Justices temporelles, justices spirituelles : conflits, rapprochements et transferts à Reims à la fin du Moyen Âge
p. 359-375
Texte intégral
1Dans une réponse faite au Parlement de Paris lors d’un conflit avec son chapitre rédigée vers 1483, l’archevêque de Reims Pierre de Laval rappelle que « il est arcevesque et duc de Reims, premier per de France, laquelle duché et pairie, ensamble le temporel dudit arcevesché, il tient en foy et hommaige du roy a cause de sa couronne de France ; et a cause d’icelluy arcevesché et pairie il a plusieurs beaux drois, prerogatives et preeminances et, entre les autres, il a toute jurisdition temporelle et spirituelle dedans la ville de Reims, excepté en aucuns lieux particuliers ou lesdits doyen et chappitre et autres eglises dudit Reims pretendent avoir ban et jurisdition1. »
2Il synthétise à l’extrême – et en la biaisant à son avantage – la réalité du système judiciaire rémois, relativement complexe. L’autorité principale est celle de l’archevêque-duc, seigneur temporel de la ville depuis le XIe siècle ; ce dernier détient la juridiction temporelle sur son ban, au nord/nord-ouest, le plus étendu de Reims puisqu’il couvre la moitié de la superficie et comprend les deux tiers des habitants de la cité2. Ce ban est appelé ban de l’archevêque ou ban de l’échevinage, les bourgeois ayant obtenu en 1182 l’organisation de cette cour judiciaire3. Les bourgeois du ban de l’échevinage ne peuvent être poursuivis ailleurs que devant la cour du prélat, sauf pour cas royal4. Dans cet espace, toutefois, les bourgs de la Couture et de Venise, bien qu’inclus dans les paroisses de Saint-Jacques et de Saint-Étienne, ne sont pas du ressort de l’échevinage et ont leur propre juge de première instance, en la personne de leur maire respectif. Si les justiciables quittent le ban, l’archevêque prétend toujours pouvoir les juger pour des délits qu’ils auraient commis sur sa seigneurie, antérieurement à leur départ. Le statut de bourgeois est facile à obtenir jusqu’au XVe siècle, moyennant le paiement d’une somme modique au seigneur et la possession d’un domicile sur le ban5. Le fonctionnement de cette justice seigneuriale est particulièrement bien connu grâce à une série de trente registres aux causes pour la période 1333-15166. Le tribunal se réunit sous l’autorité du bailli ou du prévôt de l’archevêque, selon la nature du délit, en présence des échevins du ban, élus chaque année par la population, à moins que les justiciables n’aient explicitement renoncé à leur présence. Le bailli préside la cour lorsqu’y sont jugés les délits les plus graves et les crimes ; au prévôt reviennent les battures sans effusion de sang, les injures et les conflits d’argent (dettes, rentes, loyers et salaires). Le statut de bourgeois est protecteur en termes procéduraux ; par exemple, la torture n’est possible envers eux que très tardivement, à la fin du XIVe siècle seulement, alors que les non-bourgeois y ont été soumis beaucoup plus tôt7. Les échevins sont chargés de rendre la sentence et de veiller au respect de la coutume locale, tandis que les officiers de l’archevêque conduisent la poursuite, mènent les débats et se chargent de l’application des peines. Les plaids sont tenus, suivant les périodes, soit dans le château de Portemars, à l’extrémité nord de la ville, soit dans la loge que possèdent les deux juges place du Change, dans le cœur du ban, à proximité des marchés aux draps et aux blés. Hors de la ville, le bailli et le prévôt de l’archevêque entendent les appels des juridictions châtelaines dépendant de la seigneurie de l’archevêque, au nombre de sept8.
3La ville compte trois autres bans. Les bans de Saint-Remi et de Saint-Nicaise comprennent les bourgs établis autour des abbayes du même nom, au sud de l’espace urbain ; le premier compte 500 feux en 1328, le second est plus modeste. L’exercice de la justice y est mal connu. Chaque abbaye emploie un bailli, l’échevinage de chaque ban est peu autonome et l’autorité du seigneur de tutelle semble rester forte jusqu’à la fin du Moyen Âge9. Le ban capitulaire ou le ban du chapitre est le plus difficile à décrire précisément. Le chapitre cathédral a toute juridiction temporelle sur les habitants d’une partie du territoire urbain, à proximité du cloître, ainsi que sur le bourg de Vesle et la mairie de Saint-Martin, au contact des bans de Saint-Nicaise et de Saint-Remi10. Cette juridiction s’exerce, par ailleurs, sur trois enclaves dans la cité : la Tirelire, Coursalin – à proximité de l’église Saint-Pierre-le-Vieil et Pissechien ou Haute Croupe entre la porte Chacre et la porte Neuve. Un censier de 1321 permet d’estimer la population concernée à 400 feux11. De plus, le chapitre a juridiction, temporelle et spirituelle celle-ci, sur les « francs-sergents », bourgeois rémois qui se mettent au service du chapitre dans son ensemble ou d’un chanoine en particulier12. Le chapitre comprend 72 membres : le nombre maximal théorique de francs-sergents est donc de 91 ; en pratique, ils sont rarement plus d’une cinquantaine. Depuis 1278, cette juridiction s’étend aux maisons des francs-sergents, exemptant de fait de la juridiction épiscopale les habitants de ces maisons et les auteurs des crimes commis dans ces maisons13. Au temporel, la justice capitulaire est rendue en « la court de Nostre Dame » par des officiers, le bailli, un laïc généralement formé en droit, au moins à la fin du Moyen Âge, et les deux chanoines sénéchaux, qui remplissent un office annuel au sein du chapitre. Les « bourgeois à chanoine », eux, dépendent directement de leur chanoine. Pierre de Laval, précédemment cité, reproche aux chanoines d’accueillir facilement, contre monnaie sonnante et trébuchante, de riches bourgeois de l’échevinage qui profitent de ce statut pour échapper à la justice archiépiscopale, réputée plus sévère14. Enfin, on peut ajouter à ces justiciables les membres des sept métiers (peintres, verriers, brodeurs, tailleurs d’images, selliers, bourreliers et chaudronniers) qui relèvent spécifiquement de la juridiction du vidame du chapitre15.
4En matière spirituelle, la juridiction de l’archevêque, représentée par deux officiaux, s’étend sur une partie encore plus grande de la ville ; seule la paroisse Saint-Michel relève de la juridiction spirituelle du chapitre, dont on ignore la manière précise dont elle était exercée. Il existe deux autres officialités, celles du grand et du petit archidiacre, mal connues – alors même que l’officialité archidiaconale a compétence sur toute la ville, comme celle de l’archevêque, ce qui met les deux cours en concurrence – d’autant qu’on appelle de la cour de l’archidiacre directement au pape et non à l’officialité archiépiscopale. Cette situation de concurrence cesse en décembre 1392, quand l’archidiacre accepte une pension annuelle (de 1 115 francs) pour compenser la fusion de sa juridiction avec celle de l’archevêque16.
5La cité de Reims offre donc un large éventail de possibilités aux justiciables qui veulent utiliser les cours selon la formule la plus profitable à leurs intérêts. Les sources disponibles, les travaux préexistants et les limites de cette communication expliquent que notre propos porte ici spécifiquement sur les juridictions de l’archevêque, temporelle exercée par l’échevinage, spirituelle exercée par l’officialité, et sur les éléments qui les rapprochent ou les distinguent radicalement. Après avoir mis en lumière d’éventuels transferts, de personnes comme de procédures, entre ces deux modalités d’expression du pouvoir de l’archevêque-duc, nous verrons que les conflits juridictionnels n’en restent pas moins nombreux dans la cité, aussi bien entre justices temporelles concurrentes qu’entre justices temporelles et justices spirituelles.
