Optimisation fiscale des sociétés et marché de l’art
p. 49-68
Texte intégral
INTRODUCTION
1Traiter de la fiscalité et de l'art revient un peu à vouloir mélanger l'eau et l'huile ...
2L'art fait appel aux principaux sens de l'être humain (à ses émotions, ses intuitions, voire son intellect ...), la fiscalité répond plus prosaïquement à des préoccupations financières.
3Pourtant c'est bien du marché de l'art et d'optimisation fiscale dont il est question ; l'art est un placement et nous nous demandons donc s'il s'agit d'un placement fiscalement avantageux.
4Pour les particuliers, la réponse est assurément positive. Les redevables de l'ISF1 seront par exemple ravis d'entendre que les objets d'antiquité, d'art ou de collection en sont exonérés (CGI art. 885 I). Les héritiers ou donataires de monuments historiques savent également qu'ils n'auront pas de droits de mutation à titre gratuit à payer sur les biens qui leur sont transmis (immeubles et meubles qui en constituent le complément historique ou artistique), sous réserve de signer avec l'Etat une convention à durée indéterminée qui prévoit les modalités d'accès au public ainsi que les conditions d'entretien des biens exonérés (CGI art. 795 A). Qui plus est, les acquéreurs, donataires, héritiers ou légataires d'une œuvre d'art, de livres, objets de collection ou de documents de haute valeur artistique ou historique, sont exonérés de droits de mutation lorsqu'il en est fait don à l'Etat dans le délai prévu pour l'enregistrement de l'acte qui constate la mutation (CGI art. 1131). Enfin, chacun sait que depuis la loi « Malraux » du 31 décembre 1968 (loi n° 68-1251, « tendant à favoriser la conservation du patrimoine artistique national »), la dation en paiement par la remise d'objet d'art est un moyen légal de se libérer des droits de mutation à titre gratuit ou du droit de partage envers l'Etat (CGI art. 1716 bis).
5Pour les entreprises, la « rencontre » entre l'art et la fiscalité est plus récente.
6Mettons de côté les sociétés civiles créées pour recevoir un patrimoine historique qui font bénéficier leurs associés des mêmes avantages que les particuliers. Mettons également de côté les entreprises relevant des métiers d'art qui peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt spécifique égal à 10% des dépenses de création d'ouvrages uniques réalisés en un seul exemplaire ou en petites séries, voire 15% pour les entreprises portant le label « Entreprise du patrimoine vivant » (CGI art. 244 quater O). La loi de finances rectificative pour 2016 (L. n° 2016-1918 du 29 décembre 2016, art. 65), proroge ce régime pour trois ans (jusqu'au 31 décembre 2019), et étend son domaine aux entreprises œuvrant dans le domaine de la restauration du patrimoine.
7En règle générale, l'application des règles fiscales de droit commun n'est pas favorable aux entreprises. Les entreprises commerciales peuvent naturellement investir dans les biens à caractère historique ou artistique, mais le traitement fiscal n'a rien de reluisant puisque la dépense n'est pas déductible fiscalement ; il s'agit d'une immobilisation, non-amortissable dans la plupart des cas, qui peut seulement faire l'objet d'une provision pour dépréciation, par ailleurs strictement encadrée puisqu'elle doit être constatée par un expert agréé près les tribunaux si le coût d’acquisition de l’œuvre est supérieur à 7.600€ (CGI art. 39 - 1, 5°, al.2).
8Le législateur a pris assez tardivement conscience que les sociétés privées pouvaient apporter beaucoup au marché de l'art ... mais à condition qu'elles y trouvent leur intérêt. Bien entendu, si l'on consulte certaines brochures publicitaires ou certains sites Internet d'organismes financiers ou de grandes entreprises, il est affirmé haut et fort que l'esprit de solidarité et la défense de la culture font partie de l'ADN de l'entreprise, mais convenons tout de même que ces entreprises sont des contribuables qui paient beaucoup d'impôts et que le légitime souci d'économie fiscale est prioritaire dans le séquençage de l'ADN de tout contribuable ...
9C'est à partir de 1982 que les dépenses des entreprises à caractère culturel (hors Fondation de France qui pouvait déjà en bénéficier) ont pu bénéficier de la déduction fiscale mécénat (CGI art. 238 bis mod. L. n° 81-1160 du 30 décembre 1981, de finances pour 1982). Ce dispositif, très souvent modifié, a véritablement connu son essor en 2003 en passant de l'état de simple abattement fiscal (ie réduction de l'assiette fiscale) à celui de véritable réduction d'impôt (ie réduction de la cotisation fiscale) (L. n° 2003-709 du 1er août 2003, « Aillagon », art. 6).
