Monnaie et confiance dans les sociétés marchandes
p. 103-113
Texte intégral
Aristote : « La monnaie est pure loi. Mais la chrématistique, le désir infini de richesse monétaire, est une force destructrice de la cité. »
Simmel : « C’est dans la monnaie que l’esprit moderne trouve son expression la plus parfaite ».
1Il existe deux conceptions antagoniques, donc irréconciliables de l’économie :
- L’hypothèse de la primauté de l’individu générique appelé homo economicus, supposé autosuffisant, parce que son désir s’exprime selon une conception naturaliste de la valeur appelée « utilité ».
- L’hypothèse de la primauté du collectif (la société préexiste) dont l’expression économique est la monnaie, posant la question de la nature du désir comme interrelation des membres de la société.
2L’hypothèse de l’homo economicus est le fondement de ce que ses protagonistes appellent la science économique. Quelle est la signification de l’hypothèse qui autorise de poser l’individu indépendamment de tout lien social constitutif ? Quelle est la nature des échanges appelés marchés entre sujets supposés n’avoir aucun lien social constitutif de leurs désirs d’objets ? Comment les échanges marchands entre agents économiques qui n’ont aucune relation directe, ne connaissent ni les besoins, ni les désirs des autres, font-ils système ? Qu’ont-ils de commun qui fait cette coordination sociale à leur insu ?
3Ce questionnement a pris une grande importance politique dans les trente dernières années qui a connu une avancée spectaculaire de ce qu’il est convenu d’appeler l’ultralibéralisme. L’idéologie dite du fondamentalisme de marché, portée par la contre-révolution anglo-saxonne de REAGAN et THATCHER, prétend faire de l’économie une science neutre, c’est-à-dire détachée de tout lien avec ce qu’il est convenu d’appeler les sciences sociales. Il est donc essentiel de comprendre les apories de cette « théorie de la valeur » pour accéder à la compréhension de la monnaie comme institution pivot des rapports économiques.
I. L’aporie du lien social sous l’hypothèse d’une naturalisation de la valeur
4Les individus n’ont aucun lien social, mais ils ont une nature commune appelée utilité qui leur est innée. Le rapport du sujet à son désir, est supposé donné. En outre, les individus connaissent parfaitement les caractéristiques de la totalité des objets qu’ils sont susceptibles d’échanger. Cette connaissance parfaite s’étend aux biens futurs. Ces hypothèses font de chaque individu un être calculateur hors société, recherchant son utilité optimale. Milton FRIEDMAN dans « free to choose », dit clairement que sous l’hypothèse d’une naturalité de la valeur, le mécanisme anonyme du marché permet aux individus de ne pas avoir de rapports directs, de se concentrer sur leurs désirs d’objets bornés par des contraintes naturelles de rareté. Encore faut-il comprendre comment les individus doivent se comporter pour parvenir à une cohérence appelée équilibre, la seule qui permette d’éviter toute interaction entre individus.
5En effet, il faut une logique découverte des prix d’équilibre présents et futurs pour que l’équilibre général des marchés puisse être atteint. WALRAS fut le premier à poser le problème en terme normatif. Il est nécessaire que le système des marchés obéisse à la logique d’un acteur collectif métaphorique, le Secrétaire de Marché. Cela n’est possible que si les individus tiennent les prix pour fixes à chaque étape de l’ajustement walrasien. Bien que les prix bougent dans le tâtonnement vers l’équilibre, les individus ne cherchent pas à agir stratégiquement sur les prix. Ils recalculent leurs offres et leurs demandes de biens présents et futurs aux prix affichés à chaque étape. La démonstration mathématique que cette logique aboutit à un équilibre général a été faite par Arrow DEBREU en 1954. L’équilibre général intertemporel existe si tous les individus sont placés dans ces conditions. Mais elles sont séparées de toute réalité empirique.
6L’Équilibre est-il le meilleur des mondes possibles ? C’est ce qu’affirme l’ultralibéralisme après la contre révolution de REAGAN et THATCHER qui ont instauré l’idéologie du fondamentalisme de marché. Pourtant l’essor de l’économie financiarisée qui a découlé de cette idéologie n’a pas conduit à un état de bien-être social optimal, bien au contraire. Les travaux de PIKETTY et ses collaborateurs montrent que la déformation de la distribution des revenus s’est caractérisée par une stagnation et une baisse dans certaines sous-périodes du salaire réel médian, accompagnée d’une déformation inégalitaire de la distribution des revenus disponibles par tranche de revenu. Ces inégalités sont exacerbées aux États-Unis et amplifiées lorsqu’on passe de la mesure du revenu à celle de la richesse. Ainsi, aux États-Unis, le top 10% de la population capte 50% du revenu net avant impôt et 75% de la richesse.
