Insécurité et développement économique - Propos sur la guerre, l’argent, le sexe et le capitalisme
p. 35-46
Texte intégral
1L’histoire des sociétés humaines, les schémas de fonctionnement des relations internationales et les modèles socio-économiques sont habituellement en convergence avec le sens commun, pour souligner que bien-être et progrès, notamment économique, ne sauraient intervenir que dans des sociétés apaisées. Et de soutenir que rien ne réussit sans la confiance des entreprises, sans la possibilité pour les opérateurs économiques d’effectuer leurs choix stratégiques à partir de prévisions fiables, au moins à moyen terme, et sans la conviction chez les particuliers que leur sécurité matérielle, personnelle et familiale est suffisamment assurée pour qu’il ne soit pas nécessaire de se prémunir en permanence contre d’éventuels troubles externes ou internes. Parallèlement, une vision quasi moralisatrice, puisant ses fondements jusque dans la scolastique médiévale, soutient qu’il ne peut y avoir de sociétés durablement stables dans l’injustice ou la guerre, que la prospérité constitue l’obstacle le plus efficace contre les désordres, qu’il s’agisse de l’intensification des échanges commerciaux comme élément dissuasif à l’encontre des conflits internationaux, qu’il s’agisse de l’augmentation du niveau de vie comme facteur d’apaisement social et de respect du droit1.
2Depuis les Lumières, au cours desquelles s’amorce la dévaluation de valeurs comme celle de l’honneur et du courage physique, ce discours devient paradigmatique. Clairement énoncé chez Hume, Kant ou Voltaire, il est relayé par nombre d’auteurs du XIXe siècle. Les premiers sont contemporains des guerres napoléoniennes, tel Constant qui, dans De l’esprit de conquête et de l’usurpation, explique qu’il faut se féliciter du succès des peuples commerçants et de l’intensification des relations économiques entre pays développés afin de rendre impossibles car trop coûteuses, et finalement intolérables au peuple, tant la guerre que la dictature. D’autres ensuite, cette fois dans cette période apaisée à laquelle Karl Polanyi donnera le nom de “paix de Cent ans”, tels Saint-Simon, Comte, Spencer et d’autres aux États-Unis iront jusqu’à postuler, dans une perspective évolutionniste, l’avènement d’une société industrialisée, pacifiée par la multiplication des interdépendances économiques, se substituant aux sociétés militaires du passé2. Le thème est repris aujourd’hui et se retrouve dans les injonctions des bailleurs de fonds internationaux qui donnent à ces constructions théoriques le poids de leur autorité en conditionnant l’octroi de crédits à l’apaisement des conflits, que ceux-ci soient sociaux, ethniques ou régionaux. En période de guerre, l’aide ne pourra qu’être humanitaire et seulement destinée à assurer la survie des populations. Seul le retour à la paix garantira le réalisme, donc la réussite de véritables plans de développement efficaces. C’est à une forme de causalité interactive que les pays en guerre sont invités à adhérer, puisque le versement de crédits d’investissement promis à tous les belligérants est présenté comme une incitation à arrêter les combats et à s’engager dans la voie de la négociation, tandis que la croissance est censée protéger contre le retour des affrontements internes.
3Par opposition, la plupart des auteurs condamnent les doctrines minoritaires et provocatrices qui présentent les conflits comme sources d’expression de la force vitale d’un peuple ou de mobilisation des énergies d’une nation en vue de leur développement, ou, sans aller jusqu’à de telles extrémités, comme moyen de règlement durable des différends internationaux. De telles analyses font l’objet d’une disqualification désormais unanime en souvenir des désastres suscités par tous les conflits d’envergure et du rappel des crimes qui y sont liés, notamment ceux qui se sont déroulés au cours de la première moitié du XXe siècle. Dès que l’on évoque le droit d’une nation à obtenir son espace vital légitime ou la violence présentée comme accoucheuse de l’histoire, l’on est pas loin des grands totalitarismes modernes. Par voie de conséquence, incidemment, sont aussi considérées avec suspicion, les théories qui font de la guerre un phénomène naturel, de Nietzsche à Spengler en passant par les théoriciens du darwinisme social, ou un produit de l’anarchie du système international, une conséquence du “dilemme de la sécurité” ou encore un effet du caractère “tragique” de la puissance3.
4Pour autant, certains se croient fondés à s’interroger sur les effets de composition positifs de l’insécurité, au risque de paraître iconoclastes. C’est à quelques-unes de ces thèses que nous voudrions faire référence, en nous en tenant à la question des rapports entre insécurité et développement économique. Pour ce faire, l’on commencera par la version la plus forcée et la plus contestée de ces rapports, corrélant le développement économique et la guerre, version cataclysmique de l’insécurité (1), pour passer à un second type d’hypothèses privilégiant des variantes plus euphémisées de l’insécurité, de l’ordre du non collectif, de nature plutôt psychique et morale (2).
