Les notions indéterminées, entre adaptation et sécurité
p. 271-291
Texte intégral
1Le thème de cette journée d’étude est enthousiasmant car, en plus des interrogations assez explicitement sous-entendues quant aux rythmes de production du droit, il suscite également et de manière plus implicite des questions aussi fondamentales qu’insolubles telles que : qu’est-ce que le droit ? Quand et comment le droit est-il, à proprement parler, produit ?
2Sans pouvoir, en vertu du temps qui m’est imparti, entrer dans le détail de telles réflexions, il me paraît néanmoins indispensable d’exposer le point de départ théorique du propos pour en arriver au thème de l’intervention : les notions indéterminées et leur rôle au sein d’un questionnement sur les rythmes de production du droit.
3Qu’est-ce le rythme ? Il peut être défini comme “le retour, à des intervalles réguliers dans le temps, d’un fait, d’un phénomène1”, une cadence, une alternance régulière. Il concerne des éléments naturels tels que les saisons ou construits comme la musique ou un poème. Ce terme porte ainsi une idée de régularité, d’harmonie. Appliqué à la production du droit, il poserait la question de son allure, de sa régularité et de sa cohérence temporelle. Y a-t-il un rythme de production du droit ? Est-il régulier ? Doit-il être rapide ou lent ?
4Le constat général en la matière est la prolifération2 incontrôlée et peut-être incontrôlable de manifestations juridiques en tous genres et de toutes origines, législative, réglementaire, jurisprudentielle, française, européenne, etc. L’inflation législative est la plus dénoncée mais s’en contenter réduit l’angle de vue, la prolifération est sans doute généralisée et concerne toutes les sources. Il y aurait trop de lois, trop de décisions, et peut-être trop de commentaires de celles-ci, faisant passer pour un doux euphémisme la constatation de Carbonnier selon laquelle il y aurait “plutôt trop de droit3”. Le rythme de production du droit irait donc dans le sens d’une accélération générale. Il serait rapide, plus rapide, trop rapide peut-être. Cette observation est sans doute fondée4. Il est certain que nous sommes très loin aujourd’hui de la conception naturaliste d’un droit permanent sur lequel le temps n’aurait pas de prise5 ou même simplement de l’existence d’une règle permanente.
5Pourquoi cet état de fait ? Le droit est le reflet de la société à laquelle il s’applique et subit une évolution au rythme de celle de cette société6. Les connaissances scientifiques, industrielles s’accroissent rapidement, les échanges économiques doivent être toujours facilités, les évolutions sociales se multiplient et les réponses politiques à toutes sortes de difficultés sont souvent exigées de manière urgente et incessante7... Le droit doit sans cesse s’adapter pour ne pas être dépassé et ainsi taxé d’ineffectivité8. À cela s’ajoutent la multiplication des sources internes et externes du droit français et la considérable avancée des droits fondamentaux.
6Si cette accélération est réelle, et parfois sans doute indispensable pour adapter le droit aux évolutions de la société, ce mouvement doit cependant être combiné avec une donnée tout aussi importante : la sécurité. En effet, “une certaine stabilité du droit est inhérente à sa fonction. Le droit est avant tout “un instrument de sécurité et par là de liberté Ce n’est que s’il peut prévoir les conséquences qui s’attacheront à ses actes que l’homme pourra décider sciemment d’entreprendre une activité, qu’il pourra organiser son travail, fonder une famille, qu’il espérera conserver ce qu’il acquiert... Toute prévision est fondée sur les règles existantes ; sa sécurité suppose une certaine fixité des institutions juridiques sur lesquelles elle s’est fondée9.” Le droit doit donc évoluer tout en assurant une certaine sécurité. La coordination de ces deux missions, en apparence contradictoires, semble difficile à assurer. Sur la question, deux thèses se sont opposées tentant de faire primer Lun ou l’autre de ces objectifs.
7La thèse du “statisme” du droit, exposée et illustrée par Ripert, prône un certain immobilisme et privilégie ainsi la sécurité. “Mais la notion de statisme ne peut pas, et ne doit pas être entendue d’une manière absolue. Les excès que Ripert a apportés à certains aspects de sa démonstration ont été généralement critiqués et regrettés ; les juristes ne sont pas nécessairement conservateurs et ennemis de toute nouvelleté10.” En antithèse, une conception de la loi mise sur l’innovation. “Mais le mobilisme absolu, qui prône le changement pour lui-même, risque de devenir un facteur de désorganisation extrêmement dangereux. (...) Une perpétuelle remise en question de tout, par l’excès du mouvement, serait dangereuse. La juste mesure est dans une conception raisonnable de la stabilité qu’exige une vie sociale organisée, régulière et paisible. C’est en ce sens qu’Hauriou complétait la définition traditionnelle du droit : “jus est ars boni et aequi, stabilis et securi”.11”
8Aucune de ces deux missions, adaptation ou sécurité, ne peut prendre le pas sur l’autre, un équilibre est à trouver. Le droit doit à la fois tenter de stabiliser les rapports sociaux, de conserver l’état social pour préserver la sécurité juridique, et s’adapter aux transformations sociales pour conserver son effectivité. Le rythme doit donc être rapide mais pas trop, il doit être harmonieux. La production du droit est ainsi le fruit de tensions entre des forces de conservation et des forces de changement12.
9Comment parvenir à cet équilibre entre adaptation et sécurité ?
10Plusieurs moyens permettent de mesurer le rythme de production du droit. Nous allons plus particulièrement nous pencher sur l’un d’entre eux : la notion indéterminée.
11Comme son nom l’indique, elle a pour caractéristique d’être imprécise, souple, floue dans son contenu. Les notions indéterminées font partie de ce phénomène ancien mais assez récemment mis en avant qu’est le droit souple. Parmi les normes, certaines, traditionnelles, ont une fonction directive autoritaire alors que d’autres ont une fonction directive souple13. Il faut ainsi distinguer deux modalités de la norme : le commandement et le recommandatoire14. Le premier “consiste à tracer des lignes de conduite à suivre rigides, dont les intéressés ne devront pas en principe s’écarter15 ” alors que les recommandations “tracent des lignes de conduite réputées opportunes à emprunter, mais que les intéressés ne sont pas tenus de suivre16”.
12Madame Catherine Thibierge17 remarque que l’avènement du droit souple a été rendu possible par une évolution socioculturelle des sociétés occidentales. En effet, d’une part, le rapport à l’autorité en général s’est transformé. Caractérisée à l’origine par la soumission et la contrainte, l’autorité serait aujourd’hui plus soucieuse de légitimation, ouverte au dialogue et en quête d’adhésion des destinataires. D’autre part, de nouveaux concepts ont émergé, tels que la flexibilité et la complexité. Apparu à l’origine en droit international public, le droit souple se manifeste désormais dans tous les ordres juridiques et dans presque toutes les branches du droit, et ce, à travers des instruments très divers : déclarations, recommandations, directives, avis, chartes, codes de conduite, etc. L’expression de “droit souple” a l’avantage d’une certaine neutralité et surtout englobe différentes manifestations, le droit flou, le droit doux et le droit mou.
