Siège et parquet en France (xixe-xxe siècles)
p. 277-297
Texte intégral
1Le principe, en honneur en France, de l’unité de la magistrature, cette dernière regroupant juges du siège et du parquet, avec un statut leur permettant de passer d’une fonction à l’autre en cours de carrière, constitue une source d’étonnement tant dans notre pays que plus encore au niveau international. Beaucoup ont de la peine à considérer que l’on puisse assimiler un conseiller à la cour ou un juge au tribunal de grande instance et un procureur, un avocat général ou un substitut. Leurs responsabilités ne sont pas les mêmes et surtout leur statut est différent. Certains croient même pouvoir déceler une contradiction entre l’indépendance inséparable de la position de magistrat et le principe hiérarchique auquel sont soumis les parquetiers. En fait, il y a là une caractéristique du système français qui puise sa justification dans un passé très ancien. C’est un thème classique sous l’Ancien Régime que celui du juge au service du roi mais également défenseur de l’intérêt général, se considérant en charge de la protection des intérêts supérieurs de la couronne, y compris contre l’idée que peut s’en faire son titulaire du moment, mal informé ou mal conseillé.
2Au-delà de l’application mécanique des textes, telle que Montesquieu paraît la concevoir1, le juge d’Ancien Régime revendique le droit d’imposer sa propre conception du bien commun et des décisions les mieux à même de préserver la paix publique2. Il s’affirme comme chargé par ses fonctions d’arbitrer entre les droits légitimes des justiciables et les principes de la monarchie. C’est au nom même de sa soumission à cette dernière qu’il se sent fondé à défier celui qui l’incarne à un moment donné. L’ancienneté de la famille royale française lui confère une solidité, quasi une invulnérabilité, qui autorise ses serviteurs, sans risque d’être taxés de rébellion, à rappeler le monarque à une juste appréciation de ses devoirs. Dans ces conditions, le juge peut s’ériger en conseiller du prince et le conseiller peut être appelé à juger sans que les principes d’indépendance de la magistrature paraissent gravement menacés.
3Parmi les conséquences modernes de cette dualité de nature permettant de surmonter les éventuelles contradictions entre la soumission au pouvoir souverain et la liberté de décision en conscience figurent certaines spécificités de notre système juridictionnel, tant dans sa dimension administrative que judiciaire. Ces caractéristiques communes provoquent la perplexité des observateurs étrangers à l’égard de ce qui leur apparaît comme un élément d’ambiguïté, sinon de contradiction. Il s’en suit, notamment de la part des instances européennes, des prises de position qui révèlent leur incompréhension des logiques qui président au statut de nos juges, ou qui trahissent notre incapacité à l’expliquer. Si les Cours de Luxembourg et de Strasbourg se sont accommodées de la double mission du Conseil d’Etat français, à la fois conseiller du gouvernement et juge de l’administration, en revanche elles ne sont pas parvenues à admettre par exemple la participation du commissaire du gouvernement comme membre à part entière des instances de jugement en matière administrative3. De même et par rapport à notre réflexion sur les rapports entre ceux qui sont chargés de requérir et ceux auxquels il appartient de juger, elle tend à refuser aux premiers le statut de magistrat. Ce serait alors la fin d’une évolution pluriséculaire qui a vu l’instauration d’un système fondé à l’origine sur l’unité de corps (I) et qui laisserait progressivement place à un traitement différent réservé aux membres du parquet par rapport aux magistrats du siège (II).
I – L’instauration d’un système fondé sur l’unité de corps
4Au début du XIXe siècle, lorsque le régime consulaire instaure ces grands corps que Napoléon comparera à des « masses de granit » sur lesquelles il entend refonder la société française, figure, au premier rang, une institution judiciaire invitée à se répartir entre magistratures debout et assise. Si les objectifs qui sont fixés aux uns et aux autres sont identiques -la défense de l’ordre social pour faire court- chacun se voit affecté des missions spécifiques et clairement différenciées. Comme souvent dans les grandes réformes introduites en 1800, il s’agit de rompre avec les hésitations et les ambiguïtés de la période révolutionnaire. C’est à ce titre que ces dernières méritent d’être rappelées, dans la mesure où elles éclairent les motivations ayant présidé, par réaction, à l’installation du système encore partiellement en vigueur de nos jours. De fait, entre 1790 et 1799, les positions évoluent fortement et parfois s’inversent. Pour résumer près de dix ans d’histoire du parquet, l’on dira que l’époque est marquée par la rivalité des deux institutions mises en place par l’Assemblée nationale constituante, ce qui trahit l’impossibilité où se trouve la classe politique de choisir entre un parquet nommé par l’exécutif et relevant de lui et des agents élus par le peuple et chargés d’exprimer sa volonté. Ce refus de se déterminer clairement entraîne la création de deux corps rivaux : d’une part celui des commissaires du roi, d’autre part celui des accusateurs publics.
5Les premiers sont évidemment héritiers de la tradition des procureurs de l’Ancien Régime. Leur affaiblissement, souhaité par le législateur qui n’ose cependant pas les éliminer totalement, passe d’abord et d’un point de vue statutaire, par la disparition de la vénalité : ce ne sont plus des officiers mais des « commissaires du roi ». Ils sont donc nommés par le monarque mais on leur reconnaît l’inamovibilité4. Du point de vue des fonctions, cet affaiblissement passe également par la perte du monopole de l’accusation ce qui résulte surtout de la création des accusateurs publics élus mais également du rôle reconnu, en matière de déclenchement des poursuites, aux citoyens, aux juges de paix, aux directeurs des jurys d’accusation5. Dans un premier temps, entre 1790 et 1792, ce sont les commissaires du roi qui interprètent en leur faveur la législation en cours d’élaboration. Ils s’appuient non seulement sur la promulgation tardive des textes d’application ce qui leur permet de maintenir les anciennes pratiques, mais également sur la volonté du monarque d’encourager la préservation de leurs prérogatives6. Ces efforts se heurtent à leur réputation de conservatisme auprès de l’opinion publique et au discrédit qui les frappe à cause de leurs liens avec la monarchie. Ils tombent avec le roi et sont supprimés par un vote intervenu dès le 18 août 17927.
6Sous la Terreur, c’est la revanche des accusateurs publics. La tentative de remplacer les commissaires du roi par des commissaires du pouvoir exécutif élus n’a pas grand avenir : ceux mis en place dans le cadre des tribunaux criminels sont les premiers supprimés, dès octobre 1792, les autres commissaires fonctionnant au niveau des tribunaux de district perdent progressivement leur influence. Ce sont donc les accusateurs publics qui s’affirment, souvent et de façon avouée en marge de la législation. La nécessité de défendre la Révolution contre ses ennemis leur paraît justifier ces atteintes à la légalité. Elle favorise les excès de la loi sur les suspects et du tribunal révolutionnaire, tant dans sa composition que dans sa procédure. La Convention et ses représentants en mission n’hésitent pas à démettre les accusateurs publics qui ne paraissent pas assez rigoureux8. La sévérité dont ils font preuve leur vaut, à leur tour, d’être traduits devant les tribunaux après le 9 thermidor.
