Qu’est-ce qu’une faculté de province au xixe siècle ?
p. 17-60
Texte intégral
1L’histoire de l’éducation (XIXe-XXe siècles) constitue un domaine particulièrement actif. Longtemps caractérisée par des approches institutionnelles et monographiques, elle connaît depuis de nombreuses années un renouvellement de ses méthodes et de ses questionnements. Reposant sur des dépouillements systématiques de certains fonds d’archives, l’histoire de l’éducation a su profiter des approches quantitatives et prosopograhiques pour tracer un tableau des différents acteurs sociaux du système éducatif, s’interroger sur les valeurs diffusées par lui ou encore développer une réflexion sur l’histoire des disciplines et de la culture scolaire1.
2L’histoire des Facultés de droit en France n’a, malheureusement, qu’assez peu profité du dynamisme de ce champ, de ses transformations et son internationalisation croissante. Les spécialistes de l’histoire de l’éducation ont vraisemblablement hésité à s’engager dans cette voie. D’une manière significative, à la différence des Facultés des lettres, des sciences et de médecine de Paris, celle de droit attend encore la réalisation de son dictionnaire biographique2. De même, la riche base bibliographique du Service de l’histoire de l’éducation (SHE) à l’INRP révèle une certaine pauvreté de la production concernant les Facultés de droit. Le récent troisième volume de la série A History of the University in Europe réserve à celles-ci une place fort réduite3. Les exemples pourraient être multipliés. Les spécialistes de l’éducation ont estimé, non sans raison, que la recherche et l’écriture d’une telle histoire des Facultés juridiques revenaient prioritairement aux historiens du droit4. Mais, les juristes semblent également avoir reculé devant cette tâche. Il n’est besoin que de consulter la bibliographique existante sur le domaine pour constater combien elle est souvent vieillie et très incomplète5. Les travaux initiés par la Société d’histoire des Facultés de droit, fondée en 1983, ont incontestablement contribué aux développements d’une histoire de la pensée juridique et apporté des lumières neuves sur l’histoire institutionnelle6. Bien des « questions pour l’histoire des Facultés de droit » posées par Stéphane Rials, au moment même de la fondation de la Société, sont cependant encore sans réponse7.
3En dépit d’un tel retard, plusieurs indices laissent néanmoins entrevoir une évolution plus positive. L’histoire du droit se montre plus sensible que par le passé aux approches sociales et culturelles. S’inscrivant dans une telle perspective, le groupe CEDRE (Corpus de l’enseignement en droit. 1800- 1950. Répertoire des archives et prosopographie des professeurs de droit) s’est constitué, il y a quatre ans, autour de Jean-Louis Halpérin8. En liaison avec certains chercheurs du Service de l’histoire de l’éducation, la quinzaine de juristes et politistes de ce groupe réalisent notamment une base biobibliographique des enseignants des Facultés de droit (1804-1950). S’appuyant sur une exploration ample des archives, convaincus des bénéfices d’une démarche prosopographique, les membres du CEDRE poursuivent l’objectif d’écrire une histoire des Facultés de droit à l’époque contemporaine dépassant largement le strict cadre de la traditionnelle histoire institutionnelle. De plus, l’intérêt pour une histoire doctrinale s’est renforcé quelque peu, ces toutes dernières années, comme en témoigne une série de manifestations scientifiques et de rééditions opportunes, par exemple, aux éditions Dalloz, aux Éditions Panthéon-Assas, ou à La Mémoire du droit (de Duguit à Demogue, en passant par Lévy-Ullman, Hauriou...). À côté de cette évolution des pratiques historiennes des juristes, il faut également compter au nombre des facteurs d’une promotion de l’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, la vague des commémorations des différentes créations napoléoniennes (à commencer par le bicentenaire du Code civil et par la naissance de l’institution scolaire d’État). Plusieurs Facultés ont ainsi consacré des colloques pour célébrer leur fondation9. On doit ajouter également, le rôle, non négligeable, joué par le train de réformes qui affectent actuellement le statut des enseignants-chercheurs et la gouvernance des Universités. Suscitant interrogations et inquiétudes, ces réorganisations à marche forcée exigent parfois une mise en perspective historique pour éclairer les enjeux présents10.
4Au croisement des enjeux scientifiques, mémoriels et politiques, le projet de la rencontre toulousaine organisée par Philippe Nélidoff s’inscrit dans ce contexte d’une réévaluation de l’histoire des Facultés de droit. Il se distingue, tout d’abord, par son ambition collective, inter-universitaire – dimension suffisamment rare pour qu’elle soit soulignée. Cette rencontre se veut la première d’une série de manifestations qui se tiendront, dans les années à venir, dans différentes Universités. Ainsi, le second rendez-vous devrait se tenir à Grenoble dans le courant 2010. Le projet insiste, ensuite, sur les Facultés de droit de province au XIXe siècle. Une telle précision n’aura échappé à personne. Les raisons d’une telle focalisation soulèvent de nombreuses questions. Pourquoi accorder un tel intérêt à ces Facultés de province ? S’agit-il de compenser une excessive polarisation de la recherche sur la Faculté de droit de Paris ? En réalité, à la différence de certaines Facultés de province, celle-ci n’a fait l’objet d’aucune synthèse ou d’enquête systématique11. Les travaux qui lui sont exclusivement consacrés demeurent, en définitive, assez peu nombreux et dispersés12. Au-delà même de ce constat, les Facultés de province auraient-elles le sentiment d’être traitées inéquitablement par une histoire du droit trop centrée sur Paris, son personnel enseignant et sa science juridique ? Il est naturellement impossible de ne pas mettre le thème de ces journées toulousaines en rapport avec la concurrence qui oppose, aujourd’hui peut-être plus qu’hier, les Facultés parisiennes à celles de province. À cet égard, l’emploi ici même de l’expression « Facultés de province » au lieu de celle de « Facultés des départements », plus juste pour la période retenue, a valeur de symptôme. Le terme de « province » n’est-il pas, à l’origine, attaché à l’idée de la domination d’un centre sur des territoires conquis ? En s’attachant si exclusivement aux Facultés de province, le projet défendu ne serait-il pas, en quelque sorte, de lutter pour l’honneur bafoué de celles-ci en rappelant leur rôle dans la formation des élites françaises au XIXe siècle ainsi que leur contribution à la science juridique française ? Somme toute, faire l’histoire des Facultés provinciales, ne serait-ce pas revendiquer leur place (occultée par l’éclat parisien ? contestée par les politiques publiques ?) dans le panthéon juridique et l’histoire de l’éducation ? Cette tâche constituerait une mission d’autant plus importante que certaines d’entre elles craignent, plus que jamais, de se voir transformer en simples écoles de droit à vocation purement professionnelle.
5Quand bien même certains acteurs de ces Facultés de droit de province s’estimeraient-ils injustement traités, jugeraient-ils leur spécificité et leur action insuffisamment reconnues, les historiens du droit doivent-ils pour autant s’engager dans une tentative de restauration de l’identité blessée de ces Facultés ? Doivent-ils s’attacher à réactiver et à valoriser cette mémoire des Facultés provinciales13 ? Sans doute, des facteurs convergents, liés notamment aux enjeux contemporains, pourraient incliner des juristes-historiens à célébrer ces Facultés de province comme des lieux de mémoire (avec ses grandes heures, ses traditions juridiques14, ses grands hommes). Il semble plus judicieux, mais également moins funèbre, de les appréhender comme des lieux de fabrication et de transmission d’un certain savoir15.
6Les Facultés de province comme lieux de savoirs posent la question suivante : « Comment des savoirs en viennent-ils à faire corps et à « faire lieu », à être partagés dans des collectifs, à organiser des territoires, à circuler dans des réseaux ? »16. Cette approche invite tout d’abord à prendre au sérieux la localisation d’une Faculté. L’espace n’est pas un territoire lisse sur lequel viendraient se projeter indifféremment toutes les choses. Il n’est pas seulement un contenant ; il est surtout un contenu de l’expérience sociale. Faire l’histoire d’une Faculté de province, c’est donc saisir ce que cette Faculté fait avec cet « espace provincial » composé d’objets, d’êtres, d’institutions, d’échelles hétérogènes. Cette approche souligne ensuite qu’une Faculté ne s’étudie pas isolément de l’ensemble de l’espace académique. Quand bien même l’historien étudie une Faculté en particulier, il doit situer son étude dans l’ensemble des relations que cette Faculté entretient avec les acteurs d’un tel espace académique. Faire l’histoire d’une Faculté de province, c’est aussi saisir comment son identité et sa place se constituent dans et par les relations qu’elle noue et que le système d’enseignement lui impose. Plutôt que de poser au centre de l’enquête un établissement juridique dont on suppose que l’identité, la spécificité et l’importance sont déjà données (notamment par les textes réglementaires) pour ensuite faire état de ses relations avec son environnement politique et social, il serait préférable d’inverser la perspective en suivant la nature, la forme et la force de ses relations avec les autres entités du champ académique afin de comprendre comment il se situe dedans, comment il conçoit et exerce sa mission, comment il cherche à accroître sa réputation, etc.
7Les lecteurs du présent texte qui attendent une histoire synthétique des Facultés de province seront nécessairement déçus. Je souhaite plus modestement faire un état rapide de la production historiographique sur l’histoire des Facultés de province au XIXe siècle en suggérant quelques pistes méthodologiques à la lumière de cette perspective qui conçoit les Facultés comme des lieux de savoirs. Mon analyse a été considérablement facilitée par les rapports réalisés pour la rencontre de novembre et publiés pour la plupart dans ce volume17 ainsi que par plusieurs monographies de qualité18. Enfin, je pense indispensable de rappeler, pour cette histoire des Facultés de droit, l’importance des mémoires de 3e cycle qui, bien souvent, défrichent des territoires encore inexplorés19.
8Pour ma présentation, je crois utile de distinguer deux dimensions complémentaires. En premier lieu, la Faculté de province est située physiquement au milieu d’un espace complexe qu’elle ordonne d’une manière spécifique pour donner sens et forme à sa politique éducative et/ou scientifique (I). L’analyse ne se réduit pas à son organigramme ou aux textes réglementaires qui l’organisent mais doit saisir les interactions nombreuses qu’elle entretient avec d’autres lieux qui la font agir. En second lieu, la Faculté de province s’efforce de se construire une position dans le champ académique, voire politique ou social (II). Distribuées sur tout le territoire, ces Facultés doivent attirer des étudiants et renforcer leur visibilité et leur crédibilité scientifique en fonction de leurs ressources locales. Cette lutte des places, qui met les différentes Facultés en concurrence, est un facteur structurant du système d’enseignement20.
I - Les provinces de l’enseignement juridique
9Les historiens du droit se sont traditionnellement intéressés à l’État enseignant. Les Facultés de province ont donc été étudiées à partir des principes (à commencer par celui du monopole universitaire) et des cadres administratifs définis depuis l’héritage napoléonien. Dans cette perspective, à la question « Qu’est-ce qu’une Faculté de province ? », la réponse apportée consiste, en premier lieu, en un rappel des textes organisant les Facultés de droit à partir de 1804 puis, en second lieu, en un effort pour éclairer l’application locale de telles dispositions. Ce primat accordé au point de vue de l’État et à l’histoire administrative conduit, dans de nombreuses études, à privilégier les textes réglementaires et les archives administratives, et tout particulièrement les archives qui reflètent l’activité des services chargés de l’administration du système éducatif (échelon ministériel, rectoral ou académique), au détriment des archives pédagogiques, des archives privées ou encore de la presse (fut-elle ou non d’éducation et d’enseignement). Les établissements d’enseignement supérieur offrent, comme l’illustre le cas de Toulouse exposé ici par Philippe Delvit et Delphine Floreck, de riches archives insuffisamment exploitées21.
10En majorant la place de l’État enseignant et de sa réglementation, les monographies consacrées aux Facultés de province proposent une histoire écrite du point de vue d’un centre qui semble dominer une périphérie plus ou moins docile. Ces Facultés sont ainsi comprises comme des rouages de l’appareil d’État et les aspects les plus originaux de ces établissements sont, le plus souvent, appréhendés comme écart à une réglementation nationale. Elles sont en somme incluses dans le territoire (idéologie territoriale ?) de l’État enseignant. Pourtant, ce lieu qu’est une Faculté de province ne se définit pas seulement par rapport à l’ordre étatique, mais également par rapport à d’autres ordres de spatialité qui contribuent tout autant à lui donner son identité. Il appartient certes à un maillage de gestion et de gouvernement (la Faculté de province comme appartenant à une aire administrative) mais est également intégré dans un espace singulier et structuré qui le distingue des autres (la Faculté de province comme appartenant à un écoumène, une contrée). Moins visible mais non moins important, la Faculté de province prend place dans un espace vécu, de convivialité collective. Elle est elle-même un espace de rencontres quotidiennes, d’échanges et de réunions (la Faculté de province comme appartenant à un espace de socialité)22.
11On ne doit pas se tromper sur le sens de cette distinction. Il ne s’agit pas de distinguer, dans l’analyse, plusieurs échelons administratifs (des services de l’État aux services de la Faculté). Cela reviendrait purement et simplement à faire revenir par la fenêtre le primat de l’État enseignant que j’avais congédié par la porte… L’enjeu est différent. Une histoire des Facultés de province se doit justement de prendre au sérieux cette qualité « provinciale ». La localisation est autre chose qu’un simple topos s’exprimant en coordonnées et épuisant toute autre considération. Une Faculté de province n’a pas seulement une position géographique avec sa longitude et sa latitude ; elle occupe une situation géographique variable par rapport à d’autres lieux, d’autres espaces, d’autres réseaux. En somme, une Faculté de droit de province, comme lieu de savoir, se définit par la nature et la forme des relations qu’elle entretient avec d’autres « êtres géographiques » (qu’il s’agisse d’individus, collectifs, etc.). Si faire l’histoire d’une (ou des Facultés) de province(s) a un sens, alors il faut que la localisation étudiée soit autre chose qu’un simple contenant ayant partout les mêmes propriétés (espace support). Aussi convient-il de saisir, dans le long terme, comment la situation et l’identité d’une Faculté située localement sont le produit d’une triple logique d’encadrement, « écologique » et de socialité23. Pour Poitiers, Toulouse ou encore Grenoble, être une Faculté de province, c’est se situer à l’intersection de ces trois sortes d’ordres de spatialité. Dans les développements qui suivent, je tenterai d’illustrer ce travail constant des acteurs des Facultés de droit pour se situer au milieu de plusieurs dimensions qui ne cessent de s’entrelacer, de s’opposer, de se renforcer. Ce travail, sans cesse repris et recommencé, est constitutif de l’identité et de la place de la Faculté de province dans l’organisation du système de l’enseignement juridique.
