La critique de la justice administrative par les magistrats de l’ordre judiciaire au xixe siècle
p. 345-353
Texte intégral
1Il n’y a guère que des professeurs de droit public et des conseillers d’Etat pour avoir cru en l’existence d’une justice administrative, du moins au cours du premier XIXe siècle (avant la loi du 24 mai 1872), période dont il va être ici question. Plus grave, et surtout plus problématique pour nous autres universitaires, il n’y a guère que des professeurs de droit public et des conseillers d’Etat qui aient écrit sur l’existence supposée de cette justice en tant qu’elle serait une justice à part entière, un ordre de juridiction évoluant en parallèle à l’ordre judiciaire. On peut comprendre que des publicistes aient cru à leurs mythes, par intérêt de classe. Il ne nous serait en revanche que peu pardonné, à nous universitaires, de ne pas douter en bonne foi de l’existence et/ou de la pertinence d’une justice administrative qui ne figure gravée sur aucun fronton des constitutions révolutionnaires, étant entendu que ce sont les constitutions de la Révolution, et non leur liquidation en frimaire an VIII, qui sont pour nous l’horizon indépassable des principes de droit public, d’organisation des pouvoirs et, ne feignons pas de l’ignorer, de déclaration de nos droits. C’est ainsi que si nous prenons la Révolution au sérieux, et si nous supposons avec elle que la liberté, droit de nature, est ce autour de quoi s’articule le droit constitutionnel, alors la question de l’existence et de la légitimité de la justice administrative est de celles que l’on peut sérieusement se poser. Ce qui suppose d’abandonner un temps la vision exclusive de nos publicistes et de nos conseillers d’Etat pour chausser d’autres lunettes, entendre d’autres discours. Ce qui suppose d’aller voir dans le camp d’en face, celui des vaincus : l’ordre judiciaire.
2L’histoire, d’ordinaire, pardonne assez peu aux vaincus. Les vainqueurs nous réconfortent intellectuellement. Il n’est pourtant pas exagéré de dire que le judiciaire fut vaincu par le triomphe de la justice administrative : c’est par retranchement des compétences du juge judiciaire, qualifié pourtant de naturel par la loi des 16-24 août 1790, que la compétence contentieuse de l’administration s’est imposée. C’est par droit de conquête politique, plus qu’en vertu des principes constitutionnels, que l’administration a étendu son empire en direction du judiciaire, contre le judiciaire. En un mot : comme le régime napoléonien qui lui donna évidemment naissance, la justice administrative viole la liberté, clé de voûte de l’ordre constitutionnel. Et du point de vue judiciaire, elle la viole au moins de deux façons : elle est contraire au libéralisme constitutionnel, sachant que les juges prennent au mot la promesse de Louis XVIII d’octroyer une charte libérale, en forme d’hommage contraint aux principes révolutionnaires comme en témoigne le titre I de la dite charte qui est en quelque sorte une version up to date de la déclaration des droits. C’est le premier temps de la contestation. Dans un second temps, sachant que l’impérialisme administratif survit aux chartes, il apparaît à certains juges que la justice administrative, comme gardienne des prérogatives du pouvoir administratif, est antinomique de la liberté en soi.
