La faculté de droit de Nancy
p. 39-54
Texte intégral
1Confortablement installée dans le Palais de l’Académie, place Carnot, la Faculté de droit de Nancy semble avoir toujours fait partie du paysage urbain et scientifique nancéien.
2En fait, la Faculté est d’abord le Collège de droit de Pont-à-Mousson, fondé en 1582. Elle ne devient Faculté de droit de Nancy qu’avec son transfert dans la cité ducale en 1768, après la mort de Stanislas et le rattachement des duchés de Lorraine et de Bar à la France. L’histoire du Droit à Nancy a bien failli s’arrêter en 1803, lorsque l’Ecole spéciale de droit de Strasbourg est chargée d’enseigner le droit pour les étudiants de l’Est de la France impériale. Il faut attendre le 9 janvier 1864 pour que la Faculté de droit de Nancy soit définitivement rétablie.
3L’histoire de la Faculté de droit de Nancy est aujourd’hui assez bien connue. Plusieurs travaux de recherches de synthèses ont permis d’en écrire les grandes lignes (cf. que nous présentons en annexe 1). L’ouvrage de référence est bien entendu l’étude de Mlle Aline Logette, Histoire de la Faculté de droit de Nancy (1768-1864-1914), parue en 1964, bien complétée depuis, notamment pour la période ultérieure à la Première Guerre Mondiale, comme en témoigne la bibliographie actuelle :
- Charles BRUNEAU, André GAIN, Eugène MARTIN, Félix SENN (et autres), L’Université de Nancy (1572-1934). Nancy, Editions du Pays Lorrain, 1934, p. 1 à 62 et p. 167 à 194. (recueil d’articles publiés précédemment dans Le Pays Lorrain.
- Jean-Louis GREFFE, « Le renouveau de l’Université de Nancy et la création des Grandes Ecoles à la fin du XIXe siècle ». Le Pays Lorrain, 1999, p. 107 à 116.
- Pierre LALLEMAND, Maurice NOËL, Pont-à-Mousson. S. l., s.d.
- Aline LOGETTE, Histoire de la Faculté de droit de Nancy (1768-1864-1914), Nancy, Université de Nancy, 1964, 275 pages.
- François LORMANT, « Aperçu illustré et commenté de l’histoire de la Faculté de Droit de Nancy, depuis sa création à Pont-à-Mousson en 1582... à nos jours », Nancy, Centre Lorrain d’Histoire du Droit, 2005, 90 pages.
- François LORMANT, « Mémoire et culture matérielle de la Faculté de Droit de Nancy : de la commémoration à la recherche historique », in Mémoire et culture matérielle de l’Université : sauvegarde, valorisation et recherche, Nancy, PUN, 2008, p. 135 à 147.
- Philippe MARTIN, « L’Université face à de nouveaux défis (1914-1972) », Les Universités de Nancy, Le Pays Lorrain, Hors série 2003, p. 27 à 36.
- François PUPIL, « L’architecture à Nancy après Stanislas : la construction de l’Université », Le Pays Lorrain, 1981, p. 229 à 236.
- François ROTH, « L’essor de l’Université de Nancy (1871-1914) ». Les Universités de Nancy, Le Pays Lorrain, Hors série 2003, p. 17 à 26.
- Guy VAUCEL, « Bibliothèque et médiathèque de Nancy ». Le Pays Lorrain, 1992, p. 45 à 50.
4D’autres recherches peuvent désormais être entreprises. En effet, si un certain nombre des archives de la Faculté sont aujourd’hui déposées et consultables aux Archives départementales de Meurthe-et-Moselle dans la série 1743W (cf. annexe 2, p. 13), le décanat a souhaité conserver un certain nombre de pièces, notamment les registres de délibérations du conseil de la Faculté, depuis son rétablissement en 1864 jusqu’à 1950.
5C’est avec ces sources que nous avons rejoint le « groupe PSN », en 2005. Dirigé par Laurent Rollet et Marie-Jeanne Schoffel-Mailfert, du Laboratoire de philosophie et d’histoire des sciences de l’Université Nancy 2 (LPHS-Archives Henri Poincaré), il réunissait plusieurs chercheurs dans une perspective interdisciplinaire, autour du projet de recherches « Genèse du Pôle scientifique nancéien : 1854-2004 ». Dans un rapport de 423 pages publié en 2006, il apporte une contribution originale sur les questions de création et de développement universitaire à Nancy au cours des 150 dernières années, en se focalisant plus particulièrement sur l’histoire des institutions scientifiques nancéiennes. Egalement, toujours dans le cadre de ce projet, le groupe PSN a organisé un colloque « Mémoire et culture matérielle de l’Université » le 8 avril 2005 (publié aux Presses universitaires de Nancy en 2008).
6Aujourd’hui, les recherches entreprises sur l’histoire de l’enseignement supérieur à Nancy se poursuivent dans le cadre de l’équipe ELOISE (Equipe lorraine d’histoire des institutions scientifiques et éducatives) et dont le projet constitue un des cinq axes de la MSH Lorraine1. C’est dans ce cadre que j’ai entrepris de travailler sur les délibérations du conseil de la Faculté depuis 1864. Après une lecture et un dépouillement méthodique de cette masse de documents, je souhaite constituer une base de données informatique qui permettra de pouvoir appréhender l’histoire de l’institution pendant les périodes des guerres (1870-1871 ; 1914-1918 et 1939- 1945) ; pendant celle du rattachement d’une partie de la Lorraine et de l’Alsace à l’Empire allemand, faisant de Nancy une ville proche de la frontière et de l’Université de Nancy (et la Faculté de droit), la dernière Université française avant l’Allemagne, dans un contexte de « Revanche », de « militarisation de la France de l’Est »...
7Nous pourrons aussi mieux connaître les hommes qui ont siégé dans les conseils entre 1864 et 1950, donc dans une période comprise entre les mandats comme doyens de François Jalabert (1864-1880) à Pierre Voirin (1949-1954). Outre un aspect purement documentaire, cette partie du travail permettra sans nul doute d’ouvrir des pistes de recherches sur les travaux des universitaires, notamment au regard de leurs opinions exprimées lors des délibérations.