I – L’affirmation iconoclaste sur les promesses économiques de la violence armée
5Il est certain que la guerre compte parmi les phénomènes sociaux dont il est difficile de soutenir qu’ils sont susceptibles de se traduire par autre chose que l’entropie : pertes humaines, destructions matérielles, démobilisations problématiques, pensions aux invalides et aux familles des victimes, endettements massifs, interruptions des circuits économiques, enfin, en cas de défaites, amputations territoriales et indemnités de guerre au profit du vainqueur. Les marxistes ajoutent aux méfaits des conflits ouverts l’accumulation de capital obérée par l’accaparement étatique des fortunes privées sous forme d’emprunts. L’histoire de l’humanité donne de nombreux exemples de nations ruinées par la guerre, naturellement lorsque celle-ci finit en désastre militaire et même parfois, en cas de victoire, lorsque le pays a dû consentir pour l’emporter un effort trop lourd. Les exemples à cet égard les plus nets et les plus fréquemment cités sont celui de l’Espagne épuisée et ruinée par ses offensives extérieures au XVIe siècle, celui de l’Europe après des deux conflits mondiaux.
6À l’inverse, les pays qui réussissent à échapper aux opérations militaires sont présentés comme des zones jouissant d’un avantage comparatif en matière de développement. Et de citer à l’appui de cette thèse par exemple le cas de l’Angleterre épargnée par les conflits “despotiques” ininterrompus dont le continent européen fut le théâtre entre 1540 et 1650. Certains peuvent même tirer des profits directs d’un conflit auquel ils ne sont pas mêlés sous forme de fournitures de matériels et d’approvisionnements aux belligérants à des tarifs souvent léonins, de conquête de nouveaux marchés, de création d’entreprises nouvelles bénéficiant des commandes de la part des États en guerre et de ceux ne pouvant plus faire appel à leurs fournisseurs traditionnels, d’afflux de capitaux et de main-d’œuvre qualifiée cherchant à échapper aux contraintes des opérations militaires. Ici, c’est l’exemple de l’Amérique latine qui peut être évoquée, bénéficiaire des conflits du XXe siècle.
7Telle est la thèse dominante. Une observation plus attentive des réalités conduit à nuancer ces points de vue et à faire apparaître des effets sinon toujours structurants associés à la violence armée, du moins non négatifs. Nombre d’études, à la suite des réflexions pionnières d’Otto Hintze et de Max Weber, ont d’abord mis en évidence le rôle de la guerre dans la formation et l’organisation politique des États modernes. Elles ont détaillé l’impact de la préparation à la guerre et de la mobilisation sur la modernisation administrative, fiscale ou budgétaire. Elles ont mis en évidence le rôle du service militaire, dont les effets de “déparochialisation”, de déségrégation, d’homogénéisation et de promotion sociales ont été amplement étudiés4.
8De même, et s’agissant maintenant des répercussions plus proprement économiques des guerres, une observation même superficielle de la réalité conduit à reconsidérer leur caractère anti-économique, dénoncé de manière itérative au cours de l’histoire, et avec succès depuis le XVIIIe siècle, comme le montre le discours physiocratique. Du XVe jusqu’à quasi la fin du XIXe siècle, et sauf naturellement lors d’épisodes de belligérance exacerbée, les guerres n’affectent pas directement l’économie. Jusqu’au premier tiers du XIXe, à tout le moins, les armées ne recrutent qu’à la périphérie des classes productrices, et leur fonctionnement ainsi que la conduite des opérations ne font pas appel de manière systématique à l’intelligence technique5. Il n’est donc pas ou guère nécessaire d’effectuer des prélèvements au sein de la main-d’œuvre civile qualifiée. Par la suite, même avec l’industrialisation de la guerre qui rend impératif le recrutement d’une ressource humaine spécialisée, donc appartenant au monde de la production économique, les répercussions ne sont pas complètement négatives. La nécessité de pourvoir en cas de conflit aux besoins démultipliés des armées, créés par la détérioration rapide et massive de leurs équipements, et d’une manière générale, au soutien économique et technique des forces, conduisent au maintien dans le secteur productif civil d’un volant important de personnels qualifiés (le ratio est de 9 à 12 civils qualifiés pour un soldat au début du XXe siècle). Les conflits modernes favorisent donc l’emploi et la formation technique, tout en imposant des limites à la taille des armées et, par-delà à leur extension indéfinie, sauf sans doute dans le cadre de leur multilatéralisation6.
9Par ailleurs, les effets en termes d’innovation induits par la guerre ne peuvent être négligés. Ils sont assez bien connus et reconnus dans les domaines de l’organisationnel ou de la communication, également, quoique plus contestées, en matière technologique. Certes, de ce dernier point de vue, plus directement lié à l’économique, l’on a discuté à juste titre les théories mettant en avant de manière trop univoque les effets d’entraînement des innovations d’origine militaire (théories du “spin off”) en raison, entre autres, de la complexité des processus de conversion militaro-civils7. En faveur des retombées de la guerre dans le domaine de l’innovation, il faut mentionner le fait que les industries travaillant pour l’armement ont sans aucun doute été en mesure de bénéficier souvent de moyens plus importants que ceux qu’aurait pu mobiliser le secteur privé pour expérimenter de nouveaux matériaux, de nouvelles énergies et de meilleurs savoir-faire. C’est particulièrement vérifiable dans les secteurs les plus innovants, notamment celui la communication avec le transistor ou internet, les avions à réaction, le radar, etc8. Si, à l’inverse, on cherche les raisons conduisant à minimiser les conséquences des inventions liées à la recherche en matière d’armement, l’on peut souligner qu’une partie seulement des innovations ont une destination civile. L’on sait qu’après le XVIIIe siècle, le progrès technologique n’est plus autant qu’auparavant un effet dérivé de la guerre. Pour autant, les thèses inverses du “spin in” peuvent apparaître tout aussi exagérées : si la guerre dépend des forces productrices nationales, elle stimule les imaginations techniciennes.
