Droits de la défense et advocatio ecclesiae devant les juridictions du haut Moyen-Âge (ive-xiie siècles)
p. 19-41
Texte intégral
1Lorsqu’on évoque la justice épiscopale au Haut Moyen Age, ce sont les termes de barbarie, de décadence et d’effondrement qui viennent à l’esprit. Et l’on explique souvent cet état de fait par la décomposition des cadres romains1. Il est vrai qu’une époque de bouleversements tels que ceux qu’a connus la séquence des Ve-XIIe siècles ne s’appréhende pas facilement et l’on est tenté d’en retenir le résultat le plus frappant : l’éradication apparente de la culture juridique et de l’ordre judiciaire romains2. Or, les mutations institutionnelles qui résultent de l’installation de peuples nouveaux en Occident relèvent davantage d’un processus chimique – rien ne se perd, rien ne se crée – que d’une entreprise de construction pour laquelle la démolition d’un bâtiment en ruines préluderait nécessairement à une nouvelle édification. Jean Gaudemet l’atteste : « (…) le droit persiste, s’efforçant, avec des succès inégaux de corriger un tableau si noir de la société. Un droit nouveau, sans doute, marqué par les courants contraires qui parcourent un monde en quête de nouveaux équilibres. Le droit de Rome, trop raffiné, avait été modelé pour d’autres temps. Aussi est-il tombé dans un oubli partiel »3. Partiel seulement, car ce droit demeure dans l’esprit. Les Barbares recevront une somme de dispositions pouvant servir à encadrer les exercices multiples du droit, un reflet de la mentalité juridique romaine, en quelque sorte.
2La justice ecclésiastique du Haut Moyen Age apparaît comme un laboratoire où s’élabore patiemment ce que sera la justice des évêques du Moyen Age classique : si les instruments et les personnels judiciaires du Haut Moyen Age ne sont plus tout à fait ceux de l’Antiquité tardive, ils sont assurément partie d’une armature du droit et d’un complexe qui sont encore romains4. Et les hommes de ces temps qui, sans doute, n’étaient pas faciles, étaient trop pénétrés et trop convaincus de la valeur de l’ordre romain pour le jeter à bas5. Il y a le plus souvent un immobilisme des pratiques juridiques car ni les souverainetés barbares, ni les cadres épiscopaux n’avaient le moyen d’en inventer d’autres6 : ils reproduisent, parfois avec quelques amendements, des systèmes judiciaires coulés dans l’ancien droit7. On adapte, on réforme, on multiplie des statuts et règlements particuliers, quitte à rendre parfois la réalité de la justice d’Eglise d’une redoutable complexité. En vérité, sous le foisonnement de cas d’espèces, des principes directeurs simples inspirent les procédures de recours et de défense, et permettent d’apprécier le degré de résistance des structures passées, et par conséquent, la continuité entre le droit de l’Antiquité et celui du Moyen Age.
I – Survivances romaines et droit de la défense (IVe-VIe siècles)
A - L’Audientia episcopalis et la juridiction ecclésiale
3L’héritage antique se retrouve à la base de la technique processuelle des droits de la défense et de l’advocatio ecclesiae dont l’institutionnalisation doit être considérée dans la longue durée car, au point de départ, on trouve un droit de la défense sans avocat ecclésiastique attitré. Dans la pratique ecclésiale, c’est l’évêque comme juge qui assume l’essentiel des prérogatives judiciaires, y compris celle de protéger8. A titre individuel ou au titre d’un concile, il est le juge de la foi et instruit les procès pénaux. Dans les deux cas, les influences romaines sont réelles. Après la paix de 313, Constantin, reconnaissant une organisation structurée, avait confié à l’évêque un véritable rôle de juge de droit commun, aussi bien dans les matières civiles que criminelles : « Le juge, en vertu de sa sollicitude, devra se taire s’il est fait appel au jugement de l’évêque. De même, si quelqu’un voulait porter une affaire devant la loi chrétienne et se soumettre à son jugement, qu’il soit écouté, quand bien même l’affaire aurait déjà été commencée devant un juge (…) »9.
4Il reste délicat cependant à déterminer si l’évêque, dans l’accomplissement de ses attributions, a fait usage massivement de pratiques coercitives10. Pour les légistes romains, il ne s’agissait pas seulement de reconnaître la juridiction ecclésiastique, mais surtout de l’intégrer dans la société civile11. Figure dominante de la cité12, l’évêque participe pleinement aux « rouages des institutions étatiques »13 ; entre autres obligations, il remplit une fonction de secours des plus faibles14 face aux détenteurs de la potestas15. De fait, il assure cet office que les empereurs de la seconde moitié du IVe siècle avaient établi pour certains de leurs agents, désignés comme patroni ou defensores ciutatum16.
5Le surcroît de pouvoir accordé à l’autorité épiscopale entraînait parfois des confusions17. Il n’était pas rare, en cas de dérives judiciaires, que l’évêque assumât une correction protectrice pour les fidèles poursuivis18. Ce rôle de défenseur officiel trouve, pour une part, ses fondements juridiques dans l’audientia epicopalis19, c’est-à-dire dans les fonctions judiciaires20 que la législation impériale reconnaissait précisément aux évêques21. Le détail des principaux actes de procédures montrent que l’évêque suivait les règles séculières aussi bien pour les délais, la constitution des mandataires, la charge de la preuve ou encore le déroulement des phases du procès22.
6Mais il s’agit d’abord d’une charge de magistrat23 qui pouvait viser aussi bien les clercs que les laïcs24. Il est significatif aussi que dans les décisions judiciaires de certains conciles, aux IVe et Ve siècles, on ne relève aucune référence à la plaidoirie dans les multiples procès en matière de juridiction spirituelle et en matière civile, alors que dans le même temps, on a adopté la procédure romaine à propos de l’accusation et des moyens de preuves25. Les lettres d’Augustin d’Hippone donnent des relations assez précises sur le déroulement des procédures26 : dans les affaires d’Antoine de Fussala27, du prêtre Abundantius28 et du sous-diacre Victorinus29, il n’est point question d’avocat ou de plaidoirie. Il en est de même dans le procès de la vierge Indicia de Vérone, condamnée une première fois par l’évêque sur la déposition de témoins subornés, sans avoir été entendue, puis innocentée en appel devant Ambroise de Milan, après une instruction complète comportant enquête, audition de témoins et interrogatoire30. La procédure suivie dans les procès ecclésiastiques serait conforme à celle des cognitiones extraordinariae où tout est laissé à l’arbitraire du juge31. Devant l’évêque, siégeant comme arbitre, protecteur et juge en équité, les parties étaient dans l’obligation de présenter elles-mêmes leurs défenses, sans assistance d’avocat officiel.
7L’absence d’avocat devant la juridiction épiscopale est à rapprocher alors de l’interdit qui fut posé très tôt pour les clercs, devant les tribunaux civils, de se constituer eux-mêmes comme avocat32. Ce qui est en cause, c’est l’exercice d’activités civiles qui vient rompre la théorie du lien33 qui attache le clerc, par le titre d’ordination34, à sa communauté exclusivement35. Un peu partout, des clercs se prêtaient au commerce et au vieil esprit mercantile, voire affairiste. On pouvait en voir se livrer à toutes sortes de métiers, y compris celui de tuteur ou d’avocat dans des procès civils36. Cette situation suscita un malaise37. Nombre d’ordonnances d’assemblées synodales mérovingiennes se font l’écho permanent de condamnations sévères38.
8Le concile de Chalcédoine de 451 avait pourtant posé, dans le canon 3, le principe de l’incompatibilité entre le ministerium ecclésiastique et une charge civile39 : « Il est venu à la connaissance du saint concile que quelques membres du clergé par un honteux esprit de lucre, louent des biens étrangers et deviennent entrepreneurs d’affaires temporelles (…). Si à l’avenir quelqu’un enfreint cette ordonnance, il doit être frappé de peines ecclésiastiques »40.
9Cela ne suffit pas. Même en Orient, ces dissipations étaient devenues sources de scandales. Justinien s’en était ému et avait interdit, sauf rares exceptions, aux évêques et autres clercs, toute charge de représentation civile, y compris de tuteur ou de curateur : « Nous ordonnons de manière générale que tous les évêques, prêtres, diacres, et sous-diacres, et principalement les moines, bien qu’ils ne soient pas clercs, soient dispensés, de droit, de gérer toute sorte de tutelle, soit testamentaire, soit légitime, soit dative. Nous ordonnons qu’ils soient non seulement exempts des tutelles, mais encore de la curatelle, tant des pupilles et des adultes, que des furieux, des muets, des sourds, et autres personnes à qui l’on donne, en vertu des anciennes lois, des tuteurs et des curateurs »41. Le canon 47 du concile de Tolède de 63342 imposera encore l’exemption complète de toute fonction civile : « Sur ordre de notre seigneur et excellence le roi Sisenand, le saint concile a décidé que tous les clercs affectés au service divin seraient exemptés de toutes convocations et charges publiques afin d’être plus libres pour leur ministère divin (…) »43. Beaucoup de ces textes n’ont pas été ignorés ou expressément rejetés. Leur autorité et leur sort sont confirmés par leur conservation dans les collections canoniques, aussi bien dans des petits recueils que dans des compilations plus savantes44.
10Pour autant, les auteurs chrétiens n’écartent pas l’institution de l’avocat. Ils le citent même de façon allégorique. Augustin d’Hippone qualifie ainsi les martyrs d’avocats, agissant auprès du Père par l’intermédiaire du Christ qui seul « est vere advocatus unus, qui interpellat pro nobis sedens ad desteram Patris »45. De toute évidence, l’évêque d’Hippone renvoie ici à la dimension biblique du Paraclet46, traduit paraklêtos47 en grec et advocatus dans les versions latines du Nouveau Testament : Jésus-Christ est l’avocat, l’intercesseur qui apporte la consolation au monde entier par sa descente du ciel48. L’utilisation du vocabulaire d’Augustin ne doit rien au hasard : il s’inspire directement du vocabulaire romain distinguant, par exemple, le defensor de l’intercessor49. Ailleurs, il propose une déontologie morale pour les avocats50.
11Des allusions semblables figurent aussi dans d’autres écrits épiscopaux51. Il est vrai que plusieurs évêques furent eux-mêmes soit des fonctionnaires romains comme Ambroise de Milan, soit des avocats comme Germain, évêque d’Auxerre, qui apprit la science du droit à Rome52. L’intégration du modèle romain se fait ainsi pas à pas. Elle résulte d’une somme d’innombrables actions, de développements intellectuels, de jugements épiscopaux et d’éducation légale. Il est évident que l’Eglise ne change pas et ne modifie pas ses institutions aussi rapidement que le législateur profane. Son œuvre juridique est lente et patiente. Les procédures canoniques ne sont donc pas celles du Bas-Empire, et toute utilisation de réalités ou de concepts romains pourrait conduire à des essais de réinterprétation. L’attachement aux références romaines est cependant signifiant53. Surtout lorsque les conciles provinciaux, après la disparition de l’Empire d’Occident, feront référence aux corporations d’avocats placées sous l’autorité des tribunaux romains, avec les defensores ecclesiae.