7Dès lors que l’on a compris que le paradigme de l’économie pure ne peut résoudre aucun des problèmes concernant la répartition des richesses, parce que ces problèmes proviennent de la nature même de l’accumulation capitaliste, on doit affronter la question du choix social. À cet égard l’économie de marché reposant sur les individus séparés est impuissante. En effet, le théorème de Kenneth ARROW (1951) est d’une importance fondamentale. Il stipule qu’il est impossible de construire une fonction collective des intérêts individuels qui soit compatible avec les conditions de cohérence du choix social. Pour que l’économie fasse ce qu’on attend d’elle, c’est-à-dire contribue à promouvoir le progrès inclusif des sociétés, sa compréhension doit être celle d’une science sociale.
II. Hypothèse alternative : dénaturaliser la valeur et conceptualiser la monnaie
8La monnaie régit les rapports économiques. Ceux-ci sont entièrement contenus dans les rapports sociaux. Ils en partagent tous les ressorts. La relation la plus fondamentale dans une société humaine est le langage qui donne sens pour autrui dans le rapport entre signifiant et signifié. Cette relation est structurée par la grammaire.
9Le sens pour autrui dans l’ordre économique est la valeur qui est le langage du nombre dont la forme est la monnaie. La grammaire de la monnaie est la comptabilité. La relation quotidienne par laquelle le langage de la monnaie est pratiqué est le paiement qui réalise la valeur des biens dans les échanges. C’est le paiement qui réalise la valeur pour autrui, comme c’est la locution qui produit le sens. La relation entre monnaie et objet marchand est équivalente à la relation entre signifiant et signifié. En tant que signifiant de la valeur des marchandises, la monnaie établit l’équivalence permettant de désigner par des unités identiques des biens qualitativement incomparables.
10On peut énoncer que le lien social appelé paiement est ce par quoi la société dans la dimension des rapports économiques (l’ensemble des possesseurs de monnaie) rend à chacun d’entre nous ce qu’elle juge que nous lui avons apporté par notre activité. Le paiement doit être final, c’est-à-dire validé par la société pour réaliser la valeur.
11Il s’ensuit que, dans cette conception, la coordination des échanges économiques est objectivable et observable. C’est le système de paiements qui est une institution fondamentale de la société et qui fait de la monnaie un bien public. Elle relie les individus en tant qu’acteurs économiques à la souveraineté politique.
12Le schéma 1 décrit l’organisation du système des paiements modernes dans laquelle la création de paiements est principalement d’origine bancaire, que les moyens de paiements au détail soient scripturaux ou électroniques. Le système des paiements est hiérarchisé parce que la finalité des paiements entre les acteurs économiques (X, Y, Z…) implique une compensation et un règlement ultime quotidien entre les banques (A, B,…) des flux de paiements issus des transactions entre les agents économiques. Ce règlement s’effectue dans la liquidité ultime, celle qui est d’acceptation unanime et qui est émise par la banque centrale.
13Le système est donc hiérarchisé parce que l’émetteur de la forme ultime de monnaie dans l’espace de souveraineté qui recouvre l’espace de circulation de la monnaie est le tiers de confiance dans le processus de règlement. Le système monétaire est isomorphe à un système juridique : ensemble de principes, de règles et de procédures qui respectent la loi monétaire de la finalité des paiements.
14La coordination des échanges réalisée dans le système de paiements est objective et observable. Ce n’est pas un équilibre, c’est le résultat de l’observance des règles d’un système : règles d’émission et de destruction des moyens de paiement, règles de compensation et de règlement, à partir desquelles se fait la coordination des échanges monétaires. Le principe surplombant qui institue l’espace de commensurabilité de la valeur est l’institution souveraine de l’unité de compte.
15 Le système de paiements étant une institution, il n’est pas appropriable. Car le langage n’appartient à personne. En revanche il doit être guidé. Il l’est par le politique. La monnaie est politique. On ne peut pas trouver opposition plus grande avec le projet utilitariste : dans celui-ci la coordination n'existe que par un équilibre normatif, dit « équilibre général ». La monnaie y est neutre. Elle n’a aucune influence sur le système des prix d’équilibre. En théorie elle n’existe pas. Dans la conception du système de paiements, la monnaie est la première entité économique, celle dont tous les actes économiques dépendent.
III. La liquidité et l’ambivalence de la monnaie
16Que veut-on dire lorsqu’on énonce que la monnaie est ambivalente ? Il faut revenir à la question théorique fondamentale du désir humain. L’utilité, en tant que substance psychologique inhérente à l’individu et déterminant entièrement les désirs d’objets, n’existent pas. La psychanalyse nous apprend que le désir se rapporte à autrui. Les individus ne peuvent exister que par la reconnaissance des autres. C’est un désir d’être parce que les individus souffrent d’un manque d’être. Il s’ensuit une présomption de rivalité réciproque parce qu’autrui se trouve dans la même disposition.