10En fait, il s’instaure d’étroites interactions entre les réseaux militaires et les réseaux civils d’innovation9 ; ainsi des systèmes info-centrés actuels, avec leur pendant stratégique : le netcentric warfare. Actuellement, dans le contexte géostratégique de lutte contre les menaces asymétriques et le terrorisme dans l’espace euro-atlantique, considérés comme l’équivalent fonctionnel d’une guerre, l’on observe que le secteur de la défense, s’il n’est pas lui-même hautement producteur d’innovations, investit désormais de manière de plus en plus importante dans la recherche et le développement (aux États-Unis, on parle désormais de science and technology based military innovation). Les financements émanant du ministère de la Défense s’orientent vers des domaines de pointe, telles les bio-et les nanotechnologies, allant jusqu’à mobiliser et à orienter (selon des modalités variées) pour ses besoins, des centres de recherche scientifique externes donc civils. Aussi critiquable qu’une telle évolution apparaisse aux yeux de ceux qui dénoncent une sorte de prise en otage de la recherche au profit du complexe industriel-militaro-sécuritaire, cette évolution constitue une forme indéniable, même si indirecte, de stimulation militaire en faveur de la recherche et l’innovation d’une manière générale.
11Enfin, l’on ne peut manquer d’évoquer les thèses concernant les répercussions de la violence armée, non pas tant en soi, mais plutôt dans ses versions “mécanisée” et “proto-industrielle” apparues avec la “nationalisation” des armées subséquente à l’avènement des États modernes souverains et de manière concomitante d’un ordre international anarchique et élargi, sur les modes de production et donc par-delà sur le développement économique. Une première approche, plutôt conventionnelle et déhistoricisée, fait valoir que la nécessité d’utiliser tout le potentiel humain mobilisable, toutes les matières premières et toutes les sources d’énergie disponibles favorise la mise en place d’une organisation planifiée de l’économie. La guerre est génératrice d’interventionnisme étatique et celui-ci se prolonge souvent au-delà de la signature du traité de paix dans le cadre de l’effort de reconstruction du pays et de relance de son économie. L’administration a souvent de la peine à abandonner les habitudes prises à l’époque des opérations militaires et continue à prétendre réguler les grands équilibres.
12Une seconde thèse, plus originale, est celle développée par ceux qui font de la guerre moderne un facteur d’apparition du capitalisme. C’est le point de vue développé par Wemer Sombart10 pour qui ces premiers conflits, que l’on peut qualifier de “westphaliens”, contribuent à la mobilisation d’armées opérant selon le principe d’une séparation entre la conduite intellectuelle et l’action physique, séparation également du soldat et des moyens de violence, séparation enfin des hommes en arme et de leur famille. Ces forces nouvelles sont créatrices d’une main-d’œuvre disciplinée, fonctionnant selon des règles mettant en avant à la fois militarisme et rationalité. Par ailleurs, le rassemblement et l’équipement de telles armées induisent pour la première fois, d’une part des besoins de masse, en termes de transport, d’habillement, d’approvisionnement et surtout d’armement, d’autre part un raccourcissement des délais dans la production, la livraison et le remplacement de ces commandes au fur et à mesure que le tempo des opérations s’accélère. Cette situation favorise le développement de manufactures d’État, puis privées, recourant à des techniques de production standardisée, fondées sur l’utilisation de pièces interchangeables11 permettant une remise en état rapide des matériels. Tout ceci stimule le développement de secteurs aussi divers que ceux de la fonderie, de la chimie, des mines, des grandes exploitations rurales et de l’agroalimentaire, et par-delà, favorise l’avènement d’une classe d’industriels, d’investisseurs et de financiers. La commercialisation de la vie économique s’établit en même temps que naît une industrie de type capitalistique gérée par une bourgeoisie d’affaires et mercantile, moins inhibée que par le passé du fait de la sécularisation des valeurs à l’égard de l’action économique et de ses rapports.