8Egalement, je souhaiterais faire une étude les étudiants de la Faculté entre 1878 et 1930, à partir de plusieurs registres publiés des travaux et publications des étudiants de l’Université, rédigés à l’occasion tant des concours généraux, que des épreuves pour l’agrégation du supérieur, entre 1878 et 1930. Un dépouillement exhaustif et thématique de ce florilège nous donnera certainement de précieuses indications sur la sociologie du mode étudiant, sur les questions juridiques qui faisaient débat et sur l’histoire générale de l’enseignement du droit à Nancy à cette période.
9La Faculté de droit de Nancy est une institution bien vivante, installée depuis plus de trois cents ans dans la cité ducale, malgré une absence douloureuse entre 1803 et 1864. Elle n’a depuis cessé de grandir et d’accueillir toujours plus d’étudiants lorrains et européens. A son propos, Grégoire de Toulouse2 écrivait au XVIIe siècle dans son De Republica : « De ces séminaires d’étudiants se tirent des docteurs, véritables astres brillant pour l’éternité, qui forment les hommes à la justice, se répandent ces avocats qui travaillent au bonheur de l’Etat, en défendant les opprimés. De là, sortent les magistrats, les juges, les prêtres, les évêques, les cardinaux... ».
10La Faculté de droit de Nancy et ses laboratoires de recherches constituent désormais le domaine scientifique DEG (droit, économie et gestion) de l’Etablissement public de coopération scientifique Nancy- Université, institué par le décret du 21 mars 20073. Une nouvelle étape de la vie du droit à Nancy est donc en cours : nul doute de la Faculté de Nancy saura maintenir son long héritage académique et scientifique.
Annexe
Annexe 1 : Petite histoire de la Faculté de droit de Nancy
I - L’essor puis la suppression du Droit à Nancy (1582-1803)
A - Du collège de Pont-à-Mousson à la Faculté de Droit de Nancy (1582- 1768)
La Faculté de droit de Nancy est initialement celle de Pont-à-Mousson..., créée en 1582, à la suite de la Bulle In Supereminenti du pape Grégoire XIII4 qui érige le Collège et l’Université de Pont-à-Mousson en 15725. L’Université de Pont-à-Mousson est placée sous la direction des jésuites. On y enseigne la théologie, l’un et l’autre droit, utrumque jus, la médecine, avec un Collège d’humanités. La bulle papale prévoit également que le Collège de Pont-à- Mousson sera établi dans les bâtiments de la commanderie de Saint- Antoine. On pourvoira à l’entretien des maîtres par une rente de 1 500 écus d’or, prélevés sur les revenus de l’abbaye de Gorze et 1 500 autres sur la mense épiscopale de Metz pour un tiers et sur les revenus des abbayes et prieurés des Trois Evêchés pour le surplus. En retour, la Compagnie de Jésus établira un collège, aussi vaste que ceux qu’elle a déjà fondés auprès des Universités les plus célèbres. La Faculté de théologie et celle des arts aura des jésuites pour doyen et professeurs ; les Facultés de médecine et de droit seront confiées à des laïques et dirigés par leur doyens, sous l’autorité d’un recteur, dont la charge dépendra de la Compagnie.
Grégoire XIII confirme sa fondation le 1er décembre 1577, dans sa bulle In suprema apostolicae sedis. Sixte-Quint, dans la bulle Rationi congruit, précise les droits du recteur sur les Facultés le 1er mai 1578. En 1580, Charles III nomme son bailli de Saint-Mihiel, le sieur de Lénoncourt, comme conservateur des privilèges de l’Université, en lui attribuant la connaissance en dernier ressort, des causes de tous les officiers et des écoliers pour faits de scolarité.
La première rentrée a lieu le 27 octobre 1574, à l’exception des Facultés de droit et de médecine, dont l’ouverture est reportée à une date ultérieure, devant le peu d’enthousiasme réciproque des laïcs de se voir subordonnés aux religieux et des jésuites d’avoir sous leurs ordres des gens débauchés et étudiants à l’humeur aventurière que sont les légistes. Le duc Charles III6, dont les ambitions sont orientées vers la France, tient à s’assurer la formation d’un personnel administratif et politique capable de la servir. En 1577, le docteur William Barclay7, ouvre un cours de droit et pose la première pierre de la Faculté8. Barclay est conseiller-maître des requêtes en Lorraine, conseiller d’Etat du roi d’Angleterre Jacques 1er9, neveu du père Hay, le premier recteur de l’Université.
Le 27 mars 1582, Charles III rend un Règlement entre les Facultés de théologie et arts, et Facultés de droit canon et civil, « pour le bien et l’augmentation de notre chère et bien aimée fille l’Université de Pont-à- Mousson... et la rendre parfaite et accomplie de toute ses parties ». Il sépare les Facultés de théologie et d’arts de celles de droit civil et canon, « afin de retrancher le chemin au désordre », avec séparation « de ceux qui en font profession »1087.
L’Université est très prospère, à en juger par le développement de ses Facultés-800 élèves en 1587, 900 en 1594, 1 200 dans les premières années du XVIIe siècle -, la renommée de ses anciens élèves — Didier de la Cour, Servais de Lairuelz, Pierre Fourier, Philippe Thibaut, quatre futurs pères réformateurs des quatre grands ordres religieux de l’Eglise de France -.
Par un édit de février 1587, Charles III défend « le port d’armes aux étudiants, ainsi que la fréquentation des jeux publics pendant les jours de dimanche ; et de vendre des livres suspects sans la permission du Recteur ». Le duc réitère les mesures de fermeté vis-à-vis des étudiants déjà prises dans une lettre du 25 mars 1584. Ce règlement de police vise à réprimer « les violences et désordres qui pourroient advenir en nostre ville, cité et Université du Pont, au moyen des voyes de faits et desbauches d’aucuns escholiers mal affectés au bien de leur estude et repos du public »11.
Un règlement du 20 janvier 1628 pourvoit aux gages des quatre professeurs de droit de la Faculté de jurisprudence. Il décide d’allouer à chacun « treize cent francs » en complément des « mille francs de gages ordinaires par an », en compensation « des charges de vacation en la place de doyen, tant à faire lesdites lectures et la fonction dudit décanat, qu’à présider, discuter et haranger aux promotions desdits gradués ».