I
3C’est un fait connu que la justice administrative est violemment contestée aux commencements de la Restauration, en tant qu’elle relève de l’autoritarisme napoléonien en même temps qu’elle révèle cet autoritarisme1. L’administration centralisée n’est pas compatible avec la promesse libérale de la charte : les administrations doivent être à nouveau élues afin que la représentation, par pallier, réorganise une nation soucieuse d’exprimer et de défendre ses libertés politiques. Quant à la justice administrative, qui permet, de l’opinion des libéraux, à l’Etat d’exercer une puissance inconditionnée, elle est inconstitutionnelle. La charte, qui tait l’existence d’une telle justice, en témoignerait : elle ne garantit que l’ordre judiciaire, prohibe les juridictions d’exception et promet de n’y rien changer qu’en vertu d’une loi. Malgré un devoir de réserve lié à leur office et une situation de dépendance à l’égard de la couronne qui ne favorise guère la liberté d’expression, certains magistrats vont se faire l’écho de ce discours, répandu sous les deux Restaurations, et qui consiste à dire que la justice administrative est inconstitutionnelle, qu’elle contredit tous les principes d’une sage organisation politique parce qu’elle ne serait pas à proprement parler une justice. Dès 1818, année où Louis-Marie de Cormenin et Jean-Baptiste Sirey prennent la défense du Conseil d’Etat2, un magistrat judiciaire conteste l’existence de la justice administrative. Il le fait au nom du libéralisme politique. Il s’agit d’Alphonse-Marie-Marcellin-Thomas Bérenger (1785-1866), conseiller auditeur puis avocat général à la cour d’appel de Grenoble, démissionnaire en 1814 par refus de prêter serment au nouveau régime (il sera élu en 1827 dans l’opposition constitutionnelle, pair de France après 1839 puis magistrat sous la seconde République). « L’auteur de ce livre, ayant le bonheur de vivre sous un gouvernement représentatif, et par conséquent dans un Etat libre, a cru pouvoir écrire avec liberté sur les institutions judiciaires de son pays. Il a trouvé qu’elles étaient incompatibles avec la monarchie constitutionnelle, et il l’a dit3 ». En effet, les Conseils de préfecture, « pas plus que le Conseil d’Etat, qui juge les appels de leurs arrêtés, n’ont une physionomie judiciaire. Ce sont de véritables commissions. Les membres qui les composent ne sont point des juges, ils n’en ont ni les mœurs, ni le caractère, ni la dignité : ils sont privés d’indépendance, et leurs institutions violent la charte, qui veut que la justice soit rendue par des juges inamovibles4 ». Second reproche logique : « La manière de procéder devant ces espèces de commissions n’est environnée d’aucunes formes ; les affaires n’y sont point instruites ; il n’y a point de plaidoiries, point de séances publiques, rien de ce qui peut mettre le juge en garde contre l’erreur, ou préserver les parties de sourdes insinuations... Tout est surprise, tout se fait dans le mystère, sur des mémoires qui peuvent n’être pas lus, et dont il est facile de soustraire la connaissance aux intéressés5 ». Troisième reproche : la « justice » administrative ne fait qu’arbitrer des intérêts et ne règle pas des droits. Il n’existe pas en un mot de droit administratif à proprement parler parce qu’il n’existe pas de législation administrative cohérente et de jurisprudence réglée ; dès lors ce que l’on nomme le droit administratif n’est que la balance des intérêts où l’intérêt public domine l’intérêt privé6.
4Ce sont ces mêmes critiques que va reprendre un second magistrat sous le règne de Charles X, mais de façon beaucoup plus complète en y consacrant un ouvrage en deux tomes. Il s’agit de François-Nicolas Bavoux qui publie en 1828 un fracassant Des conflits ou empiètement de l’autorité administrative sur le pouvoir judiciaire. On pourrait résumer cet ouvrage par le constat que dressera Tocqueville dans L’Ancien Régime et la Révolution. A savoir : la séparation des pouvoirs et des autorités, posée par la Constituante, a été appliquée en France au profit exclusif de l’administration et au détriment du judiciaire7. En effet, la loi des 16-24 août 1790 a interdit formellement au judiciaire de faire acte d’administration. Seulement, et on l’oublie trop, des législations empiriques, la jurisprudence du Conseil et un régime autoritaire (le régime napoléonien) ont laissé l’administration dans la justice puisqu’il est supposé exister une justice administrative dont le champ des compétences est préservé unilatéralement par l’exécutif, par l’intermédiaire des préfets, qui élèvent les conflits comme autant d’interdits en direction de l’indépendance de la justice. La séparation des autorités n’a donc pas eu complètement lieu et la garantie des lois n’existe pas, les particuliers pouvant être détournés des juges pour être réorientés vers l’administration d’Etat, qui ne comporte aucun juge naturel puisque l’administrateur qui juge n’est ni inamovible, ni indépendant. Le libéralisme de Bavoux (il siège à la Chambre comme libéral étant