tel autre. Nul doute qu’il y ait dans cette récupération d’une partie d’un texte ancien notamment la conséquence d’une certaine urgence à faire publier ses idées à un moment où l’histoire du pays est en train de basculer, où il est important, pour les auteurs, de faire connaître leur point de vue, en vue d’infléchir le cours des événements. Il s’agit aussi, pour Constant, d’attirer l’attention sur lui, sur la pertinence de ses analyses et de ses idées, en un temps où des redistributions de places sont prévisibles. Les commentaires politiques édités à l’époque sont souvent rédigés en forme de demande d’emploi.
60En même temps, l’on ne peut pas s’empêcher de penser que ces extraits doivent revêtir une certaine importance aux yeux de Constant. Ils se présentent sous des formes très diverses : anecdotes, rappels historiques, argumentations, démonstrations... En tout cas, ils correspondent à des analyses et des commentaires sur lesquels il n’a pas varié et auxquels il constate un suffisant caractère d’actualité pour mériter d’être repris. Surtout, ils frappent par la priorité donnée à la description de mécanismes politiques précis, se fondant sur des situations réelles génératrices de conflits ou, à tout le moins, de tensions dont la liberté pourrait devenir la victime innocente. Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, ce ne sont pas les analyses théoriques, les grands principes intangibles qui ont toujours sous-tendu son idéologie que Constant recopie prioritairement. Encore que ces principes se retrouvent tout au long de son œuvre, il prend souvent la peine de les reformuler. En revanche, il récupère les matériaux concrets qui paraissent à l’origine de sa pensée. Finalement, il manifeste là une tournure d’esprit plus sociologique, politologique que philosophique.
61Il en va ainsi de son argumentation en faveur de l’hérédité de la pairie. Il reprend son analyse de l’une des causes des tensions sociales qui furent à l’origine de la révolution : la vieille aristocratie ne bénéficiant d’aucune prérogative politique, son existence n’avait plus guère d’autre conséquence que d’humilier les roturiers par le spectacle de quelques privilèges que ne justifiait aucun rôle particulier, ni aucune utilité sociale. Elle était incapable, comme en Angleterre, d’encadrer le peuple et de veiller sur le respect des libertés traditionnelles. « Elle irritait sans contenir »123. Entendons : elle irritait le reste de la population par ses prétentions sans contenir ni les classes populaires contre la tentation de se révolter, ni le gouvernement contre la tendance à l’autoritarisme. En 1815, interrogé par Napoléon qui hésite sur la mise en place d’une pairie, Constant s’y montre favorable et arrache la décision. Quatre ans plus tard, il revient sur la question et montre qu’il a évolué : les effets combinés du goût des Français pour l’égalité et de nouvelles formes de notabilités fondées sur les activités commerciales et industrielles lui paraissent désormais aller dans le sens du refus d’une pairie héréditaire surtout fondée sur la propriété foncière124.
62On peut regrouper les arguments présentés en faveur de deux prérogatives importantes que Constant souhaite voir reconnaître au chef de l’État et qui témoignent qu’à ses yeux l’exécutif n’est pas le seul danger pour la liberté ; les chambres peuvent l’être également et il convient de prévoir des obstacles et des contrepoids pour limiter leurs tendances à ne pas jouer le rôle représentatif qui leur a été assigné. La première prérogative concerne la possibilité de nommer des pairs en nombre illimité. Ici Constant évoque un épisode survenu en 1783 en Grande-Bretagne, lorsque le monarque s’aperçut que la coalition très largement majoritaire parmi les lords et aux communes ne correspondait plus aux attentes du pays : la dissolution permit de rectifier les choses au sein de la chambre basse mais aurait été impossible pour la chambre haute sans la faculté de modifier la majorité par des nouvelles nominations en nombre suffisant125. La deuxième prérogative consiste en un droit de veto qui évite les inconvénients d’une séparation trop stricte des pouvoirs : si le monarque ne peut s’opposer à la mise en application d’une loi dangereuse, il en résulte « qu’une classe d’hommes fait les lois sans s’embarrasser des maux qu’elles occasionnent et qu’une autre classe exécute ces lois, en se croyant innocente du mal qu’elle a fait »126. Rien de plus étranger à Constant que l’exaltation de la loi127, présentée par certains auteurs du XVIIIe siècle comme le critère de toute justice et de toute liberté puisqu’â la fois reflet du droit naturel et expression de la volonté nationale. L’on ne saurait mettre trop d’obstacles à la promulgation des mauvaises lois, quitte à se priver de quelques bonnes.