I - Des personnels communs ?
6Si, en théorie, juridiction spirituelle et juridiction temporelle sont bien distinctes, on sait combien les juristes et les praticiens du droit et de la justice sont souvent formés dans les deux droits. La coexistence dans une même ville et sous une même autorité des différentes cours de justice a-t-elle comme corollaire des liens personnels ?
7En descendant dans la hiérarchie des personnels, on constate d’étroites connexions entre ces mlieux judiciaires. Pour ce qui est des juges, la norme est qu’ils ne cumulent pas les fonctions, ni même ne passent d’une cour à l’autre. À partir du XIIIe siècle, les baillis de l’échevinage sont des laïcs, généralement de rang chevaleresque, alors que les officiaux sont des chanoines jusqu’à la fin du Moyen Âge17 : ceci exclut toute confusion des rôles. Mais, au XIIe siècle, l’office de bailli de l’archevêque était dévolu à des clercs. Même postérieurement, des clercs peuvent exercer des charges de juges au temporel. Par exemple, Baudouin de Ruffy, bailli de l’archevêque entre 1192 et 1205, est également prévôt de Notre-Dame ; Milon de Nanteuil (1207-1217) est, lui aussi, prévôt du chapitre et Me Michel de Porte-Mars (v. 1240) est chanoine de Saint-Symphorien18. Un cumul ponctuel semble possible : dans un acte de 1330, on évoque un « maître Grégoire », bailli et official de l’archevêque19. L’intermède est cependant de courte durée car on retrouve un laïc dès 1331, Me Hue de Griny20.
8S’ils n’exercent pas, sauf exception, les deux fonctions de bailli et d’official, ces juges sont-ils issus d’un milieu et d’une culture comparables ? Il faut attendre 1384 pour voir des gradués en droit s’installer définitivement dans l’office de bailli : l’archevêque Richard Picque, lui-même ancien étudiant d’Orléans, fait appel à un parent des Dormans, Me Jean la Vielle, licencié en droit civil et en droit canon21. Par la suite, les titulaires sont systématiquement des spécialistes de droit civil formés à l’Université, qui ont acquis une première expérience en droit coutumier dans des fonctions exercées à Reims ou dans les villes des environs22. Les officiaux quant à eux sont, dès l’origine, des juristes reconnus. Pour l’extrême-fin du Moyen Âge, les titulaires attestés sont gradués de l’Université en droit canonique : Gilles Grant Raoul, official en 1506, est licencié en décret. Jean l’Abbé, official en 1486, possède le même grade ; il est par ailleurs connu comme possesseur de plusieurs livres ensuite remis à la bibliothèque du chapitre, au contenu varié : Décrétales de Grégoire IX, Histoire scolastique de Pierre le Mangeur, recueil d’œuvres d’Aristote, Euclide, etc., mais aussi traité de droit romain23.
9Baillis et officiaux forment donc, tout à fait logiquement, un milieu de juristes, mais la coupure entre droit civil et droit canon semble nette. En revanche, les prévôts de l’archevêque sont issus d’un milieu très différent car la charge est affermée pour trois ans. Ce ne sont pas nécessairement des praticiens, même si ces derniers sont de plus en plus nombreux au XVe siècle24.
10Promoteurs et procureurs exercent des fonctions comparables à l’officialité et à l’échevinage, à partir du milieu du XIVe siècle. La première mention d’un procurator curie ad excessus à l’officialité date de 1329, dans l’Ordinatio de curiis remensibus25. Jean de Condé (de Condeto) est le premier identifié : il est désigné comme procurator vestre [c’est-à-dire de l’archevêque] et vestre curie remensis ad excessus, dans un texte de 1330 environ énumérant les griefs du chapitre contre l’archevêque26. Le même document évoque également un P. de Chaigny, « autrefois procureur [de l’archevêque]27 », ce qui reste ambigu. Puis, l’historien dispose de peu d’éléments pour identifier ces promoteurs. En 1389, Me Jean de Montfaucon est cité comme tel, tout comme Me Gérard Bernart, dans le rapport sur l’exécution testamentaire de l’archevêque Richard Picque28. En 1421, on rencontre Me Ponce de Montfaucon, licencié en décret29 ; en 1487 : maître Blaise Bouchet ; en 1496 : maître Jean Bourguet, licencié en lois et bachelier en décret ; en 1507 : Jean Maillefer, notaire et promoteur30.
11En cour laie, la mise en place d’un procureur d’office est un peu plus tardive, sans doute sur le modèle de l’officialité31. Jusqu’au milieu du XIVe siècle, c’est le bailli, ou son lieutenant en son absence, qui conduit la poursuite. Dans le courant des années 1350, un « procureur de l’archevêque » est institué32. Il ne semble avoir pour tâche que de se joindre à certaines demandes contre des crimes jugés attentatoires à l’honneur et à l’autorité de l’archevêque33. Ce n’est pas encore un office : la charge est exercée au cas par cas par des individus différents. Entre 1368 et 1376, le « procureur de l’archevêque » se transforme en un véritable « procureur de l’office » chargé de réclamer réparation, en se portant demandeur au nom de l’archevêque, pour tout trouble à l’ordre public jugé suffisamment grave : homicides, bris d’asseurement, mais également simples battures à sang ou conflits commerciaux mettant en jeu « le bien commun » des habitants. La demande déposée, le procureur d’office conduit toute la procédure afin d’apporter la preuve de ce qu’il avance. La charge est confiée, de ce fait, à des juristes passés par l’université : Me Renaut Cochet de 1377 à 1385 ; Me Nicaise de Tremery, futur bailli de l’archevêque, en 1387-1389 ; Me Jean Brulart, ancien procureur du roi en la prévôté de Châtillon-sur-Marne, au moins de 1428 à 1445. Certains, cependant, doivent leur office à leur expérience et non à des études juridiques : ainsi, Henri Janore (1395) est ancien sergent du bailli. Les autres titulaires sont mal connus, car ils sont simplement désignés comme « le procureur d’office »34.
12Ces quelques exemples attestent que, pour ce qu’on en sait, promoteurs et procureurs d’office sont normalement des hommes distincts. Ils sont toutefois issus du même milieu. Par exemple, Ponce et Gérard de Montfaucon, fils du promoteur Jean de Montfaucon, sont avocats et procureurs devant les cours du bailli et du prévôt et Ponce a lui-même cumulé ces fonctions avec celle de promoteur35. Dans la seconde moitié du XVe siècle, Jean Bourguet a fait une longue partie de sa carrière en baillie comme procureur et, ponctuellement, comme lieutenant du bailli, avant de devenir promoteur de l’officialité36. Certains de ces hommes connaissent donc bien la procédure en vigueur dans les deux cours.
13Les procureurs paraissent spécifiquement rattachés à l’une ou à l’autre des deux cours : nous n’en avons trouvé aucun exerçant successivement devant l’officialité et devant l’échevinage. En revanche, les avocats peuvent intervenir indifféremment dans l’une ou l’autre cour : Me Henri le Membru, également lieutenant du bailli de Vitry, Raoul Prieuse et Me Jean Maubrouet sont connus devant l’échevinage comme devant l’officialité37. Les experts sollicités par les cours sont probablement les mêmes : nous n’avons pas pu le vérifier pour Reims, mais à Châlons, le médecin Simon Albespine travaille aussi bien pour l’officialité que pour le Conseil de ville38. Enfin, et logiquement étant donné la nature de leur office, les notaires sont strictement rattachés à une cour : le règlement de l’officialité de 1266 interdit strictement qu’un notaire exerce conjointement dans plusieurs juridictions39.