élu à la place de Royer-Collard qui lui cède sa circonscription) part d’un présupposé politique : la charte est d’inspiration révolutionnaire dans la mesure où elle sépare les pouvoirs afin qu’ils s’équilibrent (le fameux régime représentatif fondé sur la légitimité électorale qui contrebalance le pouvoir royal institué) ; et non seulement elle sépare les pouvoirs exécutif et législatif mais en outre Bavoux prétend que la charte institue une tripartition des pouvoirs : le judiciaire est bien un pouvoir à la puissance nulle. Il doit être indépendant institutionnellement de ceux qui font les lois et de ceux qui les font exécuter : l’office du juge ne doit pas être perturbé ou arrêté par les corps constitués pour la garantie des lois ; en cela il y a pouvoir. Sa puissance est nulle puisque le judiciaire ne peut dénaturer les lois faites ni pénétrer le champ de l’autorité chargée de pourvoir à leur exécution. La pratique des conflits, et la dévolution à l’administration d’un contentieux arraché à la justice, sont des pratiques inconstitutionnelles. Ne serait-ce que parce que l’article 62 de la charte précise que Nul ne peut être distrait de ses juges naturels et que l’article 57 précisait bien que les juges, nommés par le Roi, sont inamovibles. Le Conseil d’Etat, créature de l’autoritarisme napoléonien en ce qu’il mélange les trois pouvoirs, ne peut être qu’incompatible avec le régime représentatif qui divise les pouvoirs. Sur ce point Bavoux connaît ses classiques ; il cite Daunou et son Essai sur les garanties individuelles de 1819 : « On donne des attributions judiciaires à un Conseil d’Etat que la loi fondamentale ne reconnaît point ; qui peut bien exister dans une monarchie absolue, mais qui n’a point de place dans un véritable système représentatif, parce que n’étant ni responsable, ni indépendant, remplissant et confondant des fonctions de toute espèce, législatives, ministérielles, administratives et enfin judiciaires, il est réellement indéfinissable et incompatible par sa nature avec une constitution proprement dite8 ».
5Troisième magistrat député qui, au nom de son libéralisme politique, conteste l’existence même de la justice administrative : Hyacinthe Colombel (1781-1851), président du tribunal civil de Nantes, dont la carrière faillit connaître un terme prématuré puisqu’il se rallia activement à Napoléon durant les Cent jours. Croyant alors lutter contre l’intransigeance des légitimistes de la première Restauration, il fait partie des libéraux nantais qui rédigent, le 23 avril 1815, une adresse à l’intention des braves Rennais. Colombel, qui avait combattu les chouans de Cadoudal comme engagé volontaire, espère créer une dynamique comparable à celle qui avait embrasé la bourgeoisie rennaise en 1789. Plus prosaïquement, l’adresse est un acte d’allégeance à l’empereur, dont on attend et espère qu’il offre une constitution libérale promise au suffrage universel. Radié de la magistrature comme dangereux bonapartiste, il ne doit sa survie en tant qu’avocat que parce qu’il consent à signer une rétractation de sa conduite pendant les Cent-Jours et une promesse de soumission inviolable et sans bornes à l’autorité royale. La Monarchie de Juillet sauve sa carrière : dès le 23 août 1830, il est nommé président du tribunal civil de Nantes où il exerce jusqu’à sa mort (son fils Evariste est maire de Nantes de 1848 à 1852). Pour Colombel, la législation du début des années 1830, venue améliorer le fonctionnement de la justice administrative, particulièrement celle du Conseil (publicité des débats, commissaires du gouvernement etc.), ne résout pas le problème au fond qui est celui de l’inadéquation entre justice administrative et constitution. En 1840, dans son ouvrage De la juridiction administrative en France, il réclame donc que le droit administratif soit mis « en harmonie avec les principes de la constitution9 », ce qui signifie, en un mot que le pouvoir exécutif ne doit plus empiéter sur le judiciaire, conçu comme gardien exclusif des libertés. Le judiciaire n’est donc pas une autorité sous tutelle de l’exécutif comme l’enseignent la plupart des publicistes à la même époque : « Nous préférons la division admise par plusieurs de nos constitutions, lesquelles ont reconnu trois pouvoirs, parfaitement et essentiellement distincts, le Pouvoir législatif, le Pouvoir exécutif et le Pouvoir judiciaire10 ». Après l’adoption de la loi de 1845 relative au Conseil d’Etat, la critique est toujours de rigueur : il n’y a pas de justice administrative à proprement parler dès lors qu’est maintenu le principe de la justice retenue, c’est-à-dire inféodée à l’exécutif. C’est la critique qu’exprime le conseiller à la Cour de cassation Charles Guillaume Hello (1787-1850) dans la troisième édition, publiée en 1849, de son ouvrage Du régime constitutionnel dans ses rapports avec l’état actuel de la science sociale et politique. Il estime que la justice administrative retenue consacre la victoire de « l’esprit de l’Empire » sur « l’esprit de la charte11 ».