63À l’appui de l’inamovibilité de la magistrature, Constant évoque la situation lamentable d’un pays où la justice ne serait pas indépendante, où « une autorité quelconque » pourrait obtenir des tribunaux que l’innocent soit condamné sans raison. Les habitants d’un tel pays seraient, prétend-il avec une comparaison qui trahit quelques préjugés ethniques, plus malheureux « que la horde sauvage des bords de l’Ohio ou que le Bédouin du désert »128. Il se montre si attaché à ce que les juges soient libérés de toute pression qu’il en arrive à trouver quelques justifications à la vénalité des offices qui caractérisaient l’Ancien Régime et malgré les inconvénients qu’elle présentait par ailleurs. À l’appui d’une telle affirmation, il invoque les vingt-cinq dernières années de l’histoire de France où tous les partis successivement au pouvoir se sont attachés à contrôler les tribunaux et à les utiliser à leur profit. « Un juge amovible et révocable est plus dangereux qu’un juge qui a acheté son emploi »129. Dans l’état de dépendance auquel étaient réduits les magistrats sous la Révolution et sous Bonaparte, il leur fallait, pour rendre une sentence selon leur conscience et non selon les consignes qui leur étaient adressées, faire preuve d’un courage supérieur à celui que l’on attend d’un soldat au cœur d’une bataille où sa vie est menacée.
64Encore faut-il interdire de distraire les accusés des tribunaux de droit commun. Constant est foncièrement hostile à toute forme de justice extraordinaire et il s’est exprimé là-dessus dès 1801, au Tribunat. La gravité des faits imputés à tel ou tel ne saurait justifier une modification dans la composition de la cour, ni un allégement des formes. C’est selon les règles de droit commun que la culpabilité doit être établie. Aucun argument d’urgence ne saurait légitimer des procédures expéditives. « Pourquoi y aurait-il une classe de faits, sur laquelle on observerait des lenteurs superflues, ou bien une autre classe, sur laquelle on déciderait avec une précipitation dangereuse ? »130. Même si les formes qui président à la production des sentences sont imparfaites, du moins sont-elles protectrices des citoyens. Les exemples de tribunaux ayant pu, grâce aux formalités que leur imposait la législation, résister aux pressions de l’exécutif sont trop nombreux pour que l’on puisse renoncer sans état d’âme à ces garanties utiles. Et Constant d’évoquer les acquittements prononcés en Angleterre à l’égard de certains adversaires du roi Jacques 1er, puis de Cromwell, malgré les ordres du maître du moment. De même, « l’affreuse loi, qui, sous Robespierre, déclara les preuves superflues, et supprima les défenseurs, est un hommage rendu aux formes »131. Il faut interdire tous ces conseils et toutes ces commissions militaires mises en place sous la Révolution pour terroriser les citoyens.
65Comme on ne saurait accumuler trop de précautions, l’indépendance des juges et la préservation de leurs compétences quelles que soient les circonstances, doivent s’accompagner d’un moyen efficace d’éviter leurs erreurs éventuelles sous la forme d’un droit de grâce reconnu au chef de l’État. Il y a là une prérogative régalienne des plus traditionnelles, dérivée à l’origine de l’idée de justice retenue, donc résultant de ce que le monarque peut à tout moment se substituer aux magistrats qui ne prononcent de sentences qu’en son nom et par délégation de sa part. Ce n’est évidemment pas le genre de raisonnement qui peut séduire Constant, ni tous ceux qui sont attachés à l’idée de séparation des pouvoirs. Ici, le droit de grâce fait simplement figure de recours contre les imperfections de la justice et, au-delà, de la loi elle-même. Certains réfutent ce dernier argument en soulignant que si la loi présente des défauts, il convient de la modifier et que, si elle n’en comporte pas, il est normal de l’appliquer. Constant réplique qu’au-delà de la loi, il y a l’interprétation qui en est donnée : « Dès qu’elle s’applique à deux circonstances, que distingue la différence la plus légère, elle est plus ou moins injuste dans l’un des deux cas »132. Les préoccupations des libéraux sont tout à fait transparentes : le droit de grâce du chef de l’État limite les conséquences de l’arbitraire du juge de même que l’indépendance du juge limite les tentations d’autoritarisme, notamment du chef de l’État. L’on n’en finit plus de dresser les pouvoirs les uns contre les autres mais le citoyen devrait finalement s’en trouver mieux.
66Le statut des membres de la Chambre élue est très marqué par la référence anglaise. Il est deux éléments de ce statut auxquels Constant se montre particulièrement attaché, d’une part à la non-rémunération des députés, d’autre part à leur rééligibilité indéfinie. Dans les deux cas, il va chercher ses preuves outre-Manche. Selon lui, c’est à tort que l’on a « déclamé contre la corruption de la chambre des communes »133. Cette dernière a prouvé à plusieurs reprises sa capacité à rester fidèle à ses principes en osant s’opposer à la couronne avec autrement plus de courage que n’ont su le faire les assemblées françaises. Quant à la rééligibilité indéfinie, il est possible d’évoquer, à l’appui de cette possibilité, non seulement l’exemple britannique mais également celui des États-Unis d’Amérique : « Des noms illustrés par des réélections non-interrompues, y sont devenus en quelque sorte une propriété populaire »134. De toute façon, il n’y a pas tant de citoyens de talents disposés à consacrer leur temps à la collectivité pour que l’on puisse prendre le luxe de n’accorder à chacun qu’un seul mandat.