10Par suite, le champ de la réduction d'impôt mécénat n'a cessé de croître. Elle a été étendue :
- aux dons versés à la Fondation du patrimoine (L. n° 2006-1666 du 21 décembre 2006, art. 10) ;
- aux fondations universitaires et aux fondations partenariales (L. n° 2007-1199 du 10 août 2007, art. 29) :
- à des projets de thèse proposés par les écoles doctorales (L. n° 2007-1199 du 10 août 2007, préc., art. 30) ;
- aux sociétés de capitaux dont la gestion est désintéressée et qui ont pour activité principale la présentation de spectacles publics ou l'organisation d'exposition d'art contemporain (L. n° 2007-1824 du 25 décembre 2007, art. 23) ;
- aux fonds de dotation (L. n° 2008-776 du 4 août 2008, art. 140) ;
- et aux sociétés nationales de programmes pour le financement de programmes audiovisuels culturels (L. n° 2009-258 du 5 mars 2009, art. 34).
11D'après la dernière enquête de l'Admical (association pour le développement du mécénat industriel et commercial, fondée en 1979) sur le mécénat en France (baromètre Admical / CSA - Le mécénat d'entreprise en France), publiée en mai 2016 (http://www.admical.org/sites/default/files/uploads/basedocu/barometre_admical_csa_2016_vdef.pdf), la moitié des entreprises de plus de 250 salariés sont désormais mécènes. En 2015, les entreprises françaises ont donné 3,5 milliards d'euros (soit une augmentation de 25% par rapport aux chiffres de 2013). Aujourd'hui, 14% des entreprises françaises, toutes tailles confondues, sont mécènes (contre 12% en 2013), soit 170.000 entreprises selon l'Admical. Et ce succès n'est pas près de s'interrompre puisque 79% des entreprises pensent au pire stabiliser leurs dépenses de mécénat et au mieux augmenter le budget qu'elles lui consacrent.
12Bien entendu, toutes les dépenses de mécénat ne concernent pas l'art et la culture. Viennent en tête des dépenses le sport (48%), les dépenses à caractère social (17%), puis les dépenses culturelles (15%) et enfin les dépenses dans le domaine de l'éducation et de la recherche (11%). C'est d'ailleurs, à ce niveau que l'on perçoit le mieux ce que recherchent les entreprises : la valorisation de leur image et l'amélioration des relations avec les acteurs locaux. Curieusement, la motivation fiscale n'apparaît pas parmi les motivations (!) et seulement 55% des entreprises affirment profiter, en tout ou partie, des avantages fiscaux offerts par la loi (!).
13Incontestablement, cela remet les idées en place ... Pourtant les avantages fiscaux apparaissent aussi alléchants que variés : les entreprises peuvent réduire significativement leur charge fiscale (IR ou IS) en finançant l'achat par des organismes d'intérêt général d'œuvres d'art (« dépenses de mécénat ») (I), et elles peuvent acquérir elles-mêmes une œuvre d'art et profiter d'une réduction de leur imposition, certes moins intéressante que la réduction « mécénat » (II).
I – Les dépenses de mécénat des entreprises
14On a trop tendance à ranger dans la rubrique « mécénat » les dépenses des entreprises en faveur d'œuvres ou d'organismes d'intérêt général. La notion de mécénat est plus précise (A).
15Lorsqu'il s'agit véritablement d'une dépense de mécénat, le mécène peut, sous des conditions et selon des modalités définies par la loi, bénéficier d'une réduction d'IR ou d'IS (B).
A – La notion de dépense de mécénat
16L'administration fiscale définit le mécénat comme un soutien matériel ou financier apporté sans contrepartie directe ou indirecte de la part du bénéficiaire à une œuvre ou à une personne morale pour l'exercice d'activités présentant un intérêt général (BOFiP, BOI-BIC-RICI-20-30-10-20, 20 juin 2017, n° 120). Il s'ensuit que la dépense de l'entreprise ne doit pas générer à son profit de contrepartie, et que l'organisme bénéficiaire doit être d'intérêt général.
1) Une dépense sans contrepartie
17La nature des dépenses - Les dépenses de mécénat peuvent prendre trois formes différentes :
- le versement en numéraire – « Mécénat financier » - qui représente 80% des dépenses totales selon le sondage de l'Admical en 2015 (V. supra, introduction) ;
- le versement en nature – « Mécénat en nature » - qui représente 8% des dépenses totales (il s'agit de dons de locaux, de matériels ou de marchandises, par exemple les dons de produits alimentaires par les entreprises de la grande distribution) ;
- le versement par mise à disposition de personnel – « Mécénat de compétence » - qui représente 12% des dépenses totales (il consiste à mettre à disposition un salarié en prenant sur son temps de travail au profit d’un projet d’intérêt général).
18L'absence de contrepartie - C'est ce qui distingue le mécénat du parrainage ; le mécénat est désintéressé alors que le parrainage est une opération commerciale à caractère publicitaire.
19Le paradoxe de la situation est que, au plan fiscal, le parrainage devrait être mieux traité que le mécénat car il engendre une dépense faite dans l'intérêt de l'exploitation, déductible de ses résultats, alors que le mécénat est une libéralité constitutive d'un acte anormal de gestion, non déductible. C'est ce qui explique que les entreprises mécènes doivent réintégrer leurs dépenses de mécénat dans le résultat imposable (ce qui génère mécaniquement une majoration d'IS de 33 1/3 %, largement compensée par la réduction d'IS de 60%, V. l'exemple infra B).
