Histoire et droit considération rétrospective d’une polémique Espagnole
p. 351-358
Texte intégral
1 Notre discipline porte un nom composé de deux sciences différentes, ce qui permet, en considérant son objet, deux prises de vue également différentes : considérer l’Histoire du droit du point de vue de l’Histoire ou du point de vue du Droit. En Espagne, ces options méthodologiques se formulèrent jadis avec une grande virulence. Aujourd’hui, l’intensité de celle-ci s’est beaucoup atténuée. Mais puisque le sujet de ces Journées est l’Histoire de l’Histoire du Droit, j’ai jugé important de jeter un regard en arrière, afin d’expliquer comment furent les choses et comment elles sont à présent. Une fois expliqué le point de départ, tout le reste en sera une conséquence, comme s’il s’agissait d’une loi physique.
Commençons par le commencement.
2Il n’est pas question de faire allusion à ceux que nous appelons les précurseurs, qui s’occupaient de publier les textes juridiques anciens, ou de commenter le Droit du passé, mais sans une méthodologie préalable1. Il est pourtant bien nécessaire de mentionner celui que nous considérons le père fondateur de la science de l’Histoire du droit espagnol : Eduardo de Hinojosa y Naveros (1853-1919). Il fut professeur d’Histoire Ancienne et du Moyen Âge à l’Université de Madrid. Il n’était pas juriste ; donc, à partir de sa formation d’historien, il traita l’Histoire du droit comme une spécialité de l’Histoire. Il considérait – et bien d’autres après lui – qu’il y avait une Histoire générale et d’autres Histoires chacune d’elles s’occupant d’une parcelle de l’activité humaine, dont l’Histoire du droit. Je n’aborderai pas ici les dysfonctions de la périodisation de l’Histoire générale, lorsqu’elle est appliquée à l’Histoire du droit, mais de sa production scientifique, dans laquelle il fut débiteur des expositions d’ensemble de l’Histoire du droit germanique.
3Je m’explique. À l’époque d’Hinojosa, la recherche et l’enseignement de l’Histoire du droit finissaient au Moyen Âge, en particulier au haut Moyen Âge. Et comme les érudits allemands avaient mis en œuvre le squelette des grandes constractions de ce Droit germanique, il lui était aisé de les emprunter et de les remplir avec les particularités du Droit espagnol. Il écrivit beaucoup2, mais un de ses travaux, El elemento germánico en el Derecho español, présenté à un congrès tenu à Berlin en 1915, eut un retentissement particulier. Il y expliquait que certaines institutions juridiques du haut Moyen Âge espagnol – tels que la vengeance du sang, la saisie privée, l’inimicitia et quelques autres – étaient des manifestations du Droit germanique, lequel aurait été introduit en Espagne par les Wisigoths. Leurs rois étaient très romanisés, donc ces institutions contraires au Droit romain furent mises en veilleuse pendant trois siècles, mais, à la chute du royaume de Tolède par la conquête musulmane, elles reverdirent pour conformer un Droit espagnol médiéval qui n’était autre que le Droit germanique enfin retrouvé3.
4Hinojosa eut deux disciples : Ramón Menéndez-Pidal, qui excellait dans la Philologie, et Claudio Sánchez-Albornoz en Histoire. Celui-ci était, comme son maître, un historien qui traitait à l’occasion des sujets juridiques mais, convaincu de l’importance de l’étude de l’Histoire du droit avec des critères scientifiques, il fonda en 1924 l’Anuario de Historia del Derecho Español, revue prestigieuse qui continue de nos jours4. Pour leur part, les professeurs d’Histoire du droit d’avant-guerre5, tels que Salvador Minguijón, Galo Sánchez et Laureano Díez-Canseco6 acceptèrent la méthodologie de Sánchez-Albornoz... et continuèrent à publier des documents, ce qui s’avérait bien nécessaire.
La réaction.
5Elle ne se fit pas attendre de la main d’autres grands professeurs – dans le sens d’anciens – lesquels, s’approchant de la Pandectistique, appliquèrent la méthodologie connue comme dogmatique juridique. Il convient de citer Manuel Torres-López7, qui fut suivi de nos jours par son disciple José-Manuel Pérez-Prendes, José-Antonio Rubio Sacristán8 et Román Riaza9. Torres-López et Rubio-Sacristán s’étaient formés en Allemagne.
