Les registres judiciaires de l’évêque de Pistoia (1287-1301)
Esquisse d’une enquête sur les procédures ecclésiastiques dans l’Italie du due et du trecento
p. 57-68
Texte intégral
1Si quelques enquêtes ont établi qu’en France et en Angleterre, des tribunaux épiscopaux avaient été institués à la charnière du XIIe et du XIIIe siècle – on pense à l’étude pionnière de Paul Fournier sur les officialités parue en 18801, suivie, depuis les années 1970, par des travaux français et britanniques2–, il y a un vide historiographique relatif qui invite à s’interroger sur leur existence et sur leurs évolutions dans l’Italie centro-septentrionale du XIIIe siècle3, quoique la quête d’une documentation judiciaire ecclésiastique aussi précoce puisse paraître désespérée4. Fort heureusement, quatre registres du tribunal épiscopal de Pistoia, conservés à l’Archivio di Stato à Florence5 et à peine explorés si l’on excepte les articles d’Armando Sapori, Giuliano Pinto et Giampaolo Francesconi6, nous ouvrent de nouveaux horizons dans l’appréhension des justices médiévales et, plus spécifiquement, des procédures en vigueur à la fin du Duecento7.
2Ce formidable dossier documentaire couvre en effet les années 1287-1301, même si les causes et les procès qu’il contient ne sont pas toujours complets ; des feuillets, en outre, sont manquants et d’autres, au contraire, ont été ajoutés. Le litige, par exemple, qui, en 1299, oppose l’évêque Andrea di Firenze et le couvent de San Miniato aux moniales de Monticello, s’interrompt brutalement, au terme d’une centaine de feuillets sur lesquels ont été couchées les dépositions de témoins8. On en déduit que les quelques neuf cents folios que comptent en tout ces registres n’ont été assemblés qu’ultérieurement en quatre volumes distincts. S’il faut rappeler l’importance croissante, à cette époque, de la mise par écrit des procès et la conservation de plus en plus systématique des pièces qui en rythment le déroulement, y compris dans les affaires criminelles bénignes, nous ne connaissons pas encore la date ni les raisons conjoncturelles de la constitution de ces recueils, peut-être liée à la tutelle florentine de 1305 ou à celle qui suit l’intermède lucquois, en 1328.
3Les causes et les procès que les quatre volumes contiennent ont en tout cas été jugés par Tommaso Andrei, évêque de Pistoia de 1285 à 1303, dont on sait à vrai dire peu de choses9, et par Arnoldo, recteur de la paroisse suburbaine de Sant’Andrea di Pistoia et « vicaire général » de l’évêque (vicarius generalis) entre 1287 et 130310. Également archidiacre de l’église collégiale de San Zenone11, Arnoldo est censé représenter l’évêque au tribunal lorsque celui-ci est absent12. Bien que l’autonomisation de la Commune dans les années 1130-1140, puis l’avènement du Popolo dans les années 1280, aient vraisemblablement affaibli son pouvoir de gestion de la population – on compte environ 11 000 à 15 000 habitants au tournant du siècle –, l’évêque n’en conserve pas moins un rôle de juge, au civil comme au pénal, en cette fin de XIIIe siècle où les Guelfes noirs et blancs de la ville s’affrontent vigoureusement. En 1296 toutefois, les statuts de la Commune limitent l’action judiciaire de l’évêque au clergé et semblent laisser libre cours à l’ingérence de la Commune dans les matières ecclésiastiques13. L’une des pistes de recherche qu’ouvre donc ce dossier documentaire et que nous tâcherons d’explorer à l’avenir est celle de l’efficience des limites statutaires opposées à la juridiction de l’évêque.
4Chacun des quatre volumes à l’étude comprend des actes d’accusation, de dénonciation ou de citation, des dépositions des témoins, des preuves collectées par l’évêque, des allégations des parties et, parfois même, des sentences – dans une proportion qui ne pourra être établie qu’ultérieurement, à partir d’une vue synoptique des affaires enregistrées par le notaire de l’évêque. La dispute bénéficiale, par exemple, qui oppose le chanoine Tancrède à un certain Rusticcio, recteur de la paroisse de Bonostallo sise dans le district de Carmignano, est finalement tranchée par l’évêque en faveur du second14. Outre ce type de litiges jugés au civil, les registres conservent essentiellement des causes matrimoniales, ainsi que des procès dans lesquels comparaissent des ecclésiastiques pour les crimes qu’ils sont soupçonnés d’avoir commis (comme la fornication ou le concubinage) ou bien dans lesquels sont jugées les pratiques usuraires. Si ces cas sont révélateurs d’une justice épiscopale s’exerçant ratione personae (compétence « à raison de la personne » ou « personnelle », délimitée par l’état de l’accusé ou du diffamé) et ratione materiae (compétence « à raison de la matière » ou « d’attribution », définie par l’objet du litige ou du procès), il semble plus difficile de repérer les affaires jugées ratione loci (en vertu d’une compétence « territoriale »), puisqu’à la fin du XIIIe siècle, l’évêque de Pistoia ne possède plus guère que le modeste fief de Sambuca15.
5Pour clore cette vue générale sur nos quatre registres, soulignons que les cas criminels qu’ils contiennent – et qu’il convient évidemment de distinguer des causes civiles – illustrent parfaitement l’usage qui, en cette fin de Duecento, pouvait être fait des procédures accusatoire et inquisitoire, sans que l’on puisse toujours discerner l’une de l’autre. Ils nous font ainsi réviser la séparation parfois trop nette forgée par les historiens du droit entre accusatio, denunciatio et inquisitio, et ne sont pas sans faire écho à l’utilisation conjointe de ces modes procéduraux par les justices communales du XIIIe siècle16. Les affaires pénales de l’évêque de Pistoia nous donnent en effet à voir la survivance d’éléments accusatoires et la combinaison de l’enquête judiciaire et de la dénonciation. Un procès criminel daté de 1290 illustre assez cette ambiguïté.