7Leur défense, et d’abord celle du personnage qui les symbolise le mieux, Fouquier-Tinville, consiste à se présenter en serviteur loyal de l’ordre établi : « Je n’étais qu’un être passif, un rouage et un ressort que faisait mouvoir la loi. Ainsi, c’est à la loi qu’il faut s’en prendre et non à son organe [...] S’il y a délit d’avoir exécuté les arrêtés des comités de salut public et de sûreté générale, je confesse que je suis coupable, je l’aurais été évidemment en ne les exécutant pas. Que fallait-il donc faire ? »9. En somme l’héritage de la Révolution est double de ce point de vue : le vain affrontement entre commissaires du roi et accusateurs publics conduit à vouloir reconstituer l’unité du corps et même sa hiérarchisation rigoureuse, presque militaire sous l’influence de Bonaparte ; l’évidente efficacité d’un système où les poursuites sont entre les mains de personnalités qui se proclament au service de la politique officielle pousse à préserver une soumission si efficace. Napoléon se souviendra de ce double constat.
8Le statut du parquet a peu évolué au cours des XIXe et XXe siècle. Les principes sont posés par la constitution de l’an VIII qui réunifie les fonctions d’accusateur public et de commissaire du gouvernement10 mais qui ne leur confère pas l’inamovibilité11. C’est un peu plus tard la loi du 20 avril 1810 sur l’organisation de l’ordre judiciaire et l’administration de la justice qui complète le dispositif faisant du droit de « juger et requérir une affaire de ‘professionnels’ »12. Par la suite, les équilibres se maintiennent, marqués cependant par quelques réformes longtemps réclamées avant d’être obtenues. Ainsi en va-t-il par exemple de l’indépendance progressivement arrachée par le barreau puisqu’il appartenait à l’origine au procureur général non seulement de désigner les membres du conseil de discipline de chacun des barreaux qui en étaient dotés, c’est-à-dire à partir de vingt membres, mais également de nommer le bâtonnier. C’est cette dernière prérogative qui est retirée en premier au parquet, par une ordonnance du 20 novembre 1822, suivie du rétablissement de l’élection du conseil de surveillance par une ordonnance du 27 août 183013.
9Dans la mesure où la législation change peu, il faut s’en remettre à l’évolution des mentalités et à la transformation des pratiques pour reconstituer les mutations qui affectent les rapports entre magistratures debout et assise. L’image du parquet par rapport aux juges du siège dépend de plusieurs éléments. Le premier peut être déduit du dépouillement systématique des archives publiques. Les rapports des procureurs, notamment portant sur l’opinion des habitants de leur ressort, ainsi que les correspondances qu’ils échangent avec la chancellerie donnent l’impression d’une absolue soumission au gouvernement et d’un souci persistant et qui domine tous les autres, d’exécuter les consignes ministérielles qui leur sont adressées. Les plus ardents paraissent même s’efforcer de les prévenir par un zèle constamment renouvelé en vue de débusquer les fauteurs de troubles et jusqu’aux germes de désordre.
10Il ne faut pas s’y tromper : les protestations de fidélité aux ministres en place constituent un élément habituel du style en honneur dans l’administration avec des expressions si stéréotypées qu’elles font presque figure de formules de politesse banales. L’on s’étonne cependant de les trouver avec cette profusion sous la plume d’un magistrat. De toutes façons, ces témoignages de loyauté politique à base de dénonciation des opposants potentiels14 ne reflètent que très imparfaitement ce qui constitue le fond de l’activité de ces magistrats, surtout consacrée à poursuivre une délinquance en quelque sorte « ordinaire ». Face à des parquetiers que leurs fonctions conduisent à multiplier les protestations d’obéissance aveugle, les juges du siège peuvent affecter une réserve qui se veut de meilleur aloi. C’est ce que l’on constate par exemple avec ce premier président de la cour d’appel d’Amiens qui déplore auprès du garde des Sceaux la tendance de son procureur général à abuser des adresses de soutien au roi, au point de s’exposer à les rendre, par leur répétition, « plus nuisibles qu’utiles »15.
11La classe politique ne fait rien pour améliorer l’image des procureurs, notamment dans le cadre des débats parlementaires où les députés apprécient que le gouvernement se proclame déterminé à obtenir du parquet un soutien sans faille à la politique officielle, sans guère paraître se soucier du risque d’en faire passer les membres pour de purs exécutants des ordres ministériels. Les rôles sont clairement répartis dès le Consulat et notamment lors du débat préparatoire à la loi du 7 pluviôse an IX. Thiessé, membre du Tribunat, ne manifeste aucune hésitation sur la soumission obligatoire de cette branche de la magistrature : « Le peuple français ayant voulu que le ministère public fût désormais une agence du gouvernement, il ne nous est plus permis je ne dis pas de décider, mais d’examiner s’il doit en être indépendant [...] Plaçons donc un ressort vigoureux dans la main du gouvernement ; que ce ressort soit tendu sur tous les points de la République ; qu’en comprimant le crime, il relève l’espoir de tous les bons citoyens »16. Boulay de la Meurthe en tire la conclusion logique : le représentant du ministère public doit être un « homme du gouvernement, nommé par lui et révocable par lui »17.
12Cette position survit à la succession des régimes politiques, reprise sous la Restauration18 et la Monarchie de Juillet. Il n’est jusqu’à la Seconde République qui maintienne ces consignes. En 1848, une circulaire du ministre de l’Intérieur Ledru-Rollin s’adressant à ses commissaires est sans ambiguïté, avec une distinction claire entre magistratures debout et assise. A l’encontre de la première : « Vous exigerez des parquets un concours dévoué » ; vis-à-vis de la seconde : « quant à la magistrature inamovible, vous la surveillerez »19. Les obligations des uns et des autres sont ainsi nettement différenciées : les premiers seront punis s’ils ne mettent pas tout leur zèle à obtempérer aux consignes qui leur sont données ; les seconds encourront des sanctions seulement en cas d’hostilité publiquement affirmée à l’encontre du gouvernement.
13Face à l’opinion publique, la répartition des rôles est évidente. Elle apparaît particulièrement dans les procès de presse, ceux qui ont tout naturellement le plus fort retentissement médiatique dans la mesure où les collègues du journaliste inculpé se font un devoir de le défendre, toutes opinions confondues pour un temps. Parmi les utilisateurs les plus efficaces de la méthode figure des personnalités très notoires comme Benjamin Constant. Ses lourds traités qui ont fait sa réputation, et ses petits romans fort connus aujourd’hui jusqu’à faire l’objet d’adaptation cinématographique, ne constituent qu’une minime partie de son œuvre. Son talent est le plus souvent mobilisé pour la défense de la liberté partout où il la sent menacée : au Parlement lors du vote des lois, dans les opérations de maintien de l’ordre contre les complots vrais ou supposés découverts par la police et surtout contre la censure judiciaire à l’encontre des journaux20.