6Mais, en fait, où en étions nous après la guerre ? Dans la sécheresse méthodologique et dans l’indéfinition. Egalement dans la pénurie de matières premières. Un manuel d’Histoire du droit, connu sous le nom de Tratado de García-Gallo10 avait été imprimé sur un papier d’origine indéfinissable, y compris les semelles d’espadrilles. Dès la fin des années 1940 surgit une nouvelle génération d’historiens du Droit, une partie desquels, dont l’importance est difficile à établir, s’était consacrée à notre discipline car ils n’avaient pas obtenu la permission parentale pour faire leurs études dans la faculté des Lettres, considérée plutôt pour les femmes en ce temps-là11.
7Comme disait García-Gallo, mon maître vénéré, l’Histoire du droit sombrait dans l’Histoire pure, car ses cultivateurs ne se sentaient pas juristes, eussent-ils étudié le Droit. Ce fut le grand moment de cet éminent professeur.
L’apport méthodologique d’Alfonso Garcia-Gallo (1911-1992).
8Comme le célèbre romaniste Alvaro D’Ors se plaisait à dire, « il y a, en Espagne, un avant et un après García-Gallo ». Il obtint la chaire d’Histoire du droit en 1935, décernée par un jury dont le président était Sánchez-Albornoz en personne. D’une capacité de travail exceptionnelle12, il consacra sa vie à l’Histoire du droit avec une abnégation totale. Il y venait du Droit et non pas de l’Histoire. Le résultat en fut une production scientifique imposante13, de laquelle il faut souligner spécialement ses 5 manuels, dont le premier fut écrit en collaboration avec Román Riaza, lorsque García-Gallo n’était qu’assistant à l’Université de Madrid.
9À l’occasion du centenaire de la naissance d’Hinojosa, il commença sérieusement son épuration méthodologique. Dans son article « Historia, Derecho e Historia del Derecho »14, il censura aussi bien l’historicisme qui restait en dehors du phénomène juridique, que la dogmatique qui ignorait l’évolution historique du Droit. Il disait – en parole et par écrit – qu’il fallait considérer l’Histoire du droit du point de vue du Droit. Et celui-ci devait être défini de l’extérieur, avec ce qu’il appelait un concept instrumental : « ordonnancement de la vie sociale avec force contraignante »15, qu’il jugeait valable pour toutes les époques et pour toutes les manifestations du Droit, savant ou populaire, écrit ou non. Si le Droit doit être étudié comme phénomène de culture, c’est-à-dire, dans un contexte extra-juridique que l’historien du Droit doit connaître, l’Histoire du droit reste néanmoins une discipline juridique. Elle doit montrer l’origine et l’évolution du Droit depuis les temps les plus anciens, mais sans perdre de vue que son objet est le Droit et non pas l’Histoire. Elle peut illustrer le Droit actuel, lequel se justifie normalement par le Droit historique, mais tel n’es pas son but, car l’Histoire du droit est une science autonome.
10Il mit en place – d’autres firent de même en Europe, et en France – le concept d’institution juridique, qui provenait de la considération de trois éléments : un fait d’importance sociale considérable, le point de vue de la société vis-à-vis de celui-là et la réponse juridique, ou institution juridique proprement dite. García-Gallo ne se contenta pas seulement de théoriser, mais il appliqua cette méthodologie dans ses manuels et dans ses travaux de recherche jusqu’à la fin de sa vie, en la polissant et en l’épurant, sans jamais y renoncer.
Les conséquences.
11García-Gallo fut formateur personnel de trois générations d’Historiens du droit. Son premier disciple fut Ismael Sánchez-Bella16, mon professeur, et à qui je dois d’être, à mon tour, professeur d’Histoire du droit. Et il en eut d’autres, dans la première génération Francisco Tomás y Valiente17, José Martínez-Gijón, et Gonzalo Martínez-Díez. Ceux-ci formèrent d’autres disciples, lesquels, à un moment déterminé, étaient envoyés à García-Gallo pour compléter leur formation. Le plus ancien en est José-Antonio Escudero, également Gustavo Villapalos, et je peux aussi me citer moi-même. Et, à leur tour, ces disciples de la deuxième génération formèrent d’autres professeurs, qu’ils envoyaient également consulter souvent le professeur García-Gallo.