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6Si le procès intenté au prêtre Iacopo, recteur de l’église Santa Maria di Fagno, accusé de fornication, d’adultère et d’homicide17, constitue l’exemple typique d’une justice criminelle épiscopale qui s’exerce ratione personae, en vertu du privilegium fori dont jouit Iacopo18, le tribunal de l’évêque de Pistoia est aussi compétent parce que la paroisse rurale de Fagno, située à huit kilomètres environ de la cité, appartient à son territoire diocésain.
7Tout commence le 15 mai 1290, lorsque le prêtre Rustichello porte à la connaissance du vicaire Arnoldo un certain nombre de « dénonciations » (denunciationes) à l’encontre de Iacopo19. 1. Celui-ci est un fornicateur public (fornicator publicus) ; il commet des adultères « de jour et de nuit ». 2. Il tient publiquement (publice) une amante nommée Gina, et aurait même d’elle un enfant. 3. Il a violenté sa propre mère, laquelle est morte des suites de ses blessures. 4. Pour tous ces crimes (sceleribus), publics et notoires (notoria et publica), Iacopo est réputé infâme (infamatus)20.
8C’est sur le fondement de ces « dénonciations » que le vicaire épiscopal décide d’« enquêter » (inquirere) et de procéder « autant d’office (ex officio suo) qu’à l’instance du promoteur (prosequentis) »21, ce qui peut sembler paradoxal si l’on se souvient qu’en droit canonique, l’action « d’office » exclut théoriquement la dénonciation d’un crime ou d’une personne par un « promoteur »22. De ce promoteur, équivalent, si l’on veut, de notre procureur actuel, Paul Fournier ne date l’apparition dans les officialités françaises que du XIVe siècle, mais on le voit fréquemment intervenir dans les procès canoniques intentés aux prélats au XIIIe siècle et la doctrine canonique le mentionne dès les années 121023. Dès les origines de la procédure inquisitoire instituée par Innocent III (1198-1216) pour faciliter la poursuite judiciaire des prélats corrompus, mais aussi du clergé scandaleux, la dénonciation par un tiers fut considérée comme l’une des formes d’accusatio pouvant introduire le procès, puisqu’elle était porteuse de diffamatio et que cette diffamatio – autrement dit l’établissement de l’infamie de l’accusé (infamia) – était une condition nécessaire de l’inquisitio veritatis24. Les ordines judiciarii, les sommes et commentaires juridiques de la seconde moitié du XIIIe siècle – que l’on pense à l’Apparatus d’Innocent IV (1243-1254) rédigé vers 1251, à la Summa aurea d’Henri de Suze composée dans les mêmes années, ou au Speculum juris de Guillaume Durant écrit, dans sa première version, vers 1271, et bien connu des praticiens du droit italiens de la fin du XIIIe siècle – reconnaissent ensuite l’équivalence logique entre diffamatio et denunciatio « judiciaire » et contribuent à combiner, pour ne pas dire adosser l’inquisitio à la denunciatio25. On peut donc faire l’hypothèse que l’action dite « d’office » prend ici le relais d’un dénonciateur-promoteur qui n’a rien d’officiel, dans l’enquête sur la fama de l’accusé.
9Cela étant, la terminologie dont use ensuite Jacobus, notre notaire d’évêque, au sujet de la constitution et des dépositions de témoins semble à nouveau brouiller les frontières procédurales entre accusatoire, inquisitoire et dénonciatoire. Le 19 mai, Rustichello et Iacopo présentent leurs dix-huit témoins respectifs26 – les interrogatoires n’auront lieu que quatre mois plus tard27, et, faute d’attestations documentaires, nous ne savons pas si, dans cet intervalle, une enquête préliminaire a été menée par le juge. Or, la possibilité, pour l’accusé, d’établir lui-même la liste de ses témoins correspond plutôt au mode accusatoire, puisque le juge agissant d’office convoque à son gré les témoins. Il est toutefois admis, depuis Honorius III (1216- 1227), que la procédure inquisitoire laisse à l’accusé le droit de produire des témoins « réprobatoires » contre les témoins produits à charge, en l’occurrence par le dénonciateur28. Le 2 septembre 1290, le juge entend donc d’abord les témoins de Iacopo, qui dit vouloir prouver ainsi (probare) qu’il n’est pas « infâme » et qu’il est, au contraire, de bonne « réputation » (fama)29. De nouveau, cette posture active et revendicative de l’accusé dans le cadre d’une procédure d’enquête ne doit pas surprendre, puisque la décrétale Qualiter et quando du 29 janvier 1206 instituant ladite procédure donnait explicitement au reus « le droit de se défendre lui-même »30 et tous les ordines judiciarii, de Tancrède à Guillaume Durant, affirment que le reus peut, pour se défendre, contester son infamia (sauf, selon certains canonistes, en cas de procédure ex officio… )31 – auquel cas le juge est tenu d’écouter les témoins de la défense, sous peine, sinon, de nullité du procès32.