14Sur ce dernier terrain, la technique de Constant est à peu près toujours la même, fondée sur une opposition soigneusement marquée entre les magistrats du siège et ceux du parquet. Ces derniers font l’objet des attaques les plus vives et même des insinuations les plus injurieuses. Il ne se borne pas à dénoncer leurs tendances liberticides ; il décortique, quasiment comme un juriste, leurs arguments techniques, leur interprétation des lois pour en dénoncer l’absurdité ; il en montre non seulement les faiblesses dans le raisonnement mais aussi les conséquences funestes si le tribunal commettait l’erreur de les suivre ; il va jusqu’à attaquer les parquetiers personnellement dans les motivations de ce qui est présenté comme de l’acharnement : tel procureur accable un journaliste parce qu’il ne s’est pas montré assez humble lors de l’enquête ; tel autre cherche à plaire au gouvernement pour obtenir une promotion flatteuse comme en témoigne toute sa carrière passée ; tel autre même doit être mû par une vanité d’auteur puisqu’il a commis quelques vers ridicules passés inaperçus et qu’il est sans doute jaloux de la notoriété de l’écrivain qu’il tente de faire condamner. On rappelle leurs déclarations imprudentes sous la Révolution et leurs palinodies bonapartistes sous l’Empire, ce qui affaiblit leurs exhortations pour une loyauté sans faille en faveur de la monarchie parlementaire.
15Par opposition, les magistrats du siège sont prudemment traités : ni attaque, ni critique même lorsqu’ils interrogent un peu rudement la personnalité poursuivie ; tout au plus quelques objurgations pour une prise en compte des circonstances atténuantes ; à l’inverse, un éloge sans nuance de leurs interventions apaisantes en faveur du prévenu ; parfois une discrète allusion aux conséquences désastreuses sur leur réputation d’une décision trop sévère qui viendrait ternir la juste confiance que chacun nourrit dans leur modération prévisible ; une affectation de sécurité quant au verdict qu’ils vont prononcer ; tout est mis en œuvre pour les opposer à leurs collègues du parquet et pour les inciter à n’en pas suivre les réquisitions. Si la technique mise en œuvre par Constant ne donne pas toujours les résultats attendus, si elle ne peut empêcher certaines condamnations, elle est systématiquement mise en œuvre et d’ailleurs suivie par la plupart des écrivains de l’époque, défenseurs de la liberté d’expression, à gauche comme à droite21. D’un bout à l’autre de l’échiquier politique, l’objectif est de désolidariser les juges et les procureurs, en flattant les premiers, en accablant les seconds.
16Lors des procès qui n’ont pas de caractère politique mais qui traitent de la délinquance en quelque sorte ordinaire, c’est une image fort différente que répandent les médias à propos des agents responsables de la répression. Ici domine une sorte d’identité d’intérêt, parfois de connivence entre les auteurs des chroniques judiciaires et les autorités en charge de repérer et de poursuivre les coupables présumés. Le parquet notamment, la police même, font l’objet d’une véritable réhabilitation de la part de la presse. Les chroniques judiciaires ont en effet constitué, au cours de la première moitié du XIXe siècle, l’un des points d’appui décisif pour les journaux populaires en cours de multiplication. C’est le fondateur de cette nouvelle sorte de médias, Emile de Girardin qui, en 1836 avec le quotidien La presse, imagine d’attirer un nouveau public qu’éloignaient jusqu’alors des gazettes plutôt élitistes. Les chroniques judiciaires sont, avec les comptes rendus des pièces de théâtre en vogue, un moyen efficace de séduire des lecteurs évidemment moins attirés par les problèmes juridiques que par le récit d’horribles forfaits et par la description de coupables cruels22. La peinture de Pierre-Paul Prud’hon sur « La justice et la vengeance poursuivant le crime » qui remonte à l’époque de la Restauration, évoque ces milliers de procès présentés comme les éléments d’une politique destinée à déboucher sur la juste punition de monstres indignes de quelque pardon que ce soit. Dans la mesure où le président du tribunal doit faire preuve d’une certaine réserve, et puisque les jurés sont à peu près réduits au silence, le procureur se voit reconnaître la première place dans cette lutte contre la criminalité. Dans le même mouvement par lequel ils accentuent le caractère sanglant et barbare des faits commis, les auteurs de chroniques judiciaires exaltent le magistrat du parquet érigé au rang de héros en charge de la défense de la société, rôle sur lequel ils insistent complaisamment.
17Il n’est jusqu’aux écrivains connus qui mettent en scène le procureur avec un mélange de fascination et d’ironie. Les grands auteurs du XIXe siècle tels Victor Hugo dans les Misérables ou Stendhal dans Le Rouge et le Noir placent ainsi un procès pénal comme un moment important de leur roman. Plus près de nous, Albert Camus dans L’Etranger ou François Mauriac dans « L’affaire Fabre-Bulle » dépeignent des rites de la justice criminelle. Ils ont évidemment tendance à en accentuer les aspects dramatiques ce qui, d’une certaine façon, valorise celui qui conduit les poursuites par rapport au reste du tribunal et, paradoxalement, par rapport à l’accusé dont tous s’accordent, parfois avec surprise, à souligner combien il paraît extérieur à son propre procès23. Par opposition, le ministère public se déploie avec une véhémence qui mobilise l’attention, parfois aussi qui suscite un peu d’ironie pour des effets oratoires jugés outranciers par rapport à la dimension tragique du procès qui n’aurait pas besoin d’être artificiellement accentuée24...
18Il est vrai qu’au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle, une dimension nouvelle se fait jour et va s’affirmer jusqu’à influencer les réquisitoires eux-mêmes. Il s’agit, dans l’appréciation de la gravité des crimes commis, de prendre en compte les malheurs, les handicaps, les influences qui font de l’accusé quasi une victime, en tous cas celle d’un système. Les idéologies de gauche dénoncent l’injustice et presque la cruauté qu’il y aurait à ne pas tenir compte des situations individuelles. Là encore le ministère public est en première ligne et fait l’objet des attaques les plus importantes. Une littérature populaire politiquement orientée, des campagnes de presse organisées par les journaux socialistes et d’abondantes caricatures mettent en scène des procureurs tout entier mobilisés pour la défense de l’ordre bourgeois et incapables de prendre en compte les souffrances humaines ou, pour parler plus sobrement, le contexte économique et social. Ce discours va exercer une influence sur le comportement des juges au point d’inquiéter certains sur le rôle de relais que peut jouer en ce domaine l’Ecole nationale de la magistrature, à l’origine d’une nouvelle génération de juges25.
II – Un traitement différent progressivement réservé aux membres du parquet par rapport aux magistrats du siège
19Le ministère public est, au sein de la fonction publique, l’un des corps ayant payé le plus lourd tribut aux successives épurations qui ponctuent la vie politique française, depuis le régime napoléonien jusqu’à la libération de l’occupation allemande, donc sur un siècle et demi. Jusqu’en 1885, il est de règle que chaque changement de régime s’accompagne de changements importants au sein des tribunaux et particulièrement parmi les procureurs, d’autant plus exposés qu’ils se sont mobilisés pour les dirigeants précédents et que les nouveaux venus attendent davantage d’eux. Ce n’est pas que les anciens ne soient pas prêts à se redéployer pour passer au service des responsables suivants, mais la plupart des acteurs de la vie politique considèrent que ce serait déconsidérer la fonction au-delà du raisonnable que d’utiliser les mêmes personnes pour soutenir des positions trop différentes.