A - Fonder
12Le système français de l’enseignement du droit a fait l’objet d’une étude précieuse publiée par Jacqueline Gatti-Montain en 198724. Étudiant le système de relations entre institution et savoir, l’ouvrage s’attache notamment aux modalités particulières de l’adaptation des Facultés de droit aux transformations de la société et du droit positif aux XIXe et XXe siècles. On notera que ce travail s’inscrit explicitement dans le sillage du courant Critique du droit qui s’efforçait, dans les années 1970, de « contribuer à l’intelligence des phénomènes juridiques dans la perspective d’une transition vers de nouveaux rapport sociaux, le socialisme » (Critique du droit, Manifeste)25. Il est vrai que, dans ce domaine de l’enseignement juridique, les travaux historiques ne manquent pas, traditionnellement, de démontrer les insuffisances, les difficultés ou la frilosité des Facultés de droit au XIXe siècle26. Au-delà de ces ambitions critiques, certains travaux mettent en lumière la philosophie des institutions depuis la refonte napoléonienne des établissements d’enseignement supérieur. Rompant avec le système antérieur, cette dernière n’en tient pas moins compte des changements intervenus dans les dernières décennies de l’Ancien régime et pendant la période révolutionnaire. Il ne m’appartient pas ici de faire une histoire des Universités en France27. Les étapes décisives de l’organisation des Facultés et des études de droit sont connues28. De la création des Écoles de droit à la réforme universitaire réalisée par la IIIe République, la structuration napoléonienne des études juridiques n’a que peu évolué. Ce qui caractérise en premier lieu ce système, c’est l’intégration de toutes les pièces du dispositif scolaire (dont le sommet est la Faculté) dans un cadre administratif national centralisé. Mais, une telle pérennité du système ne doit pas masquer combien l’Université et ses Facultés constituent un enjeu politique important pour les différents régimes politiques qui se succèdent mais, également, qu’au sein même des Facultés de droit les rapports de force ne furent pas toujours identiques. Ces facteurs ont affecté plus ou moins directement le fonctionnement des Facultés jusqu’à la IIIe République. Destinées à répondre à une demande sociale de compétences, les Facultés « professionnelles » (droit et médecine) ont fait, pendant cette période, l’objet d’une attention particulière de la part des autorités, à la différence des Facultés « académiques » (lettres et sciences). Pour le cas des Facultés de droit, il s’agit de garantir aux hommes de loi un certain niveau de compétence et d’assurer la cohérence idéologique des élites. Vivier traditionnel des cadres de l’État, le milieu des juristes voit donc sa formation étroitement contrôlée pour la mettre en conformité avec sa vocation purement utilitaire. Les Facultés de droit sont dominées par le modèle de l’école (quand bien même on leur reconnaît le titre de « Faculté ») : diplôme ouvrant à une fonction particulière, organisation uniforme des programmes, monopole de la collation des grades par l’État, etc. Si des préoccupations scientifiques se manifestent dans la réorganisation universitaire républicaine, le caractère professionnel des Facultés juridiques, bien que discuté dans ses propres rangs, n’est pas remis en cause29.
13Les Facultés de droit sont établies en l’an XII : Aix, Caen, Dijon, Grenoble, Paris, Poitiers, Rennes, Strasbourg, Toulouse, Bruxelles, Coblentz. En l’an XIII, les annexions consulaires ajoutent provisoirement à la liste Gène, Parme, Turin. L’établissement à Pise d’une nouvelle Faculté clôt ce mouvement de création napoléonienne. Il faudra attendre le Second Empire et la IIIe République pour assister à la reprise d’un tel mouvement avec des fondations à Nancy et Douai (1864), Bordeaux (1870), Lyon (1875), Montpellier (1878), sans oublier l’Ecole de droit d’Alger transformée en Faculté en 1909. Pour comprendre ces différentes créations, il est certes indispensable de saisir la philosophie et les ambitions de la politique éducative menée par le pouvoir en place. Elles peuvent être, à cet égard, apparentes dans les textes réglementaires qui fondent ces établissements. Mais, on ne saisit pas pour autant, par exemple, les mécanismes exacts qui président à des décisions gouvernementales plus ou moins informées, ni les subtils efforts menés par des acteurs locaux pour convaincre des droits de leur ville à posséder « leur » Faculté de droit. La fondation d’une Faculté est un moment privilégié pour saisir les raisons du choix d’une ville et les modalités complexes de son installation. C’est peut-être à l’occasion d’une telle création qu’il devient possible de saisir avec le plus de netteté ce qu’un établissement doit à sa situation géographique particulière. La distribution spatiale des Facultés de droit, leur dispersion sur le territoire national ne vont pas de soi. Aux Archives nationales, la sous-série F17 conserve, à cet égard, des informations essentielles sur les débuts de ces Facultés.
14Certaines villes, pouvant justifier d’une forte tradition juridique, ne sont parvenues à faire revivre leur tradition universitaire qu’à partir de la seconde moitié du XIXe siècle. Leurs qualités éventuelles de chef-lieu de département et de siège de la Cour d’appel (et, par conséquent, d’une académie) n’ont pas suffi à justifier une implantation prioritaire. D’autres, comme Angers, Avignon ou Orléans, ont attendu la seconde moitié du XXe siècle. La décision d’implanter une Faculté est souvent l’aboutissement d’un processus impliquant des acteurs nombreux motivés par des objectifs plus ou moins compatibles. Pas plus que le gouvernement républicain, le régime napoléon ne put échapper à cette nécessité du réalisme en manière de politique éducative. Les acteurs ne se réduisent pas seulement aux agents du pouvoir centralisateur (comme le ministre de l’Intérieur, le préfet30 ou le recteur) qui doivent d’ailleurs faire face aux sollicitations de leurs administrés ; il faut compter également sur l’implication de tout un ensemble d’individus et de collectifs qui se chargent de porter l’ambition académique d’une ville. Par exemple, le choix de Grenoble en l’an XII doit beaucoup à l’action et aux relations politiques de son futur directeur de l’Ecole de droit, Jean-Paul Didier31. Ce dernier se rend notamment à Paris au nom du Conseil municipal pour soutenir l’action des représentants de l’Isère au Corps législatif. De son côté, Strasbourg aligne, en ordre de bataille, son maire et son Conseil municipal, le préfet et les députés du Bas-Rhin pour soutenir sa demande32. L’érudit François Guerrier de Dumast dépense, à partir de 1854, une énergie considérable à promouvoir le rétablissement d’une Faculté à Nancy33. A Montpellier, dès 1875, le Conseil général et le Conseil municipal forment des commissions, rédigent des rapports et travaillent à convaincre le pouvoir central de la légitimité et de l’urgence de leur requête. Bordeaux connaît une mobilisation identique tout particulièrement sous la monarchie de Juillet et rallie, parmi les notables, la chambre des notaires et le conseil de l’Ordre des avocats34.
15Obtenir l’érection d’une Faculté de droit dans sa ville, c’est d’abord mobiliser des alliés, enrôler d’autres acteurs à sa propre démarche, intéresser des relais politiques. Pour cela, certaines localités ont dû, d’une manière réitérée, pétitionner, protester, correspondre, voyager… Il ne s’agit pas seulement de convaincre les autorités compétentes en invoquant un passé juridique prestigieux, l’accessibilité d’une école par les étudiants du département ou encore les nécessité de la vie juridique locale. Une candidature s’impose aussi contre une ou des concurrentes soucieuses de démontrer leur supériorité. Elle doit également s’attirer les bonnes grâces des Facultés en place et tente parfois de déminer de possibles oppositions. Ainsi, en ambitionnant de fonder sa Faculté, la ville de Lyon provoque des réactions très contrastées de la part des établissements grenoblois et dijonnais. Bien des années plus tôt, Dijon a livré bataille pour s’imposer contre Besançon35. Bordeaux n’ignore pas, quant à elle, combien Poitiers reste vigilante face à une éventuelle candidature. Après la création des Facultés de Nancy et Douai, certains juristes n’hésitent pas à faire connaître, par des publications, l’hostilité que leur inspire la réussite de ces moyennes villes au détriment de plus grands centres urbains (Lyon, Bordeaux)36.
16Les intérêts des acteurs locaux rencontrent bien souvent ceux du régime en place. Ce dernier peut convertir la création d’une Faculté de droit en gain politique et l’inscrire au fronton de son action gouvernementale. Fondées en 1806, les nouvelles Facultés de Bruxelles et de Coblence (destinées à retenir les étudiants qui risquaient de partir vers les établissements allemands) s’imposent au moment même où l’Empire poursuit son expansion et organise l’espace européen. D’une manière identique, la création de l’école (préparatoire) d’Alger en 1879 s’inscrit dans le projet colonial français dont elle traduit bien les ambigüités37. La ville de Lyon, de son côté, trouve un appui inattendu dans la loi de juillet 1875 autorisant les Facultés libres. Devant la menace que l’apparition d’une Faculté catholique constitue aux yeux du pouvoir républicain, ce dernier, au nom de sa politique laïque, se rallie à l’idée d’une création lyonnaise. En brandissant l’épouvantail de l’enseignement catholique, les autorités lilloises obtiennent également des républicains le transfert de la Faculté de droit de Douai à Lille en 1887. L’installation d’une Université laïque, regroupant toutes les Facultés dans la préfecture du département du Nord, apparaît comme un impératif et un symbole politique38.
17Les résistances opposées par les gouvernements à la création de certaines Facultés contraignent leurs promoteurs à affiner leur stratégie. À Lyon, l’inertie du pouvoir conduit à la mise en place de cours libres de droit entre 1867 et 1875. Bien que fonctionnant entre légalité et tolérance, cette Faculté libre finit par imposer les vertus de son existence et mène à la fondation d’une Faculté juridique dans la capitale des Gaules39. C’est une initiative de même nature qui conduit à la création bordelaise : le recteur de Bordeaux et les institutions municipales facilitent l’ouverture de cours de droit libres et gratuits donnés par des avocats entre 1896 et 187040. Bordeaux et Lyon, villes commerciales, l’ont ainsi emporté sur le préjugé qui prétend maintenir l’enseignement juridique à l’écart de toute corruption de l’esprit mercantile. Mais, c’est surtout, en rassurant les autorités centrales sur la charge financière entraînée par l’établissement d’une Faculté, que les milieux juridiques locaux et leurs alliés tentent d’arriver à leur fin à la fin du Second Empire et sous la IIIe République. Ainsi, Nancy et Bordeaux proposent d’assumer seuls, pour une certaine durée, le coût de fonctionnement de leur Faculté et dégagent l’État de toute participation financière. Tout au long du XIXe siècle, toute création soulève la question délicate, tant d’un point de vue financier que matériel, de l’installation de la Faculté dans les locaux dédiés. Fonder une Faculté, ce n’est pas seulement faire le choix d’une ville, c’est aussi localiser la Faculté dans cette ville. Une telle opération doit concilier des logiques et des contraintes souvent contradictoires (à commencer par des contraintes budgétaires) qui mettent en pleine lumière les enjeux propres à la localisation d’un établissement. Dans le choix d’un emplacement, il se joue bien plus que des questions de commodité ou d’accessibilité. La situation des lieux d’enseignements définit aussi des formes particulières de savoirs et de pouvoirs41. La contigüité des Facultés entre elles, la proximité de la Faculté de droit avec certains lieux de pouvoirs n’est pas sans enjeux sociaux et symboliques ni sans conséquence sur la production intellectuelle42.
B - Se gouverner
18Qu’est-ce qu’une Faculté de province sinon, en premier inventaire, le personnel et les organes chargés de son fonctionnement ? Qu’est-elle sinon une organisation en action ? Le cadre organisationnel des Facultés de droit, de l’Université napoléonienne à l’Université de la République, est connu. Le mouvement général est, pourrait-on dire, celui d’une quête d’autonomie. Après plusieurs décennies d’un enseignement supérieur sous étroite surveillance, la IIIe République contribue, en effet, à la renaissance des Universités et à l’augmentation de leurs moyens. Le fonctionnement des Facultés de droit s’en trouve sensiblement transformé.
19Les études ont systématiquement souligné le caractère très centralisé de l’Université napoléonienne et l’étroitesse des marges d’actions du doyen43 (anciennement dénommé « directeur » dans les Ecoles de droit de l’an XII) et de son établissement. Les institutions de l’Université impériale sont, en effet, placées sous l’autorité d’un grand maître assisté d’un conseil d‘Université ; dans les circonscriptions académiques, les Facultés sont soumises au contrôle étroit du recteur, lui-même aidé d’un conseil académique44. Sans oublier les inspecteurs généraux des Facultés de droit dont le rôle connaît des évolutions très sensibles en fonction des régimes politiques45. Dans tous les cas, le fonctionnement des Facultés de droit est structuré verticalement : les instances centrales ne cessent de les irriguer d’instructions et de recommandations de toute sorte et cherchent à drainer vers leurs propres services toute information utile sur la marche des établissements académiques. Les réformes introduites par la IIIe République, sans briser naturellement le lien qui attache à leurs tutelles les Facultés de droit, contribuent à vitaliser l’activité des organes internes (le décanat, le conseil de la Faculté et l’assemblée de la Faculté) de ces dernières.
20Si ce cadre organisationnel et juridique du fonctionnement des Facultés de droit est souvent rappelé, les travaux analysant avec précision la vie interne d’une Faculté de droit sont beaucoup plus rares et constituent un angle mort de la recherche46. Pourtant, une Faculté de province ne se contente pas seulement d’appliquer des textes en vigueur, elle doit donner aussi un sens à une politique éducative en fonction d’un contexte particulier. L’action du doyen, du personnel et des organes collectifs d’une Faculté est toujours une action située. Une telle enquête sur la vie interne d’une Faculté, susceptible d’éclairer certaines de ses spécificités dans l’espace universitaire français, est subordonnée à l’exploration d’archives multiples, trop souvent négligées, incomplètes et d’un accès parfois malaisé. La directrice des Archives départementalesde l’Isère, Hélène Viallet, a récemment donné une présentation des sources de l’histoire de la Faculté de droit de Grenoble47. Ce panorama archivistique rappelle que, dans son enquête aride sur le fonctionnement de la Faculté, l’historien doit examiner non seulement les richesses de la sous-série F17 des Archives nationales (cartons comprenant des éléments sur l’organisation, l’inspection générale, les troubles et désordres, les budgets et comptes, les dossiers individuels du personnel…), mais aussi les archives produites par l’Université et les services relevant du ministère de l’Instruction publique conservées aux Archives départementales (série T : registres de délibérations du Conseil de la Faculté, de l’assemblée des professeurs, documents comptables, dossiers du personnel administratif, séances du conseil de l’Université, correspondance avec le recteur…), des archives privées (série J : dossiers de l’architecte sur la construction de la Faculté, archives d’anciens élèves…) ou encore les archives municipales (registres de délibérations du Conseil municipal). Il n’est pas rare que les archives départementales et/ou de l’Université se révèlent trop fragmentaires ou sans véritable continuité (comme à Lyon, avec la disparition d’une partie des procès verbaux du conseil de la Faculté et une correspondance entre le doyen et le recteur très lacunaire48). Des sources imprimées peuvent pallier certaines lacunes des archives : les discours de rentrée solennelle et les rapports annuels du doyen se révèlent parfois d’une grande richesse d’informations. A partir d’une enquête archivistique minutieuse, la question de la gouvernance d’une Faculté de droit au XIXe siècle est susceptible de réponses plus fines et plus concrètes. Il s’agit donc moins d’exposer le cadre dans lequel le doyen, le personnel et les organes collégiaux agissent, que de tenter d’éclairer comment la gestion particulière d’une Faculté s’appuie sur un certain nombre de ressources et s’ajuste à certaines contraintes.