67La liberté de la presse, enfin, fait l’objet de longues justifications de la part de Constant. Là encore, il cite toutes sortes d’exemples destinés à montrer l’innocuité de la liberté et les dangers de la censure. Il évoque la Prusse de Frédéric II où, dit-il, ont coexisté une totale liberté de la presse et une absolue sécurité du pouvoir en place, malgré de terribles guerres. Il souligne les inconvénients, pour la France du XVIIIe siècle, d’une censure qui a empêché les auteurs de dénoncer les inconvénients de ces affrontements continuels avec la Grande-Bretagne qui ont ruiné le pays et constitué l’une des causes les plus évidentes de la Révolution. Si les gazettes avaient été libres, elles auraient mis en évidence et convaincu les populations des progrès accomplis avec le règne de Louis XVI. La censure rend la masse de la population à la fois ignorante et crédule, donc inquiète et parfois féroce. Les gouvernants auraient le plus grand intérêt à supprimer toutes les formes de censure qui les empêchent de connaître les abus les plus criants et qui encouragent le despotisme aux niveaux subalternes de l’administration. « La liberté de la presse remédie à ces deux inconvénients ; elle éclaire l’autorité quand elle est trompée, et de plus, elle l’empêche de fermer volontairement les yeux »135. D’une façon générale, l’abondance même de l’arsenal législatif et réglementaire mobilisé contre les journaux aboutit à surestimer leur puissance, voire à augmenter leur audience.
*
68Au terme de cette étude, la généalogie de l’Acte additionnel paraît plus complexe, et surtout remontant plus haut dans le passé que l’on ne le croit généralement. Ce ne sont donc pas moins de cinq textes principaux qui ont précédé et préparé la version définitive : au départ, on trouve un manuscrit de Constant de 1806 avec des « Principes de politiques » fournissant la majeure partie des analyses et des argumentations présentées à l’appui des cinquante articles qui composent le projet de Constitution publiée en mai 1814 et dont la moitié se retrouvent dans la première version connue de l’Acte additionnel, celle-ci fournissant à son tour la moitié des articles du document suivant, ce dernier légèrement modifié dans le texte final. Au-delà de cette comptabilité un peu vaine qui présente du moins l’intérêt de reconstituer les filiations mais qui présente l’inconvénient de confondre dans le même décompte les éléments importants et les dispositions mineures, les responsabilités semblent à peu près établies, avec un rôle prédominant reconnu à Benjamin Constant, tout au long du processus de rédaction, comme le veut une tradition orale, longtemps médiocrement démontrée et bien au-delà de ce qu’il laisse entendre dans ses Mémoires.
69L’équilibre des pouvoirs envisagé alors paraît banal, avec un exécutif bicéphale, un législatif fondé sur le bicaméralisme et une justice indépendante. Il serait frivole de se demander ce qu’aurait pu être l’application d’un tel système si on lui avait donné plus que quelques semaines de mise en application. Du moins peut-on noter la mention, pour la première fois dans un texte constitutionnel, de l’existence d’un gouvernement dont les documents préparatoires montrent que Constant le souhaitait tout à fait indépendant du chef de l’État. Dans ses Réflexions sur les Constitutions, il présente en effet une stricte distinction entre les pouvoirs du chef de l’État et ceux des ministres136 comme la grande innovation qui va résoudre les problèmes d’instabilité politique dans lesquels se débat la France depuis près de trente ans. D’un certain point de vue, la seconde restauration lui donne raison avec la mise en place, par Louis XVIII, dès son retour, du premier gouvernement de cabinet, avec Talleyrand comme « président du conseil des ministres ».
70Si d’autres innovations auxquelles Constant était attaché, tels le veto du chef de l’État ou la gratuité des fonctions représentatives, n’ont pas eu le même succès et ne lui ont pas durablement survécu, du moins témoignent-elles de sa volonté obstinée de mettre en place tous les obstacles possibles au despotisme, par exemple en permettant au monarque de s’opposer à des lois inutilement rigoureuses au risque assumé d’en annuler de bienfaisantes, ou encore en privilégiant une classe d’élus d’autant plus insensibles à toutes les pressions qu’ils sont nécessairement riches, voire, ce qui ne lui déplairait pas trop, conservateurs.
