Pierre Hébraud, l’itinéraire universitaire
p. 11-20
Texte intégral
1Plus de trente après la disparition de Pierre Hébraud, la doctrine du professeur toulousain devient pour la première fois un objet d’étude à part entière, celui d’un colloque d’abord, et désormais celui de la publication de ses actes. Le travail aurait pu commencer directement par les aspects les plus saillants de sa pensée, ses influences, sa portée, sa place au sein de la doctrine privatiste de son temps. Mais parce que ce « temps », précisément, couvre une période de profonde transformation des facultés de droit et de la production universitaire, et, aussi, parce que les trente dernières années ont quelque peu effacé le souvenir de Pierre Hébraud des mémoires de ceux qui ne l’ont pas connu, une présentation de son parcours universitaire a paru bienvenue avant que ne commence vraiment la réflexion sur sa doctrine, afin que l’homme ne disparaisse pas totalement derrière l’auteur et le professeur.
2Réputé pour sa « pudeur extrême1 », Hébraud se laisse pourtant difficilement saisir. Et les archives universitaires laissent à son sujet un sentiment mitigé. D’un côté, elles paraissent assez substantielles, composées de dossiers de carrière, de correspondances administratives, de registres de délibérations de l’Assemblée et du Conseil de Faculté2. Mais d’un autre côté, la plupart de ces documents limitent notre connaissance à une dimension purement administrative. De ces premières sources, deux impressions se détachent particulièrement. La première concerne les archives elles-mêmes, qui sont peu bavardes. Les dossiers administratifs sont assez succincts, depuis le dossier étudiant d’Hébraud jusqu’à celui de sa liquidation de pension. Quant aux registres de délibérations, ils relèvent d’une langue très neutre, policée, qui efface bien souvent les positions personnelles derrière les seules décisions collectives, rendant difficile l’appréhension d’un parcours individuel. Le second constat concerne plus précisément Hébraud. Malgré ces réserves, ces premières sources suffisent en effet à imposer rapidement une double impression, qui se confirme au fil des pages et des procès-verbaux : celle, objective, mesurable, de la présence sans faille du maître dans les institutions facultaires (assemblée, conseil) et même au-delà (notamment aux séances de l’Académie de Législation de Toulouse, où, d’après le décompte de Pierre-Louis Boyer, il figure parmi les membres les plus présents3). Une assiduité et une régularité qui témoignent tout à la fois d’une implication personnelle, d’une disponibilité sans faille, d’un dévouement, aussi, dont on trouve souvent la trace et le témoignage direct. L’autre impression, plus subjective et moins mesurable, qui se dégage des archives, est celle de la modestie du professeur. Modestie, et en même temps, autorité ou fermeté. Ses interventions sont, en effet, toujours discrètes, mesurées, plutôt rares même ; mais elles emportent bien souvent la conviction des commissions et assemblées où il siège.
3Ces archives universitaires permettent de retracer l’essentiel du parcours d’Hébraud. Mais, pour les raisons indiquées, elles sont aussi insuffisantes pour nous restituer le personnage de manière plus incarnée, plus animée. Et si une étude doctrinale peut complètement se passer d’une telle présentation, de la connaissance d’un parcours de vie, fût-il professionnel, c’est en fait Hébraud lui-même qui nous invite à ne pas délaisser totalement cette approche, lorsque, s’adressant aux agrégatifs de 1959, trente ans après la mort d’Hauriou (et à propos de sa doctrine civiliste), il juge nécessaire « de faire allusion à sa personne », présentée comme « la clé de la pénétration de ses idées4 ». Sans avoir la prétention d’aller si loin, mais pour compléter les archives administratives et universitaires, il a alors paru judicieux de se tourner vers des « archives orales » ou « vivantes », c’est-à-dire vers les contemporains d’Hébraud qui peuvent encore témoigner à son sujet et nous permettre de recueillir une connaissance directe non recelée par les archives officielles. A ce titre, de très sincères remerciements doivent être adressés à tous ceux qui ont généreusement accordé plusieurs heures d’entretien et de discussion : ses anciens étudiants et anciens élèves, tout d’abord (les professeurs Jean Devèze, Jacques Poumarède, Gabriel Roujou de Boubée et Daniel Tomasin), qui ont pu apporter leur éclairage sur les années 60 et 70 notamment ; M. le Président Jean-Pierre Pech, ensuite, qui partagea avec Hébraud, de 1968 à 1975, toutes ses fins d’après-midi, le jeudi, pour la préparation des candidats au concours de l’ENM ; et enfin, plus particulièrement, M. Michel Hébraud, l’un de ses fils, très ému à l’idée que la Faculté consacre une journée d’étude à l’œuvre de son père et qui a très aimablement accepté d’apporter son propre témoignage sur des points qui lui tenaient à cœur, non nécessairement liés à la doctrine même de Pierre Hébraud, mais toujours aux conditions de sa production intellectuelle.