10C’est ainsi sous serment et en présence des parties que les témoins de la défense, pour la plupart suffragants de Celle, vont tenter de discréditer les suffragants de Fagno et de fragiliser les dénonciations portées à l’encontre de Iacopo, en en dévoilant les obscurs motifs et les intérêts masqués. Comme l’indiquent la répétitivité, mais aussi la concordance, de leurs dépositions, ils se conforment à un questionnaire préétabli par le juge, dont la conception univoque de la vérité ne laisse guère de place à de possibles contradictions. La bonne fama de l’accusé est en effet unaniment proclamée, tous doivent préciser qu’ils ne sont ni « ennemis » ni « parents » de l’accusé (qu’ils sont donc capables et ne sauraient être réprouvés), et selon la moitié d’entre eux, les habitants de Fagno ne haïssent Iacopo et n’osent le diffamer que parce qu’il exige d’eux certaines redevances, en vertu d’un droit féodal de patronage33. Les témoins de la défense, donc, ne se prononcent pas sur l’innocence ou la culpabilité de l’accusé, mais sur sa fama uniquement, et déposent dans le but de réprouver les témoins à charge produits par le dénonciateur.
11Le même jour, les témoins de Rustichello comparaissent à leur tour et sont interrogés par le vicaire de l’évêque sur les quatre « articuli » de l’« intentio », qui correspondent certes aux chefs d’accusation, mais qui, à ce stade de la procédure, se transforment en questions34. Manifestement interchangeables, les verbes « denunciare » et « accusare » caractérisent conjointement les réponses des témoins à charge35. Ces derniers, cependant, n’accusent pas directement Iacopo des crimes qui lui sont imputés par le dénonciateur, puisqu’ils sont questionnés sur l’infamie et la réputation de l’accusé, ainsi que sur ce qu’ils entendent par fama publica. Parmi les dépositions des dix-huit témoins, voici un extrait des réponses d’un dénommé Raniero Adalceti (Raynuccius Adalceti) – passé, faut-il le rappeler, au tamis du latin d’un officier de justice sans doute rompu aux techniques de l’interrogatoire :
12« Interrogé sur le quatrième article de la susdite intention qui est : ‘dans quelle mesure ledit prêtre Iacopo est publiquement infamé (infamatus) de chacune des choses susdites qui lui sont reprochées’, il a répondu et dit que les choses contenues dans cet article sont vraies. Interrogé sur la manière dont il le sait, il a répondu que ces choses sont publiquement et communément dites par les hommes et les femmes de la terre de Fagno et que toutes les choses susdites relèvent, sur la terre de Fagno, de la voix publique et de la renommée. Interrogé sur le nombre d’hommes qui font cette renommée publique, il a répondu que la totalité des hommes de ladite commune de Fagno font la renommée publique. Interrogé sur ce qu’on appelle voix publique et renommée, il a répondu qu’il s’agit de ce qui est dit publiquement par des hommes ou d’autres personnes. On lui a demandé s’il haïssait ou s’il aimait ledit prêtre Iacopo, il a répondu que non ; s’il avait des liens de parenté avec Rustichello, il a répondu que non ; s’il avait témoigné par haine, imprécation, excès de charité ou amour, il a répondu que non. »36
13Par cette série de questions obsessionnelles, réitérées lors de chaque témoignage, et qui portent bel et bien sur la source de ce dernier, le juge – comme l’a montré à maintes reprises Julien Théry depuis ses recherches sur le procès intenté par la papauté, en 1307, à l’évêque d’Albi Bernard de Castanet – érige la fama en un moyen de connaissance et un support de véridiction37, même dans les procès criminels d’une faible ampleur.
14Après que les témoins ont été interrogés et que leurs dépositions ont été enregistrées, un juge nommé Bascherius, dont ne nous ne connaissons pas la provenance géographique, intervient à la demande des deux parties. Convoqué le jeudi 23 novembre 1290 par le vicaire de l’évêque, Bascherius, lui non plus, ne doit pas se prononcer sur les faits, mais uniquement sur la fama de l’accusé (« Iacopo est-il infamé des faits allégués par Rustichello ? » et « est-il de bonne fama ? »), ainsi que sur une question de procédure (« Doit-on procéder plus avant dans cette cause ? »)38. Les deux parties ont alors huit jours pour présenter leurs « allégations » (id est leurs accusations et leurs affirmations) au juge Bascherius. Le 23 décembre seulement, Arnoldo fait savoir qu’il publiera le conseil dudit Bascherius après l’Epiphanie. Enfin, le 8 janvier 1291, le consilium est lu publiquement, devant les parties. S’appuyant sur les dénonciations, la confessio de l’accusé, les témoignages et les allégations39, Bascherius estime que le prêtre Iacopo n’est pas infamé du meurtre de sa mère, mais que le juge peut en revanche enquêter sur la vérité des autres charges, à propos desquelles l’infamie a été établie40. Le vicaire épiscopal proclame, par sentence « interlocutoire », qu’il se conformera à cet avis et ne poursuivra pas Iacopo pour le meurtre de sa mère. Malheureusement, nous ne disposons, pour cette affaire, ni de l’enquête « de vérité » sur les crimes, qui a sans doute suivi cette première et longue phase centrée sur l’infamie du reus, ni, par conséquent, de la sentence « définitoire » du procès qui aura décidé du sort de Iacopo.
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15Contenant la copie d’autres consilia demandés aux légistes de Pistoia, les registres nous offrent la possibilité de saisir in medias res l’expertise juridique sollicitée par le juge ou par les parties, et par là même de nuancer les conclusions d’une historiographie fondée sur les recueils de consultations établis ex post41. Cette littérature des consilia, qui connaît son âge d’or durant la première moitié du XIVe siècle, a déjà fait l’objet de nombreuses études, tout particulièrement en Italie, terreau propice à cette forme d’expertise étroitement articulée à l’enseignement universitaire du droit42. Or, comme le souligne Corinne Leveleux-Teixeira dans un article récent, de tels recueils « induisent un gauchissement sensible du réel, puisqu’ils ont souvent entraîné la disparition ou l’altération des références précises aux affaires qui leur ont donné naissance » et « qu’ils ne concernent pas le tout-venant du contentieux, mais les cas les plus épineux, ceux que la complexité de leur structure ou la confusion de leurs circonstances qualifie pour une demande d’avis »43. Si le consilium s’articule toujours à la décision du juge, qu’il est supposé éclairer, s’il est sans doute aussi un moyen d’« apprivoiser et d’infléchir la norme »44, il nous faudra veiller à l’avenir à ne pas surestimer son efficacité, d’autant que l’expert, rappelons-le, ne dessaisit jamais le juge de l’affaire – il n’a qu’une fonction transitoire et n’a aucune juridiction propre –, ni n’a vocation, au contraire du procureur, à se substituer à l’accusé ou au dénonciateur.