14Ce monde de juristes partage indéniablement une culture commune, quelle que soit la cour d’exercice. Des alliances familiales existent entre eux et ils se côtoient dans les instances politiques urbaines40. Dans quelle mesure la coexistence a-t-elle induit des rapprochements procéduraux ?
II - Des procédures qui se rejoignent
15La proximité procédurale entre les deux cours peut tout d’abord s’observer à travers l’enquête. La procédure d’enquête pénètre Reims par l’officialité, où elle sert de modèle pour sa mise en œuvre dans la juridiction temporelle. La chronologie est difficile à cerner. L’officialité de Reims est probablement la plus ancienne du royaume de France et l’enquête y a sans doute été usitée dès la fin du XIIe siècle : il est possible que la tentative de l’archevêque Henri de France d’organiser sa justice temporelle sur le modèle de sa justice spirituelle, ce qui provoquerait la révolte des Rémois en 1166-1167, n’ait pas posé problème uniquement par le fait que l’archevêque entend se passer des échevins, mais aussi par la procédure en cour de développement41. De même, le conflit de 1234 entre l’archevêque et ses bourgeois débute peut-être à la suite d’une tentative de l’archevêque d’imposer la procédure d’enquête en cour laie. L’affaire semble se nouer autour du problème de l’usure et de la possibilité de poursuivre les usuriers ex officio devant les juridictions ecclésiastiques. Mais les bourgeois auraient réagi également aux prétentions de l’archevêque Henri de Braine à utiliser la procédure d’enquête, dans le cadre même du conflit entre les Rémois et le chapitre42. En tout cas, l’enquête est bien attestée à l’officialité au début du XIVe siècle, comme en témoigne le « praticien » de la cour43 : entre autres exemples, il est précisé que le juge peut agir d’office, en alléguant la fama ; mais celle-ci doit être suivie d’une enquête44. La preuve par témoignage est la norme, même si la preuve par serment lui coexiste et peut lui être préférée45. Trois témoins ou plus sont nécessaires46. La fama peut être invoquée comme preuve en matière matrimoniale, avec un seul témoin – c’est l’occasion pour le rédacteur du « praticien » de définir la fama : Quam famam probatam intelligo, si dicerit testis famam esse, licet non credat veram ; quia fama procedit non ex opinione hujus, sed ex eo quod communiter dicitur47.
16Si le fait est notoire, le juge peut procéder à une enquête avant toute autre étape de procédure, notamment la citation : Preterea sciendum est, quod judex volens procedere super notorio, se potest informare, et recipere testes ad informacionem suam, ante citacionem, vel ante pronunciacionem, eciam parte non vocata ad hoc. Processus iste factus fuit de consilio parisiensium, laudunensium, et remensium peritorum48.
17L’enquête est donc la norme procédurale de l’officialité. Devant les cours temporelles, son introduction est plus tardive. Elle est néanmoins utilisée dès les années 1330, dans les procès conduits d’office comme dans les procès de type accusatoire qui opposent deux parties, sans adjonction de la puissance publique à la cause de l’une d’elle. L’ouverture de l’enquête reste cependant conditionnelle à l’acceptation du suspect et le juge ne peut en aucun cas l’y contraindre49, si bien que, vers 1350, l’enquête reste encore très minoritaire par rapport à d’autres modes de preuve, l’aveu et le serment50. Cette défiance pour l’enquête vient probablement du fait qu’il s’agit d’un mode de résolution plus coûteux et plus long ; elle est également adaptée au manque d’effectifs : un nombre plus élevé de procédures d’enquêtes aboutirait à une asphyxie totale du tribunal, faute de personnel suffisant. À partir du moment où la justice temporelle de l’archevêque est dotée d’un procureur d’office et où le consentement à l’enquête n’est plus nécessaire, sa part va croissant et atteint entre 70 et 90 % des cas au début du XVe siècle51. En quelques décennies, la progression est fulgurante et les mêmes progrès peuvent être constatés quant à l’information préparatoire52. Les modalités de l’enquête sont relativement classiques, en dépit de quelques particularités53. Le nombre maximal de productions successives des témoins est de quatre, alors que le droit savant les limite à trois. Les délais entre chaque production sont généralement d’une huitaine ou d’une quinzaine, mais ils peuvent exceptionnellement s’allonger à un mois, voire à six semaines, en fonction de l’intensité des sessions judiciaires. La première production intervient après la litiscontestatio, c’est-à-dire le moment où les parties présentent leurs points de vue respectifs, dans la mesure où les témoins sont interrogés sur les articles (articuli) produits par les parties. Le nombre des témoins ne paraît pas réglementé. Cependant, pour que la preuve puisse être considérée comme pleine, la partie doit réunir au moins deux à trois témoins concordants. Exceptionnellement, un seul témoin peut être produit, en dépit de l’adage issu du droit romain en vertu duquel testis unus testis nullus. Dans ces cas très rares, les actes mentionnent explicitement que l’accusé a accepté d’être jugé sur ce seul témoignage54. Avant de témoigner, les témoins sont astreints à la prestation d’un serment qui lie l’enquête à un sacré contraignant. Le serment garantit, aux yeux de la procédure, la véracité du témoignage. Lorsque les noms des témoins produits par la partie adverse leur sont communiqués, les défendeurs peuvent en récuser certains, en émettant contre eux des reproches (reprobationes) motivés55. Le motif principal de demande de récusation est l’appartenance du témoin aux « haineux et mal volens » de l’accusé56. Ces sentiments doivent être de notoriété publique57. Pour éviter la production de reproches, il semble que les demandeurs évitent de choisir des témoins connus pour leurs relations de haine avec le défendeur58. Comme partout ailleurs, une hiérarchie des témoignages est établie en fonction du mode de connaissance sur lequel repose le savoir du témoin. Sont distingués les témoignages de visu, de auditu et de fama, la prime revenant au savoir constaté visuellement59. Le mode de connaissance n’est jamais signalé dans les registres aux causes, mais il est parfois précisé que le bailli a demandé à l’accusé s’il voulait qu’on sache la vérité « par tesmoins qui avoient esté au fait », c’est-à-dire qui ont été présents60. L’objectif du juge est d’atteindre une certitude quant à la connaissance des faits dont est porté témoignage61. Comme le serment, cette certitude est garante de vérité, à tel point que, dans les actes rémois, le terme de vérité est devenu synonyme d’enquête : « Li baillis dit que la cognoissance en appartenoit a luy, et demanda audit Thierry sé il voloit que on en sceust la verité. Et pour ce que ledit Thierris ne se volt mettre en enqueste […] »62.
18Enfin, les deux cours usent de procédures de preuves par serment que l’on peut rapprocher l’une de l’autre. La procédure de « l’escondit » est usitée devant le tribunal du bailli et du prévôt jusqu’au début du XVIe siècle63. En fonction de la gravité du délit, ce serment d’innocence est prêté par le seul accusé ou par six co-jureurs de son choix, les co-jureurs affirmant que l’homme qu’ils connaissent est incapable d’avoir commis les faits qu’on lui reproche : ils « ont dit par leur serment qu’ilz creoient qu’il [l’accusé] avoit fait bon serment »64. Cette forme de serment purgatoire est un serment de credulitate, qui marque la confiance en l’autorité morale de l’accusé : l’innocence de celui-ci est donc établie par défaut, les co-jureurs affirmant que l’homme qu’ils connaissent est incapable d’avoir commis le crime qu’on lui reproche. Les paroles prononcées et les gestes qui les accompagnent sont extrêmement ritualisés et soigneusement codifiés par la coutume65. Cette pratique offre l’avantage de débloquer la procédure quand le juge ne parvient pas à faire la preuve de la culpabilité de l’inculpé, tout en lavant celui-ci des soupçons que l’accusation a jetés sur son honneur. Caractéristique de l’accusatoire, ce serment ne s’en intègre pas moins aux nouvelles formes inquisitoires que revêt la procédure rémoise au XVe siècle66. Il peut être rapproché du serment purgatoire que les officialités ont continué d’utiliser, notamment dans les affaires relatives à la foi ou à l’exercice du ministère pastoral du clergé. L’accusé, là encore, jure lui-même qu’il est innocent de ce qui lui est reproché, et produit un nombre variable de co-jureurs dont le serment vient « valider » le sien en attestant de sa bonne renommée. Ainsi, en 1472, devant l’officialité épiscopale de Châlons-sur-Marne, une purgation « à trois mains » est demandée à sire Jean Asselin, prêtre curé de Huiron, alors qu’il est accusé d’avoir révélé des secrets de confession ; il produit cinq co-jureurs67. Souvent considéré à tort comme « archaïque », l’escondit rémois a peut-être trouvé dans la pratique de l’officialité une raison de persister jusqu’au début de l’époque moderne.