20Il n’est jusqu’aux intéressés eux-mêmes qui en ont plus ou moins conscience. Certaines lettres de démission en témoignent : « Je comprends les nécessités politiques qui empêchent le gouvernement de me conserver mes fonctions [...]. Je n’entends rien faire qui soit voisin de l’amertume ou de l’hostilité [...]. Je rentre dans le rang et je dis un éternel adieu à la vie politique »26. Chaque régime insiste sur une motivation particulière pour justifier les mesures d’élimination : le Consulat invoque l’incompétence des juges hérités de la Révolution ; la Restauration dénonce les séides de l’usurpateur ; la Monarchie de juillet se méfie des légitimistes trop intransigeants ; la IIe République veut des juristes convaincus des bienfaits du nouveau régime ; le Second Empire cherche des hommes d’ordre... Il n’est jusqu’à la IIIe République qui, au cours des années que dure sa difficile gestation, entre 1870 et 188327, multiplie les campagnes d’épuration d’une année sur l’autre, au gré des allers et venues du pouvoir entre la droite et la gauche.
21En fait, il est difficile d’évaluer le nombre de magistrats touchés par chacune de ces épurations. A l’époque, les responsables à l’origine de ces mesures d’éviction se gardent de s’en vanter. Par la suite, les historiens ont de la peine à s’accorder sur des chiffres indiscutables. Pour s’en tenir à un exemple et s’agissant des magistrats ayant refusé de prêter le serment à Louis-Philippe, les auteurs en décomptent entre plus de trois cents pour le chiffre le plus élevé et une centaine pour le plus modeste28. Plusieurs causes s’additionnent pour expliquer ces difficultés d’évaluation. La première tient au procédé d’épuration auquel il est le plus souvent fait appel, consistant, pour chaque nouveau régime, à proclamer hautement l’inamovibilité de la magistrature mais en en limitant le bénéfice aux magistrats nouvellement nommés29. Le résultat ? Il n’y a pas à proprement parler de décisions d’éviction mais des mesures de confirmation, de promotion, de déplacement, de rétrogradation ou de nouvelle nomination. Ceux que le régime ne maintient pas constituent une sorte de chiffre noir dont on ne connaît les composantes qu’à travers des exemples individuels, soit que les victimes bénéficient d’une certaine notoriété qui rend leur départ ostensible, soit qu’elles osent protester, ce qui n’est pas le cas de la majorité. Il n’y a pas de statistiques officielles sur les campagnes d’épuration.
22Par ailleurs, il est difficile de faire le partage entre les diverses formes que peut prendre la perte par un magistrat du poste qu’il occupait. Evoquant quelques années plus tard sa carrière interrompue, il a souvent tendance à parler de renvoi pur et simple, ce qui peut être un moyen de se présenter en martyr et de prétendre à une réintégration ultérieure qu’il espère accompagnée d’une promotion considérée comme une juste compensation. Cette identité de destin qui unit en apparence tous les évincés, peut dissimuler des décisions assez différentes, parfois explicables comme lorsqu’il s’agit de simples refus de serment comme en 1830 où un certain nombre de monarchistes traditionnels ont l’impression que leur monde s’effondre avec le départ du représentant de la branche aînée des Bourbons alors qu’au contraire tout est mis en œuvre pour que Louis-Philippe préserve l’essentiel.
23Les démissions invoquent souvent une sorte de clause de conscience comme au début des années 1880 lorsque le gouvernement enjoint la justice de collaborer à sa politique de lutte contre les congrégations non autorisées : dans un milieu resté très catholique, certains refusent de prêter la main aux mesures d’expulsion prévues30. Il y a aussi les pressions qui s’exercent sur des magistrats accusés d’avoir participé à des juridictions d’exception mises en place par le régime précédent : les IIIe et IVe Républiques, à près de trois quarts de siècle d’intervalle, utiliseront le procédé d’abord, en 1870, contre ceux qui ont figuré dans les commissions mixtes chargées de conduire la répression au lendemain du coup d’Etat du 2 décembre 1851 ; ensuite, en 1944 contre ceux ayant accepté de siéger dans les sections spéciales31. Il y a enfin les mises à la retraite comme celles prononcées par le décret du 1er mars 185232.
24Les parquetiers sont évidemment les plus exposés à ces mesures d’autant qu’ils ne bénéficient pas de l’inamovibilité33 et que les dirigeants considèrent qu’ils sont en droit d’en obtenir « un concours dévoué » pour reprendre la formule citée plus haut, émanant du ministre de l’Intérieur de 1848, Ledru-Rollin. Cette année-là, c’est le ministre de la Justice Crémieux, qui remplace assez systématiquement les procureurs institués par le précédent régime, par des avocats de sa connaissance. Il recommence d’ailleurs en 1870 jusqu’à susciter l’indignation d’Edmond de Concourt, observateur attentif de la vie politique de l’époque et qui note dans son Journal l’afflux à « la curée des places [...] de tous les avocats de deux sous, tous les avocats sans cause, tous les avocats sans talent et sans honorabilité »34. Les historiens soulignent d’ailleurs que certaines vagues de remplacement ont parfois eu un effet négatif pour ceux qui les avaient organisées : ainsi en 1848, où les républicains ont éliminé de vieux magistrats habitués à faire preuve de docilité passive par la succession des régimes précédents, pour les remplacer par de jeunes juristes dont certains sont passés sans effort par la suite au bonapartisme ; symétriquement Napoléon III, en voulant rajeunir le corps, s’est privé des services de personnalités installées par son onde et qui étaient sans doute disposées à retrouver les fidélités de leurs débuts.
25Sous la Troisième République, après les épurations qui en marquent les premières années, l’image du procureur aux ordres du pouvoir en place s’estompe avec la quasi disparition d’une justice politique en rupture avec le sentiment dominant au sein de l’opinion publique. Ce n’est pas que la répression disparaisse à l’encontre des opposants : ainsi avec l’application des lois dites scélérates contre les anarchistes. Simplement, les mesures de rigueur rejoignent l’indignation populaire à l’encontre des attentats aveugles et des dérives criminelles de certains groupes comme la « bande à Bonnot ». Désormais, le parquet n’a plus trop de peine à se dire le défenseur de la société dans la mesure où il participe de la politique officielle de maintien de l’ordre et de protection de la sécurité publique. Les magistratures debout et assise sont perçues comme faisant, d’un certain point de vue, le même métier, au service de la défense des citoyens, des personnes et des biens. Ils se voient en partenaires plutôt qu’en adversaires et le bon sens commun approuve ce positionnement. Tout au plus quelques idéologies d’extrême droite et d’extrême gauche, relayées par leurs organes de presse et leurs auteurs, conduisent-elles à dénoncer l’acharnement de certains procureurs mais qui n’est pas considéré comme d’une autre nature que la sévérité de quelques juges.