21L’action gestionnaire se situe bien dans un environnement (tant local que national) et elle s’organise « par le moyen » d’un tel environnement49. Le regard s’oriente ici spontanément vers la question financière et comptable de la Faculté dont il est inutile de rappeler l’importance. Or, sur ce domaine plus que tout autre, les études existantes (sinon à de très rares exceptions) semblent éviter cet aspect scabreux de l’histoire50. Si les Facultés de droit sont mieux dotées que leurs voisines académiques, l’auto-financement est dominant, même lorsque le pouvoir républicain consent une forte augmentation du budget.
22D’une façon générale, la Faculté est un « acteur-réseau », c’est-à-dire que la source de ses actions est complexe, incertaine car influencée, suggérée, dominée par d’autres acteurs qui l’obligent à emprunter des voies plus ou moins droites pour mener à bien sa mission51. Ainsi, le doyen (dont le rôle peut se révéler décisif, tout particulièrement à partir du moment où cette fonction devient élective), les professeurs (dont le travail et la conduite sont scrutés), le personnel administratif ne cessent de situer leurs activités par rapport à celles du ministère52, des recteurs (qui appliquent autant les décisions prises à Paris qu’ils transmettent et soutiennent des demandes émanant localement)53 et des inspecteurs généraux54. Il n’est pas rare que le grand maître de l’Université impériale interroge, tout au long du XIXe siècle, l’assemblée de la Faculté sur des questions organisationnelles ou pédagogiques (introduction d’un enseignement, avis sur des projets de reformes...). La suppression pure et simple de la Faculté de droit de Grenoble, entre 1821 et 1824, constitue l’illustration extrême (et unique) de la réaction des pouvoirs publics face à une agitation politique. La cohabitation éventuelle avec les autres Facultés du département et les relations plus ou moins régulières avec les autorités municipales (notamment pour des raisons financières et immobilières) pèsent sur la conduite de ces affaires. Il conviendrait d’étendre la liste des entités qui poussent la Faculté à agir dans tel ou tel sens.
23Au service de la délivrance des diplômes, la Faculté consacre un temps infini à organiser les études et les examens. Dans ce domaine de la vie des Ecoles de droit, les situations sont sans doute, d’une ville à l’autre, plus contrastées qu’on ne le croit spontanément. Les efforts du doyen et de son équipe enseignante peuvent être décisifs pour maintenir la bonne marche et le sérieux du cursus universitaire55. On connaît les critiques récurrentes formulées à l’encontre des examens et l’organisation des études juridiques est un sujet de préoccupations constant pour le corps professoral et les autorités politiques56. Non moins importante pour comprendre la gestion locale d’une Faculté est la manière dont elle discipline la population étudiante et l’organise. Il y a des villes dont la réputation est d’être plus agitée que d’autres. La police de la Faculté inclut naturellement l’assiduité de ses élèves mais également leur attitude à l’intérieur et l’extérieur de l’établissement. Pour faire face à l’agitation des étudiants et leurs manifestations d’action collective, un jeu subtil de relations s’établit ainsi entre la Faculté, la police, la commune ou encore la justice.
24Au-delà même de ces aspects disciplinaires que John M. Burney restitue parfaitement dans son étude sur les étudiants toulousains57, il convient de mesurer les conséquences de « la naissance de l’étudiant moderne » au XIXe siècle58 sur la fonctionnement même de la Faculté. En effet, celle-ci n’est plus seulement au service de la remise des diplômes. Elle se doit de compter avec les revendications de l’étudiant, catégorie qui gagne progressivement en visibilité sociale. Des associations étudiantes prennent alors en charge les demandes et revendications des étudiants et deviennent des interlocuteurs crédibles dans l’Université59. Cette nouvelle place accordée à l’étudiant s’inscrit dans le mouvement d’accroissement des marges d’action des organes de la Faculté, lié aux réformes républicaines et aux nouvelles demandes sociales. Une telle situation exige par conséquent d’être plus attentif encore aux rapports de force au sein même des instances académiques qui peuvent notamment s’exprimer dans certaines décisions collégiales (à commencer par l’élection du doyen). De même, si un doyen peut imprimer sa marque dans la conduite des affaires universitaires (et, plus encore, à l’occasion de la défense des prérogatives universitaires)60 jusqu’à la troisième République, il devient parfois, à la faveur de l’autonomie accrue des Facultés, l’initiateur d’une véritable politique de rayonnement de sa Faculté61.
C – Faire corps
25Parmi les acteurs de la Faculté de droit, ce sont les professeurs qui ont retenu le plus fréquemment l’attention de la recherche historique62. La conquête de leur statut est redevenue un objet d’interrogation historique63. Récemment, Mathieu Touzeil-Divina a très opportunément donné une vaste présentation de la question de l’accès au corps enseignant au XIXe siècle (nomination directe, nomination sur présentation et concours) qui peut servir de guide64. Le principe d’un concours comme mode d’accès à la carrière universitaire n’a pas fait complètement l’unanimité dans le monde universitaire. Si ses partisans y voient un gage d’égalité et un moyen de combattre les nominations politiques ou de circonstances, ses adversaires dénoncent en lui les multiples abus dont il est le théâtre65. La procédure du « concours de chaire »66, instituée en 1809, domine presque toute la période jusqu’en 185567. Ces concours locaux n’en accumulent pas moins de nombreux reproches : ils visent tantôt le poids de Paris, tantôt la (in-) compétence des jurys de concours ou encore le localisme des recrutements68. Mais, contrairement à une idée reçue, l’instauration d’un concours d’agrégation en 1855 ne s’est pas faite sans résistance des milieux académiques. Après quarante ans de fonctionnement, en 1896, ce concours d’agrégation, nationale et unique, connaît une nouvelle évolution. Il est réorganisé en quatre sections : droit privé, droit public, histoire du droit et économie politique69. Un tel sectionnement n’est pas réalisé sans hésitations70. Une étude globale et minutieuse des « concours de chaire » et des concours d’agrégation serait à entreprendre impérativement71. Elle pourrait ainsi éclairer le déroulement concret des épreuves et les logiques de sélection, les enjeux et les besoins spécifiques à chaque Faculté. Dans le cadre de l’agrégation nationale, il deviendrait alors possible d’affiner la sociologie des agrégés, de préciser l’origine sociale et géographique des candidats et des élus, la distribution des affectations, etc.
26Pour l’instant, les efforts historiographiques se portent essentiellement sur l’étude des contributions doctrinales de grands professeurs de droit, sans d’ailleurs toujours se soucier de restituer leur entreprise dans la totalité de leur activité et de leur univers72. L’histoire des idées juridiques prime l’histoire intellectuelle et sociale des juristes ; les travaux se concentrent sur des individualités plutôt qu’ils ne cherchent à brosser le portrait collectif du corps professoral. Il est vrai que cette tâche, que tente actuellement de mener le groupe CEDRE, s’annonce difficile. Car, avant même d’en extraire des caractéristiques sociologiques, encore conviendrait-il d’opérer un recensement complet de ce collectif enseignant, tout statut confondu et sur la longue durée (des suppléants aux professeurs agrégés, en passant par les simples agrégés ou les chargés de cours). Actuellement, nous ne connaissons pas le nombre total des enseignants entre 1804 et 1914. Une démarche prosopographique s’impose donc ; elle ouvrira la voie à une enquête sociologique des enseignants en droit digne de ce nom, éclairant ainsi leurs origines sociales, la géographie de leurs origines, leur formation, etc.
27Cette analyse de la morphologie du corps n’a pas seulement vocation à offrir une photographie de ce groupe ; elle doit pouvoir contribuer, pour reprendre les remarques de Victor Karady, à une meilleure compréhension des « trajectoires sur lesquelles repose concrètement l’expérience professionnelle vécue et dans lesquelles s’inscrivent, objectivement, les espérances de réussite propres à chaque agent autant que les possibilités qu’a chacun d’élargir son patrimoine de qualifications, de titres et de diplômes et les stratégies de mobilité professionnelle »73. En d’autres termes, l’enquête devra pouvoir restituer les formes et les rythmes de la carrière des agents engagés dans cette profession enseignante, dans les conditions changeantes du marché qui lui sont propres (tout particulièrement à partir de l’instauration de l’agrégation). Elle permettra de spécifier le profil des enseignants parisiens par rapport à ceux de province (notamment, quels sont ceux qui ont le plus de chance d’accéder à la Faculté parisienne ? quelles Facultés constituent les meilleurs tremplins pour Paris ?) ainsi que la division géographique et intellectuelle du travail entre les professeurs des Facultés de droit (par exemple, la dépendance plus ou moins grande au centre parisien ou la hiérarchie implicite entre les différentes Facultés)74.
28A défaut de posséder cette morphologie du corps des Facultés de droit dans la longue durée, l’étude sociale du groupe des enseignants par Faculté est une démarche essentielle quoique encore peu fréquente75. Elle dirige la réflexion, moins vers la biographie des professeurs, que vers la constitution de l’identité d’un « groupe socio-spatial » possédant un certain capital économique, politique et culturel76. L’étude des positions sociales des enseignants dans leur espace urbain, de leurs revenus et fortunes, de leurs alliances politiques et familiales est de nature à éclairer leur place dans la société. Ces enseignants appartiennent-ils à cette « bourgeoisie de robe » dont Christophe Charle a repéré l’émergence au XIXe siècle77 ? Si, à la différence d’autres professions juridiques, la carrière professorale conserve des traits méritocratiques et se trouve moins marquée par des formes de reproduction sociale78, elle n’en est pas moins marquée du sceau de l’enracinement local et de la notabilité79. Par conséquent, ce groupe, dans le milieu de son époque, développe des stratégies communes et entretient des relations plus ou moins intenses avec la classe dominante et le reste de la société80. Son identité est loin de se réduire à certains aspects plus folkloriques (mais néanmoins important dans la représentation du corps)81 de la vie universitaire mais se construit à partir de compétences professionnelles, de liens avec le Palais82, de pratiques localisées de sociabilité83, d’engagements politiques et sociaux84, etc. En restituant ainsi l’identité collective d’une Faculté de province, l’historien donne sens à l’inscription spatiale de cet établissement d’enseignement supérieur.
II - L’inscription provinciale des savoirs juridiques
29La profession d’enseignant à la Faculté de droit est, comme toute autre, triple : elle est une vocation qui donne sens aux tâches et aux missions à effectuer, une activité rémunérée (un emploi) et un métier supposant des compétences partagées par des collègues. Elle apparaît, à bien des égards, comme un prototype de la tradition française du « corporatisme d’État », modèle chargé d’assurer la conformité de l’exercice de la fonction à une mission publique, à commencer par la formation des élites nationales. Cependant, une bonne compréhension de cette profession ne peut se réduire à une étude de l’ensemble de dispositifs (corps professionnel et statuts attribués par l’État) et de dispositions (techniciens du droit ou pédagogues, notables désireux d’utilité sociale ou serviteurs de l’État). Parce que cette activité s’exerce dans des établissements qui n’ont pas tous la même importance dans l’espace universitaire français, parce que cette activité inclut des productions intellectuelles (la doctrine) qui sont jugées d’inégale valeur ou d’inégale importance, la Faculté et ses enseignants se situent aussi dans un espace social structuré par des relations de collaborations et de concurrences. En somme, il existe un marché universitaire dans lequel des Facultés possèdent une légitimité scientifique plus ou moins importante, un nombre d’étudiants plus ou moins grand, un rayonnement international plus ou moins étendu, etc85. Nul n’en sera surpris : la Faculté parisienne domine ici les autres Facultés qui se situent par rapport à elle, même si des études circonstanciées sont nécessaires pour établir les formes et l’étendue d’une telle hégémonie. Impossible d’ignorer la centralité parisienne, même dans une enquête sur les Facultés de province, sous peine de passer à côté des dynamiques sociales à l’œuvre dans les savoirs juridiques.
30Dans cet univers compétitif, comment peut-on créer une asymétrie à son profit ? Comment une Faculté de province et ses enseignants s’y prennent-ils pour acquérir une position de force dans le champ doctrinal ? Le « provincialisme », bien loin d’être un handicap, a dans certaines conditions contribué à asseoir la réputation et l’autorité de certaines places universitaires. Je souhaite, dans cette seconde partie, restituer au lieu qu’est une Faculté de droit de province sa capacité à faire le savoir juridique.
A – Enseigner
31Le professeur de la Faculté de droit constitue, à bien des égards, un idéal-type du métier professionnalisé (notamment une formation, un accès et un exercice réglementés ; le monopole dans l’accomplissement des tâches)86. Si ce groupe peut être qualifié de « communautés professionnelles », c’est en premier lieu parce que chacun exerce son activité dans un cadre juridique et institutionnel commun, chacun possède une culture partagée, etc. Il n’est pas besoin de revenir sur le statut de ces professionnels et de son évolution. Cependant, un groupe professionnel abrite souvent des réalités professionnelles différentes ou opposées, conflictuelles. De ce point de vue, la profession est, dans sa pratique quotidienne, plus segmentée et plus hétérogène que ne le laissent apercevoir les organigrammes des établissements d’enseignement87.
32Le monde académique est stratifié très inégalement ; la reconnaissance et la visibilité de certaines Facultés et de certains professeurs sont contrastées. Si le milieu des Facultés de droit fait place, plus que dans d’autres milieux, à des mécanismes méritocratiques laissant entrevoir des possibilités d’accès à la profession enseignante, il n’en est pas moins marqué par un phénomène de concentration de la reconnaissance. Ce qui frappe ici, c’est que le primat accordé à la Faculté de droit de Paris est institué par le pouvoir politique. Cette asymétrie entre Paris et province est consubstantielle à la fondation du système d’enseignement juridique français. Elle se manifeste notamment par une dotation étatique unitaire largement supérieure par rapport à la province88 mais également par la rémunération supérieure des professeurs parisiens89. Tout au long du XIXe siècle, cette différence de traitement est dénoncée par les enseignants provinciaux exaspérés d’être traités, selon l’expression de Pierre Garraud, en professeurs de « seconde zone ». Sans oublier non plus l’inégalité de traitement entre la métropole et l’Ecole d’Alger qui vit cette différence comme une déchéance. Dans les dernières décennies du XIXe siècle, au moment même où la mobilité enseignante s’accroît, l’augmentation du salaire des enseignants est perçue par certains doyens comme une solution pour stabiliser le personnel de leur Faculté.
33Les formes strictes de l’enseignement et ses méthodes (le cours magistral, les cours complémentaires), les réformes et tentatives de réformes dont elles furent l’objet nous sont plus souvent connues du point de vue réglementaire que dans leur pratique concrète90. Cette dernière devrait être étudiée dans un contexte local, c’est-à-dire en la rapportant aux conditions matérielles réelles qui en permettent l’exercice. C’est en s’attachant à cette même nécessité de saisir la dimension concrète des pratiques enseignantes qu’il convient également d’interroger le contenu des cours. Quel droit enseigne-t-on dans les Facultés de province au XIXe siècle ? Dans chaque Faculté, l’enseignement est d’essence civiliste, dominé par le code civil et s’attache traditionnellement au droit criminel, aux droits procéduraux, au droit commercial (en 1809 pour Paris), au droit romain et au droit public (fût-il étudié avec le regard du privatiste)91.