III - Des juridictions en conflit
19Au-delà de ces rapprochements caractéristiques d’une cité épiscopale, il n’en demeure pas moins que la concurrence entre juges est très forte à Reims, non seulement parce que la ville ne forme pas une juridiction unique, mais aussi parce que les statuts des habitants diffèrent.
20La concurrence sévit, en premier lieu, entre justices temporelles et justices spirituelles, ces dernières ayant pour réputation d’être moins sévères que les premières. La justice séculière de l’archevêque ne peut juger les causes impliquant des clercs, qui relèvent exclusivement de la justice d’Église, en vertu du privilegium fori68. Le principal point de friction concerne les clercs mariés, qui ont acquis ce statut au cours de leurs études. Le privilège de clergie, qu’ils conservent tout au long de leur vie, prive le bras séculier d’un nombre important de justiciables, les clercs non bénéficiés représentant probablement trois à quatre cents feux au XIVe siècle, soit un millier de personnes69. Normalement, les détenteurs de ce privilège doivent en faire la déclaration au début du procès et le juge doit automatiquement déclarer leur renvoi devant la justice ecclésiastique. Dans le registre en baillie R 140, le défendeur se déclare « clerc et non responsable » devant le bailli dans seulement onze affaires, ce qui est finalement assez peu, compte tenu du nombre d’années que couvre ce registre (1432-1465)70. Sans doute le demandeur laïc saisit-il directement l’official lorsqu’il sait que son adversaire est un clerc. Lorsqu’il y a doute sur le statut de l’accusé, le signe présomptif distinctif de la clergie, comme partout ailleurs, est principalement la tonsure mais, du fait des fraudes possibles, cet élément suffit rarement71. En 1418, Coleçon Fagot est ainsi accusé d’avoir tenté de faire parvenir des ciseaux à l’un de ses valets emprisonné afin qu’il se fasse une tonsure : « Office a proposé contre Coleçon Fagot que nagaires ung des varlés dudit Coleçon, pour certains excés et delits par lui perpetrez, fut mis en prison en Portemars par Robin de Poix, sergent du bailliage de Reins, auquel prisonnier ledit Coleçon a baillié ou s’est efforcié de tout son povoir de lui baillier forcettes, cizeaulx ou autres instrument pour faire tonsure audit prisonnier qui n’est pas clerc, en commettant fraude et usurpant le droit de justice, concluant en amende de prison, ung mois au pain et a l’eaue, et de XL £ p., ou raisons, offrant de prouver […] »72.
21Les greffiers sont attentifs à ces fausses déclarations et effectuent des recoupements dans les déclarations des accusés ou demandent aux échevins de vérifier les registres. Le 3 décembre 1455, Perrard Couillet, accusé d’avoir injurié des sergents qui poursuivaient un homme, se dit clerc, alors que « autreffois ce soit advoué bourgeois de l’eschevinaige »73.
22Les juges laïcs tentent aussi de riposter en usant d’artifices destinés à conserver certaines des affaires impliquant un clerc. En janvier 1414, le procureur d’office invoque que le statut de clerc ne peut bénéficier à un individu qui s’en est pris aux sergents du bailli, mais sa demande a peu de chance d’aboutir74. En 1344, c’est sur la date de l’ajournement que le prévôt s’appuie pour revendiquer la primauté sur l’archidiacre dans le conflit qui oppose un chanoine à un bourgeois à propos de la vente d’une robe et d’un « peliçon », prétendant s’être saisi de l’affaire le premier75.
23Non seulement la justice d’Église peut connaître ratione personae de certains criminels, mais elle peut revendiquer certaines causes ratione materiae : entrent dans cette catégorie toutes les infractions à la discipline religieuse, hérésie, sacrilège, sorcellerie, blasphème, commises par des clercs comme des laïcs, les affaires matrimoniales et l’adultère. À Reims, c’est surtout en matière de blasphème que la concurrence joue, la justice séculière prétendant poursuivre les laïcs coupables de ce délit de parole, sur le modèle de l’attitude adoptée par la justice royale depuis la fin du XIIIe siècle76.
24L’enchevêtrement des limites des quatre bans de la ville, celui de l’archevêque au nord/nord-ouest, du chapitre autour du cloître, de Saint-Remi à l’est et de Saint-Nicaise à l’angle sud-est77, suscite une importante concurrence entre détenteurs de la justice banale, même si l’archevêque est le seul à disposer de fourches patibulaires et à pouvoir justicier les criminels en cas de peine de mort78. La limite entre deux bans n’est pas toujours évidente. En 1455, le procureur de l’archevêque accuse un sergent du chapitre d’avoir réalisé un exploit sur sa juridiction : tout l’enjeu du procès est de déterminer si la portion de la chaussée qui se situe devant la fenêtre de la maison de Gilet Josnet, rue de Vesle, sur laquelle a été arrêté l’individu, est effectivement de son ressort79. En 1494, la visite d’une maison est organisée pour déterminer si elle est de la juridiction de l’archevêque ou de celle du chapitre. Le lieutenant du bailli prétend que l’entrée de la chambre et la cuisine de l’hôtel relèvent de la seigneurie de son maître, mais le représentant du chapitre conteste cette inspection car elle n’a pas été menée en sa présence80.
25Les Rémois peuvent être également tentés de se livrer à de fausses déclarations de bourgeoisie, comme Guillot de Lespée qui se déclare, dans un premier temps, bourgeois de l’archevêque, avant de se dire bourgeois du chapitre. Il est aussitôt rendu au chapitre, sur la foi de cet aveu. Mais le prévôt découvre qu’il a menti et réclame à Guillot une amende de 60 s. p. Celui-ci tente à nouveau d’esquiver en se prétendant cette fois bourgeois du vidame81 ! Pour se prémunir de tels comportements, en cas de doute, le juge peut faire emprisonner l’individu et ne le libérer que sur la promesse de ne pas se réclamer d’un autre statut : « Demande fu faite a Huet Fierens de la bature la fille la Clere, plainte faite presens eschevins. Il le nya. Lidis lieutenant li bailla jour a venredi d’amender ou escondire. Li lieutenant fit mettre la main a luy afin que il ne se transportast hors de la juridiction Monseigneur de Reins et il a promis a penre droit et faire droit en ceste court sens autre adveu d’autre bourgoisie, et pour ce est recreuz »82.