13Tout d’abord, le droit doux est un droit non imposé, que ce soit dans son élaboration, en relevant plus de la négociation, ou dans son expression, en étant plus recommandatoire qu’obligatoire. Il ne commande pas. ne donne pas d’ordre. Malgré les apparences, le droit doux, bien que non obligatoire, peut être appliqué et respecté par ses destinataires et la latitude qui leur est laissée est souvent garante d’une meilleure réception de ce droit, par adhésion.
14Ensuite, le droit mou est un droit sans sanction juridique prévue. S’il ne produit pas d’effets juridiques prédéterminés, notamment si la contrainte de l’autorité publique lui fait défaut, il n’en est pas pour autant dépourvu de conséquences : qu’il s’agisse d’effets juridiques possibles, tels que la responsabilité civile, ou d’effets non juridiques, comme un effet d’influence sur les conduites des acteurs ou d’orientation des politiques, ou encore d’un effet contraignant au sens social de la contrainte : du blâme à l’exclusion, en passant par le boycott.
15Enfin, et c’est celui qui nous intéresse ici, le droit flou a un contenu imprécis, est caractérisé par la souplesse de son contenu. Il serait une facette du droit qui existe depuis toujours. Pour l’illustrer, il est possible de prendre l’exemple de l’article 1382 du Code civil18 qui contient des notions, comme la faute ou le dommage19, floues à l’origine, dont le juge doit, au fil du temps, préciser la teneur, et qui conservent une texture ouverte leur conférant une adaptabilité, un caractère évolutif20. La notion ainsi indéterminée est l’opposée de la “norme juridique immédiatementopérationnelle21 ”, c’est-à-dire celle où le juge peut trouver directement la solution, revêtant “une grande précision tant dans le présupposé que dans l’imputation des conséquences22”.
16Il convient de remarquer que la notion indéterminée est elle-même un concept assez flou, elle peut prendre plusieurs formes, connaître différentes dénominations, allant du standard à la notion cadre en passant par la notion à contenu variable. Elle peut également être contenue dans une règle, un principe, un droit fondamental. Il a été choisi de s’intéresser ici aux notions indéterminées en général, de manière à englober toutes ces manifestations de droit flou.
17Ces précisions étant faites, se pose la question de savoir comment se situe la notion indéterminée au sein d’une réflexion sur les rythmes de production du droit ?
18Nous le verrons, les notions indéterminées peuvent être considérées, d’une part, comme un instrument de sécurité. Elles permettent en effet de ralentir le rythme de production législative et constituent des figures stables du droit français, une forme de pérennité dans l’agitation. Les notions indéterminées, d’autre part, permettent une évolution raisonnée du droit en ce que son contenu, flou, peut être adapté, précisé, et ce, de manière mesurée car le changement s’inscrit généralement au sein du système juridique, s’inspire de l’existant.
19Nous allons ainsi, dans un premier temps, nous intéresser aux notions indéterminées en tant qu’instrument participant de la sécurité du droit (I). Dans un second temps, nous verrons qu’elles permettent également son évolution (II).
I – LES NOTIONS INDÉTERMINÉES ET LA SÉCURITÉ JURIDIQUE
20Les notions indéterminées peuvent être considérées comme participant à la sécurité juridique, et ce de deux manières. D’une part, elles permettent concrètement de ralentir le rythme de production législative. Dans leur rapport à la loi, elles évitent en effet que celle-ci change de manière trop fréquente grâce à leur caractère évolutif. D’autre part, les notions indéterminées, envisagées cette fois-ci de manière plus autonome, participent, en elles-mêmes, à la sécurité juridique, en ce qu’elles constituent des éléments de stabilité au milieu des changements incessants évoqués plus avant. Les notions indéterminées représentent donc un facteur de ralentissement de la production législative (A) et des éléments stables du système juridique (B).
A – Les notions indéterminées, facteur de ralentissement de la production législative
21Nous l’avons vu, le droit doit d’adapter aux évolutions de la société et parfois de manière rapide. Il le doit car il ne peut pas être déconnecté de la réalité. Cette cohésion peut être le fruit d’une collaboration entre les sources et ne peut d’ailleurs guère être assurée isolément. Bien qu’elle soit la figure emblématique du droit français et donc assez largement sollicitée, la loi seule en effet n’est pas censée suivre chacune des évolutions de la société. Son rôle traditionnel au sein du système juridique est d’intervenir a priori, de durer, de s’ancrer dans le temps. Il faut à ce titre rappeler les mots de Portalis lors de la présentation du Code civil :
22 “il faut être sobre de nouveautés en matière de législation, parce que s’il est possible, dans une institution nouvelle, de calculer les avantages que la théorie nous offre, il ne l’est pas de connaître tous les inconvénients que la pratique seule peut découvrir ; qu’il faut laisser le bien, si on est en doute du mieux ; qu’en corrigeant un abus, il faut encore voir les dangers de la correction même ; qu’il serait absurde de se livrer à des idées absolues de perfection, dans des choses qui ne sont susceptibles que d’une bonté relative ; qu’au lieu de changer les lois, il est presque toujours plus utile de présenter aux citoyens de nouveaux motifs de les aimer ; que l’histoire nous offre à peine la promulgation de deux ou trois bonnes lois dans l’espace de plusieurs siècles ; qu’enfin, il n’appartient de proposer des changements qu’à ceux qui sont assez heureusement nés pour pénétrer d’un coup de génie et par une sorte d’illumination soudaine, toute la constitution d’un Etat23.”
23Dans l’esprit des codificateurs, la loi devait donc durer, se garder d’une trop grande mobilité. Encore aujourd’hui, il est considéré que, plus largement, le droit “devrait (...) rester à l’abri des tressaillements de l’opinion qui ne résiste guère aux trépidations de l’actualité...24”.
24La loi n’est donc théoriquement pas censée suivre les évolutions les plus rapides de la société25 et, en pratique, il faut ajouter qu’elle n’est de toute façon pas l’instrument idéal pour cela. En effet, son processus de fabrication est nécessairement long. Entre la préparation du projet ou de la proposition de loi, une éventuelle consultation, le dépôt, l’examen par les chambres, les amendements, la promulgation, la publication.., les étapes peuvent être nombreuses et lorsque le rythme de production législative est accéléré, le risque quant à la qualité du texte est dénoncé. De fait, la loi ne peut donc pas suivre le rythme parfois effréné de certaines évolutions de la société.
25La loi seule ne suffit ainsi pas à répondre aux besoins d’évolution du droit. Pour pouvoir tout à la fois être en phase avec la société et se garder de changer de manière trop fréquente, en d’autres termes, évoluer sans changer, elle peut être combinée avec un autre élément du système juridique26 : l’interprétation du juge, qui peut être évolutive. “Le droit étant une création continue de la société, on admettra que la loi n’est que l’expression provisoire de la règle adaptée au milieu social ; (...) elle peut acquérir un sens nouveau par lequel elle s’adaptera aux exigences nouvelles du groupe27”. Un des intérêts des notions indéterminées est justement de faciliter cette évolution sans que le texte ait à changer. Du fait de leur indétermination, elles impliquent et permettent l’intervention du juge qui doit préciser leur sens.