13Cette tendance s’accentue avec les guerres de la Révolution et de l’Empire, et prend pour la première fois toute sa portée avec la guerre de Sécession puis avec les guerres totales de la première moitié du XXe siècle. Les pouvoirs publics ne se bornent pas à mettre en place des structures nationalisées de production, destinées à approvisionner le pays et à équiper ses forces armées. Ils suscitent des interlocuteurs privés capables de les relayer dans ces domaines. Les conflits mondiaux du XXe siècle, notamment aux États-Unis et au Japon, ont favorisé l’affirmation de grands groupes industriels, seuls interlocuteurs capables de satisfaire les demandes des pouvoirs publics. Outre-atlantique, la politique anti-trust a connu une interruption pendant les deux conflits mondiaux : il est malcommode pour l’État de s’adresser à une poussière de firmes lorsqu’il veut répartir les moyens disponibles au niveau national et passer des commandes massives. Ces grandes entreprises constituent un acteur important de l’effort de guerre. Les alliés ne s’y sont pas trompés lorsqu’au lendemain du second conflit mondial, ils ont fait passer en jugement des chefs d’entreprise accusés de crimes de guerre ou contre l’humanité. Beaucoup de ces structures de production privées sortent du conflit avec des capacités de fabrication accrues et des moyens financiers renforcés. L’histoire des entreprises, qui reste souvent à faire, témoigne de ce que nombre d’entre elles se sont constituées en période de conflit pour répondre aux commandes des armées. Se sont ensuite développées celles qui ont réussi une reconversion et le passage des marchés militaires aux marchés civils. Les savoir-faire testés pendant la guerre, les structures de production mises en place alors, les moyens financiers rassemblés, ont souvent donné aux plus adaptables un avantage comparatif décisif notamment par rapport à leurs concurrents étrangers. Il n’est jusqu’aux auteurs spécialisés dans la description du démarrage économique qui ont souligné qu’un certain nombre de pays sont entrés dans l’ère industrielle à l’occasion de guerres généralement victorieuses comme l’Allemagne bismarckienne, parfois perdues comme le Japon confronté aux bombardements de la flotte du commodore Perry en 1854, ce qui suscita un sursaut national.
14Bien évidemment, ce type de théorisation ne saurait avoir de portée générale12. Il a d’ailleurs été l’objet de critiques serrées qui ont fait ressortir que statistiquement les périodes de paix ont été plus propices (sans nécessairement qu’elles en soient la cause) au développement économique, surtout lorsque des guerres limitées (belligérance maîtrisée de type défensif, navale plutôt que terrestre, etc.) ont pu avoir des effets de stimulation et offrir des opportunités au capitalisme, sans obstacle aux forces de développement et de production à l’œuvre mais les accompagnant ; ainsi en Europe occidentale après la décontinentalisation de la conflictualité intervenue à partir de la seconde moitié du XVIIe siècle13.
15Cette mise en regard de la violence armée avec le développement économique, aussi suspecte soit-elle, tant au plan idéologique que scientifique lorsqu’il s’agit de guerre ouverte (avec les risques connexes d’exploitation démagogique qui peut en être faite14), trouve plus facilement quelque validité dans l’hypothèse de formes moins extrêmes d’insécurité, ne se produisant plus à l’échelle d’une société toute entière, mais plutôt sur un plan personnel et plus intime.
II – Sur les bienfaits des tensions morales, sociales et psychologiques
16Pour paradoxale qu’elle puisse paraître, l’idée d’un rapport entre les tensions morales, sociales et psychologiques d’une part et le développement d’autre part, trouve une forme de reconnaissance dans diverses expressions quasi proverbiales. Il en va ainsi par exemple avec l’idée assez simpliste que “les loups affamés chassent mieux”. Dans cette perspective, ceux qui bénéficient d’une situation trop stabilisée seraient incapables de se dépasser et de donner le meilleur d’eux-mêmes. Le roman populaire et même les contes pour enfants regorgent de personnages qui puisent dans les malheurs de la vie la motivation pour transcender le destin obscur auquel ils paraissaient promis. Nombre d’auteurs, sous des formes littéraires plus ou moins convaincantes, ont repris cette idée en l’orientant dans le sens auquel ils étaient personnellement le plus sensibles, ainsi Madame de Staël proclamant que la grandeur est le deuil éclatant du bonheur, ainsi de Cocteau soutenant que l’on ne crée que dans l’inconfort.
17Il ne s’agit pas ici de faire apologie de l’angoisse ou de l’insécurité sous des formes personnelles, qu’elles soient physiques ou psychologiques, comme moteur du développement. Peuvent cependant être évoqués ici plusieurs auteurs reconnus pour leur contribution à la compréhension des modalités d’ordre psychologique de la croissance économique de l’occident, qui, certes, sans faire explicitement référence à l’idée d’insécurité, mettent néanmoins en regard, avec une forte présomption de causalité, d’un côté un état d’esprit qui peut s’interpréter comme relevant de l’inconfort, de l’autre l’apparition de cette forme particulière d’organisation économique, source de développement et de prospérité qu’est le capitalisme. Il est vrai que l’interprétation habituelle faite de leur pensée ne va pas exactement dans le sens évoqué dans les présentes observations.