20En pratique, la distinction entre le parrainage et le mécénat n'est pas toujours facile à faire. En effet, si le mécénat interdit tout message publicitaire au profit du mécène, il n'est pas interdit de le remercier en l'associant aux opérations de l'organisme désintéressé. Tant qu'elle se limite à la mention du nom du donateur, et quelle que soit son support (logo, sigle ...), cela ne remet pas en cause la qualification de mécénat. Au-delà, l'opération peut être qualifiée de parrainage. D'une manière générale, l'entreprise ne doit pas retirer un avantage commercial quelconque de l'opération (ex : signature d'un marché). En clair, selon l'administration fiscale : « le bénéfice du dispositif en faveur du mécénat n’est remis en cause que s’il n’existe pas une disproportion marquée entre les sommes données et la valorisation de la « prestation » rendue par l’organisme » (BOFiP, BOI-BIC-RICI-20-30-10-20, 20 juin 2017, n° 160).
Exemple administratif (BOFiP, BOI-BIC-RICI-20-30-10-20, n° 180) :
Une entreprise informatique offre gratuitement à un important musée la création d’une base de données informatique pour ses collections de dessins. L’entreprise apporte des heures d’ingénieurs et sa technologie. Son apport en nature est valorisé à 80 000 euros par an, pendant 2 ans.
En contrepartie, le musée installe un cartel indiquant le nom de l’entreprise dans les salles consacrées aux dessins et sur l’ensemble des supports de communication. L’entreprise dispose par an de quatre soirées réservées pour une cinquantaine de clients et de 100 invitations gratuites pour son personnel.
Il s’agit d’une opération de mécénat en raison de la disproportion marquée entre le don et les contreparties reçues.
Si l’entreprise exigeait, en contrepartie du mécénat « technologique », que le musée équipe son centre de recherche exclusivement de son matériel informatique, alors la contrepartie serait une prestation directe de services et placerait l’opération sous le régime du parrainage.
2) Une dépense d'intérêt général
21Seules les dépenses au profit d'œuvres ou d'organismes d'intérêt général peuvent ouvrir droit à la réduction d'impôt mécénat de l'article 238 bis du CGI. Il s'agit des œuvres ou organismes d'intérêt général, ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial ou culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises (CGI art. 238 bis, 1-a). Selon l'administration, la condition liée à l'intérêt général est remplie si l'activité de l'organisme n'est pas lucrative (il ne recherche pas le profit ; BOI-BIC-RICI-20-30-10-10, 10 mai 2017, n° 90 et s.) et que sa gestion est désintéressée (aucun avantage ne doit être accordé aux fondateurs, dirigeants ou membres de l'organisme ; BOFiP, BOI-BIC-RICI-20-30-10-10, 10 mai 2017, n° 130 et s.).
22L'administration exige en outre que l'organisme désintéressé ne fonctionne pas au profit d'un cercle restreint de personnes (BOI-BIC-RICI-20-30-10-10, 10 mai 2017, n° 160), comme par exemple une association d'anciens élèves. Selon elle : « Un organisme fonctionne au profit d'un cercle restreint de personnes lorsqu'il poursuit des intérêts particuliers d'une ou plusieurs personnes clairement individualisables, membre(s) ou non de l'organisme. Sont ainsi considérés comme exerçant leur activité au profit d'un cercle restreint de personnes, des organismes qui ont pour objet de servir les intérêts particuliers, notamment matériels et moraux, d'une ou plusieurs personnes, familles ou entreprises, de quelques artistes ou de certains chercheurs, etc... » (BOFiP, BOI-IR-RICI-250-10-10, 10 mai 2017, n° 130). Par exemple, pour une association culturelle « il convient d'examiner si les activités de l'association sont effectuées avant tout en faveur d'une personne en particulier (ou de ses ayants-droit) ou, au contraire, si elles s'inscrivent dans un objectif plus large comme celui de faciliter et d’élargir l'accès du public aux œuvres artistiques et culturelles ou d’améliorer la connaissance du patrimoine (BOFiP, BOI-IR-RICI-250-10-10, 10 mai 2017, n° 160). En revanche, peu importe si un seul artiste est concerné par les opérations de l'organisme.
B – La réduction d'impôt mécénat
23Dans le cas général, la réduction d'impôt (IR ou IS) est de 60% pour les entreprises qui font des versements au profit d'une œuvre d'intérêt général (L. n° 2003-709 du 1er août 2003, relative au mécénat, aux associations et aux fondations, art. 6 ; CGI art. 238 bis, préc.).
24Les entreprises imposées à l'IS peuvent prétendre à une réduction d'impôt portée à 90% du montant des versements effectués pour contribuer à l'achat de Trésors nationaux ou de biens présentant un intérêt majeur pour le patrimoine national (L. n° 2002-5 du 4 janvier 2002 relative aux musées de France, art. 23 ; CGI art. 238 bis-0 A, préc.).
