L’occupation du Guipuzcoa et la Terreur
p. 189-198
Texte intégral
1La Terreur en Pays basque français ayant déjà été étudiée par des érudits locaux1, il m’a semblé plus utile de l’envisager en Pays basque espagnol, dont l’occupation par les troupes républicaines n’a fait l’objet que de quelques rares articles de la part d’historiens français2.
2La Gazette nationale ou Moniteur universel, journal officiel de la République française, et le Recueil des actes du Comité de Salut public avec la Correspondance officielle des représentants du peuple en mission, permettent de connaître la version française des événements qui se déroulèrent dans les provinces basques d’Espagne pendant une année, de juillet 1794 à juillet 1795.
3Bien que les rapports des représentants du peuple en mission près l’armée des Pyrénées occidentales soient très descriptifs et toujours très élogieux pour l’armée républicaine3, on peut néanmoins y découvrir l’état d’esprit des révolutionnaires à l’égard des Basques et des Espagnols.
4Peu après que la France eût déclaré la guerre à l’Espagne, le 7 mars 1793, l’armée espagnole, dans laquelle on comptait de nombreux émigrés français4, commandée par le général Ventura Caro, passa la frontière et envahit une partie du Pays basque français. Mais elle ne put résister longtemps aux troupes françaises, plus nombreuses et animées d’un grand enthousiasme patriotique. À partir du mois de février 1794, la situation se renversa. L’armée espagnole dut battre en retraite, le 24 juillet 1794, devant les troupes républicaines conduites par le général Moncey qui voulait "forcer cette nation superstitieuse et ce gouvernement capétien à respecter le territoire français...”5. Mais non contents de repousser l’ennemi et faisant fi du principe d’équilibre6, les Français envahirent à leur tour le Guipuzcoa, d’autant plus facilement d’ailleurs que les habitants de cette province, arguant de leurs privilèges7, refusèrent les levées d’hommes réclamées par le général Caro. Et, cinq jours plus tard, le drapeau tricolore flottait sur une vaste partie du territoire basque en Espagne.
5Après un premier mouvement de peur, la population guipuzcoanne accueillit favorablement l’armée française. S’ouvrit alors la phase des négociations. Mais elle fut vite suivie d’une autre, de répression ; la Terreur sévit en Espagne comme en France. Puis le calme revint après la chute de Robespierre.
– I –
A – Période des négociations
6Lorsqu’en juillet 1794, les troupes françaises pénétrèrent en Guipuzcoa, les habitants du pays, auprès desquels les prêtres espagnols et les émigrés les avaient peintes comme des "anthropophages", s’enfuirent effrayés8. Mais ils changèrent rapidement d’attitude à la suite des proclamations répandues partout des idéaux révolutionnaires. Les Républicains se présentaient comme une armée de libération venue "purifier la terre de la liberté, souillée par la présence des esclaves..."9. Ils se disaient aussi respectueux des "opinions, moeurs, coutumes et usages" des peuples cmquis10. Les Basques qui, depuis qu’ils sont apparus dans l’histoire, ont toujours lutté pour conserver leurs libertés, se laissèrent convaincre par les Républicains qui semblaient sincères et persuadés du bien-fondé de "leur mission libératrice des peuples opprimés par les tyrans".
7De telles proclamations, souvent réitérées, et accompagnées d’un décret interdisant aux soldats français, sous peine de mort, tout acte de pillage ou de dévastation et tout excès envers les habitants désarmés, ne pouvaient que donner à réfléchir à un peuple profondément attaché à ses libertés et victime de la politique unificatrice et centralisatrice des Bourbons, d’autant plus qu’il souffrait alors d’une grave crise économique.
8Le peuple guipuzcoan accueillit donc favorablement cette conquête, qui lui promettait la restitution de ses droits. Gonzalo Anès écrit même que, dans la Rioja, des troupes de jeunes enfants défilaient dans les rues, en criant "Vive la liberté de France"11.
9Quant à la bourgeoisie, minoritaire mais représentative du pays au sein des assemblées politiques, elle était acquise aux idées libérales. Rappelons les "caballeritos de Azcoïtia", petit groupe initiateur des "sociétés économiques", et le comte de Peñaflorida, fondateur de la "Real sociedad Bascongada de los amigos del País", qui était en relations épistolaires suivies avec les philosophes français, les Encyclopédistes et les Physiocrates, notamment avec Jean-Jacques Rousseau qui était très admiratif du régime politique basque. Beaucoup d’enfants de la bourgeoisie basque étaient élevés dans des collèges français. Et, en dépit des prohibitions, des réunions très animées se tenaient dans les cafés et les clubs de Saint-Sébastien, où les enseignements de l’Église et la légitimité de la Monarchie étaient remis en cause12.