12Si cette figure juridique n’est pas entièrement semblable au statut de l’advocatus fisci du droit romain54, elle n’est pas davantage germanique car à l’entrecroisement des deux cultures juridiques et de deux formes de l’organisation judiciaire, vient s’ajouter la soumission de ce protecteur des intérêts de l’Eglise à l’ordo ecclésiastique et à la discipline religieuse.
B – Les defensores ecclesiae et la représentation judiciaire
13La qualification de defensor ecclesiae a désigné deux institutions différentes : l’une légale et judiciaire, l’autre de l’administration intérieure de l’Eglise. Cette dénomination pourrait donner à penser que leur fonction était, pour la défense de l’Eglise, analogue à celle des magistrats, chargés d’assurer la protection des intérêts de la cité contre l’oppression, ou encore, contre les abus des gouverneurs. Certains évêques avaient pu exercer, en des temps troublés, cette charge de defensor civitatis55. Ces deux institutions, quoique proches en apparence, ne répondaient pas cependant aux mêmes objectifs : le défenseur de la cité est pris au sens de protecteur56, même si R.-M. Frakes attribue à Constantin une loi non conservée, qui aurait transformé la fonction, lui conférant une mission judiciaire accessible aux plus humbles57. Quant au titre de defensor ecclesiae, il a le sens spécial et technique de représentant en justice. Du reste, il était habituel de désigner sous le nom de defensores ceux qui, avec ou sans mandat58, se produisaient en justice au nom d’autrui et auxquels on en vint à permettre de se présenter aussi pour le demandeur59.
14Avant le Ve siècle, l’existence permanente de defensores ecclesiae n’est pas certaine. Aucune source n’indique précisément leur statut. Ils interviennent le plus souvent, semble-t-il, pour revendiquer la propriété de lieux de culte confisqués par des schismatiques ou des dissidents60. C’est le canon 3 du concile général d’Afrique, réuni à Carthage le 13 juin 407, qui prépare pour la première fois, une résolution visant à institutionnaliser un defensor ecclesiae. Il devait être pris dans le corps des avocats, parmi ceux qui étaient en exercice ou en mesure de recevoir des causes.
15Ils devaient pouvoir bénéficier, comme les sacerdotes de la province, de la faculté d’entrer aux secretaria des juges toutes les fois où la nécessité s’imposait, soit pour s’opposer à quelque entreprise, soit pour répondre aux besoins61. La Constitution impériale d’Honorius, du 15 novembre 407, en réponse à cette demande, se contente d’indiquer que les causes impliquant à la fois le pouvoir impérial et l’Eglise seront traitées par les avocats de cette dernière62.
16Si elle autorise les Eglises en question à disposer d’un personnel juridique propre, elle n’en précise pas le statut spécifique. Dans le contexte des Eglises d’Afrique, les defensores ecclesiae désignaient probablement des avocats laïcs résolus à récupérer contre les donatistes, des bâtiments religieux, des biens mobiliers ainsi que tous les droits les concernant. Ces auxiliaires des évêques et abbés avaient la charge de préparer les nombreux contentieux, compliqués par la résistance des expropriés. La nécessité s’imposait donc de donner à ces Eglises, des mandataires, fondés légalement à les représenter dans toutes les affaires, et cela, pour éviter toute tentative captieuse. Sur le terrain, les fonctions du defensore ecclesiae « dépassaient celles d’un simple avocat au tribunal »63. Outre la direction des procès, il devait s’assurer de l’efficacité des sentences, administrer le patrimoine ecclésiastique, contrôler les propriétés rurales, revendiquer les esclaves indûment aliénés, … et participer aux œuvres de charité. Il n’était pas rare non plus de le voir assumer l’administration provisoire des biens lors des vacances du siège épiscopal. Ce privilège du for contribue encore à la reconnaissance de l’autonomie de la justice et de la société ecclésiastique64.
17La reconnaissance de cette institution dans la pratique contentieuse des autres Eglises laisse place à de nombreux doutes. Si l’on peut penser que les Eglises d’Afrique eurent à en bénéficier largement, il est peu probable que la préfecture des Gaules et même l’Orient, aient eu à y recourir, en dépit du Code Théodosien applicable à tout l’Empire.
18On relève cependant son existence en Italie65, et plus tardivement, à l’époque mérovingienne dans certains royaumes francs où ils prennent le titre d’advocatus (« avoué » ou vocati)66. Les évêques et les abbés avaient alors à leur service des advocati. Vers 675, le concile de Saint-Jean-Losne rend même leur emploi obligatoire pour les évêques : « Qu’aucun évêque ne plaide en justice, mais qu’il recoure à un avocat, de crainte que, tandis qu’il se même au fracas des procès, on ne le voie s’insurger sous la poussée de la colère »67. L’emploi de ce personnel reste finalement ambigu68 et l’on observe une certaine confusion entre d’une part, le personnel laïc et l’ensemble du clergé, et d’autre part, son utilisation ponctuelle ou régulière69.
19C’est d’ailleurs à cette époque que le concile d’Agde de 50670 envisage, dans le cadre de la progressive ruralisation de la vie économique71, l’aliénation de biens d’Eglise lorsqu’elle est reconnue par deux ou trois comprovinciaux ; l’administration de ce type d’opération est alors confiée à un clerc représentant l’évêque : le vici-dominus que Grégoire le Grand recommande aux évêques72. Ultérieurement, la charge sera dévolue à des laïcs, dénommés avoués. C’est l’origine des avoueries ecclésiastiques.
20Si le defensore ecclesiae avait connu un réel progrès, il faut aussi noter que son intervention pouvait varier selon la nature du procès. Il arrivait que l’évêque ou l’abbé soient dans l’obligation de paraître directement, la représentation n’étant pas admise. Dans les procès criminels, les évêques et les prêtres possédaient un privilège de représentation restreint d’après le droit romain, complet dans la Lex Romana Burgundionium73. Il faut dire que l’homogénéisation des statuts sera tardive aussi bien devant les institutions judiciaires civiles que devant celles de l’Eglise. Le rôle d’arbitre dévolu aux évêques contribue peu à faire émerger la figure d’un advocatus ecclesiae à cette époque alors que dans le même temps, celle d’avoué, illustre l’importance grandissante du contentieux patrimonial et de l’organisation bureaucratique.
II – Pressions réformatrices et droit de la défense (VIIe-XIIe siècles)
A - De la tradition isidorienne à la réforme carolingienne
21C’est dans l’Espagne soumise aux Wisigoths, et encore sous l’influence du droit romain74, qu’il faut rechercher des traces sur l’avocat75. Isidore de Séville est un témoin privilégié de la survivance des règles passées. Dans ses Etymologies, il écarte la preuve per coniuratores au profit de la preuve par témoins76, et en fait de peines, privilégie les châtiments afflictifs du droit romain77.
22Il fait référence à l’orator78, au jurisconsulte79, aux patroni80 et aux causidici81. Il souligne notamment la prévarication de l’avocat82. S’il paraît bien connaître l’avocat romain, il se garde cependant de le citer dans ses monuments législatifs. Plusieurs questions se posent : n’y avait-il donc aucun avocat dans les affaires ecclésiastiques ? Son assistance n’était-elle que facultative comme le suppose la liste des six personnes citées à l’instance : judex, accusator, reus et tres testes ?83 Une certitude : Isidore n’a pas innové ; il perpétue la tradition de l’Eglise romaine sans que l’on puisse conclure qu’il méconnut l’avocat devant les juridictions ecclésiastiques. Le même raisonnement vaut pour les conciles de Tolède qu’il a présidés et dont les dispositions sont rapportées dans la collection Hispana. Une autre collection plus antérieure, la Dyonisiana84, reprend la plupart des ordonnances des assemblées orientales, spécialement l’interdiction portée par le concile de Chalcédoine à propos de l’incompatibilité des charges civiles et ecclésiales85. Y figurent aussi les normes des conciles de Carthage sur les defensores ecclesiae86 ainsi qu’une décrétale d’Innocent Ier interdisant de recevoir dans la cléricature le laïc qui a exercé, après son baptême, la profession d’avocat87.
23Toutes ces mesures de défaveur ont été reçues dans l’Hispana, ce qui permet de présumer de la connaissance de l’institution de l’avocat romain en même temps que du refus de sa compatibilité avec la cléricature88.
24Vers le milieu du VIIe, l’Eglise continue d’utiliser les procédures romaines89 : le Code théodosien reste la loi commune90 alors que les compilations de Justinien sont méconnues ou ont peu d’influence dans tout l’Occident. La Lex romana wisigothorum publiée en 654 par Receswinthe maintient le principe selon lequel la loi romaine est la loi de l’Eglise : « secundum lege Romanam, quam ecclesia vivit »91. On ne relève, cependant, au cours de cette période, aucun concile traitant de l’avocat : il faut donc comprendre que les procès se déroulaient sans assistance. Dès lors que les procédures civiles excluaient elles-mêmes la présence de l’avocat, il aurait été surprenant que l’Eglise l’imposât. Il est probable que le droit de l’Eglise s’est, adapté à la culture juridique des lieux où elle se trouve implantée. Elle n’a pas jugé nécessaire de compléter la législation civile dans la matière de l’assistance judiciaire en dehors de la protection des faibles. Le canon 12 du concile de Mâcon de 585 précise que les pauvres ne peuvent être jugés en dehors de la présence de l’évêque ou de son délégué, considérés l’un et l’autre comme des défenseurs : « (…) puisque c’est à notre prévoyance que par la volonté de Dieu sont principalement confiés des veuves et des orphelins, il nous est parvenu que ceux-ci sont maltraités par les juges pour les motifs les plus légers, avec grande cruauté et sans recours, dépourvus qu’ils sont de défenseur. Pour cette raison, nous décrétons que les juges ne citent pas à comparaître des veuves et des orphelins sans avoir averti l’évêque sous la tutelle duquel ils vivent – ou si l’évêque est absent, son archidiacre ou un de ses prêtres (…) »92.
25Le VIIIe siècle voit la diffusion de la collection canonique l’Hispana qui va dominer la discipline de l’Eglise espagnole du VIIe au XIe siècle93. Sa naissance et sa croissance continuent pendant près d’un siècle reflétant la situation exceptionnellement favorable réservée à l’Eglise ibérique, du fait de l’unité politique et de l’étroite collaboration entre pouvoir civil et ecclésiastique. Elle servira de modèle et de source à plusieurs collections canoniques de la renaissance carolingienne, notamment l’Hadriano-Hispana et la Dacheriana. Toutes ces compilations abordent des considérations sur la procédure mais aucune ne renvoie à l’avocat. Là encore, il faut se retourner vers la législation civile pour trouver quelques références. Les Carolingiens n’ont pas introduit d’innovations mais ils fixent, avec plus de précision, les conditions dans lesquelles un plaideur peut être accompagné d’un assistant judiciaire94. Les veuves, les orphelins et, en général, tous les pauvres, ont le droit de solliciter l’aide d’une personne pour rassembler tous les témoins ou pour être informés sur les lois applicables. Elle est parfois qualifiée de tuteur. Elle assume une fonction proche de celle de l’avocat puisque les textes assurent qu’elle est chargée de « rationare pro alio »95. On laisse entendre que son intervention est surtout gracieuse et n’est justifiée que par le seul service de la justice ; elle ne saurait être marquée par la cupidité ou le désir d’une récompense96.