71Surtout, il aurait souhaité imposer une responsabilité aussi largement ouverte que possible des fonctionnaires d’autorité. Tel est sans doute l’aspect le plus novateur de son programme avec la volonté de faire descendre la possibilité de recours contre l’action administrative jusqu’aux agents d’exécution puisque c’est d’eux, et souvent à leur initiative personnelle, que la liberté reçoit ses atteintes les plus fréquentes, les plus douloureuses et les plus vexatoires pour ceux qui en sont victimes. Simultanément, à l’autre bout de la chaîne des décisions administratives, les ministres devraient pouvoir être traduits devant les tribunaux de droit commun. Les coauteurs de l’Acte additionnel, ceux que la défaite de Waterloo a conduit à souhaiter rester dans l’ombre, ont sans doute pris une juste conscience de l’enjeu d’une telle disposition. Au fil des versions, les modalités de mise en cause des agents du gouvernement se sont précisées et élargies... jusqu’au texte final où elles ont pratiquement disparu d’un coup, ne survivant qu’à travers la vague promesse d’une loi destinée à régler la question.
72La vision que l’on peut avoir de la dernière Constitution voulue par Napoléon 1er ne se trouve pas révolutionnée par l’étude de ces versions successives mais, quand même, assez sensiblement modifiée. Elle apparaît plus originale qu’on ne l’a dit, influencée par l’esprit du temps mais très peu par la Charte de 1814, tentant comme elle d’implanter en France un parlementarisme à l’anglaise, porteuse des mêmes ambiguïtés et des mêmes promesses avec une responsabilité ministérielle encore mal dégagée d’une procédure de type pénal. Elle témoigne surtout de la continuité de pensée et même de l’obstination du courant libéral, fondé sur des principes élaborés au début du premier Empire, proposant ses services une première fois lors du retour des Bourbons sur le trône, croyant s’imposer en 1815 mais de façon trop éphémère pour convaincre, revenant à la charge avec Louis-Philippe, survivant à Constant pour influencer les constituants de 1875. Il faut replacer l’Acte additionnel dans cette évolution séculaire : les libéraux sont convaincus de la force irrésistible de leurs idées, un revers comme celui des Cent-Jours ne peut entamer leur confiance dans la victoire finale de leurs propositions. C’est bien le thème dominant des Mémoires de Constant : le pays ne peut s’en prendre qu’à lui-même de l’échec de 1814, la classe politique n’a pas su se rassembler autour du beau texte que l’on a mis à sa disposition. Ce n’est que partie remise.
Notes de bas de page
1 Nous nous devons, en début d’article, de rendre hommage et d’exprimer notre reconnaissance au professeur Kurt Kloocke, membre du comité directeur chargé de la publication des Œuvres complètes de Benjamin Constant et directeur des volumes relevant de la troisième période : 1813-1821. Ce sont ses recherches sur les diverses versions préparatoires au texte définitif de l’Acte additionnel qui ont rendu possible notre étude.
2 Mémoires sur les Cent-Jours publiés dans Benjamin CONSTANT, Œuvres complètes, Max Niemeyer Verlag, Tùbingen 1993, t. XTV, p. 215 à 221 [cité désormais Œuvres]. Sur les rapports Napoléon-Constant, cf. Laurent DUBOIS de CARRATIER, « L’Acte additionnel aux constitutions de l’Empire : la dialectique Napoléon-Constant », dans Annales de l’Université des sciences sociales de Toulouse, 1997, p. 78 et s.
3 Benjamin CONSTANT, Journaux intimes, Gallimard, Paris 1952, p. 438 (cité désormais Journaux intimes).
4 Frédéric BLUCHE, Le plébiscite des Cent-Jours (avril-mai 1815), Droz, Genève 1974.
5 Œuvres, t. XIV, p. 241-242.
6 « Le champ de mai », dans Robert MARGERIT, Waterloo, NRF, Paris 1964, p. 127 à 137.
7 Moniteur, 8 juin 1815, p. 646.
8 CHATEAUBRIAND, Mémoires d’Outre-Tombe : « L’Acte additionnel enlève à Bonaparte le parti républicain et fait des mécontents dans presque tous les autres partis » (livre XXIII, chap. 12). Cf. Cl. RADIGUET, L’acte additionnel aux constitutions de l’Empire du 22 avril 1815, thèse droit, Caen 1911.
9 Œuvres, t. XIV, p. 217.
10 Id., p. 219.
11 Œuvres, t. XIV, p. 241.
12 Constant (Benjamin), Réflexions sur les constitutions, la distribution des pouvoirs, et les garanties d’une monarchie constitutionnelle, Nicolle, Paris 1814, p. XI [cité désormais Réflexions].
