Introduction générale
p. 11-53
Texte intégral
1Dans le royaume de France, au xvie siècle, tandis que la construction de l’État se poursuit1, la redécouverte éblouie de l’Antiquité, les progrès des sciences et l’invention de l’imprimerie bouleversent les cadres mentaux de la pensée. Faisant de l’homme le fondement et la fin de tout, l’humanisme tend à substituer la Raison à la Révélation comme principe de la connaissance2 ; il incite à mettre le savoir à la portée du plus grand nombre car, comme l’aurait dit Rabelais, « un livre vraiment humain doit s’adresser à tous. Les temps sont venus où la philosophie doit sortir de l’école et rayonner comme le soleil sur l’univers entier »3. Par l’étude des textes et des civilisations antiques, l’humanisme redécouvre l’éthique née dans les cités grecques. D’une certaine manière, il lui appartient de « réinventer la politique »4.
2De fait, le xvie siècle marque « l’essor de la philosophie politique »5. Lorsqu’il commence, « rien n’est joué, en matière idéologique »6. Mais un contexte national et international particulièrement tendu se charge de pousser loin les débats. Il appartient à de houleuses controverses, qui débordent parfois le cadre de la pensée pour s’incarner en de sanglantes tragédies, de penser la spécificité du politique, sa séparation d’avec la morale, le « machiavélisme » comme la « gouvernementalité » ; tandis que les théories de l’absolutisme se précisent, la doctrine du droit divin des rois s’affirme, les droits régaliens comme la souveraineté sont pensés avec autant de fougue que de clarté. Juridiquement et politiquement, la monarchie s’arme pour affronter les persistantes revendications des corps constitués, qui prétendent détenir une part de souveraineté, et les contestations virulentes qui, dans l’ombre de la Réforme protestante, entendent remettre en cause la légitimité du prince sinon défendre un véritable droit de révolte débouchant sur le tyrannicide.
3Naturellement, les historiens des idées politiques comme certains historiens du droit et des institutions se sont de longue date penchés avec attention sur ces problématiques comme sur les « grands » auteurs de cette période. Ceux dont les contributions à la théorie et à la philosophie politique sont jugées les plus fondamentales, ceux dont les œuvres constituent, par leur originalité ou leur profondeur, un temps fort de l’évolution de la pensée ou des concepts ont fait l’objet de nombreuses études. Au-delà des frontières, dominent les figures de Machiavel et de More, celles des Réformateurs, des auteurs de la seconde scolastique comme celles des précurseurs de l’École du droit naturel ; dans le royaume de France Bodin, considéré comme le premier et le plus lumineux des penseurs politiques du xvie siècle, mais aussi Seyssel, La Boétie, Montaigne, les monarchomaques, Hotman, Bèze, Du Plessis-Mornay, et les auteurs de la Ligue. Comme la pensée de ces auteurs se trouve aujourd’hui assez bien balisée, les grandes charnières, les grandes évolutions de la théorie politique paraissent clairement identifiées.
4Pour autant, force est de le constater, pour appréhender au fond les idées de ce siècle politique s’il en est, beaucoup reste à faire. La chose est évidente. L’histoire des idées politiques ne saurait se limiter à l’histoire des grands penseurs ou considérés comme tels. Une histoire « aristocratique » de la pensée, faite « par les sommets », ne saurait résumer à elle seule les idées politiques. Qui sait d’ailleurs si certains grands auteurs ne sont pas considérés comme tels pour des raisons qui tiennent davantage à quelque raison circonstancielle, et notamment à l’accessibilité de leurs œuvres, qu’au contenu substantiel de celles-ci ? Comment expliquer sinon que les contributions d’un Budé et d’un Cujas, dont l’influence fut au xvie siècle considérable, demeurent aujourd’hui dans l’ombre ?7 À tout le moins convient-il, pour apprécier les idées politiques d’une période, de déterminer la portée des œuvres que l’on étudie, de chercher à savoir quelle influence celles-ci ont pu avoir sur leur temps, dans quelle mesure les idées qu’elles véhiculent s’inscrivent dans la réalité de leur époque et sont représentatives des opinions contemporaines. Il est donc tout à fait fondamental d’étudier non seulement les traités politiques ou juridiques produits par les plus fins penseurs mais aussi ceux qui furent composés par des auteurs jugés mineurs, et même, bien sûr, les idées exprimées ailleurs, hors du cadre juridique ou politique8. De même que la pensée juridique n’est pas l’apanage des seuls juristes, la pensée politique appartient à tous9.
5 Aller voir du côté des minores, chercher les témoignages de l’appréhension du politique chez les auteurs « littéraires » ou les anonymes, mettre en perspective les idées par l’appréciation du cadre politique, institutionnel ou humain dans lequel elles se sont développées, les historiens y songent depuis bien longtemps. Aux xviiie et xixe siècles, à une philosophie de l’histoire convaincue de la suprématie de la raison et des idées sur l’expérience, s’oppose déjà une approche de l’histoire des idées soucieuse de démontrer l’influence des structures sociales et économiques sur le développement de la pensée10. C’est sans trop tarder que l’« histoire des doctrines »11 naissante se trouve rattrapée par une histoire des idées politiques entendue non plus comme l’histoire des systèmes politiques élaborés par quelques penseurs, mais comme une histoire des idées replacées dans leur contexte12. Contre les « Idoles » défendues par l’« histoire historisante » du xixe siècle, le xxe siècle part en campagne13 ; l’École des Annales propose un large renouvellement des sources14. Lorsque, après la Seconde Guerre mondiale, le cours d’histoire des idées politiques fait son entrée à l’Institut d’Études Politiques, Jean-Jacques Chevallier s’attache encore aux « grandes œuvres », entendues comme celles qui « ont marqué profondément l’esprit des contemporains ou celui des générations ultérieures », celles qui, soit au moment même de leur publication, soit plus tard, et en quelque sorte rétrospectivement, ont « fait date » ou ont bénéficié, « immédiatement ou à terme, de ce qu’on pourrait appeler la résonance historique ou la chance historique »15. Mais quelques années après, alors même que le cours d’histoire des idées politiques a été intégré dans le programme de la licence en droit et s’apprête à être porté à deux semestres, Jean Touchard lui confère d’autres desseins : sans pour autant décrier le travail consistant à « isoler quelques doctrines et les étudier sub specie aeternitatis », il cherche à inscrire l’histoire des idées politiques dans celle des institutions, sociétés, faits et doctrines économiques, dans celle de la philosophie, des religions et des littératures ou même des techniques ; il s’efforce de mettre en avant les penseurs qui, pour n’être pas des penseurs politiques, pouvaient contribuer à éclairer l’état d’une société lorsque leurs idées ont eu une importante diffusion16. Dans les années 1960, l’influence de l’anthropologie, celle du marxisme poussent plus encore les historiens à reconnaître la nécessité d’inscrire les œuvres dans le cadre de l’infrastructure économique ou dans celui de la superstructure idéologique17. 1968 le répète : « tout est politique ». Un temps délaissée, l’histoire politique revient en force, et l’histoire des idées nourrit des perspectives plus larges que jamais18. L’histoire nouvelle multiplie les objets historiques, portant l’attention sur les mentalités19, l’opinion publique20, l’idéologie21, les cérémoniaux politiques22, la culture juridique et politique23. « Que vaudrait une histoire des idées politiques qui restreindrait son champ d’observation aux écrits exclusivement politiques ? » interrogeait en 1985 Jacques Krynen24.
6En dépit de la constance de ce motif historiographique, la place réservée aux grands auteurs dans l’histoire des idées politiques demeure cependant pour certaines périodes de notre histoire tout à fait prépondérante. Ainsi en est-il pour le xvie siècle : à lire certains ouvrages, il semble en effet que la philosophie politique française de la Renaissance se résume à Bodin25 ; il paraît parfois qu’en dehors de ce dernier, de Seyssel, de La Boétie, des monarchomaques et des auteurs de la Ligue, il n’y ait pas eu de penseurs politiques dignes de ce nom au xvie siècle26. Tout à fait compréhensibles pour des raisons didactiques, dans le cadre de manuels universitaires qui assument d’ailleurs parfaitement la nécessité d’une présentation synthétique des idées27, tout en regrettant parfois que la trop grande densité des œuvres produites à l’époque moderne impose d’aller vers les grands auteurs28, de telles perspectives ne sauraient circonscrire la recherche29.
7Il semble dès lors fondamental non seulement de compléter l’étude des auteurs les plus connus par quelques travaux qui demeurent en déshérence30, mais aussi de s’attaquer à l’étude des autres penseurs. En particulier à celle des juristes31. Les juristes, en effet, sont à la Renaissance sur tous les fronts. En charge de la plupart des responsabilités politiques, ils viennent massivement grossir les rangs des officiers royaux ; sans pour autant négliger les responsabilités provinciales et municipales. Ayant fait le voyage d’Italie ou formés au mos gallicus juris docendi32, ils sont dotés d’une solide culture ; possesseurs de riches bibliothèques, ils vivent, souvent, entourés de lettrés à l’égard desquels certains font figure de mécènes. S’intéressant à la poésie comme à l’architecture, ce sont eux qui composent la plupart des œuvres produites par la Renaissance, faisant progresser aussi bien la philologie et l’histoire que la science juridique33. Et, magistrats moyens, auxiliaires de justice ou lettrés retirés dans la solitude de leurs cabinets, ils sont « saisis par le politique »34.
8Bien sûr, certains de ces juristes sont régulièrement sollicités dans le cadre de synthèses transversales. Leur contribution aux théories de l’absolutisme35, à l’idée de race ou de noblesse36, au concept de constitution37 ou au modèle familial38 a ainsi été abordée. L’ensemble de leur œuvre ne l’est que plus rarement dans le cadre de monographies qui seules permettent de dégager leur vision globale du politique et du juridique en évitant les écueils liés à des lectures trop rapides ou orientées. L’histoire de la pensée politique de la Renaissance s’est toutefois enrichie de belles monographies consacrées à quelques juristes considérés comme importants ou jugés notables. À l’instar du travail autrefois conduit par Paul Ourliac sur Étienne Bertrand39, divers ouvrages consacrés à André Tiraqueau40, Pierre Grégoire de Toulouse41 et Bernard d’Argentré ont frayé la voie42. Récemment, d’importantes études se sont attelées à ces « fossiles » qui, tel Barthélemy de Chasseneuz, n’étaient peut-être pas à « l’avant-garde de la pensée » mais furent des « juristes-mesure », témoins privilégiés de l’évolution des idées dont les œuvres firent longtemps autorité43. Grâce à l’étude approfondie de « ces gros volumes d’abord difficile, que les jugements négatifs des historiens, ne voulant sans doute pas avouer qu’ils n’y comprenaient à peu près rien, ont contribué à faire négliger »44, on connaît bien, désormais, l’apport d’un Charles Loyseau45, d’un Charles Du Moulin46 ou d’un Guillaume Benoît47 aux idées politiques. On connaît mieux, aussi, le discours sur la loi véhiculé par les chanceliers Antoine Duprat, Guillaume Poyet et Michel de L’Hospital48, et l’apport d’un Guy Coquille au droit commun coutumier49. On est aussi en mesure d’espérer beaucoup d’un courageux travail en cours sur Cujas50 sinon que quelqu’un se penche enfin avec toute l’attention qu’elle mérite sur l’œuvre de Guillaume Budé51. Encore sont-ils nombreux ceux qui restent dans l’ombre, notamment parmi les officiers moyens, les maîtres secondaires, et surtout, ces juristes dont on a coutume de dire qu’ils ont eu le bon ou le mauvais goût de délaisser le droit, et la technique, pour s’orienter vers des méditations plus philosophiques, morales ou littéraires. Car identifier les juristes à de purs techniciens du droit paraît tout aussi réducteur que limiter le droit à la procédure. Et négliger la contribution philosophique, morale ou littéraire des juristes serait amputer leur identité d’éléments qui lui sont inhérents, et qui demeurent essentiels à l’exercice même de leurs missions. Cela est particulièrement vrai pour la Renaissance. Sous l’influence de l’humanisme, les juristes se proposent en effet un nouvel idéal : établir la science du droit comme un élément de la culture universelle, nouer entre elle et les autres disciplines de l’esprit, la théologie, la philosophie, le politique, l’histoire, la philologie, des liens étroits et indissolubles. L’objet de la jurisprudence est alors non seulement de maîtriser la technique juridique mais aussi de rapporter les lois à leur véritable fin, à toute la vie sociale des hommes, à la satisfaction de l’ensemble de leurs besoins légitimes ; la jurisprudence apparaît alors « comme la reine des sciences, la science de l’homme » ; le jurisconsulte, « bien plus qu’un simple expert en droit : l’autorité par excellence en matière d’organisation de la société »52. L’érudition exigée pour répondre aux nouveaux critères de la science du droit exige des plus savants qu’ils se consacrent à plein temps à leurs recherches. À l’instar d’un Budé désireux de mener à terme ses Annotationes et son De Asse, certains délaissent à cette fin charges officielles, officines et prétoires53. Le mode de vie des humanistes va dans le sens d’une scission entre l’appréhension intellectuelle du droit et sa pratique ; avec l’essor du mos gallicus, après 1540, une certaine distance s’opère entre quelques-uns des plus grands juristes du temps et le monde de la pratique54. Le goût des belles-lettres et de la poésie, qui est pour certains un exutoire aux difficultés et aux troubles du siècle, vient nourrir leurs méditations. Tout entiers baignés de la culture juridico-politique de leur auteur, les Emblema d’Alciat participent ainsi de l’éducation politique et juridique de leurs lecteurs55. Et parfois, lorsque ce goût des belles-lettres vient supplanter définitivement celui du juridique, les juristes se muent en historiens, en philologues, en moralistes ou en philosophes.
9À défaut d’élargir ainsi son champ d’investigation, l’histoire des idées, il faut le reconnaître, prend le risque de conserver une vision étroite des choses et de s’arc-bouter sur un certain nombre d’idées reçues. Il se pourrait que quelques-unes des grandes synthèses qui la fondent se révèlent être bâties sur de bien fragiles fondements, et qu’elle passe à côté de quelques caractéristiques importantes de ce dont elle prétend cependant rendre compte. En témoignent s’il en faut l’historiographie de l’absolutisme, l’historiographie relative à la fameuse « École de Toulouse » et à Guillaume de La Perrière (I), emblématiste et politique du premier seizième siècle (II).
I. Guillaume de La Perrière et l’École de Toulouse
10En 1886, Gabriel Hanotaux posait la question de la nature de l’autorité royale à l’époque de François Ier. Tout en admettant que d’aucuns eussent alors préféré un régime monarchique tempéré faisant obstacle à l’arbitraire, il estimait les Français tout disposés à suivre l’impulsion d’un « grand parti autocratique » parvenu au sommet de l’État, un parti « passionnément centralisateur et autoritaire », lequel, écrivait-il, « paraît avoir trouvé son centre dans le Midi de la France et notamment au parlement et à l’université de Toulouse, qui passaient alors pour l’école des plus grands magistrats et des premiers hommes d’État ». Hanotaux voyait dans les œuvres de Jean Ferrault et de Charles de Grassaille l’exposition doctorale d’une doctrine enseignée à l’Université et appliquée au Parlement, toute dévouée à la grandeur et à l’excellence du roi de France et des privilèges du roi très-chrétien, à l’essor du pouvoir royal et à son rayonnement hors des frontières. Il en résumait d’une phrase la teneur : « L’esprit politique que ces publications révèlent est celui du pur despotisme »56. Et l’historien de considérer en outre que cette école de pensée avait perduré. Au début du xviie siècle encore, écrivait-il,
la vraie reine du Midi, c’était Toulouse. […] Des hauteurs de l’Auvergne, du Velay, du Quercy, de la Guyenne, de la Navarre, de l’Espagne, l’élite de la jeunesse descendait vers son université. Ils recueillaient, sur les lèvres des professeurs, le suc de la tradition romaine et scolastique. Ils s’y séchaient au feu d’une doctrine âpre et autoritaire qui faisait de tous ces Gascons les plus redoutables serviteurs de l’autorité royale. Dès longtemps, on disait de l’université de Toulouse qu’elle était « l’école des plus grands magistrats et des premiers hommes d’État », et le proverbe répétait à son tour :
Paris pour voir,
Lyon pour avoir,
Bordeaux pour dispendre,
Et Toulouse pour apprendre57.
11Cette vision d’une « ardente École de Toulouse » connut, on le sait, une fortune immédiate58. Hanotaux l’avait développée en s’appuyant uniquement sur les œuvres de Ferrault et de Grassaille, mais, rapidement, le nombre des promoteurs toulousains de l’absolutisme commença de grossir. Dès 1899, Edmond Joucla constatait une même passion monarchique et une « conception absolue du pouvoir » chez l’« écrivain toulousain » Guillaume de La Perrière, lequel avait, remarquait-il, blâmé Seyssel d’avoir vu quelque élément aristocratique dans le régime de la France59. Ce fut ensuite chez le chancelier Duprat et Pierre Grégoire de Toulouse que l’on trouva la continuation d’une « tradition autoritaire et exclusivement royale »60. Quand bien même Roger Doucet montrait combien les pratiques politiques de François Ier avaient suscité des résistances et découvrait la vigueur d’un gallicanisme parlementaire lequel, sur le modèle conciliaire, suggérait le rôle politique des corps constitués61, la thèse de Gabriel Hanotaux acquit la certitude d’un dogme62. On en trouvait désormais des traces chez les « légistes », mais aussi au-delà des milieux juridiques, et c’est ainsi qu’il fallait comprendre, suivant J.W. Allen, l’œuvre du « juriste-poète » La Perrière63.
12Au demeurant, les œuvres produites par les membres de l’« École de Toulouse » ne suscitaient guère la curiosité des spécialistes de la Renaissance toulousaine. Les perspectives dégagées par Roger Doucet n’ayant pas été approfondies, ses mises en garde ne furent pas relevées. Les études consacrées à l’humanisme méridional, centrées sur ses grandes figures, Jean de Boyssoné, Étienne Dolet, Jean de Pins, s’attachaient principalement à découvrir leurs parcours biographiques et leurs préoccupations littéraires64. Parvenant mal à identifier la place qu’avait pu avoir La Perrière auprès de leurs héros, elles se préoccupèrent peu de « l’annaliste », que Jacoubet qualifiait de « façon de poète »65. Faisant peu de cas des enseignements dispensés à l’université de Toulouse, elles stigmatisaient la « barbarie » d’une ville où Jean de Boyssoné, soupçonné d’hérésie, avait eu à subir une cérémonie d’abjuration publique, et où Étienne Dolet avait eu maille à partir avec les autorités municipales et parlementaires. Elles regardaient donc Toulouse comme un refuge de l’incivilité, une ville opposée à l’humanisme, et même, par certains côtés, hostile au roi66. Dans les ouvrages consacrés aux théories politiques, l’existence d’une « École de Toulouse » n’en continuait pas moins de faire son chemin. En 1941, William Farr Church affirmait que la pensée politique française avait connu, sous le règne de François Ier, une remarquable homogénéité. Tout en étudiant les œuvres composées par Grassaille, Chasseneuz, Rebuffi et Tiraqueau, il présumait le rôle joué dans l’extrême glorification du monarque par les principes de droit romain enseignés à l’université de Toulouse67. Signalant à nouveau le soutien que Guillaume de La Perrière aurait manifesté à l’absolutisme français en élevant la voix contre les théories « constitutionnelles », il trouvait dans son œuvre une présentation du corps social plus élaborée que chez Seyssel, et estimait que celle-ci n’avait pas encore reçu toute l’attention qu’elle méritait68. En 1948, Paul Ourliac allait dans ce sens, faisant de ce même La Perrière, de Pierre Grégoire de Toulouse et de Jean Bodin les illustres successeurs de Ferrault et Grassaille69. Grossissant encore le nombre des promoteurs toulousains de l’absolutisme, Pierre Mesnard leur associa bientôt Arnaud Du Ferrier, présenté comme un « continuateur fidèle d’une grande tradition dont Bartole lui-même avait autrefois adopté l’esprit »70.