26Reprenant une mesure déjà introduite aux VIe-VIIe siècles, certains capitulaires carolingiens reconnurent aux élites civiles le droit d’être représenté par un intermédiaire qualifié d’advocatus97. Ce privilège fut étendu aux prélats épiscopaux ainsi qu’aux abbés et abbesses dont l’assistance est alors assurée par des avoués. Le cumul de charges, à la fois de juridiction et de représentation judiciaire, couvre le statut de ces advocati ecclesiastici. Personnages de premier plan, ils représentent les autorités religieuses et défendent leurs intérêts devant les justices séculières ; mais, dans le même temps, ils sont aussi des magistrats car ils rendent la justice au nom de l’évêque ou de l’abbé, en particulier, dans les contentieux patrimoniaux entre les clercs et les paysans à propos de terres de l’Eglise, jouissant de l’immunité98. Les autorités séculières ne tardent pas à poser des exigences sur le caractère idoine des advocatus ecclesiae. Charlemagne exige que leur constitution se fasse devant ses missi dominici, après qu’il soit vérifié qu’ils avaient un certain nombre de qualités de science et d’intégrité morale, ces qualités qui seront plus tard requises pour les avocats proprement dits : « Ut episcopi, abbates adque abbatissae addvocatos (…) legem scientes et iustitiam diligentes pacificosque et mansuetos habeant (…). Tales sint, quale eos canonica vel regularis institutio fieri iubet, voluntate Deiu subditos et ad omnes iustitia percifiendi semper paratos, legem pleniter observantes absque fraude maligno, iustum semper iudicium in omnibus exercentes »99. Cet advocatus ecclesiae accompagne désormais les plaignants pour certains procès devant le tribunal du comté et assure leurs défenses comme le patronus de l’ancien droit romain100.
27Quelques conciles, peu nombreux cependant, autorisent l’assistance des orphelins et des veuves par des clercs ou des moines devant les juridictions civiles. Des évêques et des prêtres, on exige la représentation judiciaire par un advocatus, ou, du moins, l’intervention d’un advocatus ecclesiae : « Si vero eorum, qui in clero sunt, propria causa agenda est, cum licentia episcopi et advocato pergat et suae causae cum iustitia suffragetur »101. Les ordonnances sont encore plus sévères pour les moines qui ne doivent pas paraître devant les tribunaux civils (placitis), y compris l’abbé, sans l’assentiment de l’évêque. En outre, si tel est le cas, l’abbé ne doit pas débattre devant le tribunal : seuls ses advocati doivent plaider et répliquer102. Les normes du concile de Rome des 14 et 15 novembre 826 viennent préciser les qualités dont doit être revêtu l’advocatus ecclesiae : qu’il s’agisse d’une affaire ecclésiastique ou privée, l’évêque ou le prêtre doivent choisir un avocat d’excellente réputation « de peur qu’en s’occupant d’affaires temporelles, ils ne compromettent leur récompense éternelle »103. Dans le cas où le clerc est accusé d’un crime public, l’avocat a le devoir de s’abstenir. Et si le prêtre ne peut trouver aucun avocat, l’évêque en cherchera les raisons car si le prêtre a mauvaise réputation, il encourra une peine conformément aux canons104.
B - Des recueils pseudo-isidoriens au décret d’Yves de Chartres
28Les recueils pseudo-isidoriens traitent de procédure et écartent, en général, la représentation judiciaire dans les affaires criminelles105. Dans le détail, on relève que les Faux Capitulaires, réalisés sous la conduite de Benoît le Lévite, se contentent de reprendre quelques dispositions de conciles. On y trouve, en particulier, la prescription du concile de Mayence de 813 qui fait interdiction aux clercs de remplir le rôle de procurator litis106 et de se produire en procès, à moins d’assurer la défense de pauvres107. L’exclusion de toute représentation judiciaire en matière criminelle est reprise : « Quod in causa capitali, vel in causa status, non per procuratores sed per ipsos est agendum »108. Cependant, dans la suite du texte, le terme d’advocatus est écarté et est remplacé par celui de procurator. Il est donc probable que les advocati ne sont pas des avocats au sens propre du terme, mais plutôt des procureurs109. L’hypothèse de la présence d’avocats ne doit pas être complètement écartée ; il est aussi possible qu’il fut envisagé des avocats comme simples conseillers des plaideurs devant les tribunaux. Une chose paraît plus certaine : ce sont les plaideurs eux-mêmes qui devaient, devant les instances ecclésiastiques, assurer leur défense. Les relations de H. Fuhrmann sur le procès qui oppose Hincmar de Reims à Hincmar de Laon à propos de l’autorité des métropolites110, paraissent confirmer cette hypothèse111. Par ailleurs, on admettait toujours une exception : devant les juridictions civiles, l’évêque ou le moine étaient représentés par un avocat112.
29La première mention officielle d’un avocat dans un procès ecclésiastique paraît remonter vers la fin du Xe siècle. Il s’agit du procès d’Arnoul de Reims, dont Abbon de Fleury fut un des défenseurs. Il a pour objet de déposer l’archevêque de Reims à la demande du roi. Le président du concile décrète : « admoveantur si qui sunt studiosi ejus defensionis, habeantque locum contradicendi, suumque Arnulphum quomodolibet defensadi. Sitque hoc nostrum edictum sub disciplina ecclesiastica (…). Excuset nunc, qui eum justas putat habere causas (…) »113. L’exposé des actes du concile indique que trois acerrimi defensores114, proches de l’accusé, interviennent au cours de l’instance dans une séquence qui ressemble à une plaidoirie, alors même qu’il est avéré qu’ils ne sont pas des avocats professionnels. Ils accusent de graves défauts dans la procédure, dénoncent des irrégularités et défendent l’accusé sur la base de textes législatifs115.
30Il a été fait remarquer qu’il fallait s’attacher davantage aux fonctions qu’à la dénomination même d’advocatus116. Il en est ainsi particulièrement pour ceux qui ont succédé aux defensores ecclesiae dans la charge d’intendants des biens temporels de l’Eglise et auxquels la tradition juridique a continué d’attribuer, à l’époque carolingienne, les qualifications d’advocatus, d’agens, de vicedominus ou encore de mandatarius. Toutes désignent une même fonction : celle de l’avoué. Il continue parfois de représenter l’évêque ou l’abbé en justice, mais il demeure surtout le gestionnaire de leurs biens. F. Senn a précisé que « dans la pensée des rois carolingiens, ils étaient destinés à être les intermédiaires entre l’immunité ecclésiastique d’une part, et le pouvoir royal de l’autre »117. Il faut en convenir : le choix du vocabulaire ne rend pas toujours compte du caractère vassal inhérent au statut de l’avoué. Il souligne cependant l’autorité d’une expression, l’advocatus, dont la fortune tient surtout, pour l’époque, au rôle d’acteur judiciaire pour son titulaire.
31Parmi les collections grégoriennes, il faut relever le capitulaire du cardinal Atton de Verceil118 qui comporte l’interdit traditionnel pour les clercs de ne pas se mêler des affaires séculières, excepté les causes dans lesquelles l’Eglise ou les orphelins sont mêlés119. Dans son libelle De pressuris ecclesiasticis, il condamne le recours au duel judiciaire et fait état de l’existence de défenseurs qui ont fait défaut aux évêques condamnés par les impies : « Multi etiam alii sancti Patres tam Veteris quam Novi testamenti falsitate damnati, ab infidelibus diversa pertulerunt tormenta, quibus nec testes, nec defensores adfuerant, qui illis aliquod defendendi praestare viderentur suffragium »120.
32Le XIe siècle marque un tournant dans l’histoire du droit avec la redécouverte du droit romain et la mise en circulation du Digeste. Cet événement prépare le triomphe du droit romain en Occident et dans la législation de l’Eglise121. Le Digeste entre dans le droit ecclésiastique avec la collection Britannica datée de 1090 : « Une masse énorme, une foule. Aucune autre collection, au cours de toute l’histoire de l’Église, n’a rassemblé un dixième de ce nombre exorbitant de pièces. On a donné à ce recueil le nom de Britannique parce que l’unique exemplaire qui en reste se trouve à Londres ; mais selon toute vraisemblance l’original fut composé à Rome »122. Un réseau d’indices relie ce monument123 à Yves de Chartres, dont on sait qu’une partie majeure de son œuvre venait justement de Rome, et qui contribua au succès du droit romain124.
33Son Décret contient le faux capitulaire punissant la cupidité de l’advocatus125. On y retrouve le capitulaire carolingien accordant aux pauvres, si besoin est, une personne « qui rationem eorum teneat, vel pro eis loquatur »126 ainsi que des mentions sur le defensor ecclesiae et l’advocatus ecclesiasticus127. Même si ces ordonnances visent surtout le représentant judiciaire, elles ont été comprises ultérieurement sous le chef de l’avocat proprement dit. Le décret d’Yves de Chartres n’apporte guère d’innovations128 ; il est rappelé que des délais sont nécessaires à l’évêque accusé « ad consilia episcoporum atque amicorum quaerenda »129 et que les clercs n’ont pas le droit de paraître devant les tribunaux civils à moins d’y assurer la « defensio orphanorum aut viduarum »130. Quant aux causes criminelles, la représentation judiciaire y est exclue131.
34Avec la Collection en neuf livres132, on touche à l’une des dernières collections avant la diffusion du décret de Gratien. Cette compilation reprend les titres de la Collection italienne en trois livres : « de accusatione et circumstantiis » à l’intérieur duquel figure un chapitre 35 : « quales debeant esse advocati » et un Livre « de judiciis et judicibus »133. A la veille de cette « époque de renouveau juridique »134, l’avocat ecclésiastique, pris sous le terme d’advocatus ou sous un autre, assoit déjà son autorité dans les débats devant les cours ecclésiastiques, non seulement en assistant les plaignants mais aussi en assurant leurs plaidoiries. La procédure accusatoire était toujours privilégiée et c’est la partie seule qui devait soutenir principalement la cause. Mais elle disposait de la faculté d’être soutenue par un tiers et de préparer sa défense selon un ordonnancement qui allait devenir classique. Pour répondre, devant le tribunal synodal de Liège, des accusations d’insoumission à son évêque et à l’empereur, l’abbé de Saint-Hubert, Thierry II [1086-1126]135 fut accompagné de « conseillers, de défenseurs » ; au cours du procès, ils eurent « la possibilité de se retirer dans un endroit autre que la salle d’audience pour préparer leur défense »136. L’abbé avait pu recruter des avocats qui n’étaient pas des dignitaires ecclésiastiques appartenant à son diocèse. Il ne fait guère de doute que ses défenseurs participaient directement aux débats. Il est attesté, notamment, que Lambert, abbé de Lombes [1137-1149], « mettait son éloquence au service des accusés qui comparaissaient devant le synode épiscopal »137. La pénétration renouvelée du droit romain et les développements de la pratique contentieuse ont ainsi contribué à une meilleure administration du droit de la défense devant les juridictions ecclésiastiques. Les jalons de la professionnalisation de l’advocatus ecclesiae sont désormais posés.