II
6L’autoritarisme du second Empire, pendant les dix à quinze premières années de son existence, fait taire la contestation judiciaire, y compris en jurisprudence où les magistrats abandonnent la plupart de leurs revendications à l’égard d’un Conseil d’Etat, officiellement présidé par l’empereur, et qu’ils n’osent plus qualifier de justice d’exception. Néanmoins, dans les années 1860, le libéralisme fait son grand retour comme programme d’opposition au régime. Notamment sur le chapitre de la question décentralisatrice où le manifeste de Nancy (1865) réclame notamment la suppression des Conseils de préfecture. Mais ce qui caractérise surtout ce libéralisme des années 1860, c’est qu’il a en quelque sorte opéré sa mue, qu’il a changé de nature : de plus en plus libéralisme de l’individu et de moins en moins libéralisme réalisé par l’Etat et la politique. Du moins le libéralisme de l’individu est-il celui de l’opposition à la toute puissance administrative du régime alors que le libéral-étatisme trouve de fervents partisans du côté de la défense d’un Etat administratif instituteur du social, pour reprendre la forte expression de Dupont-White. Le malentendu vient précisément de ce que le libéralisme au plan politique peut très bien coexister avec l’absence des libertés au plan civil comme le souligne, notamment, Prévost-Paradol12. Le second Empire en témoigne qui consacre une démocratie politique (suffrage universel et représentation élue) où les libertés civiles demeurent sous tutelle du gouvernement, c’est-à-dire, concrètement, administrées et soumises au régime des autorisations préalables. C’est dans ce contexte d’une opposition de fond à l’autoritarisme administratif, mené notamment par le parti libéral d’Edouard Laboulaye, qu’un magistrat angevin, Eugène Poitou, publie, en 1869, un des essais les plus pénétrants qui soient sur l’administration : La liberté civile et le pouvoir administratif en France. Comme Laboulaye, Poitou souhaite dépasser le seul débat relatif à la décentralisation qui occupe tous les esprits depuis le manifeste de 1865 : « La centralisation excessive tue la vie communale, j’en conviens : mais l’autocratie administrative met en péril la liberté civile13 ». Il renverse donc la perspective par rapport à la problématique des libéraux de la première génération : ce n’est pas forcément par un régime politique libéral que l’on résout la question de la liberté mais en posant, d’emblée, la liberté civile comme pierre angulaire de l’organisation sociale : « La liberté civile est la première de toutes les libertés, celle sans laquelle toutes les autres ne sont rien. C’est donc elle qu’il faut assurer d’abord ; c’est à elle qu’il importe avant tout de donner des garanties14 ». De ce point de vue la liberté a été mal comprise en France : « Nous avons pris pour elle l’égalité démocratique, qui est la plus ardente de nos passions, mais qui n’est au fond que [...] le nivellement des conditions civiles et politiques ; et qui peut tout aussi bien se concilier avec le despotisme qu’avec la liberté. [...] Nous avons pris pour elle la liberté politique, qui n’est que l’ensemble des garanties organisées pour assurer l’intervention du pays dans son gouvernement [...]. Rien de tout cela n’est la liberté. Que me fait l’égalité, si vous n’avez à offrir que l’égalité dans la servitude ? M’importe-t-il beaucoup que la nation soit souveraine, si moi, citoyen, je suis esclave ? Et de quoi me serviront les libertés politiques, si ma liberté individuelle m’est enlevée ?15 ».
