Les désunions de la magistrature
(xixe-xxe siècles)
Études d’histoire du droit et des idées politiquesÉditeur : Presses de l’Université Toulouse Capitole
Lieu d’édition : Toulouse
Publication sur OpenEdition Books : 4 janvier 2021
Collection : Études d’histoire du droit et des idées politiques
Année d’édition : 2012
Nombre de pages : 551
Présentation
La magistrature, et la justice avec elle, génère depuis plusieurs années une littérature abondante. De la presse quotidienne aux essais les plus savants, les difficultés de l’institution judiciaire, autant que ses défauts, nourrissent une interrogation où la magistrature, comme objet d’étude, occupe une bonne place. On s’inquiète de sa responsabilité ; on veut connaître scs opinions. On suppose son pouvoir, ou on déplore qu’elle n’en ait aucun. Chaque fois, le singulier s’impose et désigne un « corps de magistrats » doté, par la magie évocatrice de l’unité supposée, d’une puissance et d’une majesté que la justice entretient visiblement jusque dans ses temples et ses atours. Un singulier qui résonne plus fort encore lorsqu’il s’agit de l’opposer, tels deux blocs antagonistes, au pouvoir politique. Monde judiciaire, ordre judiciaire, autorité ou pouvoir judiciaire : la conflictualité qui marque les rapports entre « le » pouvoir juridictionnel et « le » politique s’embarrasse rarement des nuances constitutives du corps divers de la magistrature.
Pourtant, l’unité doit-elle suivre ce singulier d’usage ? A l’image d’un monde complexe, la magistrature est bien traversée de divisions sociales et d’une pluralité de représentations et d’habitudes mentales. La variété des statuts de ses membres, les blocages hiérarchiques - propres au moins à tout système administratif - les résistances entre magistrats supérieurs et inférieurs, les conflits de compétence ou de juridiction, les rivalités entre « le » siège et « le » parquet, l’cclatcmcnt des ordres juridictionnels, le pluralisme syndical, les parcours politiques individuels : tout invite à se méfier d’un singulier forcément trompeur, porteur de représentations conventionnelles, et à explorer, en complément, les diversités de la magistrature.
Dans un contexte marqué par le regain de tensions entre le politique et « le » juge, l’historien peut alors proposer une interrogation sur les formes et le contenu de ces conflits à partir de l’hypothèse des désunions internes d’un corps excessivement présenté dans sa capacité d’union. A partir du cas de la France et de l’Italie, où l’histoire de la justice autant que son actualité sont marquées par des conflits ouverts et assumés par les deux pouvoirs, avec l’exemple de l’Espagne et de la Suisse également, le livre explore la piste des désunions de la magistrature comme élément éclairant d’une conflictualité ancienne aux formes et acteurs très variés.
Sommaire
Jacques Krynen
IntroductionPremière partie : juges contre juges : la naissance des désunions au xixe siècle
Christine Mengès-Le Pape
De quelques regards posés sur la magistrature ancienne au début du xixe siècleFrancesco Aimerito
Différenciations mentales et culturelles dans la magistrature du royaume de Sardaigne au xixe siècle : « magistrats », « juges » et « lois de procédure »Julian Montemayor
Juges absolutistes contre juges libéraux en Espagne (1808-1842)Francesco Di Donato
Le gouvernement divise des jugesNouveaux modèles de la médiation patriarcale dans le monde contemporain
Deuxième partie : juges contre juges : les formes nouvelles des désunions au xxe siècle
Jean-Claude Farcy
Du « bon juge » aux « juges rouges »Béatrice Fourniel
Associations et syndicats de magistrats de l’ordre judiciaire dans la France du xxe siècleMathieu Soula
« Faire corps », une illusion d’institution ?Les relations entre magistrats d’après la jurisprudence du conseil supérieur de la magistrature (1958-2010)
Troisième partie : juges contre juges : magistrature et non professionnels
Jean-Christophe Gaven
Les juges révolutionnaires face aux notables-adjoints : l’unité de la magistrature contre la division de la justiceDanielle Anex-Cabanis
Juges professionnels et juges laïques en SuisseJacques Raibaut
La justice consulaire entre tolérance et nécessitéJacques Poumarède
La conciliation, la mal-aimée des jugesBernadette Pierchon-Bédry
Les prud’hommes pêcheurs en MéditerranéeQuatrième partie : l’unité du corps : à l’épreuve des structures
André Cabanis et Olivier Devaux
Siège et parquet en France (xixe-xxe siècles)Maria Gigliola di Renzo Villata
Le ministère public en Italie après l’unification (xixe -xxe siècle)Quelques considérations sur son rôle politique, le principe de la légalité et... de l’opportunité des poursuites
Cinquième partie : l’unité du corps : à l’épreuve de la dualité de juridiction
Grégoire Bigot
La critique de la justice administrative par les magistrats de l’ordre judiciaire au xixe siècleBernard Pacteau
Les conflits entre l’ordre administratif et l’ordre judiciaire, avant et donc sans le tribunal des conflits…Sixième partie : l’unité du corps : à l’épreuve de la concurrence des juridictions
Isidoro Soffietti
Les résistances politiques et juridiques à la création d’une cour de cassation : le cas du royaume de Piémont-SardaigneLaurence Soula
Le difficile ajustement des relations entre les cours d’appel et la cour de cassationLe Chaos de la jurisprudence au xixe siècle
Septième partie : nouvelles désunions ?
Philippe Delvit
Les désunions de la magistrature. Voire…Les jugeurs passés à la moulinette de l’assiette au beurre
Caroline Gau-Cabée
Mythe et réalités d’une société moniste : le droit au cœur des divisions, les voies de l’unitéLycette Condé
Juges français et juges européens : un ou plusieurs corps et une ou plusieurs voix pour dire les règles communes ?Jean-Christophe Gaven
ConclusionsLe texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.