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35Malgré ses lacunes et ses imperfections, le droit médiéval des Ve-XIIe siècles présente un intérêt certain pour l’histoire de l’advocatio ecclesiae. Certes, le vocabulaire des sources est fuyant. A côté de la terminologie du droit romain classique, de signification précise et d’emploi régulier, les textes canoniques livrent des usages pour le moins équivoque. On est loin d’une construction savante de la langue du droit, reflet d’une technique juridique affinée et d’un esprit disposé à manier l’abstraction.
36S’il en est ainsi, c’est que l’Eglise ne dispose pas durablement d’instances judiciaires stables, capables de mettre en jeu les règles du droit processuel. Les mots sont toujours les signes d’une réflexion intellectuelle et, ici, les témoins des mentalités judiciaires. Aux origines, les conciles et les collections canoniques posent la question du droit de la défense. Les rapports incertains entre le nouveau droit, surgi après la disparition de l’Empire d’Occident, et le droit romain, n’épuisent pas les liens existant entre ces deux ordres juridiques138. On doit constater, mis à part les formules de procuratore, de patronus, de defensore, ou encore d’intercessore, que l’advocatus s’est peu à peu assuré une prééminence et un quasi-monopole au début du XIIe siècle. Bien évidemment, même sous ce vocable, on aura remarqué que le vocabulaire n’a pas non plus de grande autorité. La référence à une même expression pour désigner des situations juridiquement différentes témoignent de l’incertitude de la pensée juridique. Les motifs de la représentation judiciaire ne sont pas clarifiés : c’est l’impuissance d’un droit ecclésial, encore en phase de construction où les faits l’emportent sur les analyses juridiques. On aurait pu attendre de plus larges développements du droit carolingien dont le recours systématique à l’écrit dans la pratique légale aurait pu contribuer à dégager des conceptualisations et des classifications139. En vérité, il semble avoir éprouvé quelque méfiance vis-à-vis de cette institution et a préféré conserver la ligne de l’ancien droit romain, en suivant les ordonnances du droit criminel140.
37Il reste que certains textes des dernières décennies du XIe siècle ont introduit des exposés plus assurés et surtout plus objectifs. On devine que la langue des canonistes ainsi que les réflexions qu’elle traduit, gagnent peu à peu les tribunaux ecclésiastiques. L’institution de l’advocatio ecclesiae devant les cours épiscopales apparaît pour la première fois avec certitude dans les collections canoniques du début du XIIe siècle. Les structures judiciaires se conforment alors à l’évolution de l’organisation sociale, politique et économique. Selon toute vraisemblance, l’Eglise a adopté à la fois le système de l’avocat romain, et celui du mandataire des époques mérovingienne et carolingienne. La redécouverte du Corpus Iuris Civilis prélude à son intégration dans les institutions judiciaires canoniques : c’est le décret de Gratien qui l’inaugure dans les premières prescriptions universelles. A n’en pas douter, la centralisation du travail de compilation141 contribuera encore à la rationalisation normative du statut de l’advocatio ecclesiae.
Notes de bas de page
1 Bryan WARD-PERKINS, La chute de Rome. La fin d’une civilisation, Paris, Alma Ed., [2014], 370 p.
2 Il faut préciser préalablement ce qu’était la charge d’avocat en droit romain. Ces brèves observations générales permettront de mieux préciser les questions que soulèvent les persistances du droit romain après la disparition de l’Empire d’Occident. Sous la République, on avait distingué deux sortes d’avocats : l’un, proprement dit, que l’on appelait patronus, considicus. L’autre était plutôt un jurisconsulte – titré advocatus – et ne prenait pas part directement au débat ; il avait pour mission de renseigner les parties sur les points du droit, surtout sous le régime des legis actiones. L’advocatus était davantage un juriste, un conseil juridique plus qu’un avocat. C’était une personne versée dans l’art du droit et qui avait pour mission de soutenir les plaideurs, leur indiquant les différentes voies du droit. Sous l’Empire, le mot advocatus change de sens : il s’agit désormais de l’avocat, en charge direct de la cause. Les anciens jurisconsultes deviennent alors de simples défenseurs qui, en qualité de syndics ou de fondés de pouvoirs, dirigent les affaires contentieuses d’une corporation civile ou ecclésiastique. Sur le plan statutaire, l’office d’avocat ne connaîtra plus guère d’évolutions majeures. Cf. John Antony CROOK, Legal advocacy in the roman world, Ithaca, Cornell University Press, [1995], 225 p. A la fin de l’Empire, il est cependant traversé par une crise morale profonde, dénoncée par les empereurs, à commencer, par Valentinien Ier dans une législation du 10 septembre 368 : « (…) qu’ils – les avocats – ne saisissent point cette occasion pour chercher à faire des profits honteux ; qu’au contraire, ils ne soient guidés dans l’exercice de ces fonctions que par le désir d’accroître leur réputation » [Codex Iustinianus, L. II, Tit. VI, De postulando, VI]. Extrait en latin cité par K. ZOLTAN MEHEZ, Advocatus romanus, Buenos Aires, Victor P. de Zavalia Editor, [1971], p. 240, dans un chapitre intitulé : Decadencia del abogado romano, p. 232-241.
3 Jean GAUDEMET, Les naissances du droit. Le temps, le pouvoir et la société au service du droit, Paris, Ed. Monchrestien, [2006], p. 105.
4 Si la justice ecclésiale du Haut Moyen Âge est si mal connue, c’est faute de sources : parmi celles qui ont été recueillies, rescapées des aléas historiques, on sait tout l’intérêt que présentent les sources littéraires et patristiques, à côté des sources juridiques les plus formalistes. Contrairement aux actes législatifs ou judiciaires, les relations patristiques pour la période des IVe-VIe siècles - outre le fait qu’elles témoignent de l’activité épiscopale d’une époque -, mettent en évidence les distorsions entre les décisions de l’autorité religieuse et l’application qui en est faite. Elles complètent aussi les lacunes documentaires inhérentes à l’époque. De leur côté, les collections canoniques, tout particulièrement les collections systématiques, à partir du VIIe siècle, et plus tard, les capitulaires carolingiens, livrent un miroir de la vie sociale. Beaucoup des règles recueillies dans ces monuments, qui fixent le contenu des procédures, traduisent les conceptions du droit de la défense. Et quelque part, ils portent le témoignage des mentalités sur la justice, sur les rapports entre juges et plaignants. Ce sont des commentaires vivants et animés des lois, en même temps que l’exposé des premiers germes de l’organisation canonique de l’Eglise médiévale. L’étude exhaustive de cette institution aurait exigé des moyens importants, des dépouillements considérables, une enquête dans des manuscrits pas toujours faciles d’accès. C’est pourquoi, on se bornera à jalonner l’itinéraire au travers d’exemples significatifs, tirés des actes de conciles, de plusieurs écrits patristiques, de quelques collections canoniques, essentiellement occidentales, et de l’étude de capitulaires à partir de sources imprimées.
5 La fonction publique romaine elle-même ne disparaît pas. Pendant près de cinq siècles, la militia, le corps des serviteurs de l’Etat, a été préservée, transformée et réinventée pour épouser, avec plus ou moins de fortune, la société de son temps. Voir Bruno DUMEZIL, Servir l’Etat barbare dans la Gaule franque (IVe-IXe siècles), Paris, Ed. Tallandier, [2013], 512 p.
6 Jacques FOVIAUX, De l’Empire romain à la féodalité, t. 1. Droit et institutions, Paris, Ed. Economica, [1993], p. 194.
7 Sur la volonté de rattachement à des procédures d’inspiration juridique romaine, se reporter à Christian LAURANSON-ROSAZ et A. JEANNIN, « La résolution des litiges en justice durant le Haut Moyen Âge : l’exemple de l’apennis à travers les formules, notamment celles d’Auvergne et d’Angers », dans Actes des congrès de la Société des historiens médiévistes de l’enseignement supérieur public, 31e Congrès, Angers, [2000], p. 21-34.
8 Les chrétiens ont eu très tôt la coutume de soumettre leurs différends à la décision de leurs chefs religieux siégeant comme arbitres. Et une fois reconnue par l’Empire, l’Eglise fut autorisée à exercer non seulement sa juridiction spirituelle mais aussi des arbitrages dans les litiges entre particuliers. Ce sera l’origine de la juridiction ecclésiastique admise par l’Etat. En Afrique, le concile de Gratus, vers 348, pose l’organisation des tribunaux ecclésiastiques. Celui de Carthage de 390 établit ou réorganise les tribunaux interdiocésains. Voir Charles MUNIER, Concilia Africae A.345-A.525. Corpus Christianorum. Series Latina CXLIX, Turnholti, Typographi Brepols Editores Pontifici, [1974], p. 12-19.
9 Codex Theodosianus, Liber I, Tit. XXVII dans Les lois religieuses des empereurs romains de Constantin à Théodose II. II. Code Théodosien I-XV…, texte latin Theodor MOMMSEN, Paul MEYER et Paul KRUEGER. Traduction Jean ROUGE et Roland DELMAIRE. Introduction et notes Roland DELMAIRE, Paris, Ed. du Cerf, [2009], p. 28-29.
10 Pierre Giovanni CARON, I tribunali della Chiesa nel diritto del Tardo Impero dans Atti dell’academia romanistica costantiniana. Convegno internazionale 1993, [1996], p. 246-263.
11 Ralph MATHISEN, Roman Aristocrats in Barbarian Gaul, Austin, University of Texas Press, [1993], p. 89-104.
12 On peut même dire qu’il assure la continuité du modèle antique de la cité dans la Gaule du Haut Moyen Age. Se reporter à Stéphane LEBECQ, Les origines franques Ve-IXe siècle, Paris, Ed. Le Seuil, [1990], Nouvelle Histoire de la France médiévale, 1, p. 28.
13 Brigitte BASDEVANT-GAUDEMET, Eglise et pouvoir impérial (IVe-VIe siècles). Quelques aspects du jeu des autorités dans Eglises et autorités. Etudes d’histoire de droit canonique médiéval, Limoges, Presses Universitaires de Limoges, [2006], Cahiers de l’Institut d’Anthropologie Juridique, n° 14, p. 59-60.
14 Odette PONTAL, Histoire des conciles mérovingiens, Paris, Ed. du Cerf, [1989], p. 284- 285.
15 Olivier GUILLOT, « ’Assassin des pauvres’ : une invective pour mieux culpabiliser les usurpateurs de biens d’église, aidant à restituer l’activité conciliaire des Gaules entre 561 et 573 », dans Arcana imperii (IVe-XIe siècle). Recueil d’articles, Limoges, Cahiers de l’Institut d’Anthropologie Juridique, [2003], n° 10, p. 184-219.
16 Bruno DUMEZIL, Les racines chrétiennes de l’Europe. Conversion et liberté dans les royaumes barbares Ve-VIIIe siècle, Paris, Ed. Fayard, [2005], p. 78. Le defensore ne donnera pas toujours des résultats satisfaisants en raison de la vénalité ou de la violence de son titulaire. Jean GAUDEMET, Les institutions de l’Antiquité, Paris, Ed. Montchrestien, [2002], 7e édition, p. 408.