10Seuls, les clercs, effrayés par la campagne de déchristianisation qui sévissait en France, étaient hostiles à l’armée républicaine. Lors de la prise de Fontarrabie, le 1er août 1794, deux capucins qui faisaient partie du conseil de guerre furent les seuls à vouloir se défendre contre les ennemis de la religion13. Mais le clergé basque ne participait pas à la vie politique de la province. Et la classe dirigeante, désireuse de jouir d’une indépendance absolue, avec l’appui de la France, avait résolu de ne pas s’opposer à l’invasion14.
11Le talent oratoire et le ton persuasif de La Tour d’Auvergne, envoyé à Saint-Sébastien pour négocier la reddition de la ville, achevèrent de convaincre la municipalité. Ayant commandé le fort de Socoa à Ciboure, il connaissait la langue basque et ce fut pour les Républicains un atout décisif. Lorsqu’il se rendit chez le gouverneur, celui-ci lui demanda de faire tirer quelques coups de canons symboliques. Ce qui fut fait et la capitulation de Saint-Sébastien fut signée le 4 août 1794, à deux heures du matin. Elle valut aux Français un butin considérable.
– II –
12Le 14 août suivant, l’assemblée générale de la province ou "Junta"15, réunie à Guétaria, pour négocier avec les Français, exigea, avant tout, la liberté du culte catholique, le respect des "fueros"16 et la non ingérence des Français dans le gouvernement de la province ; ce qui fut accordé, mais verbalement17.
13Cette reddition fut mal interprétée par les Conventionnels qui crurent, à la lecture des rapports des représentants en mission18, que les Guipuzcoans souhaitaient une annexion pure et simple à la France ; ce qui prouve que les Français, mal informés, n’avaient rien compris.
14Et la suite des événements prouva aux Guipuzcoans qu’ils avaient été trop confiants en la générosité des Républicains.
B – La répression
15Alors que Barère proclamait à la Convention nationale que "les principes de la justice et du droit des gens ne furent jamais méconnus par les Français"19, une terrible répression s’abattit sur la province.
16Le représentant en mission, Pinet, ayant intercepté une lettre en date du 9 août adressée par la "Junta" guipuzcoanne au ministre espagnol Alcadia, dans laquelle elle exprimait, au nom de la province, ses sentiments d’amour et de loyauté pour la Monarchie et affirmait que son attitude à l’égard des Français n’avait pour seul but que d’éviter l’effusion de sang, fit alors saisir toutes les pièces de la "Junta". Parmi elles, il trouva d’autres lettres compromettantes ; dans l’une d’elles, il était écrit que "c’est une excellente mesure que celle d’amuser les Français"20.
17Le rapport de Pinet était-il impartial ? ou bien la "Junta", se sentant trompée, voulait-elle ménager le gouvernement madrilène qui considérait le Guipuzcoa comme un traître ?
18Toujours est-il que les représentants en mission prirent un arrêté pour rompre les pourparlers avec la "Junta" de Guipuzcoa et faire déclarer la partie de cette province occupée par l’armée de la République, "pays conquis". Dans son rapport, Pinet justifiait cette mesure par "la conduite évasive, équivoque et peu franche des députés de la dite province, que nous soupçonnons avec beaucoup de fondement de vouloir se jouer de nous". Il accusait les Guipuzcoans d’être les "plus cruels ennemis de la République.... Un peuple cagot, superstitieux, fanatique et esclave, ayant pour maître un tyran et des prêtres, doit détester une nation qui a secoué le despotisme et tous les préjugés"21.
19Le 26 août 1794, les membres de la "Junta" furent pris comme otages et conduits à Bayonne où ils furent incarcérés à la citadelle. Les États du Guipuzcoa furent cassés et remplacés par une commission municipale à laquelle, seul, un habitant de Saint-Sébastien pouvait assister. Toute espèce d’assemblées et de rassemblements furent interdits. Tous les droits et libertés du peuple basque furent supprimés. "On fit fermer les églises, on mit en arrestation les prêtres ; les religieuses même, arrachées à leurs couvents, furent entassées sur des charrettes et livrées à une équipe de hussards qui leur firent ainsi traverser le pays conquis et les conduisirent à Bayonne, où elles furent incarcérées et traitées de la manière la plus barbare"22. La guillotine, élevée sur la place de Saint-Sébastien frappa les nobles et les prêtres avec acharnement. Les représentants en mission déployèrent une sévérité féroce, digne du régime de la Terreur qui pesait alors sur la France. Le représentant Pinet, surnommé le "Nouvel Attila" par le général espagnol Carro, s’acquit dans cette province une réputation qui la disputait à celle de Carrier, le bourreau de Nantes23.