16Outre la contribution à l’histoire de l’expertise juridique à laquelle nous invitent ces registres pistoiesi, ils nous permettent plus largement – sous réserve, bien entendu, d’une enquête approfondie et exhaustive – de réviser l’histoire des procédures ecclésiastiques en usage à la fin du XIIIe siècle et de mieux circonscrire le « for » d’un évêque parmi d’autres, en ne partant plus seulement des délimitations ratione materiae ou ratione personae, un peu figées à vrai dire, mais en s’attachant plutôt à l’articulation de ce for épiscopal aux autres juridictions : celle du pape bien sûr – dont on trouve plusieurs lettres dans les registres, puisque le Siège apostolique délègue l’évêque de Pistoia comme juge de certaines causes florentines, lucquoises ou pisanes et lui renvoie parfois celles qui lui ont été soumises en appel45– celle des abbés également, mais aussi celle des justices séculières, en particulier communales, lorsque des laïcs sont en cause, ou dans des cas d’usure par exemple.
17L’enjeu n’est d’ailleurs pas que de procédure, si l’on veut bien songer que les traces de concurrences juridictionnelles contenues dans ces registres nous indiquent aussi le rôle que jouait l’évêque de Pistoia dans le gouvernement de la cité – on sait la place démesurée que certains évêques ont pu occuper dans le Midi de la France à la fin du XIIIe siècle. Sans doute loin de la « théocratie épiscopale » albigeoise d’un Bernard de Castanet46, et bien que nos registres et nos procès ne soient pas aussi touffus que ceux de l’Inquisition, on peut s’y appuyer pour conduire une histoire sociale de Pistoia et de son contado, une histoire de la vie des familles et des communautés paroissiales de ce pays toscan qui, pour cette période, reste à explorer. Dans les registres, viennent par exemple se refléter les conflits entre clergé et paroissiens, le désir, en milieu rural, d’ascension sociale par l’accès à la cléricature, les pratiques citadines de l’usure ou encore les stratégies matrimoniales de certaines familles.
18Pour finir, soyons sûrs que dans le cadre d’une histoire croisée de la normativité canonique, conciliaire ou synodale, de la procédure criminelle et du for épiscopal, on ne peut que gagner à comparer ce dossier pistoiese à d’autres situations présentant les mêmes traits formels et institutionnels. Après avoir rendu un hommage liminaire à Paul Fournier, nous aimerions, pour conclure, nous référer à l’étude esquissée par Guy Geltner sur les registres criminels de la cour épiscopale de Lucques dans la seconde moitié du XIVe siècle47, ainsi qu’au remarquable mémoire écrit par Yolanda Serrano Seoane sur les registres de procès criminels de l’évêque de Barcelone au XVe siècle48. Ce n’est en effet qu’au prix d’un comparatisme raisonné avec d’autres tribunaux épiscopaux, qu’ils soient lucquois, barcelonais ou rémois, que notre compréhension des spécificités procédurales et des routines judiciaires de l’évêque, dans ce temps long qui sépare les conciles de Latran IV et de Trente, pourra s’approfondir.
Notes de bas de page
1 Paul FOURNIER, Les officialités au Moyen Âge, Paris, Plon, 1880.
2 Anne LEFEBVRE-TEILLARD, Les officialités à la veille du concile de Trente, Paris, LGDJ, 1973 ; Charles DONAHUE et Norma ADAMS (éd.), Select Cases from the Ecclesiastical Courts of the Province of Canterbury, 1200-1301, Londres, Selden Society, 1981 ; Richard H. HELMHOLZ, The Oxford History of the Laws of England. Volume I, The Canon Law and Ecclesiastical Jurisdiction from 597 to the 1640’s, New York, Oxford University Press, 2004 ; Véronique BEAULANDE, Le malheur d’être exclu ? Excommunication, réconciliation et société à la fin du Moyen Age, Paris, Publications de la Sorbonne, 2006.
3 L’essai comparatiste de Robert BRENTANO, Due chiese : Italia e Inghilterra nel XIII secolo, Bologne, Il Mulino, 1968 (trad. Two Churches : England and Italiy in the Thirteenth Century, Berkeley, University of California Press, 1988, 2e édition), p. 132-170 en particulier, reste la pierre de touche des recherches à venir. L’historien fut en effet pionnier dans l’étude de la formation des curies épiscopales en Italie et de leur rôle judiciaire.
4 Pour preuves, les contributions réunies dans I registri vescovili dell’Italia settentrionale (secoli XII-XV), Atti del Convegno di studi (Monselice, 24-25 nov. 2000), A. BARTOLI LANGELI et A. RIGON (éd.), Rome, Herder, 2003. Dans ce volume, Giuseppe GARDONI signale néanmoins que l’évêque de Mantoue laisse à son vicaire le soin de juger certaines causes dès le milieu du XIIIe siècle, « I registri della chiesa vescovile di Mantova nel secolo XIII », p. 141-187, ici p. 165.