17 La plupart des évêques assimilaient, consciemment ou non, leurs fonctions à celle des magistrats urbains. Certains estimaient même que leur fonction requérait un apparat analogue à celui des fonctionnaires civils et impliquait une vie mondaine, que leurs reprochaient leurs collègues issus des monastères dont ils avaient gardé l’idéal ascétique, tels Martin de Tours au IVe siècle ou Césaire d’Arles au VIe. Cette tendance était d’autant plus naturelle qu’un nombre croissant de ces évêques étaient originaires de l’ancienne aristocratie gallo-romaine : au moins 45 % de ceux dont on connaît un peu plus que le nom pour les IVe-VIIe siècles. Ils n’ignoraient ni la culture latine, ni le droit romain. Zélés serviteurs de leur cité, on a pu les assimiler à des episcopi cardinales, à savoir qu’ils sont devenus aussi indispensables que des charnières (cardines) sont nécessaires au fonctionnement d’une porte. Se reporter à Georg SHEIBELREITER, Der bischof in Merowinger zeit, Wien, H. Böhlaus Nachf, [1983], 312 p.
18 Il n’est pas aisé d’établir l’influence exercée par le droit chrétien sur le droit privé. Les analogies peuvent paraître vagues ou lointaines mais le principe ne peut être mis en question à propos de l’apparition de la notion d’abus de droit, de respect du bien d’autrui, de répression des actes de violence, d’élargissement de la notion de dol, ... Michel HUMBERT, Institutions politiques et sociales de l’Antiquité, Paris, Ed. Dalloz, [2007], 9e Edition, p. 465.
19 Hervé OUDART, L’évêque défenseur des pauvres, correcteur des injustices, libérateur des prisonniers dans les œuvres de Venance Fortunat dans Camenae, [2012], 11, p. 11.
20 Martin HEINZELMANN, Bischofsherrschaft in Gallien. Zur Kontinuität römischer Führungsschichten vom 4. Bis zum 7. Jahrhundert. Soziale, prosopographische und bildungsgeschichtliche Aspekte, München, Artemis Verlag Zürich und München, [1976], p. 179-183.
21 Le Code théodosien comprend, en particulier, deux constitutions relatives à l’audentia episcopalis. Cf. Le Code Théodosien. Livre XVI. Texte latin et traduction française. Introduction, notes et index par Elisabeth MAGNOU-NORTIER, Paris, Ed. du Cerf, [2002] : Theodosiani libri, 2, 12, p. 118-119 ; 2, 47, p. 176-179. Avec le temps, les empereurs limiteront les pouvoirs jusqu’alors reconnus aux évêques : « A la fin du IVe siècle et au début du Ve, des constitutions impériales ont réduit la compétence des évêques aux causes religieuses, mais on reconnaissait aux évêques des pouvoirs d’arbitrage » dans Albert GAUTHIER, Le droit romain et son apport à l’édification du droit canonique, Ottawa, Université Saint-Paul, [1996], p. 89-90.
22 Jean GAUDEMET, La formation du droit séculier et du droit de l’Eglise aux IVe et Ve siècles, Paris, Ed. Sirey, [1979], p. 224.
23 Concile de Bordeaux [384-385] : « (…) permissumque id nostrorum inconstantia qui aut sententiam uel in refragantem ferre debuerant, aut si ipsi suspecti habebantur, aliis episcopis audientiam reseruare, non causam imperatori de tam manifestis criminibus permittere » dans Conciles gaulois du IVe siècle. Texte latin de l’édition C. Munier. Introduction, traduction et notes par Jean GAUDEMET, Paris, Ed. du Cerf, [1977], p. 114.
24 Pierre RICHE, « Evêques, moines et empereurs (610-1054) », dans Histoire du Christianisme, sous la dir. de Jean-Marie MAYEUR, Paris, Desclée, [1993], p. 611.
25 Sur les personnes non admises à témoigner, voir le canon 13 du concile d’Arles de 314, dans Conciles gaulois du IVe siècle, op. cit., p. 52-55.
26 Pierre SARR, « Administration et discipline ecclésiales dans l’Afrique chrétienne d’après quelques lettres de saint Augustin », dans Dialogues d’Histoire ancienne, 32, [2006], p. 83- 100, en particulier p. 89-92.
27 AUGUSTIN, Epist., CCIX dans Migne, Patrologia latina, t. XXXIII, col. 953. Sur le déroulement de la procédure, lire Melchior-Edouard MOMBILI THUMAINI, L’aspect d’autonomie et de communion dans la praxis africaine des recours à Rome (IIIe-Ve siècle). Essai d’interprétation du comportement ambivalent de l’épiscopat africain, Tesi Gregoriana, Sere Storia Ecclesiastica, Roma, Editrice Pontificia Università Gregoriana, [2001], p. 251- 268.
28 Idem, Epist. LXV dans PL, Tome XXXIII, col. 235.
29 Idem, Epist., CCXXXVI dans PL, Tome XXXIII, col. 1033-1034.
30 Kevin UHALDE, Expectations of justice in the Age of Augustine, Philadelphia, University of Pennsylvania, [2007], p. 68.
31 Jean-Marie CARBASSE, Introduction historique au droit pénal, Paris, PUF, [1990], Collection Droit Fondamental, p. 32-33.
32 Elle repose sur cette incise scripturaire de Paul : « Quiconque est enrôlé au service de Dieu ne s’embarrasse pas dans les affaires séculières, s’il veut (afin de) plaire à celui qui l’a enrôlé » [II, Tim. 2, 4]. Déjà au IIIe siècle, Cyprien de Carthage avait interdit aux prêtres et aux diacres de son diocèse de se présenter comme avocats devant les tribunaux, surtout devant les cours civiles [Epist. I, 9]. Référence citée par J.-A. BRUNDAGE, The medieval origins of the legal profession. Canonists, Civilians and Courts, Chicago/London, The University of Chicago Press, [2008], p. 67.
33 Bernard CALLEBAT, La stabilité des ministres ordonnés dans les conciles et les collections canoniques (Ier-VIIe siècles). Naissance et histoire d’un droit, thèse de doctorat, Toulouse, Faculté de droit canonique, [1997], 5 vol., 1800 p.
34 Une nouvelle raison qui allait éclairer et confirmer la doctrine de la stabilité du ministre dans son église, nisi urgeat bonum Ecclesiae, est que, dès le IVe siècle, on suivait la pratique de ne conférer l’ordination sacerdotale ou bien la consécration épiscopale qu’avec un titre spécial, c’est-à-dire avec un titre affectant le sujet dans une église déterminée de laquelle il épousait la cause, d’ailleurs toujours identique et commune à tous les lieux : le service et le bien des fidèles. Lire Cyrille VOGEL, Titre d’ordination et lien du presbytre à la communauté locale dans l’Eglise ancienne dans Maison Dieu, 115, [1973], p. 70-85.
35 Luigi DAL LAGO, L’inamovibilità dei parroci dal Concilio Vaticano I al Codice di Diritto Canonico del 1983, Padova, Edizioni Messagero Padova, [1991], p. 18.
36 H. VIDAL, « L’avocat dans les décisions conciliaires et synodales en France (XIIe-XIIIe siècles) », dans Revue de la Société d’Histoire de la Profession d’Avocat, 3, [1991], p. 1.
37 Bien qu’il ne fixe pas directement son commentaire sur la fonction d’avocat, Ambroise de Milan donne des raisons admises par tous pour condamner le mélange de genres : « Fraudes et turpia lucra decere clericos, quorum est utilitati omnium inservire : illos in causis pecuniariis intervenire nequaquam debere, secus vero in capitalibus ». Voir De officiis ministrorum, l. III, cap. 9 dans PL, t. XVI, col. 161. Au n° 59, se trouve notamment un passage utilisé plus tard par les décrétistes pour interdire aux prêtres l’exercice de la charge d’avocat (idem, col. 162). Se reporter aussi au décret de Gratien, Caus. XIV, qu. V, c. 10 dans Corpus Iuris Canonici, Pars Prior, Decretum Magistri Gratiani, Ed. A. Friedberg, Graz, Akademische Druck-U. Verlagsanstalt, [1959], col. 740.
38 Voir notamment les canons 13 de Clermont [535], 30 d’Orléans [538], 13 d’Orléans [541] dans Jean GAUDEMET et Brigitte BASDEVANT, Les canons des Conciles Mérovingiens (VIe-VIIe siècles). Texte latin de l’Edition de C. de Clercq. Introduction, Traduction et Notes. T. 1, Paris, Ed. du Cerf, [1989], p. 214-217 ; p. 254-255 ; p. 306-307, ou encore le canon 1 de Saint Jean-de-Losne [673] dans Carlo de CLERCQ, Concilia Galliae A.511-A.695. Corpus Christianorum. Series Latina CXLVIII A, Turnholti Typographi, Brepols Editores Pontificii, [1963], p. 315-316.
39 Ce texte avait été précédé d’une ordonnance datée du 3 octobre 416 de Théodose et de Palliadus -reprise dans le Code de Justinien, Livre I, Titre III, 17- interdisant aux clercs de se mêler d’affaires civiles ou administratives en raison de leur état : « Placet nostrae clementiae ut nihil commune clerici cum publicis actionibus, vel ad curiam pertinentibus cujus corpori non sunt adnexi habeant », dans Corpus Iuris Civilis. Codex Iustinianus recognovit Paulus Krueger, Editio stereotypa octava, Volumen Secundum, Berolini, apud Weidmannos, [1906], p. 20.
40 Giuseppe ALBERIGO, sous la dir., Les conciles œcuméniques. Les décrets. Tome II.1. De Nicée à Latran V, Paris, Ed. du Cerf, [1994], p. 202-203. Cette norme avait connu un précédent en Orient avec le canon 6 de la collection des 85 canons apostoliques. Cf. Pericles-Pierre JOANNOU, Discipline générale antique (IIe-IXe siècle). Les canons des conciles œcuméniques, Tome I, 1, Fascicolo IX, Grottaferrata, pontificia Commissionbe per la Redazione del Codice di Diritto Canonico Orientale, [1962], p. 11.
41 Codex Iustinianus, L.I, Tit. III, De episcopis et clericis, LI (LII) dans Corpus Iuris Civilis, op. cit., p. 34-35 : « Generaliter sancimus, omnes vivos reverendissimos episcopos, necnon presbyteros, diaconos, et subdiaconos, et praecipue monachos, licet non sint clerici, immunitatem ipso jure omnes habere tutelae, sive testamentariae, sive legitimae, sive dativae : et non solum tutelae eos esse expertes, sed etiam curae, non solum pupillorum, et adultorum, sed et furiosi, et muti, et surdi, et aliarum personarum, quibus tutores vel curatores a veteribus legibus dantur ».
42 Ce canon figure dans la Collection de Saint-Amand [B.N.Paris, ms. lat. 3846, f°209 R – Bernard CALLEBAT, op. cit., p. 1030 ; 1038 ; 1045] et dans la plupart des collections wisigothiques : la Collection de Novare, l’Hispana, les Excerpta, l’Hispana systématique [Bernard CALLEBAT, op. cit., p. 1160, 1279, 1351 et 1421].