26Les notions indéterminées introduites dans les textes n’ont pas, par définition, un contenu prédéterminé et fixe. Elles ont ainsi pour vocation naturelle d’être floues et donc “déterminables etredéterminables28” par le juge. Celui-ci se voit attribuer une certaine liberté d’appréciation dans la détermination de ce contenu. Il tiendra compte de l’évolution des mœurs ou du contexte social par exemple. Grâce à leur texture ouverte, ces notions indéterminées rendent ainsi possible l’adaptation progressive du texte aux circonstances et évolutions de la société. Son contenu peut évoluer mais sans que le texte ait à changer. Ce dernier peut être conservé, s’inscrire dans la durée tout en restant cohérent et effectif. Par cette collaboration entre texte et interprétation facilitée par la présence de notions indéterminées, le rythme de production législative est donc mesuré, ralenti. Ces outils au contenu souple permettent donc de concilier ces exigences en apparence contradictoires, d’assurer la pérennité des textes sans pour autant que ceux-ci soient figés ou déconnectés29.
27Le droit des obligations est un bon exemple de la pérennité des textes permise par la présence de notions indéterminées. En effet, les dispositions relatives à la responsabilité civile notamment ont survécu à la révolution industrielle, au développement du machinisme, à l’augmentation des accidents, grâce au caractère évolutif des notions de chose, de dommage ou de faute30, à l’association des dispositions législatives et de l’interprétation du juge.
28Les notions indéterminées peuvent avoir pour effet de ralentir le rythme de production des lois en leur évitant de devoir sans cesse être modifiées pour être adaptées aux évolutions de la société ou aux cas non prévus lors de leur élaboration. Les notions indéterminées participent également de la sécurité juridique, en elles-mêmes, en constituant des éléments stables du système.
B – Les notions indéterminées, des éléments de stabilité du système
29Dans leur rapport à la loi, les notions indéterminées permettent, grâce à leur caractère évolutif, de ralentir le rythme de production législative en adaptant le contenu du texte au contexte. La loi n’a pas à être modifiée car le juge adapte ses dispositions floues. De manière plus autonome, les notions indéterminées elles-mêmes, grâce à leur imprécision, peuvent durer et constituent ainsi, pour bon nombre d’entre elles, des éléments stables au milieu d’un système changeant. Par leur pérennité, elles contribuent alors à assurer une certaine sécurité juridique.
30De nombreuses notions indéterminées semblent en effet avoir toujours été présentes au sein du système juridique car elles font partie de sa structure, en constituent des éléments clés, des points de repère. C’est le cas, par exemple et à nouveau, des notions de faute et de dommage qui sont à la base de notre système de responsabilité civile. Celui-ci a connu des évolutions considérables et en subira sans doute bien d’autres mais ces notions floues se maintiennent, en forment l’ossature31. C’est encore le cas de mécanismes anciens et indispensables au système tels que l’abus de droit32 ou la fraude33. Les règles les entourant peuvent changer, ces notions demeurent et elles le peuvent car elles sont indéterminées34, car leur contenu est évolutif. Au surplus, lorsqu’un texte contenant une notion indéterminée change, celle-ci peut lui survivre, être intégrée à la nouvelle version du texte. Ce sera le sort par exemple de la bonne foi maintenue par l’ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, notamment à l’article 1104, car elle est un des principes essentiels de la matière35. Il est même possible d’ajouter que, lorsque des notions indéterminées sont en apparence supprimées, elles peuvent subsister sous une autre appellation car elles sont indispensables, c’est le cas du bon père de famille devenu la personne raisonnable36 et ce sera peut être celui de la cause qui disparaît mais dont les fonctions devraient demeurer37.
31Les notions indéterminées constituent ainsi des éléments stables. Cette pérennité est permise par leur souplesse et peut être expliquée par le fait que certaines d’entre elles constituent des instruments clés du système mais également, et les deux éléments sont liés, bien souvent, car elles matérialisent les valeurs du système juridique, des valeurs beaucoup moins changeantes que les règles elles-mêmes. Il est en effet possible de considérer que le droit n’est pas qu’un amas neutre de règles, de normes ou d’instruments, alignés les uns à côté des autres mais que ceux-ci sont organisés, tendent vers les mêmes objectifs, font partie d’une unité cohérente. Un de ces objectifs pourrait être la réalisation de valeurs’38dont le respect devrait être assuré39 et dont les notions indéterminées faciliteraient l’influence au sein du système. Celles-ci laissent au juge une marge d’appréciation pour que leur contenu soit défini et adapté aux cas et aux évolutions. Il ne s’agit cependant pas de coquilles vides alimentées à son gré par le juge. Ce dernier n’est pas totalement libre dans ce travail de détermination, il est au contraire cantonné, guidé par la nécessité de respecter et réaliser les valeurs du système juridique à travers ses décisions. Le contenu des notions floues est donc nourri, inspiré par ces valeurs qui guident l’interprète40. Cette incursion des valeurs au sein du système permise par l’indétermination des notions souples est particulièrement visible pour les standards. En effet, ceux-ci renvoient de manière guère dissimulée à un “système normatif extra ou parajuridique, c’est-à-dire à un corpus structuré qui mélange ou alterne les mœurs, la morale, l’économie, la technologie, - avec aussi, le cas échéant, un zest de juridique extra-étatique41”. “Le standard réintroduit la vie et la morale dans le droit42 ”. Communément entendu, le standard est un “type, une norme de fabrication43”. Ainsi, la fabrication d’un appareil électrique, par exemple, doit répondre à des standards, des normes de fabrication pour être conforme aux exigences posées en la matière. En droit, le standard est une norme à laquelle doivent répondre, par exemple, les décisions de justice ou les comportements. Selon le dictionnaire de Vocabulaire juridique du Doyen Cornu, le terme désigne “une norme souple fondée sur un critère intentionnellement indéterminé, une notion cadre44”. En posant un modèle de référence, une norme au sens courant du terme, en impliquant “la mesure de comportements et de situations en termes de normalité45 ”, les standards renvoient explicitement à la mobilisation de valeurs. Les bonnes mœurs, par exemple, ne sont pas définies par les textes mais ne sont pas vides de sens pour autant. Ce standard, même si sa substance est aujourd’hui réduite à peau de chagrin46 et s’il n’a pas été repris par l’ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, est imprégné de morale47 Comme le fait remarquer Monsieur Philippe Le Tourneau, “la loi ne renvoie pas aux mœurs, mais aux bonnes mœurs. (...) Dans la détermination des bonnes mœurs la liberté du juge n’est pas totale. Il lui faut rechercher quel est, dans l’état actuel de la société, l’idéal auquel adhère la majorité des citoyens, et quel est l’esprit des textes qui entrent en ligne de compte, le tout sous le contrôle de la Cour de cassation48 ”. Il en est de même de la bonne foi qui “reste une notion imprégnée de morale49”. L’indétermination des notions floues emporte la nécessité pour le juge devant définir leur contenu de se référer aux valeurs du système juridique. Celles-ci présentent bien plus de permanence que la majorité des règles et rendent donc indispensables et pérennes les notions indéterminées.