18Il s’agit d’abord de Max Weber et de ses réflexions, dont les plus centrales ont été réunies sous le titre de L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme15. Cette thèse canonique part d’une observation finalement assez banale, faite par maints auteurs depuis le milieu du XVIIIe siècle (l’on pense à Madame de Staël ou à Benjamin Constant), selon laquelle la croissance et le décollage économique de l’Europe s’effectuent selon des modalités tout à fait particulières à partir du XVIe siècle dans les pays du Nord de l’Europe et en Angleterre, plus tard aux États-Unis, c’est-à-dire au sein d’un espace coïncidant avec l’implantation du protestantisme, du moins sous ses formes calviniste, piétiste, méthodiste et baptiste. À sa démonstration, Weber ajoute la description d’une croissance générée par un mode d’organisation économique fonctionnant sur les bases d’une forme avancée et modernisée de capitalisme dont il décrit les traits caractéristiques et originaux. Cette observation sera confirmée par d’autres dans le cadre d’enquêtes et d’analyses portant sur les sites d’innovations scientifiques et technologiques et leur intégration16.
19Toute l’originalité de l’analyse wébérienne réside dans la façon dont est appréhendée l’articulation entre protestantisme et esprit du capitalisme. Elle est menée du postulat de la prédestination, trait caractéristique et central du protestantisme, selon lequel le destin choisi par Dieu pour chacun ne saurait résulter des actions conduites sur terre ou par l’intervention d’une Église, comme avec le catholicisme. Ce postulat, dont il était logique d’attendre qu’il engendre plutôt une attitude fataliste, en tout cas anti-économique, sur le mode contemplatif ou sur celui de la dissipation, semble au contraire avoir incité à l’effort, au travail comme fin en soi (cf. ses développements sur la notion de beruf, vocation), à l’épargne, à l’ascétisme, des qualités donc qui se trouvent en adéquation avec des comportements économiques créateurs d’une prospérité continue et cumulative.
20Ainsi, c’est la détresse créée par le mystère de la prédestination qui pousserait d’abord les individus à s’investir dans l’action afin de détourner leur pensée du sort éventuel dont ils ne peuvent connaître l’aboutissement puisqu’il fait partie du dessein de Dieu17. Ensuite et surtout, ils finissent par être conduits à interpréter la matérialisation de leur réussite comme le signe de leur élection par Dieu, autrement dit, leur laissant supposer une vocation de salut éternel. Ce serait donc un sentiment profond d’insécurité suscité par le postulat de la prédestination qui fonderait des attitudes et des comportements susceptibles à leur tour de conséquences socialement heureuses en terme de développement économique. Selon la forte formule de Weber, le travail “décharge de cette monstrueuse tension à laquelle est condamné le calviniste sans évasion”. Morale, travail et ascétisme sont les bases du protestantisme. Les travaux de Boyle, Baxter et d’autres en donnent la démonstration.
21Ainsi le caractère aléatoire de la sanctification, la négation de la possibilité d’obtenir son salut par une attitude conforme aux injonctions évangéliques ou par un rachat pénitentiel, présentés par les autorités catholiques comme conditionnant la rédemption, débouchent sur un sentiment d’angoisse devant le risque de la damnation qui se traduit paradoxalement par un activisme faisant d’une part figure de politique d’étourdissement, en quelque sorte destinée à évacuer l’inquiétude et à éviter de penser aux risques encourus, d’autre part de tests permettant de se rendre compte du regard que Dieu pose sur chacun. La réussite dans le monde des affaires s’interprète et devient, dans un tel contexte, le signe de la bienveillance divine, d’autant que l’enrichissement de chacun est réhabilité comme participant à la prospérité globale surtout dans la mesure où une partie de la richesse est utilisée dans un sens social.
22A contrario, et par un renversement des valeurs par rapport à la société catholique médiévale, où la richesse est au mieux un pudendum, et si elle est impulsive, une turpitudo, celui qui se désintéresse de l’activité productive, celui qui ne tente pas d’apporter sa contribution au développement et n’y parvient pas, devient suspect. Sa vie effacée est perçue comme le signe d’un rejet par Dieu. Ainsi n’est-ce pas un monde de sécurité morale, psychologique qui est décrit par Weber, comme caractérisant la société protestante, mais, à l’inverse, une société de tension, d’insécurité face aux desseins de Dieu, devenant motif d’effort et finalement facteur de croissance.
23Il est une seconde thèse, toujours sur les origines du capitalisme moderne, développée dans une direction diamétralement opposée, par Werner Sombart, compatriote et quasi contemporain de Weber (lequel incidemment dénoncera l’administration publique pour avoir refusé à son collègue un poste universitaire qu’il finira par obtenir très tardivement). Cette thèse est cependant toute autant pertinente pour notre propos en ce qu’elle repose implicitement aussi, du moins est-ce ainsi qu’elle peut se donner à interpréter, sur l’idée d’insécurité.
24Sombart, que l’on vient d’évoquer à propos du rapport entre guerre et capitalisme, développe en effet dans sa réflexion sur les origines du capitalisme, un volet tout à fait remarquable, quoiqu’un peu à la marge de ses autres travaux sur le capitalisme18, les mettant en regard de l’ostentation et du luxe19, couple problématique, ce qui le conduit diverger en cela des prémisses weberiennes, puisque finalement et pour forcer le trait, c’est le vice qui est le moteur des choses.