43 G. MARTINEZ DIEZ et T. MARIN MARTINEZ, Concilios visigoticos e hispano-romanos, Pamplona-Madrid, Consejo Superior de Investigaciones Cientificas, [1963], p. 208.
44 Sur la réception des normes en question dans le décret de Gratien, voir Bernard CALLEBAT, op. cit., tome V, p. 1718. Pour ne prendre que l’exemple du canon 3 de Chalcédoine, celui-ci sera reçu aux VIe-VIIe siècles, dans les collections gauloises suivantes : la Collection d’Albi [B.M.Toulouse, ms. lat. 364, f° 5 R – Bernard CALLEBAT, op. cit., p. 848 ; 858 ; 864], la Collection de Saint-Maur [B.N.Paris, ms. lat. 1451, f° 58 V – Bernard CALLEBAT, op. cit., p. 911 ; 919 ; 925], la Collection de Pithou [B.N.Paris, ms. lat. 1564, f° 112 R – Bernard CALLEBAT, op. cit., p. 961 ; 967 ; 971], la Collection de Bigot [B.N.Paris, ms. lat. 2796, f° 115 R-V – Bernard CALLEBAT, op. cit., p. 993 ; 1008 ; 1013] et surtout dans la Vetus Gallica considérée comme la compilation la plus aboutie au VIIe siècle (version primitive). Cf. H. MORDEK, Kirchenrecht und Reform im Frankenreich, Berlin-New York, Walter de Gruyter, [1975], p. 343-617.
45 AUGUSTIN, Serm., CCLXXXV, 5 dans PL, Tome XXVIII, col. 1295.
46 J. BEUTLER, Paraclete dans The new Interpreters’s. Dictionnary of the Bible, Nasville, Abingdon Press, [2006], p. 377.
47 L’étymologie biblique des termes souligne que le verbe grec paraklein signifie appeler auprès de soi, inviter, consoler [A. PAUL, « Paraclet » dans Dictionnaire de la Théologie chrétienne, Paris, Albin Michel, [1998], p. 616]. Quant au substantif paraklêtos, il désigne l’avocat, le défenseur des disciples du Christ [D.-M. CROSSAN, « Paraclete » dans New Catholic Encyclopedia, Washington, Thomson-Gale, The Catholic University of America, [2003], 2d Edition, t. 10, p. 872].
48 FRANCOIS, « Jésus Notre Avocat » dans L’Osservatore Romano, 16, [2013], Ed. Française, p. 2. L’intervention pontificale est à rapprocher du texte du concile de Francfort de juin 794 qui commente la première lettre de Jean, II, 1 : « Mes petits enfants, je vous écris ces choses, afin que vous ne péchiez point. Et si quelqu’un a péché, nous avons un avocat auprès du Père, Jésus-Christ, le juste » : « Nam advocatus mihi ille est, qui pro me iudicem interpellat et causam necessitatis meae propriae tuitione defendit » dans Monumenta Germaniae Historica, Concilia, t. II, p. 135.
49 AUGUSTIN, Epist., CLIII, 10 dans PL, Tome XXXIII, col. 657 : « Defensor ab intercessore plurimum distat. Nam ille diluendis vel obtegendis criminibus operam maxime impendit ; intercessor autem etiam cum de culpa constat, pro poena removenda vel temperanda curam gerit ».
50 Idem, Epist., CLIII, 23 et 25 dans PL, Tome XXXIII, col. 663-664.
51 Ainsi, dans une de ses lettres Epist., VII, 10, Feliux Ennodius, évêque de Ticinium, dénonce l’avarice de certains avocats : « Compulsoris functus officio, ad redhibitionem promissionis suæ vix advocatum cœgi, ut quod advocatis debebat exsolveret. Genus duræ professionis, ut a vobis dicenda præveniam, ad verecundiam clericus inclinavi. Quale sit quo molliuntur obstinatissimi, et quid sibi velit qui raptores spoliat, æstimate (…) » dans Monumenta Germaniae Historica, Auct. Ant., Tome VII, p. 235 : « J’ai assumé le rôle de compulseur et ce n’est pas sans peine que j’ai forcé l’avocat à s’exécuter et à payer aux avocats ce qu’il devait. Dure profession, pour parler comme vous le ferez vous-même. C’était pour moi clerc une besogne fort embarrassante. Jugez vous-mêmes de ce qu’il en coûte pour amener à composition des esprits si opiniâtres et forcer à rendre gorge les ravisseurs ». Sidoine Appolinaire, évêque de Clermont dans la deuxième moitié du Ve siècle, en fait uniquement une relation narrative : Correspondance. Livres VI-IX, Édition bilingue. Texte établi et traduit par A. Loyen, Tome III, n. 198, Paris, Les Belles Lettres, coll. Collection des universités de France - Série latine, [1970], L. VIII, 6, § 5 : p. 94 - L. IX, 13, § 5 : p. 168.
52 V. SAXER, « Germain d’Auxerre » dans Dictionnaire Encyclopédique du Christianisme Ancien, Paris, Ed. du Cerf, [1990], t. 1, p. 1040.
53 Jean GAUDEMET, Les sources du droit de l’Eglise en Occident du IIe au VIIe siècle, Paris, Ed. du Cerf/CNRS, [1985], p. 67 et s.
54 A. AGUDO RUIZ, El advocatus fisci en derecho romano, Madrid, Editorial Dykinson, [2006], 152 p.
55 R.-M. FRAKES, Contra potentium iniurias : the ‘’defensor civitatis’’ and Late Roman Justice, Munich, C. H. Beck, [2001], p. 220-223.
56 F. OPPEDISANO, Maioriano, la plebe e il defensor civitatis dans Rivista di Filologia e di Istruzione Classica, 139, [2011], 2, p. 422-448.
57 La volonté de l’empereur était probablement de conférer une reconnaissance légale à la juridiction de l’évêque. Il aurait ainsi fait preuve d’innovation en tentant d’apporter des réponses différentes à des problèmes analogues, de manière à faciliter l’accès de la justice à des plaignants nécessiteux. R.-M. FRAKES, op. cit., p. 225.
58 J. IGLESIAS-REDONDO, Diccionario de definiciones y reglas de derecho romano, Barcelona, Ariel, [2011], p. 27-28.
59 A. d’ORS, Derecho privado romano, Pamplona, EUNSA, [2008], p. 121 et s.
60 Une lettre datée de 367 des empereurs Valentinien, Valens et Gratien indique que des defensores sont intervenus aux côtés du pape Damase pour contester la propriété d’une église détenue par les partisans de l’anti-pape Ursicinus. Une autre correspondance d’Innocent atteste l’intervention de defensores romains en vue de faire expulser des hérétiques du diocèse de Sienne. Se reporter à C. SOTINEL, « Le personnel épiscopal. Enquête sur la puissance de l’évêque dans la cité », dans L’évêque dans la cité du IVe au Ve siècle. Image et autorité, Rome, Ecole Française de Rome, [1998], Publications de l’Ecole française de Rome, 248, p. 110.
61 Registri Ecclesiae Carthaginensis Excerpta. XII. Notitia de concilio Carthaginensi, 13 iunni 407. c. XCVII : « Placuit etiam ut petant ex nomine prouinciarum omnium legati perrecturi, Vincentius et Fortunatianus, a gloriosissimis imperatoribus, ut dent facultatem defensores constituendi scholasticos, qui in actu sunt uel un munere defensionis causarum, ut more sacerdotum prouinciae, idem ipsi defensionem ecclesiarum susceperint, habeant facultatem negotiis ecclesiarum, quoties necessitas flagitauerit, uel ad obstitendum obrepentibus, uel ad necessaria suggerenda, ingredi iudicum secretaria » dans C. MUNIER, Concilia Africae A.345-A.525., op. cit., p. 215.
62 Theodosiani libri, 2, 38 dans Le Code Théodosien. Livre XVI, op. cit., p. 158-161 qui précise notamment que « (…) tous les avantages qui, provenant de Nous, seront attribués de manière spécifique à l’Eglise, seront portés à la connaissance des gouverneurs et suivis d’effet, selon leur décision, par leurs avocats, et non par l’intermédiaires des présidents de l’assemblée provinciale (’coronati’) ».
63 J. DELMAILLE, « Avocat » dans Dictionnaire de Droit canonique, Paris, Lib. Letouzey et Ané, [1935], t. 1, col. 1525.
64 J. ORLANDIS, Historia de las instituciones de la Iglesia catolica, Pamplona, EUNSA, [2003], p. 135.
65 Cassiodori Senatoris Variae, Monumenta Germaniae Historica, Auctorum Antiquissimorum, Tomus XII, Berlin, Weidmann, [1894], Liber Secundus, II, 30, p. 63 : « Defensores itaque sacrosanctae Mediolanensis ecclesiae pro expensis pauperum (…) »- Liber Nonus, IX, 15, p. 279 : « Nuper siquidem ad nos defensor ecclesiae Romanae flebili allegatione pervenit ».
66 E. CHENON, Histoire générale du droit français public et privé des origines à 1815, Paris, Ed. Sirey, [1926], p. 330.
67 Canon 3 : « Ut nullus episcopus causas perferat nisi per aduocatum, ne, dum causarum tumultus nititur exercere, a fomitem iracundiae semet ipsum uideatur erigere » dans Jean GAUDEMET et Brigitte BASDEVANT, Les canons des conciles mérovingiens…, op. cit., t. II, p. 578-579.
68 F. Martroye relève notamment que dans la législation de Justinien, on ne trouve « aucune trace du représentant de l’Eglise, d’ordre judiciaire, qu’avaient institué les lois d’Honorius. Elles ne sont pas reproduites dans le Code. La Novelle VII du XVIII des Calendes de mai (14 avril) 535, sur l’inaliénabilité des biens des Eglises et établissements pieux, énumère à diverses reprises tous les dignitaires, administrateurs et fonctionnaires ecclésiastiques ou civils chargés de l’observation ou de l’exécution de cette loi (…) ne mentionne pas les ‘defensores ecclesiae’ » dans F. MARTROYE, « Les ‘defensores ecclesiae’ aux Ve et VIe siècles », dans Revue Historique du Droit Français et Etranger, [1923], p. 600.
69 Après le Ve siècle, les sources ne renvoient plus à l’institution du defensor ecclesiae comme mandataire légal de l’Eglise, membre du collège des avocats. Le titre désigne alors un fonctionnaire de l’Eglise d’un autre ordre et d’un statut différent. La charge est occupée par des clercs. Ce defensor est présenté notamment comme un assistant qualifié pour les mariages ; il est surtout un administrateur dont les compétences servent à toutes sortes d’offices : patrimoine, gestion du personnele ecclésiastique, … Voir Novellae Iustinianus, Collatio Sexta, Tit. III, Novella LXXIV, Caput. IV, § 1 dans Corpus Iuris Civilis, op. cit., Volumen Tertium, p. 374-375 : « Mais quant à celui qui remplit une charge intermédiaire, qui exerce des fonctions honnêtes ou une profession estimée, s’il veut s’unir légitimement à sa femme et ne point faire de contrats nuptiaux, il ne le fera pas indistinctement, sans sureté et sans preuve ; mais il se présentera dans quelque église, il déclarera son intention au défenseur de la Très-Sainte-Eglise, lequel en présence de trois ou quatre très révérends clercs, dressera attestation (…) ».