32En évitant des changements législatifs trop fréquents et en constituant des éléments stables au sein du système juridique, les notions indéterminées contribuent à assurer l’objectif de sécurité juridique. Elles ralentissent le rythme de production législative et sont elles-mêmes ancrées de manière particulièrement durable au sein de l’ordre juridique. Cependant, sécurité ne veut pas dire immobilisme, sinon l’équilibre délicat évoqué en introduction ne serait pas assuré. Les notions indéterminées permettent également, grâce à leur flexibilité, au droit d’évoluer.
II – LES NOTIONS INDÉTERMINÉES ET L’ÉVOLUTION DU DROIT
33Les notions indéterminées interfèrent également d’une autre manière dans les rythmes de production du droit. En effet, s’il peut être considéré qu’elles ralentissent le rythme de production législative, constituent des éléments stables au sein du système juridique, s’arrêter là rend leur perception incomplète. Certes, les textes subsistent, mais leur contenu évolue, le droit, par le biais des notions indéterminées, change. Nous allons ainsi observer le phénomène en modifiant l’angle de vue. Dans un premier temps, nous verrons que les notions indéterminées permettent l’évolution du droit (A). Dans un second temps, nous relativiserons ce constat en précisant que, malgré ces changements, l’essentiel généralement demeure, il y a rarement révolution et instabilité mais plus souvent adaptation de l’existant (B).
A – L’évolution du droit grâce aux notions indéterminées
34Nous avons vu que les notions indéterminées présentes dans les textes permettent de ralentir le rythme de production législative. En en adaptant le contenu, elles évitent que le texte lui même n’ait à changer. Cependant s’arrêter à cette constatation rend compte de manière imparfaite du phénomène. Si la loi ne change pas grâce à la flexibilité des notions indéterminées qu’elle contient, le droit, lui, évolue.
35Il peut en effet être considéré que le droit est finalement davantage le résultat d’une collaboration entre les différentes sources que le produit de chacune d’elles isolément envisagées. Des données inspirent l’édiction des règles, la loi les pérennise, le juge les interprète, les fait évoluer, les applique, la doctrine les commente, etc. À travers ces rencontres, le droit évolue et les notions indéterminées ont un rôle à jouer dans cette dynamique.
36Leur contenu indéterminé leur permet en effet d’adapter les textes aux situations concrètes et aux évolutions de la société. Ces notions souples peuvent prendre la forme de standard mais pas uniquement. “Le standard est un concept beaucoup plus étroit que la notion souple : toute notion souple n’est pas un standard, loin s’en faut, mais il y aura parfois difficulté à les distinguer dans certains cas50 ”. Il est possible de prendre à nouveau pour exemple les “bonnes mœurs”, une notion indéterminée dont l’appréciation “est fortement contingente51”. Elle fondait autrefois la réprobation des juges face au concubinage, à travers notamment l’impossibilité pour la concubine d’obtenir réparation du dommage causé par le décès accidentel de son compagnon. Cette jurisprudence a été abandonnée, et même un concubinage adultère ne paraît plus faire obstacle, sous réserve d’appréciation de la stabilité des relations, à l’indemnisation de la concubine52. Alors que le texte demeurait53, la notion indéterminée également, le contenu, lui, évoluait. Le standard implique une idée de normalité, de modèle comparatif. Certaines notions indéterminées échappent cependant à cette catégorie, c’est le cas par exemple de celle d’“accident de la circulation”. La notion n’a pas été définie dans la loi et le juge s’emploie à en préciser le contenu et à l’adapter aux évolutions de la société54 sans que soit mobilisée une réflexion en termes de normalité.
37Dans leur rapport à la loi, les notions indéterminées permettent l’évolution du droit largement entendu en en faisant varier le contenu. Elles sont également présentes en dehors des textes de loi, dans les principes et les droits fondamentaux par exemple, et permettent d’en assurer l’adaptation.
38Au premier chef, la notion indéterminée est peut-être attendue au sein des textes pour en faciliter les évolutions. Le droit ne se résume cependant pas aux textes et il s’exprime notamment à travers l’existence de principes, des instruments au sein desquels la notion indéterminée a particulièrement sa place. Les principes55 sont très présents en droit français puisqu’ils existent “en toutes matières et de tout temps”56 et “sont, pour beaucoup d’entre eux, à la base de notre droit”57.
39Ils sont des normes caractérisées par une grande généralité et l’incarnation de certaines valeurs’58. La plupart des principes contiennent ainsi des notions indéterminées leur permettant de s’adapter à l’infinité d’applications potentielles qu’ils appellent et facilitant la mobilisation de valeurs pour en déterminer le contenu. Il est possible de prendre pour exemple le principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage59. Il a été créé par la jurisprudence sur la base de l’article 544 du Code civil. Grâce aux notions indéterminées qu’il contient, il évolue dans son contenu. Par exemple, il a été considéré dans un arrêt du 28 juin 1995 par la deuxième chambre civile “qu’un propriétaire, même s’il ne réside pas sur son fonds, est recevable à demander qu’il soit mis fin aux troubles anormaux de voisinage provenant d’un fonds voisin”. Cela signifie que les troubles de voisinage ne sont pas que des dommages causés à la personne des voisins mais à la propriété elle-même. Ils atteignent les biens et pas seulement les personnes60.
40Peut-être plus étonnants à trouver ici, les droits fondamentaux sont également utilisés comme des notions souples et permettent, tout en assurant la pérennité des textes, d’adapter le contenu de ces derniers. Au niveau européen, les droits contenus dans la Convention européenne des droits de l’homme ne sont pas définis dans le texte lui-même. La Cour de Strasbourg en précise et en fait évoluer le sens. Par exemple, la vie familiale, protégée par l’article 8 de la convention, est une notion indéterminée, à la texture ouverte, lui permettant de s’adapter aux évolutions. Si la vie familiale présuppose l’existence d’une famille, celle-ci ne s’est progressivement pas limitée pas aux seules relations fondées sur le mariage, mais a englobé d’autres liens familiaux. Le droit au respect de la vie familiale vaut ainsi tout autant pour la famille naturelle que pour la famille légitime ou la famille adoptive. Alors qu’en 200161, les juges européens avaient fermement affirmé que des relations durables entre des partenaires homosexuels ne relevaient pas du droit au respect de la vie familiale au sens de l’article 8 de la convention, le 24 juin 201062 l’évolution des mœurs et des attitudes sociales conduisirent la Cour de Strasbourg à admettre qu’il était devenu artificiel de maintenir ce point de vue traditionnaliste.
41Les notions indéterminées permettent ainsi l’adaptation du droit aux évolutions de la société. Si elles permettent de ralentir le rythme de production législative et sont stables mais permettent l’évolution du droit plus largement entendu, se pose alors la question de l’intensité de cette évolution et de ses conséquences.
B – Évolution et non révolution
42L’existence, au sein du système juridique, de notions floues permet l’adaptation du droit aux évolutions de la société, ce sont donc des outils de changement. Ce dynamisme est rendu possible par une collaboration entre les sources et notamment par le pouvoir d’appréciation laissé au juge. Or, ce caractère évolutif, cette liberté et cette souplesse ne vont parfois pas sans interroger.