L’édit de Léopold12 du 6 janvier 1699 porte règlement des études et promotion aux degrés publics en l’Université de Pont-à-Mousson. Le duc cherche à « remettre l’Université dans son ancienne splendeur, en rétablissant la pureté de ses exercices, suivant ses anciens statuts », afin de la voir « refleurir comme auparavant, par sa renommée, dans toute l’Europe, mais encore qu’elle donnera à l’Eglise et à l’Etat des sujets dignes des emplois les plus importants ». Désormais, ceux qui veulent être « reçus à aucune charge de judicature dans nos états, tant dans nos cours et compagnies souveraines, que dans les bailliages et sièges bailliagers », prêteront « serment d’avocat sur des licences par lui obtenues, soit dans notre Université de Pont-à-Mousson, soit dans une autre Université approuvée ». Cette condition n’est remplie qu’après « deux années d’études consécutives et avoir obtenu le degré de bachelier après une année d’études ». En outre, ce texte confirme la création de quatre chaires de professeurs, de droit canon, d’Institutes et de code Justinien, du Digeste, « lequels auront soin, en dictant et expliquant leurs leçons de droit civil, de faire remarquer aux étudiants ce qui se trouvera abrogé, tant par les coutumes de nos pays, que par les ordonnances de nos prédécesseurs ducs et les nôtres ».
Un cours de droit public est créé à l’Université de Pont-à-Mousson par une déclaration du 15 décembre 1706, confirmée par l’édit de décembre 1723. Il établit une étude de droit municipal des duchés, de la législation ducale et des coutumes du pays de Lorraine en plus des quatre chaires de droit romain -Institutes et code Justinien -, droit canonique et droit civil13
B - 1768-1803 : du transfert de la Faculté à Nancy à sa suppression
Pour marquer son opposition au roi de France, Léopold veut supprimer la chaire de droit français. Louis XIV, blessé, répond alors en retirant aux titres acquis à l’Université lorraine l’équivalence avec les titres acquis en France, ce qui à pour conséquence de détourner de Pont-à-Mousson les étudiants français, d’Alsace et des Trois Evêchés... Le successeur de Léopold, son fils François III, épouse l’archiduchesse d’Autriche. Il abandonne ses duchés au roi de Pologne Stanislas Leszczynski14, le beau-père de Louis XV. Stanislas est favorable à l’Université de Pont-à-Mousson : le 23 juillet 1744, il l’honore même de sa visite. En dépit des assauts répétés de la Cour Souveraine et ceux plus pressants encore de l’intendant Chaumont de la Galaizière1592, il n’est cependant pas décidé à la transférer à Nancy, afin de ne pas plus l’affaiblir et la déconsidérer, même si en 1752 il accepte la création d’un Collège royal de médecine à Nancy.
Le 23 février 1766, après la mort de Stanislas et le rattachement de la Lorraine à la France en vertu du traité de Vienne de 1736, la ville de Nancy reprend ses démarches pour obtenir le transfert de l’Université en ses murs. Le 1er juillet 1768 paraît l’édit de suppression de la Compagnie de Jésus. Privé de son principal soutien, l’Université doit céder... Le 3 août 1768, Louis XV donne à Compiègne les lettres-patentes qui transfèrent l’Université de Pont-à-Mousson à Nancy. Après 216 ans, c’est la fin de l’histoire universitaire de cette ville. La Lorraine perd ainsi à la fois son indépendance et Pont-à-Mousson son Université.
C’est par lettres-patentes royales du 7 septembre 1769, que Louis XV pourvoit au paiement des dépenses concernant l’établissement des Ecoles de droit et de médecine de l’Université de Nancy. Il accorde 1 000 livres par an d’honoraires à son recteur et fixe une dotation de 200 livres à l’Université et 300 livres à chacune de ses deux Facultés, « pour l’entretien des meubles et les menues réparations des écoles »16. L’édifice, prévu pour accueillir l’Université de Nancy et sa bibliothèque n’est terminé qu’en 1778. En attendant, les Facultés sont dispersées dans la ville : la médecine est ainsi accueillie dans un des pavillons de la place Stanislas. Le 11 novembre 1778, les Facultés de droit et de médecine s’installent solennellement dans le Palais de l’Université, qui est aujourd’hui la Bibliothèque municipale de Nancy. La médecine occupe l’aile gauche, le droit le centre. En 1788, l’aile droite achevée est donnée aux avocats pour y tenir leurs conférences et y installer leur bibliothèque privée17.
Le premier cours de droit en français de la Faculté de Nancy est créé en 1789. Des lettres-patentes du mois de mars de la même année substituent à la chaire de droit municipal et coutumier une chaire de droit français, pour « expliquer la constitution et les nouvelles lois promulguées par l’Assemblée constituante ». Le 11 janvier 1792, à l’occasion de la remise des prix aux meilleurs étudiants en droit français, Henri, l’avocat chargé du cours, reçoit une médaille en or d’une valeur de 100 écus, pour « lui donner une preuve de satisfaction de son civisme et de son zèle à faire connaître les principes de la constitution et du droit français ».
A la veille de la Révolution, la France compte vingt-deux Universités : Aix, Angers, Avignon, Besançon, Bordeaux, Bourges, Caen, Dijon, Douai, Montpellier, Nantes, Orange, Orléans, Paris, Pau, Perpignan, Poitiers, Rennes, Strasbourg, Toulouse, Valence et Nancy. Comme les autres Universités (sauf celles de Dijon, Orléans, Pau et Orange), Nancy est constituée des quatre « Facultés Supérieures » de théologie, droit, médecine et arts. En 1793, l’Université de Nancy est vue comme une des mieux installées du royaume, avec une salle de bibliothèque pouvant contenir au moins 30 000 volumes, un logement pour le bibliothécaire, des salles d’enseignement pour le droit, la médecine et la théologie, des logements pour les professeurs, un laboratoire de physique, un cabinet d’histoire naturelle et un laboratoire de chimie.