70 Canon 7 : « Casellas uero uel mancipiola ecclesiae episcopi, sicut prisca canonum praecepit auctoritas, uel uasa ministerii, quasi commendata fideli proposito integro ecclesiae iure possideant : id est, ut neque uendere neque per quoscumque contractus res unde pauperes uiuunt, alienare praesumant. Quod si necessitas certa compulerit, ut pro ecclesiae aut necessitate aut utiliate, uel in usufructu uel in directa uenditione aliquid distrahatur, apud duos uel tres comprouinciales uel uicinos episcopos causa, qua necesse sit uendi, primitus comprobetur ; et habita discussione sacerdotali, eorum subscriptione quae facta fuerit uenditio roboretur ; aliter factauenditi uel transactio non ualebit (…) » dans C. MUNIER, Concilia Galliae A. 314 – A 506, Cura et studio, Turnholti, Typographi Brepols Editores Pontificii, [1963], p. 195-196.
71 C. FANTAPPIE, Storia del diritto canonico e delle istituzioni della Chiesa, Bologna, Il Mulino, [2011], p. 73.
72 Jean GAUDEMET, Eglise et Cité. Histoire du droit canonqiue, Paris, Ed. du Cerf/Montchrestien, [1994], p. 217.
73 Lex Romana Burgundionium, Ed. August Friedrich Barkow, Charleston, Nabu Press, [2012], XI, 4 : “Criminalis vero actionis nullatenus posse mandari, nisi ab episcopis aut presbyteris, ad quos tamen mandati exitus revertetur”.
74 Déjà en 506, Alaric II promulgua pour les citoyens romains qui lui étaient soumis une Lex Romana Visigothorum, plus connue sous l’appellation du Bréviaire d’Alaric (Breviarium Alarici ou Breviarium Alaricianum). Voir B. DUMEZIL et M. ROUCHE, sous la dir., Le Bréviaire d’Alaric. Aux origines du Code civil, Paris, Presse Universitaire Paris-Sorbonne, [2008], 371 p. En 654, Receswinthe publiera une nouvelle lex visigothorum applicable à tous ses sujets, romains ou wisigoths, clercs ou laïcs. Supra, réf. 91.
75 J.-N. HILLGARTH, The Visigoths in History and Legend, Toronto, Pontifical Institute of Medieval Studies, [2009], Studies and Texts, n. 166, p. 21-56.
76 ISIDORE DE SEVILLE, Etymologiarum, Liber XVIII, Caput XV dans PL, T. 82, T. 3-4, col. 650.
77 P. CAZIER, Isidore de Séville et la naissance de l’Espagne catholique, Paris, Ed. Beauchesne, [1994], p. 266.
78 « Orator est igitur vir bonus dicendi peritus. Vir bonus consistit natura, moribus, artibus (…) », Etymologiarum, Liber II, Caput III, §. 1 dans PL, LXXXII, T. 3-4, col. 125.
79 « Responsa sunt, quae jurisconsulti respondere dicuntur consulentibus (…) », Etymologiarum, Liber V, Caput XIV, §. 1 dans PL, LXXXII, col. 201.
80 Les textes d’Isidore de Séville renvoient à deux sens : « Patroni a patribus dicti sunt, quod hujusmodi affectum clinetibus exhibeant, ut quasi patres illos regant », Etymologiarum, Liber X, Caput CCVI dans PL, LXXXII, col. 389. « Inter agere causam et dicere. Quod agit patronus, dicit reus », Differentiarum, Liber I, §. 64 dans PL, LXXXIII, col. 17 – idem, Liber I, §. 360 dans PL, LXXXIII, col. 47.
81 « Antiqui forensem eloquentiam caninam facundiam nuncupabant, eo quod causidici in certaminibus causarum (…) », Sententiarum, Liber III, Caput LXVI dans PL, LXXXIII, col. 728.
82 « Praevaricator, malae fidei advocatus et qui, vel in accusando nocitura, vel in defendendo profutura praetereat, aut inutiliter dubieque ponat, mercedis gratia, scilicet corruptus », Etymologiarum, Liber X, Caput CCXXIV dans PL, LXXXII, col. 391.
83 Etymologiarum, Liber XVIII, Caput XV dans PL, CXXXII : §. 6 « Judex dictus, quasi jus dicens populo, sive quod jure disceptet (…) », col. 650 – §. 7 « Accusator vocatus, quasi adcausator, quia ad causam vocat eum quem appellat », col. 650 - §. 7 « Reus a re quam petitur nuncupatus, quia quamvis sceleris conscius non sit (…) », col. 650-651 – « Testes antiquitus superstites dicebantur, eo quod super statum causae proferebantur (…) », col. 651.
84 Dans le registre des collections romaines des Ve-VIe siècles, cette collection avait été précédée de la Collection de Freising du nom de l’unique manuscrit conservé autrefois à la Bibliothèque Capitulaire de Freising et classé actuellement à la Staasbibliothek de Munich [H. MORDEK, Kirchenrecht und Reform im Frankenreich, Berlin/New York, Walter de Gruyter, [1975], p. 9 ; 81 ; 181 251]. Elle se composerait en fait de deux collections canonique (collectio Frisingensis Ia et collectio Frisingensis IIa). Son auteur est inconnu mais paraît bien se rattacher à la renaissance gélasienne. Elle pourrait être l’œuvre de Denys le Petit. C’est dans la deuxième version que l’on retrouve le canon de Chalcédoine [canon 7 = LXXV]. Cette ordonnance figure aussi dans la Quesnelliana qui date de la même époque et dont le lien avec Denys le Petit est aussi avancé [canon 3 = XXV-7]. Se reporter au Codex canonum ecclesiasticorum et Constitutorum sanctae sedis apostolicae dans PL, LVI, col. 359-747. Quant à la Dyonisiana dont on a conservé trois versions (la dernière ne comprend plus que la préface), elle conserve le canon de Chalcédoine dans les deux principales [canon 7 = XIII-7 et III-7].
85 Codex Canonum Ecclesiae Universae dans PL, LXVII, col. 171.
86 Idem, col. 205 (canon 75) et col. 214 (canon 97).
87 Decreta Innocentii papae : « De laicis vero religio tua consuluit quod canones prohibeant. Certum est quidem hoc regulas ecclesiasticas continere : sed non ita definitum est ut de omnibus sit laicis constitutum. Neque enim clerici nasci et non fieri possunt, sed designata sunt genera de quibus ad clericatum pervinere non possunt, id est, si quis fidelis militaverit, si quis fidelis causas egerit, hoc est postulaverit, si quis fidelis administraverit. De curialibus autem manifesta ratio est, quoniam, etsi inveniantur hujusmodi viri quei debeant clerici fieri, tamen saepius ad curiam repetuntur, cavendum ab his est propter tribulationem quae saepe de his Ecclesia provenit » dans PL, Liber LXVII, col. CCXLIX, n. 30.
88 Infra, réf. 43.
89 E. Cortese a montré que la double législation dont pouvaient s’inspirer les peuples wisigoths n’avait rien avoir avec la volonté de codifier le droit barbare. Même sous les apparences d’un droit particulier, il s’agit d’un droit qui admet le droit de l’Empire romain comme droit commun ou général. Il en sera ainsi pour la Lex Romana Visigothorum et la Lex Romana Burgundionum. Cf. E. CORTESE, Le grandi linee délia storia giuridica medievale, Rome, II Cigno Galileo Galilei, [2000], p. 44-48. Ces deux compilations entendaient proposer un cadre, même vulgarisé, pour l’organisation de l’empire universel dont elles se sentaient parties intégrantes. Identifiée comme un droit séculier par excellence par le concile de Séville en 619, la Lex Romana est définie en 775 Lex totius mundi par le moine Gatulfe, de descendance germanique, dans une lettre à Charlemagne. Lire C. PETIT, « Lex mundialis. Expresión visigoda de la ley romana » dans A Ennio Cortese, I. BIROCCHI et alii (sous la dir.), Rome, II Cigno Galileo Galilei, [2001], vol. 3, p. 89-97.
90 C’était d’ailleurs la référence d’Isidore de Séville, avec Paul et Gaius. Voir J. FONTAINE, Isidore de Séville. Genèse et originalité de la culture hispanique au temps des Wisigoths, Turnhoult, Brepols, [2000], p. 95.
91 Cet adage figurait déjà dans la Lex Ribuaria, Tit. LXI, MGH, Legum, Sectio I, t. III, Pars II, p. 109.
92 Cf. Les canons des conciles mérovingiens…, op. cit., p. 470-473.
93 L’Hispana isidoriana est ainsi à l’origine de deux grandes recensions : l’Hispana Juliana, subdivisée en une partie Toletana et une forme Gallica ; l’Hispana Vulgata, ramifiée en une branche Catalane et une branche commune.
94 Cap., III De viduis et pupillis et pauperibus dans MGH, Capitulare Regum Francorum, t. I, p. 281.
95 Capitulare Pippini, n. 5 dans MGH, capitularia Regum Francorum, t. 1, p. 192.
96 Cap. IX : « Ut nemo in placito pro alio rationare usum habeat defensionem alterius iniuste, sive pro cupiditate aliqua, minus rationare Valente vel pro ingenio rationis suae iustum iudicium marrire vel rationem suam minus valente alente opprimendi studio” dans MGH, Capitulare Missorum generale, Tit. I, p. 93.
97 Pippini Capitulare Italicum, n. 10 dans MGH, Capitularia Regum Francorum, t. 1, p. 210.
98 Capitulare Aquisgranense, n. 14 dans MGH, Capitularia Regum Francorum, t. 1, p. 115. Idem, Capitulare Missorum Aquisgranense primum, n° 809, p. 151 et Pippini Capitulare Italicum, n° 11, p. 210.
99 Capitulare Missorum generale, n° 13 dans MGH, Capitularia Regum Francorum, t. 1, p. 93.
100 R. LAPRAT, « Avoué, avouerie ecclésiastique », dans Dictionnaire d’Histoire et de Géographie Ecclésiastiques, Paris, Letouzey et Ané, [1931], t. 5, col. 1227.
101 Canon 11 du concile de Châlon-sur-Saône de 813 dans MGH, Concilia, t. II, p. 276.
102 Canon 12 du concile de Mayence de 813 dans MGH, idem, t. II, p. 264.
103 Canon 19 du Concile de Rome de 826 dans MGH, idem, p. 575.
104 Cette précision figurant au canon 20 du même concile sera reprise dans le Décret de Gratien : Caus. V, qu. III, c. 3.
105 B.-E. FERME, Introduccion a la historia de las fuentes del derecho canonico. El derecho antiguo hasta el Decretum de Graciano, Buenos Aires, Editorial de la Universidad Catolica, Argentina, [2006], p. 150-159.
106 Canon CXXIV, Liber Sextus, dans MANSI, Sacrorum concilium nova et amplissima collecito. Supplementum ad tomum decimum septimum, Parisiis, Expensis Huberti Welter Bibliopolae, [1902], t. 17 B, col. 944 : « Clericus vel monachus neque exactor publicarum, neque conductor, aut vestigalium magister, vel curator domus, vel procurator litis, vel fideijussor in talibus causis fiat (…) ».