43Il est en effet, d’une part, régulièrement reproché aux notions indéterminées leur caractère discrétionnaire et donc l’insécurité63 qu’elles comportent. La souplesse dans la mise en œuvre de ces notions et donc leur imprécision rendrait imprévisible leur utilisation. Néanmoins, nous l’avons vu, un tel constat, s’il ne peut sans doute pas être balayé, peut être modéré. La liberté laissée aux juges dans la détermination du contenu de ces notions souples est notamment cantonnée, encadrée par le renvoi aux valeurs du système juridique. Il est même possible de proposer que parfois la présence de notions indéterminées évite l’arbitraire du juge qui, confronté à l’absence ou l’insuffisance de règles précises, se doit néanmoins de statuer, en le guidant. Elles constituent des points de repères rappelant les grands principes du système.
44D’autre part, c’est le constat des évolutions persistantes du droit qui questionne. Si, certes, les notions indéterminées ralentissent, limitent l’inflation législative et constituent en elles-mêmes des instruments pérennes, leur caractère évolutif, ne participe-t-il pas à l’accélération du rythme de production du droit si souvent dénoncé ? Nous l’avons vu, les textes et les notions indéterminées restent mais le droit s’adapte, évolue, change donc. L’existence de notions déterminées au sein des textes peut ainsi limiter les changements législatifs mais en créant peut-être en contrepartie une augmentation du contentieux. Le juge doit se prononcer sur leur contenu et le refaire à chaque fois que nécessaire. Peut-être les notions indéterminées pallient-elle l’inflation législative par l’inflation judiciaire64 ?
45Sur ce point, il est sans doute indiscutable que le besoin de détermination des notions floues conduise à remplacer le changement de loi par le recours au juge. Le changement, l’évolution du droit est inévitable. Cependant, lorsqu’il est amené progressivement par l’intervention du juge et justifié par la diversité des cas et l’évolution de la société, il est sans doute plus acceptable car d’une intensité raisonnable. Le changement peut en effet être concilié avec la sécurité. Il n’exclut pas l’esprit de conservation, comme Ripert le soulignait : “réparer le vieil édifice, c’est empêcher qu’il ne s’écroule65”. Tout changement ne conduit pas nécessairement et finalement assez rarement à une révolution, à une véritable remise en cause. Ainsi est-il préférable de parler d’évolution, car cette notion implique un changement modéré et qui n’atteint pas la base, les principes essentiels, les institutions du système juridique. Les changements se font sur la base du droit existant, combinant adaptation et respect des traditions.
46Il est ainsi possible aujourd’hui de relativiser les changements incessants, l’accélération généralisée des rythmes de production du droit évoqués en introduction en constatant qu’évolution n’est pas synonyme de révolution, chaque changement s’inscrit au sein de l’ordre juridique, repose sur un socle préexistant, des valeurs, des institutions, des notions indéterminées qui constituent autant de points de repères utiles pour faire face aux évolutions. Le droit actuel s’alimente à la source du passé66.
47La réforme du droit des contrats tant attendue reprend par exemple les principes essentiels et centenaires du droit des contrats, les jurisprudences constantes, même la cause dont la disparition est scellée devrait voir son esprit, ses fonctions subsister.
48Je terminerai en citant le Professeur Jean-Louis Bergel, selon lequel “les fondements sont plus durables que leurs manifestations superficielles67 et les révolutions juridiques sont rares, car l’équilibre des multiples forces conservatrices et créatrices du droit empêche, même dans des moments de crise, les bouleversements durables et favorise de simples oscillations68”
Notes de bas de page
1 Dictionnaire Larousse
2 “Sur le terrain législatif et dans tous les domaines, on constate unanimement, et souvent on dénonce, ta prolifération des lois nouvelles. A côté de certaines grandes lois, rajeunissant et codifiant de grands chapitres du droit, d’une manière parfois heureuse, parfois très discutable, on relève quotidiennement la multiplicité de ce que Capitant appelait les “petits bouts de lois”, sur les points les plus divers et les plus particuliers. Elles interviennent souvent pour reprendre et modifier tel ou tel détail d’une loi précédente et récente. La mobilité de la législation a atteint un point tel qu’elle incite les plaideurs à prolonger les procès, par l’exercice répétés des voies de recours, en spéculant sur une modification législative dont ils pourraient ainsi profiter” (P. Hebraud, “Observations sur la notion du temps dans le droit civil”, Mélanges Kayser, t. II, Puam, 1979, p. 1 et s.).
3 J. Carbonnier, Flexible droit - Pour une sociologie du droit sans rigueur, LGDJ, 10ème éd., p. 9.
4 Voir cependant : E. Grass, “L’inflation législative a-t-elle un sens ?”, RDP. 2003. 139 et G. Hispalis, “Pourquoi tant de loi(s) ?”, Pouvoirs. 2005. 11.
5 “Comme nous le dit Domat, seules les lois divines sontintemporelles” (Ph. Thery, “La justice entre l’exigence de la durée et la contrainte de l’urgence”, Droits, no 30, 2000, p. 89 et s., spéc. p. 89).
6 “On constate nécessairement que le droit se modifie avec le temps et que l’ordre juridique d’un pays donné est en perpétuelle mutation. La constante mutabilité du droit, sa relativité dans le temps, est un de ses traits caractéristiques. (...) Le droit se transforma sans cesse au rythme de l’histoire dont il épouse, freine ou encourage l’évolution si bien qu’il traduit les conditions de son temps et porte les stigmates de l’époque où il s’est formé. Ce n’est pas une donnée stable. Il varie avec la culture de chaque société. La modification du droit est aussi fonction des variations de l’opinion publique à l’égard des règles qu’il édicte qui, pour être effectives et praticables, doivent être comprises et acceptées et qui doivent s’adapter à la conscience populaire. Ainsi, le droit devient plus ou moins rural ou urbain, commercial ou individuel, plus ou moins libéral ou autoritaire, plus ou moins général ou spécialisé.., selon l’évolution des sociétés qu’il régit.” (J.-L. Bergel, Théorie générale du droit, Dalloz, 5ème éd., 2012, no 97, p. 124 et s.) ; “Le droit évolue et (...) cette évolution se précipite à l’époque contemporaine, avec l’accélération de l’histoire. Le droit doit s’adapter maintenant sans répit à la modernité, ce qui bouscule les rythmes temporels classiques et en précipite le mouvement.” (J.-L. Bergel, Théorie générale du droit, préc., p. 128-129).
7 “La relation de l’homme politique à l’électeur s’opère principalement à travers les médias : la pression s’exerçant sur le Gouvernement en faveur de nouveaux textes se voit ainsi amplifiée, appelant, à un rythme largement dicté par l’événement, des réponses de plus en plus rapides.” (Sécurité juridique et complexité du droit. Rapport public CE. 2006, p. 254).