5 Florence, Archivio di Stato, Class. III, 23-26, Stanza III, armad. 2, Acta curiae aepiscopalis Pistoriensis de anno 1287 ad annum 1301 (désormais : Florence, AS, Acta curiae Pistoriensis). Ces registres sont signalés dans la Guida storica e bibliografica degli archivi e delle biblioteche dIttalia, II, Provincia di Pistoia, parte I, Pistoia, R. Piattoli (éd.), Rome, 1934, p. 102. Voir également Luigi CHIAPPELLI, « Una nuova fonte per l’antica storia di Pistoia », Bullettino storico pistoiese, an. 15, 1913, fasc. 1, p. 75-77.
6 Une brève étude a été menée sur l’usure dans les registres de l’évêque de Pistoia par Armando SAPORI, « L’usura del Dugento a Pistoia », Studi di storia economica medievale (secoli XIII-XIV-XV), vol. 1, Florence, G. C. Sansoni, 1955 (3e édition), p. 181-189. L’auteur, cependant, néglige les aspects juridiques de ces affaires d’usure. Plus récemment, Giampaolo FRANCESCONI y a consacré quelques pages dans un essai sur le crédit à Pistoia aux XIIe-XIIIe siècles, « Qualche considerazioni sull’attività creditizia a Pistoia in età comunale », L’attività creditizia nella Toscana comunale, Atti del Convegno di Studi (Pistoia – Colle di Val d’Elsa, 26-27 sept. 1998), A. DUCCINI et G. FRANCESCONI (éd.), Pistoia, Società pistoiese di storia patria, 2000, p. 151-190, ici p. 186-190 ; trois affaires, enfin, sont étudiées par Giuliano PINTO, « Clero e chiese rurali nel Pistoiese alla fine del Duecento », Pistoia e Toscana nel Medioevo. Studi per Natale Rauty, E. VANNUCCHI (éd.), Pistoia, Società pistoiese di storia patria, 1997, p. 104-129.
7 Je remercie chaleureusement Julien Théry qui m’a fait l’amitié de relire cet article et de m’éclairer sur de fascinantes subtilités procédurales. J’espère que les développements sur la position du dénonciateur, les dépositions de témoins et le régime de véridiction qu’elles révèlent, rendent justice à ses propres recherches. Je reste bien entendu seul responsable des approximations que peut receler cette étude.
8 Florence, AS, Acta curiae Pistoriensis, pezzo 4, fol. 1r-104v.
9 Gaetano BEANI, La Chiesa pistoiese dalla sua origine ai tempi nostri. Appunti storici, Pistoia, Pagnini, 1912, p. 248 ; Natale RAUTY, L’antico palazzo dei vescovi di Pistoia, I, Storia e restauro, Florence, Olschki, 1981, p. 356.
10 Édouard FOURNIER, L’origine du vicaire général et des autres membres de la curie diocésaine, Paris, 1950 [1940], distingue le vicarius du vice agens (vicaire général) qui, au XIIIe siècle, se charge des affaires temporelles et administratives de l’évêque, remplaçant et représentant ce dernier in spiritualibus et temporalibus, dans l’ensemble du diocèse et sur tous les fidèles, en cas d’absence prolongée du prélat, mais il n’est pas certain que cette terminologie se retrouve dans la documentation de la pratique.
11 Elena VANNUCCHI, dans Storia di Pistoia II. L’Età del libero Comune dall’inizio del XII alla metà del XIV secolo, Giovanni CHERUBINI (éd.), Florence, Le Monnier, 1998, p. 347- 386, explique qu’à la tête du collège des chanoines, se trouve le prepositus qui doit surveiller et contrôler ses frères, représenter le chapitre dans les affaires administratives, et tient sous ses ordres l’archipresbiter et l’archidiaconus, lequel assume la fonction de vicaire de l’évêque.
12 Sabatino FERRALI, « La serie dei vicari generali della diocesi di Pistoia dal sec. XIII al sec. XVIII », Bullettino storico pistoiese, n° 76, 1974, p. 29-51, ici p. 39-40, repris dans id., Chiesa e clero pistoiese nel Medioevo, G. FRANCESCONI et R. NELLI (éd.), Pistoia, Società pistoiese di storia patria, 2005, p. 201-226, ici p. 216.
13 Elena VANNUCCHI, dans Storia di Pistoia II, op. cit., p. 350-355 ; Statuti pistoiesi del secolo XIII : studi e testi, t. III. Statutum potestatis comunis Pistorii (1296), L. ZDEKAUER (éd.), Pistoia, Società pistoiese di storia patria, 2002, p. 9 en particulier, lib. I, II, « De quattuor iudicibus potestatis », et p. 98-99, lib. III, II, « De officio judicis maleficiorum ».
14 Florence, AS, Acta curiae Pistoriensis, pezzo 1, fol. 36r-51v.
15 Selon Elena VANNUCCHI, dans Storia di Pistoia II, op. cit., p. 347-348, la Commune exerce également la justice civile et criminelle sur le territoire de Sambuca.
16 Massimo VALLERANI, « I processi accusatori a Bologna fra due e trecento », Società e storia, n° 78, 1997, p. 741-788 ; Gaëtan DI MARINO, « L’implantation et les remises en cause des dogmes accusatoire et inquisitoire », dossier Inquisitoire-accusatoire : un écroulement des dogmes en procédure pénale, dans Revue internationale de droit pénal, 1997, p. 17-30 ; Massimo VALLERANI, « I fatti nella logica del processo medievale. Note introduttive », Quaderni storici, n° 108, 2001, p. 665-693 ; Mario SBRICCOLI, « Justice négociée, justice hégémonique l’émergence du pénal public dans les villes italiennes des XIIIe et XIVe siècles », Pratiques sociales et politiques judiciaires dans les villes de l’Occident à la fin du Moyen Âge, J. CHIFFOLEAU, C. GAUVARD et A. ZORZI (éd.), Rome, École française de Rome, 2007 (Collection de l’ÉfR, 385), p. 389-421 ; Jacques CHIFFOLEAU, « Du système accusatoire au système inquisitoire. L’aveu », dossier Justice et politique : l’impossible cohabitation ?, J. de MAILLARD (éd.), dans Panoramiques, n° 63, 2003, p. 124-132.