7Or, force est de constater selon notre auteur que le gardien de la liberté n’est pas institué en France. Au contraire : alors que le régime représentatif, garant des libertés politiques, est assuré par une Chambre élue au suffrage universel, alors même que la démocratie sociale règne grâce à la centralisation qui maintient l’égalité des conditions, le pouvoir administratif, parce qu’il prétend justement instituer le social à partir d’une poussière d’individus, tient toujours sous sa coupe les libertés individuelles16. « Quel est le pouvoir qui protégera le droit individuel, qui défendra la personne, la propriété du citoyen, contre les caprices de cette puissance formidable, armée de deux cent mille bras, qui s’appelle le pouvoir administratif ?17 ». De l’opinion d’Eugène Poitou, ce tiers garant ne peut être que le judiciaire. Mais il faut pour ce faire, établir ou rétablir une tripartition des pouvoirs en France, c’est-à-dire réhabiliter le judiciaire en tant qu’il serait garanti de toute intrusion de l’exécutif et de son administration dans sa sphère : « Là où la justice n’est pas souveraine, là où elle n’a pas le dernier mot, il n’y a pas de liberté parce qu’il n’y a pas de garantie18 ». Par conséquent, « [i]l faut ou modifier notre régime administratif, ou renoncer à la liberté19 ». En un mot, il faut accomplir une séparation des autorités conforme à la séparation des trois pouvoirs, c’est-à-dire sortir enfin l’administration de la justice après que la Révolution ait sorti la justice de l’administration.
Notes de bas de page
1 G. RAÏSSAC, Les controverses relatives à la juridiction administratives de 1789 à la Deuxième République, Paris, Sirey, 1937 ; F. BURDEAU, « La crise du principe de dualité des juridictions », RFDA, 1990, p. 724-733 ; Y. LAIDIE, « Les libéraux et la justice administrative au XIXème siècle : un mariage de raison ? », Revue Administrative, 2001, p. 5-11 ; L. JAUME, « Les libéraux et la justice administrative sous Juillet : craintes et ambiguïtés », L’office du juge : part de souveraineté ou puissance nulle ?, O. CAYLA et M.-F. RENOUX-ZAGAME (dir.), Paris, LGDJ, 2001, p. 137-150 ; C. AUZANNEAU, « La justice administrative vue par la doctrine de Locré à Aucoc », Regards sur l’histoire de la justice administrative, G. BIGOT et M. BOUVET (dir.), Paris, Litec, 2006, p. 105-127 ; M. JORAT, « Supprimer la justice administrative... deux siècles de débats », RFDA, 2008, p. 456-467 ; G. BIGOT, « Justice administrative et libéralisme sont-ils compatibles ? », RDP, 2012, p. 441-456.
2 Anonyme [CORMENIN], Du Conseil d’Etat envisagé comme conseil et comme juridiction dans notre monarchie constitutionnelle, Paris, Hérissant Le Doux, 1818 ; J.-B. SIREY, Du Conseil d’Etat selon la charte constitutionnelle ou notions sur la justice d’ordre politique et administrative, Paris, Cour du Harlay, 1818.
3 BERENGER, De la justice criminelle en France, d’après les lois permanentes, les lois d’exception, et les doctrines des tribunaux, Paris, L’Huillier, 1818, Avant-propos, p. I.