25Sombart part de l’observation qu’en fait, les premières manifestations de ce qui s’apparente aux linéaments, du moins au contexte du capitalisme moderne, c’est-à-dire la standardisation, l’internationalisation, l’urbanisation et la sécularisation, s’observe non pas dans les pays du Nord réformés, mais bien dans les États italiens des XIIIe et XIVe siècles où se développe un goût accentué pour le luxe et la consommation ostentatoire, donc capricieuse, comme mode de vie des élites urbaines et des classes dirigeantes, un phénomène qui culmine en France sous les Valois, puis s’étend au reste de l’Europe au cours des siècles suivants.
26Ce serait les exigences liées à un tel comportement qui auraient induit toute la série de processus économiques qui s’amorcent à l’époque, tels le grand commerce maritime et transcontinental, la production manufacturière à grande échelle, le développement du prêt bancaire pour des opérations commerciales d’envergure, l’installation d’entrepôts, la standardisation, la flexibilité, jusqu’à la réorganisation des villes, le développement de nouveaux modes de vie, notamment en matière d’habitat, d’hygiène, de gastronomie, mais également de tolérance sexuelle, d’adultère, d’illégitimité des naissances, de jeu, de prostitution haut de gamme (le “call-girlisme” en quelque sorte), etc.
27S’agissant de la phénoménologie du luxe et de l’ostentation, leur historicité et naturellement leurs conséquences économiques ne sont pas à proprement parler des thèmes nouveaux. L’économiste Wilhelm Roscher20, par exemple, en avait discuté, ainsi que Thorstein Veblen plus tard21. L’originalité de la thèse de Sombart réside dans le facteur déclenchant qu’il avance pour expliquer d’une part le développement sur une grande échelle du luxe et d’autre part ses conséquences, un facteur qui peut se concevoir en rapport avec l’insécurité.
28Pour Sombart, cette variable, qu’il considère comme une évolution majeure des comportements humains, s’amorce au cours des XIe et XIIe siècles avec la geste troubadour et la mariolâtrie, et prend toute son ampleur avec ce que l’on peut présenter comme la sécularisation de l’amour. Selon lui, et d’autres auteurs qui ont fait cette observation dans d’autres domaines à la même époque, notamment artistique22, le rapport entre les sexes, qui jusqu’alors trouvait sa complétude dans le cadre d’un mariage consommé sous et pour le regard divin, en tout cas transcendant le seul commerce des sens et du plaisir, se désidéalise. L’amour n’est plus un phénomène cosmique au service du ciel, mais devient progressivement une fin en soi, fondé sur la glorification de l’être aimé et la recherche de la sensualité, tendant à l’érotisme, voire par-delà, à la perversion. Centré sur l’émancipation de la chair, il tend dès lors à opérer en fonction du seul jeu de la séduction et de la compétition amoureuse, dont la dynamique nourrit le luxe et l’ostentation. Déconnecté de l’ordre divin et de la permanence que celui-ci entretient, l’amour devient aléatoire, provisoire, soumis aux vicissitudes et aux caprices de la nature humaine, à la passion, mais également à l’envie, à la concupiscence et à la jalousie, autrement dit situé dans une configuration où opèrent la séduction et la compétition, bref toute une série de paramètres structurant une atmosphère d’insécurité intérieure, avec son lot de paranoïa et de névrose.
29Ces évolutions débouchent sur un monde marqué par de nouvelles tensions dans une ambiance de concurrence liée à l’apparition de rapports humains plus contractuels, mais aussi, et par-delà, à des formes différentes de rivalités sociales, un monde qui se substitue à la société médiévale que l’Église avait souhaité pacifier en éliminant les germes de conflits ouverts. Le Quattrocento italien, plus tard la Renaissance en Europe occidentale vont être à l’origine d’un climat de compétition pacifique où chacun s’efforce de prendre le dessus sur les autres membres du corps social par des pratiques ostentatoires génératrices de dépenses et donc de croissance économique. La formule de Mercier définissant le luxe comme “le bourreau des riches” traduit bien la fragilité de ce climat. On retrouve l’idée de l’insécurité psychologique et morale récupérée comme un élément générateur d’une surenchère de commandes auprès des activités productives donc créateur de bénéfices, d’emplois, de prospérité des entreprises. Ce serait le schéma du développement de l’Europe occidentale. Ce moteur de la croissance se maintient jusqu’à l’apparition des sociétés pré-démocratiques et démocratiques liées aux événements de la Révolution française. Au XVIIIe siècle, Voltaire en présente une analyse intuitive sur “le superflu, chose très nécessaire”. À l’inverse dans des sociétés apaisées parfaitement stables d’un point de vue social sans compétition, sans concurrence, la sécurité peut être génératrice de stagnation.