4C’est donc l’ensemble de ces ressources qui nous donneront à voir les grandes lignes du parcours d’Hébraud : aussi bien les restitutions officielles des archives universitaires que les témoignages informels de ses contemporains. Un ensemble qui met l’accent sur deux points essentiels : celui d’une vie intellectuelle développée au sein d’une institution profondément transformée au cours du XXe siècle et celui d’une doctrine qui ne se laisse pas réduire à la seule procédure civile à laquelle le nom d’Hébraud est le plus naturellement associé.
5Rien ne va mieux, sans doute, à Hébraud que cet adage très connu du XVIe siècle : « Paris pour voir, Lyon pour avoir ; Bordeaux pour dispendre, et Toulouse pour apprendre ».
6« Toulouse pour apprendre », dans le cas d’Hébraud, cela signifie d’abord s’établir à Toulouse pour commencer ses études supérieures. Pierre Hébraud n’est pas toulousain d’origine. Né à Nîmes en 1905, il obtient son baccalauréat C Mathématiques en 1922 dans l’Académie de Montpellier, alors que ses parents viennent de déménager à Perpignan où son père exerce la profession de gérant du Crédit Lyonnais5. « Toulouse pour apprendre », c’est donc d’abord le choix d’une faculté en particulier, alors que la proximité géographique indiquait davantage celle de Montpellier. D’après Michel Hébraud, au sortir du lycée, son père se serait plutôt destiné, par goût, à des études scientifiques et souhaitait préparer Polytechnique. Il en aurait été dissuadé par un ophtalmologue de la rue Ozenne, à Toulouse, qui, lui diagnostiquait alors une cécité certaine dans les trois ans à venir, c’est-à-dire autour de ses vingt ans. Et c’est ce médecin qui lui aurait recommandé, ainsi qu’à ses parents, d’envisager plutôt de commencer des études de droit, réputées plus brèves et donc possiblement achevables avant que l’infirmité ne devînt totale6.
7Les études de Pierre Hébraud, en fait, ne furent pas si brèves que l’imaginait alors le spécialiste de la vision. La volonté d’embrasser la carrière universitaire devait en effet mener Hébraud jusqu’au doctorat, obtenu en 1929. En revanche, elles furent fulgurantes. « Toulouse pour apprendre », dans le cas d’Hébraud, cela signifie donc aussi apprendre auprès des grands maîtres et s’en faire remarquer par des résultats brillants. Son parcours est émaillé de Premiers Prix en droit civil dès sa 1e année d’études en 1923, de mentions Très Bien avec éloges de la faculté, sans discontinuer de 1924 à 1927, date à laquelle il achève ses trois années de cours de doctorat. Il excelle alors dans toutes les disciplines, avec des notes qui se situent toujours entre 18 et 20 : droit civil, droit romain, histoire du droit public et privé, droit administratif et constitutionnel7. Ses maîtres sont le doyen Cézar-Bru, titulaire de la 1e chaire de droit civil, le professeur Perreau, qui occupe la 2e chaire de droit civil, celle‑là même qui reviendra à Hébraud en 1937 ; Ricol, qui règne en maître sur l’enseignement de la procédure civile de 1919 à 1944 ; Fraissingea et Gabolde en droit commercial, dont Hébraud ne garde pas un très fort souvenir ; Fliniaux et Thomas en droit romain et histoire du droit ; Hauriou, évidemment, l’une de ses sources d’inspiration et d’admiration, en droit administratif et constitutionnel8.