12Il n’était pas le seul tête d’école, et la concurrence avec d’autres agrégatifs se traduisait, dans les concours18 par des polémiques très virulentes sur le concept et la méthodologie de la discipline. Le candidat défendait son option méthodologique dans la même mesure où il méprisait les autres. Il y avait, cependant, un accord entre toutes les écoles : le haut Moyen Âge était une période de parcours obligé. On ne pouvait pas devenir professeur sans prouver qu’on savait y travailler. Le latin et la paléographie en étaient des connaissances indispensables. Il était bien vu, par respect du passé, d’avoir publié des textes, mais de mon temps cela n’était pas indispensable.
13Les écoles se partageaient entre la juridique-institutionnelle de García-Gallo et l’Histoire du droit comme spécialité de l’Histoire. Les autres orientations étaient peu nombreuses, voire marginales. Ainsi, le bifrontisme19 du professeur catalan José-María Font i Rius, l’Histoire des livres juridiques de Rafael Gibert20, l’Histoire totale de Bartolomé Clavero21 et le structuralisme théorique de Pérez-Prendes.
14Au long des années, le nombre de chaires augmenta. Certains professeurs arrivèrent à l’âge de la retraite. Donc, à partir des années 80 du siècle dernier, la pluralité des sensibilités méthodologiques se fraya un chemin, et la virulence d’antan s’atténua. Si on prônait alors la juridicité de l’Histoire du droit comme contrepoids à ceux qui n’y voyaient que de l’Histoire22, de nos jours on détecte une envie d’équilibre entre les deux composants de notre discipline. Avec le déclin des positions irréductibles, la théorie bifronte, jadis minoritaire, acquit une importance croissante.
Nous arrivons au temps présent.
15Temps marqué par cet essor de la théorie bifronte, à laquelle on vient de faire allusion. Elle ne constitue pas une nouveauté, car Font i Rius, l’éminent professeur de Barcelone la défendait23. Mais ce n’est pas un homme fait pour la bagarre, fût-elle académique. En plus, avant 1970 il y avait peu de chaires soumises à concours. Il n’eut qu’un disciple de première génération, Jesús Lalinde, qui était un théoricien du bifrontisme24. Dans la seconde génération, aussi bien Font i Rius que Lalinde purent former un bon nombre de professeurs,.
16La théorie bifronte s’est revitalisée en Catalogne, aussi bien par le magistère de ces deux professeurs que par le composant catalan. Une école de Font i Rius est aujourd’hui fondée, et ses membres ont désigné comme héritier scientifique de Font le professeur catalan Tomás de Montagut i Estragués. En dehors de la Catalogne, José-Antonio Escudero, a été reconnu comme tête d’école, et il a adhéré au bifrontisme.
17Mais en quoi consiste-t-il ? Quel est l’apport fondamental de cette théorie bifronte ? Escudero l’a très clairement formulé dans l’introduction à son manuel25. Résumons. L’Histoire du droit est Histoire, car l’histoire de quelque chose est toujours de l’Histoire. Elle n’est pas du Droit, car le Droit du passé, aujourd’hui exposé, n’a pas la force contraignante propre au Droit. Mais s’il en est ainsi, l’Histoire du droit n’en reste pas moins une science juridique, car elle insiste sur la stabilité du Droit, qui est quelque chose de particulier, de spécial dans l’évolution historique générale. Et aussi parce qu’elle dépend d’une conception déterminée du Droit, que ce soit l’actuelle, empruntée comme point de départ, ou que ce soit celle d’une autre époque suffisamment connue. Ses disciples ont apporté aussi des nuances : la méthode historique ou la méthode juridique prévaudront en fonction du problème ou sujet à étudier, c’est-à-dire, de l’opportunité considérée comme adéquation. L’Histoire du droit, enfin, est une science substantiellement duale, car il s’agit d’étudier le Droit, et non pas l’Histoire, comme processus, ce qui veut dire dans sa perspective historique.
Les choix méthodologiques dans l’actualité.
18Nous sommes arrivés à une période de détente, où des conceptions différentes peuvent cohabiter, dans le sens le plus strict, sans qu’aucun grincement ne se produise. Un seul exemple peut aisément l’expliquer. J’ai été formé dans l’école de García-Gallo, et me suis considéré juriste avant qu’historien, n’ayant jamais éprouvé le besoin de changer d’avis. Mon épouse, par contre, se décida pour la méthodologie duale, et notre vie commune n’en est pas troublée pour autant.
