Le bon régime
p. 79-80
Texte intégral
1Habitude d’école que celle de disserter sur les mérites comparés de l’aristocratie, de la démocratie et de la monarchie ? Malgré la découverte de la Politique d’Aristote, celle-ci avait été oubliée ou délaissée par les auteurs médiévaux1. Pour l’auteur d’une œuvre destinée à brosser un portrait du politique à l’attention de « gouverneurs » peu au fait de questions théoriques, le thème constituait cependant un passage obligé. C’est au tout début du Miroir Politicque que La Perrière s’y frotte, immédiatement après avoir défini la société. Désireux de donner une vision d’ensemble de la discussion par « occulaire demonstration », l’emblématiste a imaginé un « Arbre de la bonne & droicte Republicque, & consequemment de la depravée »2. Il en éclaire l’esprit en puisant une nouvelle fois chez Aristote :
La bonne, & droicte republicque est celle, en laquelle les gouverneurs tendent à l’utilité publicque de la cité, & au bien de toute la civile societé. Elle est appelée droicte & juste, d’autant quelle se determine à telle fin, & la cherche : à laquelle & pour laquelle toute republicque est instituée, c’est pour consulter à l’utilité & salut d’icelle, tant qu’elle est conforme à rectitude & justice. La republicque depravée (sans la descrire autrement) est celle, qui repugne & est diametralement contraire à la bonne & juste, & mesmement aux fins, c’est que (au contraire de la bonne) elle tasche d’augmenter injustement son bien particulier, n’ayant aucun soin du public3.
2Cette mise au point constitue pour lui un préambule nécessaire, un préambule exprimant à nouveau sa volonté de subordonner la société politique à la poursuite du bien commun et au respect d’une ligne éthique basée sur l’honnêteté. Exact contraire de la bonne république, la république dépravée est dès lors identifiée comme privilégiant le bien privé sur le public au mépris de la rectitude et de la justice4. Bien que la forme de son gouvernement, en définitive, ne soit pas déterminante, La Perrière n’en oublie pas d’expliquer le fonctionnement de chacune des constitutions évoquées dans l’Arbre, successivement décrites et analysées. Il le fait assez succinctement. Ce sont les bases du politique que ses lecteurs doivent trouver dans le Miroir Politicque, non une réflexion théorique sur sa structure ontologique. L’auteur d’ailleurs ne se laisse guère emporter par ses commentaires, qui paraît douter de la perfection et de la stabilité de ces Républiques simples (chapitre I). Quelques digressions en effet le révèlent : c’est dans un autre modèle qu’il trouve l’assurance de la stabilité, celui de la constitution mixte (chapitre II).
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