13Estimant sans doute excessive l’envergure conférée à cette École, André Viala voulut en préciser les contours. Il exigeait désormais des auteurs qu’ils aient appartenu à un réseau local de professeurs et de parlementaires, des œuvres qu’elles aient contenu l’expression d’une pensée politique sinon systématisée, du moins approfondie. Ainsi écartait-il les ouvrages techniques de Jean Corsier, Jean de Belly, Bernard Lauret et Étienne Aufréri mais reconnaissait à ceux de Guillaume Benoît, Nicolas Bertrand et Charles de Grassaille un « tout autre intérêt ». Eux, en effet, partageaient une conception nouvelle des recherches juridiques, un net souci d’élargir les cadres traditionnels de la pensée médiévale, une grande richesse d’informations (puisées dans un très grand nombre de sources juridiques, religieuses, mais aussi littéraires et historiques, dont leurs auteurs avaient perçu l’importance pour l’appréhension globale du droit), enfin, la poursuite d’un objet identique : « prôner l’excellence du royaume de France et de sa forme de gouvernement ». L’École de Toulouse se trouvait ainsi largement réduite. Si, selon Viala, elle avait eu quelque influence sur bien des politiques du XVIe siècle (Almain, Seyssel, Budé, Pasquier, d’Espence et Buzé), elle ne comptait plus qu’une poignée de représentants. Parmi eux, Guillaume de La Perrière, mentionné comme son héritier ou « successeur direct »71.
14Régulièrement mis en avant pour sa contribution estimée à la genèse de l’absolutisme, Guillaume de La Perrière n’était guère sorti de l’ombre où il se trouvait depuis le xviie siècle. Seul Ernest Roschach avait au xixe siècle rencontré le personnage au cours des patientes recherches qu’il conduisait dans le dépôt des archives municipales de Toulouse dont il avait la charge72. Au début du siècle suivant, seul l’abbé Corraze consacra une brève mais fort riche étude à l’une de ses publications et à son statut de prêtre bénéficier73. Puis l’œuvre de ce dernier commença d’intéresser Greta Dexter, spécialiste de l’emblématique74. Parallèlement, l’historiographie relative à l’École de Toulouse suivait son cours. En 1955, il appartint à Jacques Poujol de relever la contradiction résultant de la dédicace du Miroir Politicque aux magistrats municipaux de Toulouse, et de la tonalité absolutiste reconnue à l’œuvre. Lui-même s’accordait à trouver dans celle-ci un témoignage de ce que l’université de Toulouse avait donné vers la fin du xve siècle un enseignement faisant « la synthèse de la suprématie du pape avec l’absolutisme royal »75. La Perrière en effet, relatait-il, prenait la peine de combattre « l’opinion erronée de ceux qui, comme Seyssel, s’imaginent que la ‘‘République des François’’ est un mélange de monarchie, d’aristocratie et de démocratie » ; il était du « clan absolutiste ». Mais Poujol relevait au passage un point qui l’avait étonné : l’embarras de l’auteur, préoccupé, « surtout au début de son œuvre, par le double souci d’exalter le roi de France et de dire beaucoup de bien des institutions toulousaines, aristocratiques dans leur principe ». Le Miroir Politicque, en effet, avait été composé pour les magistrats municipaux76. L’historien concluait que l’auteur avait conscience qu’un vent nouveau, cristallisant certaines oppositions à la royauté, soufflait sous le règne d’Henri II, mais qu’il n’en faisait pas partie77. Il voyait dans son Miroir, « justement parce qu’il n’est pas l’œuvre d’un spécialiste ou d’un initié », un témoignage particulièrement précieux « sur l’intérêt nouveau que portent certains esprits aux questions d’autorité et de régime politique : les Français croient à la monarchie absolue mais acceptent d’en discuter »78.
15Considéré non comme un grand esprit mais comme un esprit représentatif, La Perrière avait de quoi susciter un intérêt accru. Tandis qu’il continuait d’être cité, fort succinctement, comme un représentant de l’« École de Toulouse »79, que certains extraits de son œuvre étaient mis en avant pour illustrer « la supériorité naturelle de la monarchie »80, son Miroir fut mis plus régulièrement à contribution. Dans sa thèse sur l’idée de race en France, Arlette Jouanna lui a accordé une attention fort soutenue. L’ouvrage lui suggère en effet plus de réflexions que ceux d’un Rabelais, d’un Pasquier ou d’un Bodin. Son auteur, affirme-t-elle, est un partisan convaincu de l’idée de race. Il vante les propriétés naturelles de la noblesse, de la roture, de la femme, évoque la continuité des qualités biologiques tout en encourageant leur symbolisation par le langage des armoiries. Ce faisant, il approuve une hiérarchie sociale inspirée d’Aristote, fondée par principe sur la vertu, concrètement sur les différences qualitatives entre diverses « manieres d’hommes ». Une hiérarchie dont il trouve des exemples dans la nature, et qui est envisagée de manière statique : chaque individu, chaque sexe, doué de qualités propres, devant demeurer à sa place. Arlette Jouanna relève cependant dans le Miroir Politicque un certain nombre d’idées contradictoires : celle de la primauté de la nourriture sur la nature, signifiant le rôle de l’éducation dans la supériorité des hommes, et celle du caractère vil ou noble de certains offices ou comportements, fondant en définitive la hiérarchie sociale sur le critère essentiel de l’utilité et sur une manière d’être plutôt que sur l’être. Elle explique ces incohérences par la tendance fréquente chez les hommes de robe (l’humaniste, pense-t-elle, provient d’un milieu robin) à affirmer l’hérédité des qualités sociales inférieures et à nier celle des vertus sociales supérieures, parce que se trouve ainsi proclamée une infériorité congénitale des paysans ou des artisans justifiant la supériorité naturelle des gentilshommes. Aussi conclue-t-elle à la présence latente, dans cette œuvre, d’une idée de race partiellement incohérente, faiblement assurée, au service des ambitions sociales de la noblesse de robe81.
16Cette mise en évidence de l’intérêt que pouvait revêtir le Miroir Politicque au-delà de sa contribution à la construction des théories absolutistes s’est avérée d’autant plus opportune que l’attention portée à l’« École de Toulouse » a fini par s’essouffler. De plus en plus de voix ont affirmé que les Valois de la Renaissance eurent à compter avec les solidarités traditionnelles, et que leur royauté a revêtu un caractère contractuel généralement accepté par les légistes du xvie siècle82. Dans l’Histoire de Toulouse dirigée par Philippe Wolff, en 1974, Bartolomé Bennassar estimait que l’on avait peut-être un peu « hâtivement » parlé d’une « École de Toulouse »83. L’étude consacrée par Enzo Sciacca, en 1975, aux racines théoriques de l’absolutisme en France entre 1498 et 1519, ignorait l’existence de celle-ci. Comptant Étienne Aufréri, Jean de Selve, Jean Ferrault et Jean Montaigne parmi des tenants de la monarchie, l’auteur relevait que certains arguments avancés par ceux-ci, tirés du droit romain, n’étaient pas nouveaux. Loin de considérer que leurs théories reflétaient un enseignement toulousain, il consacrait une longue étude à l’Orléanais Jean Feu et, relevant le faible emploi que Ferrault fait du droit civil, estimait même qu’il n’avait pu être formé ni à Toulouse ni à Orléans, où l’étude des sources romaines avait une place d’importance, mais à la faculté parisienne, traditionnellement dédiée au droit canonique !84 En 1978, si Quentin Skinner évoquait les « légistes » qui commençaient à soutenir, en un style « de plus en plus agressif », une idéologie fortement royaliste (Ferrault, Chasseneuz, Du Moulin et Grassaille), il ne leur accordait qu’une importance minime, l’évolution vers une théorie du pouvoir potentiellement sans limites du roi n’ayant selon lui été particulièrement prononcée que sous le règne d’Henri II. Il le constatait dans les écrits de personnages « aussi secondaires » qu’Étienne De Bourg ou Guillaume de La Perrière85. En 1978, Michel Foucault se penchait sur l’œuvre de ce dernier dans le cadre de ses recherches sur le concept de « gouvernementalité » et la naissance de l’art libéral de gouverner. Tout en estimant celle-ci très décevante en comparaison de celle de Machiavel, il considérait qu’elle constituait l’un des premiers témoignages de « démarquage ou d’opposition sourde » au Florentin. À ses yeux, La Perrière allait en effet à rebours des théories contemporaines proposant au gouvernement, comme finalité, la souveraineté ou l’obéissance des citoyens. Assignant pour sa part à celui-ci la réalisation de desseins beaucoup plus larges, il assimilait l’art de gouverner à l’utilisation de tactiques plutôt que de lois. Son œuvre indiquait de ce fait une rupture importante dans l’évolution du concept de « gouvernementalité »86.
17La réhabilitation de l’auteur était en marche. Il était clair qu’elle ne pouvait avoir lieu, désormais, du fait de son éventuelle contribution aux thèses montantes de l’absolutisme dans la première moitié du xvie siècle. Les positions ultramontaines de l’université de Toulouse, sa capacité de dissidence à l’encontre du Capétien apparaissaient en effet avec plus de clarté, dans le sillage de l’affaire de l’Epistola tholosana de 1402, ou de l’opposition suscitée par le concile de Bâle87. Et tandis que de nombreuses études mettaient en valeur la persistance, au début du xvie siècle, de vivaces théories « constitutionnalistes » prônant la nécessité d’un gouvernement respectueux des corps constitués88, la thèse de Jacques Krynen invitait à situer bien en amont la genèse de l’absolutisme en France89. Partant, il était évident que les constructions juridiques d’un Jean Ferrault ou la foi monarchique d’un Charles de Grassaille avaient de solides précédents médiévaux. Il en découlait que l’« École de Toulouse », si École il y avait eue, n’avait à proprement parler rien inventé. Après presque un siècle d’existence, la théorie de Gabriel Hanotaux connaissait des heures sombres. Le temps était au désaveu. Enzo Sciacca, approfondissant les recherches entreprises dans sa thèse, affirmait que dans les œuvres de Ferrault, Chasseneuz et Grassaille, l’exaltation du pouvoir royal démontrait la substantielle faiblesse des théories absolutistes. Il signalait comment, chez Ferrault, la légitimation de la souveraineté s’appuyait non plus sur les archives, les lois ou les coutumes, mais dans l’incontestable et supérieure volonté divine. Dans l’insistance de Grassaille à évoquer le rôle équilibrant des officiers de justice, il percevait comme une manière d’inviter le roi à la modération. Il voyait là une théorie laquelle, se détachant de ses sources médiévales, assumait avec plus d’évidence la défense d’une monarchie administrative dans laquelle la volonté du monarque est maintenue dans les rets des offices et des Cours souveraines90. Et, tandis que Jacques Verger insistait sur la nécessité de nuancer le rôle traditionnellement attribué aux juristes méridionaux, « celui de serviteurs exclusifs et intransigeants de la prépondérance royale », pour réévaluer leur attachement aux particularismes locaux91, Patrick Arabeyre relevait la force du provincialisme d’un archevêque comme Bernard de Rosier92.
18Bousculant la vision traditionnelle d’une « Toulouse Barbare » où l’humanisme fut interdit dès 1532 avec les condamnations de Boyssoné et de Dolet93, Robert A. Schneider, dans sa monographie portant en 1989 sur la municipalité de Toulouse, démontre à quel point les élites municipales se sont approprié le mouvement de renouveau intellectuel et artistique qui agitait la France. Révélant comment Toulouse s’est teintée d’une forte symbolique humaniste, il établit comment, au Capitole, les magistrats municipaux et quelques écrivains, au premier rang desquels Guillaume de La Perrière, ont entretenu de concert une véritable mythologie citadine pour faire vivre un « humanisme civique » proche de celui des Républiques italiennes94. C’était là remettre en cause la vision traditionnelle encore en vigueur sur l’humaniste95. Or, cette même année, ayant examiné tout spécialement la forme du gouvernement et de la société dans le Miroir Politicque, Enzo Sciacca s’élevait contre les idées reçues sur l’auteur : l’un des premiers à utiliser l’œuvre de Machiavel en France, doté d’une importante culture italianisante, celui-ci, démontrait-il, loin d’être l’un des tenants de l’absolutisme comme beaucoup l’avaient cru, avait une préférence sensible, bien qu’implicite, pour les régimes démocratiques !96
19Sur la place de Guillaume de La Perrière au sein de l’« École de Toulouse », le débat n’eut pas lieu. Cependant, au cours de la dernière décennie, tandis que l’essor des études sur l’emblématique a suscité un intérêt accru pour le Theatre des Bons Engins et la Morosophie97, le Miroir Politique a continué d’éveiller l’attention des chercheurs. En 1991, Arlette Jouanna a souligné à nouveau le caractère savoureux des métaphores employées par l’auteur pour désigner la noblesse ou l’ordre de la société98. En 1995, poursuivant les travaux entrepris par Michel Foucault, Michel Senellart a fait de l’œuvre un jalon notable dans l’évolution des arts de gouverner99. Dernièrement, Éric Gojosso y a trouvé plusieurs témoignages remarquables de l’avancée sémantique du concept de République, notant qu’en dépit d’une facture et d’un titre renvoyant au genre médiéval des miroirs du prince, « ici le miroir réfléchit non pas la figure idéale du souverain, mais une réalité que l’auteur a scrupuleusement observée, frayant ainsi la voie à Jean Bodin »100. Aurélie Du Crest enfin a relevé l’intérêt du lien qu’il établissait entre le pouvoir politique et la famille101. La thèse admise par l’historiographie n’en demeure pas moins vivace. Pour Éric Gojosso, La Perrière « ne croit pas à l’existence du régime mixte et s’emploie en conséquence à réfuter la thèse de Seyssel »102. La majorité des critiques voient dans le Miroir Politicque une illustration imagée, sinon très juridique, de la pensée politique qui, à la Renaissance, soutient l’ascension de François Ier. Aux yeux de tous, l’auteur fait montre d’une sensibilité proche de Bodin, étant un représentant d’une « École » dont on continue parfois, de manière hâtive ou embarrassée, d’alléguer l’existence103. Mais il faut le constater : la lente désagrégation des idées admises sur l’École de Toulouse a suivi son cours. Diverses études, sans s’attacher spécifiquement à l’étude du groupe toulousain, ont démontré que l’absolutisme ne procédait pas du droit romain, invitant à nuancer le rôle éventuel de l’enseignement donné à la faculté de droit méridionale104. En 1994, Paul Ourliac a jeté un nouveau pavé dans la mare, en remarquant que l’œuvre de Guillaume Benoît avait profondément influencé les auteurs « libéraux » de la seconde moitié du xvie siècle : Hotman, Bèze, et peut-être Coras105. Comme la thèse de Patrick Arabeyre l’a minutieusement démontré, l’œuvre de ce canoniste, tout en glorifiant le roi très-chrétien, affichait les prétentions des parlementaires ; elle se faisait l’écho d’un fort particularisme juridique106. L’étude que ce même auteur vient de consacrer au Tractatus celebris de Jean Montaigne empêche désormais de compter celui-ci parmi les représentants d’une École à l’absolutisme intransigeant107. Les récents travaux de Jacques Krynen ne le montrent que trop : sous couvert d’une rhétorique flatteuse, ce sont bien souvent les prétentions d’un Parlement ambitionnant un partage de la souveraineté qui percent108. La fière « École de Toulouse » mise en avant à la fin du xixe siècle, encore alléguée ça et là109, se trouve ainsi réduite à une peau de chagrin. Roger Doucet avait autrefois émis de sérieuses réserves sur l’absolutisme de Nicolas Bertrand. Une étude approfondie de l’œuvre de ce dernier confirmerait sans doute ses analyses pour rejoindre les conclusions qui ont désormais été développées sur Jean Montaigne, Guillaume Benoît, Jean Ferrault ou Charles de Grassaille. Il n’est plus possible d’avancer que ceux-ci étaient des novateurs ou qu’ils se faisaient les promoteurs d’un pouvoir délié de toute entrave. Les fondements théoriques de l’absolutisme étaient déjà en place depuis quelques siècles lorsque leurs œuvres en systématisèrent certains aspects, et si un François Ier entendait désormais utiliser à plein des moyens dont ses prédécesseurs n’avaient pas mis à profit tout le potentiel, ni Jean Montaigne, ni Benoît, ni Ferrault ni même Grassaille n’entendaient l’exempter de certaines obligations qu’ils jugeaient fondamentales.
20Face à cette évolutive et changeante historiographie de l’« École de Toulouse », il convenait encore de mieux cerner l’apport de Guillaume de La Perrière à la théorie politique. L’historiographie qui vient d’être retracée ne le montre que trop : appréhender les idées exprimées par un homme nécessite d’identifier le milieu dans lequel celles-ci se sont déployées et le public auquel éventuellement elles étaient destinées. Avant d’étudier au vrai la pensée de Guillaume de La Perrière, il fallait donc cerner le contexte discursif dans lequel celle-ci s’était épanouie. Il était nécessaire de veiller à ne juger ni les œuvres, ni la pensée de l’humaniste à l’aune de considérations méthodologiques actuelles : « un homme du xvie siècle doit être intelligible non par rapport à nous, mais par rapport à ses contemporains » écrivait Lucien Febvre110. Que La Perrière ne soit, pas plus que ses illustres contemporains, un penseur systématique, qu’il n’y ait chez lui aucune frontière marquée entre droit, politique, morale ou religion ? Rien de moins étonnant. Les auteurs ne manifestent guère, à la Renaissance, d’esprit de synthèse. Budé « ne connaît pas l’art de conduire sa pensée », regrettait Louis Delaruelle111. « Luther est un esprit discursif, qui répugne à la rigueur logique, voire même à la plus élémentaire cohérence » ; « Au xvie siècle, le génie de la synthèse n’était pas encore descendu sur l’Allemagne » soulignait Georges de Lagarde112. La connaissance de l’environnement d’un auteur, celle de l’esprit et des méthodes qui s’imposaient à ses contemporains permettent seules d’interpréter son œuvre. Ainsi l’étude du chemin fait par un Guillaume de La Perrière dans les facultés de droit de Toulouse et d’Avignon, celle du parcours qui le mena des emblèmes au Miroir Politicque, ont-elles précédé l’examen de sa pensée.