34Mais le contenu exact des cours reste délicat à établir. Le marché de l‘édition juridique universitaire est peu développé et le recours à la production doctrinale d’un auteur ne nous renseigne pas nécessairement sur le contenu thématique et les orientations pédagogiques de son enseignement. Néanmoins, les notes d’anciens étudiants, les cours manuscrits du professeur ou les comptes rendus de la presse locale offrent des prises intéressantes pour comprendre comme un cours est construit et dispensé. Ainsi, il a été possible de restituer l’enseignement du droit civil du professeur strasbourgeois Jean Frantz (1760-1880) à partir du manuscrit de son cours, l’enseignement de droit civil de professeurs grenoblois dans les années 1880 à partir des notes de l’étudiant Louis Stouff, ou encore le cours de droit constitutionnel du professeur Edouard Jourdan en 1886-1887 grâce aux notes d’un étudiant en doctorat92. Cette enquête ouvre aussi la voie à une interrogation sur la qualité de l’enseignement juridique. Le but n’est pas d’exhumer de nouveaux « grands juristes » méconnus mais de saisir comment se construisent des hiérarchies entre les enseignants en droit. Qu’est-ce, en somme, qu’un « bon » professeur dans la France du XIXe siècle en général et en province en particulier ? La qualité doit être également conçue comme une stratégie visant à capter un auditorat étudiant. En d’autres termes, la qualité de l’enseignement est-elle, pour les étudiants, un critère pertinent pour le choix d’une Faculté ?
35Si on peut s’interroger sur la capacité de la qualité à structurer l’espace universitaire, il ne fait guère de doute que l’importance de l’offre disciplinaire est un élément de l’attractivité universitaire93. Cette fois encore, l’État, avec constance, a favorisé la Faculté parisienne en lui confiant le soin de développer des nouveaux enseignements juridiques, les Facultés de province ne profitant que dans un second temps d’une extension de cette innovation. Les exemples abondent, que je limiterai à deux : après la chaire de droit commercial créée à Paris en 1809, c’est Toulouse qui en bénéficie en 1822 ; en 1828, Paris ouvre une chaire de droit administratif, c’est ensuite le tour de Poitiers (1832), puis des autres Facultés (à partir de 1835)94. L’instauration définitive de certaines chaires fait parfois suite à plusieurs tentatives infructueuses. Au gré des circonstances politiques et des changements de régime, quelques créations sont provisoires. Une chaire autonome de droit criminel, instituée en 1830, est presque aussitôt supprimée pour s’imposer officiellement en 184695. Les Facultés de Toulouse et Caen se voient privées de leur chaire de droit administratif au bout de quelques mois (1829-30). Le bref destin de l’ordonnance du 24 mars 1819 introduisant l’histoire du droit, le droit naturel, l’économie politique ou encore le droit administratif est symptomatique de cette porosité de l’enseignement juridique aux contingences politiques96.
36Dans tous les cas, il ne faut pas se satisfaire d’une interprétation trop manichéenne pour expliquer la plus grande facilité dont on peut créditer la Faculté parisienne pour diversifier son offre disciplinaire. Bien souvent, la Faculté de Paris a montré une farouche résistance face aux efforts des pouvoirs publics pour augmenter le nombre de chaires en raison d’un accroissement des étudiants (l’attrait des carrières civiles se fait plus forte après le retour à la paix en 1815) et de la nécessité de répondre aux transformations juridiques et sociales. Le refus des professeurs parisiens se fonde sur la peur d’une ingérence dans les affaires universitaires d’un pouvoir politique désireux de reclasser ses clientèles. Ensuite, l’esprit civiliste incline à regarder avec une circonspection les disciplines de sciences morales et politiques (économie politique, histoire du droit, droit public…). Enfin, la création de nouvelles chaires menace les intérêts pécuniaires des professeurs : l’augmentation des chaires nécessite d’accroître le nombre des examinateurs, et donc de réduire la rémunération que ces derniers touchent, des droits de présence aux examens... Si les Facultés de province n’ont pas systématiquement accueilli avec bienveillance la réorganisation des enseignements97, elles n’ont pas, pour soutenir la concurrence avec la capitale, ménagé leurs efforts pour convaincre de la création d’enseignements nouveaux98. Lorsque leurs prétentions se sont heurtées à un refus des autorités, elles n’ont pas hésité, par exemple, à recruter des alliés dans les milieux locaux99. À Bordeaux comme à Toulouse, la création d’un cours complémentaire, respectivement en 1874 et 1878, avec le soutien financier de la municipalité, permet d’assurer la présence de l’économie politique dans le cursus100. C’est aussi par le biais du cours complémentaire, donné à titre gratuit par un professeur, que la Faculté de Grenoble organise un enseignement d’histoire du droit dès 1846 (officialisé seulement en 1907)101.
37Les Facultés de droit connaissent à partir des années 1870 un mouvement d’ouverture sans précédent. Entre 1865 et 1919, le nombre de chaires passe de 85 à 198. Une telle augmentation tient surtout à la promotion des études consacrées à la politique, à l’économie et à la société. Elle est inséparable des transformations et des modernisations du monde occidental qui nécessitent l’harmonisation de l’enseignement avec les nouvelles conditions économiques et sociales102. Les changements dans l’enseignement supérieur sont introduits en grande partie à la suite d’une active campagne menée à l’intérieur même de la communauté universitaire. Ce mouvement réformateur est porteur d’une idéologie anti-professionnelle. Les universitaires refusent de voir leur rôle réduit aux seuls aspects pratiques de la formation professionnelle et cherchent à promouvoir la « recherche » et la « science » selon le modèle fourni par l’Allemagne. Une telle revendication est de nature à accroître l’autonomie des enseignants et à élever leur statut social. Ainsi, en 1877, un décret rend obligatoire l’enseignement de l’économie politique en première année de licence103. Puis, c’est un cours de droit constitutionnel qui est ouvert à Paris en 1879104. Un an après, un décret organise un cours obligatoire et annuel « d’histoire générale du droit français » en première année de licence. Progressivement, les Facultés de droit s’ouvrent à des disciplines telles que la science financière, le droit international public, la législation industrielle105 ou encore la législation coloniale (décret du 28 décembre 1880 et décret du 24 juillet 1889).
38Cette évolution ne se fait pas sans résistances. Certains professeurs attachés à un enseignement articulé autour de « l’esprit judiciaire » n’approuvent pas cette ouverture aux « Sciences de l’État ». Ils dénoncent le danger d’une politisation de l’enseignement et rejettent hors de l’Université des disciplines qu’ils jugent encore dans un stade préscientifique, comme pour l’économie politique. Toutefois, un argument joue en faveur du ralliement, bon gré mal gré, à cette ouverture des Facultés de droit : le problème de la formation des administrateurs106. En effet, le monopole dont les Facultés de droit bénéficient dans la formation des hauts fonctionnaires au XIXe siècle est menacé par l’École libre des sciences politiques, fondée à Paris en 1871 par Emile Boutmy107. Cette situation est d’autant plus préoccupante que les effectifs des Facultés stagnent, rendant plus urgente encore la nécessité d’ouvrir de nouveaux débouchés professionnels. L’extension des nouvelles branches du droit se perçoit également dans la réforme opérant le dédoublement de l’ancien doctorat en 1895. À côté du doctorat juridique, un nouveau doctorat « ès sciences politiques et économiques » est institué. Un programme est établi pour ce doctorat : trois cours obligatoires (économie politique, histoire des doctrines économiques, science financière) et trois cours à option (législation industrielle, législation coloniale, législation rurale). Ce nouveau doctorat, l’organisation des conférences facultatives de licence et de doctorat (arrêté du 30 avril 1895 sur les conférences ; loi du 28 juillet 1895 portant fixation de la rétribution à verser par les étudiants pour les conférences ; circulaire ministérielle du 31 octobre 1895 relative à l’organisation des conférences) et la section de l’agrégation (droit privé, droit public, histoire du droit et économie politique) sont autant d’éléments qui attestent les progrès de l’ouverture des Facultés de droit. À cette occasion, Charles Gide parle d’un « grand pas en avant ». Dans son vaste panorama des sciences sociales, Henri Hauser constate que « ce sont les réformes de 1894-95 qui ont définitivement installé dans nos Facultés de droit l’enseignement des sciences sociales »108.
39La réorganisation républicaine du système d’enseignement ne se contente pas de multiplier les matières de sciences sociales ou d’État. Elle organise aussi un nouveau rapport des Facultés de province à la compétition universitaire. Ces Facultés sont, d’un côté, en mesure d’investir plus fortement certaines branches du droit nouvelles et promouvoir une conception renouvelée du travail académique. Peut-être seront-elles en mesure de faire jeu égal, dans certains secteurs, avec la Faculté parisienne, quelque peu empêtrée dans la compétition que le développement d’écoles libres de sciences politiques et sociales lui imposent (École libre des sciences politiques, Collège libre des sciences sociales, Ecole des hautes études sociales…). D’un autre côté, ces mêmes Facultés sont elles-mêmes au prise, plus fortement que jamais, avec la concurrence de leurs voisines juridiques, plus nombreuses que par le passé, et littéraires. De crainte de perdre des étudiants plus mobiles et plus exigeants, chacune exprime le souhait de leur offrir l’éventail le plus large de disciplines enseignées. Ainsi, la Faculté de Toulouse demande en 1899 la création d’un cours d’économie coloniale afin que les étudiants ne partent pas à Bordeaux qui enseigne cette discipline depuis 1892 et où se trouve l’Institut colonial formant des cadres coloniaux.
40Mais les Facultés de province doivent également se garder de deux autres dangers. Tout d’abord, dans l’ordre des savoirs sociaux, les Facultés de lettres, qui connaissent une mutation sans précédent, apparaissent brusquement comme des concurrentes sérieuses. Elles disputent aux Facultés juridiques le titre de « Facultés des sciences sociales ». Des juristes en viennent ainsi à s’engager dans la voie de la sociologie, instrument de transformation de la science juridique et objet de controverses avec les philosophes. Des cours libres de « science sociale » sont créés à Toulouse (Hauriou), Bordeaux (Duguit pour la sociologie et Faure et Saint-Marc pour les statistiques) ou encore Nancy (Melin). Surtout, suite à la loi sur la liberté de l’enseignement supérieur votée le 12 juillet 1875, certaines Facultés de province ont à gérer les conséquences de l’apparition d’instituts catholiques : à Paris, Lille, Lyon, Angers et, pour une période plus courte, Toulouse109. Si seuls quelques professeurs des Facultés de droit d’Etat rejoignent les Facultés libres, ces dernières, au-delà de leur dimension confessionnelle, prétendent encadrer les étudiants plus efficacement110.
41L’espace universitaire du XIXe siècle se construit à la mesure des transformations de la condition étudiante ; elle en est un acteur central. Si, jusqu’en 1880, les étudiants se distinguent par une culture de protestation (parfois peu préoccupés qu’ils sont du sérieux de leur parcours scolaire), ils manifestent progressivement le souhait de s’organiser collectivement pour améliorer leur situation. Pourtant, cette figure de l’étudiant en droit, et de « l’étudiant de province » en particulier111, est encore mal connue.
42Il importe que toute enquête sur une Faculté de province s’y arrête longuement, en traçant tout d’abord ses caractères morphologiques et ses modes locaux de socialisation. Ensuite, elle pourra apporter des éclairages sur l’évolution des effectifs (critère central de hiérarchisation des Facultés de droit entre elles), sur les débouchés qui conditionnent le choix des cursus ainsi que sur le coût des études. Deux catégories particulières peuvent retenir l’attention : les étudiants étrangers et les étudiantes (à Bordeaux, la première étudiante s’inscrit en 1898)112. Enfin, cet étudiant un peu particulier qu’est l’aspirant au doctorat occupe une place particulière113. Quelles perspectives professionnelles le doctorat offre-t-il ? Dans quelle mesure constitue-t-il un accès à un poste d’enseignement ? Le décret du 30 avril 1895, qui traduit une orientation plus scientifique de la thèse, n’est à cet égard pas exempt de cet esprit de compétition entre Facultés. En effet, la loi militaire de juillet 1889 est responsable, en partie, de cette évolution de l’enseignement dans les Facultés juridiques. Comme le reconnaît Claude Bufnoir, « la plus immédiate [des raisons] est peut-être la nécessité, vivement sentie de toute part, d’accorder l’organisation du doctorat en droit avec les exigences de la loi militaire ». Cette loi accorde aux docteurs en droit le privilège de ne passer qu’une année au lieu de trois sous les drapeaux, alors que cette dispense de deux ans est octroyée aux licenciés des Facultés des lettres et des sciences. Alors que la thèse de doctorat en droit ne concernait qu’une fraction des étudiants, elle devient à partir de ce moment un objet très convoité114. Le problème réside cependant dans la difficulté à obtenir le titre de docteur en droit. Puisqu’il n’était pas possible d’espérer obtenir une dispense pour les licenciés en droit, il devient indispensable de rendre l’acquisition du doctorat moins malaisé pour ne pas voir fuir la population des étudiants vers les études littéraires et scientifiques. Par conséquent, on décide de diviser le doctorat en droit en doctorat juridique et doctorat en sciences politiques et économiques. C’est, pour donner corps à ce nouveau grade, qu’on décide alors l’introduction de nouvelles disciplines.
B – Se singulariser
43Comment les Facultés provinciales participent-elles à la production doctrinale au XIXe siècle ?115 Certaines Facultés fournissent-elles des contingents d’auteurs plus importants que d’autres ? Des professeurs provinciaux se distinguent-ils plus particulièrement dans certaines branches juridiques ? Dans le champ de la production doctrinale, on aurait tort d’opposer caricaturalement une Faculté parisienne toute puissante à des Facultés de province transparentes. Au XIXe siècle, les commentateurs du code civil les plus célèbres ne sont-ils pas très souvent des juristes provinciaux (Toullier, Proudhon, Demolombe, Aubry et Rau, etc.) ? La visibilité éditoriale de ces derniers est, somme toute, assez remarquable au regard du caractère étroit et largement parisien du marché de l’édition juridique, du faible nombre des revues juridiques (une fois encore parisiennes)116 et des conditions matérielles parfois défavorables à toute « recherche juridique » (par exemple, l’état des bibliothèques universitaires)117.
44Jusque dans les années 1880, les Facultés de droit comme institutions peinent à se doter d’une identité scientifique spécifique. Sous l’effet du cadre napoléonien homogénéisant, assez rares sont, en effet, celles qui semblent pouvoir se prévaloir d’une orientation doctrinale originale118. Plus que jamais, l’image doctrinale des Facultés est alors incarnée (ou réduite à ?) par quelques auteurs réputés. L’autorité de ces derniers n’est pas seulement la conséquence d’un dialogue plus ou moins inédit avec les codifications napoléoniennes ; elle est inséparable d’un certain « régime de savoir » propre à cette époque qui articule formes institutionnelles, pratiques scientifiques, modes d’insertions politiques et de sociabilités, réalités économiques et sociales, etc. Ainsi, la place de certains auteurs peut-elle être liée à des liens particulièrement étroits avec le Palais ou encore à la fréquentation de traditions juridiques étrangères119. Si les relations avec les juristes allemands et leur impact sont bien connus au XIXe siècle120, celles avec le common law demeurent inexplorées. On soulignera ici un élément déterminant des positionnements doctrinaux de cette période : le champ doctrinal s’organise directement en fonction de doctrines politiques bien plus qu’en fonction de recherches spécialisées et d’appartenances disciplinaires121. Ce qui constitue l’originalité d’éminents professeurs de Strasbourg et de Poitiers, c’est leur effort pour inscrire leur démarche doctrinale dans une perspective libérale122. De la Restauration à la IIIe République, les plus fermes soutiens d’une rénovation de la science juridique ne cessent pas de promouvoir des sciences morales et politiques, c’est-à-dire un savoir libéral de l’organisation sociale. De ce point de vue, la doctrine est moins clivée entre des partisans de l’exégèse et des partisans de méthode historique qu’elle ne s’organise entre deux types d’esprit scientifique : esprit dogmatique (plutôt préoccupé par l’autorité de l’État) et esprit « science sociale » (orienté plus ostensiblement vers les libertés).