17La séparation marchande est paradoxale parce qu’elle détourne la rivalité sur l’appropriation. Mais elle ne supprime pas le manque à être. Il est possible de montrer que, si le réseau des désirs d’objets forme un système indécomposable, la dynamique du désir d’accaparer se polarise sur un objet unique qui est par là même exclu du domaine des objets particuliers : c’est la liquidité.
18La liquidité est ce que chacun désire parce qu’il (ou elle) postule que tous les autres la désirent dans un même espace monétaire (externalité de demande). Ce qui est créé par la croyance unanime ressortit à la structure des rapports de l’individu à l’Autre selon LACAN. La recherche par chacun de ce qui peut être accepté par tous comme la valeur en soi produit une polarisation qui est le point fixe d’un processus endogène. Il est fragile parce que toute croyance collective se forme par un processus autoréférentiel à partir de la multiplicité des croyances individuelles.
19On peut alors comprendre l’ambivalence de la liquidité. D’un côté la liquidité est une puissance collective de la société dont l’acceptabilité générale fait protection à l’égard de ses membres. Elle s’exerce dans le système des paiements qui est placé sous l’égide de la souveraineté. D’un autre côté, c’est un désir illimité d’appropriation. La liquidité est à la fois le support et le but de l’accumulation de la richesse privée. L’ambivalence de la monnaie résulte de ces deux faces contradictoires du lien social.
20En tant que pouvoir d’appropriation, faire de l’argent avec l’argent, le désir d’accumulation d’argent engendre la logique financière du momentum, en opposition avec le postulat de l’efficience de la finance. Le momentum résulte de l’interaction stratégique des acteurs sur les marchés financiers qui engendre des mouvements collectifs dont procède l’instabilité de la finance aiguillonnée par l’effet de levier : « s’endetter plus pour gagner plus ». Les marchés financiers soumis au momentum n’ont pas de valeurs d’équilibre. Il en résulte des spirales entre l’endettement et la hausse des prix d’actifs, appelées bulles spéculatives qui induisent des vulnérabilités cachées dans les bilans de tous les acteurs du jeu de l’argent.
21L’expression macroéconomique de cette dynamique est le cycle financier : essor, euphorie, crise, panique, récupération. Les ressorts subjectifs en sont : le mimétisme, la contagion, l’aveuglement collectif, le déni. Ce sont les ressorts collectifs du dérèglement de la finance.
IV. La confiance et la politique de la monnaie
22Réguler les contradictions des motivations de rechercher la liquidité pour maîtriser l’ambivalence est au principe de la politique de la monnaie dont la finalité est duale : conserver l’unité de compte, c’est la stabilité monétaire ; préserver l’intégrité des paiements, c’est la stabilité financière. La manière d’agir dans ces deux domaines est de préserver la confiance des usagers de la monnaie. La politique de la monnaie est donc la mise en œuvre des modes de légitimation de l’institution monétaire. Ce sont les formes de la confiance.
23La confiance dans la monnaie n’est donc en rien une disposition psychologique innée, une sorte « d’utilité ». C’est un système social incorporé qui est structuré en trois formes hiérarchisées et articulées aux règles du système de paiements.
24La confiance méthodique est horizontale et routinière. Elle s’établit et se reproduit dans les paiements quotidiens qui rythment les transactions entre les agents. Elle dépend de règles de conduite non écrites grâce auxquelles la fluidité des paiements est préservée et donc les coûts des transactions réduits.
25La confiance hiérarchique est verticale et polarisée. Elle s’établit entre les usagers de la monnaie et la puissance publique responsable de l’intégrité du système des paiements : dans le monde contemporain, la banque centrale. La puissance souveraine qu’elle exprime est celle du prêteur en dernier ressort dont la finalité est la préservation de l’intégrité du système de paiements et à travers elle de toute l’économie marchande.
26La confiance éthique implique la souveraineté dans un but de légitimation du pouvoir. La banque centrale reçoit délégation de souveraineté dans l’ordre de la monnaie par la constitution dont le garant est la représentation du peuple.
27On peut donc dresser la correspondance entre les formes de la confiance et les règles du système des paiements :
Formes de la confiance | Règles du système de paiements |
Méthodique | Circulation des dettes et transferts des risques |
Hiérarchique | Compensation et règlement |
Éthique | Conservation de l’unité de compte |
28 Plus fondamentalement l’ordre monétaire et l’ordre politique participent d’une même visée de cohésion sociale : l’acceptation des règles monétaires par les sujets de l’échange marchand pour l’un, l’adhésion des citoyens à la loi pour l’autre. Pour pouvoir réaliser cette finalité collective, les entités qui reçoivent délégation de la souveraineté, l’État en tant qu’exécutif politique d’un côté, la banque centrale de l’autre, doivent collaborer sous l’égide d’un principe unique de souveraineté qui les englobe : l’ordre constitutionnel (schéma 2).