– III –
20Cette répression, accompagnée du pillage des églises, des dépôts d’armes et de munitions, mais aussi des magasins de farines et approvisionnements divers, effraya la population24. Un régiment de volontaires se rallia aux Biscayens et aux paysans de la province d’Alava pour combattre les Français dans l’armée du général espagnol Colomera. Les Français néanmoins avançaient ; ils s’emparèrent de Tolosa, Bergara, Ascoïtia, Azpeïtia... Bilbao fut conquise le 17 juillet25. Pampelune en Navarre fut aussi assiégée et l’ennemi battu à Vitoria en Alava. L’armée française se préparait à franchir l’Ebre lorsque les hostilités furent suspendues.
21Entre temps, le 9 thermidor an II, le 27 juillet 1794, Robespierre et ses amis avaient été renversés à la Convention et exécutés. S’ouvrit alors une phase plus humaine de la Révolution, celle du retour aux libertés reconnues en 1789 et de réparation à l’égard des pays qui avaient souffert de la dictature montagnarde.
C – La réparation
22À l’assemblée parisienne, le despotisme de Robespierre et "la perversité de ceux qui ont trempé leurs mains dans le sang"26 furent blâmés et les qualités des Basques exaltées27.
23Sous l’influence du comte de Cabarrus28, bayonnais et au courant de la psychologie basque, les Thermidoriens voulurent réparer les grossières erreurs de leurs prédécesseurs. Le représentant Pinet, sur les conseils du général Moncey, alerté par la clameur publique, fut rappelé au sein de la Convention, le 13 août 1794. Puis ce fut le tour des autres représentants en mission près l’armée des Pyrénées occidentales, qui furent tous changés.
24Le 27 germinal an III, le 16 avril 1795, la Convention nationale adopta un décret29 par lequel "elle désavouait les atrocités et les injustices commises par les agents de l’ancien gouvernement dans les provinces de Guipuzcoa et de Biscaye" et assurait "que les oppresseurs de ces contrées seraient poursuivis et traduits devant les tribunaux"30. Ce décret fut suivi d’un arrêté du Comité de Salut public du 23 avril 1795 qui désignait le tribunal administratif des Basses-Pyrénées pour poursuivre les crimes commis. Et les représentants en mission furent chargés d’établir un état des dommages causés aux habitants des provinces occupées afin de les indemniser.
25Ces mesures furent suivies d’effet. Par des arrêtés particuliers des représentants en mission, l’entière liberté du culte fut rendue aux Basques, le gouvernement et les administrations qu’avait la province de Guipuzcoa avant la conquête furent rétablis, les prisonniers libérés et ceux que la Terreur avait fait émigrer furent invités à rentrer dans leurs foyers. Une vingtaine de responsables de déprédations commises dans cette province furent arrêtés et conduits à la citadelle de Bayonne31. Pinet, mais non Cavaignac, fut mis en accusation. Des états furent établis en vue de l’indemnisation des habitants.
26Cependant le gouvernement de Madrid songeait à des négociations. Le Roi convoqua à la Cour, le 3 mai 1795, le marquis d’Iranda, originaire d’Hendaye mais établi depuis longtemps à Madrid. Cette nouvelle jeta les habitants de la province de Guipuzcoa dans la plus grande inquiétude ; ils craignaient par un traité de paix rentrer sous la domination espagnole.
– IV –
27Le Comité de Salut public était désireux de conserver les territoires conquis en Espagne, alléguant que "les montagnes qui sont au sud de ce petit pays forment une limite plus naturelle que la ligne de l’ancienne frontière..."32.
28Mais les accords entre les deux États ne prenaient pas cette voie. Proche du peuple qu’il avait appris à connaître au cours de sa mission, le représentant du peuple, Meillan, offrit ses services au gouvernement français pour négocier avec l’Espagne33.