13 Id., p. 215.
14 Pour éviter de donner l’impression de se battre la coulpe sur la poitrine des collègues, nous dénoncerons en premier : A. CABANIS et al., Histoire constitutionnelle et politique de la France de la Révolution à nos jours, LGDJ, Paris 2000, où l’Acte additionnel ne se voit consacrer que deux lignes (p. 26).
15 Paul BASTID, Benjamin Constant et sa doctrine, 2 vol., Armand Colin, Paris 1966, t. 1, p. 284 : « À la vérité, les travaux préparatoires de la Constitution étaient entourés d’un certain mystère » ; Stéphane RIALS, « Acte additionnel », dans Dictionnaire Napoléon (sous la direction de Jean TULARD), Fayard, Paris 1987, p. 32 : « Il réunit une commission dont la composition comme les travaux sont mal connus, mais dont on sait qu’elle fut assez divisée [...] la commission de constitution initialement installée arrêtât, sans doute avec de faibles modifications, le texte définitif qui fut, pour finir discuté devant le Conseil d’État » ; MARGERIT, ouvr. cité, p. 105 : « Tous les historiens ne s’accordent pas sur l’importance du rôle joué par Benjamin Constant dans la rédaction de cet acte, et qu’il a eu peut-être quelque tendance à gonfler [...] il ne nous intéresse en rien de savoir quelle fut dans cet ouvrage la part de Napoléon, et celle de Benjamin Constant, ou de Merlin de Douai, Thibeaudeau, Defermon [...] » ; Marcel MORABITO et Daniel BOURMAUD, Histoire constitutionnelle et politique de la France (1789-1958), Montchestien, Paris 1996, p. 157 : « On retint donc la procédure la plus rapide -et la plus confidentielle- celle de la commission de la constitution [...] ».
16 Le mot est de Montlosier (BASTID, ouvr. cité, t. 1, p. 286).
17 Œuvres, t. XIV, p. 215 à 221.
18 Id., p. 2l5 : « On a voulu m’attribuer l’acte additionnel en entier. J’indiquerai plus tard quels articles m’appartiennent [...] et de quels autres articles je puis me croire plus ou moins responsable, pour les avoir approuvés ou consentis. Maintenant je ne serai qu’historien et je raconterai seulement les faits ». Le « plus tard » ne viendra jamais.
19 Id., p. 216 à 219.
20 Id., p. 227.
21 21 Id., p. 224.
22 Seconde réponse de Benjamin Constant [Paris 1817], p. 2-3.
23 Œuvres, t. XIV, p. 223.
24 Id., p. 224.
25 Seconde réponse, p. 2-3.
26 Constant parle d’une « espèce de comité de constitution » qui se composait « en partie des présidents de section » (Œuvres, t. XIV, p. 226-227) du Conseil d’État.
27 Les constitutions de la France depuis 1789 (présentation par Jacques GODECHOT), Garnier-Flammarion, Paris 1979, 1995 (nouvelle édition), p. 226.
28 Œuvres, t. XIV, p. 223.
29 H. Nicolle, Paris 1814, XVI +168 p.
30 Réflexions, p. V.
31 Le fait que les Réflexions soient directement à l’origine du premier projet d’Acte additionnel a été mis en évidence par le professeur Kloocke.
32 A.N. AF IV 859 (12), manuscrit « Napoléon, Empereur des Français [...] », publié dans t. IX des Œuvres complètes et désigné sous le sigle Al que nous reprenons ici.
33 Journaux intimes, p. 438.
34 Id.
35 Id.
36 Id.
37 Œuvres, t. XTV, p. 211.
38 Id., p. 216-217.
39 Al, art. 18 et 19, contraires aux chap. II-3 et IV-1 des Réflexions.
40 Al, art. 28 à 32 reprenant et développant le chap. III-2 à 5 des Réflexions. Sur « L’immunité constitutionnelle des ministres », cf. DUBOIS de CARRATIER, art. cité, p. 90 et s.
41 Al, art. 41 à 44 reprenant et développant le chap. VIII-1 des Réflexions.
42 AJV. AFIV 859 (12), imprimé « Acte additionnel [...] », publié dans t. IX des Œuvres complètes et désigné sous le sigle A2 que nous reprenons ici.
43 A2, art. 15.
44 A2, art. 16.
45 A2, art. 20.
46 A2, art. 36.
47 A2, art. 42 à 56 sauf art. 52 (art. 32 dans le précédent projet).
48 A2, art. 54 à 56. Cf. Lucien JAUME, « La responsabilité des ministres chez Benjamin Constant », dans Revue française de droit constitutionnel, n° 42, 2000, p. 227 à 243.
49 A2, art. 61 à 63.
50 A2, art. 4 à 6 (ce dernier article étant le seul qui fasse allusion à la famille impériale).
51 A2, art. 64 et 73.
52 A2, art. 8, 9, 20 et 37.
53 Œuvres, t. XIV, p. 209 et 211.