17 Ce procès a fait l’objet d’un résumé par Giuliano PINTO, « Clero e chiese rurali nel Pistoiese alla fine del Duecento », art. cit.
18 Robert GENESTAL, Le privilegium fori en France du Décret de Gratien à la fin du XIVe siècle, Paris, E. Leroux, 1924, 2 vol., retrace les origines du « privilège du for », établi sous Constantin puis, après sa suppression temporaire en 452, dans les Novelles de Justinien.
19 Florence, AS, Acta curiae Pistoriensis, pezzo 1, fol. 137r : Anno nativitatis ejusdem millesimo CCLXXXX, indictione quarta, die XV mensis maii, coram discreto viro domino Arnoldo plebano plebis sancti Andree Pistoriensis venerabilis patris domini Thome dei gratia Pistoriensis episcopi vicario generali, comparuit Rustichellus Gratie de Fagno et porrexit et dedit quatenus presbiterum Jacobum rectorem ecclesie sancte Marie de Fagno insertas denunciationes.
20 Ibid. : Rustichellus Gratie de populo et parrochia ecclesie sancte Marie de Fagno […] denunciat coram vobis domino Arnoldo vicario venerabilis patris domini Thome dei gratia Pistoriensis episcopi quod presbiter Jacobus rector dicte ecclesie sancte Marie de Fagno est fornicator publicus et in obbrobrium sui ordinis et in dampnum dicti communis et populi vadit de die et nocte publice fornicando et adulteria committendo. Item denuntiat dictus Rustichellus eundem presbiterum Jacobum de eo quod ipse consuevit publice tenere amasiam seu fornicariam, scilicet Ginam mulierem in domo dicte ecclesie et ex ea habuit filiam seu filium. Item denuntiat dictus Rustichellus eundem presbiterum Jacobum de eo quod ipse vulneravit mortifere dominam Mesem matrem dicti presbiteri Jacobi, ex quo vulnere dicta sua mater decessit et expiravit et postmodum in anime sue periculum celebrare non metuit et sacrificando in missis publice corpus domini nostri Jhesu Christi indigne tractavit. Que omnia dicit dictus Rustichellus esse notoria et publica in dicta terra de Fagno et quod de predictis et quolibet predictorum et aliis sceleribus est dictus presbiter in dicta terra publice infamatus.
21 Ibid. : Super quibus prefatus dominus vicarius intendit inquirere et procedere tam ex officio suo quam ad instantiam predicti Rustichelli prosequentis et prosequere volentis denunciationes easdem.
22 Au milieu du XIIIe siècle par exemple, le canoniste Henri de Suze distingue l’enquête « d’office » et l’enquête faite « sur dénonciation », dans sa Summa aurea, Venise, 1574, col. 1473, lib. V, « De inquisitionibus », §4 : Quando procedatur ad inquisitionem. Et quidem aut inquisitio fit aliquo prosequente vel denunciante, […] aut ex officio. Et dans la Glossa ordinaria de Bernard de Parme (v. 1241 – v. 1266), voyez ad X, 5, 1, 24, v. « Ad inquirendum », éd. Rome, 1582, p. 1596 : Et tunc distingue : quia aut procedit ex officio suo, aut aliquo postulante inquisitionem.
23 Julien THERY, Fama, enormia. L’enquête sur les crimes de Bernard de Castanet, évêque d’Albi (1307-1308). Gouvernement et contestation au temps de la théocratie pontificale et de l’hérésie des bons hommes, Université Lyon II, dir. J. CHIFFOLEAU, thèse soutenue en 2003, chap. 6 en particulier ; id., « Fama. L’opinion publique comme preuve judiciaire. Aperçu sur la révolution médiévale de l’inquisitoire (XIIe-XIVe siècles) », La preuve en justice de l’Antiquité à nos jours, B. LEMESLE (éd.), Rennes, PUR, 2003, p. 119-147 ; Günter JEROUSCHEK et Daniela MÜLLER, « Die Ursprünge der Denunziation im Kanonischen Recht », Recht – Idee – Geschichte : Beiträge zur Rechts- und Ideengeschichte für Rolf Lieberwirth anlässlich seines 80. Geburtstages, H. Lück, B. Schildt (éd.), Cologne – Weimar – Vienne, Bölhau, 2000, p. 3-24.
24 Charles LEFEBVRE, « Contribution à l’étude des origines et du développement de la denunciatio evangelica en droit canonique », Ephemerides Iuris canonici, VI/1, 1950, p. 60- 93 ; Lothar KOLMER, « Die denunciatio canonica als Instrument im Kampf um den rechten Glauben », Denunziation : historische, juridische und psychologische Aspekte, G. JEROUSCHEK, I. MARSSOLEK, H. RÖCKELEIN (éd.), Tübingen, 1997, p. 26-47 ; Lotte KERY, « Inquisitio – denunciatio – exceptio : Möglichkeiten der Verfahrenseinleitung im Dekretalenrecht », Zeitschrift der Savigny-Stiftung für Rechtsgeschichte, t. 118, Kanonistische Abteilung, n° 87, 2001, p. 226-268. Deux décrétales d’Innocent III font explicitement dépendre l’enquête de vérité sur les crimes de l’infamatio de l’accusé, voyez X, 5, 1, 19 (Cum oporteat) et X, 5, 1, 21 (Inquisitionis negocium).