26Le statut de franc-sergent du chapitre a également été l’occasion de nombreux litiges, tant entre le chapitre et l’échevinage qu’entre le chapitre et l’officialité. Le chapitre réclame ainsi des francs-sergents cités ou arrêtés par les deux juridictions archiépiscopales. Il s’agit surtout de « bourgeois à chanoine », attachés à un chanoine particulier. Ainsi en 1325 Jean Cochelet, cité par l’official pour l’exécution testamentaire de sa femme, se déclare franc-sergent particulier du chanoine Gaucelin de Jean, auquel il est restitué. En 1302, l’excommunication de Mathieu de Boscolis est annulée à cause de son statut de « bourgeois à chanoine »83. En 1494, Jean Balan, potier d’étain, ajourné devant la cour du bailliage « pour avoir achetté du plomb a ung larron », doit être rendu à son chanoine84. Ces cas sont connus parce qu’ils ont donné lieu à des conflits entre des juridictions réclamant le même justiciable ; ils se terminent systématiquement à l’avantage du chapitre85.
27Les conflits entre juridictions sont nombreux, d’autant qu’en cas de flagrant délit le privilège juridictionnel ne joue plus : c’est au seigneur du lieu où a été commis le délit que revient alors le jugement. Mais l’information doit explicitement faire apparaître le caractère manifeste du forfait, ce qui explique des va-et-vient entre juridictions lorsque ce n’est pas le cas ou lorsque l’information n’est pas terminée au moment où l’accusé se réclame d’un autre seigneur :
28« Jehannette, femme de Sance Brunet, subgecte de chappitre, qui avoit esté prise en present delict pour la bature par elle faicte a Ysabelet, femme de Lyevin Willot, rendue ausdits de chappitre soubz informé, et depuis rendue a mondit seigneur aprés ce que l’en a informé du present delict […] »86.
29Dans les années 1370 et 1380, une affaire autrement plus grave est l’objet d’une vive polémique entre l’échevinage et Saint-Remi. En 1375, les religieux ont arrêté sur leur ban en flagrant délit d’homicide, du moins le prétendent-ils, deux bourgeois de l’échevinage, Jehan Rampart et Herbinet de Venderesse. De plein droit, ils les ont fait juger par leur bailli, qui les a condamnés à mort. Au moment où le juge s’apprête à remettre les deux condamnés au prévôt de l’archevêque pour que celui-ci exécute la sentence, une rébellion éclate pour favoriser la fuite des deux hommes. Le monastère accuse les échevins d’être à l’origine de cette « conspiration » et porte plainte au bailli de Vermandois, qui diligente une enquête sur place, au mois de novembre87. Pour contourner la plainte des religieux, les échevins ont impétré au roi une lettre de rémission en faveur d’un des deux meurtriers, mais ils n’ont manifestement pas réussi à la faire entériner88. Quinze ans plus tard, le procès ouvert par les moines devant le Parlement est toujours pendant, comme le montrent les frais de déplacement à Paris qu’il occasionne en 1385 et 139089. Le procureur du roi s’est adjoint au monastère, réclamant la suppression de l’échevinage, une amende honorable et le paiement d’une amende profitable de 10 000 £ au roi90. L’affaire, qui se conclut vraisemblablement par un accord amiable entre les deux parties, souligne à quel point l’exercice de la justice est emblématique de l’autorité seigneuriale, d’où la récurrence des conflits.
30La ville de Reims offre donc un large éventail de possibilités aux justiciables qui veulent utiliser les cours selon la formule la plus profitable à leurs intérêts. Au sein de cette mosaïque de juridictions temporelles, le tribunal que les échevins forment autour du prévôt et du bailli seigneurial se présente comme la cour la plus dynamique. Du fait du statut de pair de France de l’archevêque, l’emprise de la justice du roi a pu être en partie contenue : comme leur seigneur, ses justiciables ne sont pas tenus de plaider ailleurs que devant le roi ou au Parlement, et le bailli de Vermandois ne peut les faire citer à sa cour de Laon, hormis pour les cas royaux, dont la liste est, il est vrai, volontairement floue et extensive91. Ce privilège, conjugué aux frais élevés du séjour parisien, a certainement limité la fuite des justiciables vers des tribunaux extérieurs à la ville. Le principe de prévention peut toutefois être utilisé par les juges royaux pour justifier leur immixtion dans la cité92. Le 29 mars 1431, par exemple, le substitut du procureur du roi à Reims, Jehan Boileaue, réclame la connaissance par prévention de l’homicide de maître Joffrin de Lucheux, indiquant qu’Hilesson, sa veuve, principale accusée, a tenté de se soustraire à la justice royale, en demandant au bailli de Reims de lui ouvrir une procédure de mise en purge. Le juge royal prétend avoir ordonné qu’une information soit diligentée dès le 10 mars, avant que le bailli de l’archevêque ne soit lui-même saisi. L’affaire disparaît du registre des plaids de l’échevinage, signe que l’argument a probablement porté et que le seigneur rémois n’a pu faire jouer de clause de renvoi93. Mais, plus que la prévention, dont il est difficile d’estimer la fréquence, c’est surtout l’appel au roi qui a permis au souverain de s’immiscer dans la manière dont la justice est rendue par les seigneurs locaux94. Il n’en reste pas moins que la justice temporelle de l’archevêque demeure une justice de proximité particulièrement prisée des justiciables à la fin du XVe siècle, en particulier en prévôté, car un ralentissement d’une partie de l’activité du bailli est perceptible dans le courant du siècle95.
31La documentation manque cruellement sur l’officialité archiépiscopale. Le seul registre conservé témoigne également de l’intervention royale par le biais de l’appel au parlement de Paris. Mais les quelques exemples relevés concernent des affaires bénéficiales traitées à la cour métropolitaine en appel de décisions prises dans une officialité d’un diocèse suffragant96. Il est impossible de dire dans quelle mesure la justice ordinaire de l’officialité rémoise subit l’influence des juridictions royales – mais on sait que c’est le cas partout ailleurs au XVe siècle. Par ailleurs, intervenant dans les conflits avec le chapitre sur les francs-sergents, le Parlement contraint de fait l’officialité à annuler certaines sentences et citations : ainsi, en 1430, un long arrêt du Parlement, qui résume de fait deux siècles de conflits, exige de l’archevêque l’absolution de quatre francs-sergents excommuniés par sa cour97.
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32La justice temporelle de l’archevêque subit une double influence : la procédure ecclésiastique mais surtout, de plus en plus, le style du Parlement. Celui-ci s’impose en une trentaine d’années à la fin du XIVe siècle, contribuant à un alignement de la procédure criminelle locale sur les normes édictées par la cour souveraine : information préparatoire systématique, usage réglementé de la torture, etc. Le paysage judiciaire rémois, complexe, offre en tout cas aux justiciables diverses possibilités, dont ils savent user. Il est patent qu’à la fin du Moyen Âge, les différentes cours rémoises se pensent comme concurrentes les unes des autres – alors même qu’elles sont pour partie animées par les mêmes hommes, ou du moins par des hommes liés entre eux par le sang ou par l’alliance. Dès 1269, le rédacteur des statuts de l’officialité affirmait que les principaux ennemis de l’archevêque dans l’exercice de sa juridiction étaient le chapitre et les bourgeois ; Pierre de Laval, à la fin du XVe siècle, ne dit pas autre chose. Entre ces deux dates pourtant, c’est sans doute la juridiction royale qui a le plus réduit l’influence des uns et des autres, en profitant notamment de cet état de conflit latent ou ouvert.
Notes de bas de page
1 Reims, Archives départementales de la Marne (désormais ADM), dépôt annexe, 2 G 321 / 26.
2 La population de Reims est estimée entre 15 000 et 20 000 habitants vers 1300, et autour de 13 000 habitants en 1480. P. DESPORTES dir., Histoire de Reims, Toulouse, Privat, 1983, p. 99 et 166.