1) Mécénat général (CGI art. 238 bis)
a) Le domaine de la réduction d'impôt
25Quant à l'entreprise mécène - Il n'existe aucune restriction légale ; toutes les entreprises, qu'elles relèvent de l'IR ou de l'IS, peuvent bénéficier de la mesure, à condition qu'il s'agisse d'un régime réel d'imposition (BOFiP, BOI-BIC-RICI-20-30-10-10, 10 mai 2017, n° 1). Et rien ne leur interdit de se regrouper en « association de mécénat collectif » afin de recevoir leurs dons (ex : « Aïda » qui regroupent une centaine d'entreprises de la région toulousaine et de Midi-Pyrénées, dans le but de rendre la musique classique accessible au plus grand nombre). En pratique, les fondations d'entreprises et les fonds de dotation ont la préférence des entreprises (surtout les premières car elles peuvent seules apparaître en tant que « fondations »).
26Quant à l'organisme bénéficiaire - L'article 238 bis du CGI établit une liste limitative des organismes concernés, lesquels peuvent être situés en France ou dans l'Union européenne. L'administration fiscale vient de commenter abondamment la liste des œuvres ou organismes concernés ; cas général (BOI-BIC-RICI-20-30-10-10, 10 mai 2017, n° 50 et s.), et cas particuliers (BOI-BIC-RICI-20-30-10-15, 10 mai 2017). V. Dr. Fisc. 2017, n° 22, comm. 328.
27- Dans le domaine de l'art, outre les œuvres et organismes d'intérêt général concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique français (y compris les fondations, les associations ou les musées de France), on peut noter que font également bénéficier leurs mécènes de la réduction d'impôt : les établissements d'enseignement artistique (publics ou privés), les organismes ayant pour objet l'organisation d'expositions d'art contemporain (publics ou privés), ainsi que notamment la Fondation du patrimoine ou d'une association ou fondation qu'elle abrite en vue de financer la restauration de monuments historiques privés classés à l'inventaire supplémentaire ou ayant reçu le label de la Fondation du patrimoine.
28- Contrairement aux règles applicables aux dons des particuliers, le bénéfice de la réduction fiscale de l'article 238 bis du CGI n'est pas subordonné à la production par l'entreprise d'un « reçu » répondant à un modèle type de l'administration, mais rien n'empêche l'organisme de délivrer une attestation afin de ménager à son mécène une preuve des versements et de leur caractère éligible. Les organismes qui ne respectent pas les conditions posées à l'article 238 bis du CGI et qui délivrent irrégulièrement des certificats, reçus ou attestations permettant à un contribuable de bénéficier d'une réduction ou d'une déduction fiscale sont passibles d'une amende fiscale égale à 25% des sommes indûment mentionnées sur ces documents (CGI art. 1740 A). Afin de se prémunir contre un tel risque, les organismes susvisés peuvent interroger l'administration dans le cadre de la procédure de rescrit fiscal (LPF art. L. 80 C) ; une absence de réponse dans les six mois équivaut à un accord implicite de l'administration fiscale.
29- Afin d’assurer sa conformité au droit communautaire (V. CJCE 27 janvier 2009, aff. 318/07, « Hein Persche », RJF 4/09, n° 416), le dispositif a été étendu aux organismes de même nature situés sur le territoire de l'Union européenne, ou de l’espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale contenant une clause d’assistance administrative destinée à lutter contre la fraude ou l’évasion fiscale (CGI art. 238 bis – 4 bis). Un agrément préalable de l'administration est nécessaire, mais le contribuable peut, dans les délais de la déclaration fiscale, produire les pièces attestant que cet organisme poursuit des objectifs et présente des caractéristiques similaires aux organismes dont le siège est situé en France.
30- Ouvrent également droit à la réduction d'impôt les dons et versements effectués au profit d'organismes qui ont pour objet la sauvegarde, contre les effets d'un conflit armé, des biens culturels mentionnés à l'article 1er de la Convention du 14 mai 1954 pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé, dont le siège est situé dans un Etat membre de l'UE ou dans un autre Etat ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales, sous réserve que l'Etat français soit représenté au sein des instances dirigeantes avec voix délibérative (L. n° 2016-1918 du 29 décembre 2016, de finances rectificative pour 2016, art. 42 ; CGI art. 238 bis – 5).
b) Les modalités de la réduction d'impôt
31Le calcul de la réduction d'impôt - La réduction d'IR ou d'IS est égale à 60% du montant des versements en numéraire ou en nature effectués au profit de l'organisme considéré, tels que pris dans la limite d'un plafond de 5 p. mille du chiffre d'affaires hors taxes de l'entreprise.
32- Lorsqu'il s'agit de versements en nature, le don doit être valorisé au coût de revient du bien donné ou de la prestation de service donnée (CGI art. 238 bis, 1, mod. L. n° 2016-1917 du 29 décembre 2016, de finances pour 2017, art. 19). En ce qui concerne l'évaluation du mécénat de compétence, le coût de revient de la prestation comprend les rémunérations et les charges sociales y afférentes (BOFiP, BOI-BIC-RICI-20-30-10-20, 20 juin 2017, n° 70).