8 “Il est devenu banal de dire que les sociétés contemporaines sont marquées par la recherche d’une satisfaction immédiate des besoins, par la disparition des repères, par la rapidité des changements techniques et de leur diffusion, ou par le renouvellement constant de l’information. Certes, le droit n’a pas pour objet d’endiguer des évolutions aussi lourdes : il doit au contraire en accompagner les mouvements. Les normes se périment donc aujourd’hui aussi vite que les situations auxquelles elles s’appliquent. (...) Ce qui caractérise les rapports sociaux aujourd’hui est sans aucun doute leur complexité, leur changement permanent, l’obsolescence de plus en plus rapide des connaissances et des techniques. Courant le risque d’être dépassé, le système normatif doit s’adapter en permanence à de telles mutations, et répondre à des défis aussi divers que la révolution des techniques de communication, l’éparpillement des revendications économiques et sociales, ou le rythme des progrès scientifiques” (J.-R Camby, “La sécurité juridique : une exigence juridictionnelle (Observations à propos de l’arrêt du Conseil d’État du 24 mars 2006. Société KPMG)”, RDP. 2006, no 5, p. 1169).
9 P. Hebraud, “Observations sur la notion du temps dans le droit civil”, préc., p. 1 et s.
10 Ibid.
11 P. Hebraud, “Observations sur la notion du temps dans le droit civil”, préc., p. 1 et s.
12 G. Ripert, Les forces créatrices du droit, LGDJ, 1955, réimprimé en 1994
13 P. Amselek, “Nonne et loi”, in La loi, APD, t. 25, Sirey, 1980, p. 89 et s., spéc. 89
14 P. Amselek, “L’évolution générale de la technique juridique dans les sociétés occidentales”, RDP. 1982. 275, spéc. 285
15 Ibid.
16 Ibid.
17 C. Thibierge, “Le droit souple, Réflexion sur les textures du droit”, RTDCiv. 2003. 599
18 Article 1382 qui deviendra l’article 1240 du Code civil lors de l’entrée en vigueur de l’ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, le 1er octobre 2016.
19 L. Maurin, “Le droit souple de la responsabilité civile”, RTDciv. 2015. 517
20 “Certains concepts juridiques sont intentionnellement laissée dans le vague parce que l’“indétermination intrinsèque” de leur contenu est un “facteur d’adaptation” du droit. Ils “ont pour vocation naturelle d’être indéterminés, et donc toujours déterminables et redéterminables” suivant les circonstances et les époques. Ce sont des notions évolutives qui constituent, comme on a pu le dire, “les organes souples du système juridiques”, “sa chair”, par opposition aux notions déterminées qui en sont “l’ossature” (G. Cornu, Droit civil, Introduction, les personnes, les biens, no 188). Le droit a, en effet, besoin d’un certain nombre de notions souples, à contenu variable, comme la faute, la négligence, l’imprudence, l’intérêt général, l’équité, l’urgence, les bonnes mœurs, le bon père de famille, l’ordre public... On parle à leurs propos de “concepts soupapes”, de “paragraphes caoutchouc”, de “notions à contenu variable”, flou, indéterminé. Pour être opérationnelle, la logique juridique doit s’accommoder de cette élasticité qui tient compte de l’évolution des mœurs, du contexte social, de règles et conventions implicites des relations humaines et permet au droit de les intégrer dans un système assoupli. C’est l’idée de “flexible droit”, magnifiquement mise en lumière par le doyen Carbonnier. (...) Ce serait, plus encore, selon Perelman, une source de rationalité non formelle, d’ordre dialectique ou rhétorique, cherchant à éviter les solutions manifestement “déraisonnables”, inadaptées ou iniques. (...) Le législateur introduit souvent, délibérément, des notions indéterminées dans les textes pour laisser au juges ou aux autorités publiques une plus grande liberté d’appréciation. Il en est de même dans les traités internationaux, en particulier dans le droit des communautés européennes ou dans la CEDH. La technique législative moderne, grâce à de telles notions, procède à de véritables “délégations normatives” aux autorités de décision et dose le niveau d’indétermination de ces notions floues en fonction du pouvoir que l’on entend effectivement déléguer. Ces concepts à contenu indéterminé permettent de maintenir l’équilibre entre l’ordre juridique et le milieu social. Grâce àeux, la permanence des textes peut être assurée sans figer le droit, ni le laisser se déconnecter de la réalité. Dans le présent, ces notions souples sont indispensables pour saisir in concreto la plasticité des comportements humains sous des formes adéquates. Dans le temps, elles permettent l’adaptation des qualifications juridiques et donc de l’application des règles correspondantes à l’évolution de la société : la notion de bonnes mœurs est essentiellement évolutive et n’a pas le même contenu en 2000 qu’en 1804 !” (J.-L. Bergel, Méthodologie juridique, PUF, 2001, no 102, p. 115 et s.). Voir également : C. Thibierge, “Le droit souple, Réflexion sur les textures du droit”, préc.
21 P. Jestaz, “Les standards dans les divers systèmes juridiques, Rapport de synthèse”, in RRJ Droit prospectif 1988-4, p. 1182 et s.
22 Ibid.
23 Portalis, Discours préliminaire du Code civil.
24 J.-L. Bergel, Théorie générale du droit, préc., no 102, p. 128-129.
25 “L’urgence nuit à la qualité de la loi, elle nuit également au dialogue avec les acteurs sociaux, elle nuit à la démocratie” (A. Lemaire et C. Verot, “Une loi de bonne qualité est avant tout une loi démocratiquement fabriquée”, JCPG. 2013. 793).
26 “Le droit est un système, un ensemble organisé d’éléments, qui structure l’élaboration, l’application et la sanction du droit” (P. Deumier, Introduction générale au droit, LGDJ, 3ème éd., no 127, p. 113) ; P. Jestaz, Le droit, Dalloz, collection Connaissance du droit, 7ème éd. 2012, p. 13 : Monsieur Philippe Jestaz définit le droit comme un système, “c’est-à-dire un ensemble d’éléments interactifs qui se veut cohérent”. Il utilise également comme synonyme la notion d’ordre juridique ayant pour avantage de traduire à la fois le sens contraignant du mot et le sens grec, celui de l’harmonie (p. 43 et s.).
27 F. Terre, Introduction générale au droit, Dalloz, 9ème éd., 2012, no 554, p. 473.
28 G. Cornu, Droit civil, Introduction, les personnes, éd. Montchrestien, coll. Domat droit privé, 13ème éd., 2007, no 188.
29 Les “standards suscitent un assouplissement marqué de la norme, qui n’est plus si directive entre les mains du juge. Fluctuante, elle se trouve à même d’évoluer à l’abri d’une règle inchangée, moins au gré de la variété des juges qu’en fonction des transformations que l’époque impose à la société. En quoi le standard introduit un facteur de souplesse dans la règle de droit, que d’autres techniques ne réalisent pas au même degré. Surtout, elle aboutit à une coopération entre législateur et juge, le premier faisant confiance au second, pour créer des normes adaptables, qui évolueront avec les circonstances sans aucune nécessité de les modifier. Le procédé du standard fait donc intervenir des variations dans la règle de droit, sans porter atteinte à sa lettre. Bien sûr c’est parfois la raison d’une critique qui insiste sur son caractère discrétionnaire” (R. Libchaber, L’ordre juridique et le discours du droit, Essai sur les limites de la connaissance du droit, LGDJ, 2013, no 257. p. 339 et s.).