Entre 1789 et 1803, la formation des étudiants devient moins théorique, pour s’orienter plus vers la pratique et l’enseignement professionnel des étudiants. Ainsi, le décret du 7 ventôse an III (25 février 1795) crée les Ecoles centrales, pour l’enseignement des sciences, des lettres et des arts, à raison d’une par département et chargées comme les anciens collèges de former les jeunes gens de 16 à 18 ans. Chaque Ecole centrale comprend notamment un professeur d’économie politique et de législation payé 3 000 livres par an. Le texte supprime tous les anciens établissements d’instruction publique, « connus sous le nom de collèges » sur toute l’étendue du territoire. L’Ecole centrale du département de la Meurthe est créée par le décret du 18 germinal an IV (1er avril 1796). Elle est installée à Nancy le 20 messidor suivant (1er juin 1796), dans le Palais de l’Université.
La loi du 11 floréal an X (1er mai 1802) sur l’instruction publique réorganise l’enseignement de la République en plusieurs niveaux : primaire, secondaire et lycée d’une part et Ecoles spéciales d’autre part. Celles-ci sont chargées « de l’étude complète et approfondie, ainsi que du perfectionnement des sciences et arts utiles ». Les Ecoles spéciales remplacent les Ecoles centrales des départements. Celle de la Meurthe, à Nancy, est fermée officiellement le 1er nivôse an XII (23 décembre 1803), entraînant avec elle la fin-jusqu’en 1864-de l’enseignement du droit à Nancy.
Désormais, l’enseignement du droit est confié à douze écoles spéciales pour l’Empire : à Aix, Caen, Dijon, Grenoble, Paris, Poitiers, Rennes, Toulouse, Turin, Bruxelles, Coblence et Strasbourg pour l’Est de la France. Les Ecoles spéciales de droit deviennent Facultés de droit par la loi du 10 mai 1806 créant l’Université Impériale. A Strasbourg, elle commence ses enseignements aux étudiants officiellement le 2 novembre 1806. Charles François Thiéret et Sébastien-Hubert Guillaume, deux anciens professeurs de l’Ecole centrale du département de la Meurthe s’y établissent.
II - De 1864 à 1940 : l’essor de l’Université de Nancy
A - 1864-1870 : le retour du droit à Nancy
Au milieu du XIXe siècle, le gouvernement prend conscience de la nécessité de former des élites intellectuelles afin d’assurer le développement du pays. En même temps, les classes élevées de la société se rendent compte que l’idée du progrès n’est pas forcément en opposition avec les valeurs traditionnelles morales et religieuses. L’Université ne formerait donc pas forcément des athées et des révolutionnaires, mais des ingénieurs, des chefs d’entreprises, des économistes, des juristes, des chimistes, des médecins, etc. dont le monde moderne a besoin. Former les juristes lorrains à Strasbourg ne semble plus répondre aux besoins de l’élite culturelle de Nancy. La question du rétablissement d’une Faculté de droit est au centre des préoccupations, tant intellectuelles que politiques. A partir de 1854, Prosper-François Guerrier de Dumast18 veut rendre à sa ville le rang et l’éclat d’une capitale régionale qu’elle avait dans le passé. C’est par lui que l’Académie Stanislas retrouve sa noblesse, que le Musée lorrain et la Société archéologique lorraine sont créés, que le Palais des ducs est restauré. Le 7 décembre 1854, le rectorat de Nancy est créé, ce qui provoque l’ouverture d’une Faculté des lettres et d’une Faculté des sciences. Guerrier de Dumast trouve avec le premier recteur de l’Université de Nancy, un allié de choix. Ils militent ensemble pour le rétablissement de la Faculté de droit de Nancy. En visite en Lorraine en 1863, le ministre de l’Instruction publique écrit que « la création d’une nouvelle Faculté de droit ne peut présenter un caractère d’utilité publique et n’a d’autre intérêt que pour la ville de Nancy et la région dont elle est le centre intellectuel, puisque les Facultés qui existent déjà suffisent largement aux besoins de la Nation ». Il accepte néanmoins de considérer le projet nancéien, à la condition toutefois que la ville de Nancy « accepte d’assumer seule le coût de fonctionnement de la Faculté pendant dix années »19. Les garanties étant acquises, le décret impérial du 9 janvier 1864 rétablit la Faculté de droit de Nancy. En 1872, c’est la création d’une Faculté de médecine, en remplacement de l’Ecole préparatoire de médecine créée en 1843.
Le décret du 10 décembre 1871 crée une seconde chaire de droit romain. Après la chute de l’Empire, les chaires de code Napoléon prennent le nom de chaires de code civil (décret du 25 septembre 1874), puis de droit civil (décrets du 24 juillet 1889, du 30 avril 1895 et 1er août 1905). Par décret du 15 septembre 1872, la chaire de procédure civile et législation criminelle, est dédoublée. Le 15 janvier 1881, une première chaire d’économie politique est créée à Nancy, puis une seconde en 1889.
B - 1870-1945 : la vie du droit à Nancy, au travers des guerres
A la suite de la défaite française contre la Prusse en 1870, une partie de la Lorraine et l’Alsace sont annexées à l’Empire allemand. Nancy est placée à proximité de la nouvelle frontière avec l’Allemagne. Pour protéger les convois ferroviaires soumis à « des actes d’endommagements ayant eu lieu sur les chemins de fer », le commandant de la IIIe Armée allemande donne l’ordre le 18 octobre 1870, de faire accompagner les trains au départ de Nancy par « des habitants connus et jouissant de la considération générale ». Les professeurs de la Faculté de droit sont ainsi désignés.