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30L’on a bien conscience du caractère caricatural de ces propos, d’une part dans l’exposé des thèses convoquées, d’autre part et surtout dans l’interprétation qui vient d’en être faite, en liaison avec le thème de cet ouvrage. Sans chercher à se rassurer en soutenant que toute démonstration un peu paradoxale est utile en ce qu’elle stimule la réflexion, il n’en demeure pas moins qu’une situation d’équilibre n’est pas forcément la plus propice à un développement économique rapide. L’on concèdera volontiers que des guerres intenses et destructrices du point de vue matériel et humain ont naturellement de forts effets négatifs. Finalement si l’on souhaitait s’orienter vers une typologie des conflits armés en fonction de leur degré de nuisance, ce sont les guerres civiles qui apparaîtraient comme les plus nocives non seulement par les pertes causées, mais également par les traumatismes durables qui en découlent. À l’autre opposé, des expéditions militaires limitées sur des théâtres très périphériques peuvent avoir des effets heureux, au moins pour la puissance impérialiste qui s’y livre et pour autant que, dans une vision cynique des relations internationales, l’on ne prenne pas en compte les dégâts causés sur le territoire qui tient lieu de théâtre des opérations. Il n’a pas été non plus dans l’intention des auteurs de faire l’éloge des inégalités sociales, des dépenses ostentatoires comme meilleurs facteurs de développement. De ce point de vue également, il est des degrés dans la prise en compte des attitudes antisociales comme éléments favorables à la croissance. Finalement, c’est bien l’idée de déséquilibre, pour autant qu’il soit maîtrisé et qu’il débouche sur des réactions positives, qui apparaît comme la notion clé favorisant le développement. Les tensions nées d’une société en croissance démographique sont susceptibles de s’ouvrir soit sur des blocages générateurs de stagnation soit sur un effort de production et d’exaltation des réussites individuelles. En matière économique, les thèses sur la relance par la consommation ont toujours eu leurs défenseurs chez les spécialistes et plus encore dans la classe politique.
31Il est également des transformations dans les mentalités qui jouent un rôle bienfaisant. Des constructions intellectuelles comme celles du début du XXe siècle consistant à soutenir que les tensions nées de l’esprit puritain confronté à une tendance aux dépenses de prestige, voire de vice, correspondent à l’analyse d’une situation datée dans le temps. De nos jours, la tendance est plutôt à l’expression des désirs et à la satisfaction des besoins. Même si l’influence que cette tendance peut avoir comme facteur de prospérité générale demeure, elle prend donc des formes différentes fondées sur une part d’accomplissement. Le déséquilibre reste un facteur de croissance pour autant que l’on en maîtrise les conséquences, à travers des processus variés en fonction des époques, des attentes et des modes de réponses à y apporter.
Notes de bas de page
1 Les Grecs considéraient la guerre comme une tragique interruption. Les Romains faisaient coïncider la société augustéenne avec la paix et la justice. Thomas d’Aquin développait le thème de Tordre juste et pacifique...
2 Pour une discussion, voir Raymond ARON, La société industrielle et la guerre, Paris, Plon, 1959 ; aussi Michel-Louis MARTIN, “Prometteur ou marginal ? Le champ de la sociologie militaire en France”, Les Champs de Mars, no 6, 1999, pp. 5-36.
3 John J. MEARSHEIMER, The Tragedy of Great Power Politics, New York, Norton, 2001.
4 Voir entre autres (la littérature est importante) A. CORVISIER, La guerre. Essais historiques, Paris, PUF, 1995, ch. 4 et 5; S. FINER, “State and Nation-Building in Europe: The Role of the Military”, C. TILLY (dir.), The Formation of National States in Western Europe, Princeton, Princeton University Press, 1975, pp. 84-163; plus récemment: B.H. DOWNING, The Military Revolution and Political Change: Origins of Democracy and Autocracy in Early Modem Europe, Princeton, Princeton University Press, 1992; B.D. PORTER, War and the Rise of the State: The Military Foundations of Modem Politics, New York, The Free Press, 1994.
5 Sauf dans certains secteurs comme l’artillerie, du moins lorsque cette arme se systématise dans le cadre d’une évolution stratégique “frédéricienne” privilégiant la mobilité, l’offensive, la recherche de la victoire décisive au détriment de la manœuvre et du siège ; l’adoption du canon Gribeauval consacrera ce changement. Voir H. ROSEN, The Système Gribeauval: A study of Technological Development and Institutional Change in the Eighteenth Century, Chicago, The University of Chicago Press, 1981.
6 H. SPEIER, “Class Structure and Total War”, American Sociological Review, juin 1939, reproduit dans Social Order and the Risks of War, New York, G.W. Stewart, 1952, pp. 260-261.
7 Qui s’observe par exemple lorsqu’il s’est agi de convertir des firmes de production de biens à finalité militaire en firmes à destination du marché civil. Voir M. BRZOSKA, “Too Small to Vanish too Large to Florish: The Dilemmas and Practices of Defence Industries Restructuring in West European Countries”, E. INBAR et B. ZILFARB (dir.), The Politics and Economics of Defence Industries, Londres, Frank Cass, 1998, pp. 71-94. P. LOCK, “Military Technology and Its Linkage to the Civilian Economy”, R.F. DUNDERWILL et al. (dir.), Defence Conversion Strategies, Boston, Kluwer, 1996, pp. 125-140.
8 Certains auteurs en sont arrivés à prétendre que le développement de l’artillerie comptait parmi les facteurs ayant favorisé l’extension de la raison, de la science et de la civilisation : J.B. BRUNET, Histoire générale de l’artillerie, Paris, Gaultier-Laguionie, 1842.