29Les conseils de Meillan ne furent pas entendus. La paix fut signée à Bâle34, le 22 juillet 1795 par les représentants des deux puissances, Domingo d’Yriarte pour l’Espagne et François Barthélémy pour la France. L’article 4 stipulait que toutes les conquêtes faites en Espagne par l’armée française devaient être restituées et les pays conquis évacués par les troupes françaises. En échange, le roi d’Espagne, dans l’article 9, cédait à la France toute la partie espagnole de l’île de Saint-Domingue aux Antilles.
30L’armée des Pyrénées occidentales évacua le territoire espagnol. Mais les Basques ne furent pas indemnisés.
31Les Basques, trop sincères et trop confiants, avaient été trompés par les révolutionnaires français qui, en dépit des rapports des représentants en mission, ignoraient leur particularisme et étaient demeurés, même après la chute des Montagnards, très centralistes et éloignés des réalités provinciales. Ils purent même craindre, pour leurs libertés, la répression espagnole ; mais Godoy n’osa pas commettre cette injustice. Le modèle français ne fut pas importé en Espagne.
32Aux désordres de la Révolution française succéda une nouvelle dictature, celle de Napoléon Bonaparte. Les provinces basques d’Espagne furent de nouveau occupées par l’armée française de 1808 à 1815. Mais les Basques, cette fois, instruits par leurs récents malheurs, résistèrent à cette tentative d’intégration dans un Empire auquel ils ne voulaient pas appartenir35.
33L’Europe de Napoléon, procédant de vues trop ambitieuses, fut éphémère. Le siècle suivant vit le triomphe des États-Nations. Leur poids historique est redoutable ; les frontières séparent des populations désormais différentes, même si leur origine est commune.
34La France subit les séquelles d’une conception trop abstraite et unitaire de la Nation, alors que l’Espagne reconnaît l’existence de structures pluralistes. Sept provinces, dont le Guipuzcoa au sein de la communauté autonome d’Euzkadi, jouissent d’une réelle autonomie administrative, financière, juridique et judiciaire. La construction européenne sera laborieuse.
Notes de bas de page
1 Cf. Mayi Castaingts-Beretervide, La Terreur et la déportation des Basques du Labourd, 1/94, Ikuska, 1994. Importante bibliographie, pp.205-207.
2 Lucienne Domergue, "Note sur l’occupation française des provinces basques au temps des guerres de la Convention (1794-1795)", A revoluçao francesa e a peninsula iberica, Revista de Historia das ideias, 10, Coimbra, 1988, pp.69-95. Pierre VILAR, "Quelques aspects de l’occupation et de la résistance en Espagne en 1794 et au temps de Napoléon", Occupants, occupés, 1792-1815, Actes du colloque de Bruxelles, 29 et 30 janvier 1968, pp. 221-236. Les travaux des historiens espagnols sont beaucoup plus nombreux. Cf. Joseba Agirreazkuenaga, "Historiographie basque des deux derniers siècles concernant les événements issus de la Révolution française", 1789 et les Basques, Actes du colloque international de Bayonne, 1989, PUF Bordeaux, 1991, pp.133-144.
3 Les soldats français sont dépeints comme les plus valeureux et républicains qui soient, alors que les soldats espagnols sont qualifiés "d’esclaves du tyran capétien" et les généraux, ses "valets".
4 Les émigrés formaient une légion connue sous le nom de légion Saint-Simon, du nom du marquis qui la commandait. Elle était composée de nombreux émigrés, mais aussi recrutait des conscrits déserteurs de l’armée française et même des paysans basques "dégoûtés des excès révolutionnaires".
Le 20 avril 1793, les représentants en mission, Pinet l’aîné et Cavaignac, écrivaient au Comité de Salut public : "Ne comptez pas trop sur les Basques, le fanatisme les dispose en faveur des Espagnols..." : M. Castaingts-Beretervide, op cit., p. 127.
5 Le Moniteur, n° 319, Tome XXI, p. 403.
6 Cf. Henri Legoherel, Histoire du droit international public, P.U.F., Que sais-je ? 1996, pp. 43-47.
7 Les provinces basques d’Espagne, comme celles de France d’ailleurs, ayant leur propre milice, leurs habitants étaient exemptés du service militaire dans les armees royales.
8 Rapport des représentants en mission Cavaignac, Garrau et Pinet l’aîné au Comité de Salut public du 11 Thermidor an II, Le Moniteur, n° 320, tome XXI, p. 407.