33- L'entreprise ne peut calculer sa réduction d'impôt sur un montant qui excède 5 p. mille du chiffre d'affaires hors taxes de l'exercice au-cours duquel les versements sont effectués. Les versements qui excèdent le plafond légal peuvent cependant donner lieu à une réduction d'impôt au titre des cinq exercices suivants, après prise en compte des versements effectués au titre de chacun des exercices, sans qu'il puisse en résulter un dépassement dudit plafond (BOFiP, BOI-BIC-RICI-20-30-20, 6 avril 2016, n° 70). Par ailleurs, le plafond de 5 p. mille étant commun à la réduction fiscale de l'article 238 bis et à la déduction fiscale de l'article 238 bis AB (achat d'œuvres d'artistes vivants ou d'instruments de musique, V. infra II, B), les excédents de versements réalisés au titre de l'article 238 bis du CGI et reportés au titres d'exercices antérieurs ne peuvent donner lieu à réduction d'impôt que si la somme des dépenses de l'exercice en application de l'article 238 bis et de l'article 238 bis AB du CGI n'atteint pas le plafond légal (BOFiP, BOI-BIC-RICI-20-30-20, 6 avril 2016, n° 80).
34L'utilisation de la réduction d'impôt - La réduction d'impôt de l'article 238 bis du CGI s'impute sur le revenu ou l'impôt sur les sociétés dû par le contribuable ou le foyer fiscal. Lorsque le mécène est une société de personnes semi-transparente, la réduction d'impôt est calculée au niveau de la société et répartie entre les associés au prorata de leurs droits ; chacun procèdera ensuite à l'imputation en fonction du régime fiscal qui lui est applicable (IR ou IS). Lorsque le montant de la réduction d'impôt excède celui de l'impôt, le solde non imputé peut être utilisé pour le paiement de l'impôt dû au titre des cinq années ou exercices suivants.
Exemple récapitulatif :
Hypothèse d'une société soumise à l'IS au taux de droit communa qui réalise un bénéfice imposable de 100 avant dépense de mécénat de 40 ouvrant doit à une réduction d'IS de 60% (hors plafonnement).
1ère situation : la société ne fait aucune dépense de mécénat.
• Bénéfice imposable : 100
• IS : 100 x 33 1/3 % = 33 1/3
• Sortie de fonds sans contrepartie : 33 1/ 3 (IS)
2ème situation : la société fait une dépense de mécénat ouvrant doit à abattement (< 2003) :
• Bénéfice imposable : 100 - 40 = 60
• IS : 60 x 33 1/3 % = 20
• Sortie de fonds sans contrepartie : 40 (libéralité) + 20 (IS) = 60
3ème situation : la société fait une dépense de mécénat ouvrant droit à réduction d'IS (> 2003) :
• Bénéfice imposable : 100
• IS brut : 100 x 33 1/3 % = 33 1/3
• IS net : 33 1/3 - [40 x 60% = 24] = 9 1/3
• Sortie de fonds sans contrepartie : 40 (libéralité) + 9 1/3 (IS) = 49 1/3
Par rapport à la 1ère situation :
• La situation n° 2 génèrera un coût supplémentaire de :
• 60 - 33 1/3 = 26 1/3
• La situation n° 3 génèrera un coût supplémentaire de :
• 49 1/3 - 33 1/3 = 16
a. 33 1/3 % (hors PME). Le taux d'IS de droit commun sera progressivement ramené à 28% d'ici 2022 (L. n° 2016-1917 du 29 décembre 2016, de finances pour 2017, art. 11). L'article 41 du projet de loi de finances pour 2018 (projet n° 235, préc.), propose une trajectoire un peu différente, avec comme objectif un taux de 25% en 2022.
2) Financement de l'achat par l'Etat de Trésors nationaux (CGI art. 238 bis-0 A)
35Domaine - Seules sont ici concernées les entreprises soumises à l'IS qui contribuent à l'achat par l'Etat ou toute personne publique de biens culturels ayant le caractère de trésors nationaux ou qui présentent un intérêt majeur pour le patrimoine national (CGI art. 238 bis-0 A).
36- L'article L. 111-1 du code du patrimoine définit les trésors nationaux comme : les biens appartenant aux collections publiques, les biens classés en application de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques (le classement sur la liste des Monuments historiques peut aussi bien concerner des biens immobiliers que mobiliers, V. C. Pat. art. L.621-1 s. et L. 622-1 s.) ou de la loi du 3 janvier 1979 sur les archives (cette loi a institué une procédure de classement comme archives historiques des archives privées « qui présentent pour des raisons historiques un intérêt public », V. C. pat. art. L.212-15 s.), ainsi que les autres biens qui présentent un intérêt majeur pour le patrimoine national au point de vue de l'histoire de l'art ou de l'archéologie (l'appréciation en est faite par une Commission spécifique à l'occasion d'une demande d'exportation d'un bien culturel). Pour ouvrir droit à la réduction d'impôt sur les sociétés, les Trésors nationaux doivent avoir fait l'objet d'un refus de délivrance d'un certificat d'exportation (ce certificat ne peut être refusé qu'aux biens culturels présentant le caractère de Trésor national ; C. Pat. art. L. 111-4), et ils doivent avoir fait l'objet d'une offre d'achat par l'Etat pour son compte ou pour le compte de toute personne publique.