8Après son doctorat, obtenu avec mention Très Bien et les éloges du jury, distingué par un prix de thèse et un prix du ministère de l’Instruction Publique décerné par l’Académie de Législation de Toulouse, « Toulouse pour apprendre », désigne alors la préparation de l’agrégation de droit privé, qu’il obtient à 26 ans, au 3e rang, dans le même concours qui devait classer major son ami Gabriel Marty9. A ce moment-là, la cécité d’Hébraud a fortement progressé, au point qu’il doit passer le concours avec l’aide d’un lecteur. Sa carrière, elle, peut enfin commencer, selon les canons de l’époque : il est d’abord affecté à l’université de Poitiers comme agrégé, en 1931 ; quatre ans plus tard, il y devient professeur, titulaire de la chaire de droit romain, qu’il occupera deux ans, avant de succéder à Perreau, à Toulouse, dans la 2e chaire de droit civil. Les années qui précèdent la guerre sont donc celles d’un jeune professeur qui prend progressivement sa place parmi ses anciens maîtres, lesquels dominent encore, jusqu’à la fin de la guerre, la faculté toulousaine. Dans cette courte période, Hébraud marque déjà son attachement à Toulouse, qu’il ne quitte pas vraiment, acceptant d’y multiplier les suppléances entre 1931 et 1937. Derrière cette variété d’enseignements, dont il se prévaut dès le mois de décembre 1935 lorsqu’il cherche à obtenir une mutation à Toulouse, pointe déjà sa spécialité en procédure civile, mise en avant par la mention de sa collaboration avec Cézar-Bru (Des Référés, 1938) et ses chroniques de procédure à la Revue critique et au Recueil Sirey10.
9A la fin des années 30, la guerre et les événements qui la précèdent apparaissent pudiquement et ponctuellement dans les registres de la faculté, alors même que celle-ci en subit une très forte perturbation. La guerre d’Espagne surgit ainsi dans les délibérations de 1937 à propos de Leopoldo García-Alas, professeur de droit civil et recteur d’Oviedo, ancien sous-secrétaire d’Etat du ministre de la Justice sous l’éphémère Seconde République et membre du Parti Républicain Radical Socialiste. Condamné à mort par la Junte de Burgos en janvier 1937, l’universitaire espagnol attire l’attention de ses collègues étrangers et suscite une demande de grâce de la faculté toulousaine, saisie – après l’exécution du professeur espagnol – par Maury en sa qualité de directeur de l’Institut de droit comparé11. La guerre apparaît également avec la mention de la mobilisation des étudiants et des professeurs en 193912, puis celle de la défaite, l’année suivante13, lorsque le doyen Magnol doit fustiger l’ « esprit de jouissance » et les « relâchements » des Français devant les étudiants des trois années de licence réunis14. Elle s’invite également lorsque le sort des étudiants prisonniers est en jeu, ceux pour lesquels Vedel, lui-même prisonnier de guerre, réclame des manuels de droit afin d’organiser les cours de droit au sein de l’Oflag XIII15, comme ceux qui, soumis au STO, font l’objet des plus vives alarmes de l’Association Générale des Etudiants de Toulouse en 194316. A chaque conseil, chaque assemblée, elle se rappelle au souvenir des présents par la liste des éloignements et des radiations multipliés entre 1941 et 194417. A certaines périodes, la moitié des enseignants manquent alors à la faculté. Pendant ces années de désorganisation, Hébraud figure parmi les enseignants les plus impliqués, avec Marty, Dauvillier, puis Ourliac, autour du doyen Magnol et auprès des étudiants, pour maintenir la faculté en état de fonctionner.