9 Ibidem.
10 Rapport de Garrau, Cavaignac et Pinet aîné lu à la Convention le 18 Thermidor an II, Le Moniteur, n° 324, tome XXI, p. 444.
11 Pierre VILAR, loc.-cit., p. 230 .
12 "Il est certain qu’existait un groupe de citoyens imbus des principes révolutionnaires de liberté, égalité et propriété" : José Ramon Cruz Mundet, La guerra de la Convention en Gmpuzcoa (1793-1795), le manuscrit de I.V. de Sarasti, Diputacion forai de Gipuzkoa, 1993, p. 25. Importante bibliographie, pp. 125-130.
13 Rapport du représentant du peuple Garrau au Comité de Salut public, le 14 Thermidor II, Le Moniteur, n° 322, Tome XXI, p. 428.
14 Cf. J. L. Lande, Basques et Navarrais. Souvenirs d’un voyage dans le Nord de L’Espagne, Paris, 1878, p. 362.
15 Les institutions des provinces basques étaient doubles : les "Juntas generales" et la "Diputación". Les "Juntas", composées des représentants de toutes les paroisses de la province, sans aucune distinction entre les ordres et exclusion du clergé, se réunissaient, en Guipuzcoa, une fois par an en session ordinaire, pour traiter de toutes les affaires concernant la province. Elles désignaient un exécutif, la "Diputación", qui était chargé de l’exécution des mesures prises par les "Juntas" et de régler les affaires courantes, mais avec des pouvoirs limités.
16 Fueros : libertés, institutions propres, privilèges au sens étymologique du terme.
17 Dans l’article 6 de la capitulation, le général Moncey se référait aux décrets de la Convention nationale qui avaient consacré la liberté des cultes et à l’arrêté des représentants en mission qui avaient assuré aux habitants des pays conquis le libre exercice de leur culte et le respect de leurs fueros, ajoutant que ce serait "faire naître un doute injurieux sur l’exécution des lois de la République et des arrêtés des représentants du peuple, que d’en faire un article exprès de la stipulation" ; or ces mêmes lois de la République n’empêchaient pas la Convention de se livrer en France à une véritable persécution des prêtres. Et dans l’article 7, il renvoyait les habitants, pour le respect de leurs fueros, à se pourvoir devant la Convention nationale et les représentants du peuple qui feront droit à leurs réclamations, "si elles sont justes” . Texte de la capitulation : Le Moniteur, n° 326, Tome XXI, p. 460.
18 "La province de Guipuzcoa, dont nous occupons une bonne partie vient de nous écrire par le canal d’un de ses députés, pour nous offrir de se donner à la république française..." : Rapport de Garrau, Cavaignac et Pinet aîné au Comité de Salut public, le 18 thermidor an II, Le Moniteur, n° 326, Tome XXI, p. 462..
19 Le Moniteur, n° 326 , Tome XXI, p. 461.
20 Rapport de Pinet aîné au Comité de Salut public, le 22 fructidor an II : Recueil des actes du Comité de Salut public, Tome XVI, pp. 591-593.
21 Ibidem.
22 Discours de Tallien à la Convention, au nom du Comité de Salut public, du 29 germinal an IV, Le Moniteur, n° 209, Tome XXIV, p. 230.
23 Il déploya la même barbarie en Pays basque français. "Les malheureux Basques furent persécutés avec une sorte de fureur... ; on les arrachait à la charrue pour les traduire devant les commissaires sanguinaires, qui les envoyaient à l’échafaud sans forme de procès...". Sous le prétexte de la désertion de 47 soldats basques, les habitants de six communes furent assujettis à l’internat et le séquestre de leurs biens fut ordonné. "Les femmes, les enfants, les vieillards, rien ne fut excepté de la mesure barbare de l’internat. Ces infortunés furent amoncelés pendant environ sept mois dans des églises de l’intérieur... Un grand nombre d’entre eux périrent de faim, de soif ou de l’air infect qu’ils y respiraient..." : Discours du représentant en mission, Chaudron-Rousseau, à la Convention, le 16 Prairial an III, Recueil des actes du Comité de Salut public, Tome XXIV, pp.51-54. Un arrêté de pacification de 1795 évalue à 3000 les seuls habitants de Sare qui furent déportés. La Société populaire de Bayonne accusa les représentants en mission, Pinet et Cavaignac, d’avoir causé la mort en Labourd de 1600 personnes.
24 Rapport des représentants en mission Garrau, Baudot et Delcher au comité de Salut public du 15 frimaire an III, Le Moniteur, n° 82, Tome XXII, p. 715.