19Après trente-trois ans au service de l’Histoire du droit, dont 28 comme titulaire de chaire, je pense que toutes les positions concernant l’objet de notre discipline sont nécessaires : elles l’enrichissent et la complètent. Le travail de recherche qui s’ensuit est débiteur du choix préalable, mais il ne doit pas être disqualifié parce qu’il considère l’Histoire du droit du point de vue de l’Histoire et non pas du point de vue du Droit. La seule exigence est que la recherche soit menée à bout en respectant de a à z la méthodologie choisie. Il est certain que chaque historien du Droit, confronté à un sujet de recherche déterminé, travaillera à sa façon, et il n’est permis à personne, même s’il est considéré comme une sommité, d’entraver cette liberté de recherche. Cela étant, il n’est pas moins licite d’en critiquer la méthode et les résultats.
20Ce respect pour le choix de la méthode se constate tous les jours en Espagne dans les différents concours, surtout dans ceux de maître de conférences (Profesor Titular), qui est le premier échelon avant de devenir professeur titulaire de chaire (Catedrático)26. Ces concours se sont déroulés selon la loi de 1984 de Réforme universitaire, qui a dispersé les anciens concours nationaux de l’ancienne loi de 1970, tenus invariablement à Madrid. Depuis 1984, chaque concours se célèbre dans l’université qui convoque le poste à pourvoir. La réforme de 2001 a voulu reconduire cette atomisation des concours, en établissant un double filtre pour devenir professeur fonctionnaire. Le premier est un concours national et se tient dans l’université du président, qui est le plus ancien de tous les membres du jury, nommés par tirage au sort. Ce concours s’appelle Habilitación, et permet à ceux qui y sont reçus (habilitados) de se présenter aux concours convoqués par les différentes universités. En tout cas, depuis que le gouvernement a changé après les élections de 2004, cette loi va être substituée par une autre, dont nous ne connaissons pas encore le contenu27. Etant donné qu’il n’y a eu qu’un seul concours d’Habilitación en Histoire du droit, il faut, pour conclure, se limiter à la longue expérience de la Loi de 1984. Il est intéressant de fournir ici l’expérience des concours célébrés conformément à cette loi, surtout des concours de maître de conférences, qui permettent de juger ceux qui veulent devenir professeurs fonctionnaires. On a déjà souligné la diversité des choix méthodologiques. Maintenant, il faut aussi exposer certaines déviations non prévues par la loi, mais devenues courantes dans la pratique.
21Primo, un excès de localisme. L’inflation de postes d’enseignants, donc, de concours, la même université favorisée par la loi de 1984 permit que la plupart des candidats obtinssent leur poste dans la même université que celle où ils avaient fait leurs études de licence et de doctorat et, où ensuite, ils étaient devenus assistants. L’endogamie ne fut pas voulue par la loi, mais elle devint inévitable. En plus, le contenu des exercices du concours28 ne permettait de constater la compétence du candidat, en général, que dans un domaine, une époque et un territoire déterminés. Et j’ai vu personnellement choisir pour le deuxième exercice un sujet apparenté avec l’activité de recherche du candidat29. Membre du jury, je désapprouvai ce choix de façon publique.
22Secundo, abandon des époques les plus difficiles à étudier dans l’Histoire du droit espagnol – période wisigothique et haut Moyen Âge – pour se pencher sur les époques moderne et constitutionnelle (XVIe-XXe siècles). Le haut Moyen Âge n’est plus considéré comme un passage obligé dans la formation d’un historien du Droit, et on a même entendu des phrases de mépris pour cette époque et pour la wisigothique. Néanmoins on observe tout récemment une augmentation des travaux consacrés à celles-là.
23Tertio, abandon notoire des connaissances instrumentales, tels que le latin et la paléographie, ce qui provoque l’impossibilité de travailler avec des textes datant d’avant le XIIIe siècle, avec les sources manuscrites et avec la littérature juridique jusqu’à la fin du XVIIe siècle.
24Quarto, inobservance de la loi en ce qui concerne l’exposition des exercices. En effet, celle-ci ordonne que ceux-là doivent être exposés oralement devant le jury ; mais normalement le candidat en fait une lecture complète de chacun sans le moindre embarras et, qui pis est, sans recevoir la moindre remarque de la part du président du jury30. Il n’est pas nécessaire d’insister sur le fait que cette déviation de la loi a un effet négatif sur la qualité de l’exercice : un candidat qui ne sait pas exposer, mais seulement lire, n’est pas un bon enseignant.