II. Guillaume de La Perrière, des emblèmes au Miroir Politicque
21Comme l’avaient suggéré les travaux d’Ernest Roschach et comme l’avait pressenti Jacques Poujol, l’œuvre politique écrite par Guillaume de La Perrière s’inscrit en effet dans un contexte particulier, un contexte qu’il convenait de mettre à jour avant toute étude des idées113.
22Né à Toulouse en 1499, La Perrière fait partie de ces nombreux juristes qui, au xvie siècle, se prennent de passion pour les belles-lettres. Dans sa ville natale, l’apprenti-juriste qu’il est bénéficie des conseils de Nicolas Bertrand, lequel, passioné d’histoire et curieux d’épigraphie, sait mettre à profit ses talents et sa culture pour défendre avec ardeur sa ville comme l’institution parlementaire toulousaine114. Mais dans la capitale méridionale comme dans la plupart des universités françaises, au début du xvie siècle, l’enseignement du droit peine à se renouveler115 ; il part étudier en Avignon où sont appelés en 1518 deux des plus fameux juristes contemporains, Gianfrancesco Sannazari della Ripa et André Alciat116. S’il ne nourrit pas là, auprès du Milanais, le goût des épigrammes grecques et des sentences morales érudites ayant inspiré les Emblema117, il enrichit une culture déjà sans doute éclectique. Figurant parmi les lecteurs de l’université, il s’y enquiert de la kabbale auprès des principaux rabbins de la ville d’Avignon118, et, son grade de licencié utriusque juris en poche, il regagne Toulouse.
23Toulouse connaît alors une intense période de renouveau culturel, artistique et politique, son siècle d’or, dit-on souvent. Sous l’égide de quelques grands parlementaires et prélats qui sont alors de fins lettrés, de très dynamiques cénacles se constituent119. À la maison commune, désormais nommée le « Capitole », se cultive une fière identité locale120, et à l’université, se pressent les plus grands noms du siècle. Associé à une agitation estudiantine particulièrement vive, l’essor du protestantisme provoque dans la ville son lot de répression121. En 1532, quarante personnes, dont quelques-uns des jeunes régents en droit, Mathieu Pac et Jean de Boyssoné, ainsi qu’une longue liste d’écoliers des lois sont poursuivies ; parmi eux, Jean de Caturce, ayant refusé d’abjurer ses erreurs, est brûlé vif « comme harang sauretz »122. L’exil de plusieurs prévenus et condamnés en Italie, où se trouve alors toute l’élite de la jeunesse du royaume123, contribue à l’émergence d’une nouvelle génération de juristes. Séduits par les muses, aspirant à l’éloquence, ils se destinent à servir, leur vie durant, l’union de la jurisprudence et de la poésie, celle de la philosophie et de la métaphysique. Toulouse se fait ainsi à leur retour un centre important de diffusion de la culture humaniste italienne, et notamment de la philosophie padouanne124.
24Ordonné prêtre, La Perrière vit des rentes provenant de petites cures, et notamment de celles du prieuré du collège de Saint-Mathurin, dont il est dès 1533 le prieur et unique collégié125. Il se consacre à l’étude et aux belles-lettres. Sa première œuvre aujourd’hui disparue, l’Invective satiricque […] contre les suspects monopoles de plusieurs crimineulx satellites : et gens de vie reprouvée […], le désigne comme un moraliste condamnant les « monopoles » qui, déréglant les marchés, faisaient augmenter les prix et contribuaient à multiplier les famines126. La deuxième de ses œuvres, ce Theatre des bons engins dont il offre un exemplaire manuscrit à Marguerite de Navarre en 1535, révèle un novateur, pionnier d’un genre nouveau : l’emblématique. Inaugurée en 1531 par l’édition, enrichie de gravures, des emblèmes d’Alciat, l’emblématique associe intimement une illustration (icon, figura) à un texte concis et percutant (epigramma, subscriptio), lequel, décrivant l’image correspondante, en explicite le sens symbolique. Prompt à mesurer l’importance de cette innovation, La Perrière est le premier auteur d’une longue série d’ouvrages d’emblèmes français. Il est l’un des rares emblématistes à composer à la fois les textes et les illustrations de ses œuvres. Le Theatre des Bons Engins confirme ainsi les talents artistiques dont il donne la mesure en 1533 et 1535, en participant aux programmes iconographiques des entrées toulousaines de François Ier et des époux de Navarre127. Aimant camper les mœurs de ses contemporains en de piquantes épigrammes, habile à en croquer les portraits en d’étonnantes vignettes, l’auteur s’y révèle encore en moraliste préoccupé de l’éducation de ses pairs, en humaniste cherchant à transmettre sa propre philosophie de la vie.
25Le Theatre des Bons Engins lui apporte une notoriété certaine, et durable. S’il ne lui ouvre pas les portes de la cour de Navarre, il conforte sa position dans les cénacles culturels toulousains. Privilégiant la langue française quand la mode est au cicéronianisme, La Perrière s’en démarque cependant128. Il s’en détache aussi en ce que, contrairement aux lettrés qu’il fréquente, il n’est pas happé par le courant de « fonctionnarisme » qui se développe à la faveur des créations d’office ; qu’il ne l’ait pas souhaité ou qu’il ne l’ait jamais pu, il n’entre pas, avec l’Humanisme, « dans les conseils du roi »129. Le désir d’obtenir des offices transforme alors ses pairs en courtisans, faisant d’eux, mieux que n’importe quelle « École », de fidèles serviteurs du pouvoir royal. À la faveur de leurs nominations, ceux-ci quittent Toulouse les uns après les autres ; lui y demeure, sans autres préoccupations extérieures que celles liées à la gestion de ses cures, et à ses œuvres. Il faut dire qu’il ne paraît pas avoir été doté d’un tempérament de courtisan. Cherchant à remercier Marguerite de Navarre de l’accueil chaleureux qu’elle lui a prodigué en 1535, La Perrière lui dédie en 1539 les Annalles de Foix, qui relatent, d’après un manuscrit du xve siècle, l’histoire du comté relevant de la souveraineté des rois de Navarre130. Son désir manifeste de complaire à la souveraine ne parvient guère à faire taire les rancoeurs qu’il nourrit à l’encontre des « philosophes vollantz » professant leur « faincte philosophie » dans son entourage131. L’épître dédicatoire qu’il adresse à Marguerite se transforme en un réquisitoire emporté contre la flatterie, les flatteurs et les princes qui se laissent séduire par eux. Trouva-telle un accueil favorable ? Encore présente dans une épître concluant les deux premiers tirages du Theatre des Bons Engins, en 1540, son amertume disparaît ensuite pour ne jamais revenir132. Il est vrai que la publication du Theatre des Bons Engins connaît un succès immédiat. L’un des plus ravissants petits livres illustrés du xvie siècle, celui-ci est rapidement et par trois fois réédité, circulant également sous forme manuscrite et même dans une édition pirate133. Ce succès lui renouvelle sans doute les faveurs de la souveraine. Comme il lui apporte la consécration d’un public national et international puisque l’œuvre sera traduite en anglais et en néerlandais134.
26Ses préoccupations didactiques, l’intérêt qu’il manifeste déjà pour les questions d’ordre moral et politique s’incarnent dans le rôle qu’il joue après 1538 au sein de la maison commune de Toulouse. Les capitouls s’emploient alors à défendre et renforcer dans la ville une identité urbaine qu’ils pensent susceptible de les préserver d’un pouvoir royal omnipotent135. Une attention accrue sur les archives de la ville et ses privilèges s’accompagne ainsi d’un vif intérêt pour une mythologie locale revivifiée par les sciences historiques naissantes136. La culture et le savoir de La Perrière sont mis à contribution. Appelé à intervenir, en 1538, dans la remise en ordre des archives de la ville, il est chargé de composer « un comencement » manuscrit pour le vidimé du Livre Blanc conservant les privilèges municipaux : le Catalogue et summaire de la fundation, principalles coustumes, libertez, droictz, privilieges et aultres actes des cité, conté, capitoulz, citoyens et habitans de Tholoze137. Tout à la gloire du Capitole de Toulouse et de ses citoyens, celui-ci vante les grandes franchises et libertés de la ville, « cité et republicque de Tholoze »138. Et l’humaniste d’entreprendre, parallèlement, la confection d’un nouvel ouvrage,
Or (comme l’on veoit communement que l’un propos ameyne l’autre) voulant de mon pouvoir enrichir l’œuvre par eux à moy commise, composay le present Miroir Politicque139.
27À l’attention des capitouls, il compose un manuel de gouvernement. Constituant le prélude à une « cumulation des ordonnances sur le fait de la police » qui ne verra semble-t-il pas le jour, celui-ci constitue la première mouture du Miroir Politicque publié en 1556. L’auteur y a recueilli « sommairement » et mis « par Epitome » tout ce qui concerne « l’art de doctrine politique » élaboré par les auteurs grecs et latins. Condensant « la plus pondereuse et plus docte de toute moralle philosophie », ce travail est déjà, comme le sera l’œuvre définitive, orné d’« arbres et de pourtraits ». Composé en cinq semaines, il impressionne manifestement ses destinataires qui font, dès lors, plus régulièrement appel à l’humaniste. À partir de 1539, La Perrière signe ainsi diverses chroniques de la vie municipale capitulaire des Annales de Toulouse140. Il y assortit l’hommage rendu aux magistrats municipaux de l’année en cours de longues considérations philosophiques, morales et politiques. Traitant chaque événement local comme un problème philosophique éternel, il confronte les données de l’histoire immédiate au passé le plus ancien, et parfois le plus légendaire, vivifié par sa culture classique comme par une connaissance intime de la culture humaniste italienne ; il mesure les pratiques gouvernementales capitulaires à l’aune de l’histoire des Républiques antiques, au nombre desquelles la Rome républicaine se voit reconnaître une place toute particulière141. Ce goût pour la réflexion politique se retrouve encore, en 1543, dans une épître liminaire qu’il compose pour introduire le nouveau livre des Conseils Généraux de la ville de Toulouse, laquelle est jugée « de grand importance pour la décoration de ladite ville ». Véritable petit traité de l’usage du conseil en politique, celle-ci révèle un La Perrière tout aussi conscient de la spécificité de l’art de gouverner que soucieux d’en connaître le fonctionnement142.
28Ces travaux tout à la fois historiographiques et politiques ne supplantent pas son goût pour l’emblématique. En 1543, paraît l’editio princeps des Cent considérations d’Amour143, par lesquelles il prétend avoir cherché à se reposer du « continuel estude de divine, & humaine philosophie »144. À rebours des Controverses des sexes femenins et masculins de son ami d’enfance Gratien Du Pont de Drusac, qui avaient semé le trouble dans la république des lettres en 1535, et qu’il avait alors cautionnées145, il s’y livre à un éloge sans fausse note de l’amour. Manifestement, il témoigne aussi d’une expérience toute personnelle, probablement contemporaine de la composition de ces pièces, à la fin de la décennie 1530. La Perrière en effet fait alors quelques entorses au principe canonique du célibat des prêtres, et de ses amours avec Jacinthe de Lomagne, une enfant naît : Marguerite, peut-être ainsi prénommée en l’honneur de la souveraine de Navarre146.
29La renommée de La Perrière s’est désormais accrue. En 1546, on fait appel à lui pour préparer une nouvelle édition française de l’Opus de Tholosanorum gestis de Nicolas Bertrand ; en 1547, il se trouve impliqué dans la première édition de la Chronique de Joinville, dont le texte a été découvert parmi les anciens registres du roi René d’Anjou que consultait à Beaufort-en-Vallée Antoine Pierre de Rieux147. Entre 1548 et 1554, année de sa mort, il fait figure d’historiographe officiel de Toulouse. Toutes les chroniques municipales de ces années sont signées de sa devise148. Celles-ci témoignent, avec autant de magnificence que de solennité, de son goût grandissant pour les questions d’ordre politique. Retraçant ici les grandes lignes d’une verte polémique, « à sçavoir s’il est expedient d’ung homme sage, et qui ayme son honneur et prouffict, de prendre charge d’estat politicque », elles s’interrogent là sur la nature des responsabilités politiques ou sur la république idéale. Noircissant de nombreux feuillets de parchemin, illustrées de « lettres d’enluminure », ces chroniques comptent parmi les plus belles des douze Livres des Histoires. Leur auteur obtient d’ailleurs pour leur composition des sommes tout à fait inédites149. La régularité et les montants de ces gages lui permettent de faire face, en 1551, à la suppression du collège de Saint-Mathurin, emporté par la réforme des institutions collégiales toulousaines150. Ils contribuent sans doute à financer la publication de ses nouvelles œuvres.
30En 1551 puis 1552, paraissent à Lyon deux œuvres aujourd’hui disparues : Le petit courtisan avec la maison parlante, et le moyen de parvenir de pauvreté à richesse, et comment le riche devient pauvre ainsi que le Dialogue moral de la lettre qui occit et de l’esprit qui vivifie ; interlocuteurs Engins : humains, Franc Vouloir, Bon Conseil, Glose confuse [… ]151. Correspondant à la traduction française d’une homélie de saint Jean Chrysostome, la première a pour but d’« inciter les cueurs des riches aux œuvres de misericorde et de charité »152 ; il n’est pas impossible que la seconde, poursuivant les finalités didactiques chères à l’auteur, ait été l’une des très rares pièces de théâtre produites par la Renaissance toulousaine. Parues en 1552 et 1553, les Considérations des Quatre mondes153 et la Morosophie renouent avec le genre emblématique. Dénuée cependant d’illustrations, la première traite de la question difficile de l’appréhension du divin par l’homme dans un style lapidaire, proche du genre hiéroglyphique et sentencieux dans lequel l’auteur voie la quintessence de l’emblème. La seconde offre, comme le Theatre des Bons Engins, la vision harmonieuse d’une adéquation parfaite entre des pièces épigrammatiques et des illustrations taillées sur mesure. La simplicité ayant guidé le Theatre des Bons Engins y cède toutefois la place à un raffinement recherché et à une préciosité accrue, témoignant sans doute des liens plus étroits qu’il entretient désormais avec certains cercles savants. Moins populaire, elle obtient un succès bien moins considérable154.
31Enfin, en 1553, La Perrière confie à l’imprimeur lyonnais Macé Bonhomme le soin de faire imprimer le Miroir Politicque initié en 1539. « Benignement » reçue par les capitouls en 1540, l’ouvrage a depuis été égaré, « sans que l’on seust que pouvoit-il estre devenu ». Ayant fait publier un monitoire pour le retrouver, les capitouls, « reputans […] estre chose indigne que nostre present miroir se moysist au fons d’un coffre, privé de lumière »155, encouragent généreusement l’auteur à reprendre sa copie pour le faire imprimer. Sans cela, l’œuvre eut définitivement sombré, car l’humaniste est alors sans le sou. Recourant à plusieurs reprises aux aumônes que les capitouls prennent sur les amendes ou « de l’argent du boys vendu » pour les destiner aux mendiants156, probablement aussi malade, il s’éteint dans le courant de l’année 1554, sans voir la parution de ce Miroir Politique auquel il a consacré de si longues années.
32Œuvre posthume, le Miroir Politicque sort des presses de Macé Bonhomme le 9 février 1556, trois années, presque, après son achèvement au printemps 1553, plus de quinze années depuis sa première composition en 1539. Augmenté au double entre 1550 et 1553, il répond encore au descriptif de 1540 : ayant recueilli « sommairement » et mis « par Epitome » tout ce qui concerne « l’art de doctrine politique », il est orné des « arbres et des portraits » par lesquels l’emblématiste entend éclairer ses enseignements politiques. Macé Bonhomme en a confié la réalisation à un très talentueux graveur de la Renaissance : Reverdy. Et La Perrière, ayant voulu disputer de cet excellent art « à la décoration principallement de nostre florissante Republicque de Tholose »157, l’a dédié aux générations successives de capitouls qui en ont financé la genèse, ainsi qu’à Jean Bertrand, garde des sceaux de France depuis le 22 mai 1551158. Protecteur de la ville de Toulouse à la cour du roi, Jean Bertrand est aussi manifestement celui de La Perrière, qui espère que l’autorité du magistrat le préservera des médisants et que son Miroir « se verra & lira par tous les climatz habitables, comme formulaire absolu de toute bonne republicques »159.
33Le choix de la langue vulgaire, qui s’est naturellement imposé à l’auteur, pouvait s’opposer à ces perspectives œcuméniques160. Mais l’œuvre révèle une culture tout à fait exceptionnelle, aussi universelle qu’atemporelle, une culture dont l’ampleur n’était que suggérée par les précédents travaux de La Perrière. La longue liste des autorités grecques et romaines alléguées au long de ses deux-cents folios parle d’elle-même161. Les référents bibliques et patristiques abondent, d’autant que c’est, souvent, la « philosophie divine » qui vient ouvrir et clore une discussion. Passant presque totalement sous silence le Corpus Juris Canonici, il se montre à peine plus disert sur le Corpus Juris Civilis, auquel il ne réfère qu’une petite dizaine de fois, et encore de manière évasive162. Assurément, le Miroir Politique n’est pas destiné à un public de juristes. Au demeurant, dans les œuvres politico-morales, les questions juridiques n’occupaient en général qu’une place restreinte163. Et l’humaniste fait passer au second plan les œuvres produites par la science juridique164. N’ayant retenu que peu d’auteurs du Moyen Âge165, il révèle une vaste connaissance des œuvres issues de la Renaissance européenne166, et surtout un intérêt tout à fait exceptionnel pour celles produites par la Renaissance italienne167. Mentionnant à plusieurs reprises les Discorsi de Machiavel, dont une traduction française avait été donnée par Denis Janot en 1544, et une « Institution politique » mal identifiée, peut-être Il principe, dont la première traduction française est donnée l’année de l’achèvement du Miroir Politicque à Paris par Charles Estienne et à Poitiers par Enguilbert de Marnef168, il est d’ailleurs l’un des premiers auteurs à connaître et à citer Machiavel en France169.
34Accumulant au fil des pages les autorités, il espère que ses lecteurs puiseront dans son Miroir matière à plus ample réflexion :
comme dans un miroir, cil qui se mire & regarde n’y veoit pas tant seulement sa face, ains y verra par ligne réflexe la plus grand partie de la salle, ou chambre en laquelle il sera. Semblablement, tout administrateur politicque, qui se voudra mirer au present miroir (non mye de cristalin, d’argent, de verre ou d’acier, mais de papier) pourra veoir en iceluy racourci & sommairement agregé, tout ce que luy est necessaire de veoir pour bien & deüement exercer son office, sans qu’il ait peine de feuilleter plusieurs autheurs Grecs & Latins, qui diffusement en ont escrit170.