25 Piero BELLINI, Denunciatio evangelica e denunciatio judicialis privata. Un capitolo della storia disciplinare della Chiesa, Milan, Giuffrè, 1986, p. 106 ; Arnd KOCH, Denunciatio. Zur Geschichte eines strafprozessualen Rechtsinstituts, Francfort, V. Klostermann, 2006, p. 58-60. Voyez, par exemple, GUILLAUME DURANT, Speculum iudiciale, Lyon, 1499, p. 350, lib. III, partic. 1, n. 3, « De inquisitione » : Quoniam sepe post denunciationem super criminibus ad inquisitionem proceditur.
26 Florence, AS, Acta curiae Pistoriensis, pezzo 1, fol. 139r : Anno nativitatis domini MCCLXXXX indictione tertia die XXV mensis maii hii sunt testes producti a presbitero Jacobo rectore ecclesie Sancte Marie de Fagno in causa quam habet cum Rustichello Gratie de Fagno coram domino Arnoldo vicario…
27 Les pièces de ce procès n’ont pas été copiées dans l’ordre chronologique, puisque les dépositions des témoins (fol. 145r-159r) ont eu lieu en septembre 1290, mais ne se trouvent enregistrées qu’après les étapes du procès – réfutation des témoins et consilium juridique – ayant eu lieu entre octobre 1290 et janvier 1291 (fol. 139v-144v).
28 X, 2, 20, 49 (Licet dilectus). Ce texte confirme l’admission de témoins reprobatorii reprobatoriorum, c’est-à-dire produits à charge par le juge ou le dénonciateur pour réprouver les témoins produits par la défense et démontrer leur incapacité. Au sujet de cette décrétale, voyez Julien THÉRY, « Judicial inquiry as an instrument of centralized Government : the papacy’s criminal proceedings against prelates in the age of theocracy (mid-12th to mid-14th century) », forthcoming in Proceedings of the 14th International Congress of Medieval Canon Law.
29 Florence, AS, Acta curiae Pistoriensis, pezzo 1, fol. 145r : Intendit probare presbiter Jacobus rector ecclesie sancte Marie de Fagno super hiis que proponit Rustichellus Gratie de Fagno, videlicet qui dicit et proponit et probare vult quod dictus presbiter Jacobus est publice infamatus, quod de die et nocte vadit fornicando et adulteria commitendo, et quod tenuit et tenet unam mulierem pro fornicaria et de eo quod proponit quod ipse vulneravit mortifere matrem suam, quod non est infamatus super hiis sed est bone fame et ducit vitam suam sine mala fama de predictis propositis.
30 X, 5, 1, 24, (Qualiter et quando) : Debet igitur esse praesens is, contra quem facienda est inquisitio, nisi se per contumaciam absentaverit, et exponenda sunt ei illa capitula, de quibus fuerit inquirendum, ut facultatem habeat defendendi se ipsum. Et non solum dicta, sed etiam nomina ipsa testium sunt ei, ut quid et a quo sit dictum appareat, publicanda, nec non exceptiones et replicationes legitimae admittendae, ne per suppressionem nominum infamandi, per exceptionum vero exclusionem deponendi falsum audacia praebeatur.
31 Par exemple, GUILLAUME DURANT, op. cit., p. 356, lib. III, partic. 1, n. 3, « De inquisitione », §3 Qualiter in inquisitione sit procedendum.
32 Boniface VIII (1294-1303) innove, cependant, dans le Sexte, en refusant l’invalidation rétrospective d’une enquête pour absence d’infamia préalable, voyez VI, 5, 1, 1 (Postquam) ; VI, 5, 1, 2 (Si is). Là encore, je remercie Julien Théry de m’avoir aiguillé vers ces textes.
33 Florence, AS, Acta curiae Pistoriensis, pezzo 1, fol. 145r : Presbiter Simon rector ecclesie de Fabrica testis inductus a presbitero Jacobo […] respondit quod nunquam audivit eum infamari de predictis que sunt proposita contra eum a dicto Rustichello, nisi ab illis de Fagno qui infamant eum occasione feudi et redditus quod eidem presbitero tenentur prestare quia nolunt sibi dare.
34 Ibid., fol. 150v : Infrascripte sunt attestationes et dicta testium productorum a Rustichello Gratie de Fagno in causa quam habet cum presbitero Jacobo rectore ecclesie Sancte Marie de Fagno coram domino Arnuldo vicario venerabilis patris domini Thome dei gratia Pistoriensis episcopi super infrascriptis articulis dictis per dictum Rustichellum scripta per me Lapum notarium infrascriptum sub examine predicti domini vicarii.
35 Ibid., fol. 139v : … cum scripti testes contra ipsum presbiterum inducti sint de comuni de Fagno et ipsum comune denunciari et accusari fecerint […] et ideo cum scripti testes prius fuerint accusatores, denunciatores sive actores de eadem questione et causa quam habet ad presens […].
36 Ibid., fol. 151v : Item interrogatus super IV articulo dicte intentionis que talis est : ‘item qualiter dictus presbiter Jacobus est publice infamatus de eo quod predicta omnia et singula etc.’, respondit et dixit vera esse que in dicto articulo continentur ; interrogatus quomodo scit, respondit quia publice et communiter per terram de Fagno ab hominibus et mulieribus predicta dicuntur et quia de predictis omnibus est publica vox et fama in terra de Fagno ; interrogatus quot homines faciunt publicam famam, respondit quod […] omnes homines dicte communis de Fagno faciunt dictam publicam famam ; interrogatus quod est dicendum publica vox et fama, respondit quod publice dicitur ab hominibus et personis ; interrogatus si odit vel diligit dictum presbiterum, respondit non ; interrogatus si attinet dicto Rustichello, respondit non ; interrogatus si testificaret hodio, pretio, prece vel amore, respondit non.