54 Ahmed SLIMANI, Le républicanisme de Benjamin Constant (1792-1799), P.U. d’Aix-Marseille, Aix-en-Provence 1999.
55 Acte, art. 14 et 16.
56 Œuvres, p. 224
57 « Alors [Bonaparte] se leva, promenant autour de lui des regards de mécontentement et d’irritation : "On me pousse, s’écria-t-il, dans une route qui n’est pas la mienne [...]" » (Œuvres, t. XIV, p. 227).
58 Georges BURDEAU, Francis HAMON et Michel TROPER, Droit constitutionnel, LGDJ, Paris 1997, p. 314 : « Ainsi l’Acte additionnel reproduisait-il la structure générale de la Charte » ; Maurice DUVERGER, Institutions politiques et droit constitutionnel, t. II, PUF, Paris 1992, p. 71 : « Elle établit un régime semi-parlementaire très proche de celui de la Charte de 1814 » ; Jean GICQUEL, Droit constitutionnel et institutions politiques, Montchrestien, Paris 1993, p. 448 : « En un mot, c’est l’empire selon la Charte » ; MORABITO et BOURMAUD, ouvr. cité, p. 158, § 2 : La « Charte Améliorée » ; Marcel PRELOT, Institutions politiques et droit constitutionnel, Dalloz, Paris 1987, p. 420 : « l’Empire selon la Charte » ; RIALS, art. cité, p. 33 : « sur le fondement de légitimités antagonistes, les expériences constitutionnelles de 1814-1815 attestent, du point de vue des techniques mises en œuvre, des convergences manifestes. Cela vaut non seulement pour la Charte et l’Acte additionnel mais également pour la constitution sénatoriale ».
59 Sur « Les voltigeurs de Louis XIV », v. José CABANIS, Charles X, roi ultra, Gallimard, Paris 1972, p. 70 à 81.
60 « Rapport sur l’état de la France au 12 mai 1815 fait au roi dans son conseil à Gand », dans CHATEAUBRIAND, Œuvres complètes, éd. Ladvocat, Paris 1828, t. VII, p. 138 à 140.
61 Id. Dans les Mémoires d’Outre-Tombe (livre XXIII, chap. 12), Chateaubriand revient sur le diagnostic : « à quelques différences près, et surtout moins l’abolition de la confiscation, c’était la Charte ».
62 Œuvres, p. 240.
63 Moniteur, 5 juin 1814, p. 617 et s.
64 25 [mai] Distribué mon livre" (Journaux intimes, p. 403).
65 La commission de rédaction de la Charte comprenant trois commissaires du roi, neuf députés et neuf sénateurs, s’était réunie, sous la présidence du chancelier Dambray, du 22 au 27 mai 1814 (Ach. de VAULABELLE, Histoire des deux Restaurations, Garnier, t. II, p. 75 à 87). Constant a rédigé ses Réflexions entre le « 24 [avril] [...] Fait un nouveau plan d’ouvrage que nous pourrons achever en moins de rien » (Journaux intimes, p. 401) et le « 24 [mai] Passé toute la nuit à refaire la préface » (Journaux intimes, p. 403).
66 GODECHOT, ouvr. cité, p. 215.
67 Réflexions, p. VII.
68 Moniteur, 8 avril 1814, p. 385 et s. ; cf. M.-J. de SOTO, « La constitution du 6 avril 1814 », dans Revue internationale d’histoire politique et constitutionnelle, 1953, p. 268 et s.
69 VAULABELLE, ouvr. cité, t. II, p. 8.
70 Id., p. 62.
71 Id.
72 « Comme ils étaient les principaux auteurs du projet sénatorial de constitution, ils firent décider que ce projet servirait de base, et que la Charte en serait inspirée » (GODECHOT, ouvr. cité, p. 213). En fait, c’est surtout vers la fin de la Charte, alors que le roi vient de demander à la commission de hâter ses travaux (VAULABELLE, ouvr. cité, t. II, p. 85), que la reprise des termes figurant la constitution sénatoriale est la plus patente.
73 Réflexions, p. 18.
74 Art. 13 et 54 à 56 de la Charte, chapitre II dans les Réflexions.
75 Art. 14 du projet sénatorial, chap. IV-3 du projet de Constant, art. 54 de la Charte.
76 Plus deux qui disparaîtront dans les versions suivantes : art. 42 et 62 de la Charte, art. 25 et 40 de Al.
77 Réflexions, p. 53, art. 48-48 de la Charte, art. 27 de Al.
78 Chap. 22-3 et IV-1 du projet de Constant, art. 19 de la Charte, art. 19 également de Al.
79 Réflexions, p. 21 à 25.
80 Art. 29 et 30 de la Charte, art. 5 et 6 de A2.
81 Art. 55 et 56 de la Charte, art. 14 et 15 de A2.
82 Art. 49 de la Charte, art. 35 de A2.
83 Art. 66 de la Charte, art. 60 de A2.
84 Œuvres, p. 226.