35Témoignage intéressant de l’évolution du genre des Miroirs à la Renaissance, apportant à la métaphore traditionnelle un élément nouveau (celui de la salle), où l’on a pu voir l’irruption de l’espace dans la relation séculaire du prince à son office, la prise en compte de la matérialité de l’État pour définir l’office du prince171, cette métaphore distingue l’œuvre de la tradition des Miroirs des Princes, que La Perrière connaissait pour le moins par les œuvres de Vincent de Beauvais et de Guillaume Durand172, sinon par la lecture des nombreux opuscules du genre, français et italiens, qui avaient paru depuis le début du siècle173. Le titre définitif de l’œuvre le révèle : le prince n’est pas ici le destinataire privilégié du Miroir, mais l’un des nombreux « administrateurs politiques » auquel il l’adresse. L’œuvre, jugée « non moins utile que necessaire à tous Monarques, Roys, Princes, Seigneurs, Magistrats, et autres surintendans & gouverneurs de Republicques »174 ne fait du reste à la monarchie qu’une place restreinte175. Les premiers lecteurs du Miroir ne s’y sont pas trompés, puisque leurs éloges font emphatiquement de La Perrière le successeur d’une longue lignée de fondateurs légendaires de Républiques antiques, Minos, Solon, Licurgue et Romulus176.
36Force est de le constater : le Miroir Politicque envisage le politique hors du cadre étroit de la « République de Toulouse » et même hors de celui du royaume de France. S’ouvrant sur un exposé des diverses formes de Républiques envisageables, l’œuvre s’attache ensuite à exposer, thématiquement, les causes de leur dépravation, puis les moyens qui permettront de les conserver. Considérant que la connaissance d’un tout nécessite l’appréhension de ses parties, l’auteur analyse en détail la famille, et notamment le couple, par le biais des lois qui sont prescrites à l’homme et s’imposent à son épouse. Enfin, il brosse un tableau des sept catégories de citoyens nécessaires à toute République. L’ensemble donne à voir la République dans sa structure institutionnelle, sa réalité quotidienne et sa diversité humaine. Y sont prises en compte les données proprement publiques de l’Etat comme l’intimité des citoyens, leurs besoins naturels et leurs dissimilitudes sociales, sans que la finalité de conservation nécessaire à la République ne soit perdue de vue. Et, cherchant à inculquer à ses lecteurs un certain sens des responsabilités civiques, La Perrière s’efforce de leur apprendre le politique tout en les « récréant ». Considérant qu’« Occulaire démonstration passe toutes autres », il rythme le cours de son propos d’arbres et de portraits dont il s’attribue très fièrement la paternité, et qui n’ont pas pour peu contribué au succès de l’œuvre. Servant non d’illustration, mais de base au discours, les arbres font du Miroir politicque une œuvre qui peut être lue, regardée et méditée. Cette esthétique raffinée contribue sans doute à la renommée de l’œuvre qui connut en effet dans la seconde moitié du xvie siècle un succès certain177, avant de sombrer dans l’oubli.
37Ce ne sont guère les institutions de la République, mais une « civile société » qu’il se plait à décrire et à dépeindre. Comme le révèle la terminologie humaniste inspirée d’Aristote à laquelle il renvoie178, cette « civile société » attire chaque citoyen dans ses filets pour se fonder sur une éthique civique individuelle. Révélait-elle, ce faisant, une sensibilité de tradition absolutiste ? Voilà ce que nous nous sommes mis en quête de déterminer179. Cette fin nécessitait de ne négliger ni le contexte d’écriture de l’œuvre ni aucune des œuvres produites par l’humaniste. Les idées de La Perrière ne se laissent pas toujours saisir avec facilité. Ses œuvres s’échelonnent sur une période qui couvre presque vingt ans et toutes se caractérisent par une forte tonalité politique. Ses emblèmes contiennent des considérations diverses sur la société, ses chroniques municipales, bon nombre de principes et de remarques politiques. Le Miroir Politicque, qui se présente comme un exposé ordonné de la vision que l’humaniste s’était forgée aux fins d’instruire les capitouls du fonctionnement de la chose publique, n’évite ni les répétitions, ni parfois les contradictions. Il ne correspond pas à une synthèse complète. Son auteur a énoncé ailleurs des idées qui lui étaient chères et qui concernent la République. Pour pénétrer au mieux sa conception du politique et en donner une présentation sinon complète, du moins globale, il convenait donc de prendre en compte l’éventualité d’une évolution tout en confrontant les idées exprimées dans le Miroir politicque à celles énoncées en ses autres compositions, emblèmes, chroniques, épîtres et pièces liminaires disséminées ça et là180. Il fallait bien sûr, dans la limite du possible, les analyser au regard des œuvres produites par ses contemporains, comme au regard de certaines de celles qui avaient pu l’inspirer, celle d’Aristote en particulier, et celles issues de l’humanisme italien dont il était tout imprégné.
38Les idées déployées au moyen d’un bagage conceptuel particulier perdent en authenticité à se trouver ordonnées dans un exposé qui se veut synthétique. Georges de Lagarde l’avait autrefois senti, écrivant à propos de Luther : « on est donc certain de trahir toujours un peu sa pensée en la réduisant à l’unité »181. Mais, s’il ne fallait pas s’étonner des éparpillements de l’auteur, il était indispensable de chercher à présenter de manière cohérente une pensée qui pouvait ne pas l’être182. Il a été assez surprenant, à cet égard, de découvrir à quel point les considérations politiques de La Perrière se sont laissées enserrer en des thématiques fluides, souvent mises en avant par l’auteur lui-même dans son Miroir Politicque. Possédant une vision assez claire des origines de la société politique, l’humaniste, qui s’interroge sur le bon régime, insiste ainsi avant tout sur l’ordre et sur l’unité de la « civile société ».
Notes de bas de page
1 Sur les institutions de la Renaissance, R. Doucet, Les institutions de la France au xvie siècle, Paris, 1948 ; G. Zeller, Les institutions de la France au xvie siècle, 1948 ; rééd. Paris, 1987 ; F. Olivier-Martin, Histoire du droit français des origines à la Révolution, Paris, 1948, réimp. Paris, 1984 ; D. Richet, La France moderne. L’esprit des institutions, Paris, 1973, rééd. 1992 ; R. Mousnier, Les institutions de la France sous la monarchie absolue, Paris, 1974, rééd. 2005 ; E. Le Roy Ladurie, L’État royal. De Louis IX à Henri IV (1460- 1610), Paris, 1987 ; E. Le Roy Ladurie, L’Ancien Régime, Paris, 1991 ; J. Cornette, L’affirmation de l’État absolu, 1515-1652, 4e éd., Paris, 2003 ; Ph. Sueur, Histoire du droit public français (xve-xviiie siècles), Paris, 1993 ; 4e éd., 2007, 2 vol. ; B. Barbiche, Les institutions de la monarchie française à l’époque moderne, Paris, 1999 ; L. Bely, La France moderne, 1498-1789, Paris, 1999 ; La monarchie entre Renaissance et Révolution, J. Cornette dir., Paris, 2000 ; J.-M. Carbasse, G. Leyte, S. Soleil, La monarchie française du milieu du xvie siècle à 1715. L’esprit des institutions, Liège, 2001 ; J.-L. Harouel, J. Barbey, É. Bournazel, J. Thibaut-Payen, Histoire des institutions de l’époque franque à la Révolution, Paris, 11e éd. entièrement refondue, 2006 ; Sur l’« absolutisme monarchique », terme qui, bien que controversé, demeure incontournable, notamment lorsqu’il s’agit d’évoquer l’historiographie qui s’est attachée à en analyser le contenu, voir notamment M. Chabod, « Y a-t-il un État de la Renaissance ? », dans Actes du colloque sur la Renaissance organisé par la Société d’histoire moderne, Sorbonne, 30 juin-1er juillet 1956, Paris, 1958, p. 57-78 ; J. Poujol, « 1515, cadre idéologique du développement de l’absolutisme en France à l’avènement de François Ier », dans Théories et pratiques politiques à la Renaissance, 17e colloque international, Tours, 1974, Paris, 1977, p. 259-272 ; La Monarchie absolutiste et l’histoire en France, Paris, 1987 ; F. Olivier-Martin, L’absolutisme français, Paris, 1988 ; J.-L. Thireau, « L’absolutisme monarchique a-t-il existé ? », Dictature, absolutisme et totalitarisme, Colloque des 15-16 mai 1997, RFHIP, 6 (1997), p. 291-309 ; F. Cosandey, R. Descimon, L’absolutisme en France. Histoire et historiographie, Paris, 2002.
2 M. Villey, « L’humanisme et le droit », conférence de Salzbourg, 1966 ; rééd. dans Seize essais de philosophie du droit dont un sur la crise universitaire, Paris, 1969, p. 60-72.
3 Rabelais aurait dit cela à Dolet, rapportent E. Noël et R. Copley-Christie, Étienne Dolet, le martyr de la Renaissance, 1508-46. Sa vie et sa mort, Paris, 1886, p. 184.
4 Pour Augustin Renaudet, l’humanisme, fondant une morale et un droit, aboutit à une politique. A. Renaudet, « Autour d’une définition de l’humanisme », BHR, 6 (1945), p. 17, 20. Sur l’« invention de la politique », M. I. Finley, L’invention de la politique. Démocratie et politique en Grèce et dans la Rome républicaine, Paris, 1985.
5 P. Mesnard, L’essor de la philosophie politique au xvie siècle, thèse Lettres, Université de Paris ; Paris, 1936.
6 F. Collard, « La pensée politique d’un clerc humaniste à la fin du xve siècle, Robert Gaguin (1433-1501) », RFHIP, 7 (1998), p. 45.
7 Sur Budé, signalons cependant les études de C. Bontems, « L’institution du Prince de Guillaume Budé », dans C. Bontems, L.-P. Raybaud, J.-P. Brancourt, Le prince dans la France des xvie et xviie siècles, Paris, 1965, p. 1-143 ; D. J. Osler, « Budaeus and Roman Law », IC, 13 (1985), p. 195-212.
8 « Il y a de la politique dans le théâtre, comme le prouve l’œuvre d’Aristophane […]. Il y a de la politique dans la poésie, ainsi dans les tragiques d’Agrippa d’Aubigné […]. Il y a de la politique dans les sermons de Bossuet ou de Bourdaloue. Il y a de la politique dans le roman : c’est dans le Lucien Leuwen de Stendhal que l’on trouve le meilleur portrait politique de la monarchie de juillet. Il y a évidemment de la politique chez les pamphlétaires et les journalistes. Mais il y en a aussi dans la littérature enfantine […] ». M. Prelot, G. Lescuyer, Histoire des idées politiques, 13e éd., Paris, 1997, p. 11.
9 La pensée juridique est « celle de ceux qui se sont intéressés au droit et l’ont influencé : le droit appartient à tous. La pensée juridique est un immense panorama, divers comme la pensée, l’histoire et le monde ». Ph. Malaurie, Anthologie de la pensée juridique, Paris, 1996, 2e éd., 2001, avant-propos ; Comme le constate A.-G. Slama, « Pour une histoire littéraire des idées », dans Axes et méthodes de l’histoire politique, dir. S. Berstein, P. Milza, Paris, 1998, p. 423 : « Les idées politiques sont un archipel relativement restreint, comportant un nombre d’escales limité. Les itinéraires, en revanche, sont infinis. Or ce sont eux qui donnent au voyage son dessin ».
10 O. Nay, Histoire des idées politiques, Paris, 2004, avant propos p. 1.
11 « L’histoire des doctrines » est enseignée à Genève par Jules Barni (auteur de l’Histoire des idées morales et politiques en France au XVIIIe siècle, Paris, 1865-1867) avant que le fondateur de l’École libre des sciences politiques, Émile Boutmy, ne confie cet enseignement à Paul Janet. Il s’agit alors, après la défaite française face à l’Allemagne, de se « refaire une tête de peuple » et de former les individus « capables de diriger l’opinion ». M. Robin, Histoire comparative des idées politiques, Paris, 1988, p. 6.
12 Dès 1856, Agénor Bardoux s’élevait en faveur des « hommes secondaires » : « Ce sont les hommes secondaires qui représentent le mieux leur époque. Le génie, par l’élévation de ses idées, brise le cadre et dépasse son siècle. La foule conserve dans tous les âges une teinte uniforme, celle que laisse l’ignorance, et ne fait guère que changer de costume. Aux hommes secondaires seul il appartient de formuler les travers et les grandeurs de leur temps dans une proportion égale, sans rien exagérer ; ils marchent vers l’avenir, mais à pas mesurés, ne se rendant pas compte de leur rôle, embarrassés par les préjugés et les idées fausses d’un passé qu’ils n’osent jamais répudier en partie ». A. Bardoux, « Les légistes au xvie siècle. Jean de Basmaison », Extrait de la RHD, juillet-août 1856, p. 1. En 1923, Marc Bloch témoignait, avec Les rois thaumaturges, d’un élargissement de l’histoire à l’anthropologie et aux mentalités. Dans les années 1930, Thibaudet s’attachait à décrire la « carte générale » des idées politiques françaises : « La géographie des idées se trouve ici devant un phénomène de relief rajeuni, de vallées qui, à travers des mouvements tectoniques successifs, et de sens différents, maintiennent une ligne stable à une figure de la terre » ; A. Thibaudet, Les idées politiques de la France, Paris, 1932, p. 236. Arthur O. Lovejoy estime alors que « les auteurs mineurs sont aussi importants et peuvent même, de ce point de vue, être plus importants que les auteurs qui sont maintenant regardés comme ayant produit des chefs d’œuvre ». Lovejoy cité par M. Robin, ibidem, p. 13.
13 F. Simiand, « Méthode historique et science sociale », Revue de synthèse historique, janvier-avril 1903 ; M.-P. Caire-Jabinet, L’histoire en France du Moyen Âge à nos jours. Introduction à l’historiographie, Manchecourt, 2002, p. 145.
14 « L’histoire se fait avec des documents écrits, sans doute. Quand il y en a. Mais elle peut se faire, elle doit se faire, sans documents écrits s’il n’en existe point. Avec tout ce que l’ingéniosité de l’historien peut lui permettre d’utiliser pour fabriquer son miel, à défaut des fleurs usuelles. Donc, avec des mots. Des signes. Des paysages et des tuiles. Des formes de champs et de mauvaises herbes. Des éclipses de lune et des colliers d’attelage. Des expertises de pierre par des géologues et des analyses d’épées en métal par des chimistes. D’un mot, avec tout ce qui, étant à l’homme, dépend de l’homme, sert à l’homme, exprime l’homme, signifie la présence de l’homme, l’activité, les goûts et les façons d’être de l’homme. Toute une part, et la plus passionnante sans doute de notre travail d’historien, ne consiste-t-elle pas dans un effort constant pour faire parler des choses muettes, leur faire dire ce qu’elles ne disent pas d’elles-mêmes sur les hommes, sur les sociétés qu’elles ont produites – et constituer finalement entre elles ce grand réseau de solidarités et d’entraides qui supplée à l’absence de document écrit ? ». L. Febvre, « Vers une autre histoire », Revue de métaphysique et de morale, 58 (1949), repris dans Combats pour l’histoire, Paris, 1995, p. 428.
15 Les grandes œuvres, écrit-il, sont « grandes en ce sens qu’elles ont marqué profondément l’esprit des contemporains ou celui des générations ultérieures, et que, soit au moment même de leur publication, soit plus tard, et en quelque sorte rétrospectivement, elles ont fait date. Autrement dit, elles ont bénéficié, immédiatement ou à terme, de ce qu’on pourrait appeler la résonance historique ou la chance historique. Cela ne signifie nullement qu’elles soient toutes intrinsèquement grandes, grandes en elles-mêmes, en valeur absolue, par la richesse des points de vue, la compréhension sereine des mécanismes individuels et sociaux, la maîtrise de la construction, la clarté et la force de l’expression. Parmi les œuvres qu’on va voir, plus d’une est imparfaite, déparée sinon gâtée par la passion partisane, et dans certains au moins de ses aspects, – il arrive que ce soit dans son essence même –, odieuse. Mais ces défauts ou même ces tares ne l’ont pas empêchée, au contraire, d’obtenir la résonance historique, de rencontrer la chance historique : parce que cette œuvre s’est trouvée répondre particulièrement aux préoccupations, aux passions politiques du moment ou d’un moment. En sens inverse, et malheureusement, il peut arriver que la chance historique déserte obstinément une œuvre politique intrinsèquement grande… ». J.-J. Chevallier, Les grandes œuvres politiques, de Machiavel à nos jours, 1949 ; rééd. 1970, 1996, 2001 (éd. Y. Guchet).
16 J. Touchard, Histoire des idées politiques, Paris, 1959 ; rééd. 2001, p. vii. Intégré dans le programme de la licence en droit en 1952, le cours d’histoire des idées politiques est porté à deux semestres en 1962.
17 G. Bourde, H. Martin, Les Écoles historiques, Paris, 1983 ; rééd. 1997, p. 271-306 sur le marxisme, p. 307-338 sur le structuralisme.
18 Michel Foucault exhorte les chercheurs à élargir le champ d’étude de l’histoire des idées pour favoriser une meilleure appréhension du savoir. En étudiant non seulement les grands ouvrages de théorie politique mais leurs à-côtés, leurs marges, les « rumeurs latérales », « philosophies d’ombre et thématiques séculaires » lesquelles, jamais fixées en de rigoureux systèmes, n’ont pu acquérir le statut d’œuvre, il s’agit de mettre en valeur non seulement la pensée, mais le discours, regardé comme un monument adressé à un auditoire particulier dans un contexte spécifique. « Définie – mais on voit tout de suite combien il est difficile de lui fixer des limites – l’histoire des idées s’adresse à toute cette insidieuse pensée, à tout ce jeu de représentations qui courent anonymement entre les hommes ; dans l’interstice des grands monuments discursifs, elle fait apparaître le sol friable sur lequel ils reposent. C’est la discipline des langages flottants, des œuvres informes, des thèmes non liés. Analyse des opinions plus que du savoir, des erreurs plus que de la vérité, non des formes de pensée mais des types de mentalité ». M. Foucault, L’archéologie du savoir, Paris, 1969, p. 179. Sur Michel Foucault, voir également M. Senellart, « Michel Foucault : gouvernementalité et raison d’État », Pensée politique, 1 (1993), p. 291-293 et G. Bourde, H. Martin, Les Écoles historiques, p. 324 sq. Sur la nécessité d’inscrire les idées dans leur contexte, Q. Skinner, « Meaning and Understanding in the History of Ideas », dans Visions of Politics, I : Regarding Method, Cambridge, 2002, p. 57-89 ; J. F. Spitz, « Comment lire les textes politiques du passé ? Le programme méthodologique de Quentin Skinner », Droits, 10 (1989), p. 144 sq.
19 Sur l’intérêt de l’histoire des mentalités développée par G. Duby, P. Ariès, J. Le Goff et M. Vovelle dans le cadre de l’histoire des institutions et de l’administration, M. Antoine, « Les institutions françaises du xvie au xviiie siècle. Perspectives de recherche », JS, 1976, p. 65-78 ; rééd. dans Le dur métier de roi, Paris, 1986, XI, p. 328.