45L’onde de choc de cette « politisation » doctrinale est parfois majeure. Sous la monarchie de Juillet, le critère d’évaluation qui permet, aux yeux de certains milieux intellectuels et du pouvoir politique, de juger d’un bon enseignant en droit mais également d’une saine méthode juridique n’est pas une maîtrise de la dogmatique mais la capacité à s’approprier le droit avec les outils de la « science sociale ». Cette transformation affecte directement la Faculté parisienne, à son corps défendant, comme en témoignent les nominations ministérielles de personnalités comme Rossi ou Ortolan. Dans un contexte libéral accru, la valorisation de cette philosophie juridique va cristalliser une quantité d’initiatives, de projets qui cherchent à se faire reconnaître. Deux avocats, versés dans le droit comparé et l’économie politique, Foelix et Wolowski, fondent respectivement, en 1833 et 1834, la Revue étrangère de législation et d’économie politique et la Revue de législation et de jurisprudence qui ouvrent ses colonnes à des professionnels du droit, à des professeurs de province et à des juristes étrangers. De même, le jeune Lerminier, admirateur de Savigny, est nommé professeur au Collège de France en 1831. Certains professeurs de province participent de ce mouvement. Le professeur de droit administratif rennais Firmin Laferrière crée en 1841 une éphémère Revue bretonne de Droit et de Jurisprudence qui, s’inscrivant dans le sillage de l’École historique allemande, promeut une transformation de la démarche juridique. Revue fondée en province, animée essentiellement par des provinciaux, elle associe quelques parisiens, tous versés dans les sciences morales et politiques123. Ce qui frappe ici, c’est le retournement spectaculaire qui s’opère à ce moment : la science défendue par la première des Facultés de droit se trouve « provincialisée » sur la carte des savoirs juridiques alors même qu’un ensemble d’acteurs aux marges de cette Faculté parisienne (et aux marges du département de la Seine) se trouvent subitement déplacés vers son centre. Un tel épisode montre combien le champ académique et le champ doctrinal ne coïncident jamais parfaitement. Le changement dans l’ordre des savoirs légitimes est une opportunité pour tout un ensemble de juristes provinciaux qui peuvent investir des terrains porteurs. Cette fenêtre se refermera assez rapidement pour revenir à une plus grande orthodoxie juridique. La condition de possibilité de ce moment inédit réside bien moins dans la doctrine dominante de la Faculté parisienne arc-boutée sur son conservatisme que la capacité des « sciences morales et politiques » a construire un réseau efficace des porte-parole.
46Les transformations républicaines du système d’enseignement changent incontestablement les formes de la politisation de la doctrine. Elle emprunte, par exemple, plus systématiquement la voie de l’introduction, au sein des Facultés, de disciplines nouvelles ayant un contenu manifestement politique ou social (économie politique, droit constitutionnel ou législation industrielle)124. Ces évolutions, qui alignent progressivement modèle professionnel, enjeux politiques et production savante pour former un nouveau régime de savoir, appellent des enquêtes plus précises. Au-delà des relations qu’entretiennent politique et doctrine, le réaménagement de l’espace académique après 1880 rend possible de nouvelles stratégies de distinction et de reconnaissance pour les enseignants et les Facultés de province. À la recherche d’une audience et d’une certaine visibilité doctrinale, les professeurs de droit développent fortement certains domaines du droit avec le soutien de leur Faculté et des milieux locaux. On assiste à la construction de véritables pôles disciplinaires portés par les membres du corps enseignant, les instances académiques, les municipalités ou encore les sociétés savantes locales. L’idée d’une territorialisation des savoirs juridiques prend ici tout son sens. Si l’École de droit d’Alger se préoccupe de droit et de science coloniales (création de la Revue algérienne, tunisienne et marocaine de législation et de jurisprudence en 1885), la Faculté de Caen s’engage, quant à elle, après 1900 dans la promotion du droit normand : création d’un séminaire de droit normand (1908) et lancement des semaine de droit normand (1911). La situation de la Faculté de Lyon est plus éclairante encore : ville ouvrière, elle se montre réceptive à la réflexion sur la législation ouvrière. Non content d’enseigner cette discipline, le professeur lyonnais Paul Pic lance, avec Justin Godard, une revue en 1900, les Questions pratiques de législation ouvrière et d’économie sociale, et, presque aussitôt, un Office social de renseignements et d’études de Lyon qui enquête sur la situation économique et ouvrière dans la région. En mettant en prise directe son enseignement sur la société lyonnaise, le professeur reforce sa position dans sa discipline125. Son autorité sur celle-ci, déjà établie par la publication d’un traité élémentaire de législation industrielle, s’en trouve consolidée par cette stratégie d’entrepreneur des sciences juridiques. C’est une démarche similaire qui permet au professeur toulousain Jean-Baptiste Brissaud, en s’appuyant notamment sur ses étudiants et sur tout un réseau de sociétés savantes régionales, de bâtir le projet d’un corpus méthodique du droit méridional126.
47L’empire des Facultés de province sur la doctrine mériterait donc une évaluation précise. Dans tous les cas, de nombreux indices signalent que nous sommes fort loin de cette image de la pensée qui représente le champ doctrinal intégralement concentré sur Paris. À cet égard, on peut rappeler le rôle des professeurs provinciaux dans la rénovation de la science juridique sous la IIIe république. L’« École scientifique » (que l’on oppose à « l’École de l’exégèse ») a une origine principalement provinciale : Gény à Nancy, Charmont à Montpellier, Deslandres à Dijon, Cuche à Grenoble en sont quelques représentants. Les causes en sont multiples. La promotion d’une « démarche scientifique » fondée notamment sur la méthode d’observation doit se lire notamment comme un effort de ces professeurs pour faire reconnaître une conception valorisante de la fonction professorale. Là où les professeurs parisiens peuvent se prévaloir d’une proximité des grandes centres politiques et judiciaires (à commencer par des liens avec pouvoir républicain) ainsi que d’une multitude de gains symboliques, les professeurs provinciaux (guidés par des motifs aussi scientifiques que politiques), sans délaisser nécessairement leurs activités au Palais, peuvent revendiquer une mission plus haute que la simple organisation des examens et la délivrance de diplômes. Néanmoins, et à la différence de la monarchie de Juillet, les efforts de ces juristes provinciaux ne parviendront jamais vraiment à déborder les partisans d’une méthode plus classique, incarnés notamment par l’institution parisienne. C’est que ces derniers parviendront à convertir à leur profit le mouvement impulsé par les juristes provinciaux.
48Dans les dernières décennies de 1800, l’accroissement du nombre des Facultés et des disciplines enseignées qui s’efforcent d’affirmer leur légitimité, les débats autour de la méthode juridique, les évolutions de la demande sociale rendent plus sensibles la question des options scientifiques de chaque Faculté désireuse d’affirmer leur identité dans un champ académique et doctrinal plus concurrentiel. Ce n’est pas un hasard si certains juristes cherchent, à partir de cette époque, à ordonner la complexité de cet univers institutionnel et intellectuel en repérant des écoles doctrinales dans certaines Facultés. Que ces écoles « provinciales » n’aient en réalité, comme des études récentes le démontrent127, aucune consistance réelle ne doit pas surprendre. La catégorie d’école n’a, en effet, pas de valeur descriptive ou de pertinence analytique : elle est, à l’inverse, un enjeu dans la construction de l’autorité doctrinale. Ainsi, l’histoire des Facultés de droit doit surtout s’attacher à décrire les usages (polémiques ou non) d’une telle catégorie, les formes de mobilisation dont elle est l’objet entre les mains d’auteurs soucieux de « faire doctrine ». Des Facultés de droit, en quête de visibilité scientifique, ne manquent pas d’accueillir avec une bienveillance certaine cette distribution géographique des constructions doctrinales. Le caractère introuvable des écoles doctrinales ne doit pas pour autant masquer le sentiment accru d’appartenance à une Faculté ni même que leurs enseignants se distinguent fréquemment par une culture et des pratiques communes128. L’enquête peut ainsi restituer les multiples opérations qui contribuent justement à donner à la Faculté une tonalité intellectuelle particulière et que le corps enseignant revendique fièrement comme un patrimoine précieux. En définitive, la IIIe République, en traçant les contours de la doctrine moderne, élève à cette occasion la Faculté de droit en elle-même au rang d’acteur de la doctrine à part au même titre que les professeurs-auteurs qu’elle compte dans ses murs.
Conclusion : les Facultés de province, une invention de la IIIe République
49Le XIXe siècle des Facultés de droit peut se caractériser rapidement par deux configurations successives. La configuration napoléonienne organise un ensemble atomisé de Facultés de province largement isolées les unes des autres mais dépendantes du centre politique. En vertu des dispositions de l’instruction pour les écoles de mars 1807, elles ne peuvent même pas correspondre entre elles ni directement ni indirectement, de sorte que la mobilité éventuelle de certains étudiants et certains échanges intellectuels entre les professeurs semblent seuls en mesure de connecter les différents sites universitaires. Les revendications visant à obtenir les mêmes conditions que la Faculté parisienne sont, pourrait-on dire, moins motivées par la volonté de faire jeu égal sur le plan académique avec une Capitale hégémonique que par l’espoir d’un minimum de « justice spatiale ». Les transformations du système de l’enseignement du droit, à partir de la seconde moitié du XIXe et s’accélérant avec la IIIe République, ont contribué à relever l’attractivité des Facultés de province. Sans parvenir, bien entendu, à renverser la centralité parisienne, les Facultés provinciales réussissent néanmoins à faire exister des projets pédagogiques et scientifiques spécifiques, à établir des positions fortes et concurrentielles dans certains secteurs du droit.
50Cette nouvelle configuration, qui construit l’espace universitaire sur un modèle plus concurrentiel, ne doit pas masquer le revers, peut-être moins pessimiste, de ce monde des Facultés juridiques. Tout d’abord, le champ académique est régulé par le critère de la carrière rendu possible par l’instauration d’une agrégation nationale (1855), d’une multiplication des Facultés et des chaires, etc. Le mérite est producteur de reconnaissance et de mobilité. Par conséquent, si la Faculté parisienne devient plus accessible, l’activité exercée dans une Faculté de province peut être une étape de la carrière ou un choix.
51Le « provincialisme » des Facultés n’est pas seulement un effet imposé du système d’enseignement ; il peut être une construction, une revendication, une identité. Une Faculté de province se distingue par des orientations scientifiques, un corps enseignant qui s’investit et décide de rester sur place, etc. Ce qui fait la différence d’une Faculté est alors valorisée (même si le modèle parisien suscite des convoitises). Cette évolution prend tout son sens lorsqu’elle est reliée aux progrès d’une conscience régionale au même moment et que les républicains arrivés au pouvoir seront loin de contredire129. À cette logique positive de la différence s’ajoute une autre logique, plus discrète et délicate à saisir, une logique de l’équivalence. La prolifération des lieux d’échanges intellectuels, la multiplication de sociétés savantes offrent des possibilités accrues de rencontres, de connexions et de débats. Les Facultés de province expérimentent la proximité de leurs difficultés, expriment plus nettement la nécessité d’agir collectivement et de désigner des porte-parole susceptibles de parler, en leur nom, de leurs intérêts. Par exemple, les professeurs provinciaux de droit public parviennent à s’organiser collectivement, notamment dans une Association des membres des Facultés de droit (1909), pour faire valoir leur vision du métier de professeur de droit (et les valeurs qu’ils y attachent) contre celle des légistes parisiens130. En somme, et avec une acuité nouvelle entre le moment 1900 et la Grande guerre, l’opposition entre Paris et la Province prend consistance par l’intermédiaire de leurs porte-parole. Pendant la IIIe République, face à la Faculté parisienne, il faut compter progressivement avec l’activisme de Facultés de la province devenues des Facultés de Province.
Notes de bas de page
1 Pour une orientation bibliographique et une présentation des archives, voir le très précieux guide : Thérèse Charmasson (dir.), Histoire de l’enseignement. XIXe-XXe siècles. Guide du chercheur, Paris, Institut national de recherche pédagogique/Comité des travaux historiques et scientifiques, 2006.
2 Ces différents dictionnaires biographiques ont été publiés dans la collection « Histoire biographique de l’enseignement » (Publications de l’INRP).
3 Walter Rüegg (éd.), A history of the University in Europe. Vol. 3 : Universities in the Nineteenth and Early Twentieth Centuries (1800-1945), Cambridge, Cambridge University Press, 2008.
4 À quelques exceptions près, à commencer par les travaux de Christophe Charle sur l’histoire sociale des professeurs de droit : « La toge ou la robe ? Les professeurs de la Faculté de droit de Paris à la Belle Époque », Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, n° 7, 1988, p. 167-175 ; « Pour une histoire sociale des professions juridiques à l’époque contemporaine. Note pour une recherche », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 76-77, 1989, p. 117-119 ; La République des Universitaires, 1870-1940, Paris, Seuil, 1994.
5 Consultez Jean-Jacques Bienvenu, « Bibliographie élémentaire », Annales d’histoire des Facultés de droit, n° 1, 1984, p. 63-95 ainsi que la bibliographie réalisée par Emmanuelle Picard, « Bibliographie sur les établissements d’enseignement supérieur » :
http://www.inrp.fr/she/picard_biblio_etablissements_enseignement_superieur.htm
6 La Société d’histoire des Facultés de droit publie des Annales d’histoire des Facultés de droit devenues la Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique puis la Revue d’histoire des Facultés de droit et de la culture juridique, du monde des juristes et du livre juridique. Trente numéros sont déjà parus depuis 1984 et constituent une source bibliographique essentielle pour notre domaine.
7 Stéphane Rials, « Quelques questions pour l’histoire des Facultés de droit », Annales d’histoire des Facultés de droit, n° 1, 1984, p. 57-62.
8 Voir le site internet du groupe : http://www.droit.ens.fr/spip.php?article2
9 Pour ne prendre que trois exemples : David Deroussin (éd.), Le renouvellement des sciences sociales et juridiques sous la IIIe République. La Faculté de droit de Lyon, Paris, Éditions La Mémoire du droit, 2007 (à l’occasion des cent trente ans de la Faculté de droit) ; Martial Mathieu (éd.), De l’Ecole de droit à la Faculté de droit de Grenoble (1806-2006). Héritages historiques et enjeux contemporains, Grenoble, Presses Universitaires de Grenoble, 2007 ; « Bicentenaire de la Faculté de droit de Strasbourg. 1804-2004 », Annales de la Faculté de droit de Strasbourg, nouvelle série, n° 9, 2008.
10 Très significativement, le débat sur « Les Facultés de droit dans la réforme » inauguré dans la Revue de droit public : Martial Mathieu, « Facultés de droit et réforme universitaire au XIXe siècle : la conquête d’un statut » (RDP, n° 4, 2008, p. 1000-1021) ; Jean-Marie Carbasse, « L’agrégation des Facultés de droit » (RDP, n° 2, 2009, p. 300-319).