85 Id., p. 224.
86 Art. 67 de la Charte.
87 « Les lois proposées dans le sein des assemblées représentatives y sont discutées librement » (Réflexions, chap. IV-2, p. 53).
88 Art. 3 de l’Acte ; Réflexions, p. 9 et s.
89 Art. 29 et 30 de l’Acte.
90 Art. 33 de l’Acte.
91 Art. 13 de l’Acte ; Réflexions, p. 77 et s.
92 Art. 18 de l’Acte.
93 Art. 56 de la Charte.
94 Art. 55 de la Charte ; art. 41 de l’Acte.
95 Art. 43 à 49 de l’Acte.
96 Commentaire de Debbasch, Bourdon et al. : « Le texte est peu clair sur la question de la responsabilité ministérielle. Cependant, celle-ci semble bien n’être que pénale » (Charles DEBBASCH, Jacques BOURDON, Jean-Marie PONTIER et Jean-Claude RICCI, Droit constitutionnel et institutions politiques, Economica, Paris 1990, p. 439) ; commentaire de Deslandres sur l’art. 39 : « Il semblait bien qu’ainsi était établie la responsabilité générale pour mauvaise administration, erreurs, fautes politiques selon le pur principe parlementaire » ; il ajoute cependant : « On peut pourtant douter qu’il en fut ainsi » (Maurice DESLANDRES, Histoire constitutionnelle de la France de 1789 à 1870, Duchemin, Paris 1932, t. 1, p. 757) ; commentaire de Morabito et Bourmaud sur l’art. 39 qui « peut éveiller un doute » sur l’existence d’une responsabilité politique ; ils ajoutent cependant que « les articles suivants dissipent toute incertitude » : l’Acte additionnel ne prévoit qu’une responsabilité pénale (MORABITO et BOURMAUD, ouvr. cité, p. 160) ; commentaire de Rials qui, dans une première lecture, envisage de détacher l’art. 39 (et l’art. 40) des articles suivants et de lui attribuer la mise en œuvre d’une « responsabilité politique malgré des survivances pénales » ; il ajoute cependant qu’il faut plutôt « adopter une seconde lecture » conduisant à supposer la seule présence d’une responsabilité purement pénale (RIALS, art. cité, p. 33-34) ; commentaire de Turpin : « les ministres devaient être pénalement, et peut-être politiquement, responsables » (Dominique TURPIN, Droit constitutionnel, PUF, Paris 1992, p. 291).
97 RIALS, art. cité, p. 34.
98 Deux publications en ce sens : un opuscule de février 1815 De la responsabilité des ministres (Nicolle, Paris 1815), et le chap. IX d’un ouvrage publié en mai de la même année Principes de politique, applicables à tous les gouvernements représentatifs et particulièrement à la constitution actuelle de la France (Eymery, Paris 1815).
99 Art. 19, 23, 24, 38 et 65 de l’Acte.
100 Réflexions, p. 1 et s.
101 Art. 19, 23 et 24 de l’Acte.
102 Telle semble bien l’intention de Chateaubriand qui, dans son rapport, souhaite visiblement que le roi reprenne à son compte nombre d’innovations introduites par l’Acte additionnel. C’est le passage de son rapport qu’il reproduit dans les Mémoires d’Outre-Tombe (livre XXIII, chap. 6) : « Sire, vous vous apprêtiez à couronner les institutions dont vous aviez posé la base... Vous aviez déterminé une époque pour le commencement de la pairie héréditaire ; le ministère eût acquis plus d’unité ; les ministres seraient devenus membres des deux Chambres selon l’esprit même de la Charte ; une loi eût été proposée afin qu’on pût être élu membre de la Chambre des députés avant quarante ans et que les citoyens eussent une véritable carrière politique. On allait s’occuper d’un code pénal pour les délits de presse, après l’adoption de laquelle loi la presse eût été entièrement libre [...] ».
103 Concession, il est vrai, fortement suggérée par Talleyrand qui fait signer et publier par Louis XVIII, le 28 juin, la déclaration dite « de Cambrai » : « Je prétends ajouter à la Charte toutes les garanties qui peuvent en assurer les bienfaits. L’unité du ministère est la plus forte que je puisse offrir. J’entends qu’elle existe » (Henry HOUSSAYE, 1815, la seconde abdication, la terreur blanche, Perrin, Paris 1911, p. 144).