20 Sur l’opinion publique, voir les travaux de C. Gauvard, notamment « Les officiers royaux et l’opinion publique en France à la fin du Moyen Âge », dans Histoire comparée de l’administration (ive-xviie siècles). Actes du XIVe colloque historique franco-allemand, Tours, 27 mars-1er avril 1977, éd. W. Paravicini et K. F. Werner, Munich, 1980, p. 583-593.
21 Symptômatique est à cet égard la parution de l’Histoire des idéologies dirigée par F. Chatelet, Paris, 1974-1978.
22 R. E. Giesey, Le Roi ne meurt jamais, Paris, 1987 ; Id., Cérémonial et puissance souveraine. France, xve-xviie siècles, Paris, 1987 ; A. Boureau, Le simple corps du roi. L’impossible sacralité des souverains français. xve-xviiie siècle, Paris, 1988.
23 Dès 1985, paraissait Culture et idéologie dans la genèse de l’État moderne, Rome, 1985. Les « mentalités » laissaient la place à l’anthropologie historique et à l’histoire culturelle. J.- M. Biziere, P. Vayssiere, Histoire et historiens. Antiquité, Moyen Âge, France moderne et contemporaine, Paris, 1995, p. 216 sq.
24 J. Krynen, « Genèse de l’État et histoire des idées politiques en France à la fin du Moyen Âge », dans Culture et idéologie, p. 400.
25 Ainsi l’Histoire de la philosophie politique dirigée par A. Renaut (1999, 5 vol.), ne consacre-t-elle qu’un bref passage à Bodin (p. 237-250) dans le cadre de l’étude de L. Foisneau, « De Machiavel à Hobbes : efficacité et souveraineté dans la pensée politique moderne », p. 203-279.
26 P. Mesnard, L’essor de la philosophie politique, s’intéresse seulement à Machiavel, More, Seyssel, Bodin, aux Réformateurs, monarchomaques et aux auteurs de la Ligue.
27 En privilégiant aussi souvent une vision de l’histoire des idées politiques qui tend à faire disparaître les auteurs derrière les concepts pour systématiser les doctrines ayant marqué le développement de la pensée politique, en s’efforçant « d’ordonner la chronologie à la logique », « de mettre en évidence le fait que les grands textes politiques sont à la fois des inventions, des constructions autonomes, et des réponses aux problèmes posés de leur temps ». E. Pisier, F. Chatelet, O. Duhamel, P. Bouretz, D. Colas, B. Guillarme, Histoire des idées politiques, 1982 ; 4e éd., 1996, « Présentation » ; également J. Rouvier, Les grandes idées politiques des origines à J.-J. Rousseau, Paris, 1973 ; D. G. Lavroff, Les grandes étapes de la pensée politique, Dalloz, 1993 ; Id., Histoire des idées politiques de l’Antiquité à la fin du xviiie siècle, 3e éd., 1997 ; Depuis le xixe siècle, 6e éd., 1996 ; H. Dhifallah, C. Elleboode, H. Houliez, J.-F. Veran, Histoire des idées politiques, Paris, 2004.
28 Ainsi Philippe Nemo, qui met à profit de très nombreux auteurs dans le premier volume de l’Histoire des idées politiques qu’il consacre à l’Antiquité et au Moyen Âge, regrette-t-il que la multiplicité des œuvres produites par les temps modernes et contemporains conduise à opérer des choix pour retenir les auteurs les plus significatifs et les plus originaux. P. Nemo, Histoire des idées politiques aux Temps modernes et contemporains, Paris, 2002, p. 11-12.
29 Tout à fait remarquables paraissent à cet égard les travaux britanniques. Dans son étude d’histoire des idées du siècle, W. F. Church accorde aux juristes qu’il considère comme des « second- and third-rate men » une place notable. W. F. Church, Constitutional Thought in Sixteenth Century France. A Study in the Evolution of Ideas, Cambridge, 1941 ; rééd. New York, 1979 ; il en est de même de J. W. Allen, A History of Political Thought in the Sixteenth Century, 1928 ; Londres-New York, 1961, qui traite des idées politiques dans le royaume p. 271-444 ; citons également The Cambridge History of Political Thought : 1450- 1700, éd. originale J. H. Burns, M. Goldie, Cambridge, 1991 ; trad. fr. J. Ménard, et C. Sutto, Histoire de la pensée politique moderne 1450-1700, Paris, 1997 ; et Q. Skinner, The Foundations of Modern Political Thought, Cambridge, 1978, II, p. 260-261 ; trad. fr. Les fondements de la pensée politique moderne, Paris, 2001 qui s’intéresse à Budé, Seyssel, Calvin, Bèze, François Hotman, Du Plessis-Mornay, Bodin et Montaigne, accorde de l’attention à Chasseneuz, Du Moulin, La Boétie, Castellion, Cujas, Du Vair, Bernard de Girard, sieur du Haillan, L’Hospital, mentionne encore Lefèvre d’Etaples, Du Faïl, Rebuffi, Rabelais, Postel, La Perrière, La Boétie, La Noue, Ramus, Connan, Le Douaren, Le Roy, Des Autels, Hurault, La Renaudie et Masson.
30 Ainsi, comme le signalait déjà R. E. Giesey, aucune comparaison des versions française et latine de la République de Jean Bodin n’a encore été faite, R. E. Giesey, Cérémonial et puissance, p. 56.
31 Henri Lévy-Bruhl regrettait dés 1954, dans son compte-rendu de l’ouvrage de Pierre Mesnard, la place insuffisante faite aux faits et aux doctrines spécifiquement juridiques. H. Levy-Bruhl, « La philosophie politique du xvie siècle », Revue internationale d’histoire politique et constitutionnelle, 3 (1953), p. 66.
32 Le mos gallicus, affirmant l’autonomie du droit national dans le renouvellement des sciences juridiques, s’impose dans l’ensemble des universités françaises dans la seconde moitié du xvie siècle. J.-L. Thireau, « L’enseignement du droit et ses méthodes au xvie siècle », Organisation générale des études et méthodes d’enseignement du droit au Moyen Âge. Annales d’histoire des facultés de droit et de la science juridique, 2 (1985), p. 27- 36. Sur la distinction entre mos italicus et mos gallicus, G. Caron, « Mos italicus e Mos gallicus juris docendi nella dottrina dei canonisti », dans Mélanges Pierre Tisset, RSHDE, 7 (1979), p. 77-91.
33 Le relevé effectué par George Huppert sur la bibliographie de La Croix Du Maine est des plus révélateurs. 178 des 378 auteurs retenus entre 1540 et 1584 sont de robe. G. Huppert, The Idea of Perfect History, 1970 ; trad. fr. L’idée de l’histoire parfaite, Paris, 1973, p. 193.
34 L’expression a été employée pour une période postérieure par H. Drevillon, P. Serna, « L’Ancien Régime et les révolutions », dans La monarchie entre Renaissance et Révolution, p. 377 sq. : « L’administration saisie par le politique ». La question des relations entretenues par les « hommes de loi », avocats et magistrats, avec le pouvoir politique, a été récemment mise en avant, pour la période du xvie au xviiie siècle, par l’ouvrage Hommes de loi et politique (xvie-xviiie siècles), H. Daussy, F. Pitou dir., Rennes, 2007.
35 J. Poujol, L’évolution et l’influence de l’idée absolutiste en France, de 1498 à 1559, thèse Paris-Sorbonne, 1955 ; E. Sciacca, Le radici theoriche dell’assolutismo nel pensiero francese del primo cinquecento (1498-1519), Milan, 1975.
36 A. Jouanna, L’idée de race en France au xvie siècle et au début du xviie siècle (1498- 1614), thèse Histoire, Paris IV ; Lille-Paris, 1976.
37 É. Gojosso, Le concept de République en France (xvie-xviiie siècle), Aix-en-Provence, 1998.
38 A. Du Crest, Modèle familial et pouvoir monarchique (xvie-xviiie siècles), Aix-en-Provence, 2002.
39 P. Ourliac, Droit romain et pratique méridionale au xve siècle. Étienne Bertrand, Paris, 1937.
40 J. Brejon, André Tiraqueau, 1488-1558, Paris, 1937.
41 E. Joucla, Les doctrines politiques de Grégoire de Toulouse, Toulouse, 1898-1899 ; C. Collot, L’école doctrinale de droit public de Pont-à-Mousson. Pierre Grégoire de Toulouse et Guillaume Barclay, Paris, 1965.
42 P.-V. Cadiou, Bernard d’Argentré, pamphlétaire de l’histoire de Bretagne et doctrinaire des statuts, thèse dactyl. Rennes, 1974.
43 C. Dugas De La Boissonny, Barthélemy de Chasseneuz (1480-1541), Grenoble, 1977, p. V, 221-222 pour les appréciations précitées ; voir également la récente étude de P. Arabeyre, « Aspects du ‘‘nationalisme culturel’’ dans le domaine du droit au début du xvie siècle : les grands juristes français selon Barthélemy de Chasseneuz », Annales de Bourgogne, 74/2 (2002), p. 161-188. L’œuvre de Barthélemy de Chasseneuz avait connu sous l’Ancien Régime un extraordinaire succès : ses Commentaria in consuetudines Ducatus Burgundiae principaliter, et totius fere Gallie consecutive, édités pour la première fois en 1517 et améliorés dans les quatre éditions ultérieures (jusqu’en 1528), furent 19 fois publiés jusqu’en 1647 ; le Catalogus gloriae mundi, connut 18 éditions entre 1529 à 1692. Ce succès avait déjà suscité diverses monographies, dont celle de J.-H. Pignot, Un jurisconsulte du xvie siècle, Barthélemy de Chasseneuz, premier commentateur de la coutume de Bourgogne et président du parlement de Provence, sa vie et ses œuvres, Paris, 1880 ; réimpr. Genève, 1970.
44 G. Giordanengo, « Avant-propos », dans P. Arabeyre, Les idées politiques à Toulouse à la veille de la Réforme. Recherches autour de l’œuvre de Guillaume Benoît (1455-1516), Toulouse, 2003.
45 B. Basdevant-Gaudemet, Aux origines de l’État moderne. Charles Loyseau (1564-1627). Théoricien de la puissance publique, Paris, 1977.
46 J.-L. Thireau, Charles du Moulin (1500-1566). Étude sur les sources, la méthode, les idées politiques et économiques d’un juriste de la Renaissance, Genève, 1980.
47 P. Arabeyre, Les idées politiques ; Id., « Droits et histoire : les fondements de la règle de succession au royaume de France chez Guillaume Benoît (1455-1516) », dans Droit romain, ‘‘Jus Civile’’ et Droit français, dir. J. Krynen, Toulouse, 1999, p. 125-154.
48 A. Rousselet-Pimont, Le chancelier et la loi au xvie siècle d’après l’œuvre d’Antoine Duprat, de Guillaume Poyet et de Michel de L’Hospital, Paris, 2005.
49 N. Warembourg, Guy Coquille et le droit français. Le droit commun coutumier dans la doctrine juridique du xvie siècle, Thèse Histoire du droit, Lille II, soutenue le 9 mai 2005 ; voir également sur le même auteur J.-L. Thireau, « Préfaces de Guy Coquille – Présentation », RHFD, 19 (1998), p. 217-233.
50 Xavier Prévost prépare actuellement sur l’œuvre de Cujas une thèse d’histoire du droit dirigée par les Professeurs Anne Rousselet-Pimont et Jean-Louis Thireau.
51 J. Krynen, « Guillaume Budé », Dictionnaire historique des juristes français (DHJF), dir. P. Arabeyre, J.-L. Halpérin, J. Krynen, Paris, 2007, p. 142-143.
52 J.-L. Thireau, « Le jurisconsulte », Doctrine et recherche en droit. Droits, 20 (1994), p. 26 ; voir aussi D. R. Kelley, « Civil Science in the Renaissance : the Problem of Interpretation », dans The Languages of Political Theory in Early Modern Europe, éd. A. Pagden, Cambridge, 1987 ; rééd. dans The Writing of History, 1997, p. 57-78 ; Id., « Jurisconsultus perfectus : The Lawyer as Renaissance Man », Journal of the Warburg and Courtauld Institutes, 51 (1988), p. 84-102 ; rééd. dans The Writing of History, p. 84-102.
53 Budé voyait le jurisconsulte comme un philosophe possédant toute l’encyclopédie du savoir. L. Delaruelle, Guillaume Budé. Les origines, les débuts, les idées maîtresses, Paris, 1907, p. 93-157 ; M.-M. de LA Garanderie, Christianisme et lettres profanes. Essai sur l’humanisme français (1515-1535) et sur la pensée de Guillaume Budé, 2e éd., Paris, 1995, p. 71 sq.
54 G. Caron, « Mos italicus e Mos gallicus », p. 77-91.
55 Sur les emblèmes et leur lien avec le politique, voir infra.
56 G. Hanotaux, Études historiques sur le xvie et le xviie siècle en France, Paris, 1886, p. 1- 35.
57 G. Hanotaux, Tableau de la France en 1614, Paris, 1898, p. 22.
58 L’expression est d’A. Degert, « Les Toulousains et les origines de la diplomatie française », Rev. Hist. Toulouse, 8/3 (1921), p. 189. L’« École de Toulouse » est mentionnée par G. Weill, Les théories sur le pouvoir royal en France pendant les guerres de religion, Paris, 1891-1892 ; E. Joucla, Les doctrines politiques ; H. Hauser et A. Renaudet, Les débuts de l’âge moderne, Paris, 1929, II, p. 68-69.
59 E. Joucla, ibidem, p. 51-52.
60 A. Deloume, Aperçu historique de la faculté de droit de l’université de Toulouse. Maîtres et écoliers de l’an 1228 à 1900, Toulouse, 1900, p. 49.
61 R. Doucet, Étude sur le gouvernement de François Ier dans ses rapports avec le parlement de Paris, Alger-Paris, I, 1921, p. 14, 43.
62 L’idée perdurait qu’à Toulouse, le parlement et la faculté de droit se faisaient les champions des prétentions royales à des droits illimités. H. de LA Perriere, Du droit de succession à la couronne de France dans la dynastie capétienne, Paris, Thèse de droit, 1908 ; J. W. Allen, A History of Political Thought, p. 281 ; P. Imbart De La Tour, Les origines de la Réforme, I : La France moderne, II : L’Église catholique, La crise de la Renaissance, 2e éd., Melun, 1948, 1944 ; H. Puget, Montaigne à Toulouse, Toulouse, 1929, p. 70, 75.
63 J. W. Allen, ibidem, p. 284.
64 Voir les bibliographies données sur Jean de Boyssoné, Étienne Dolet et Jean de Pins dans le Dictionnaire des Lettres françaises. Le xvie siècle (DLF xvie siècle), éd. revue sous la dir. de M. Simonin, Paris, 2001, p. 181, 366, 946.
65 H. Jacoubet, Les trois centuries de maistre Jehan de Boyssoné, docteur régent à Tholoze, Paris-Toulouse, 1923, p. 58-59.
66 Étienne Dolet accusait la « barbarie » de Toulouse, sa grossièreté et sa sottise d’avoir fait fuir le roi François, « lumières de l’humanité ». É. Dolet, Les Orationes duae in Tholosam d’Étienne Dolet (1534), éd. fac-similé traduite et annotée par K. Lloyd-Jones et M. Van Der Poel, Genève, 1992 ; G. Cazals, « Des procès humanistes au procès de Toulouse : Toulouse barbare », dans Littérature et droit, du Moyen Âge à la période baroque : le procès exemplaire. Actes de la journée d’études du groupe de recherche Traditions antiques et modernités de Paris VII (samedi 29 mars 2003), études réunies par S. Geonget et B. Méniel, Paris, 2008, p. 161-189.
67 W. F. Church, Constitutional Thought, p. 43 sq.
68 Ibidem, p. 33, 71-72. La Perrière est avec Brèche, Ferrault, Heluis et Du Bourg, l’un de ses « second- and third-rate writers » de la période, p. 44.
69 P. Ourliac, « Toulouse, cité du droit », 1948 ; dans Études d’histoire du droit médiéval, II, Paris, 1980, p. 165-166.
70 P. Girard, « La jeunesse de Cujas. Notes sur sa famille, ses études et son premier enseignement », NRHD, 40 (1916), p. 458 sq., 476-482 ; P. Mesnard, « La place de Cujas dans la querelle de l’humanisme juridique », RHD, 4e s., 28 (1950), p. 523 ; Id., « Jean Bodin à Toulouse », BHR, 12 (1950), p. 31-59.
71 A. Viala, Le parlement de Toulouse et l’administration royale laïque. 1420-1525 environ, Albi, 1953, I, p. 287-298. Les manuels consacraient alors quelques lignes à l’École de Toulouse, J. Droz, Histoire des idées politiques en France, Paris, 1948, p. 18 ; J. Touchard, Histoire des idées politiques, I, p. 249-250.
72 E. Roschach, « Histoire d’une préface », Annuaire de l’Académie des sciences, inscriptions et belles-lettres de Toulouse, 1882-1883, p. 16-24 ; Id., « Les douze livres de l’histoire de Toulouse, étude critique des chroniques municipales, manuscrits du xiiie au xviiie siècle (1295-1787) », dans Toulouse, Toulouse, 1887, p. 35-41 ; Id., « Un voyage princier en 1535. Passage à Toulouse du roi de Navarre Henri d’Albret et de la reine Marguerite », MASIBLT, 10e s., 2 (1902), p. 54-70. Le faible intérêt suscité par La Perrière est attesté par les notices biographiques qui lui furent consacrées dans la Biographie toulousaine, « Par une société de gens de lettres », Paris, 1823 comme dans la Biographie universelle ancienne et moderne […], nouv. éd. Paris-Leipzig, 1854-1865.
73 Abbé R. Corraze, « L’impression des Annales de Foix en 1539 », Bulletin historique du diocèse de Pamiers, Couserans et Foix¸ 15e année, 45-46 (janvier-juin 1940), p. 193-199. L’oubli dans lequel l’auteur était alors tombé s’observe dans la courte notice que lui consacre H. de La Perriere, Notes sur la maison de La Perrière, et sur les diverses familles qui ont porté le même nom, Gap-Paris, 1938, p. 84.
74 G. Dexter, La Perrière and his poetic works, Thèse, Londres, 1952 ; Id., « Guillaume de La Perrière », BHR, 17 (1955), p. 56-73.
75 J. Poujol, L’évolution et l’influence, p. 47 ; voir également, du même, « L’évolution et l’influence des idées absolutistes en France de 1498 à 1559 », L’information historique, 18 (1956), p. 43-44 ; « Jean Ferrault on the King’s Privileges », Studies in the Renaissance, 5 (1958), p. 15-26.
76 J. Poujol, éd. de C. de Seyssel, La Monarchie de France et deux autres fragments politiques, Paris, 1961, p. 48.
77 J. Poujol, « L’évolution et l’influence », p. 44.
78 J. Poujol, L’évolution et l’influence, p. 336-337.
79 C. Collot, L’école doctrinale, p. 39 ; F. Simone, Umanesimo, Rinascimento, Barocco in Francia, Milan, 1968, p. 147.
80 J. Imbert, H. Morel, R.-J. Dupuy, La pensée politique des origines à nos jours, Paris, 1969, p. 148-149.
81 A. Jouanna, L’idée de race, notamment p. 934-935, 1364.
82 Suivant les travaux de R. Doucet, Les institutions, 1948 ou J. Russel Major, Representative Institutions in Renaissance France, 1421-1559, Madison-Londres, 1980.