30 Sur ce point notamment : “Les concepts de responsabilité, de faute, d’imputation n’ont pas de réalité ontologique. Ils n’ont pas d’existence comme catégories a priori, indépendamment des conceptions qui déterminent te système juridique dans lequel on les considère à un moment donné” (D. Deroussin, Histoire du droit des obligations, Economica, 2ème éd., 2012, p. 639).
31 Elles sont maintenues dans l’ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations.
32 F. Audren et C. Fillon, “Louis Josserand ou la construction d’une autorité doctrinale”, RTDciv. 2009. 39 ; P. Ancel et C. Didry, “L’abus de droit : une notion sans histoire ?”, in L’abus de droit : comparaisons franco-suisses : actes du séminaire de Genève, mai 1998, p. 51 et s.
33 “Appuyé sur une longue tradition, fréquemment appliqué par lestribunaux, le principe d’un correctif au fonctionnement ordinaire des règles juridiques en cas de fraude estindiscutable” (J. Ghestin, G. Goubeaux et M. Fabre Magnan, Traité de droit civil, Introduction générale, LGDJ, 4ème éd., 1994, no 809, p. 798).
34 “On admettra le principe qu’il n’y apas, en droit, de concept sans idées qui les suscitent ou les prolongent et donc dominent leur régime juridique. Les idées génèrent, animent et structurent les concepts : entre les choses et les mots qui les désignent, il y a des idées qui donnent du sens aux choses, permettent de les connaître et de les comprendre, rendent le présent intelligible et l’avenir prévisible. (...) Le concept ou la notion de « consommateur » en fournit un bon exemple. Issue de pratiques commerciales attentatoires à l’information et au consentement éclairé des consommateurs puis des réactions de certains milieux économiques à des méthodes agressives de démarchage et de vente, l’idée de protection des consommateurs a inspiré les premiers textes consuméristes au début des années 1970." (J.-L. Bergel, “A la recherche de concepts émergents en droit”, D. 2012. 1567).
35 M. Mekki, “Les principes généraux du droit des contrats au sein du projet d’ordonnance portant sur la réforme du droit des obligations”, D. 2015. 816 ; D. Mazeaud, “Droit des contrats : réforme à l’horizon !”, D. 2014. 291.
36 J. Huet, “Adieu bon père de famille, Relation d’un cauchemar suivie d’observations sur les mots en droit, et d’autres choses encore”, D. 2014. 505
37 C. Grimaldi, “Les maux de la cause ne sont pas qu’une affaire de mots, À propos du projet d’ordonnance portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations”, D. 2015. 814 ; R. Boffa, “Juste cause (et injuste clause), Brèves remarques sur le projet de réforme du droit des contrats”, D. 2015. 335 ; D. Mazeaud, “Droit des contrats : réforme à l’horizon !”, préc.
38 C. Grzegorczyk, La théorie générale des valeurs et le droit, LGDJ, 1982, ; “Les normes incarnent généralement des valeurs : la justice, l’égalité, la sécurité, la stabilité, l’ordre et la paix”, “Dans sa recherche de la solution juste, le juge se référera, directement ou indirectement, à un système de valeurs, valeurs éthiques, morales, religieuses, pour orienter ou justifier son choix” (Le juge, gardien des valeurs ?, dir. V. Fortier, CNRS éd., 2007, p. 15 et p. 16) ; “la norme n’est pas seulement une manière de faire, d’être ou de penser, socialement définie, opératoire et sanctionnable. Elle tire l’essentiel de sa force de n’être pas perçue justement comme un simple arbitraire, mais de la reconnaissance de sa légitimité qui se mesure par références aux valeurs. Si la norme est l’institué, la valeur est l’instituant“ (P. Robert, F. Soubiran-Paillet et M. Van de Kerchove, “Normativités et internormativités”, in Normes, normes juridiques, normes pénales, dir. P. Robert, F. Soubiran-Paillet et M. Van de kerchove, t. I, L’Harmattan, 1997, p. 17).
39 “La mouvance de ces idées est connue : le droit est couramment présenté comme un instrument - outil, mécanisme neutre, convention ou règle de jeu - utilisé pour organiser et maîtriser les relations sociales. Dérive absolue. (...) Ultime dérive, certains prétendent éliminer la cause des actes volontaires de l’homme tendant à un effet de droit. Les opérations juridiques deviennent abstraites (abstraites de leur cause), déconnectées de leur dimension morale essentielle, ce qui est le plus sûr moyen d’échapper à tout jugement de valeur, alors que la cause, de l’essence du vouloir susceptible d’effets juridique, et elle seule, détermine ce pouvoir et garantit qu’il mérite la reconnaissance et la sanction du droit” (P. Diener, “Ethique et droit des affaires”, D. 1993. Chron. 17).
40 A propos du droit souple : “- une notion constituant une interface à la fois entre les valeurs et le droit dur, et entre le phénomène social du droit et le droit lui-même - une notion qui contribue à relier le droit à l’évolution sociale et aux autres sciences humaines” (C. Thibierge, “Le droit souple, Réflexion sur les textures du droit”, préc.)
41 P. Jestaz, “Les standards dans les divers systèmes juridiques, Rapport de synthèse”, préc.
42 A. Tunc, “Standards juridiques et unification du droit”, RIDC, vol. 22 no 2, Avril-juin 1970. pp. 247-261
43 Le Nouveau Petit Robert de la langue française 2007, “Standard”, sens no 1, p. 2428
44 G. Cornu, Vocabulaire juridique, PUF, 9ème édition, 2011, “Standard”, 1, p. 978
45 S. Rials, Le juge administratif français et la technique du standard (Essai sur le traitement juridictionnel de l’idée de normalité), LGDJ, 1980, no 93, p. 120
46 La Cour de cassation annulait traditionnellement les libéralités consenties à un(e) concubin(e), dès lors qu’il était établi qu’elles avaient pour but d’inciter le bénéficiaire à la poursuite des relations hors mariage. Cette solution désuète a été abandonnée par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 3 février 1999 (no de pourvoi : 96-11946, Bull. civ. 1999 I no 43, D. 1999. J. 267, rapp. Savatier ; note Langlade-O’sughrue ; D. 1999. sonun. 377, obs. Lemouland ; D. 1999. 307, obs. Grimaldi ; D. 1999. Chron. 351, obs. C. Larroumet ; RTDciv. 1999. 364 obs. J. Hauser), dont la solution a été confirmée par un arrêt d’Assemblée plénière en date du 29 octobre 2004 (no de pourvoi : 03-11238, Bull.,AP, 2004 no 12p. 27, D. 2004. 3175, note Vigneau; Defrénois 2004, 12-30, no 24, art. 38073, p. 1732-1738, obs. Libchaber ; Defrénois 2005, 02-15, no 3, art. 38096, p. 234-238, obs. Piedelièvre ; RTDciv. 2005. 104, obs. J. Hauser)
47 Ph. Le Tourneau, “Le droit et l’éthique”, in Mél. X. Linant de Bellefonds, Litec 2007, p. 291 s.
48 Ph. Le Tourneau. JurisClasseur Civil Code > App. Art. 1131 à 1133, Fasc. unique : CONTRATS ET OBLIGATIONS. - Exception d’indignité. - Règles "Nemo auditur" et "In pari causa", no 111 et s.