En réponse, le conseil de la Faculté, réuni le 27 octobre 1870 et composé de MM. Jalabert20, doyen, Lombard21 et Liégeois22, professeurs titulaires, délibère ainsi :
« Considérant que le fait de forcer les notables d’une ville à monter sur les locomotives des trains de chemin de fer est une violation directe des principes du droit international. Qu’en effet, le but notoirement poursuivi est de détourner ceux qui tenteraient d’arrêter la marche des convois par des tentatives de vive force ou des interruptions de la voie ferrée en leur inspirant la crainte d’atteindre un de leurs nationaux. Qu’il n’y a aucune raison pour qu’au même titre, les notables d’une ville ne fussent mis devant les troupes des envahisseurs pour recevoir le feu des nationaux tentant de la reprendre. Attendu qu’il ne saurait être légitime, en vue d’une utilité quelconque, de compromettre la sûreté, la liberté et la dignité de citoyens ayant un droit solennellement reconnu à la conservation de ces biens. Proteste contre une mesure qui est contraire à l’humanité, à l’égalité et au droit des gens tel qu’il est universellement admis et pratiqué de nos jours chez les nations civilisées »23. L e 29 octobre 1870, le doyen Jalabert reçoit une injonction pareille à celle adressée à M. Lombard. Il y répond ainsi : « M. Jalabert doit à sa dignité de professeur et de doyen, et à sa conscience d’homme libre et de citoyen français, de ne pas obéir volontairement à un ordre contraire aux principes universellement reçus du droit des gens. Il ne cédera qu’à la contrainte matérielle présentée par la gendarmerie ». Le lendemain, le 30 octobre, contraint par les forces de l’ordre et conduit à la gare, il est obligé de monter dans le convoi de Nancy à Lunéville24.
En 1896, la loi sur les Universités prévoit que désormais le conseil des Facultés s’appelle le Conseil de l’Université. Cette même loi accorde aux 17 Universités d’Etat (dont celle d’Alger), la personnalité juridique et l’autonomie financière. Elles sont des personnes morales soumises à la volonté de l’Etat pour l’essentiel (notamment les recrutements, les bâtiments...) et capables, en marge des enseignements fondamentaux, de développer un certain nombre d’enseignements supplémentaires d’intérêt régional ou local.
L’année suivante, l’Université de Nancy obtient l’autonomie administrative, suite au vote de la loi sur l’enseignement supérieur préparée et rapportée par le Lorrain Raymond Poincaré (1860-1934), académicien et ancien étudiant des Facultés des lettres et de droit de Nancy. Désormais, l’Université regroupe les quatre Facultés de lettres, sciences, droit et médecine. Comme les 17 autres Universités françaises, elle est désormais dotée de la personnalité civile et de l’autonomie financière, bien que chacune des Facultés reste autonome sous la direction de son doyen. Leurs activités sont cependant coordonnées sous l’autorité d’un recteur dans le cadre du conseil de l’Université.
Enfin, en 1905, l’Université de Nancy est l’une des premières et des plus actives de France. Elle en a le second budget, avec 1 850 000 francs-après celle de Paris, mais devant celles de Bordeaux et de Lyon.
Les effectifs étudiants s’effondrent, avec seulement 27 nouveaux inscrits en 1915-1916. Lors du bombardement du 26 février 1916, Robert Parisot ne trouve qu’un seul auditeur à son cours... L’Université est fermée le 11 février 1917. Le 13 février 1917, le Palais de l’Académie est bombardé. Le 31 octobre 1918, deux bombes incendiaires détruisent une grande partie de la bibliothèque universitaire (ainsi que le musée d’archéologie et d’histoire de l’art). En 1921, lors de la visite à Nancy du président du conseil, Raymond Poincaré, le Palais de l’Académie ne renferme plus que le droit et les lettres.
Le 8 novembre 1927, l’Université reçoit la Croix de Guerre pour avoir « poursuivi ses travaux et son enseignement, malgré la proximité de la ligne de bataille, et en dépit d’un bombardement continu des plus violents, qui a causé la mort de nombreuses victimes et occasionné d’importants dégâts, s’est ainsi acquis les plus beaux titres de la reconnaissance du pays pour son héroïsme, qui symbolise l’effort des Universités de France pendant la Grande Guerre ».
En 1932, le président Lebrun remet la Légion d’Honneur à l’Université, en évoquant « la noble attitude de notre Université au cours de la guerre, la vaillance des professeurs et des étudiants, le courage avec lequel elle supporta ses blessures ».
Entre 1940 et 1945, l’Université subit encore la guerre : de nombreux professeurs sont arrêtés (le doyen Senn25 est incarcéré pour avoir défendu ses étudiants ; le recteur Gain, nommé par Pétain, est condamné pour collaboration à cause de ses articles publiés dans l’Echo de Nancy, journal en français dirigé par l’occupant allemand...), morts au combat ou en déportation (en novembre 1943, M. Schneider, pour « activités anti- allemandes »)...
III - La Faculté de droit depuis 1950
A - Le droit dans l’Université
A partir du milieu des années 1950, de nouvelles branches d’études sont organisées à Nancy, avec la création de nombreux instituts spécialisés : IPAG, CUEP, IEJ, Centre de droit social, Centre d’études administratives et financières, Centre lorrain d’histoire du droit... Nancy devient peu à peu un pôle universitaire de première importance. Alors qu’elle compte 3 890 étudiants en 1917, elle a plus de 23 000 en 1957, 45 000 aujourd’hui...
Au début des années 1970, l’Université de 1572 devient « les Universités de Nancy », regroupant trois entités : Nancy 1 pour les sciences, la médecine, la pharmacie, dentaire ; Nancy 2 pour les lettres et le droit et l’INPL regroupant les grandes écoles... Nancy est l’une des dix premières villes de France en population estudiantine, au même niveau que Strasbourg, Lille ou Grenoble. La forte population étudiante entraîne la création de nouveaux sites universitaires. Ainsi, la Faculté des lettres quitte la place Carnot pour le boulevard Albert 1er ; la Faculté des sciences quitte les environs de la porte de la Craffe pour Vandoeuvre ; création des cités universitaires du Charmois, du Placieux de Montplaisir, ...) et l’aménagement de nouveaux locaux (comme le grand amphithéâtre de 700 places de la Faculté de droit, construit en 1967...). Enfin plus récemment, le campus droit connaît de nouveaux aménagements : nouvelle bibliothèque universitaire, rénovation des locaux, construction du bâtiment K, ...
B - Les étudiants de la Faculté de droit en quelques chiffres
En novembre 1864, la Faculté de droit compte 106 étudiants. Ce nombre augmente à 180 en 1868. Entre 1871 et 1892, le chiffre se maintient entre 210 et 250. En 1893, il dépasse 250 pour franchir les 300 en 1895.