10Ainsi, au printemps 1940, Hébraud continue d’accepter de représenter la faculté de Toulouse à Rabat, au Centre d’Etudes Juridiques, pour y organiser les examens, malgré les vicissitudes de la guerre. L’épisode sera particulièrement pénible pour Hébraud, qui se trouve piégé par l’entrée en guerre de l’Italie, qui dégrade les relations franco-marocaines et oblige le professeur toulousain à différer son retour, à renoncer à son voyage initial vers la France et à rentrer seul, en plusieurs semaines, en traversant l’Espagne en butte à « la mauvaise volonté de certaines autorités espagnoles18 ». Un retour vécu comme un cauchemar, par Hébraud mais aussi par ses collègues et sa famille, sans nouvelles du professeur et sérieusement inquiets pour son sort.
11De retour à la Faculté, Hébraud s’occupe de la réorganisation des examens, qu’il faut adapter aux contraintes de la guerre et de la défaite, puis des enseignements. Il siège dans diverses commissions, s’occupe de favoriser la diffusion de cours sténographiés pour les étudiants absents19, représente la Faculté auprès de l’Université et s’exprime personnellement dans une commission de réflexion sur la réforme de l’entrée à l’université, en se montrant très réservé sur les projets d’examens sélectifs envisagés par le gouvernement de Vichy pour lutter contre la médiocrité prétendue du baccalauréat20.
12Côté enseignement, il est parmi les plus actifs. Alors que la faculté doit rappeler ses professeurs honoraires pour faire face à l’absence d’une partie du corps enseignant (Cézar-Bru, Gheuzi, Perreau), Hébraud assure en effet de très nombreuses suppléances de collègues. Il est celui qui en accepte la plus grande variété et enseigne aussi bien l’histoire des doctrines économiques que la législation coloniale, le droit commercial, la procédure civile et l’économie politique, auxquels s’ajoutent deux créations nouvelles en 1941 et 1943 : le cours de droit des assurances, financé par une compagnie privée, puis le cours de droit d’enregistrement, qui avait été supprimé en 1914, faute de financements suffisants, et qu’Hébraud travaille inlassablement à rétablir depuis son retour à Toulouse en 1937. Alors jeune professeur, Hébraud déployait un argumentaire qui témoignait déjà de sa conception et de son approche du droit, notamment par son invitation aux privatistes à regarder la fiscalité des transactions civiles et commerciales comme un « élément indispensable à la pleine compréhension des principes du droit civil21 ».
13Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, la Faculté de droit change imperceptiblement de visage. Quantitativement, elle ressemble encore à la faculté d’avant-guerre : moins d’une vingtaine d’enseignants (professeurs et agrégés confondus), quelques centaines d’étudiants à peine, trois amphithéâtres, aux anciennes facultés, à côté de la faculté des Lettres, un secrétariat commun : telle est la physionomie de la faculté jusqu’au milieu des années 60. Si on observe bien, cependant, les premiers changements commencent à apparaître. Et parmi eux, un changement de génération, qui fait pleinement émerger en responsabilité un groupe de professeurs où se démarquent particulièrement Marty, Hébraud et Raynaud d’une part, Dauvillier et Ourliac d’autre part22.