26La grande loi de réforme de la justice de 1958 constate l’état de fait ancien, s’agissant de l’unité de la magistrature, avec un article 1er sans ambiguïté : « Le corps judiciaire comprend les magistrats du siège et du parquet [...] »35. La conséquence d’une telle affirmation est confirmée par la loi organique du 25 février 1992 : « Tout magistrat a vocation à être nommé au cours de sa carrière, à des fonctions du siège ou du parquet »36. On a l’impression que le ton est d’autant plus péremptoire que la règle commence à subir des attaques de plus en plus vives. Il ne paraîtrait peut-être pas nécessaire de l’affirmer aussi fortement si personne n’en doutait. L’unité du corps continue cependant d’être défendue par les grandes organisations professionnelles regroupant les juges, ainsi de l’Union syndicale des magistrats et du Syndicat de la magistrature. Ils l’ont notamment rappelé lors de la mise en cause du fonctionnement de la justice après l’affaire Doutreau37. Ils ont conscience que la dépendance du parquet à l’égard de la chancellerie menace leur unité ce qui les conduit à réclamer la coupure du lien entre les procureurs et le ministre. Pour sa part, le Conseil supérieur de la magistrature, dans plusieurs de ses rapports annuels depuis 1998, demande que les magistrats du parquet soient nommés sur sa proposition ou, à tout le moins, sur son avis conforme, « donc contraignant » et qu’ils bénéficient, en matière disciplinaire, des mêmes garanties que les juges du siège de façon à leur assurer « les exigences et garanties attachés au statut de magistrat qui serait plus sûrement et ostensiblement assuré »38.
27La classe politique y semble moins que jamais disposée. Sans doute, l’apparition de ceux que les médias ont désignés sous le nom de « juges rouges » n’est-elle pas étrangère à la crainte de perdre un efficace droit de regard et d’influence sur le fonctionnement interne de juridictions qu’il paraît de plus en plus difficile de maîtriser. La volonté affichée par certains magistrats de se mettre au service de la protection des plus faibles et de la poursuite des responsabilités jusque chez les plus notables a inquiété les responsables du pays39, tous partis confondus et même si l’alternance aux sommets de l’Etat s’est traduite par des politiques différentes selon les majorités au pouvoir, la période la plus favorable par rapport à notre propos étant celle du gouvernement Jospin, entre 1997 et 2002, avec l’engagement de renonciation à toute intervention dans des affaires individuelles et de respect des avis négatifs du Conseil supérieur de la magistrature relatifs aux projets de nomination des magistrats du parquet. D’une façon générale, les gouvernements et, au premier chef, les gardes des Sceaux, puisent des motifs de prudence dans les successives déconvenues qui leurs ont été infligées en plusieurs occasions où ils essayaient de s’imposer. Les procureurs ne sont pas les seuls qui aient fait l’objet de pression de la part de la chancellerie. Les juges d’instruction notamment en ont eu leur part, avec la menace du dessaisissement.
28Le parquet demeure cependant le plus exposé par cette tradition qui conduit à le considérer comme en charge de transmettre les vœux du pouvoir politique. Les résultats sont divers, d’autant plus satisfaisants pour la chancellerie que la confidentialité de l’intervention est préservée ce qui est rarement le cas. Parmi les affaires les plus médiatisées, l’on peut évoquer celle du substitut Ceccaldi parvenant en 1976 à faire annuler sa mutation comme procureur à Hazebrouck40. Doit être également cité un épisode spectaculaire de l’instruction dirigée contre le maire de Paris Jean Tibéri et contre son épouse avec la décision du garde des Sceaux de faire aller chercher en hélicoptère dans l’Himalaya le procureur Davenas pour qu’il annule l’ouverture d’une information judiciaire prononcée par son substitut adjoint41... Il est vrai que les médias se font plus souvent l’écho des pressions subis par les juges d’instruction. Il n’en reste pas moins que l’accueil généralement défavorable réservé par l’opinion publique à ces immixtions du gouvernement, même lorsqu’elles ne sont pas juridiquement irrégulières, témoignent d’un sentiment dominant favorable à l’indépendance des juges.
29Le parquet y puise un argument pour obtenir une indépendance qui lui paraît de plus en plus nécessaire pour préserver le corps unique. La perspective d’une perte de ce statut les inquiète avec un risque de fonctionnarisation42, pour reprendre une expression utilisée volontiers, bien qu’elle ne soit pas juridiquement très correcte. De même la formule incitant les procureurs à « prendre un bain de siège »43 ne paraît-elle pas très raffinée, en tous cas peu valorisante tant pour le parquet que pour la magistrature assise. L’objectif se situe à un niveau plus élevé. La préservation du statut de la magistrature debout passe par une réforme du Conseil supérieur de la magistrature. C’est ce que réalise la loi constitutionnelle du 27 juillet 1993 prévoyant deux formations de douze membres mais avec des garanties qui demeurent moins importantes pour le parquet dont les membres sont nommés sur avis simple du CSM, à l’exception de ceux dont les emplois sont pourvus en conseil des ministres. Par ailleurs le CSM, dans sa formation spécialisée, reçoit les compétences de l’ancienne commission de discipline du parquet44, ce qui constitue un autre aspect de rapprochement avec les juges du siège. Une étape supplémentaire aurait pu être franchie avec le projet de réforme du CSM prévue par le gouvernement Jospin, étendant l’exigence de l’avis conforme et augmentant les pouvoirs de l’instance disciplinaire. Bien qu’accepté en principe par le président Chirac et voté par les deux assemblées en juin et novembre 1998, le texte n’a pas été soumis au congrès qui devait se réunir début 2000. La grande réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008 n’affecte que de façon très limitée les garanties accordées au parquet45. Du moins l’évolution va-telle dans le bon sens.
30L’idée d’une véritable indépendance n’est pas abandonnée. Elle réapparaît notamment dans les allocutions prononcées par le procureur général près la Cour de cassation lors de l’audience solennelle de début d’année de cette dernière, par exemple en 2010, par la voix de Jean-Louis Nadal46. Il appréhende une évolution tendant « éloigner le ministère public du statut de la magistrature ». Il craint que se réalise l’annonce formulée, quarante plus tôt, par le premier président Aydalot qui s’inquiétait d’un « parquet rejeté dans les ténèbres extérieures », prophétie dont on mesure le caractère angoissant quand on se souvient que cette référence à la Bible évoque le destin des pécheurs condamnés à l’enfer. Contre une perspective si sombre, il développe les ouvertures qui s’offrent au parquet, apte par le système de collégialité qui le caractérise, à corriger les inconvénients de la solitude dans laquelle se débat le juge d’instruction. Il prône une prise en compte mieux assurée des avis du Conseil supérieur de la magistrature et souhaite en augmenter l’autorité en les assortissant de motifs.