107 Canon XLVI, Additio quarta, Idem, col. 1202-1203 : « Munera injusta accipere vel etiam dare, pro aliquo seculari conquestu pretio aliquem conducere, contentiones & lites vel rixas amare, in placitis secularibus disputare, excepta defensione orphanorum aut viduarum, conductores aut procuratores esse secularium rerum, turpis verbi vel facti joculatorem esse, vel jocum secularem diligere, alea samare, ornamentum inconveniens proposito suo quaerere, in deliciis vivere velle, gulam, ebrietatem sequi, pondera injusta vel mensuras habere, negocium injustum exercere (…) ».
108 Canon CCCVII, Liber Septimus, idem, col. 1102 et Canon XIV, Additio quarta, idem, col. 1194.
109 Dans une lettre attribuée au pape Clément, Cap. IV, il est formulé que le prêtre ne peut pas être advocatus litium : « Te quidem oportet inreprehensibiliter vivere, et summo studio niti, ut omnes vitae huius occupationes abicias, ne fideiussor existas, ne advocatus litium fias, ne in ulla aliqua occupatione prorsus inveniaris mundialis negoti occasione perplexus » dans P. HINSCHIUS, Decretales pseudo-Isidorianae et Capitula Angilramni, Lipsiae, Ex officina Berhnard Tauchnitz, [1863], 771 p. Dans une pseudo-décrétale de Félix, Cap. XIII, on ajoute l’interdiction pour l’infâme d’être procureur : « Infamis enim persona nec procurator potest esse nec cognitor (…) », idem, p. 202.
110 Le contentieux avait été bâti, de part et d’autre, sur les Fausses décrétales auxquelles les protagonistes avaient ajouté d’autres faux. Il dura de 869 à 871. En novembre 869, Hincmar de Laon présenta à son clergé, assemblé à Gondreville, un recueil appelé Pittaciolus qui comprenait des extraits des décrétales d’Isidore Mercator et des Capitula Angilramni, ainsi que de fausses lettres des papes Léon Ier, Gélase, Grégoire Ier et Nicolas Ier. En particulier, le document entendait protéger l’évêque contre le synode provincial, en tant qu’organisme judiciaire. Hincmar de Reims avait réagi dans un style typiquement haut-médiéval. Il répliqua en utilisant et en fabriquant d’autres faux. Si la victoire revint à Hincmar de Reims, ce ne fut pas parce que les faux de Hincmar de Laon avaient été plus graves, mais parce que cet évêque s’était aliéné le clergé de son diocèse en le forçant, sous menace d’excommunication et même de mort, à accepter le Pittaciolus et aussi parce qu’il s’était fait un ennemi personnel du roi de Francie occidentale, Charles le Chauve, en pactisant avec ses ennemis. Dossier complet établi par H. FUHRMANN, Einfluss und Verbreitung der pseudoisidorischen Fälschungen von ihrem Auftauchen bis in die neue Zeit. 1re partie. Stuttgart, Anton Hiersemann, [1972], Monumenta Germaniae historica, vol. 24, n° l, LV+236 p.
111 On relèvera au passage cette incise d’Hincmar de Reims qui fait état de l’attribution aux saints du rôle d’avocats en faveur des hommes ; il qualifie « Saint Rémi » de « patronus et defensor » ; n’est-ce pas pour cette raison qu’on les appelle « patrons » ? Voir HINCMAR de Reims, Vita Remigii dans MGH, Scriptorum rerum merovingicarum, t. III, p. 333.
112 HINCMAR de Reims, de presbyteris criminosis, Caput 29 : « Episcopis (…) et presbyteris sacris legibus praestatur, ut in talibus causis misso procuratore, id est dato pro se advocato respondeant » dans PL, T. CXXV, col. 1108.
113 Cap. XVII, Remense Conciliabulum [991] dans PL, T. CXXXIX, col. 301.
114 Cap. XVII, idem, col. 301-302 : « (…) sed aderant acerrimi defensores, scientia et eloquentia insignes, Johannes scolasticus Autisioderensis, Romulfus abbas Senonensis, Abbo rector coenobii Floriacensis, ignorantia praeteritorum gestorum pressi, et anathemate ad dicendum provocati ».
115 Cap. XXIII, idem, col. 308-309.
116 Infra. § I.2 à propos des defensores ecclesiae et de la représentation judiciaire.
117 F. SENN, L’institution des Avoueries ecclésiastiques en France, Charleston, Bibliolife, [2013], 2e édition, p. 21 et s.
118 A. STICKLER, Historia Iuris Canonici Latini. Instituttiones Academicae. I. Historia fontium, Torino, Librariam Pont. Athenaeci Salesiani, [1950], p. 166-167.
119 Capitulaire du Cardinal Atton, Cap. XLVII dans Mansi (J.-D.), op. cit., t. 19, col. 253.
120 De pressuris ecclesiasticis, Pars I dans PL, T. CXXXIV, col. 57.
121 G. SCELLINI, Storia del diritto canonico, Roma, Edizioni Scientifiche Italiane, [2008], p. 25.
122 E. CORTESIO, Théologie, droit canonique et droit romain. Aux origines du droit savant (XIe-XIIe s.) dans Comptes rendus des séances de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 146, [2002], 1, p. 57-74.
123 Cette collection contient de larges extraits d’anciens registres pontificaux qu’on ne pouvait consulter qu’à Rome. L’origine romaine de la première rédaction est aujourd’hui admise. Cf. A. FIORI, « La ’collection Britannica’ e la reimersione del Digesto », dans Rivista internazionale di Diritto comune, 9, [1998], p. 84.
124 « Par l’ampleur de son information, le décret d’Ives surclasse (…) tous ses prédécesseurs. S’il a eu des modèles, son apport personnel est important. Nombreux sont ici les emprunts directs aux textes du droit romain, qui constitue d’ailleurs l’un des caractères saillants du Décret » cité par J. GAUDEMET, « La doctrine des sources du droit dans le Décret de Gratien », dans La formation du droit canonique médiéval, London, Variorum Reprints, [1980], VIII, p. 9.
125 Yves de CHARTRES, Decreti, Pars XVI, Cap. CCCLV dans PL, T. CLXI, col. 966.
126 Idem, Pars XVI, Cap. CCLXXIV dans PL, T. CLXI, col. 955.
127 Idem, Pars III, Cap. CCXVIII dans PL, T. CLXI, col. 250 : « Ibi namque (ut dicunt) Valentinus nomine, Mediolanensis Ecclesiae defensor, defunctus est (…) »- Pars VII, Cap. XXIII dans PL, T. CLXI, col. 550 : « De praesentium portitore quod defensor factus non est (…) »- Pars VII, Cap. 107 dans PL, T. CLXI, col. 568 : « (…) Nequaquam tamen contentiones aut lites aliquas ibi movere praesumat, sed quid quid quaerendum vel etiam respondendum sit, per advocatos suos hoc faciat »- Pars XVII, Cap. CLXII dans PL, T. CLXI, col. 935 : « Si post tres contestationes invenerit maritus uxorem suam in sacro loco cum suspecto homine colloquium habentem, tradat cos ecclesiae defensori vel aliis clericis, ut separatim custodiantur in periculo defensoris vel clericorum, ut auditos judex mittat ad religiosum civitatis episcopum (…) ».
128 P. LANDAU, “Das Dekret des Ivo von Chartres : Die handschriftliche Überlieferung im Vergleich zum Text in den Editionen des 16. Und 17. Jahrhunderts”, dans Zeischrift der Savigny-Stiftung für Rechtsgeschichte (Kanonistische Abteilung], 70, [1984], p. 1-44.
129 Idem, Pars V, Cap. CCXCVI dans PL, T. CLXI, col. 414.
130 Idem, Pars VII, Cap. CVIII dans PL, T. CLXI, col. 569.
131 YVES de CHARTRES, Panormia, Lib. IV, Cap. LVI dans PL, T. CLXI, col. 887 : « In criminalibus causis, nec accusator, nisi per se aliquem accusare potest, nec accusatus per aliam personam se defendere permittitur ».
132 J. GAUDEMET, Les sources du droit canonique. VIIIe-XXe siècle, Paris, Ed. du Cerf, [1993], p. 100.
133 Ad Opp. S. Anselmi Lucensis Appendices, Lib. VI, Cap. XXXV dans PL, CXLIX, col. 563-564.
134 E. PETIT, Pourquoi le droit canonique ?, Paris, Parole et Silence & Collège des Bernardins, [2013], p. 14.
135 Le contentieux opposait depuis plusieurs générations l’abbaye à l’Ordinaire qui reprochait aux moines de s’être soustraits de son autorité en faisant allégeance à Rome et en bénéficiant d’une exemption apostolique. L’accusation était rejetée par les intéressés qui soutenaient seulement avoir voulu faire confirmer les biens du monastère par le Pontife romain.
136 J. MAQUET (J.), « Faire justice » dans le diocèse de Liège au Moyen Âge (VIIIe-XIIe siècles). Essai de droit judiciaire reconstitué, Genève, Librairie Droz, [2008], p. 168.
137 Idem, p. 169.
138 En particulier s’agissant du droit de l’Espagne wisigothique, se reporter à T. TOMAS Y VALIENTE, Manual de historia del derecho espanol, Madrid, Tecnos, [2012], p. 102-105.
139 R. McKITTERICK, The Carolingians and the written word, Cambridge, Cambridge University Press, [1989], p. 134 et s.
140 Sur les principes généraux de la protection juridique à l’époque carolingienne, voir E. SASTRE SANTOS, Storia dei sistemi di diritto canonico, Roma, EDIURCLA, [2011], p. 187-188.
141 A. WINROTH, The Making of Gratian’s Decretum, Cambridge, Cambridge University Press, [2007], Cambridge Studies in Medieval Life and Thought, Fourth Series, Book 49, 268 p.
Auteur
Professeur à la Faculté de droit canonique de Toulouse directeur du C.E.H.D.C. / Laboratoire Histoire, Théologie & Religions
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Les Facultés de droit de province au xixe siècle. Tome 1
Bilan et perspectives de la recherche
Philippe Nélidoff (dir.)
2009
Les Facultés de droit de province au xixe siècle. Tome 2
Bilan et perspectives de la recherche
Philippe Nélidoff (dir.)
2011
Les désunions de la magistrature
(xixe-xxe siècles)
Jacques Krynen et Jean-Christophe Gaven (dir.)
2012
La justice dans les cités épiscopales
Du Moyen Âge à la fin de l’Ancien Régime
Béatrice Fourniel (dir.)
2014
Des patrimoines et des normes
(Formation, pratique et perspectives)
Florent Garnier et Philippe Delvit (dir.)
2015
La mystique déracinée. Drame (moderne) de la théologie et de la philosophie chrétiennes (xiiie-xxe siècle)
Jean Krynen
2016
Les décisionnaires et la coutume
Contribution à la fabrique de la norme
Géraldine Cazals et Florent Garnier (dir.)
2017
Ceux de la Faculté
Des juristes toulousains dans la Grande Guerre
Olivier Devaux et Florent Garnier (dir.)
2017