37- La réduction d'IS prévue pour les dons en faveur de l'achat par l'Etat ou toute personne publique de biens culturels situés en France ou à l'Etranger dont l'acquisition présenterait un intérêt majeur pour le patrimoine national au point de vue de l'histoire, de l'art ou de l'archéologie n'est applicable qu'après avis motivé de la Commission visée à l'article L. 111-4 du Code du patrimoine (BOFiP, BOI-IS-RICI-20-20, 12 septembre 2012, n° 80).
38Régime - Pour ouvrir droit à la réduction d'impôt, les versements de l'entreprise doivent avoir été acceptés par le ministre chargé de la culture et le ministre chargé du budget (la procédure est détaillée aux articles 171 BA et suivants de l'annexe II du CGI). Si les conditions sont remplies, la réduction d'IS est égale à 90% des versements de l'entreprise à l'agent comptable de la Réunion des musées nationaux et du Grand Palais des Champs-Élysées.
39- A la différence de l'article 238 bis du CGI, les sommes versées par une entreprise sous le régime de l'article 238 bis-0 A du CGI ne sont pas plafonnées pour le calcul de la réduction d'impôt, mais le montant de cette dernière ne peut excéder 50% du montant de l'IS dû par l'entreprise au titre de l'exercice d'imputation (l'excédent n'est ni reportable ni remboursable ; BOFiP, BOI-IS-RICI-20-20, 12 septembre 2012, n° 190). Au cas de pluralité de versements, la limite de 50% s'apprécie par rapport au montant total des versements de l'exercice.
40- Comme dans le régime de l'article 238 bis par contre, les sommes versées ne sont pas déductibles des résultats (elles doivent donc être réintégrées dans le bénéfice imposable).
II – Les acquisitions d'œuvres d'art par les entreprises
41Cette fois ci, nous ne sommes plus dans le cadre des libéralités puisque l'entreprise à une contrepartie à la dépense : l'œuvre d'art. L'entreprise ne s'appauvrit pas ; elle fait simplement un investissement dans le domaine artistique. Par conséquent, il ne peut s'agir de mécénat.
42Le législateur fiscal est moins généreux lorsqu'il s'agit d'achats par les entreprises elles-mêmes. Celles-ci peuvent, soit bénéficier d'une réduction d'impôt de 40% lorsqu'elles achètent des Trésors nationaux (CGI art. 238 bis-0 AB) (A), soit d'une déduction sur 5 ans du prix d'achat d'œuvres d'artistes vivants ou d'instruments de musique (CGI art. 238 bis AB) (B).
A – L'achat de Trésors nationaux par les entreprises
43Lorsque l'entreprise achète elle-même le bien culturel ayant la nature de Trésor national ayant fait l'objet d'un refus de délivrance d'un certificat d'exportation, la réduction d'impôt ne s'applique que si un certain nombre de conditions très précises sont remplies (1°). Si tel est le cas, la réduction d'IR ou d'IS est égale à 40% de la dépense de mécénat considérée (2°).
1) Des conditions d'application draconiennes
44La réduction d'impôt n'est accordée que dans les conditions suivantes (CGI art. 238 bis-0 AB) :
- le bien ne doit pas avoir fait l'objet d'une offre d'achat de l'Etat dans les conditions fixées par l'article L. 121-1 du code du patrimoine ;
- l'entreprise doit s'engager à consentir au classement du bien comme monument historique en application de l'article L. 622-4 du code du patrimoine ou comme archives historiques en application de l'article L. 212-15 du code du patrimoine ;
- le bien ne doit pas être cédé pendant dix ans à compter de l'achat ;
- durant cette période de dix ans, le bien doit être placé en dépôt auprès d'un musée de France, d'un service public d'archives ou d'une bibliothèque relevant de l'Etat ou placée sous son contrôle technique.
45La réduction d'impôt au titre de l'article 238 bis-0 AB du Code général des impôts est en outre subordonnée à l'agrément du Ministre de l'économie et des finances qui se prononce après avis de la Commission prévue à l'article L. 111-4 du code du patrimoine précité (la procédure est détaillée aux articles 171 BE et suivants de l'annexe II du CGI).
2) Une réduction d'impôt réduite
46Les sommes consacrées par les entreprises à l'achat d'un Trésor national dans les conditions susvisées ouvrent droit à une réduction d'impôt sur le revenu ou sur les sociétés égale à 40% du coût d'acquisition du bien (BOFiP, BOI-BIC-RICI-20-20, 12 septembre 2012, n° 230).
47Le régime de cette réduction d'impôt est celui qui a été décrit à propos de l'article 238 bis-0 A. Ainsi s'impute-t-elle sur l'IR ou l'IS dû au titre de l'exercice au cours duquel le versement a été effectué (BOFiP, BOI-BIC-RICI-20-20, 12 septembre 2012, n° 240). Et dans l'hypothèse ou la réduction d'impôt est supérieure à l'impôt dû par le contribuable, l'excédent n'est ni reportable ni remboursable (BOFiP, BOI-BIC-RICI-20-20, 12 septembre 2012, n° 270).