3 Ou sa réorganisation, l’échevinage préexistant à la charte willelmine ; mais il faut attendre celle-ci pour connaître sa composition et sa compétence. Sur ce point, voir notamment P. DESPORTES, Reims et les Rémois aux XIIIe-XIVe siècles, Paris, Picard, 1979, p. 73-91.
4 E. PERROT, Les cas royaux. Origine et développement de la théorie aux XIIIe et XIVe siècles, Paris, A. Rousseau, 1910.
5 P. DESPORTES, Reims et les Rémois…, op. cit., p. 183-187.
6 Voir J. BRIAND, L’information à Reims aux XIVe et XVe siècles, Thèse de doctorat dirigée par C. GAUVARD et F. COLLARD, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2012, 3 t., p. 38- 74 (à paraître aux Publications de la Sorbonne).
7 Ainsi, en 1279 et en 1316, les échevins font appel au Parlement car des bourgeois ont été torturés par les agents de l’archevêque alors que leur qualité de citoyen était parfaitement connue (P. VARIN éd., Archives administratives de la ville de Reims, Paris, 1839-1848, t. 1, p. 965-969 et t. 2, p. 182-184).
8 Ce sont les châtellenies de Sept-Saulx (c. de Verzy, arr. de Reims, au sud-est de la ville), Bétheniville (c. de Beine-Nauroy, arr. de Reims, au nord-est de la ville), Cormicy (c. de Bourgogne, arr. de Reims, au nord-ouest de la ville), Courville (c. de Fismes, arr. de Reims, à l’ouest de la ville) et Attigny (c. d’Attigny, arr. de Vouziers, à environ cinquante-cinq kilomètres au nord-est de la ville), ainsi que les prévôtés de Chaumuzy (c. de Ville-en-Tardenois, arr. de Reims, au sud-ouest de la ville) et de Nogent-Sermiers (c. de Verzy, arr. de Reims, au sud de la ville) ; un registre de 1493-1496 est en grande partie consacré à ces cas : Reims, Archives municipales et communautaires (désormais AMC), FA, R 141 (le registre est par erreur incorporé à la série des registres de l’échevinage).
9 P. DESPORTES, Reims et les Rémois…, op. cit., p. 238-248.
10 Ibid., p. 234.
11 Cartulaire A du chapitre : Reims, ADM, 2 G 1650, fol. 119v-124.
12 On parle de « sergents communs » pour les francs-sergents du chapitre ; leur nombre est limité à 19 par Guillaume aux Blanches-Mains. De plus, chaque chanoine ne peut avoir, à condition qu’il soit résident, qu’un « sergent particulier » ou « bourgeois à chanoine ». Pour une synthèse sur leur statut et leur nombre, voir P. DESPORTES, Reims et les Rémois…, op. cit., p. 223-227.
13 P. VARIN éd., Archives administratives…, op. cit., t. 1, p. 936-953.
14 Voir V. BEAULANDE-BARRAUD, « La juridiction du chapitre de Reims : un moyen de résister à la justice archiépiscopale ? », dans M. CHARAGEAT et P. PRETOU dir., Résister à la justice, dans l’Europe médiévale et moderne. Actes du colloque de Bordeaux, 12-14 décembre 2011, Paris, Klincksiek, à paraître.
15 G. ROBERT, « Le vidame de Reims et les métiers dépendants », dans Nouvelle revue de Champagne et de Brie, n° 15, 1938, p. 208-235. Pour un exemple de justiciable arguant de cette qualité pour échapper au tribunal de l’archevêque, voir Reims, AMC, FA, R 132, fol. 186, décembre 1384.
16 P. DESPORTES, Reims et les Rémois…, op. cit., p. 626. Sur l’officialité archiépiscopale, voir notamment V. BEAULANDE, « L’officialité métropolitaine de Reims d’après un ‘doctrinal’ du début du XVIe siècle », dans « La province ecclésiastique de Reims », Travaux de l’Académie nationale de Reims, vol. 178, 2008, p. 365-380, et ead., « Le traitement de la dette par l’officialité de Reims à la fin du XVe siècle », dans V. BEAULANDE-BARRAUD, J. CLAUSTRE, E. MARMURSZTEJN dir., La fabrique de la norme. Lieux et modes de production des normes au Moyen Âge et à l’époque moderne, Rennes, PUR, 2012, p. 177- 190.
17 Choisis parmi les chanoines aux débuts de l’officialité, ils sont ensuite prébendés parce que nommés officiaux par l’archevêque. P. DESPORTES, Reims et les Rémois…, op. cit., p. 317.
18 Ibid., p. 91.
19 P. VARIN éd., Archives administratives…, op. cit., t. 2, p. 617.
20 P. DESPORTES, Reims et les Rémois…, op. cit., p. 273.
21 Marié à Marguerite de Dormans, nièce des chanceliers Guillaume et Jehan de Dormans, il rentre au Parlement à partir de 1389 et y exerce les fonctions de conseiller aux requêtes du Palais, puis aux enquêtes, jusqu’à sa mort en 1399. Ibid., p. 627.
22 Pierre Toignel, bailli de l’archevêque de 1440 à 1460, a précédemment été bailli du chapitre cathédral, puis garde de la justice temporelle de Saint-Remi. Me Jehan Robertchamp cumule la fonction de bailli de Rethélois (à partir de 1398) et celle de bailli de Reims (peut-être dès 1405, de façon certaine à compter de 1408) jusqu’à sa mort en 1421. Sur ces carrières, voir J. BRIAND, L’information à Reims…, op. cit., p. 47-49.
23 Il est cité de nombreuses fois dans le seul registre de l’officialité conservé : Reims, ADM, 2 G 1768. Les manuscrits 58, 562, 697, 705 et 897 de la Bibliothèque municipale de Reims ont été sa propriété.
24 J. BRIAND, L’information à Reims…, op. cit., vol. des annexes, p. 153-154.
25 P. VARIN éd., Archives administratives…, op. cit., t. 2, p. 592.
26 Ibid., p. 618.
27 Ibid., p. 621.
28 Ibid., p. 748 et p. 758.
29 P. DESPORTES, Reims et les Rémois…, op. cit., p. 687.
30 Respectivement : Blaise Bouchet : Reims, ADM, 2 G 1768, fol. 72 ; Jean Bourguet : Reims, AMC, FA, R 141, fol. 231 (juillet 1495) et fol. 312v (février 1496), ADM, G 9/16 (avril 1496) ; Jean Maillefer : Reims, ADM, 2 G 1768, fol. 131v.
31 Sur toutes les étapes qui suivent, voir J. BRIAND, L’information à Reims…, op. cit., p. 591-592.
32 La première apparition remonte à 1360 (Reims, AMC, FA, R 127, fol. 171v) mais les registres aux causes sont perdus entre 1352 et 1360.
33 Par exemple les injures et coups donnés à des sergents du bailli ou du prévôt dans l’exercice de leurs fonctions ou un bris d’asseurement. Dans les autres affaires, les plus nombreuses, c’est le bailli qui continue à prendre en charge la poursuite contre les délinquants présumés.
34 Les procureurs d’office du tribunal temporel de l’archevêque comme les promoteurs de l’officialité sont de manière générale peu cités nommément dans les sources, mais désignés par leur fonction : nous citons ici ceux qui sont clairement identifiés, ce qui n’est pas la norme.
35 Ce cumul semble une exception. Sur la famille Montfaucon, voir P. DESPORTES, Reims et les Rémois…, op. cit., p. 687.
36 Reims, ADM, G 9/16 ; AMC, FA, R 141, fol. 231. Les liens entre les hommes de l’officialité et ceux de la cour laie sont attestés également par le fait que Jean de Montfaucon, promoteur, est désigné comme héritier du bailli Pierre de Clarisel ; V. VARIN éd., Archives administratives…, op. cit., t. 2, p. 758.