11 Voir néanmoins le projet en cours « Paris capitale juridique », convention conclue entre la ville de Paris et l’ENS : http://www.droit.ens.fr/spip.php?article4
12 Portant d’une manière spécifique sur la Faculté de Paris, voir notamment : Olivier Motte, La Faculté de droit de Paris et le ministère de l’Instruction publique au XIX e siècle, DES de l’Université de Paris 2, 1974 ; Madeleine Ventre-Denis, « La Faculté de droit de Paris et la vie politique sous la Restauration : l’affaire Bavoux », Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, 5, 1987, p. 33-64 ; Catherine Lecomte, « La Faculté de droit de Paris dans la tourmente politique, 1830-1848 », Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, n° 10-11, 1990, p. 59-98 ; Guy Antonetti, « La Faculté de droit de Paris à l’époque où Boissonade y faisait ses études », Revue internationale de droit comparé, 1991, volume 43, n° 2, p. 333-356 ; Marc Milet, La Faculté de droit de Paris face à la vie politique : de l’affaire Scelle à l’affaire Jèze, 1925-1936, Paris : LGDJ, 1996.
13 Pour les enjeux de mémoire : François Lormant, « Mémoire et culture matérielle de la Faculté de Droit de Nancy : de la commémoration à la recherche historique », in Mémoire et culture matérielle de l’Université : sauvegarde, valorisation et recherche, Nancy, PUN, 2008, p. 135-148.
14 Guilaume Leyte, « Le provincialisme juridique dans la France d’Ancien régime : quelques remarques », Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, 2002, n° 22, p. 95-117.
15 Sur ces deux projets complémentaires, quoique très différents : Pierre Nora (dir.), Les lieux de mémoire. 3 volumes, Collection Quarto, Gallimard, 1997 ; Christian Jacob (dir.), Les lieux de savoirs. Espaces et communautés, Paris, Albin Michel, 2007.
16 Christian Jacob, « Faire corps, faire lieu », in Christian Jacob (dir.), op. cit., p. 20.
17 Les rapporteurs sont : Jean-Marie Augustin (Poitiers), Boris Bernabé (Dijon), Anne-Sophie Chambost (Caen), Olivier Devaux (Toulouse), Catherine Fillon (Lyon), Sylvie Humbert (Lille-Douai), Farid Lekeal (Lille-Douai), Tiphaine Le Yoncourt (Rennes), François Lormant (Nancy), Cyrille Marconi (Grenoble), Marc Malherbe (Bordeaux), Jean-Louis Mestre (Aix), Céline Pauthier (Strasbourg), Mathieu Touzeil-Divina (Poitiers), Fabien Valente (Montpellier).
18 Quelques monographies importantes : John M. Burney, Toulouse et son Université, Facultés et étudiants dans la France provinciale du 19e siècle, Toulouse-Paris, Presses du Mirail, éditions du CNRS, 1988 (concerne aussi bien les études littéraires que les études juridiques) ; Olivier Devaux, L’enseignement à Toulouse sous le Consulat et l’Empire, Toulouse, Presses de l’IEP de Toulouse, 1990 ; Olivier Devaux, L’enseignement à Toulouse sous la Restauration, Toulouse, Presses de l’Université des sciences sociales de Toulouse, 1994 ; Aline Logette, Histoire de la Faculté de droit de Nancy (1768-1864-1914), Nancy, Publications de l’Université de Nancy, 1964 ; Marc Malherbe, La Faculté de droit de Bordeaux : 1870-1970, Talence, Presses universitaires de Bordeaux, 1996 ; Mathieu Touzeil-Divina, Éléments d’histoire de l’enseignement du droit public : la contribution du doyen Foucart (1799-1860), Poitiers, LGDJ, 2007 (qui a l’avantage supplémentaire de constituer aussi une synthèse sur de nombreux aspects de l’organisation des Facultés de droit au XIXe siècle) ; Paul Weisbuch, La Faculté de droit de Grenoble (an XII-1896), thèse de droit, Grenoble, 1974.
19 Quelques mémoires : M.P. Ader, La Faculté de droit au XIXe siècle. Histoire d’une résurrection, mémoire DEA, Montpellier, 2000 ; Jacqueline Begliuti-Zonno, La Faculté de droit de Toulouse au début de la IIIe République (1875- 1887), mémoire M2, Toulouse, 2006-07 ; Christophe CichockI, Les enseignants de la Faculté de droit de Dijon (1806-1914), mémoire DEA, Dijon, 1991-92 ; Sylvain Desport, La Faculté de droit de Poitiers au début de la IIIe République (1870-1885), mémoire DEA, Poitiers, 2003 ; Florence GIRAL, L’enseignement du droit à Toulouse au XIXe siècle, mémoire DEA, Toulouse, 1994-95 ; Viviane HA, Étude sociale de la Faculté de droit de Poitiers (1806-1846), mémoire maitrise histoire, Poitiers, 1973 ; Elisabeth Jouve-Lefebvre, L’histoire de la Faculté de droit d’Aix-en-Province de 1870 à 1914, mémoire DEA, Aix-en-Provence, 1998- 99 ; Bernard Mathieu, La Faculté de droit de Dijon dans la première moitié du XIXe siècle (1806-1885), mémoire DEA, Dijon, 1979-80 ; Karine Prevost, Histoire de la Faculté de droit de Poitiers de 1806 à 1845, mémoire DEA, Poitiers, 1997 ; Monique Puzzo-Laurent, La Faculté de droit de Toulouse sous le Second Empire, mémoire DES, Toulouse, 1973.
20 La distinction ici proposée me permet, immédiatement, de situer la place que me semble devoir tenir la Faculté parisienne dans une histoire des Facultés de droit de province au XIXe siècle. Cette question a été refoulée pendant le colloque de novembre traduisant notre embarras collectif. Quand bien même l’historien souhaiterait écrire une histoire des Facultés de province sans Paris, la Faculté parisienne reviendrait le hanter discrètement. Lorsque l’étude historique porte sur la localisation d’une Faculté de droit dans un milieu déterminé alors il faut reconnaître que Paris est une Faculté « de province » comme une autre. La capitale, comme Montpellier et Nancy, (s’) arrange (avec) son environnement qui limite ou facilite son action ; elle doit aussi faire avec le pouvoir politique, la municipalité, un Institut catholique, etc. Par conséquent, c’est de façon quelque peu artificielle que j’exclus la Faculté parisienne pour alléger ma tâche. Lorsque le regard se porte sur la construction des positions pédagogiques et doctrinales, Paris ne peut pas plus disparaître du champ de l’observateur : les Facultés de province gravitent autour d’elle, se situent par rapport à elle. Impossible d’étudier la taille de Douai ou Toulouse sans l’étalon parisien.
21 Sur les services des archives des Universités :
http://www.archivesdefrance.culture.gouv.fr/annuaire-services/publics/
22 Sur ces trois sortes d’espaces locaux (espace d’encadrement, espace-système, espace d’intercommunication), voir Roger Brunet, Le déchiffrement du monde. Théorie et pratique de la géographie, Paris, Belin, 2001, p. 119-130.
23 Sur la différence entre espace produit et espace support, voir Denise Pumain, Thérèse Saint-Julien, L’analyse spatiale. Localisation dans l’espace, Paris, Armand Colin, éd. 2008, p. 43-46 : « Le projet de la géographie est bien toujours d’étudier les propriétés d’un espace relatif et des processus qui contribuent à différencier les lieux ».
24 Jacqueline Gatti-Montain, Le système d’enseignement du droit en France, Lyon, PUL, 1987.
25 Voir notamment Jean-Jacques Gleizal, Michel Miaille, « L’enseignement du droit dans la formation sociale », in Pour une critique du droit, Presses Universitaires de Grenoble, François Maspero, 1978 ainsi que plusieurs articles publiés dans la revue Procès. Une ambition critique anime également Julien Bonnecase lorsqu’il publie en 1929 son classique Qu’est-ce qu’une Faculté de droit ? Dirigé contre le conservatisme de certains juristes, l’ouvrage veut démontrer que « les Facultés de droit doivent être par un jeu savamment combiné, des établissements de haute philosophie, des centres d’éducation sociale et des cliniques juridiques » (p. 11). L’histoire des Facultés de droit se développerait-elle principalement sur un terreau militant ?
26 Mathieu Touzeil-Divina examine certains des préjugés associés aux Facultés de droit au XIXe : « Entre ordre et préjugé, la Faculté de droit de Poitiers au XIXe siècle », Cahiers poitevins d’histoire du droit. Premier cahier, LDGJ, 2007, p. 155- 191.
27 On consultera le toujours utile Louis Liard, L’Enseignement supérieur en France, 1789-1889, 2 volumes, Paris, 1888-94. Voir également, Antoine Prost, Histoire de l’enseignement de France, 1800-1967, Paris, Armand Colin, coll. « U », 1968, 2e éd. 1977 ; Jacques Verger (dir.), Histoire des Universités en France, Toulouse, Privat, 1986 ; Christophe Charle, Jacques Verger, Histoire des Universités, Paris, 2e éd., 2007 (pour sa dimension comparatiste).
28 Récemment, pour un panorama, l’utile synthèse réalisée par Mathieu Touzeil-Divina dans ses Élements d’histoire de l’enseignement du droit public : la contribution du doyen Foucart (1799-1860), Poitiers – Paris, 2007, p. 13-74 ainsi que Jean-Louis Halperin, Histoire du droit privé français depuis 1804, Paris, PUF, éd. 2001, p. 47-52. Il serait judicieux de réaliser, pour les Facultés de droit, une analyse détaillée et synthétique du Recueil des lois et règlements sur l’enseignement supérieur (en 7 volumes) d’A. de Beauchamp, du Recueil des règlements des Facultés de droit de Daniel de Folleville (en 3 volumes) ainsi que des Enquêtes et documents relatifs à l’enseignement supérieur publiés par le ministère de l’Instruction publique.
29 George Weisz, The Emergence of Modern Universites in France (1863-1914), Princeton, Princepton UP, 1983.
30 Sur leur rôle, voir le cas exemplaire de la mise en place des Facultés de droit dans les départements étrangers de l’Empire, Anne-Marie Voutyras, « Les Facultés de droit dans les départements étrangers de l’Empire napoléonien », Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, 1992, p. 127-157.
31 Sur le choix de Grenoble, consultez la thèse de Paul Weisbuch, op. cit.
32 Jean-Laurent Vonau, « De l’école spéciale de droit à la Faculté impériale (1804- 1815) », in Bicentenaire de la Faculté de droit de Strasbourg. 1804-2004, Strasbourg, Presses Universitaires de Strasbourg, 2008, p. 20.
33 Aline Logette, op. cit.
34 Voir Marc Malherbe, op. cit., p. 25-35.
35 Fr. F. Villequez, Les Ecoles de droit en Franche-Comté et en Bourgogne. La Faculté de droit de Dijon, Paris, E. Thorin, 1875. Dijon doit notamment son succès au soutien du conseiller Berlier et Maret, tous deux appréciés du premier consul (p. 66).
36 Deux exemples : A. Batbie, « De la création de nouvelles Facultés de droit », Revue critique de jurisprudence et de législation, 1865, t. 27, p. 455-57 ou Eliacin Naquet, « De l’enseignement du droit », Paris, 1872 (tiré de la Revue critique de jurisprudence et de législation, 1871-72).
37 Jean-Claude Vatin, « Exotisme et rationalité : à l’origine de l’enseignement du droit en Algérie (1879-1909) », dans Sciences sociales et colonisation, Paris, CNRS, 1984, p. 161-183 ; Laure Blevis, « Une Université française en terre coloniale. Naissance et reconversion de la Faculté de droit d’Alger (1879-1962) », Politix. Revue française des sciences sociales du politique, p. 53-73 ; Robert Carvais, Florence Renucci, « La Faculté de droit d’Alger : un état de la recherche historique », 14 p. (communication personnelle des auteurs).
38 Louis Trenard, De Douai à Lille, une Université et son histoire, Université de Lille III, Villeneuve d’Ascq, 1978.
39 Nicole Dockes, « La fondation de la Faculté de droit de Lyon », in La Faculté de droit de Lyon : 130 ans d’histoire, Éditions lyonnaises d’art et d’histoire, 2006 et sa contribution dans ce volume.
40 Marc Malherbe, op. cit., p. 28.
41 Pour comprendre l’architecture morale des Facultés de droit : Jean-Philippe Heurtin, L’espace public parlementaire. Essai sur les raisons du législateur, Paris, PUF, 1999 ; Christian de Montlibert, L’impossible autonomie de l’Architecte. Sociologie de la production architecturale, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg et Maison des sciences de l’homme, 1995.
42 Voir l’exemple de Grenoble analysé par Sylvain Gauche, Éric Pantalacci, « Les lieux d’enseignements de la Faculté de droit de Grenoble : contraintes matérielles et mutations symboliques (XIXe-XXe siècles) », in Martial Mathieu, De l’école de droit à la Faculté de droit de Grenoble, op. cit., p. 163-182. Voir, pour Toulouse, la contribution de Sonia Moussay dans ce volume.
43 Sur la fonction de doyen de la Faculté de droit, outre la thèse de Mathieu Touzeil-Divina, op. cit., sur le doyen Foucart, on consultera par exemple J.-P. Marque, Université, doctrine et idéologie. Le doyen Morelot (1786-1875), Dijon, 1982.
44 Sur cette organisation napoléonienne : Félix Ponteil, Histoire de l’enseignement en France, 1789-1965, Sirey, 1965 ; Jean Tulard, « L’Université Napoléonienne », in Histoire de l’administration de l’enseignement en France, 1789-1981, Genève, Droz, 1983, p. 11-17 et, dans le même volume, la contribution de Paul Gerbod, « L’administration de l’Instruction publique (1815-1870) », p. 19- 36.
45 Paul Gerbod, « Les inspecteurs généraux et l’inspection générale de l’Instruction publique de 1802 à 1882 », Revue historique, 1966, p. 79-106.
46 Une enquête de cette nature est, par exemple, réalisée par Marc Malherbe, La Faculté de droit de Bordeaux 1870-1970, Presses universitaires de Bordeaux, 1996, p. 61-97.
47 Hélène Viallet, « Les sources de l’histoire de la Faculté de droit de Grenoble » dans Martial Mathieu (éd.), De l’école de droit à la Faculté de droit de Grenoble (1806-2006), op. cit.., p. 19-24. On se reportera aux inventaires sommaires proposés dans certains rapports publiés ci-après ainsi qu’au Guide du chercheur sur l’histoire de l’enseignement (XIXe-XXe).
48 Voir la contribution de Catherine Fillon dans ce volume.
49 Par exemple, la situation si spécifique de Strasbourg, M. Thomann, « La Faculté de droit de Strasbourg dans son environnement social, économique, intellectuel du XVIe au XXe siècle », in Les Universités du Rhin supérieur de la fin du Moyen-Age à nos jours, Strasbourg : Presses universitaires de Strasbourg, 1988. p. 71-81.
50 Sur la dotation financière étatique de la Faculté de droit de Paris et celles de provinces pour l’année 1867 : Victor Karady, « Les origines et la naissance de l’Université contemporaine », in Jacques Verger (dir.), Histoire des Universités en France, op. cit., p. 296-298.