4 Ibid., p. 349.
5 Ibid., p. 350.
6 Ibid., p. 350-351 : « La législation administrative, si toutefois on peut appeler législation, un amas de dispositions qui n’ont aucun lien entr’elles, est d’ailleurs si ténébreuse que, semblable aux livres sibyllins, les seuls initiés peuvent se flatter de la connaître. Elle se compose d’une multitude de décrets impériaux, d’avis du Conseil d’Etat, de décisions ministérielles, et pour en donner une idée, il suffit de dire que la collection des décisions relatives à une seule branche de l’administration, celle de l’enregistrement et des domaines, forme déjà quatorze gros volumes in 4°. Comment espérer de trouver là des règles et des principes fixes ? Aussi l’autorité administrative n’a-t-elle point de jurisprudence : elle ne peut pas même s’en former une. Chaque affaire est décidée d’après des considérations de circonstance. Quelquefois des décrets impériaux étaient rendus pour le besoin d’une cause, et d’autrefois c’étaient des décisions ministérielles qui arrivaient au moment du jugement, pour tracer des directions. Ces décrets, ces décisions, enregistrés à mesure, pour servir de règle jusqu’à nouvel ordre, imitaient ces constitutions, que, dans la décadence de l’empire, l’importunité arrachait à la faiblesse, et qui s’abrogeant tour à tour, jetaient le trouble dans les familles, et le désordre dans la législation ».
7 A. de TOCQUEVILLE, L’Ancien Régime et la Révolution (1856), Paris, Gallimard, Folio, 1967, p. 125-126 : « Les légistes modernes, en fait de droit administratif, nous assurent qu’on a fait un grand progrès depuis la Révolution [...]. Nous avons, il est vrai, chassé la justice de la sphère administrative où l’ancien régime l’avait laissée s’introduire fort indûment ; mais dans le même temps, comme on le voit, le gouvernement s’introduisait sans cesse dans la sphère naturelle de la justice, et nous l’y avons laissé : comme si la confusion des pouvoirs n’était pas aussi dangereuse de ce côté que de l’autre, et même pire ; car l’intervention de la justice dans l’administration ne nuit qu’aux affaires, tandis que l’intervention de l’administration dans la justice déprave les hommes et tend à les rendre tout à la fois révolutionnaires et serviles ».
8 F.-N. BAVOUX, Des conflits ou empiètement de l’autorité administrative sur le pouvoir judiciaire, Paris, J.-P. Aillaud, 1828, t. I, p. 54-55.
9 H. COLOMBEL, De la juridiction administrative en France, Paris, Joubert, 1840, p. 4 : « Parmi les améliorations qu’attend la France, se place, à l’un des premiers rangs, le besoin de mettre notre droit administratif en harmonie avec les principes de la constitution. S’il est indispensable que le pouvoir exécutif soit libre et fort dans sa sphère légitime, il est nécessaire aussi qu’il répudie les empiètements faits, à diverses époques, sur l’autorité judiciaire ».
10 Ibid., p. 55-56.
11 C.-G. HELLO, Du régime constitutionnel dans ses rapports avec l’état actuel de la science sociale et politique, Bruxelles, Meline, Cans et Cie, 3ème édition, 1849, p. 331-332.
12 PREVOST-PARADOL, La France nouvelle, 1868, p. 3-47.
13 E. POITOU, La liberté civile et le pouvoir administratif en France, Paris, Charpentier, 1868, préface, p. IV.
14 Ibid., p. VIL
15 Ibid., p. 2-3.
16 Ibid., p. 16 : « Que la France marche depuis un siècle et à pas rapide vers la démocratie, cela est évident. Que le pouvoir central ait pris, en même temps et du même pas, des accroissements continus et en quelque sorte proportionnels, c’est ce qui ne peut guère non plus être contesté. Ce double mouvement s’accélérant sans cesse et de façon uniforme, il est clair, si rien n’y faisait obstacle, que nous arriverions fatalement et en même temps, dans un siècle ou deux, à la démocratie absolue et à la servitude universelle ».
17 Ibid., p. VII.
18 Ibid.
19 Ibid.
Auteur
Professeur à l’Université de Nantes, Institut universitaire de France
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