29L’ordre constitutionnel incorpore et formalise les valeurs qui font que les membres d’une même communauté se reconnaissent entre eux comme citoyens d’une même nation. Il se nourrit de symboles qui actualisent le mode d’appartenance que l’on appelle la culture d’un peuple. Cette culture plonge ses racines profondément dans l’histoire. La constitution formalise ce réservoir de valeurs collectives dans des principes et des normes que les citoyens acceptent en tant que membres d’un peuple qui les a instituées. Tel est le principe de souveraineté.
30L’existence des crises qui traversent l’histoire monétaire et l’histoire politique démontre que la préservation du système des formes de la confiance ne va pas de soi. Ce sont des crises de confiance. La nature et l’intensité des crises découlent de la mise en doute du niveau de confiance qui dégrade le respect des règles du système de paiements.
V. Les crises de confiance
31Une façon de distinguer les différents types de crise est de les « classer » selon la forme et l’ampleur de la détérioration de la confiance qui leur est associée.
Formes de confiance, règles des paiements et types de crises | ||
Formes de la confiance | Règles des paiements | Types de crises |
Méthodique | Circulation des dettes et transferts des risques | Crises financières mineures (idiosyncratiques) |
Hiérarchique | Compensation et règlement | Crises bancaires systémiques |
Ethique | Conservation de l’unité de compte | Crises monétaires |
32Le système de paiements reflète les tensions et les dysfonctionnements qui parcourent la société, qui se transmettent dans la structure des dettes et y créent des fragilités par rapport à la finalité des paiements. C’est dans le système de paiements que s’accumulent les difficultés financières à travers l’incapacité de régler des montants de plus en plus élevés de dettes et la résistance des créanciers d’accepter de les reporter dans le temps. La possibilité que ces doutes se transforment en crise de confiance généralisée est le risque de système.
33Le risque de système désigne un échec généralisé des intermédiaires et des marchés financiers à coordonner les comportements des agents économiques demandeurs de moyens de financement et de ceux qui allouent leur épargne. C’est, en effet, le risque d’une configuration dans laquelle les actions des agents individuels pour tenter d’amélioration leur situation financière détériorent la situation de tous. La réalisation de ce risque dans une crise systémique paralyse donc les canaux monétaires par lesquels la mobilisation de l’épargne disponible se fait, laquelle dépend de la confiance. L’ampleur et l’étendue d’une crise dépendent donc du niveau de confiance qui est endommagé, voire détruit.
34Lorsque la confiance hiérarchique est endommagée, l’ordre monétaire dans son ensemble peut être mis en doute. Il révèle sa véritable nature. La monnaie n’appartient pas à l’État mais, comme le montre le schéma 2, elle a avec l’État des liens organiques dont la dissolution détruit la cohésion sociale et transmute la crise financière en crise politique. Pour l’éviter il faut absolument que la banque centrale et l’État apparaissent comme deux institutions légitimes d’une même souveraineté. C’est la confiance éthique qui préserve le principe de souveraineté dont dépend la cohésion de la nation. La confiance éthique est la croyance que la puissance de la monnaie n’est pas déployée pour satisfaire des buts arbitraires en faveur de groupes d’acteurs privés ou d’intérêts politiques partisans. La confiance éthique est donc celle qui évite que la société se déchire dans des conflits dont la monnaie est l’enjeu. Lorsque la confiance éthique est ébranlée, la monnaie légale n’est plus perçue comme légitime.
35La crise atteint son paroxysme lorsque l’espace de la mesure des valeurs perd son homogénéité, chacun cherchant à faire prévaloir sa propre unité de compte. La cohérence des prix est détruite et le temps économique disparait. Il n’y a plus d’opportunité d’oser des projets, plus de temps pour entreprendre. Seule compte l’immédiateté de la recherche fiévreuse d’une protection du patrimoine existant.
36Le résultat de cette recherche finit par se polariser sur une nouvelle croyance commune, dont le support est souvent extérieur à l’espace monétaire antérieur. Les crises monétaires extrêmes ne peuvent être endiguées que par une réforme monétaire instituant une nouvelle unité de compte ; ce qui implique un changement de la configuration politique capable de polariser l’acceptation unanime sur une nouvelle forme de monnaie.
Auteur
Professeur émérite de sciences économiques, Université Paris Nanterre,
Conseiller scientifique Cepii et France Stratégie, membre honoraire de l'IUF
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La loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations…
Dix ans après
Sébastien Saunier (dir.)
2011