37 Devant l’officialité : Reims, ADM, 2 G 1768, par exemple fol. 22 pour le Membru et Prieuse, fol. 38 pour Maubrouet. En cour laie : Reims, AMC, FA, R 140, fol. 147v pour le Membru et Prieuse et R 141, fol. 50 pour Me Jean Maubrouet, ici cité comme procureur en cour laie.
38 S. GUILBERT, « À Châlons-sur-Marne au XVe siècle : un conseil municipal face aux épidémies », Annales. Économie, Sociétés, Civilisations, t. 23/6, nov-déc. 1968, p. 1292.
39 P. VARIN éd., Archives législatives de la ville de Reims, 1ère partie : Coutumes, Paris, 1840, p. 16.
40 J. BRIAND, L’information à Reims…, op. cit., en part. p. 381et s.
41 Sur cette hypothèse, voir P. DESPORTES, Reims et les Rémois…, op. cit., p. 83-85.
42 Voir V. BEAULANDE, « La force de la censure : l’excommunication dans les conflits de pouvoir au sein des villes », Revue Historique, n° 646, 2008, p. 251-278, et P. DESPORTES, Reims et les Rémois…, op. cit., p. 156-166.
43 Le practicus de l’officialité de Reims date de 1320-1325, contrairement à ce qu’estimait P. Varin qui le suppose antérieur à 1290. Si c’est la source principale pour connaître la procédure utilisée à l’officialité, il est clair que la pratique de l’enquête lui est très antérieure, dès les années 1200 sans doute.
44 […] In negocio inquisitionis, debet fama precedere inquisitionem ; nec sufficit famam esse tempore quo inquiritur […] (V. VARIN éd., Archives législatives…, op. cit., p. 154).
45 Ibid., p. 36-37.
46 Ibid., p. 36.
47 Ibid., p. 181-182. Sur la fama, voir notamment C. GAUVARD, « La fama, une parole fondatrice », Médiévales, n° 24, 1993, p. 5-13 et J. THERY, « Fama : l’opinion publique comme preuve judiciaire. Aperçu sur la révolution médiévale de l’inquisitoire (XIIe-XIVe siècle) », dans B. LEMESLE dir., La preuve en justice de l’Antiquité à nos jours, Rennes, PUR, 2003, p. 119-147.
48 V. VARIN éd., Archives législatives…, op. cit., p. 292. On notera la référence aux « experts » parisiens, laonnois et rémois, signe que cette enquête antérieure à la citation a été sujet de discussion.
49 Pour rendre compte de l’acceptation du suspect, les scribes relatent que la personne « s’est mise en enqueste », sous-entendu de son plein gré (Reims, AMC, FA, R 122, fol. 4, 26 mars 1333) ; plus explicitement, ils peuvent indiquer qu’elle a donné son accord pour être jugée par enquête (ibid., R 124, fol. 8, 5 juin 1348).
50 Un sondage effectué pour l’année 1348 donne moins d’un cas sur trois. Pour des exemples détaillés, voir J. BRIAND, L’information à Reims…, op. cit., p. 601-604.
51 Ibid., p. 604.
52 J. BRIAND, « Se avant toutes œuvres information preparatoire n’est faicte. Le contrôle de l’information préparatoire à Reims à la fin du XIVe siècle », dans A. DESTEMBERG, Y. POTIN et E. ROSENBLIEH dir., Rendre justice. Journées d’étude en l’honneur de Claude Gauvard par ses élèves (Paris, 26-27 mars 2010), Paris, Publications de la Sorbonne, à paraître.
53 Pour une comparaison avec les prescriptions de la littérature juridique savante, voir Y. MAUSEN, Veritatis adjutor. La procédure du témoignage dans le droit savant et la pratique française (XIIe-XIVe siècles), Milan, A. Giuffrè, 2006.
54 Reims, AMC, FA, R 123, fol. 130v, 6 août 1344.
55 B. SCHNAPPER, « Testes inhabiles, les témoins reprochables dans l’ancien droit pénal », Revue d’histoire du droit, 33, 1965, p. 575-616.
56 Par exemple : Reims, AMC, FA, R 137, fol. 22, 20 juin 1392. Sur la place de la haine dans la procédure locale, voir J. BRIAND, « Haine et haineux devant la justice rémoise à la fin du Moyen Âge », dans M. DELEPLACE dir., Les discours de la haine. Récits et figures de la passion dans la Cité, Actes du colloque international de Reims (26-28 septembre 2007), Villeneuve d’Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 2009, p. 125-138.
57 D. L. SMAIL, « Hatred as a Social Institution in Late Medieval Society », Speculum, 76, 2001, p. 90-126.
58 Par exemple, dans le registre R 137 (Reims, AMC, FA), qui couvre un peu plus d’une année (1391-1392), on dénombre seulement cinq cas de formulation de reproches en prévôté et deux en bailliage.
59 J.-P. LEVY, La hiérarchie des preuves dans le droit savant du Moyen Âge depuis la renaissance du droit romain jusqu’à la fin du XIVe siècle, Paris, Sirey, 1939.
60 Reims, AMC, FA, R 123, fol. 153, 15 septembre 1344.
61 Jacques d’Ableiges écrit ainsi, à propos du témoin : « s’il ne rend bonne cause et bonne raison par quoy il appert qu’il sache ce qu’il dit ». Pour déterminer la source du savoir, le juge doit lui demander « si est ce par ouyr, par veoir, par creance » (Jacques d’ABLEIGES, Le grand coutumier de France, éd. E. LABOULAYE et R. DARESTE, Paris, 1868, p. 601-602). Voir aussi, à ce sujet, Jean BOUTILLIER, Le Grand coutumier et practique du droict civil et canon observé en France… cy-devant umprimé soubs le nom de la Somme rural, éd. Charondas le Caron L., Paris, 1621, p. 626-627.
62 Reims, AMC, FA, R 123, fol. 31v, 20 février 1344.
63 Alors que cette conception de la preuve est progressivement remise en question à partir du XIIIe siècle dans le reste du royaume.
64 Reims, AMC, FA, R 139, fol. 172, 27 novembre 1415.
65 V. VARIN éd., Archives législatives…, op. cit., p. 634-635.
66 Il faut se garder d’opposer un mode de preuve considéré à tort comme rationnel face à un autre qui ne le serait pas, dans la mesure où le serment et la renommée jouent un rôle majeur dans la procédure d’enquête comme dans celle de l’escondit. Plus rapide et moins coûteux, l’escondit offre encore une solution prisée par les justiciables, même si des doutes se font jour. À la fin du XVe siècle, les habitants n’acceptent plus forcément le serment purgatoire comme une preuve suffisante. Ainsi, le 13 juin 1496, Simon Popehan, ancien prévôt de l’archevêque dans les années 1480, entame une procédure d’appel contre la décision de l’actuel prévôt de lui imposer la prestation d’un escondit plutôt qu’une enquête (Reims, AMC, FA, R 141, fol. 372-372v).
67 Châlons-en-Champagne, ADM, G 921, fol. 33v. Malheureusement, le seul registre conservé pour l’officialité de Reims ne donne pas d’exemple de ce type ; il concerne très majoritairement des affaires de dettes, pour lesquelles la preuve par serment du défendeur est la norme.
68 R. GENESTAL, Le privilegium fori en France du décret de Gratien à la fin du XIVe siècle, 2 vol., Paris, E. Leroux, 1921-1924.
69 P. DESPORTES, Reims et les Rémois…, op. cit., p. 321.
70 Reims, AMC, FA, R 140.
71 Ibid., R 124, fol. 41. Sur les signes distinctifs du statut de clerc devant le Parlement, voir L. de CARBONNIERES, La procédure devant la chambre criminelle du Parlement de Paris au XIVe siècle, Paris, H. Champion, 2004, p. 301-409, not. p. 329-333.