En 1904-1905, les étudiants sont 400, 500 en 1906-1907. Jusqu’à la Grande Guerre, le nombre annuel oscille entre 460 et 520. Les guerres interrompent la croissance, tout en consacrant une autre ascension dans l’héroïsme : pendant la guerre de 1870-71, six de nos étudiants sont morts pour la France ; en 1914-18, les héros de la Faculté, morts pour la Patrie, pour la reconstitution intégrale de la Lorraine sont 140...
A partir de 1919, la Faculté reconstitue peu à peu ses auditeurs. Il faut cependant attendre 1925 pour retrouver le chiffre de 500 étudiants. La statistique ministérielle de 1929 enregistre le chiffre record de 696 étudiants, ce qui donne à la Faculté de droit de Nancy le 3e rang national, après Paris et Lyon. Cet essor rapide est dû principalement à deux faits : l’affluence des Lorrains recouvrés, principalement de la région messine (qui n’a pas encore sa Faculté de droit) ; et la progression remarquable et rapide de l’Institut commercial de Nancy, rattaché à notre Faculté : en 1923, l’ICN compte en effet 23 étudiants, 200 en 1930.
En 1930-1931, l’Université de Nancy compte 4 598 étudiants, dont 802 pour le droit, qui se répartissent en 678 garçons (84,5 %) et 156 filles (15,5 %). L’année suivante, 4 294 étudiants, dont 846 pour le droit : 690 garçons (81,5 %) et 152 filles (18,5 %).
Parmi tous les étudiants de la Faculté de droit en 1931-1932, 37 % ne sont pas français : en majorité, ils viennent des pays de l’Est : Pologne (51,3 %), de Roumanie (12,5 %), de Bulgarie (8,8 %), ou encore de Chine (5,8 %).
En 1958, la Faculté compte 1 099 étudiants (dont 873 inscrits en droit et 226 dans ses instituts) ; 1 085 en 1959 (dont 900 en droit), 987 en 1960 (dont 810 en droit) et 808 inscrits en droit en 1961. En 1974, la Faculté accueille 3 335 étudiants, répartis entre les cursus de droit, sciences économiques et gestion, pour un total de 9 699 étudiants à l’Université de Nancy 2.
Aujourd’hui, le campus de la Faculté de droit, sciences économiques et gestion de Nancy compte 5 616 étudiants, soit :
- 2 897 inscrits en droit, toutes années confondues, 991 inscrits en sciences économiques,
- 1137 en AES,
- 224 au CEU et 186 à l’IPAG.
La Faculté de droit de Nancy est une institution bien vivante, installée depuis plus de trois cents ans dans la cité ducale, malgré une absence douloureuse entre 1803 et 1864. Elle n’a depuis cessé de grandir et d’accueillir toujours plus d’étudiants lorrains et européens. A son propos, Grégoire de Toulouse, écrivait au XVIIe siècle dans son De Republica : « De ces séminaires d’étudiants se tirent des docteurs, véritables astres brillant pour l’éternité, qui forment les hommes à la justice, se répandent ces avocats qui travaillent au bonheur de l’Etat, en défendant les opprimés. De là, sortent les magistrats, les juges, les prêtres, les évêques, les cardinaux... ».
La Faculté d’aujourd’hui porte donc un long héritage académique et scientifique, qu’il est important de faire revivre. Les délibérations du conseil de la Faculté depuis 1864 constituent sans aucun doute un autre fonds d’archives permettant de suivre quotidiennement la vie administrative de la Faculté depuis son rétablissement à Nancy.
Annexe 2 : Série 1743 W des Archives départementales de Meurthe-et-Moselle
Cote de rangement | Description sommaire | Dates extrêmes |
1743W6- 1743W11 | Registres d’inscriptions aux cours. | 1961-1967 |
1743W22 | Attestations d’études. | 1868-1961 |
1743W38 | Institut des Sciences Politiques. | 1930-1959 |
1743W39 | Institut Commercial de Nancy (bulletins trimestriels, organisation de ’École, nominations, plaquettes). | 1928-1974 |
1743W41 | Institut Commercial de Nancy (Bourses). | 1956-1959 |
1743W42 (1912-1930) 1743W43 | Statistiques générales des examens. | 1912-1974 |
1743W51 | Dispenses de Baccalauréat, renseignements politiques, dossiers d’étudiants des autres Facultés. | 1880-1947 |
1743W66- 1743W103 | Résultats obtenus aux examens, procès-verbaux, calendrier des épreuves. | 1 898-1950 |
1743W159 | Organisation des cours et des cours complémentaires : circulaires, correspondances, tableaux, conseils de l’Université. | 1923-1960 |
1743W161 | Etudiants vivant dans les colonies : dossiers des candidats, notes, études dans les colonies. | 1923-1960 |
1743W168- 1743W170 | Fiches d’enregistrement des diplômes. | 1850-1 950 |
1743W177 | Mai 1968, réforme des Universités. | 1968-1969 |
1743W262 | Prix et médailles de la Faculté de Droit. | 1 873-1965 |
1743W275 | Conseil d’Université de Nancv (1950-1956), étudiants inscrits en 1943. | 1942-1956 |
1743W282 | Vœux du recteur de Nancy au recteur de Lausanne concernant le jumelage des Universités. | 1891 |
1743W283 | Correspondance du doyen. | 1 864-1892 |
1743W284 | CUCES. Dossiers. | 1960-1964 |
1743W288 | Titularisation, vacances de chaires. | 1947-1960 |
1743W296 | Correspondance diverse + Colloque de Pont-à-Mousson sur les établissements d’enseignement supérieur dans la future Région Lorraine (1968). | 1940-1968 |
1743W306 | CUCES, rapports d’activités, correspondances. | 1964-1968 |
1743W312 | Examens de licence, procès verbaux (1896-1899). Nécrologies (1850-1900). | 1850-1900 |
1743W313 | Guide de l’étudiant (1900). Conseil de la Faculté de droit. | 1865-1961 |
1743W314 | Rétablissement de la Faculté. Correspondance (1864) | 1864-1961 |
1743W321 | Enseignement technique, arrêtés, circulaires, correspondance. | 1959-1968 |
1743W327 | Personnel : notices individuelles, feuilles de renseignement. | 1910-1950 |
1743W330 | Université lorraine, statuts, conseil d’Administration, Subventions, plans. | 1956-1968 |
17 43W332 | Etudiants d’Alger, correspondances diverses (1962). Statistiques (1956-1957). | 1956-1962 |
1743W333 | Suiets des examens. | 1886-1959 |
1743W358 | Vie et organisation de la Faculté de Nancv. | 1956-1 960 |
Notes de bas de page
1 ELOISE, le Laboratoire d’histoire des sciences et de philosophie (Archives Henri Poincaré, UMR 7117) et la Maison des sciences de l’homme lorraine organisent un colloque à Nancy, les 27-28 novembre 2008 sur « L’approche biographique en Histoire des sciences et techniques ». Programme et résumés disponibles sur la page du colloque : http://poincare.urtiv-Dancy2.fr/Activites/?contentId=5578
2 Pierre Grégoire de Toulouse, doyen de la Faculté de droit de Pont-à-Mousson du 27 mai 1582 à février 1597, mort de la peste en 1598.