* * *
31La question de la qualité des membres du parquet a été récemment traitée par la Cour européenne des droits de l’homme. Il s’agit de la mise en garde à vue puis en détention provisoire d’une avocate toulousaine, soupçonnée d’avoir divulgué des informations liées à une affaire de drogue à laquelle était mêlé un client de son cabinet. Parmi tous les arguments qu’elle a soulevés à l’encontre de sa détention, la Cour a retenu la violation de l’article 5 § 3 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme prévoyant que toute personne arrêtée ou détenue doit être aussitôt entendue par un juge47. L’avocate avait en effet comparu devant le procureur adjoint de Toulouse et l’Etat français rappelait en cette occasion « l’unité du corps judiciaire ». La Cour a invoqué sa jurisprudence antérieure48 pour considérer que le procureur ne disposait pas de l’indépendance suffisante pour répondre aux exigences de la convention49 et a condamné l’Etat français. L’arrêt est du 23 novembre 2010. Moins d’un mois plus tard, le 15 décembre 2010, la Cour de cassation française en prend acte, également dans une affaire de garde à vue concernant une personne qui avait blessé un voisin avec une carabine à air comprimé, occasion pour la haute juridiction d’indiquer que « c’est à tort que la chambre de l’instruction a retenu que le ministère public est une autorité judiciaire au sens de l’article 5 paragraphe 3 de la convention européenne des droits de l’homme, alors qu’il ne présente pas les garanties d’indépendance et d’impartialité requise par ce texte »50. Ce ralliement à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme est d’autant plus méritoire qu’il n’était pas nécessaire à la décision finale dans la mesure où, la garde à vue prolongée par le procureur ayant duré à peine plus d’une heure, elle n’a pas encouru la censure de la Cour de cassation.
32La question de l’unité de la magistrature en France, ou plutôt du regroupement en son sein du siège et du parquet, demeure donc très ouverte51. Toutes sortes de puissantes fées se penchent sur son destin puisque l’on ne saurait parler de berceau pour une institution si ancienne. Elles manifestent la volonté d’intervenir avec des intentions contradictoires. Parmi les plus hautes autorités sur le terrain du droit, le Conseil constitutionnel français a reconnu à l’unité du corps une valeur constitutionnelle, justifiée par son rôle de défense du respect de la liberté individuelle mais, à l’opposé, la Cour de justice de Strasbourg refuse aux procureurs la qualité de magistrats indépendants aptes à défendre les droits des citoyens européens. Dans le monde politique, les divers partis publient des programmes uniformément bienveillants à l’égard de la liberté de décision des juges, du moins aussi longtemps que ces mouvements sont dans l’opposition. En revanche, arrivés au pouvoir, ils ont de la peine à renoncer au levier que leur donne l’autorité de la chancellerie sur la hiérarchie judiciaire. Au sein même de la magistrature, les syndicats expriment leur attachement à la préservation de l’unité du corps mais la Cour de cassation doit tenir compte des décisions des Cours européennes. Finalement le destin de ce regroupement des magistratures assise et debout paraît dépendre de grands enjeux dont on ne peut même pas dire qu’ils le dépassent. Ce qui est en cause, c’est rien moins que les modalités de protection des libertés publiques, que la conception d’une démocratie fondée sur la séparation des pouvoirs, ou que, d’une certaine façon, l’avenir du processus de construction de l’Europe.
Notes de bas de page
1 Cf. les formules utilisées par Montesquieu à propos du juge : « êtres inanimés », « puissance (...) pour ainsi dire invisible et nulle », « puissance (...) en quelque façon nulle ». Il se méfie de la volonté des juges d’interpréter la loi en fonction de leur idée de l’équité (A. CABANIS, « Le juge et Montesquieu », dans Revue des sciences politiques, premier semestre 2008, n° 59, p. 17-37).
2 Cf. Jean-Louis Nadal, procureur général près la Cour de cassation : « Je rappellerai d’un point de vue historique, que la spécificité du ministère public, à la fois organe de poursuite et gardien des libertés individuelles, remonte à ma connaissance à la grande ordonnance de Philippe le Bel du 23 mars 1303 énonçant la formule du serment des gens du roi et montrant que l’accusateur doit également avoir en charge la recherche de la vérité et la bonne application de la loi » (allocution d’ouverture au « Cycle de conférences de procédure pénale » à la Cour de cassation, 19 janvier 2006).
3 Ce sont les ordonnances des 2 février et 12 mars 1831 qui reconnaissent aux maîtres des requêtes faisant fonction de ministère public devant le Conseil d’Etat le titre de « commissaire du roi », dénomination à laquelle est substituée en 1849 celle de « commissaire du gouvernement ». Bien qu’il formule ses conclusions « en toute indépendance » (notamment arrêt du Conseil d’Etat du 29 juillet 1998), la Cour européenne des droits de l’homme (arrêts Kress du 7 juin 2001, Loyen du 5 juillet 2005 et Martinie du 12 avril 2006) a exprimé ses réserves à l’égard de sa présence, a fortiori de sa participation, au délibéré. Désormais le commissaire du gouvernement porte le titre de « rapporteur public » (décret du 1er février 2009).
4 Titre 8 (art. 1 à 7) de la loi des 16-24 août 1790 qui institue un ministère public composé de commissaires du roi (Collection complète des lois, décrets, ordonnances, réglements et avis du Conseil d’Etat publiée par J. B. DUVERGIER, t. I, Paris 1824, p. 371-372 ; désormais désigné : DUVERGIER). Art. 1er de la loi des 8 mai-27 septembre (sic) 1790 indiquant que les membres du ministère public seront nommés par le roi et institués à vie (DUVERGIER, t. I, p. 199).
5 Eric de MARI, « Le parquet sous la Révolution, 1789-1799 », dans Histoire du parquet (dir. J.-M. CARBASSE), PUF, Paris 2000, p. 226.
6 Ils s’appuient donc sur les encouragements du roi qui les qualifie de « gardiens de la liberté, de la sûreté et de la propriété » (Eric de MARI, art. cité, p. 229).
7 Décret des 18-30 août 1792 qui suspend (sic) les fonctions des commissaires du roi près les tribunaux civils et criminels (DUVERGIER, t. IV, p. 379).
8 Eric de MARI évoque l’accusateur public de la Vienne, Rampillon, destitué à la suite de l’intervention des représentants en mission Lejeune et Piorry, pour un réquisitoire jugé trop indulgent en faveur de deux domestiques impliqués dans une émeute (art. cité, p. 237).
9 Extrait du dossier conservé aux Archives nationales à propos du procès de Fouquier-Tinville, cité par Eric de MARI, art. cité, p. 239.
10 Constitution de l’an VIII, art. 63 : « La fonction d’accusateur public près un tribunal criminel, est remplie par le commissaire du gouvernement ».
11 Idem, art. 41 : « Le premier consul [...] nomme et révoque à volonté [...] les commissaires du gouvernement près les tribunaux ».
12 Formule figurant en titre de développements dans Histoire de la justice en France, par J.-P. ROYER, J.-P. JEAN, B. DURAND, N. TERASSE et B. DUBOIS (PUF 2010), p. 453.
13 Art. 8 de l’ordonnance du 20 novembre 1822 (DUVERGIER, t. XXIV, p. 184) et art. 1er de l’ordonnance du 27 août 1830.
14 Cf. les nombreuses citations extraites des rapports et des correspondances conservés dans la série BB des archives nationales et figurant dans l’article très explicite de Jean-Pierre ROYER, « Le ministère public, un enjeu politique au XIXe siècle » dans Histoire du parquet, p. 257 à 296. A l’inverse, il relève comme une belle manifestation d’indépendance la lettre du procureur général de Douai qui ose informer le ministère qu’il a cru bon de faire preuve de modération dans la mise en œuvre des mesures de rigueur qui lui avaient été demandées contre les écrits dangereux mais qui poursuit sa missive par une protestation de loyauté fort prudente, expliquant au ministre que si « ces adoucissements vous paraissent avoir des dangers, même dans des départements paisibles comme les nôtres, je vous prie de m’en prévenir et de les excuser en faveur des bonnes intentions. J’aurais soin de faire exécuter les mesures que vous jugerez à propos d’y substituer » (id., p. 265- 266). Le naturel soumis revient donc rapidement.