104 Art. 6 de la Charte ; art. 62 de l’Acte.
105 Art. 8 de la Charte ; art. 64 de l’Acte.
106 Art. 63 de la Charte ; art. 55 de l’Acte.
107 BASTID, ouvr. cité, p. 287 : « Durant toute cette période, Benjamin Constant est sur le plan politique dans la position du joueur, qui s’est engagé, qui ne songe pas à revenir en arrière, mais qui doute un peu de la fortune » ; DUBOIS de CARRATIER, art. cité, p. 79 : « À l’époque, la nouvelle du ralliement de Constant est perçue comme une palinodie ridicule » ; RIALS, art. cité, p. 32 : « L’homme, très remarquable esprit politique et constitutionnel, était doublement opportuniste, au sens le plus neutre du terme » ; MORABITO et BOURMAUD, ouvr. cité, p. 157 : « Volte-face a priori surprenant du chef des libéraux qui, un mois auparavant, dans le Journal des débats, avait comparé Napoléon à Attila et à Gengis Khan... » ; M. VIELCASTEL, Histoire de la Restauration, Boccard, Paris 1919, t. 1, p. 390 : « De toutes les défections qui marquèrent cette triste époque, aucune ne produisit un étonnement plus profond, aucune ne jeta sur celui qui s’en était rendu coupable autant de déconsidérations et de ridicule » ; cf. enfin Dictionnaire des girouettes, Eymery, Paris 1815, p. 101 à 104.
108 BASTID, ouvr. cité, p. 6.
109 Pour Constant lui-même, les incertitudes dans le domaine des sentiments, peuvent refléter la même tendance dans le domaine religieux ou politique (Œuvres, p. 497).
110 GUILLEMIN, Benjamin Constant muscadin, Gallimard, Paris 1958.
111 LAS CASES, Mémorial de Sainte-Hélène, mardi 13 août 1816.
112 Journaux intimes, p. 401.
113 Formule de Dupin (BASTID, ouvr. cité, p. 469).
114 Journaux intimes, p. 435.
115 Id., p. 436.
116 Journal des débats, 19 mars 1815. Cf. Etienne HOFMANN, « Benjamin Constant à la veille des Cent-Jours », dans Études de lettres, 1977, p. 1 à 23.
117 Journaux intimes, p. 438.
118 Id., p. 438.
119 Id., p. 439.
120 Id., p. 440.
121 CHATEAUBRIAND, Mémoires d’Outre-Tombe, livre XXIX, chap. 21.
122 Ce projet d’ouvrage a fait l’objet d’une remarquable édition commentée : Etienne HOFMANN, Les "Principes de politique" de Benjamin Constant : la genèse d’une œuvre et l’évolution de la pensée de leur auteur (1789-1806), Droz, Genève 1980, 2 vol. (le t. II cité désormais : Principes).
123 Réflexions, p. 11, démonstration reprise des Principes, p. 226 ; conséquence : art. 3 de l’Acte.
124 Œuvres, p. 232 à 236.
125 Réflexions, p. 19, démonstration reprise des Principes, p. 401 ; conséquence : art. 4 de l’Acte.
126 Réflexions, p. 22, citation empruntée aux Principes, p. 55 ; conséquence : art. 24 et 25 de l’Acte.
127 A. CABANIS et O. DEVAUX, « La liberté contre la loi chez Benjamin Constant », dans Pensée politique et loi, Presses universitaires d’Aix-Marseille, Aix-en-Provence 2000, p. 249 à 263.
128 Réflexions, p. 33, citation empruntée aux Principes, p. 181.
129 Réflexions, p. 34, citation empruntée aux Principes, p. 182 ; conséquence : art. 51 de l’Acte.
130 Réflexions, p. 87-88, citation empruntée aux Principes, p. 186, elle-même empruntée à un discours du 25 janvier 1801 (Constant polémiste, textes politiques choisis par Olivier Pozzo di Borgo, J.J. Pauvert, Paris 1965, p. 37) ; conséquence : art. 60 de l’Acte.
131 Réflexions, p. 89, citation empruntée aux Principes, p. 187 ; conséquence : art. 54 et 55 de l’Acte.
132 Réflexions, p. 37-38, citation emprunté aux Principes, p. 193 ; conséquence : art. 57 de l’Acte.
133 Réflexions, p. 69, démonstration reprise des Principes, p. 230 ; conséquence : art. 11 de l’Acte.
134 Réflexions, p. 73, citation empruntée aux Principes, p. 233 ; conséquence : art. 12 de l’Acte.
135 Réflexions, p. 155, citation empruntée aux Principes, p. 136 ; conséquence : art. 64 de l’Acte.
136 Réflexions, p. 1 à 8.
Notes de fin
* Article rédigé avec Olivier DEVAUX et publié par dans La constitution dans la pensée politique, Presses universitaires d’Aix-Marseille, Aix-en-Provence 2001, p. 255 à 287.
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