83 B. Bennassar et B. Tollon, « Le siècle d’or (1463-1560) », dans l’Histoire de Toulouse, dir. P. Wolff, Toulouse, 1974, p. 264.
84 E. Sciacca, Le radici theoriche dell’assolutismo, p. 41.
85 Q. Skinner, The Foundations of Modern Political Thought, Cambridge, 1978, II, p. 260- 261 ; trad. fr. Les fondements de la pensée politique moderne, Paris, 2001, p. 798-709.
86 M. Foucault, « La gouvernementalité », dans Dits et Ecrits, III : 1976-1988, 1994, p. 635- 657.
87 J.-L. Gazzaniga, L’Église du Midi à la fin du règne de Charles VII (1444-1461) d’après la jurisprudence du parlement de Toulouse, Paris, 1976, p. 109 sq. ; P. Ourliac, « Le parlement de Toulouse et les affaires de l’Église au milieu du xve siècle », dans Mélanges Pierre Tisset, RSHDE, 7 (1979), p. 339-358, repris dans Études d’histoire du droit médiéval, I, Paris, 1979, p. 507-528 ; Id., « L’Epistola tholosana de 1402 », dans Mélanges offerts à Pierre Vigreux, Toulouse, 1981, p. 577-579 ; également J. Verger, « ‘‘Ladicte Université de Toulouse est moult notable et tres ancienne’’. Histoire et conscience de soi chez les universitaires toulousains à la fin du Moyen Âge », dans Saint-Denis et la royauté. Études offertes à Bernard Guenée, travaux réunis par F. Autrand, C. Gauvard et J.-M. Moeglin, Paris, 1999, p. 593-606 ; P. Arabeyre, Les idées politiques, p. 61 sq.
88 Sur la persistance du constitutionnalisme, voir, outre les travaux précités de J. Poujol et d’E. Sciacca, B. Tierney, Religion, Law, and the Growth of Constitutional Thought (1150- 1650), Cambridge, 1982 ; trad. fr. Paris, 1993.
89 J. Krynen, Idéal du Prince et pouvoir royal en France à la fin du Moyen Âge (1380-1440). Étude de la littérature politique du temps, Paris, 1981.
90 E. Sciacca, « Ferrault, Chasseneux et Grassaille. Alle origini della teoria della sovranità nel pensiero politico moderno », dans Studi in onore di Cesare Sanfilippo, Milan, 1985, p. 697-752, notamment p. 713, 747.
91 J. Verger, « Les gradués en droit dans les sociétés urbaines du Midi de la France à la fin du Moyen Âge », dans Milieux universitaires et mentalités urbaines au Moyen Âge. Colloque du département d’études médiévales de Paris-Sorbonne et de l’université de Bonn, Paris, 1987, p. 149, 153-154.
92 P. Arabeyre, « Les écrits politiques de Bernard de Rosier (1400-1475), archevêque de Toulouse (1452-1475) », PTEC, 1987, p. 9-15 ; Id., « Un prélat languedocien au milieu du xve siècle : Bernard de Rosier, archevêque de Toulouse (1400-1475) », JS, 1990, p. 291-326.
93 L’idée était encore assez récemment admise. En 1976, Claude Longeon estimait la critique trop sévère, mais n’en considérait pas moins Toulouse comme un refuge d’autorités orthodoxes dont l’immobilisme du droit nuisait au renom de la Faculté. C. Longeon, Une province française à la Renaissance. La vie intellectuelle en Forez au xvie siècle, thèse Lille III, 1974 ; Lille, 1976, p. 132. Jean-Claude Margolin écrivait que « Toulouse est en quelque sorte l’anti-Lyon, cette cité rhodanienne tolérante aux exilés, aux transfuges, voire aux hérétiques ». J.-C. Margolin, « Profil de l’humanisme lyonnais vers 1537 : Dolet, Arlier, Visagier. Perspectives de recherches », dans Il Rinascimento a Lione. Atti del congresso internazionale (Macerata, 6-11 Maggio 1985), éd. A. Possenti, G. Mastrangelo, Macerata, 1988, II, p. 678-679 ; également Id., « Au temps de Barthélemy Aneau : Jean de Boyssonné et l’humanisme lyonnais d’après sa correspondance », RHR, 47 (1998), p. 12.
94 R. A. Schneider, Public Life in Toulouse, 1463-1789. From Municipal Republic to Cosmopolitan City, Ithaca, 1989 ; voir aussi, Id., « Crown and Capitoulat : Municipal Government in Toulouse, 1500-1789 », dans Cities and Social Change in Early Modern France, éd. P. Benedict, Londres, 1989, p. 195-220.
95 Henri Morel continuait de le qualifier de « défenseur de l’absolutisme ». H. Morel, « La renaissance de Sparte », dans État et pouvoir. Réception des idéologies dans le Midi. L’Antiquité et les Temps Modernes. Actes du 4e Colloque de l’AFHIP, Lyon, 19-20-21 septembre 1985, Aix-Marseille, 1986, p. 91. ; Id., « Le régime mixte ou l’idéologie du meilleur régime politique », dans Réflexions idéologiques sur l’État. Colloque de l’AFHIP tenu à Aix, 1986, Aix-Marseille, 1987, p. 104. A.-M. Lecoq relevait l’intérêt d’une illustration du Miroir politicque. A.-M. Lecoq, François Ier imaginaire. Symbolisme et politique à l’aube de la Renaissance française, Paris, 1987, p. 430.
96 E. Sciacca, « Forma di governo e forma della società nel Miroir politique di Guillaume de La Perrière », Dal Machiavellismo al libertinismo. Studi in memoria di Anna Maria Battista, Il Pensiero politico, 22/2 (1989), p. 189.
97 Voir les études spécifiques de G. Dexter, The Earliest French Emblem books. Sources and Composition of the Theatre des Bons Engins by Guillaume de La Perrière and the Hecatomgraphie by Gilles Corrozet, Dissertation, Londres, Birkbeck College, 1981 ; I. Bergal, « Word and Picture : Erasmus Parabolae in La Perrière’s Morosophie », BHR, 48 (1985), p. 113-123 ; A. Saunders, « Picta poesis : the Relationship between Figure and Text in the Sixteenth Century French Emblem Books », BHR, 49 (1986), p. 621-652 ; Id., « The Sixteenth Century French Emblem : Decoration, Diversion or Didacticism », Renaissance studies, 3/2 (juin 1989), p. 115-133 ; Id., « Paris to Lyon and Back Again : Trends in Emblem Publishing in the Mid-Sixteenth Century in France », dans Intellectual Life in Renaissance Lyon. Proceedings of the Cambridge Lyon Colloquium 14-16 april 1991, dir. P. Ford, G. Jondorf, Cambridge, 1993, p. 63-79 ; Id., « Is it a Proverb or is it an Emblem ? French Manuscripts Predecessors of the French Emblem Books », BHR, 55 (1993), p. 83- 111 ; Id., « When it is a Device and when it is an Emblem : Theory and Practice (but mainly the latter) in Sixteenth Century Freance », Emblematica, 7/2 (hiver 1993), p. 239-259 ; S. Rawles, « The Daedalus Affair : the Lyon Piracy of the Theatre des Bons Engins », dans Intellectual Life, p. 49-61 ; B. Milcamps, Les emblèmes de la folie dans la Morosophie de Guillaume de La Perrière, DEA, Centre d’études supérieures de la Renaissance, Tours, 1996- 1997 ; aussi les ouvrages de référence, The Emblem in Renaissance and Baroque Europe. Tradition and Variety. Selected Papers of the Glasgow International Emblem Conference, 13- 17 August 1990, éd. A. Adams, A. J. Harper, E. J. BRILL, Leide-New York-Cologne, 1992 ; J.-M. Chatelain, Livres d’emblèmes et de devises. Une anthologie (1531-1735), Paris, 1993 ; A. Adams, S. Rawles, A. Saunders, A Bibliography of French Emblem Books of the Sixteenth and Seventeenth Century, Genève, 1999 ; S. Rawles, « Les deux éditions de La Morosophie de Guillaume de la Perrière », dans L’humanisme à Toulouse (1480-1596). Actes du colloque international de Toulouse, mai 2004, réunis par N. Dauvois, Paris, 2006, p. 109- 121.
98 A. Jouanna, « Des ‘‘gros et gras’’ aux ‘‘gens d’honneur’’ », dans Histoire des élites en France du xvie au xxe siècle, dir. G. Chaussinand-Nogaret, Paris, 1991, p. 17-18, 23-24, 40- 41.
99 M. Senellart, Les arts de gouverner. Du regimen médiéval au concept de gouvernement, Paris, 1995, p. 52-53.
100 É. Gojosso, Le concept de République, p. 92-95, 173, p. 77 concernant l’École de Toulouse.
101 A. Du Crest, Modèle familial, p. 91, 154.
102 É. Gojosso, Le concept de République, p. 94.
103 La Perrière ne figure pas dans les manuels de J.-J. Chevallier, Histoire de la pensée politique, 1979 ; Id., Les grandes œuvres politiques, 1970 ; M. Prelot, G. Lescuyer, Histoire des idées politiques ; E. Pisier, F. Chatelet, O. Duhamel, P. Bouretz, D. Colas, B. Guillarme, Histoire des idées politiques, 1982. Il est mentionné dans diverses études et ouvrages comme l’un des promoteurs de l’absolutisme. A. Guery, « L’œuvre royale. Du roi magicien au roi technicien », Le Débat, 74 (mars-avril 1993), p. 128 ; A. Jouanna, La France du xvie siècle, Paris, 1996, p. 246 ; A. Jouanna, P. Hamon, D. Biloghi, G. Le Thiec, La France de la Renaissance. Histoire et dictionnaire, Paris, 2001, p. 269 ; P. Nemo, Histoire des idées politiques aux Temps modernes, p. 43 ; L. Petris, La plume et la tribune. Michel de L’Hospital et ses discours (1559-1562). Suivi de l’édition du De initiatione Sermo (1559) et des Discours de Michel de L’Hospital (1560-1562), Genève, 2002, p. 283.
104 H. Morel, « L’absolutisme procède-t-il du droit romain ? », dans Histoire du droit social, Mélanges en hommage à Jean Imbert, dir. J.-L. Harouel, Paris, 1989, p. 425-440 ; réédité dans L’influence de l’antiquité sur la pensée politique européenne (xvie-xxe siècle), Aix-Marseille, 1996, p. 113-130 ; également dans ce même opus, A. Leca, « La place de la lex digna dans l’histoire des institutions et des idées politiques », notamment p. 147 sq. ; et, sur la nécessité d’envisager avec précaution l’apport du droit romain à la construction de l’État, M.- F. Renoux-Zagame, « ‘‘Et a le roi plus d’autorité en son royaume que l’empereur en son empire… ’’. Droit romain et naissance de l’État moderne selon la doctrine et la pratique du palais », dans Droit romain, ‘‘Jus Civile’’ et Droit français, p. 125-154.
105 P. Ourliac, « La nation et l’État dans l’œuvre de Guillaume Benoît, canoniste (1455- 1516) », dans Papauté, monachisme et théories politiques. Études d’histoire médiévale offertes à Marcel Pacaut, I : Le pouvoir et l’institution ecclésiale, Lyon, 1994, p. 159-160.
106 P. Arabeyre, Les idées politiques, 2003 ; Id., « Un ‘‘mariage politique’’ : pouvoir royal et pouvoir local chez quelques juristes méridionaux de l’époque de Charles VIII et de Louis XII », dans Terres et hommes du Sud. 126e congrès des Sociétés historiques et scientifiques tenu à Toulouse, 9-14 avril 2001, CTHS, à paraître.
107 P. Arabeyre, « Aux racines de l’absolutisme », p. 189-210.
108 J. Krynen, « Qu’est-ce qu’un Parlement qui représente le roi ? », dans Excerptiones juris. Studies in honor of André Gouron, dir. B. Durand, L. Mayali, Berkeley, 2000, p. 353-366 ; Id., « Une assimilation fondamentale », p. 208-223 ; Id., « De la représentation à la dépossession du roi. Les parlementaires ‘‘prêtres de la justice’’ », MEFR, Moyen Âge, 114/1 (2002), p. 95-119.
109 J.-L. Harouel, J. Barbey, É. Bournazel, J. Thibaut-Payen, Histoire des institutions, p. 272.
110 L. Febvre, Amour Sacré, Amour profane. Autour de l’Heptaméron, Paris, 1954 ; 1971, p. 10. Sur ces questions méthodologiques, également L. Strauss, La renaissance du rationalisme politique classique, Paris, 1993, p. 283 sq.
111 L. Delaruelle, Guillaume Budé, p. 126.
112 G. de Lagarde, Recherches sur l’esprit politique de la Réforme, Douai, 1926, p. 292.
113 Tel a donc été l’objet de la première partie de la thèse préparée sous la direction du Professeur Jacques Krynen et soutenue à l’université des sciences sociales de Toulouse le 17 décembre 2003 : G. Cazals, Guillaume de La Perrière (1499-1554). Un humaniste à l’étude du politique. Prix Ourgaud de la Société archéologique du Midi de la France (mars 2004). Prix Sydney Forado de l’Académie des sciences, inscriptions et belles-lettres de Toulouse (octobre 2004). Cette première partie de thèse, à paraître à Genève, a fait l’objet de plusieurs publications, dont G. Cazals, « From Law to Literature : Guillaume de La Perrière’s Intellectual Path », dans Property Law in Renaissance Literature, éd. D. Carpi, Francfort-sur-le-Main, 2005, p. 145-160 ; Id., « Guillaume de La Perrière et l’humanisme civique », dans L’humanisme à Toulouse, p. 69-90. Elle a inspiré les développements suivants.
114 Issu d’une longue lignée de juristes méridionaux, Nicolas Bertrand poursuit à Toulouse ses études in utroque jure ; il y obtient son baccalauréat puis sa licence en 1493 et 1499. Ses talents de juristes lui valent dès ce moment la reconnaissance de ses pairs. En 1499, il est élu capitoul du quartier Saint-Barthélemy, en mai puis septembre 1501, délégué par la ville à la cour du roi. Il mène de front, sa vie durant, les diverses charges auxquelles l’appellent l’exercice de son office parlementaire, celles de ses diverses fonctions municipales, celles enfin qu’il paraît avoir assumées à l’Université en tant que professeur de droit canon, peut-être depuis l’obtention de son doctorat en 1506. Attaché de façon permanente à la maison commune de la ville en sa qualité d’assesseur, il est à nouveau élu en 1510 capitoul de son quartier. En 1513, comme il s’illustre également dans l’art de la poésie, il est élu mainteneur de la Gaie-Science. En 1515, il publie l’œuvre à laquelle il doit la célébrité : l’Opus de Tholosanorum gestis ab urbe condita cunctis mortalibus apprime dignum conspectibus (Toulouse, Jean Grandjean, 13 juillet 1515). Il termine sa carrière en devenant, en 1519, lieutenant principal du viguier de Toulouse. G. Cazals, « Nicolas Bertrand », DHJF, p. 79- 80. Tout entier dédié à la gloire de Toulouse et de ses institutions, son opus contient un Opusculus de magnifica parlamenti tholosani institutione lequel légitime les prétentions des parlementaires toulousains à un partage de souveraineté judiciaire et législative, prétentions qui venaient d’être ravivées en 1510 par l’affaire Lomagne. J. Krynen, « La signification d’une métaphore : le Sénat de Toulouse », dans L’Humanisme à Toulouse, p. 43-57.
115 Un conformisme pesant, consacrant une hostilité de principe à la nouveauté, limite alors l’enseignement à la transmission d’une technique juridique et à la connaissance d’un corpus intangible d’autorités traditionnelles, « C’est-à-dire le bagage nécessaire pour accéder aux grades et manifester ensuite au moins les apparences de la compétence intellectuelle ». J. Verger, « À la naissance de l’individualisme et de la pensée individuelle : la contribution des universités médiévales », dans L’individu dans la théorie politique et dans la pratique, dir. J. Coleman, Paris, 1996, p. 84 ; aussi, du même, Histoire des universités en France, Toulouse, 1986, p. 126 ; et J.-L. Thireau, « L’enseignement du droit », p. 27-36.
116 R. Caillet, L’université d’Avignon et sa faculté des droits au Moyen Âge (1303-1503), Paris, 1907 ; P.-É. Viard, André Alciat (1492-1550), Paris, 1926 ; M. Ascheri, Un maestro del mos italicus : Gianfrancesco Sannazari della Ripa (1480 c.-1535), Milan, 1970 ; M. Venard, « Concurrentes ou complémentaires ? Les universités du Sud-Est de la France », dans Les échanges entre les universités européennes à la Renaissance, éd. M. Bideaux et M.- M. Fragonard, Genève, 2003, p. 337-348.
117 « Le mot emblema désigne un ouvrage de mosaïque joint et assemblé de menus carrés enchâssables. L’Emblema était aussi chez les anciens des ornements greffés sur des vases d’or, d’argent et de vermeil, détachables à volonté : technique inconnue à notre époque, à ce que je crois » indique Guillaume Budé (Annotationes in XXIV Pandectarum libros, Paris, 1514, fol. CV) traduit par P. Laurens, lequel signale que le mot s’était introduit dans les ouvrages de droit en marge de la loi du Digeste De auro et argento legato, comme chez Antonio de Nebrija (Iuris civilis lexicon, Bologne, 1511, fol. 19 v.). A. Alciat, Emblemata, Lyon, Macé Bonhomme, 1551 ; rééd. en fac-similé par P. Laurens, Paris, 1997, p. 17-18. C’est par jeu, à l’occasion de fêtes de fin d’année 1519, qu’Alciat avait offert ce recueil d’emblèmes à son ami Konrad Peutinger (1465-1547), secrétaire du sénat d’Augsbourg ayant donné son nom à la célèbre carte des voies militaires de l’Empire romain sous Théodose découverte en 1500.
118 G. de La Perriere, Miroir Politicque, p. 2-3.
119 Sous le patronage des magistrats Jean de Pins, Jacques Minut, des frères Du Faur et de l’évêque Georges de Selve, avec Jean de Boyssoné, Mathieu Pac, Arnaud Du Ferrier, Gribaldi Mopha et Pierre Bunel, un vaste sodalitium littéraire s’était constitué à Toulouse, attirant la jeunesse la plus illustre du royaume, les jeunes Étienne Forcadel, Jacques Cujas, Hugues Doneau, ou Anne Du Bourg. Sur tout cela, L’Humanisme à Toulouse et G. Cazals, Guillaume de La Perrière, à paraître.