37 Julien THERY, « Fama : l’opinion publique comme preuve judiciaire. Aperçu sur la révolution médiévale de l’inquisitoire (XIIe-XIVe siècle), art. cit.
38 Florence, AS, Acta curiae Pistoriensis, pezzo 1, fol. 140v : Die jovis XXIII mensis novembris, dominus Arnuldus vicarius scriptus in presentia partium predictarum in eius presentia constitutarum, receptis suspectis ab eisdem partibus, elegit dominum Bascheriam judicem in quem ambe partes concordaverunt se ad consulendum super predictis, videlicet utrum presbiter Jacobus scriptus per probata producta habita et allegata et proposita coram domino vicario scripto in scripta causa sit infamatus an bone fame, et utrum debeat procedi ulterius in scripta causa et contra dictum presbiterum Jacobum secundum petitionem scripti Rustichelli.
39 Ibid., fol. 141r : Per ea que producta et probata et proposita et allegata sunt coram scripto domino vicario in causa predicta, visis denuntiatione sive denuntiationibus factis per dictum Rustichellum de dicto presbitero, et confessione ipsius presbiteri, et testibus ab utraque parte productis, et auditis allegationibus utriusque partis…
40 Ibid., fol. 141r : … tale est quod de hiis que continentur in primo et secundo capitulis denuntiationis sive denuntiationum predictarum factarum per dictum Rustichellum, per ea que probata, proposita et allegata sunt, dictus presbiter Jacobus est infamatus et contra eum ulterius potest procedi in causa predicta secundum formam juris. De hiis vero que continentur in tertio capitulo dicte denuntiationis sive predictorum denuntiationum per ea que proposita, probata, habita et allegata sunt, dictus presbiter Jacobus non est infamatus nec contra eum ulterius procedi potest.
41 Guido KISCH, Consilia. Eine bibliographie der juristischen Konsiliensammlungen, Bâle, 1970. Voir également Legal consulting in the civil law tradition, M. ASCHERI, I. BAUMGÄRTNER et J. KIRSCHNER (éd.), Berkeley, Robins Collection Publications, 1999.
42 Mario ASCHERI, « Il consilium dei giuristi medievali », Consilium. Teorie e pratiche del consigliare nella cultura medievale, C. CASAGRANDE, C. CRISCIANI et S. VECCHIO (éd.), Florence, Edizioni del Galluzzo, 2004, p. 243-258.
43 Corinne LEVELEUX-TEIXEIRA, « Juger le faux pour croire le vrai. Le discours des consilia juridiques sur les pratiques de falsification (XIVe-XVIe siècle) », Juger le faux (Moyen Âge – Temps modernes), O. PONCET (éd.), Paris, École nationale des Chartes, 2011, p. 119-142, ici p. 121.
44 Ead., « Opinion et conseil dans la doctrine juridique savante (XIIe-XIVe siècles) », dans Consulter, délibérer, décider. Donner son avis au Moyen Âge (France-Espagne, VIIe-XVIe siècle), Toulouse, CNRS – Université Toulouse-le-Mirail, 2010, p. 33-50, ici p. 50 ; ead., « Savoirs techniques et opinion commune : l’expertise dans la doctrine juridique médiévale (XIIIe-XVe siècle), Experts et expertise au Moyen Âge. Consilium quaeritur a perito, XLIIe Congrès de la SHMESP, Paris, Publications de la Sorbonne, 2012, p. 117-131.
45 Pour ne citer que deux exemples de causes bénéficiales en appel (causae appellationis) renvoyées à l’évêque de Pistoia : Florence, AS, Acta curiae Pistoriensis, pezzo 1, fol 75r- 86v ; pezzo 2, fol. 114r-114v.
46 Jean-Louis BIGET, « Un procès d’Inquisition à Albi en 1300 », Le Credo, la morale et l’Inquisition, dans Cahiers de Fanjeaux, n° 6, 1971, p. 273-341 ; id., Hérésie et inquisition dans le Midi de la France, Paris, Picard, 2007 ; Julien THERY, « Cléricalisme et hérésie des bons hommes. L’exemple d’Albi et de l’Albigeois (1276-1329) », L’anticléricalisme en France méridionale (milieu XIIe - début XIVe siècle), dans Cahiers de Fanjeaux, n° 38, 2003, p. 471-508 ; id., « Une politique de la terreur. L’évêque d’Albi Bernard de Castanet (v. 1240- 1317) et l’Inquisition », Les inquisiteurs. Portraits de défenseurs de la foi en Languedoc (XIIIe-XIVe siècles), L. ALBARET (éd.), Toulouse, Privat, 2001, p. 71-87.
47 Guy GELTNER, « I registri criminali dell’ Archivio arcivescovile di Lucca : prospettive di ricerca per la storia sociale del Medioevo », Il patrimonio documentario della Chiesa di Lucca. Prospettive di ricerca, Atti del Convegno internazionale di studi (Lucca, 14-15 nov. 2008), S. PAGANO et P. PIATTI (éd.), Florence, SISMEL, 2010, p. 331-340 ; id., « Patrolling normative borders after the Black Death : the bishop of Lucca’s criminal court », Center and Periphery : Studies on Power in the Medieval World in Honor of William Chester Jordan, K. L. JANSEN, G. GELTNER and A. E. LESTER (éd.), Leiden, Brill, 2013, p. 169- 180.
48 Yolanda Serrano SEOANE, « El sistema penal del tribunal eclesiástico de la diócesis de Barcelona en la Baja Edad Media », 2 vol., Clío & Crímen : Revista del Centro de Historia del Crimen de Durango, nº 3, 2006, p. 334-428.
Auteur
Ecole française de Rome
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