3 Décret n° 2007-384 du 21 mars 2007 portant création de l’établissement public de coopération scientifique « Nancy Université », JORF n° 69 du 22 mars 2007 p. 5281.
4 Hugo Buonocompagno, né à Bologne en 1502, mort le 10 avril 1585. Elu pape en 1572, il fixe le calendrier dit grégorien l’année de son élection.
5 Le choix de Pont-à-Mousson se justifie par sa situation géographique, à égale distance entre Metz et la cité ducale de Nancy. Le site est en outre plein de charmes, propice à la méditation et à l’étude : « A l’entours, on voit des allées ouvertes aux promeneurs, principalement à l’endroit où le fleuve attiédit, par la douce fraîcheur de ses eaux, la chaleur que reçoit le creux de la vallée... ».
6 Charles III (1545-1608). Il réorganise l’administration, la justice et les finances de ses duchés. Il crée une armée permanente, fonde l’Université de Pont-à-Mousson. Il développe les forges, les salines, favorise le commerce et les corporations. Intolérant, il fait brûler en place publique les sorciers et sorcières de son duché.
7 William Barclay, doyen de la Faculté de droit de Pont-à-Mousson de 1598 à 1603.
8 Elle est installée sur la rive gauche de la Moselle, au 58 de l’actuelle rue Saint-Laurent à Pont-à-Mousson.
9 Jacques 1er, né à Edimbourg le 19 juin 1556, mort le 27 mars 1625. Roi d’Ecosse puis roi d’Angleterre à partir de 1603.
10 Après le refus du célèbre Cujas, car les jésuites l’ont dissuadé d’accepter, Charles III nomme Grégoire de Toulouse, un laïc et docteur es droits, pour fonder l’Ecole de droit de Pont, avec le titre de « doyen desdites Facultés canonique et civile, Decanus Facultatum, juris civilis & canonici ». Sa mission est de « conférer aux escholiers les degrés ésdites Facultés, après qu’ils auront estes deuement examinés par lesdits quatre docteurs régents ».
11 En effet, « ... si les enfants viennent acquérir sciences et bonnes lettres, plusieurs autres qui portent le nom d’escholiers (sic), au lieu de vaquer à leurs estudes (sic), s’adonnent aux débauches avec port d’armes, tant de jour que de nuit, consommans (sic) ainsy (sic) à leurs jeunesses, Facultés et moyens inutilement, au grand regret de leurs parents..., se querellent les uns les autres avec tant de véhémence qu’ils s’ensuivent de grands inconvénients comme de fresche (sic) mémoire il est advenu, par le meurtre perpétré en la personne d’un bourgeois dudit lieu sans subjetc aucun. II faut mettre « bon ordre sur le port d’armes desdits escholiers, afin de retrancher par ce moyen toutes occasions et querelles entre eux, blessures, homicides et autres grands inconvénients qui en pourroient advenir ». Dès lors, « Décrétons que les escholiers, en quelque science et Faculté que ce soit, ne pourront porter sur eux, ni faire porter après eux, aucunes armes offensives, de jour comme de nuit ». De même, « défendons de recevoir lesdits escholiers à tous jeux publics, d’escrimes, jeux de paulmes, danses et autres, pendant le saint service divin du saint jour de dimanche et autres festes solennelles commandées par l’Eglise. Aussi, avons nous prohibé et défendu, prohebons (sic) et défendons à tous escholiers (sic) de résidans (sic) en notre Université du Pont-à-Mousson de quelque âge, condition et profession, de porter cy parés (sic), espées (sic) et dagues, soit de jour ou de nuit, ni d’aller par les rues neutamment (sic) si ce n’est avec des lanternes, torches ou flambeaux, en peine d’emprisonnement de leur personne ». En 1594, puis en 1602 le duc de Lorraine doit encore interdire, outre les livres subversifs, le port d’armes aux étudiants, les excursions nocturnes, les débauches, les querelles d’étudiants... Dans son édit du 5 février 1602, Nouveau règlement pour la discipline de l’Université, Charles III déclare en effet que ses précédentes ordonnances, « bien que venant de nous et publiées comme il convient, sont néanmoins mal exécutées, au notable dommage et diminution de la discipline »... Le duc crée en outre une prison pour les « escholiers », avec charge pour les étudiants punis de payer eux-mêmes le geôlier, « de trois gros à l’entrée et un gros pour chaque jour qu’il passera en ladite prison ».
12 Léopold (1690-1729). Duc de Lorraine et de Bar, rentré dans ses états en 1697 après la signature du traité de Ryswick. Il épouse la nièce de Louis XIV, Elisabeth-Charlotte d’Orléans. Il révise les vieilles coutumes de Lorraine et fait publier le code Léopold, développe les industries du fer, du sel, les verreries, les faïenceries. Il fait bâtir à Lunéville, par Germain Boffranf (élève de Mansard) un palais plus digne de son règne que le Palais ducal, jugé trop petit, démodé et froid. Il meurt en 1729 à l’âge de 49 ans. Son fils François, vivant à la cour de l’empereur d’Autriche à Vienne, sa mère Elisabeth-Charlotte assurera la régence.