120 G. Cazals, ibidem et « La constitution d’une mémoire urbaine à Toulouse (1515-1555) », dans Écritures de l’histoire (xive-xvie siècle), Actes du colloque du Centre Montaigne, Bordeaux 19-21 septembre 2002, réunis et édités par D. Bohler et C. Magnien-Simonin, Genève, 2005, p. 167-191 ; la belle thèse de F. Bordes, Formes et enjeux d’une mémoire urbaine au bas Moyen Âge : le premier Livre des histoires de Toulouse (1295-1532), thèse d’Histoire, Université de Toulouse-le-Mirail, janvier 2006.
121 D. S. Hempsall, « The Languedoc 1520-1540 : a Study of Pre-Calvinist Heresy in France », Archiv für Reformation Geschichte, 2 (1971), p. 225-244 ; R. A. Mentzer, Heresy Proceedings in Languedoc, 1500-1560, Philadelphie, 1984 ; N. RIGAL, Le parlement de Toulouse et la vie religieuse en Languedoc au début du xvie siècle, maîtrise Histoire, Université de Toulouse-Le Mirail, septembre 1999.
122 Pantagruel, de passage à Toulouse, n’y demeura guère, « quand il vit qu’ils faisaient brûler leurs régents tout vifs comme harengs saurets ». F. Rabelais, Pantagruel, éd. G. Defaux, Paris, 1994, p. 325. Sur ceux qui, réunis autour l’inquisiteur Arnaud de Badet, discutaient « de potestate Romani pontificis et des abuz de l’Église […] et parloyent aussi de libero arbitrio et de veneratione sanctorum », voir les ADA, H 418, publiées en partie par L. Bloch, J. Doinel, Archives de l’Aude. Archives ecclésiastiques. Séries G-H, Carcassonne, 1900, p. 370-376 ; D. S. Hempsall, ibidem, p. 225-244 ; R. A. Mentzer, ibidem ; G. Cazals, « Des procès humanistes ».
123 Entre 1538 et 1552, les noms de 43 Toulousains figurent sur les rôles de l’université de Ferrare. É. Picot, « Les Français à l’université de Ferrare », JS, février-mars 1902 ; Id., Les Français italianisants ; « Les professeurs et étudiants de langue française à Pavie aux xve et xvie siècles », Bulletin philologique et historique, 1915, p. 8-90 ; « Italiens en France au xvie siècle », Bulletin italien, 1917, 1918 ; aussi H. Busson, Le rationalisme dans la littérature française de la Renaissance (1533-1601), Paris, 1971, p. 71 sq. ; J. Verger, « Les rapports entre universités italiennes et universités françaises méridionales (xiie-xve siècle) », dans Università e società nei secoli XII-XVI, Pistoia, 1982, p. 145-173 ; Passer les monts. Français en Italie. L’Italie en France (1494-1925). Xe colloque de la Société française d’études du seizième siècle (Paris et Reims, 30 novembre-2 décembre 1995), dir. J. Balsamo, Paris-Florence, 1998 ; P. Ferte, « Toulouse et son université, relais de la Renaissance entre Espagne et Italie (1430-1550) », dans Les échanges entre les universités européennes à la Renaissance, éd. M. Bideaux et M.-M. Fragonard, Genève, 2003, p. 217-230.
124 H. Busson, Le rationalisme, p. 71 sq.
125 Guillaume de La Perrière est recteur des églises de Saint-Loube et d’Amades dans le diocèse de Lombès, bénéficiaire d’une chanoinie en l’église métropolitaine de Narbonne ainsi que de la cure de Parazan, petite commune située dans le même diocèse dans le canton de Ginestas, près de la rive gauche de l’Aude, au pied sud des coteaux du Minervois. Abbé R. Corraze, « L’impression des Annales de Foix » ; G. Cazals, Guillaume de La Perrière, à paraître.
126 Invective satyricque nouuellement tyssue & composée par maistre Guillaume de La Perrière, licentié es droicts : citoyen de Tholose. Contre les suspects monopoles de plusieurs crimineulx satellites : et gens de vie reprouvée : imitateurs de ceux qui furent naguieres pugnyz et iusticiez audict Tholose par auctorité de la souveraine cour de Parlement miroir de vertu : et fontaine de iustice. [A la fin : ] Gulielmus a Perriera iurium licen. Tholosae Dictabat anno Reparate Salutis per Iesum Christum. MDXXX. Idibus Octobris. In-4°, goth., 16 fol. L. Desgraves, J. Megret, Répertoire bibliographique des livres imprimés en France au seizième siècle, 20e livraison, 151 : Toulouse, Baden-Baden, 1975, p. 68.
127 La Perrière avait composé les moralités ornant le parcours du cortège royal ainsi que le décor de certaines médailles offertes aux souverains. N’est pas absolument certain son rôle dans la composition de la médaille offerte à François Ier, qui comportait le message suivant, mis « sur un triangle bien artisté » : « Ut acuti gravesque nervi simul consentum efficiunt sic qui regnis praesunt formidinem amore amoremque formidine temperantes stabilem monarchiam assequuntur et autres écritures à propos » (« Tout ainsi que les cordes unissent en un même accord les aigus et les graves, ainsi ceux qui gouvernent les royaumes doivent-ils parvenir à équilibrer la monarchie en tempérant la crainte par l’amour et l’amour par la crainte »). AMT, BB 9, du 8 juillet, fol. 185 sq., reproduite en AA 82, fol. 22 v. avec quelques erreurs de transcription. Pour la composition des médailles offertes aux souverains de Navarre, il est attesté qu’il a travaillé à « l’invention et ordonnances des medailles que pretendez donner au Roy et Royne de Navarre : Ensemble aux oraysons et arangues dyceulx ». AMT, CC 2428, n. 130 et 131 ; G. Cazals, Guillaume de La Perrière, à paraître.
128 La Perrière privilégie en effet dans ses œuvres le français, langue de longue date privilégiée dans le domaine juridique, et consacrée par l’ordonnance de Villers-Cotterêts en 1539. A. Dauzat, Précis d’histoire de la langue et du vocabulaire français, Paris, 1949 ; S. Lusignan, ‘‘Vérité garde le Roy’’. La constitution d’une identité universitaire en France (xiiie-xve siècle), Paris, 1999, p. 176 ; P. Fiorelli, « Pour l’interprétation de l’ordonnance de Villers-Cotterêts », Le Français Moderne, 18 (1950), p. 277-288 ; D. Trudeau, « L’ordonnance de Villers-Cotterêts et la langue française : histoire ou interprétation », BHR, 47 (1984), p. 103-6 ; J.-M. Carbasse, Introduction historique au droit, Paris, 1998, p. 198- 200. De nombreux humanistes, en revanche, vouent un véritable culte à la langue latine et au cicéronianisme. Voir notamment É. V. Telle, L’Erasmianus sive ciceronianus d’Étienne Dolet (1535). Introduction, fac-similé de l’édition originale du De imitatione Ciceroniana, commentaires et appendices, Genève, 1974 ; J.-C. Scaliger, Oratio pro M. Tullio Cicerone contra Des. Erasmum (1531). Adversus Des. Erasmi Roterod. Dialogum ciceronianum oratio secunda (1537), éd., traduction et annotations M. Magnien, Genève, 1999.
129 A. Renaudet, Préréforme et humanisme à Paris pendant les premières guerres d’Italie (1494-1517), Paris, 1953 ; Genève, 1981, p. 647.
130 G. de La Perriere, Les Annalles // De Foix, Ioincz A Ycelles // les cas et faictz dignes de perpetuelle recordation, adue // nuz, tant aulx pays de Bearn, Commynge, Bigorre // Armygnac, Nauarre, que lieulx circumuoysins, // despuis le premier Comte de Foix Ber- // nard, iusques a Tresillustre et Puis- // ant Prince, Henry, a present Comte // de Foix et Roy de Na- // uarre. Composees et // mises au champ // de publica- // tion (ce // que par cy deuant n’a esté // faict) Par Maistre Guillaume de La Perriere, // Licentie es droictz, Citoyen de Tholose. // [Armes écartelées de Foix et de Béarn] // On les vend a Tholose, chez Nicolas Vieillard, // Imprimeur demourant en la rue de Villeneufue. // Avec Privilege. // [fol. 281] Et imprimees par Nico-// las Vieillard, Imprimeur du-// dict Tholose, et furent a-// chevees d’imprimer // Le XXIII. iour // de Iuillet, // Lan mil // cinq // centz, et xxxix. // [Marque de Nicolas Vieillard]. In-4°, [fol. a[8]b[4]c[6]], 82 fol. 5 exemplaires furent recensés par L. Desgraves, J. Megret, Répertoire bibliographique, 1975, p. 113. Nous avons travaillé sur l’exemplaire BMT, Rés. D XVI 228, propriété de Cambolas puis d’un certain Gazeau ayant ensuite intégré les collections d’Étienne Baluze et du dr. Desbarreaux-Bernard. L’œuvre connaît un certain succès puisqu’elle est tirée en deux exemplaires.
131 G. de LA Perriere, ibidem, fol. [C i v.]-[C ii].
132 Au décès de Marguerite de Navarre, survenu le 21 décembre 1549 au château d’Odos, près de Tarbes, La Perrière compose une épître consolatoire à l’attention d’Antoine de Bourbon, puis il dépose sur le tombeau de la souveraine des vers latins dont Bérenger de La Tour D’Albenas donne une traduction française dans ses œuvres. G. de LA Perriere, La Morosophie, fol. [A 4-B 1 v.] ; B. de La Tour D’Albenas, Le siecle d’or. Et autres vers divers, Lyon, Jean de Tournes et Guillaume Gazeau, 1551, p. 217-218 ; reproduits aussi dans la Choreide, autrement, louenge du bal : aus dames, Lyon, Jean de Tournes, 1556, p. 74.
133 Édition A : G. de La Perriere, Le Theatre // DES BONS EN-//gins, auquel sont con-// tenus cent Emble-//mes. // Auec priuilege. // On les vend à Paris en la rue neufue nostre // Dame à L’enseigne sainct Jehan Baptiste, pres // saincte Geneviefue des Ardens : // [A la fin : ] Imprimé à Paris par Denis Janot libraire et imprimeur, demourant en la rue neufve nostre Dame à l’enseigne sainct Jehan Baptiste pres saincte Geneviefve des Ardens, [s. d.], In-8°, 108 fol ; rééd. en fac-similé par A. Saunders, The Scholar Press, 1973. La supplique adressée par Denis Janot au prévôt de Paris pour l’obtention du privilège (fol. 1 v) date du dernier jour de janvier 1540. Dès 1540, Denis Janot imprimait une deuxième série d’ouvrages, suivant la même formule que l’editio princeps, mais avec un bon nombre de variations de texte. Édition B : G. de La Perriere, Le Theatre // DES BONS EN-//gisn, auquel sont con-// tenuz cent Emble-//mes. // Avec privilege. // On les vend à Paris en la rue neufve nostre // Dame à L’enseigne sainct Jehan Baptiste, pres // Saincte Geneviefve des ardens // [A la fin : ] Imprimé à Paris par Denis Janot libraire et imprimeur, demourant en la rue neufve nostre Dame à l’enseigne sainct Jehan Baptiste pres saincte Geneviefve des Ardens, [s. d.], In-8°, 108 fol. 180 variations de texte ont été recensées entre les éditions A et B.S. Rawles, « The Daedalus Affair », p. 53. Les emblèmes circulaient sous forme manuscrite. Un manuscrit signé Julyot, commencé en 1536 et compilant diverses pièces dont de nombreuses poésies de Marot, a consigné l’ensemble des emblèmes du Theatre. La datation en est malaisée : certaines pièces de Marot qui y figurent ne furent pas imprimées avant 1544. D’autres demeurèrent inédites au xvie siècle, tel l’épigramme « Robinet à Marot ». Bnf, ms. fr. 12795, « Les cent Emblèmes », fol. 140-165 v. ; C. Marot, Œuvres poétiques, éd. G. Defaux, Paris, II, 1993, p. 294 et 1093. Rapidement, une édition pirate, « À la marque d’Icare », sortit des presses lyonnaises de Denis de Harsy. Celle-ci donnait les dizains modifiés de la seconde édition Janot, mais se trouvait dénuée des illustrations dont l’imprimeur n’avait pu obtenir les bois. Sa structure avait été modifiée de manière à rendre moins sensible cette absence : les allusions trop explicites aux gravures avaient été gommées des dizains et des titres avaient été ajoutés en guise de substitut partiel. L’exemplaire unique de cette édition [Bnf Rés. Z 2526], relié avec deux autres éditions non illustrées, « À la marque d’Icare », des emblèmes d’Alciat et de Corrozet, a longtemps été daté de 1536 ; il était alors considéré comme l’editio princeps du Theatre. Une minutieuse étude des différentes versions de l’œuvre a permis à Stephan Rawles de rétablir la datation exacte. S. Rawles, « The Daedalus Affair », p. 49-61.
134 Dix-neuf fois rééditée en France, l’œuvre fut traduite en néerlandais (sous le titre Tpalays der ghelaerder ingienen oft der Konstiger gheesten in houdende hondert moralle figueren allen verstandighen ende kliefhebbers der konsten ghenuechlijck om lesen, Ubers. Frans Fraet, Anvers, Witwe von Jacob Van Liesveldt, 1554 ; réédité en 1555 et 1564) et connut un grand succès en Angleterre où les emblèmes de La Perrière, diffusés par Geoffrey Whitney (A Choice of Emblems, Londres, 1586) puis par Thomas Combe (The Theatre of Fine Devices, Londres, Richard Field, 1593 et 1614), furent également traduits vers 1591 dans une édition dont Picot ne recensait aucun exemplaire complet (Emblems Translated into English, In-16°). M. V. Silcox, « The Translation of La Perrière’s Le Theatre des Bons Engins into Combe’s The Theatre of Fine Devices », Emblematica, 2/1 (été 1987), p. 61-94. Dix-neuf éditions parurent jusqu’au début du xviie siècle, la plupart en France à Lyon (Jean de Tournes, 1545, 1546, 1547, 1549, 1553 ; Jean II de Tournes, 1580, 1583) ou Paris (É. Groulleau, successeur de Janot, 1554 et 1561). J.-M. Chatelain, Livres d’emblèmes ; A. Adams, S. Rawles, A. Saunders, A Bibliography of French Emblem Books.
135 Sur les relations entretenues par la ville avec la royauté, A. Deloume, Vue de Toulouse au xvie siècle. Les Capitouls, Toulouse, 1899 ; P. Dognon, Les institutions politiques et administratives du pays de Languedoc du xiiie siècle aux guerres de religion, Toulouse, 1895 ; R. A. Schneider, Public Life in Toulouse ; plus généralement B. Chevalier, Les bonnes villes de France du xive au xvie siècle, Paris, 1982 ; Id., Les bonnes villes, l’État et la société dans la France de la fin du xve siècle, Paris, 1995 ; R. J. Knecht, Un prince de la Renaissance. François Ier et son royaume, Paris, 1998.
136 Voir notamment G. Cazals, « La constitution d’une mémoire urbaine », p. 167-191 ; Id., « L’histoire au secours du droit : enquête sur le privilège capitulaire de créer des notaires aptes à instrumenter ubique terrarum (Toulouse, 1527) », dans L’histoire institutionnelle et juridique dans la pensée politique, Aix-Marseille, 2006, p. 151-168.
137 G. de La Perriere, Catalogue et summaire de la fundation, principalles coustumes, libertez, droictz, privilieges et aultres actes des cité, conté, capitoulz, citoyens et habitans de Tholoze, AMT, AA 5, fol. xxii-xxxix ; également BB 268, cahier papier incomplet de la fin mais ayant conservé le titre du manuscrit fol. [1], le Vidimé ayant été amputé de la partie supérieure du fol. xxii ; éd. G. Cazals, « Une contribution inédite à l’historiographie toulousaine : Le Catalogue et summaire de la fundation, principalles coustumes, libertez, droictz, privilieges et aultres actes des cité, conté, capitoulz, citoyens et habitans de Tholoze de Guillaume de La Perrière (1540) », MSAM, 65 (2005), p. 139-162.
138 G. de LA Perriere, ibidem, fol. xxix v. Ceci était conforme à la tradition, puisque les articles 155 et 156 de la Coutume de Toulouse affirmaient que l’air de la ville rendait libre. H. Gilles, Les coutumes de Toulouse (1286) et leur premier commentaire (1296), Extrait du Recueil de l’Académie de législation, 6e s., 5/117e année, Toulouse, 1969.
139 G. de La Perriere, Miroir Politicque, p. 7.
140 Les seules chroniques authentifiées autour des années 1540 sont G. de La Perriere, « Chroniques 216 (1538-1539) », AMT, BB 274, p. 37-44 ; « Chronique 218 (1541-1542) », p. 51-56.
141 Platon, Polybe, Varron, Virgile, Cicéron, Plutarque, Tite-Live, Lucain, Horace, Ovide, Pline ou Vitruve les Saintes Ecritures, Ausone, saint Jérôme, saint Augustin, certaines « lois romaines », Le Mantuan, les Strozzi, Pontano, Pic de La Mirandole, Reuchlin, Léon Baptista Alberti.
142 L’œuvre est composée au nom de Pierre Salomon, greffier de la maison commune. G. de La Perriere, « À Trez honnorez Seigneurs Messeigneurs administrateurs pour la presente année du Capitole tolosain, Pierre Salomon, greffier et secretaire dudict Capitolle. Salut », AMT, BB 10, fol. [1-3 v.].
143 L’ouvrage fut publié par François Juste et Pierre de Tours, en un format In-16°, illustré de figures sur bois à chaque page. Brunet l’avait probablement consulté puisqu’il mentionne l’existence d’un exemplaire possédé par la bibliothèque impériale, relié avec une Comédie des sacrifices portant la même date, vendu en 1830. J.-C. Brunet, Manuel du libraire et de l’amateur de livres […], 1809 ; 5e éd. Paris, 1860-1865, 7 vol. ; Paris, 1990, p. 830. Cette première édition n’a semble-t-il pas été conservée. Nous avons travaillé sur la seconde, G. de La Perriere, Les cent con=//siderations d’amour, // composées par Guillaume de la // Perriere Tholo-//sain. // Avec une Satire contre// fol Amour. [par Gilles Corrozet] // A Lyon, // par Iaques Berion. // M. D. xlvviii. // 1548 ; In-32 °, sign. A.D., figure sur bois au titre, dédicace à Jean de Maleripe, fol. [A 1 v.-B].
144 G. de La Perriere, ibidem, fol. [A 3].
145 G. Du Pont, seigneur de Drusac, Les Controverses des Sexes Masculin et Femenin, Toulouse, Jacques Colomiès, janvier 1534.
146 Aucune Jacinthe ne figure dans l’arbre reconstitué par A. Navelle, Familles et notables du Midi toulousain au xve et xvie siècle, Fenouillet, 1991-1992, VI, p. 275, mais son existence est avérée par l’acte de légitimation obtenu de Charles IX par leur fille Marguerite. Archives Nationales, Trésor des Chartes, JJ 263, n. 94, fol. 39.