14Dans ce groupe, on serait tenté d’imaginer Hébraud moins impliqué, institutionnellement, que ses collègues. D’abord, parce qu’à cette époque, il est l’une des figures principales de la doctrine toulousaine, comme en témoigne son rayonnement universitaire ou ses travaux à l’Académie de Législation de Toulouse lorsqu’elle est sollicitée pour donner son avis23. Ensuite, parce que d’autres figures, comme Marty ou Ourliac, semblent l’éclipser en matière d’administration. Enfin parce qu’à la manière d’un conservateur libéral, Hébraud se tient à distance du pouvoir et des pouvoirs, pour demeurer toujours sur le terrain du droit, des principes et de la vie du droit, comme en témoigne, entre autres, la passe d’armes avec le garde des Sceaux Jean Foyer en 1966 au sujet de l’affaire Casamayor24. Mais croire Hébraud moins impliqué dans l’administration de la faculté serait sans doute une erreur de perspective. D’une part parce qu’il collabore de très près à l’administration de ses collègues, à laquelle il est personnellement associé. Et d’autre part, parce qu’il accepte d’assurer certaines fonctions administratives. Il dirige ainsi l’Institut de criminologie, il est le 1er directeur de l’IEJ de la Faculté de droit de Toulouse de 1962 à 1975 et, s’il refuse de se porter candidat au décanat de la faculté de droit au motif principal de sa cécité, il est directeur d’une éphémère UER d’Etudes pratiques de préparation aux carrières judiciaires, de 1971 à 197325.
15Parallèlement, la reconnaissance de ses pairs lui vaut d’être nommé membre du concours d’agrégation en 1951, puis président en 1970. Mais au-delà de cette succession de dates, auxquelles on pourrait ajouter d’autres distinctions, comme la Légion d’honneur (dont il est fait chevalier en 1953) ou les palmes académiques (dont il est commandeur en 1958), il convient de terminer cette rapide présentation en évoquant deux points, parmi les éléments recueillis au cours des entretiens réalisés avec ses anciens étudiants et collaborateurs.
16Le premier concerne l’enseignant. A l’unanimité, Hébraud est présenté comme un professeur brillant, « impressionnant », dont les cours sont à la fois ardus, exigeants et, « une fois qu’on les comprend, brillamment intelligents ». Autant de propos qui confirment les mots de Merle, selon lequel « il fallait (…) se concentrer pour suivre sa pensée subtile26 ». Hébraud initie ses étudiants au sens du texte, leur en apprend la lecture, le commentaire, le sens du détail (au point de les rendre, parfois, plus savants que les jurys, comme a pu l’indiquer le président Jean-Pierre Pech, à propos d’un commentaire d’Hébraud sur l’unification de l’appel). Un goût du texte qui affleure dans chacune de ses positions au conseil ou à l’assemblée de la faculté, lorsque les réformes de l’enseignement du droit touchent à cette distance qu’il s’efforce d’abolir entre le texte et l’étudiant. C’est en tout cas un professeur immensément respecté, dont les cours ne sont troublés par aucun chahut, qui enseigne quasiment sans note (à l’exception de rares fiches en braille) après avoir « révisé », chaque matin, avec l’aide de son épouse27 ; un professeur capable d’identifier à l’oreille ses différents étudiants et qui, comme l’ont confirmé ses élèves et son fils, reçoit facilement chez lui, 8 rue Deville, à quelques pas de la faculté, où « toutes ses forces28 » sont entièrement consacrées à l’étude du droit.
17Le second point qu’il faut souligner à partir des témoignages recueillis est celui de la curiosité intellectuelle d’Hébraud et de son ouverture d’esprit. Hébraud, semble-t-il, ne fut pas un dogmatique. Et qu’il s’agisse de ses cours de licence et de doctorat, ou des préparations de l’IEJ, il a marqué nombre de ses étudiants par son intérêt pour le droit vivant et par la conviction de devoir intégrer à la réflexion juridique les évolutions sociétales – pas nécessairement pour les épouser, mais au moins pour les inclure dans les éléments de la réflexion et de la contradiction. A l’IEJ, il consacre ainsi une place importante aux questions d’actualité à l’occasion des grands oraux du jeudi soir. Dans ses cours, le droit comparé, la sociologie, la philosophie du droit (qu’il enseigne à la suite de Marty en 1973), l’histoire ont également droit de cité. Sans oublier le cinéma ou la musique. Certains de ses étudiants découvrent Carbonnier grâce à lui, à une époque où la faculté toulousaine semble avoir une tradition plus dogmatique. Et comme l’ont souligné plusieurs des interlocuteurs qui ont bien voulu évoquer leur souvenir d’Hébraud, il faudrait mesurer l’influence de ce dernier sur plusieurs générations de magistrats, formés à partir de ses interrogations personnelles sur l’office du juge, l’acte juridictionnel et la jurisprudence, ainsi que de son intérêt convaincu pour l’interdisciplinarité.