15 Lettre du président de Malleville du 23 août 1820 citée par Jean-Pierre ROYER, art. cité, p. 266, note 4.
16 Archives parlementaires de 1787 à 1860, 2e série, t. II, Paris 1873, p. 213-214.
17 Id., p. 214.
18 En 1824, puis dans une deuxième édition datée de 1825, M. d’EYRAUD publie De l’administration de la justice et de l’ordre judiciaire en France (première édition : 2 vol., Crapelet éd. ; 2e édition : 3 vol., Fanjat aîné éd.), ouvrage qu’analyse Jacques KRYNEN sous le titre « Une charge contre le ministère public » (Etat de la justice France, XIIIe-XXe siècle, t. II : L’emprise contemporaine des juges, Gallimard, Bibliothèque des histoires, Paris 2012, p. 77-83). Eyraud défend une haute conception des missions et des responsabilités du ministère public, tout en reconnaissant qu’il peut être tenté de se mettre au pur et simple service d’une ligne politique et en lui refusant l’inamovibilité.
19 Cité dans Histoire de la justice en France, p. 660.
20 Cf. A. CABANIS, Présentation et notes de De la liberté des brochures, des pamphlets et des journaux, considérée sous le rapport de l’intérêt du gouvernement, publié dans Constant (Benjamin), Œuvres complètes, t. IX, Tubingen 2001, 1, p. 57 à 115 ; Présentation et notes de Questions sur la législation actuelle de la presse en France, et sur la doctrine du ministère public, relativement à la saisie des écrits, et à la responsabilité des auteurs et imprimeurs, publié dans Constant (Benjamin), Œuvres complètes, t. X, Tubingen 2010, 1, p. 659 à 728 ; A. CABANIS et O. DEVAUX, Présentation et notes de Annales de la session de 1817 à 1818, publiées dans CONSTANT (Benjamin), Œuvres complètes, t. X, Tubingen 2010, 1, p. 899 à 1053
21 Pour ce qui est des auteurs de droite, en l’occurrence légitimiste, on peut citer CHATEAUBRIAND, poursuivi pour sa défense de la duchesse de Berry, assurant lui-même sa défense, se moquant des attitudes du procureur, flattant le jury : Mémoires d’Outre-Tombe, livre 36, chap. 26 : « Mon procès ». Comme souvent chez Chateaubriand il y a une part de reconstruction de sa propre histoire : cf. le compte rendu du procès par Le Moniteur, 1er mars 1833, p. 559 ; Ghislain de DIESBACH, Chateaubriand, Perrin, Paris 1995, p. 485-487.
22 Claude BELLANGER et al., Histoire générale de la presse française, t. IL PUF, Paris 1969, p. 114 et s.
23 A. CABANIS, « L’image des débats en Cour d’assises chez les romanciers français des XIXe et XXe siècles », dans Justice et politique : de la guerre de cent ans aux fusillés de 1914 (dir. J. BASTIER), Presses de l’Université des sciences sociales de Toulouse, Toulouse, 1998, p. 53 à 72 ; not. « II – Une affaire de professionnels ».
24 Victor HUGO souligne le style inutilement emphatique du vocabulaire utilisée par le procureur lors du procès qui va conduire Jean Valjean à se dénoncer ; il évoque « cette langue de province qui, [...] étant devenue classique, n’est plus guère parlée que par les orateurs officiels du parquet, auxquels elle convient par ses sonorités graves et son allure majestueuse » (Les Misérables, livre 7, chap. 9 et 10). Albert CAMUS met en scène Meursault surpris de l’agressivité de l’avocat général à son encontre : « tant d’acharnement m’étonnait. J’aurais voulu lui expliquer cordialement, presque avec affection [...]. Mais naturellement, dans l’état où l’on m’avait mis, je ne pouvais parler à personne sur ce ton » (L’étranger, deuxième partie, chap. 3 et 4). François MAURIAC, pour sa part, décrit l’avocat général « orateur armé de poncifs redoutables », ajoutant qu’il « met au service de la société de très vieilles armes mais éprouvées, car la rouille envenime les plaies » (« L’affaire Fabre-Bulle », dans Œuvres romanesques et théâtrales complètes, Gallimard (La Pléiade), Paris 1979, t. II, p. 889).
25 Une certaine image du procureur de la République s’impliquant personnellement dans la poursuite des crimes dure jusqu’à nos jours. A l’occasion du départ un peu prématuré à la retraite, début octobre 2011, de M. Bilger, avocat général près la cour d’appel de Paris, le Monde publie un article délicieusement fielleux comme à son habitude25. Le grand quotidien du soir se délecte de ce que ce « partisan enthousiaste » de Nicolas Sarkozy le qualifie désormais de « Caligula au petit pied ». Nous retiendrons de cette interview le passage suivant : « j’espère n’avoir pas mis la main ni l’esprit dans une véritable erreur judiciaire. Je n’ai pas toujours été à la hauteur de cette philosophie qui veut que, lorsqu’une accusation judiciaire s’effondre, il faille la laisser s’effondrer : parfois je la retenais je l’admets ».
26 Lettre de Gustave Rouland, avocat général à la Cour de cassation (3 mars 1848) citée dans Histoire de la justice en France, p. 659 où il est ajouté, à propos de cet « éternel adieu à la vie politique » : « Pas si sûr... ». De fait, il est rappelé dans ses fonctions dès 1849. Il sera même ministre de l’Instruction publique et des Cultes sous Napoléon III.
27 Première épuration : entre septembre 1870 et janvier 1871 lorsque s’installe le gouvernement républicain provisoire et que Crémieux revient au ministère de la Justice ; deuxième mouvement important en sens inverse : entre février 1871 et mai 1873, en forme de revanche des victimes des mesures précédentes avec la présence de Thiers comme chef du pouvoir exécutif et de Dufaure comme ministre de la Justice ; troisième mouvement qui accentue le précédent : de mai à octobre 1877 dans le cadre du régime de l’ordre moral qui croit possible d’inverser l’évolution du corps électoral vers la République en s’appuyant sur le relais des agents publics, au premier chef les préfets et les magistrats ; enfin quatrième épuration : entre février 1879 avec l’arrivée du ministère Waddington et jusqu’à la loi du 30 août 1883, avec la volonté des Républicains de mettre la magistrature en harmonie au moins apparente avec le nouveau régime, avec notamment Cazot et Martin-Feuillée comme gardes des Sceaux.
28 Soit une centaine selon G. PICOT (La réforme judiciaire en France, Hachette, Paris 1881), 319 selon G. MARTIN-SARZEAUD (Recherches historiques sur l’inamovibilité de la magistrature, Marchal, Paris 1883) et 156 selon M. ROUSSELET (La magistrature sous la monarchie de Juillet, Sirey, Paris 1937). Ces comparaisons sont effectuées dans Histoire de la magistrature en France, p. 654, n. 1.