13 Son but est de traiter des droits souverains et régaliens, droits de la guerre et de la paix, des fiefs et autres. Enfin, un édit du 12 novembre 1720, porte « création de deux docteurs agrégés en la Faculté de droit de l’Université de Pont-à-Mousson », « afin que les étudiants qui s’y rendent soient en état de puiser dans les diverses Facultés, comme dans leurs sources, la vérité et la science qu’ils cherchent ». Il est donc « avantageux de joindre aux professeurs de la Faculté de droit des docteurs agrégés, pour suppléer à leurs fonctions, lorsqu’ils en seraient empêchés ».
14 Stanislas Leczynsky, dit « Stanislas le Bienveillant » (1737-1766). En 1736, par la convention de Meudon, Stanislas, roi de Pologne détrôné, père de Marie Lezczynska, femme de Louis XV, devient duc de Lorraine et de Bar. Stanislas devient un monarque qui règne, mais ne gouverne pas, puisque le duché est administré par un intendant militaire français : Antoine-Martin Chaumont de la Galaizières. En 1761, Stanislas ratifie le traité de Paris qui prévoit qu’à sa mort, le duché sera rattaché au royaume de France. Il vit à Lunéville, embellit Nancy en créant la place Royale, qui unit les villes de René II et de Charles III, ornée par les grilles de Jean Lamour. Le 5 février 1766, il meurt à l’âge de 88 ans. Le 23 février, le chancelier de la Galaizières proclame la réunion définitive du duché de Lorraine à la France.
15 Antoine de la Galaizière. Né le 4 octobre 1727, il est le fils de Antoine-Martin Chaumont de la Galaizère, l’intendant de Louis XV en Lorraine, II est conseiller au Parlement de Paris en 1746, maître des requêtes en 1749 et intendant de Montauban en 1756. Intendant de Lorraine de 1759 à 1777, il est ensuite intendant de Strasbourg jusqu’en 1790, avec son fils Antoine-Pierre Chaumont de la Galaizière comme adjoint. Il émigré en Belgique en 1790..
16 Un arrêt de la Cour Souveraine de Lorraine du 17 mars 1775, sur les réquisitions du procureur-général, porte règlement pour les étudiants de l’Université de Nancy. Son but est « d’éloigner de la jeunesse ce qui pourrait la corrompre, conserver dans sa pureté le précieux dépôt des lois ». A cet effet, « il est nécessaire que les règlements pris par le duc Léopold soient rendus publics ». Dès lors, nous renouvelons les « très expresses défenses être faites à tous les écoliers de droit, médecine et autres Facultés de ladite Université, de quelque état et condition ils soient, de porter armes dans la dite ville de Nancy, faubourgs et banlieues, de jour et de nuit ». De même, « fait défenses aux hôteliers, aubergistes, cabaretiers, maîtres de billards dans lesdites villes, faubourgs et banlieue, ... de prendre en pension chez eux des étudiants de l’Université qui ne soient pas leurs parents ». « Fait défense auxdits étudiants déjouer avec qui que ce soit, même entre eux, aucun jeux de hazard »...
17 Ce bâtiment est construit sur des plans de Charles-Louis de Montluisant, sous la direction de Claude Mique, le cousin de l’architecte de Louis XVI et de Marie-Antoinette. Les travaux intérieurs de la bibliothèque ne sont pas encore achevés en 1789. En 1790, les collections de la bibliothèque de Nancy représentent 75 000 livres et manuscrits, provenant des 36 bibliothèques de maisons religieuses et de 112 bibliothèques particulières. A partir de 1791, tous ces ouvrages sont réunis au rez-de-chaussée de l’Université. La bibliothèque n’ouvre finalement ses portes, dans ses murs actuels, qu’en 1794, avec une salle de bibliothèque pouvant contenir au moins 30 000 volumes. D’abord ouverte seulement aux seuls élèves de l’Ecole Centrale de la Meurthe, elle ne devient publique qu’en 1799.
18 Prosper-François Guerrier de Dumast (1796-1883). Né à Nancy, auteur de plusieurs écrits historiques consacrés à la Lorraine où il réhausse l’importance de cette nation qui a longtemps joui d’une indépendance offrant quelques analogies avec celles des Républiques italiennes ou suisses. Orientaliste, savant zélé, il est l’auteur de Nancy, histoire et tableau (1837), Mémoire sur la question de l’unité des langues (1843), Le duc Antoine et les rustauds (1749), Sur la vraie prononciation du G arabe (1857), ...
19 Le décret du 25 septembre 1874 annule définitivement cette condition.
20 François Philippe Victor Théophile Jalabert, doyen de la Faculté de droit de Nancy de 1864 à 1880.
21 Antoine Lombard, professeur de droit commercial (1864-1894), de droit criminel (17875-1880), de droit international public (1890-1894). Titulaire de la chaire de droit civil (1880-1898).
22 Liégeois, professeur de droit administratif, chargé du cours d’histoire du droit.
23 Registre des délibérations du conseil de la Faculté de droit de Nancy, de 1864 à 1874.
24 1872 : Jules Simon, ministre de l’Instruction publique, des Cultes et des Beaux-Arts de 1871 à 1873 écrit : « je rétablis l’Université de Nancy et je lui donne toute la liberté dont une famille, un corps savant, ont besoin sans rien lui demander ». En 1891, l’académicien Ernest Lavisse (1842-1922) dit de l’Université de Nancy « qu’elle doit être une forteresse de l’intelligence nationale puisqu’elle est au péril et à l’honneur de l’avant-garde. Face à l’Allemagne qui a annexé Metz et Strasbourg, elle se doit d’être une vitrine de la France, une vitrine intellectuelle et scientifique, un pôle de rayonnement et d’attraction sur la France de l’Est et les pays voisins ».
25 Félix Senn, professeur de droit romain, doyen de la Faculté de droit de Nancy de 1931 à 1949, recteur de l’Académie de 1940 à 1946.
Auteur
Ingénieur de recherches à l’Université Nancy II
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