49 Ph. Le Tourneau et M. Poumarède, “Bonne foi”, Rep. Civ. Dalloz, janvier 2009
50 P. Jestaz, “Les standards dans les divers systèmes juridiques, Rapport de synthèse”, préc.
51 J. Hauser et J.-J. Lemouland, “Ordre public et bonnes mœurs”, Rep. Civ. Dalloz, janvier 2015.
52 Cass., ch. mixte, 27 févr. 1970, D. 1970. 201, obs. Combaldieu ; JCP 1970. II.16305, concl. Lindon, note Parlange. - Crim. 19 juin 1975, D. 1975. 679, note Tunc. - Crim. 8 janv. 1985, JCP 1986. II. 20588, note Endréo.
53 L’ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016 supprime la référence aux bonnes mœurs pour retenir la notion englobante d’ordre public.
54 On nous concédera qu’à qualifier accident de la circulation la rupture inopinée d’un tendeur d’arrimage de toit la Haute juridiction fait d’une notion souple un concept... élastique !” (Ph. Brun et P. Jourdain. “Responsabilité civile”. D. 2006. 1929).
55 S. Caudal (dir.), Les principes en droit, préc. ; Les principes généraux du droit, droit français, droit des pays arabes, droit musulman, Bruylant, 2005 ; D. Bureau, “L’ambivalence des principes généraux du droit devant la Cour de cassation”, préc. ; P. Morvan, “Principes”, préc., p. 1201 et s. ; N. Molfessis, “La notion de principe dans la jurisprudence de la Cour de cassation (Civ. 1re, 15 mai 2001, à paraître au Bulletin ; Civ. 3e, 10 mai 2001, à paraître au Bulletin ; Civ. 1re, 4 avr. 2001, Bull. civ. I, no 105, p. 67 ; Crim. 13 mars 2001 ; Com. 27 févr. 2001, pourvoi no 99-15.414 ; Soc. 9 janv. 2001, Bull. civ. V, no 237, p. 186 ; Civ. 1re, 17 oct. 2000, Bull. civ. I, no 249, p. 163 ; Soc. 20 juin 2000, Bull. civ. V, no 237, p. 186)”, préc. ; P. Sargos, “Les principes généraux du droit privé dans la jurisprudence de la Cour de cassation, les garde-fous de l’excès du droit”, préc. ; P. Morvan, Le principe de droit privé, préc. ; M. De béchillon, La notion de principe général en droit privé, préc. ; A. Jeammaud, “Les principes dans le droit français du travail”, Dr. soc. 1982. 618 ; J. Boulanger, "Principes généraux du droit et droit positif”, in Le droit privé au milieu du XXème siècle, Etudes offertes à G. Ripert, LGDJ, 1950, t. I, p. 51 et s.
56 P. Deumier, Introduction générale au droit, préc., no 15, p. 21. Dans le même sens : “Ces principes sont, pour beaucoup d’entre eux, à la base de notre droit. Tous les champs disciplinaires semblent concernés : des plus classiques, comme le droit civil ou le droit administratif aux plus jeunes, tel le droit communautaire ou le droit de l’environnement ; des plus techniques comme le droit budgétaire ou le droit des marchés publics, aux plus généraux tel le droit international ou le droit constitutionnel” (S. Caudal, “Rapport introductif”, in Les principes en droit, S. Caudal (dir.), Economica, 2008, p. 1 et s., spéc. p. 1).
57 S. Caudal, “Rapport introductif”, in Les principes en droit, préc., p. 1.
58 A. Jeammaud, “De la polysémie du terme “principe” dans les langages du droit et des juristes”, in Les principes en droit, préc., p. 49 et s.
59 “Ce critère de normalité ou d’anormalité des troubles de voisinage constitue un standard, une notion souple et évolutive, livrée à l’appréciation souveraine du juge (Civ. 3e, 4 janv. 1990 précité, V. aussi, Civ. 3e, 3 janv. 1969, Bull. civ. II, no 13, p. 12 ; 24 avr. 1970, Bull. civ. III, no 281, p. 204 ; Civ. 2e, 8 juin 1983, Bull. civ. II, no 122, p. 85 ; A. Mourocq, note J.C.P. 1980 (N) II, p. 106).” (J.-L. Bergel, “Troubles du voisinage : chronique de jurisprudence”, RDI 1990. 189).
60 H. Périnet-Marquet, Droit des biens,JCP 1996.1.3921 no 4 ; A. Robert, Biens et droits réels, D. 1996, Somm. 59.
61 CEDH, DC Mata Estevez c/ Espagne du 10 mai 2001 (req. no56501/00).
62 CEDH 24 juin 2010, Sclialk et Kopf c/ Autriche, req. no 30141/04.
63 S. Néron, “Le standard, un instrument juridique complexe”, JCP 2011. 1003 ; “Ils avaient compris également que le standard présentait un certain nombre d’inconvénients ou de dangers. Mais aucun de ceux-ci ne leur paraissait important. Certes, reconnaissaient-ils, le standard ouvre la porte à l’arbitraire du juge. Mais, sans les standards, le juge déforme la loi, ce qui n’est pas mieux. Il est vrai aussi que les standards ne permettent pas un développement scientifique du droit, puisqu’ils rendent inutiles les raisonnements et les constructions. Il est aisé de répondre que le droit n’a pas pour objectif d’être un exercice intellectuel. On a dit également que le standard permettait en fait au juge de poser des règles. Mais ce sont des règles que le juge modifiera au fur et à mesure des besoins de la société. Enfin, si l’on affirme que le standard porte atteinte à la séparation des pouvoirs, il est aisé de répondre qu’en toute hypothèse, le magistrat possède un certain pouvoir de fait et qu’il est préférable que ce pouvoir lui soit ouvertement délégué par le législateur dans le standard que pris par lui pour répondre aux besoins sociaux devant la carence dulégislateur.” (A. Tunc, “Standards juridiques et unification du droit”, préc.).
64 “Comme le standard suppose l’intervention du juge, le Droit se judiciarise. Au final, si la norme est flexible pour les juges, elle ne l’est pas pour les justiciables. Le standard pallie l’inflation législative par l’inflation judiciaire. De ce fait, l’avantage de clarification et de simplification du Droit est à nuancer. La jurisprudence est importante, complexe et difficile à appréhender, ce d’autant plus que l’approche est casuistique. En réalité, la clarification et la simplification se limitent au texte juridique mais ne concernent pas le Droit de manière générale”. (S. Néron, “Le standard, un instrument juridique complexe”, préc.).
65 G. Ripert, Les forces créatrices du droit, préc., no 2.
66 J.-L. Bergel. Théorie générale du droit, préc., p. 124 et s.
67 J.-L. Bergel, “La relativité du droit ?”, RRJ 1986-3, p. 13 et s.
68 J.-L. Bergel, Théorie générale du droit, préc., p. 126.
Auteur
Maître de conférences, Université Toulouse 1 Capitole, IDP
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