29 Art. 41 de la constitution de l’an VIII : « Le premier consul [...] nomme tous les juges criminels et civils autres que les juges de paix et les juges de cassation, sans pouvoir les révoquer » ; art. 58 de la charte de 1814 : « Les juges nommés par le roi, sont inamovibles » ; le chancelier précisant : « Il n’y a que les juges nommés par le roi qui soient inamovibles ».
30 Ce serait 259 parquetiers et 300 juges qui auraient démissionné en cette circonstance (Histoire de la justice en France, p. 744).
31 Alain BANCAUD, La haute magistrature sous Vichy XXe siècle, Paris 1996 ; id., Une exception ordinaire. La magistrature en France 1930-1950, Paris 2002 ; AFHJ, La justice des années sombres (1940-1944), Paris 2001 et not. J.-P. JEAN, « Quel regard porter sur les magistrats ayant siégé dans les juridictions d’exception sous l’occupation ? », p. 237-246.
32 Nombre des magistrats affectés par ce décret fixant l’âge de retraite à 70 ans pour l’ensemble des magistrats et à 75 ans pour les membres de la Cour de cassation : 132.
33 En 1830, les parquetiers sont les premières victimes des épurations : 426 révocations d’après ROUSSELET (La magistrature sous la Monarchie de juillet, ouvr. cité).
34 Cité dans Histoire de la justice en France, p. 665.
35 Ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature (JO 23 déc. 1958. p. 11551). En revanche, dans sa version primitive, la constitution de 1958 ne donne pas d’indication sur le corps unique, lacune comblée par une décision du Conseil constitutionnel du 11 août 1993 : « l’autorité judiciaire qui, en vertu de l’article 66 de la constitution, assure le respect de la liberté individuelle, comprend à la fois les magistrats du siège et du parquet » (décision n° 93-326, 5e considérant).
36 Art. 1er de la loi organique n° 92-189 du 25 février 1992, ajoutant un deuxième paragraphe à l’ordonnance de 1958.
37 Cf. le développement « Clarifier les fonctions du siège et du parquet » (p. 446 et s.) Rapport fait au nom de la commission d’enquête chargée de rechercher les causes des dysfonctionnements de la justice dans l’affaire dite Doutreau », n° 3125, 6 juin 2006 : « Si le président de l’USM ne se pose pas la question de l’opportunité ou non de la pérennité de ces passerelles entre le siège et le parquet (« En quoi faudrait-il modifier le système et prévoir une séparation du siège et du parquet ? Ce n’est absolument pas nécessaire »), les arguments avancés ici et là en faveur de l’unité du corps des magistrats apparaissent d’ordre psychologique, professionnel et déontologique. [...] Dans le même ordre d’idées, pour M. Eric Alt, vice-président du Syndicat de la magistrature : « la scission du corps irait dans le sens d’une fonctionnarisation du parquet ». Les mêmes considérations déontologiques ont été formulées sous une autre forme par ce magistrat : « Il est important que magistrats du siège et magistrats du parquet doivent défendre les mêmes valeurs. C’est pourquoi nous sommes pour l’unicité du corps ».
38 Rapports pour 1998, 2001, 2003-2004 et 2005 (La documentation française, p. 191-192).
39 Pour une tentative de mise en perspective historique de l’évolution des missions du juge en France depuis l’Ancien Régime : A. CABANIS et M. MARTIN, « La justice depuis le XIXe siècle : attentes sociales et dérives professionnelles », dans La légitimité des juges, Toulouse 2004, p. 25-37. Pour une rétrospective bienveillante sur le destin des « juges rouges » : « Vingt ans de syndicalisme judiciaire 1968- 1987 », dans la revue du SM., Justice, juin-septembre 1988.
40 La mutation en forme de promotion dans un petit Tribunal de grande instance, de M. Ceccaldi, jusque là substitut à Marseille, est considérée par la presse comme une sanction faisant suite à son enquête sur les ententes pétrolières. Une grève de plusieurs centaines de magistrats lui permet d’obtenir l’annulation de sa nomination. Il sera nommé préfet de Nice par la gauche arrivée au pouvoir. Quant au TGI d’Hazebrouck, il est décidé de le supprimer en 2011.
41 L’information judiciaire devait porter sur un rapport sans intérêt payé par le Conseil général de l’Essone à Mme Tiberi qui ne sera finalement pas poursuivie à cause d’erreurs de procédure. Quant à l’ancien procureur de l’Essonne, Laurent DAVENAS, il va publier ses réflexions sur la justice sous le titre Lettre de l’Himalaya à ceux qui jugent et à ceux qui sont jugés (Seuil 1998).
42 Philip MILBURN, Katia KOSTULSKI et Denis SALAS, Les procureurs entre vocation judiciaire et fonctions politiques, PUF, Paris 2010, p. 152. Pour une vision dramatisée du syndrome obsidional de la magistrature debout : « les parquetiers se sentent assaillis par un environnement hostile qui déciderait de leur sort à leur corps défendant. Ils perçoivent une alliance objective – réelle ou fantasmée- entre juges, avocats et parlementaires pour instaurer une procédure accusatoire dans le système judiciaire français » (id., p. 151).
43 Cité dans Histoire de la justice en France, p. 1180.
44 Art. 1 de la loi constitutionnelle n° 93-952 du 27 juillet 1993, modifiant l’article 65 de la constitution relatif au Conseil supérieur de la magistrature.
45 Art. 31 de la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 modifiant l’art. 65 de la constitution, notamment en prévoyant un avis du CSM pour la nomination de tous les magistrats du parquet, y compris ceux auxquels il est pourvu en conseil des ministres.
46 Audience solennelle de début d’année de la Cour de cassation, allocution par Jean-Louis Nadal, procureur général près la Cour de cassation, 14 janvier 2010.
47 Article 5 § 3 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « Toute personne arrêté ou détenue [...] doit être aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires ».
48 Arrêt de base : Schiesser contre Suisse du 4 décembre 1979, § 31 : « le « magistrat » ne se confond pas avec le « juge » mais encore faut-il qu’il en possède certaines des qualités, c’est-à-dire remplisse des conditions constituant autant de garanties pour la personne arrêtée. La première d’entre elles réside dans l’indépendance à l’égard de l’exécutif et des parties ».
49 § 59 de l’arrêt du 23 novembre 2010 : « La Cour estime que le procureur adjoint de Toulouse, membre du ministère public, ne remplissait pas, au regard de l’article 5 § 3 de la Convention, les garanties exigées par la jurisprudence pour être qualifié, au sens de cette disposition, de ‘juge ou (...) autre magistrat habilité par la loi à exercer les fonctions judiciaires’ ».
50 Arrêt n° 7177 du 15 décembre 2010 (10-83.674). Cour de cassation, chambre criminelle.
51 Cf. Quel avenir pour le ministère public ?, sous l’égide de la Cour de cassation, Dalloz, Paris 2008, notamment les « Conclusions et perspectives d’avenir » de Robert BADINTER (p. 173-181).
Auteurs
Professeurs à l’Université Toulouse 1 Capitole (CTHDIP)
Professeurs à l’Université Toulouse 1 Capitole (CTHDIP)
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