48A sa différence néanmoins, la réduction d'IR ou d'IS n'est pas plafonnée à 50% du montant de l'impôt dû par l'entreprise (il n'existe pas davantage de plafonnement du montant des dépenses consacrées à l'achat de Trésors nationaux, à l'inverse du mécénat général).
49Naturellement, les sommes consacrées par l'entreprise à l'achat de Trésors nationaux ne sont pas déductibles de ses résultats imposables, mais cela tient à la nature comptable d'investissement de la dépense C'est une différence majeure avec la situation qui va suivre et qui concerne spécifiquement l'achat d'œuvres d'artistes vivants ou d'instruments de musique.
B – L'achat d'œuvres d'artistes vivants ou d'instruments de musique
50Aux termes de l'article 238 bis AB du CGI : « Les entreprises qui achètent, à compter du 1er janvier 2002, des œuvres originales d'artistes vivants et les inscrivent à un compte d'actif immobilisé peuvent déduire du résultat de l'exercice d'acquisition et des quatre années suivantes, par fractions égales, une somme égale au prix d'acquisition ».
51Il s'agit d'un avantage fiscal, initialement réservé aux achats d'œuvres d'artistes vivants par la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 relative au développement du mécénat (art. 7), modifiée à plusieurs reprises, et notamment par la loi n° 2003-709 du 1er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations (art. 6) qui a étendu, sous conditions, aux acquisitions d'instruments de musique l'avantage fiscal accordé aux œuvres originales d'artistes vivants.
52L'avantage fiscal ne consiste pas ici, en une réduction fiscale mais en une déduction fiscale ; c'est l'assiette de l'impôt, et non l'impôt lui-même, qui est diminué. Comme en comptabilité l'achat de tels œuvres ou instruments constitue une dépense d'investissement non déductible, la déduction fiscale s'opère de manière extra-comptable (tableau fiscal n° 2058-A-SD).
1) Des conditions variables
53Acquisition d'œuvres d'artistes vivants - Quatre séries de conditions doivent être réunies.
541. Les œuvres concernées sont celles qui sont visées à l'article 98 A de l'annexe III du CGI (BOFiP, BOI-BIC-CHG-70-10, 2 décembre 2015, n° 20). Il s'agit :
- des tableaux, peintures, dessins, aquarelles, gouaches, pastels, monotypes, entièrement exécutés de la main de l'artiste ;
- des gravures, estampes et lithographies, tirées en nombre limité directement de planches entièrement exécutées à la main par l'artiste, quelle que soit la matière employée ;
- des productions en toutes matières de l'art statuaire ou de la sculpture et assemblages, dès lors que ces productions et assemblages sont exécutés entièrement de la main de l'artiste, à l'exclusion des articles de bijouterie, d'orfèvrerie et de joaillerie ;
- des fontes de sculpture à tirage limité à huit exemplaires et contrôlé par l'artiste ou ses ayants-droit ;
- des tapisseries tissées entièrement à la main, sur métier de haute ou de basse lisse, ou exécutées à l'aiguille, d'après maquettes ou cartons d'artistes, et dont le tirage, limité à huit exemplaires, est contrôlé par l'artiste ou ses ayants droit ;
- des exemplaires uniques de céramique, entièrement exécutés de la main de l'artiste et signés par lui ;
- des émaux sur cuivre, entièrement exécutés à la main, dans la limite de huit exemplaires numérotés et comportant la signature de l'artiste, à l'exclusion des articles de bijouterie, d'orfèvrerie et de joaillerie.
552. L'artiste doit être vivant au moment de l'achat de l'œuvre.
563. L'entreprise doit inscrire le bien à un compte d'actif immobilisé et elle doit inscrire la somme déduite à un compte de réserve spéciale figurant au passif du bilan, au plus tard à la clôture de l'exercice qui suit celui au titre duquel la déduction est pratiquée. Il est à noter que, selon l'administration, une telle exigence a pour effet d'exclure de la mesure les entreprises qui n'ont pas cette faculté au plan comptable, telles que celles qui relèvent des BNC (Rép. Foulon n° 36875, JOAN du 10 mars 2015, p. 1719).
574. L'entreprise doit exposer au public, à titre gratuit, l'œuvre d'art qu'elle a acquise. L'exposition de l'œuvre est la contrepartie essentielle et obligatoire de l'avantage fiscal. Elle peut avoir lieu dans les locaux de l'entreprise accessibles au public ou aux salariés (ou lors de manifestations organisées par elle ou par un tiers), dans un musée auquel le bien est mis en dépôt, par une collectivité publique ou un établissement public à caractère scientifique, culturel ou professionnel. Quelles que soient les modalités, l'entreprise doit assurer la diffusion de l'information auprès du public. La durée de l'exposition au public correspond à la durée de l'avantage fiscal (V. infra).
58Acquisition d'instruments de musique - Tous les instruments de musique sont a priori concernés (BOFiP, BOI-BIC-CHG-70-10, 2 décembre 2015, n° 60).
591. L'entreprise doit inscrire les instruments acquis à un compte de l'actif immobilisé et elle doit porter dans un compte de réserve spéciale au passif du bilan une somme égale à la déduction opérée (BOFiP, BOI-BIC-CHG-70-10, 2 décembre 2015, n° 160).