72 Reims, AMC, FA, R 139, fol. 111, 11 mai 1418.
73 Ibid., R 140, fol. 119.
74 Ibid., R 139, fol. 178, 31 janvier 1414 : « Par le procureur d’office a esté proposé contre Jaquet Balouart que nagaires ledit Jaquet s’est efforciez et ingerez de rescourre des mains de justice, des mains des sergens du bailliage de Reins, maistre Jehan de Bouzies, lequel estoit prins pour certain gros delict, en disant que sé ledit maistre Jehan le vouloit croire, il n’entreroit ja en prison ; concluant en amende de LX £ ou autre amende arbitrelle, offrant de prouver. Par ledit Jaquet fut dit qu’il est clerc et par ce non responsable par devant ledit bailli et eschevins et doit estre renvoyez a son ordinaire, c’est assavoir en la court de l’Eglise, et de ce se rapporte au jugement des eschevins. Par ledit procureur d’office fut proposé au contraire que ledit Jaquet en ce faisant a contemp Ibid., né la justice temporelle et par ce en ce cas responsable, et sur tout droit a VIIIe ».
75 Ibid., R 123, fol. 56-56v.
76 Plusieurs procès successifs opposent à ce sujet l’archevêque aux échevins devant le Parlement : allusions dans Reims, AMC, FA, R 123 (1344), fol. 24, 31v et 91v ; R 124 (1349), fol. 135v-136 et 174-174v ; même chose en 1385 (V. VARIN éd., Archives administratives…, op. cit., t. 3, p. 637) et en 1401 (ibid., p. 638-647). On trouve pourtant encore quatre cas de poursuite pour blasphème devant les échevins entre 1454 et 1459 (Reims, AMC, FA, R 140, fol. 113v, 119, 129v et 132). Pour une évolution de l’attitude de la justice royale vis-à-vis de ce crime, voir C. LEVELEUX, La parole interdite. Le blasphème dans la France médiévale (XIIIe-XVe siècles) : du péché au crime, Paris, De Boccard, 2002.
77 À ce propos, voir supra.
78 P. VARIN éd., Archives législatives…, op. cit., p. 811-812. La remise des condamnés à mort du ban Saint-Remi à l’archevêque est l’objet d’un rituel très précis : C. GAUVARD, « Mémoire du crime, mémoire des peines. Justice et acculturation pénale en France à la fin du Moyen Âge », dans F. AUTRAND, C. GAUVARD et J.-M. MOEGLIN éd., Saint-Denis et la royauté. Études offertes à Bernard Guenée, Paris, Publications de la Sorbonne, 1999, p. 691- 710, ici p. 700-708. Le gibet de l’archevêque est situé dans la banlieue, au nord-est de la ville, à proximité de la route de Bétheny (P. DESPORTES, Reims et les Rémois…, op. cit., n. 191, p. 92).
79 Reims, AMC, FA, R 140, fol. 120v, 17 mars 1455. Une inspection est organisée sur place le 22 mars. Le 20 octobre, le chapitre accepte finalement que l’exploit litigieux soit mis au néant (fol. 122v-123).
80 Ibid., R 140, fol. 112-112v.
81 Ibid., R 122, fol. 58.
82 Ibid., R 123, fol. 17 : il s’agit ici sans doute d’un bourgeois de Saint-Nicaise (fol. 19v). Pour un exemple de conflit de juridiction entre l’archevêque et l’abbé de Saint-Nicaise, voir ibid., R 149, fol. 22, août 1470.
83 Reims, ADM, 2 G 1650, fol. 214 et fol. 345. Un grand nombre d’actes sur ces questions est copié dans le cartulaire du chapitre, signe de l’importance réelle et symbolique de ces conflits.
84 Reims, AMC, FA, R141, fol. 142.
85 Sur ces conflits spécifiques entre juridictions autour du statut de franc-sergent, voir notamment V. BEAULANDE-BARRAUD, « La juridiction du chapitre de Reims… », loc. cit.
86 Reims, AMC, FA, R 141, fol. 108, samedi 19 juillet 1494. Même type de conflit entre l’abbé de Saint-Remi et les officiers de l’archevêque en 1337 : Jacques des Mainieux, bourgeois de Saint-Remi, a été arrêté en flagrant délit par l’un des sergents du bailli, mais il s’est enfui en portant la main sur le sergent. Le bailli de l’archevêque diligente une enquête visant à établir la réalité du flagrant délit. Au vu de celle-ci, l’abbé se déclare « bien informé » des circonstances et rend le fuyard à la justice de l’archevêque (V. VARIN éd., Archives administratives…, op. cit., t. 2, p. 784-786).
87 Reims, AMC, FA, R 155, compte du greffe de l’échevinage février 1376-février 1377, fol. 4v. Sur les mouvements de foule auxquels peuvent donner lieu les exécutions, voir C. GAUVARD, « Pendre et dépendre à la fin du Moyen Âge : les exigences d’un rituel judiciaire », rééd. dans Violence et ordre public au Moyen Âge, Paris, Picard, 2005, 66-78.
88 En sus de celui des amis charnels de la victime, l’accord du juge de première instance est indispensable pour procéder à l’entérinement : C. GAUVARD, « Le roi de France et les villes : à propos de la justice pénale », dans La gobernanza de la ciudad europea en la Edad Media, J. A. SOLORZANO TELECHEA et B. ARIZAGA BOLUMBURU dir., Logroño, Instituto de Estudios Riojanos, 2011, p. 21-46, ici p. 41. Ces démarches sont évoquées dans les comptes : Reims, AMC, FA, R 155, compte du greffe de l’échevinage février 1376-février 1377, fol. 3, 3v, 5 et 5v.
89 Ibid., R 156, compte du greffe de l’échevinage février-novembre 1385, fol. 3, 3v et 9 ; ibid., compte du greffe de l’échevinage 1390-1391, fol. 4v.
90 V. VARIN éd., Archives administratives…, op. cit., t. 3, p. 889-894, d’après un rôle récapitulatif des causes de l’échevinage pendantes au Parlement entre 1388 et 1399.
91 E. PERROT, Les cas royaux…, op. cit.
92 À ce sujet, voir J. RIOLLOT, Le droit de prévention des juges royaux sur les juges seigneuriaux. Origines et développement de ce droit dans l’ancienne France en matière purement judiciaire, Paris, Rousseau, 1931. Un lieutenant du bailli de Vermandois et un procureur du roi ne se sont installés à Reims qu’à partir des années 1410-1420, à la faveur de la guerre civile : P. DESPORTES, Reims et les Rémois…, op. cit., p. 629-631 et 655-657.
93 Reims, AMC, FA, R 139, fol. 27v.
94 C. GAUVARD, « Le roi de France et les villes… », art. cité.
95 D’un plaid du bailli tous les six jours au début des années 1330, on passe à un plaid tous les quinze jours à la fin du XIVe siècle et à un plaid tous les deux mois entre 1430 et 1460. Voir J. BRIAND, L’information à Reims…, op. cit., p. 51-62.
96 Par exemple Reims ADM, 2 G 1568, fol. 91-91v et fol. 121 : dans les deux cas, il s’agit de contestations d’une élection abbatiale.
97 V. VARIN, Archives législatives de la ville de Reims, t. 2, Statuts, Paris, 1844, p. 340-363. La citation donnée en introduction de cet article provient d’un long texte rédigé à la demande de l’archevêque pour étayer sa défense au Parlement dans un conflit de ce type.
Auteurs
Université de Reims
Université Paris Panthéon Sorbonne
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