51 Dans son article sur Poitiers (« Entre ordre et préjugé », op. cit.), Mathieu Touzeil-Divina analyse la situation de la Faculté comme le résultat d’interactions entre plusieurs ordres (ordres municipal, rectoral, ministériel…) ainsi qu’avec les autres Facultés.
52 Monique Puzzo, « La Faculté de droit de Toulouse et le Ministère durant le second Empire », Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, n° 7, 1988, p. 107-123.
53 Voir la somme réalisée par Jean-François Condette, Les recteurs d’académie en France de 1808 à 1940, 3 tomes, Paris, INRP, 2006-2009 ainsi que Jean-François Condette, Henri Legoherel (dir.), Les recteurs d’académie en France : deux cents ans d’histoire, Paris, édition Cujas, 2008. Voir également, Nathalie Goedert-Abaji, « Quand les recteurs regardaient la France », in Instruction, éducation, administration. Mélanges en l’honneur de Jacques Lelièvre, Paris, PUF, 1998, p. 121-157.
54 Alain Laquieze, « L’inspection générale des Facultés de droit dans la seconde moitié du XIXe siècle (1852-1888) », in Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, 1989, n° 9, p. 7-43 ; G. Caplat (dir.), Les inspecteurs généraux de l’instruction publique : Dictionnaire biographique, 1802-1914, Paris, INRP, 2000.
55 Pour de nombres références, la bibliographie réalisée par Jean-Jacques Bienvenu, op. cit., p. 74-80 et les développements consacrés à ces questions dans les différentes monographiques portant sur une Faculté de droit.
56 Deux références classiques parmi d’autres : Louis Trenard, « Salvandy et les études juridiques », Revue du Nord, XLVIII, 1966, p. 337-379 ; André Dauteribes, « Laboulaye et la réforme des études de droit », Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, n° 10-11, 1990, p. 13-57.
57 John M. BurneY, Toulouse et son Université, op. cit., notamment le chapitre VII.
58 Selon l’expression de Pierre Moulinier, La naissance de l’étudiant moderne au XIXe siècle, Paris, Belin, 2002.
59 Voir, par exemple, Jean-François Condette, « Les Associations générales d’étudiants en France et le politique (1881-1914), 1e partie : espoirs et développement. 2e partie : les espoirs déçus du régime républicain, limites et contestation des AGE », Carrefours de l’éducation, n° 23 & 24, 2007, p. 85-101 et 149-158 ; du même, « Folklore, solidarité et revendications étudiantes : l’Union lilloise des étudiants de l’État (1881-1940) », Matériaux pour l’histoire de notre temps, Revue d’histoire contemporaine éditée par l’Association des amis de la BDIC et du Musée d’histoire contemporaine, Paris X, n° 86, avril-juin 2007, « 1907 : Une union étudiante est née », p. 34-46. Dans plusieurs articles, Christiane Ratel-Derobert a examiné les moyens d’expression des étudiants aixois dans la première moitié du XIXe siècle.
60 Paul-Marie Gaudemet, « La Faculté de droit de Dijon vue par ses dirigeants sous Napoléon III », Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, n° 14, 1993 et les contributions de Cyrille Marconi et de Hugues Richard dans ce volume.
61 Pour le cas des décanats lyonnais de Caillemer et Josserand, Frédéric Audren, Catherine Fillon, « Louis Josserand ou la construction d’une autorité doctrinale », Revue trimestrielle de droit civil, janvier-mars 2009, n° 1, p. 39-76.
62 Sur l’histoire des professeurs de droit, voir la synthèse de Jean-Marie Carbasse, « Professeurs à la Faculté de droit », Denis Alland, Stéphane Rials (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, Paris, PUF, Quadrige, 2003, p. 1242-1247.
63 Joseph Delpech, Statut du personnel enseignant et scientifique de l’enseignement supérieur, Librairie du Recueil Sirey, 1937 ; Jean Imbert, « Sur le statut particulier des enseignants (de 1800 à 1980) », Revue de droit public et de la science politique, 1983, p. 5-21. En dernier lieu, la synthèse de Martial Mathieu, « Facultés de droit et réforme universitaire au XIXe siècle », op. cit. Plus largement, Paul Gerbod, La Condition universitaire en France au XIXe siècle (1842-1880), Paris, P.U.F., 1965.
64 Mathieu Touzeil-Divina, Éléments d’histoire de l’enseignement du droit public, op. cit., p. 173-248.
65 Voir la controverse qui oppose Lanjuinais et Salvandy (1838) sur le concours et sa légitimité : Yann-Arzel Durelle-Marc, « La nomination des professeurs de droit, sujet de débat parlementaire sous la monarchie de Juillet. Autour du débat Lanjuinais-Salvandy, juin 1838 », in Nader Hakim, Marc Malherbe (dir), Thémis dans la cité. Facultés de droit et institutions locales à l’époque contemporaine, à paraître. L’historiographie s’est surtout préoccupée des nominations politiques à la Faculté de droit de Paris. Par exemple, Guy Antonetti, « La Faculté de droit de Paris à l’époque où Boissonade y faisait ses études », op. cit.
66 Sur la notion de chaire, Jean Dauvillier, « La notion de chaire professorale dans les Universités depuis le Moyen Âge jusqu’à nos jours », Annales de la Faculté de droit de Toulouse, 1959, p. 285-316.
67 Jean-Jacques Bienvenu, « Les concours pour les chaires des Facultés de droit (an XII-1855) », Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, 2003, n° 23, p. 7-39.
68 Un exemple de concours controversé : André Cabanis et Olivier Devaux, « Un concours de chaire à la Faculté de droit de Toulouse en 1822 : entre rumeurs et localisme », », Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, n° 23, 2003, p. 41-55.
69 Voir la synthèse de Jean-Marie Carbasse, « L’agrégation des Facultés de droit », op. cit.
70 Sur ce sectionnement, on consultera : Jean-Pierre Queneudec, « Quelques remarques sur un centenaire : le concours d’agrégation de droit public », in Mélanges en l’honneur de Georges Dupuis, Paris, LGDJ, 1997, p. 271-277 ; Jean-Louis Halperin, « L’histoire du droit constituée en discipline : consécration ou repli identitaire ? », Revue d’histoire des sciences humaines, n° 4, 2001, p. 9-32 ; J. Poumarede, « Pavane pour une histoire du droit défunte (sur un centenaire oublié) », Procès, 6, 1980, p. 91-102 ; Lucette Le Van Lemesle, Le Juste et le Riche. L’enseignement de l’économie politique, 1815-1950, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2004.
71 Patricia Ducret a recensé les 1 706 candidatures (dont plus de 310 reçus) au concours d’agrégation entre 1856 et 1912 (http://www.inrp.fr/she/agregdroit/index.html). Jean-Louis Halperin a, quant à lui, réalisé une étude sur « La première génération d’agrégés d’histoire du droit », in Jacques Poumarede (éd.), Histoire de l’histoire du droit, Presses de l’Université des sciences sociales de Toulouse, Toulouse, 2006, p. 257-264.
72 Un ouvrage collectif vient d’apporter une contribution décisive à l’étude des auteurs de la doctrine : Patrick Arabeyre, Jean-Louis Halperin, Jacques Krynen, Dictionnaire historique des juristes français (XIIe-XXe), Paris, PUF, 2007. On pourra également consulter quelques répertoires biographiques, notamment Anne-Marie Ballansat, Les juristes dauphinois du XIXe siècle. Répertoire bibliographique, Grenoble, 1985 ou encore la base « Les jurisconsultes du XIXe siècle » (30 fiches réalisées à partir des ressources des Archives nationales) accessible sur le site Juristoria de l’Association Domat : http://www.juristoria.com/21.html
73 Victor Karady, « Les professeurs de la République. Le marché universitaire, les réformes universitaires et les transformations de la fonction professorale à la fin du 19e siècle », Actes de la Recherche en Sciences Sociales, 1983, volume 47-1, p. 91. On consultera également du même auteur : « L’expansion universitaire et l’évolution des inégalités devant la carrière d’enseignant au début de la IIIe République », Revue française de sociologie, 1973, volume 14, n° 4, p. 443-470 et « Recherches sur la morphologie du corps universitaire littéraire sous la Troisième République », Le Mouvement social, n° 96, 1976, p. 47-80.
74 Pour les Facultés des sciences, Christophe Charle, « Les professeurs des Facultés des sciences en France : une comparaison Paris/Province », Revue d’histoire des sciences, 1990, 43, n° 4, p. 427-450.
75 Marc Malherbe consacre par exemple des développements à la « position sociale des enseignants de la Faculté » et offre, dans la deuxième partie de son ouvrage, des fiches bio-bibliographiques très complètes sur chaque enseignant (La Faculté de droit de Bordeaux, op. cit., p. 259-436). Cette démarche est plus fréquente pour l’histoire des magistrats et des avocats. Récemment, Vincent Bernaudeau, La justice en question. Histoire de la magistrature angevine au XIXe siècle. Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2007 ; Serge Defois, Les Avocats nantais au XXe siècle - Socio-histoire d’une profession, Rennes, PU Rennes, 2008.
76 Nous nous inspirons de la notion de « classe socio-spatiale » forgée par Alain Reynaud, Société, espace et justice, Paris, 1981, PUF, pour qui la différenciation spatiale est génératrice d’inégalités dans le niveau et le statut social des individus et des groupes
77 Christophe Charle, « La bourgeoisie de robe en France au XIXe siècle », Le mouvement social, n° 181, octobre-décembre 1997, p. 53-72.
78 Pour le cas de la Faculté de droit de Montpellier, Christophe Charle, « Enracinés et déracinés, les professeurs de la Faculté de droit de Montpellier (1880- 1914) », in Septième centenaire des Universités de l’Académie de Montpellier (1289-1989), Montpellier, 1992, p. 148-154 ; du même, La République des universitaires, 1870-1940, Paris, Seuil, 1994 (chapitre 6).
79 En fonction des périodes et des lieux, le corps enseignant d’une Faculté se compose presque exclusivement d’un personnel local, comme à Strasbourg jusqu’en 1870.
80 Christophe Charle, « La bourgeoisie de robe », op. cit., p. 55.
81 On pense notamment aux séances solennelles de rentrée (voir la contribution de Mathieu Peter dans ce volume) et au port du costume, Yves Mausen, « Le rouge assigné au costume des cours de justice, réglementation du costume des professeurs des Facultés de droit et restauration universitaire », in Martial Mathieu (éd.), De l’école de droit à la Faculté de droit de Grenoble, op. cit., p. 85-94.
82 Pour le cas de Toulouse, Jacques Poumarede, « Le Barreau et l’Université », in Histoire des Avocats et du Barreau de Toulouse, in Jean-Louis Gazzaniga (dir.), Privat Toulouse, 1992, p. 163-180. Voir les remarques de Nader Hakim, L’autorité de la doctrine civiliste française au XIXe siècle, Paris, LGDJ, 2002, p. 200-226.
83 Cf. le cas de l’Académie de législation de Toulouse étudié par Pierre-Louis Boyer dans ce volume.
84 Sur l’engagement politique des professeurs de droit, le travail essentiel est celui de Marc Milet, Les professeurs de droit citoyens. Entre ordre juridique et espace public. Contribution à l’étude des interactions entre les débats et les engagements des juristes français (1914-1995), thèse pour le doctorat de science politique, Université Paris II, 2000 ; Carlos M. Herrera (dir.), Les juristes face au politique. Le droit, la gauche, la doctrine sous la IIIe République, Paris, Kimé, 2003. Pour Bordeaux, on consultera les contributions réunies dans Nader Hakim, Marc Malherbe (dir.), op. cit. Pour Grenoble, l’exemple de Taulier : R. Avezou, « Frédéric Taulier, maire de Grenoble (1845-1848 ; 1849-1851) », in La Révolution de 1848 dans le département de l’Isère, Grenoble 1949, p. 457-478. Pour Poitiers, voir, dans ce volume, la contribution de Jean-Marie Augustin.
85 Sur les Facultés de sciences et des lettres, Mary Jo Nye, Science in the Provinces. Scientific Communities and Provincial Leadership in France, 1860-1930, Berkeley-Los Angeles-Londres, University of Carlifornia, 1986 ; Robert Locqueneux, « Henri Bouasse et la défense des Facultés de province au début du XXe siècle », in Transmission et diffusion des savoirs dans le Sud de la France, Paris, Editions du CTHS, 2007, p. 88-98.
86 Voir la synthèse de Christian Chene, « Enseignement du droit », in Denis Alland, Stéphane Rials (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, Paris, PUF, p. 617-625.
87 Les travaux de sociologie des professions, très développés dans le monde anglo-saxon, s’avèrent ici très utiles pour les historiens du droit. Voir la synthèse de Claude Dubar, Pierre Tripier, Sociologie des professions, Paris, Armand Colin, 2e édition, 1998. Pour les professions juridiques, deux exemples : Lucien Karpik, Les avocats. Entre l’État, le public et le marché. XIXe- XXe, Paris, Gallimard, 1995 ; D. Rueschemeyer, « Doctors ans Lawyers : a Comment on the Theory of the Professions », Canadian Review of Sociology and Anthropology, 1, 1965, p. 17- 3.
88 En 1867, la dotation unitaire des Facultés de droit est six fois inférieure en province par rapport à Paris : Victor Karady, « Les origines et la naissance de l’Université moderne », op. cit., p. 298.
89 Jusqu’en 1876, la rémunération des professeurs consiste en un traitement fixe et un traitement variable qui dépend des étudiants inscrits et de leur réussite. Une nette différence s’établit ainsi entre les professeurs et les suppléants mais aussi entre les petites Facultés et les grandes (en réalité, Paris et Toulouse). Mais, cette inégalité en faveur de la Capitale perdure bien après l’affirmation d’un seul traitement fixe. Cf. Mathieu Touzeil-divina, Éléments d’histoire du droit public, op. cit.
90 Sur l’enseignement du droit au XIXe siècle, Mathieu Touzeil-Divina, Éléments d’histoire du droit public, op. cit., p. 108-171 ; Jean-Jacques Bienvenu, « Politique et techniques de l’encadrement rapproché de l’étudiant », Annales d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, n° 2, 1985, p. 143-159 ; Christian Atias, « La controverse et l’enseignement du droit », Annales de la Faculté de droit et de la science juridique, n° 2, 1985, p. 107-123.
91 Sur de droit romain, voir les contributions de David Deroussin et Marc Malherbe dans ce volume. Jean-Louis Mestre a consacré plusieurs études aux premiers cours de droit constitutionnel.
92 Céline Pauthier, « L’enseignement de droit civil du professeur Frantz (1760- 1818) : le cadre impérial et la pratique universitaire », in Annales de la Faculté de droit de Strasbourg, n° 9, 2008, p. 33-55 ; Jean-Louis Halperin, « L’enseignement du droit civil dans les années 1880 à travers les notes de Louis Stouff », Mémoires de la Société pour l’histoire du droit et des institutions des anciens pays bourguignons, comtois et romands, vol. 57, 2000, p. 197-208 ; Jean-Louis Mestre, « Le droit constitutionnel selon Édouard Jourdan en 1886-1887 », Hommage à Romuald Szramkiewicz, Litec, 1998, p. 323-334. Voir également Henri Vidal, « Alfred Pierron et l’enseignement du droit romain à Montpellier de 1881 à 1895 », Mélanges Roger Aubenas. Recueil de Mémoires et Travaux publiés par la Société d’Histoire des anciens Pays de Droit écrit, Montpellier, 1974, p. 749-759.