602. L'entreprise doit s'engager à prêter l'instrument de musique à titre gratuit aux artistes-interprètes qui en font la demande. Mais il lui suffit de démontrer qu'elle a procédé à la publicité de son offre de prêt auprès du public potentiellement concerné.
2) Un régime fiscal commun
61Si les conditions susvisées sont réunies, l'entreprise est autorisée à déduire de façon extra-comptable le prix de revient de l'œuvre ou de l'instrument de musique (imprimé n° 2058-A-SD, ligne XG - s'agissant des entreprises soumises à un régime réel normal d'imposition - imprimé n° 2033 B - pour les entreprises qui relèvent du régime simplifié d'imposition).
62La déduction fiscale s'étale sur cinq ans ; l'année de l'acquisition et les quatre années suivantes, par fractions égales (BOFiP, BOI-BIC-CHG-70-10, 2 décembre 2015, n° 200).
63Le prix d'achat des œuvres d'art ou des instruments de musique est déductible dans la limite de 5 p. mille du chiffre d'affaires telle que diminuée des versements effectués en application de l'article 238 bis du CGI. Lorsque la fraction du prix d'acquisition ne peut être totalement déduite au titre d'une année, l'excédent non utilisé ne peut être reporté pour être déduit au titre d'une année ultérieure (BOFiP, BOI-BIC-CHG-70-10, 2 décembre 2015, n° 220).
64En pratique, il convient encore de tenir compte des deux règles suivantes :
- La somme qui a été inscrite au compte de réserve spéciale sera réintégrée au résultat imposable au cas de changement d'affectation ou de cession de l'œuvre ou de l'instrument, ou encore au cas de prélèvement sur le compte de réserve (CGI art. 238 bis AB, al.5).
- L'entreprise peut constituer une provision lorsque la dépréciation de l'œuvre excède le montant des déductions fiscales qu'elle a déjà opérées (CGI art. 238 bis AB, al.6), mais si le coût de l'acquisition de l'œuvre est supérieur à 7.600€, elle est tenu de faire procéder à une expertise afin de faire constater cette dépréciation (CGI art. CGI art. 39 - 1, 5°, al.2).
Exemple de combinaison des articles 238 bis et 238 bis AB :
Soit une SA dont le chiffre d'affaires de N est de 1M€ qui fait don de 3.000€ à un musée et qui acquière par ailleurs une oeuvre d'artiste vivant pour un prix de 15.000€.
• Limite globale pour l'ensemble des versements de N : 1M€ x 5/00 = 5.000€
• Versements effectués au titre de l'article 238 bis : 3.000€
• Réduction d'IS au titre de ce versement : 3.000€ x 60% = 1.800€
• Reste à déduire au titre de l'article 238 bis AB : 5.000€ - 3.000€ = 2.000€
• L'entreprise ne pourra pas déduire en N : [15.000€ x 1/5 = 3.000€] - 2.000€ = 1.000€
• Economie d'IS au titre de ce versement : 2.000€ x 33 1/3 % = 667€
• L'entreprise est définitivement privée d'une économie d'IS de : 1.000€ x 33 1/3 % = 333€
• Total des réductions d'IS en N : 1.800€ + 667€ = 2.467€
Afin d'optimiser sa situation fiscale, la société pourrait ne donner que 2.000€ en N et 1.000€ en N+1 :
• Réduction d'IS en N au titre de l'article 238 bis : 2.000€ x 60% = 1.200€
• Economie d'IS en N au titre de l'article 238 bis AB : 3.000€ x 33 1/3 % = 1.000€
• Réduction d'IS en N+1 au titre de l'article 238 bis : 1.000€ x 60% = 600€ (sous réserve que le plafond de versements au titre de cet exercice ne soit pas dépassé).
• Total des réductions d'IS cumulée en N et N+1 : 1.200€ + 1.000€ + 600€ = 2.800€
CONCLUSION
65La modestie des économies fiscales qui sont susceptibles être réalisées, y compris en situation d'optimisation fiscale, permet sans doute de mieux comprendre pourquoi la fiscalité n'est pas un déterminant majeur dans les choix des entreprises mécènes. Même si, après tout, il n'y a pas de petites économies, l'apport de la fiscalité est bien maigre comparée aux retombées médiatiques qui sont générées par des dépenses soigneusement ciblées dans des domaines porteurs. Certes, les organismes bénéficiaires ne doivent pas assurer la publicité de leur mécène, sans quoi il s'agirait d'une opération de parrainage, mais en réalité les entreprises n'ont pas besoin qu'on s'occupe de leur image ; elles le font très bien elles-mêmes ...
66Toulouse, le 17 novembre 2017
Notes de bas de page
1 L'article 12 du projet de loi de finances pour 2018 (projet n° 235) prévoit d'abroger l'ISF et d'instituer un impôt sur la fortune immobilière (IFI).
Auteur
Professeur à l'Université Toulouse Capitole, Centre de Droit des Affaires (CDA)
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La loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations…
Dix ans après
Sébastien Saunier (dir.)
2011