9 La littérature est vaste et complexe dans ce domaine ; voir C. SERFATI, Production d’armes, croissance et innovation, Paris, Economica, 1995.
10 Kreig und Kapitalismus, Munich et Leipzig, Dunker und Humbolt, 1913.
11 Le développement de l’artillerie, notamment lors de l’introduction du système Gribeauval, en est un exemple ; voir M.A. BASSET, “Essai sur l’histoire des fabrications d’armement en France jusqu’au milieu du XVIIIe siècle”, Mémorial de l’artillerie française, vol. 14, 1935, pp. 881-1280.
12 Une argumentation à peu près semblable pourrait d’ailleurs s’appliquer aux effets économiques des dépenses militaires, mais comme il ne s’agit pas d’un élément directement lié à l’insécurité ou seulement de manière très oblique, il n’a pas été évoqué ici. L’on sait que pour certains, ces dépenses sont des sommes retirées aux activités productives par le biais de l’impôt, donc qui risquent de manquer aux investissements nécessaires à l’accroissement du secteur productif. Ce serait particulièrement grave dans le cas des pays en développement. Il est vrai que cet argument sur le rôle négatif des prélèvements fiscaux rejoint le procès fait par certains libéraux à toutes les dépenses publiques dès lors qu’elles ne portent pas sur les activités relevant du domaine de l’État très strictement entendu. Encore convient-il de noter que de ce dernier point de vue, la défense nationale y est généralement intégrée. D’autres auteurs, à l’inverse, y compris parmi les libéraux, font plutôt, au nom du développement économique, l’éloge des dépenses militaires, y compris par rapport à celles résultant d’autres services publics. Ils critiquent volontiers les administrations chargées de tâches de contrôle et de surveillance comme exerçant un rôle de frein à la croissance. Ils attendent au contraire de la défense que, par ses commandes portant notamment sur des matériels sophistiqués, a fortiori par ses programmes de recherche, elle exerce une fonction incitative d’entraînement au profit des entreprises dont certaines parmi les plus performantes. C’est tout le débat sur le rôle du complexe militaro-industriel qui est ici évoqué. L’impact est si important que dans nombre de cas, l’argument de l’aide indirecte apporté par l’État par exemple au profit des industries de construction aéronautique est invoqué jusque devant l’instance de règlement des différends de l’Organisation mondiale du commerce comme perturbant les mécanismes de la concurrence au niveau international. C’est notamment l’un des arguments utilisés par la France à propos d’Airbus contre Boeing.
13 L’on ne saurait assez recommander sur cette question l’excellente étude de J.U. NEF, War and Human Progress : An Essay on the Rise of Industrial Civilization, Boston, Harvard University Press, 1950.
14 Les exemples d’une telle exploitation sont nombreux ; l’on peut citer en ce sens les processus ayant conduit aux unifications italienne et allemande ou plus récemment le Maroc de Hassan II avec la récupération du Sahara ou l’Argentine de Galtieri à propos des Falklands.
15 Un double article intitulé “Die protestantische Ethik und der Geist des Kapitalismus” et para dans Archivfür Sozialwissenschaft und Sozialpolitik, vol. 20 et 21, 1904-1905 puis réédité dans Gesammelte Aufsätze zur Religionssoziologie, 3 vol., Tübingen, Mohr, 1920-21.
16 Cf. les deux remarquables articles de Robert K. MERTON, “Puritanism, Pietism and Science” et “Science and Economy of 17th Century England”, Social Theory and Social Structure, New York, The Free Press, 1968 (nouvelle édition), pp. 661-681 et 628-660. Également, I. THOMER, “Ascetic Protestantism and the Development of Science and Technology”, American Journal of Sociology, vol. 58, 1952, pp. 25-33.
17 Rien n’exprime avec autant d’acuité cette angoisse que ces stances à Dieu sous la plume de la sœur de Biaise Pascal, Jacqueline :
Sans cesse elle espérait en vous
Et toujours son soin le plus doux
Était de vous être fidèle.
Hélas ! dans son aveuglement,
Lui donnâtes-vous tant de zèle
Pour la perdre éternellement ?
18 Par exemple, Der moderne Kapitalismus : Historich-systematische Darstellung des Gesamteuropeäischen Wirtschaftlebens von seinem Aufängen bis zur Gegenwart, Munich, 1916.
19 Luxus undKapitalismus, Munich et Leipzig, Dunker und Humbolt, 1913.
20 “Über den Luxus”, Archiv der Politischen Ökonomie und Polizeiwissenschaft, vol. 1, 1845.
21 The Theory of the Leisure Class, New York, Penguin, 1899 (traduction française, Paris, Gallimard, 1979).
22 P. A. SOROKIN, Society, Culture and Personality: Their Structure and Dynamics, New York, Harper, 1947, ch. 40 notamment.
Auteurs
Professeurs à l’Université Toulouse 1 — Sciences Sociales
Professeurs à l’Université Toulouse 1 — Sciences Sociales
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