93 Voir, dans la contribution publiée ici de Ludovic Azema, les extraits des délibérations de la Faculté de Toulouse, qui expriment très exactement cette préoccupation.
94 Pour la création des chaires de droit administratif, Mathieu Touzeil-Divina, Éléments d’histoire du droit public, op. cit., p. 471-555. Voir également, Pierre Bodineau, « L’impossible reconnaissance de la science administrative dans les Facultés de droit au XIXe siècle », SHDB, fasc. 48, 1991, p. 201-217.
95 Madeleine Ventre-Denis, « La difficile naissance, à la Faculté de Paris, de la première chaire autonome de droit criminel (1804-1846) », Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, 1991, n° 12, p. 151-183.
96 Madeleine Ventre-Denis, Les sciences sociales et la Faculté de droit de Paris sous la Restauration. Un texte précurseur : l’ordonnance du 24 mars 1819, Paris, Aux amateurs de livres, 1985 ; Madeleine Ventre-Denis, « La première chaire d’histoire du droit à la Faculté de droit de Paris (1819-1822) », Revue historique du droit français et étranger, LIII, 1975, p. 596-622 ; Madeleine Ventre-Denis, « Sciences sociales et Université au XIXe siècle : une tentative d’introduction de l’économie à Paris sous la Restauration », Revue historique, CCLCVI, 1976, p. 321- 342.
97 Sur l’opposition de la Faculté de Grenoble à l’introduction du cours de droit administratif en 1837, Floriane Juge, « Le développement de l’enseignement du droit public à la Faculté de droit de Grenoble au XIXe siècle », in Martial Mathieu (dir.), De l’école de droit à la Faculté de droit, op. cit., p. 141-152.
98 Sur le cas de l’histoire du droit dans les Facultés de province : Philipe Nelidoff, « Les premiers historiens du droit toulousains (1850-1904) », in Jacques Poumarede (éd.), Histoire de l’histoire du droit, Presses de l’Université des sciences sociales de Toulouse, Toulouse, 2006, p. 145-161 ; Marc Malherbe, « L’histoire du droit à la Faculté de Bordeaux au XIXe siècle », in Jacques Poumarede (éd.), Ibid., p. 163-192 ; Ahmed Slimani, « Pierre-Jules Minier, un promoteur méconnu de l’histoire du droit en France au milieu du XIXe siècle », in V. Gazeau, J.-M. Augustin (dir.), Coutumes, doctrine et droit savant, Paris, LGDJ, 207, p. 279-306 ; Ahmed Slimani, « Les débuts de l’histoire juridique moderne à la Faculté de droit d’Aix (1879-1918) », Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, à paraître.
99 On rappellera que, pour pallier l’absence d’un enseignement pratique à destination des professions judiciaires et commerciales, des juristes (souvent avocats mais également professeurs de droit) organisent au XIXe siècle des « cours publics », soumis à autorisation, de notariat, de droit commercial ou autre. Entre 1810 et 1872, on a pu recenser, dans toute la France, 251 demandes d’autorisation pour ouvrir un cours public en droit : http://www.inrp.fr/she/cours_magistral/table3/index.htm. Il conviendrait également d’enquêter sur la cohorte des « répétiteurs », ces professeurs privés qui aident les étudiants à préparer leur examen, et autres « conférences juridiques ».
100 Voir dans ce volume les contributions de Nelly HIssung-Convert, Ludovic Azema et de Jacqueline Begliutti.
101 Patricia Mathieu, « L’histoire du droit à la Faculté de droit de Grenoble », in Martial Mathieu (dir.), De l’école de droit à la Faculté de droit, op. cit., p. 153- 161. La Faculté de Strasbourg a connu un grand nombre de cours libres (ou cours « libres », cours « volontaires », cours « gratuits », …) préfigurant l’introduction officielle d’un cours. Voir la contribution de Céline Pauthier dans ce volume.
102 Georges Weisz, op. cit. Du même auteur, « Le corps professoral de l’enseignement supérieur et l’idéologie de la réforme universitaire en France, 1860- 1885 », Revue française de sociologie, XVIII, 1977, p. 201-232.
103 Lucette Le Van Lemesle, op. cit., p. 283-285.
104 Sur l’introduction du droit constitutionnel au sein des Facultés de droit, voir l’analyse très précise de Guillaume Sacriste, Le droit de la République (1870- 1914). Légitimation(s) de l’État et construction du rôle de professeur de droit constitutionnel au début de la Troisième république, thèse pour le doctorat en science politique, Université Paris I Panthéon-Sorbonne, 2002, p. 31-126.
105 Farid Lekeal, « Les origines de l’enseignement de la législation industrielle : enjeux et qualification d’un nouveau champ d’études », Cahiers de l’Institut régional du travail, Aix en-Provence, n° 9, avril 2001, p. 30 et s.
106 Bruno Dumons et Gilles Pollet, « Universitaires et construction de l’État providence : la formation économique et juridique des élites françaises (1890- 1914) », Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, 1990, n° 20, p. 179-195.
107 Pierre Favre, Naissances de la science politique en France (1870-1914), Fayard, 1989, p. 21-50 et Dominique Dammame, Histoire des sciences morales et politiques et de leur enseignement des Lumières au scientisme, Thèse, Paris I, 1982.
108 Henri Hauser, L’enseignement des sciences sociales. État actuel de cet enseignement dans les divers pays du monde, Paris, 1903, p. 144.
109 Pierre-Henri Prelot, Naissance de l’enseignement supérieur libre : la loi du 12 juillet 1875, Paris, 1987 ; Gersende Le Jariel, Lucien Brun ou le légitimisme absolu (1822-1898), thèse pour le doctorat en histoire, Lyon III, 2001 (pour la Faculté libre de droit de Lyon) ; Jean-Claude Matthys, « Les débuts de la Faculté catholique de droit à Lille (1874-1894) », Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, 1987, tome 5, p. 73-99 ; Jean-Claude Matthys, « L’École des sciences sociales et politiques de la Faculté catholique de droit de Lille (1894- 1925) », Revue d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, n° 10-11, 1990, p. 99-129.
110 Sur ce milieu des juristes catholiques : Frédéric Audren, « La Belle époque des juristes catholiques (1870-1914) », Revue française d’histoire des idées politiques, n° 28 (Juristes catholiques, 1880-1940), 2008, p. 233-271
111 Paul Ourliac, « L’étudiant de province », Revue de l’enseignement supérieur, 1958, n° 3, p. 43-46 ainsi que l’étude essentielle de John Burney, op. cit., sur Toulouse. Voir dans ce volume la contribution d’Ahmed Slimani. Deux modèles à suivre pour l’histoire contemporaine : Dominique Julia, Jacques Revel, Les Universités européennes du XVIe au XVIIIe siècle. Tome 2. Histoire sociale des populations étudiantes, Paris, Editions de l’EHESS, 1989 ; Hartmunt Titze, Der Akademiker-Zyklus, Goettingen, Vandenhoeck et Ruprecht, 1990.
112 Voir, sur cette question, les études de Caroline Barrera, Etudiants d’ailleurs. Histoire des étudiants étrangers, coloniaux et français de l’étranger de la Faculté de droit de Toulouse (XIXe siècle-1944), Toulouse, Presses de Centre universitaire Champollion, 2007 ainsi que sa contribution dans ce volume.
113 Sur le doctorat : Jean Imbert, « Passé, présent et avenir du doctorat en Droit en France », Annales d’histoire des Facultés de droit et de la science juridique, 1984, p. 11-33 ; Marjorie Berruex, « Du doctorat au thésard. Étude sur la place de la thèse de doctorat à la Faculté de droit de Grenoble au XIXe siècle », », in Martial Mathieu (éd.), De l’école de droit à la Faculté de droit de Grenoble (1806-2006), op. cit., p. 97-108. Dans une perspective d’histoire sociale, Sylvain Gauche, « Les aspirants au doctorat de la Faculté de droit de Grenoble au XIXe siècle », Ibid., p. 109-119 et François Barloy, Les thèses soutenues devant la Faculté de droit de Montpellier, de 1880 à 1960, Mémoire de DEA d’histoire du droit, Montpellier, 1989. Dans la base des candidatures à l’agrégation de droit, Patricia Ducret mentionne systématiquement à partir de 1874 et jusqu’en 1912 (sauf 1878 et 1879) le lieu du doctorat de candidat : http://www.inrp.fr/she/agregdroit/.
114 Henri Hauser, op. cit., p. 145 indique qu’à Paris, la moyenne annuelle des docteurs est passée de 68 à 143. Ernest Glasson, « La crise des Facultés de droit », Revue internationale de l’enseignement, tome 43, 1902, p. 385 signale le « nombre moyen des étudiants en doctorat de 1878 à 1890 : 190 ; de 1890 à 1901 : 352 ».
115 Sur la doctrine, voir les ouvrages de Nader Hakim, L’autorité de la doctrine civiliste. op. cit. et de Philippe Jestaz, Christophe Jamin, La doctrine, Paris, Dalloz, 2004.
116 Jean-Yves Mollier, « Editer le droit après la Révolution française », Histoire et civilisation du livre - revue internationale, n° 1 (« Production et usages de l’écrit juridique en France du Moyen Âge à nos jours »), Droz, 2005, p. 137-147. Voir également Frédéric Audren, Nader Hakim (dir.), Les revues juridiques au XIXe siècle, Paris, La mémoire du droit, à paraître ; Patrick Canto, La Revue de législation et de jurisprudence (1835-1853), thèse droit, Université de Lyon III, 1999.
117 Voir la contribution de Marielle Mouranche dans ce volume.
118 Néanmoins, le particularisme de Strasbourg se manifeste notamment par la place réservée, en un temps d’exégèse triomphante, à l’École historique allemande, au droit naturel, à la philosophie du droit : Marcel Thomann, « Strasbourg et l’Europe : l’élaboration et la diffusion de doctrine juridique à la faculté de droit de Strasbourg, » Revue d’histoire des facultés de droit, n° 13, 1992, p. 115-125. De même, la faculté de Poitiers, qui possède une chaire de droit administratif depuis 1832, ne cessera plus de rappeler et soutenir « sa tendance traditionnelle vers l’étude du droit public et administratif » : Mathieu Touzeil-Divina, « Éléments historiques : la faculté des juristes Pictaves ». Article consultable en ligne : http://chezfoucart.com/spip.php?article13
119 Olivier Motte, Lettres inédites de juristes français du XIXème siècle conservées dans les archives et bibliothèques allemandes, 2 vol., Bonn, Bouvier-Verlag, 1989- 1990 ; du même, Savigny et la France, Berne, P. Lang, 1983.
120 Jean-Louis Mestre, « Les juristes aixois et la science juridique allemande au XIXe siècle », in La coopération franco-allemande en Europe à l’aube du XXIe siècle, PUAM, 1998, p. 105-123 ; Marc Malherbe, « L’influence germanique dans l’enseignement économique et juridique à Bordeaux (XIXe-XXe siècles), in Alain Ruiz (dir.), Présences de l’Allemagne à Bordeaux, du siècle de Montaigne à la veille de la seconde guerre mondiale, Bordeaux, Presses Universitaires de Bordeaux, 1997, p. 273-28 ; Jean Dauvillier, « Le rôle de la Faculté de droit de Toulouse dans la rénovation des études juridiques et historiques aux XIXe et XXe siècles », Annales de l’Université des Sciences sociales de Toulouse, 1976, p. 343- 384.
121 Pour les débats autour de la propriété : Mikhaïl Xifaras, La propriété. Etude de philosophie du droit, Paris, PUF, 2004 et, plus récemment, Julien George, Les passions politiques de la doctrine juridique. Le droit de propriété aux XIXe et XXe siècles, thèse droit, Université de Toulouse I, 2008.
122 Voir, dans ce volume, la contribution de Mathieu Touzeil-Divina qui souligne l’ambiance libérale entourant les travaux de la Faculté de Poitiers.
123 Yann-Arzel Durelle-Marc, « La Revue bretonne de droit et de jurisprudence de F. Laferrière et l’école historique française du droit », in Jacques Poumarede (éd.), Histoire de l’histoire du droit, op. cit., p. 373-387.
124 Sur l’introduction du droit constitutionnel, voir Guillaume Sacriste, op. cit. Sur le droit social, les remarques de Christophe Jamin et Pierre-Yves Verkindt, « Droit civil et droit social : l’invention d’un style néoclassique chez les juristes français au début du XXe siècle », Nicholas Kasirer (dir.), Le droit civil, avant tout un style ?, Paris, Éditions Thémis, 2003, p. 103-120.
125 Voir les contributions de Nader Hakim et Farid Lekeal, in David Deroussin (éd.), op. cit., p. 123-171 ; Nader Hakim, « Les premiers traités de législation industrielle et la jurisprudence : les ressources d’une influence doctrinale au Palais », in Jean-Pierre Le Crom, Les acteurs de l’histoire du droit du travail, Rennes, PU Rennes, 2004, p. 29-39.
126 Voir, dans ce volume, l’analyse proposée par Hervé Le Roy.
127 Sur l’invention d’une « École de Poitiers » par Maurice Hauriou dès 1892, voir la contribution de Mathieu Touzeil-Divina dans ce volume. Sur les écoles doctrinales, les travaux de Fabrice Melleray, « École de Bordeaux, école du service public et école duguiste. Propositions de distinction », Revue du droit public, n° 6, 2001, p. 1887-1905 ; « L’école de Strasbourg : mythe ou réalité ? », in Mélanges Pierre Pactet, Dalloz, 2003, p. 319-338 ; « Remarques sur l’école de Toulouse », in Etudes en l’honneur du professeur Jean-Arnaud Mazères, Paris, Litec, 2009, p. 533-553. Voir également Jérôme Ferrand, « Contorsions logiques et poids des mots : l’interprétation de l’article 1382 du code civil par les professeurs et jurisconsultes grenoblois dans le premier XIXe siècle », in Martial Mathieu (éd.), De l’école de droit à la faculté de droit de Grenoble, op. cit., p. 123-140) qui constate l’inexistence d’une « école grenobloise de la responsabilité civile dans le premier XIXe siècle ».
128 Sur ces communautés de pratiques et de cultures, je me permets de renvoyer à deux articles : Frédéric Audren, « « La Belle époque des juristes catholiques », op. cit. et « Comment la science sociale vient aux juristes ? Les professeurs de droit lyonnais et les traditions de la science sociale (1875-1935) », in David Deroussin (éd.), Le renouvellement des sciences sociales et juridiques, op. cit., p. 3-50.
129 Christophe Charle, « Régions et consciences régionale en France », Actes de la Recherche en Sciences Sociales, 1980, volume 35, n° 1, p. 37-43 ; Jean-François Chanet, L’École républicaine et les petites patries, Aubier, 1996. Pour un cas particulier, Catherine Bertho, « L’invention de la Bretagne », Actes de la Recherche en Sciences Sociales, 1980, volume 35, n° 1, p. 45-62.
130 Voir sur ce point, la démonstration très convaincante de Guillaume Sacriste Le droit de la République (1870-1914), op. cit.
Auteur
Chargé de recherche au CNRS - Maison française d’Oxford
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