147 J. de Joinville, L’Histoire et chronique du Tres chrestien Roy S. Loys, IX. du Nom, et xliiii. Roy de France. Escripte par feu Messire Jehan Sire, seigneur de Jonville, et seneschal de Champaigne, amy et contemporain dudict Roy S. Loys. Et maintenant mise en lumière par Anthoine Pierre de Rieux. Avec Privilege du Roy. On les vend à Poictiers, à l’enseigne du Pelican, M.D.XLVII, In-4°, 8 fol., ccxviii fol. chiff. et 9 ff. non chiffrés pour la table. Nous avons travaillé sur l’édition donnée à Genève, par Jacques Chouët, en 1596 [BMT, Fa D 2554]. Antoine Pierre découvrit le manuscrit de la chronique de Joinville aux alentours de 1544 à Beaufort-en-Vallée, comme il le précise dans l’épître qu’il adresse « Au roy treschrestien, François premier de ce nom, Anthoine Pierre treshumble salut », fol. [*4]. Le prince et son historien. La vie de Saint Louis de Joinville, dir. J. Dufournet, L. Harf, Paris, 1997.
148 G. de La Perriere, « Chronique 225 (1548-1549) », AMT, BB 274, p. 97-111 ; « Chronique 226 (1549-1550) », p. 113-123 ; « Chronique 227 (1550-1551) », p. 125-134 ; « Chronique 228 (1551-1552) », p. 135-143 ; « Chronique 229 (1552-1553) », p. 145-157 ; éd. en ligne sur le site internet de Archives municipales de Toulouse http://www.archives.mairie-toulouse.fr/tresors/annales/trans_livre2/l2intro.htm
149 Jusqu’à 20 livres tournois l’année 1552-1553, pour laquelle il avait eu « double labeur en la composition de vostredicte hystoire ». G. Cazals, Guillaume de La Perrière, à paraître.
150 G. Cazals, « Le collège de Saint-Mathurin au xvie siècle », dans Histoire de l’enseignement du droit à Toulouse, EHDIP, 11 (2007), dir. O. Devaux, Toulouse, p. 17-53.
151 La Croix Du Maine, Du Verdier, Les bibliothèques françoises, IV, p. 113 ; Paul Louisy dans son article sur La Perrière dans la Nouvelle biographie générale, p. 519.
152 G. de La Perriere, Miroir Politicque, p. 183. L’homélie en question n’a pas été identifiée, nombreux sont en effet les sermons de saint Jean Chrysostome qui évoquent la pauvreté et la richesse, et aucun élément ne permet de découvrir lequel d’entre eux La Perrière avait traduit.
153 G. de La Perriere, Les // considerations // des quatre mondes, // a savoir est : // Divin, // Angelique, // Celeste, // Sensible : Comprinses en quatre Centuries de quatrains, // Contenant la Cresme de Divine // & humaine Philosophie. // Par Guillaume de la Perriere Tolosan. Redime me a calumnijs hominum. // [Marque de Macé Bonhomme] // A Lyon, Par Macé Bonhomme, & A Tolose, par Jean Moulnier. // 1552 // Avec privilege, pour dix ans [A la fin : ] Imprimé // par Macé Bonhomme // A Lyon // In-8°, 236 p. Privilège donné à Fontainebleau le 11 août 1551, fol. [A 1 v.-A 2] ; Henri II, Catalogue des actes, V, 1998, n. 9157.
154 Elle ne connut que deux éditions, S. Rawles, « Les deux éditions », p. 109-121.
155 G. de La Perriere, Miroir Politicque, fol. [A 3] et p. 8.
156 G. Cazals, Guillaume de La Perrière, à paraître.
157 G. de La Perriere, Miroir Politicque, p. 12.
158 Jean Bertrand, membre du Conseil du roi, avait été nommé premier président du parlement de Paris le 7 juillet 1550. H. Michaud, La Grande chancellerie et les écritures royales au xvie siècle, Paris, 1976, p. 55 sq.
159 G. de La Perriere, Miroir Politicque, p. 11.
160 Sa première chronique municipale, en 1539, l’année de l’ordonnance de Villers-Côterets, substitue définitivement le français au latin dans l’écriture des Annales, en expliquant que tous les capitouls pourront désormais en lire les enseignements. Dans un manuel de gouvernement destiné aux capitouls, le français s’imposait. Mais ce choix, conforme à ceux faits par les moralistes, s’opposait alors à l’élitisme de nombre de juristes qui se refusaient à faire place au vulgaire dans des œuvres politiques et juridiques. Ce n’est qu’à contre-cœur et sur ordre du roi que Budé rédigea en français son Institution du prince ; il ne la jugea pas digne d’être imprimée. R. Trinquet, « Les origines de la première éducation de Montaigne et la suprématie du latin en France entre 1530 et 1540 », Bulletin de la société des amis de Montaigne, 4e s., 16 (1968), p. 23-39. Calvin ayant donné l’exemple, par la traduction de son Institution, d’un « premier ouvrage de haute pensée rédigé en français », certains juristes commencèrent à composer en français les œuvres qu’ils adressaient à un public plus large ou dont ils espéraient qu’elles auraient une influence certaine sur l’évolution des institutions ou de la puissance publique ; ils réservaient le latin à leurs ouvrages techniques et savants, tel Du Moulin. B. Basdevant-Gaudemet, Aux origines de l’État moderne, p. 15-17. Le projet de François de Nesmond, enseigner le droit romain en français, fut considéré comme une hardiesse. J. Plattard, « Un novateur dans l’enseignement du droit romain ; François de Nesmond, professeur à l’université de Poitiers (1555) », RSS, 12 (1925), p. 141-147 ; T. Peach, « Le droit romain en français au xvie siècle : deux Oraisons de François de Nesmond », RHD, 60 (1982), p. 5-44 ; J. B. Atkinson, « Naïveté and Modernity : The French Renaissance Battle for the Literary Vernacular », Journal of the History of Ideas, 35 (1974), p. 179-198 ; J.-L. Thireau, « L’enseignement du droit », p. 35. En 1559, Bodin n’estimait pas encore la langue française suffisamment riche pour donner aux arts et aux sciences une expression correcte. Il s’adressa au « Sénat et peuple de Toulouse » en latin. Ce n’est qu’en 1576 que, jugeant les sources de la langue latine « presque taries », il se décida à publier ses Six livres de la République en français. J. Bodin, Oratio de instituenda in repub. Juventute ad senatum populumque Tolosatem, Tolosae, Petri Putei, 1559, In-8° ; éd. et trad. P. Mesnard, Paris, 1951, p. 52 ; J. Bodin, Les six livres de la République, texte de la 10e éd. revu par C. Frémont, M.-D. Couzinet, H. Rochais, Paris, 1986, p. 10. Le séjour toulousain de Bodin doit être situé entre 1554 et 1561, mais ses dates précises demeurent douteuses. H. Gilles, « La faculté de Toulouse au temps de Jean Bodin », dans Université de Toulouse et enseignement du droit xiiie-xvie siècle, Toulouse, 1992, p. 213-214.
161 Aristote, Apollonios de Tyane, Antisthène, Arcesilas de Pitane, Aristobole, Aristophane, Athénée, Bion, Cébès de Thèbes, Chilon, Démocrite, Démosthène, Diogène Laërce, Diphile, Homère, Isocrate, Platon, Plaute, Socrate, Xénophon, Zénon ; Apulée, Aulu-Gelle, Ausone, Bassus, Boèce, Cassiodore, Caton, Catulle, Cicéron, Claudien, Eutrope, Fulgence, Macrobe, Pline l’Ancien, Plutarque, Salluste, Solin, Tite-Live, Vopiscus Flavius.
162 Mis à part deux références explicites aux « prefaces » de Justinien, il mentionne quatre fois « le jurisconsulte », une fois Gaïus, les « Pandectes », les « Constitutions impériales », allègue trois fois les « jurisconsultes », une fois, enfin, la « règle de droit ». La lex oppia ne figurait pas dans le Corpus, et c’est chez Tite-Live qu’il en trouve mention. Les rares lois romaines qu’il invoque, comme la lex julia de adulteriis, ne font l’objet d’aucuns renvois explicites.
163 Le propos des auteurs n’était pas d’exiger des monarques des compétences techniques qui eussent pu remettre en cause leur propre rôle de conseillers. J. Krynen, « Le droit : une exception aux savoirs du prince », dans Le savoir du prince. Du Moyen Âge aux Lumières, dir. R. Halévi, Paris, 2002, p. 51-67, p. 51-67. Sur la faible utilisation du droit romain dans les « miroirs des princes », D. Quaglioni, « Il modello del principe christiano. Gli specula principum fra Medio Evo et prima Età moderna », dans Modelli nella storia del pensiero politico, dir. V. I. Comparato, 1987, p. 119 ; également M. Stolleis, Histoire du droit public en Allemagne. Droit public impérial et science de la police (1600-1800), trad. M. Senellart, Paris, 1998, p. 507.
164 La Renaissance est une période de remise en question de la science du droit. Les fulminations à l’encontre des juristes pleuvent, à commencer par celles de Luther qui les considère comme des ennemis du Christ exaltant le mérite des œuvres, aussi comme des « pleutres, bavards, avocassiers insolents ». Luther promet la potence à son fils s’il se met à étudier le droit, et recommande aux princes la même méfiance. C’est dans les Saintes Ecritures qu’il veut trouver l’ensemble des règles de droit. G. de LAGARDE, Recherches sur l’esprit politique, p. 132, 135-136, 148. Les humanistes s’attachent quant à eux à restituer la lettre authentique du Corpus. Angelo Poliziano (1454-1494) avait envisagé une édition critique du Digeste. Entre 1529-1531, parut à Venise une édition du Corpus sans glose (due à Gregor Meltzer dit Haloander). En 1553, la Littera Florentina, privée de sa glose accursienne, fut éditée par Lelio Torelli (1489-1569) secrétaire de Cosme Ier. E. Cortese, Il diritto nella storia medievale, II, p. 467 et 469 notamment note 26. Une grande autorité n’en est pas moins conservée à la science juridique par les plus grands jurisconsultes, voir à cet égard les diverses études de D. R. Kelley, M. Aschieri, J.-L. Thireau, et D. J. Osler citées en bibliographie et celles de M. Reulos dont « L’interprétation des compilations de Justinien dans la tradition antique reprise par l’humanisme », dans L’humanisme français au début de la Renaissance, Paris, 1973, p. 273-286 ; Id., Comment transcrire et interpréter les références juridiques (droit romain, droit canonique et droit coutumier) contenues dans les ouvrages du xvie siècle, Genève, 1985.
165 Raban Maur, Vincent de Beauvais, Arnaud de Villeneuve, Guillaume Durand, Lulle ou Roderic de La Borie, Pierre de Croissants, le pape Jean xxii (Jacques Duèze), Averroès, Avicenne, les Annales de France et celles de Toulouse.
166 Il connaît les œuvres d’Érasme, Thomas More, Juan Luis Vives, Johann Trithemius, Naucler, Johannes Camers, celles d’Alexandre Benoît, Nicolas Bérauld, Charles Bouelles, Guillaume Budé, Symphorien Champier, Philippe de Commynes, Antoine Geoffroy, Gilbert Grap, Jacques Lefèvre d’Etaples, Marguerite de Navarre, Claude de Seyssel, Jean Tixier de Ravisi.
167 Outre les œuvres de Dante, Pétrarque et Boccace, auxquelles il fait référence dans ses emblèmes, La Perrière cite dans le Miroir politicque Leon Battista Alberti, Antonio Beccadelli (le Panormitain), Ermolao Barbaro, Filippo Beroaldo, Flavio Biondo, Poggio Bracciolini, Gasparo Contarini, Janus Cornarius, Joannes Cuspinianus, Paolo Emili (Paul-Emile), Francesco Filelfo, Théodore Gaza, Campano Giannantonio, Paolo Giovio, Cristoforo Landino, Raffaele Maffei, Francesco Patrizi, Giovanni Pico della Mirandola, Pie II, Giovanni Pontano, Bartolomeo Sacchi, dit Platina, Angelo Poliziano, Julius Pomponius Laetus, Marco Antonio Sabellico, les Strozzi, Pier Paolo Vergerio l’Ancien, Maffeo Vegio.
168 G. de La Perriere, Miroir Politicque, p. 13, 20, 23 ; E. Sciacca, « Forma di governo », p. 180-181.
169 Sur la fortune de l’œuvre de Machiavel en France, G. Cardascia, « Machiavel & Jean Bodin », BHR, 3 (1943), p. 129-167 ; G. Procacci, Machiavelli nella cultura europea dell’Età moderna, Rome-Bari, 1995.
170 G. de La Perriere, Miroir Politicque, fol. [2-2 v.].
171 M. Senellart, Les arts de gouverner, p. 52-53. Cette évolution sémantique aboutit dans l’œuvre de Nicolas de Montand (Le Miroir des François, 1581, p. ix) : « jamais miroir ardent ny flammes etincellantes, n’ont eu leur lueur que par traicts de temps, et de petite portée. Mais le cristal cristalin de ce Miroir a une telle proprieté qu’il peut facilement penetrer iusques aux quatre coins et aux environs de ce Royaume […] ». Cité par D. Reynie, « Le regard souverain. Statistique sociale et raison d’Etat du xvie au xviiie siècle », dans La raison d’État : politique et rationalité, dir. C. Lazzeri et D. Reynié, Paris, 1992, p. 44. Cette évolution est aussi redevable de la technique de facture des miroirs. Au Moyen Âge, les miroirs, convexes ou métalliques, réflétaient tout au plus le visage. À la Renaissance, la constitution de panneaux de glaces permit l’extension de la surface réfléchissante reflètant les scènes d’intérieur, et en face d’une ouverture, le monde extérieur. C.-G. Dubois, L’imaginaire de la Renaissance, Paris, 1985, p. 38.
172 W. Berges, Die Fürstenspiegel des hohen und späten Mittelalters, Leipzig, 1938 ; H. Grabes, Speculum, Mirror und Looking-glass, Tübingen, 1973 ; D. M. Bell, L’idéal éthique de la royauté en France au Moyen Âge d’après quelques moralistes de ce temps, Genève-Paris, 1962 ; J. Krynen, Idéal du Prince ; A. Stegmann, « Le modèle du prince », dans Le modèle à la Renaissance, dir. C. Balavoine, J. Lafond, P. Laurens, Paris, 1986, p. 117-138 ; D. Quaglioni, « Il modello del principe christiano », p. 103-122 ; J. Krynen, L’empire du roi, p. 167 sq. ; M. Senellart, Les arts de gouverner ; R. J. Knecht, « François Ier et le Miroir des Princes », dans Le savoir du prince. Du Moyen Âge aux Lumières, dir. R. Halévi, Paris, 2002, p. 81-110.
173 Symphorien Champier, Le régime d’un jeune prince, Lyon, 1502 ; Jean Bouchet, Le chappelet des princes, en cinquante rondeaulx et cinq ballades, Paris, 1507 ; l’anonyme Instruction du jeune prince, 1507 ; Simon Bourgouyn, L’espinette du jeune prince, Paris, 1508 ; Symphorien Champier, La Nef des princes, Lyon, 1508 ; Jean Bouchet, L’Epistre au roi Louis XII sur les devoirs des rois, v. 1513-1514 dans les Epistres morales et familieres du Traverseur, Poitiers, 1545 ; Jean de Marre, Régime d’un prince qui commence vivat rex, dédié à Louis XII, Paris, BnF, manuscrit fr. 1219 ; Guillaume Budé, L’institution du Prince, 1519 ; la traduction de Gilles d’Aurigny, Le livre de police humaine, 1544 ; Jean Brèche, Brief traicté de la doctrine et condition des princes, 1544 ; Claude d’Espence, Institution du prince chretien, Paris-Lyon, 1546, s. l., 1548 ; la traduction par Jean Chaperon de Christine de Pisan, Le chemin de long estude, Paris, 1549 ; la traduction de Roseo da Fabriano, Le parrangon de vertu, pour l’institution de tous Princes, Potentatz et seigneurs chrestiens, Paris, 1549 ; De Launay, Institution des princes chrétiens, 1559 ; Michel de L’Hospital, De sacra Francisci II, Galliarum regis institutione, 1559 ; Jean Heluïs, Le Miroüer du prince chrétien, Paris, 1566 ; Jean Talpin, Institution d’un Prince chrétien, Paris, 1567. Il faut ajouter les très nombreuses éditions des miroirs étrangers, notamment, depuis 1529, du Relox de Principes d’Antoine de Guevara.
174 G. de La Perriere, Miroir Politicque, fol. [α 1 r.].
175 Ibidem, p. 198.
176 Pierre de Fontaugier, « Autre au lecteur » : « Qui pretendra conduire par raison / Soy, & ses biens, sa famille & mesnage, / Icy pourra trouver toute saison / Le propre lieu de son apprentissaige. / Mais c’est bien peu, car pourra d’advantage / Par ces escrits conduyre sa cité, / Et s’il est bien en eux exercité, / Et que son cœur sur-ce discours il fonde, / Digne sera (par sa dexterité) / de gouverner et regir tout le Monde », ibidem, fol. [α 3 v.] ; Bernard Du Poey de Luc compare l’auteur à Cadmus, fondateur de Thèbes, et au fils du roi de Thrace Orphée, qu’il considère sans doute comme la personnification de l’art adoucissant les instincts brutaux de l’homme. Bernard Du Poey de Luc, « Au seigneur de La Perriere, de son Miroir politicque. Sonnet », ibidem, fol. [α 4] ; Guillaume Du Cayret le place dans la lignée de Minos, Solon et Licurgue ; Guillaume de Cayret, « Sonnet », ibidem, fol. [α 5 v.] ; Guillaume Ydriard, enfin, croit qu’il recevra plus de bruit de son œuvre que Romulus lui-même, car « Romulus ne fonda qu’une ville, / et vous monstrés preceptes à foyson, / pour en fonder et parfaire cent mile » ; Guillaume Ydriard, « À Monsieur de La Perriere, auteur du present œuvre, et son singulier amy. Salut », ibidem, fol. [α 6].
177 Voir infra, p. 362.
178 En 1438, Leonardo Bruni, traduisant la Politique d’Aristote, utilise l’expression societas civilis, qu’il emprunte à Cicéron. L’expression est reprise dans les Loci communes theologici de Mélanchthon et la traduction de cette dernière œuvre du latin en français, en 1551, donne société civile pour societas civilis. L’expression se retrouve également chez le traducteur d’Aristote Louis Le Roy, en 1570, et on la retrouve en anglais : dans la traduction anglaise des Politiques, en 1598, on parle en effet de civil society, et en 1642, Hobbes, dans le De cive, évoque aussi la « société civile ».
179 G. Cazals, Guillaume de La Perrière, à paraître.
180 Voir la liste donnée en bibliographie, infra, p. 363 sq.
181 G. de Lagarde, Recherches sur l’esprit politique, p. 292.
182 Et tenter d’échapper à cette « mythologie de la cohérence » qui envahit l’histoire de la pensée politique, et que dénonce Q. Skinner, « Meaning and Understanding in the History of Ideas », dans Visions of Politics, I : Regarding Method, Cambridge, 2002, p. 67 sq.
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