18« Hébraud faisait respirer le droit29 » se souvient Jacques Poumarède. Voilà, peut-être, qui donne un vrai contenu à l’adage « Toulouse pour apprendre »… Apprendre avec Hébraud, c’était accéder à cette respiration du droit, que le présent ouvrage propose désormais de retrouver aussi dans sa doctrine.
Notes de bas de page
1 Roger Merle, « Pierre Hébraud (1905-1983) », Annales de l’Université des Sciences Sociales de Toulouse, t. XXXI, 1983, p. VI.
2 Archives de l’Université Toulouse 1 Capitole (abr. Arch. UT1C).
3 Pierre-Louis Boyer, L’Académie de Législation de Toulouse (1851-1958). Un cercle intellectuel de province au cœur de l’évolution de la pensée juridique, thèse de droit dactyl., Toulouse, 2010.
4 Pierre Hébraud, « Maurice Hauriou et les civilistes », Recueil de l’Académie de Législation de Toulouse, t. IV, 1967, p. 13-40.
5 Arch. UT1C, Pierre Hébraud, Dossier d’étudiant (1922-1930).
6 Entretien Michel Hébraud.
7 Arch. UT1C, Pierre Hébraud, Dossier d’étudiant (1922-1930).
8 SIPROJURIS, Base de données des enseignants des Facultés de droit (1804-1950).
9 Arch. UT1C, Pierre Hébraud, Dossier de carrière (1926-1975).
10 Arch. UT1C, Pierre Hébraud, Notices individuelles 1935, 1937, 1939.
11 Faculté de Droit et des Sciences économiques de Toulouse, Registre des Procès-Verbaux des Délibérations de l’Assemblée de la Faculté (abr. RDAss.), 1936-1951, f°9, 16.02.1937.
12 RDAss, 29.09.1939, f°63.
13 RDAss, 29.06.1940, f°85.
14 RDAss, 21.10.1940, f°103.
15 RDAss, 14.10.1941, f°147.
16 RDAss, 09.12.1943, f°220.
17 Parmi eux, entre autres, Georges Vedel (prisonnier de guerre), André Hauriou (mobilisé, absent, puis révoqué par arrêté du 15.12.1943 avant d’être réintégré en septembre 1944), Maurice Byé (en mission au Brésil, puis professeurs aux armées, absent), Paul Ourliac (absent, chef-adjoint du cabinet du secrétaire d’Etat à l’Education nationale, 1941-1942), Pierre Raynaud (en mission temporaire auprès du Secrétariat d’Etat à la Jeunesse, 1941).
18 Arch. UT1C, Lettre du doyen Magnol au préfet de la Haute-Garonne, 16.07.1940, Dossier Correspondance.
19 RDAss, 30.09 et 09.10.1940, f°96-98.
20 RDAss, 20.06-14.07.1941, f°134-143.
21 RDAss, 26.01.1937, f°6.
22 RDAss 1951-1961.
23 Recueil de l’Académie de Législation de Toulouse, 1957, Avant-projet de Code civil.
24 Revue Trimestrielle de Droit civil, 1966.
25 Arch. UT1C, Pierre Hébraud, Dossier de liquidation de pension.
26 Roger Merle, op. cit., p. V.
27 Entretien avec Michel Hébraud.
28 Homélie du Père de Nauroy, 23.11.1983, Archives privées Michel Hébraud.
29 Entretien avec Jacques Poumarède.
Auteur
Professeur à l'Université Toulouse Capitole, CTHDIP
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