25 Cf. Pilar Feijoo Caballero, Bizkaia y Bilbao en tiempos de la Révolution francesa, Thèse Histoire Deusto, Bilbao.
26 Discours de Dubois-Crancé à la Convention, le 22 septembre 1794, Le Moniteur, n° 1, Tome XXII, p. 4.
27 “Au milieu de la servitude générale, ils ont conservé de grandes traces de liberté ; ils ont des lois constitutionnelles dont plusieurs ont avec les nôtres une ressemblance frappante, et qui sont une des plus puissantes barrières que la raison et le courage des peuples aient élevé entre le despotisme et leurs droits... C’est un peuple fait pour la liberté...". Discours de Tallien à la Convention, le 18 avril 1795, Le Moniteur, n° 209, Tome XXIV, p. 230.
28 La fille du comte, Thérèse, était l’épouse en secondes noces du Conventionnel Tallien.
29 Le Moniteur, n° 209, Tome XXIV, p. 231.
30 Lorsque Chaudron-Rousseau fit, le 20 Floréal, la lecture publique du décret à la maison commune de Saint-Sébastien, il fut ovationné et le député général de la province, Romero, promit fidélité au nom du peuple guipuzcoan à la République française. Rapport de Chaudron-Rouseau au Comité de Salut public du 22 floréal an III, Le Moniteur, n° 242 , Tome XXIV, p. 491-492. Le générai Moncey promit de mettre son armée au service de la liberté des Guipuzcoans : "les baïonnettes des républicains français sauront seconder le voeu des républicains guipuzcoans pour l’indépendance".
31 Rapport de Chaudron-Rousseau à la Convention du 17 Prairial an III, Recueil des actes du Comité de Salut public, Tome XXIV, p. 83.
32 Lettre du Comité de Salut public aux représentants du peuple en mission à l’armée des Pyrénées occidentales, du 28 germinal an III, Recueil des actes du Comité de Salut public, Tome XXII, p. 191.
33 "... On a oublié que la Monarchie espagnole est composée de morceaux décousus qui laissent à plusieurs provinces un gouvernement local, sur lequel le ministre ne peut rien. Vous aurez eu beau stipuler avec le Roi, la Catalogne, la Navarre, la Biscaye, l’Alaba, le Guipuzcoa arriveront avec leurs privilèges locaux, et vos conventions seront nulles en tout ce qui les choquera...". Lettre de Meillan au Comité de Salut public du 19 Thermidor an III, Recueil des actes du Comité de Salut public, Tome, XXVI, p. 252. En effet, ces provinces jouissaient, au sein de l’État espagnol, d’une grande autonomie. Les provinces basques avaient un droit analogue au droit d’enregistrement et de remontrances des parlements en France, appelé "derecho de soorecarta" en Navarre, "uso" en Guipuzcoa, et "passé foral" en Biscaye, qui était la sanction du serment prêté par le Roi à son avènement de respecter leurs fueros. Si les lettres patentes-royales étaient contraires à leurs fueros, elles pouvaient les refuser. Le Roi avait cependant le dernier mot, auquel cas, les lettres-patentes étaient enregistrées avec cette formule : "se obedece, pero no se cumple".
34 Cf. Joseba M. Goni Gallarraga, "Guipuzcoa en la paz de Basilea (1795)", Hommage à J. Ignacio Tellechea Idigoras, Bulletin des études historiques sur Saint-Sébastien, 1982-1983, pp. 761-803.
35 Dominique Joseph Garat, député du Tiers-État labourdin aux États Généraux de 1789, comte de l’Empire, conçut le projet en 1808 d’un État réunissant les sept provinces basques, fédéré dans l’Europe napoléonienne et comprenant trois departements : la Nouvelle Phénicie, la Nouvelle Tyr et la Nouvelle Sidon : "Plan d’un projet de réunion des Basques français et des Basques espagnols en un ou deux départements de l’Empire. Fragment d’un mémoire qui ne paraît pas avoir été remis à l’Empereur, et qui était peut-être destiné à entrer dans le travail sur l’Espagne que celui-ci avait demandé, adressé par Garat à l’Empereur", publié par Albert Darricau, "France et Labourt", Revue Internationale d’Études basques, 1906, pp. 290-299 et Bull, de la Société Borda, 1906, pp. 245-250 .
Auteur
Professeur d’Histoire du droit à l’Université de Pau et des pays de l’Adour
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