25Nous devons tout ce que vient d’être signalé à la loi de 1984, qui en finit avec la mobilité des professeurs, qui facilita l’endogamie et qui fit baisser le niveau. Bien sûr, pour la plus grande satisfaction des candidats et de leurs formateurs. Maintenant, un professeur, qu’il soit maître de conférences ou titulaire de chaire, n’est pas professeur d’Histoire du droit, mais professeur d’Histoire du droit d’une université déterminée. S’il veut se faire muter, il devra faire un nouveau concours31, dont le résultat reste toujours incertain.
26Après tant de théorie exposée dans les premières pages, il était obligatoire de tourner les yeux sur la pratique quotidienne, même si cela devait déplaire à certains.
Notes de bas de page
1 Tomás Muñoz y Romero, Colección de fueros municipales y cartas-puebla de los reinos de Castilla, Léon, Corona de Aragón y Navarra, Madrid, 1845, nov. impression Madrid, 1972. Francisco Marrinez Marina, Teoria de las Cortes, 3 vols., réédition, Madrid, 1979. ID., Ensayo histórico-critico sobre la legislación y principales cuerpos legales de los reynos de León y Castilla, Madrid, 1808. On pourrait citer quelques autres plus anciens, comme les frères Covarrubias ou Ambrosio de Morales.
2 Eduardo de Hinojosa y Naveros, Obras, édition de l’Instituto Nacional de Estudios Jurídicos, I, Madrid 1948 ; II. Madrid 1955 ; III, Madrid 1974. L’étude cité en texte est publié dans le tome II, p. 407-470.
3 Comme échantillon splendide, voir le livre de Julius Ficker, Sobre el íntimo parentesco entre el Derecho godo-hispánico y el noruego-islándico, traduction de J. Rovira-Armengol, Barcelone, 1928. Comme étude de synthèse, Alfonso Garcia-Gallo, « Considération critica de los estudios sobre la legislación y la costumbre visigodas », Anuario de Historia del Derecho Español (dorénavant AHDE), 44, Madrid, 1974, 343-464.
4 Publiée sous les auspices des Ministères de la Présidence et de la Justice, le dernier volume paru est le n° 75. correspondant à l’année 2005.
5 Il s’agit, bien sûr, de notre guerre civile (1936-39). Voir les manuels de Salvador Minguijon, Historia del Derecho Español, 12 cahiers -connu en Espagne comme le grand Minguijón- Saragosse, 1923-1934. Il écrivit aussi un autre manuel connu comme le petit Minguijón, c’est-à-dire, « Historia del Derecho Español », dans la Collection Labor, Barcelone 1933. Pour sa part, Galo Sanchez est auteur d’un manuel qui résume admirablement les sources du Droit historique espagnol : Curso de Historia del Derecho Español. dont la 10ème édition fut imprimée à Valladolid en 1972.
6 II fût aussi directeur de l’Anuario. Doué d’une intelligence remarquable, il écrivit néanmoins fort peu, ce que les cultivateurs de la discipline avons beaucoup regretté. Je connus dans ma jeunesse un ancien élève – décédé il y a vingt ans presque nonagénaire du professeur Diez-Canseco, qui m’exprima à plusieurs reprises l’admiration que provoquaient ses cours parmi les étudiants de l’Université de Madrid. García-Gallo le connut fort bien, et il se plaisait à raconter des anecdotes très amusantes à son égard.
7 Manuel TORRES Lopez, Lecciones de Historia del Derecho Espanol, 2 vols., 2ème édition Salamanque 1945-36. Il convient de mentionner ici son travail « El Estado visigótico », AHDE, 3, Madrid 1926, 307-475, très germanique. José Manuel Perez-Prendes, Historia del Derecho Español, 2 vols., dernière édition Madrid 1999.
8 Cet auteur écrivit fort peu, car il se consacra plutôt aux activités d’entreprise. Par son germanisme, il convient de citer son travail « Donationes post obitum et donationes reservato usufructu en la Alta Edad Media de León y Castilla », AHDE, 9. Madrid. 1932, 1-32.
9 Román Riaza, Historia de la Literatura Jurídica española, Madrid. 1930. Román Riaza et Alfonso Garcia-Gallo, Manual de Historia del Derecho Español, Madrid, 1934.
10 En réalité, l’oeuvre s’intitulait Historia del Derecho Español, I. Exposición Histórica, Madrid, 1940. Nous parlerons de García-Gallo un peu plus tard. Ce livre n’abordait que les époques pré-romaine, romaine et wisigothique, mais dans tous les domaines.
11 Hans Thieme avait souligné la situation ambiguë de l’historien du Droit, considéré par les juristes comme un bon historien, et par les historiens comme un bon juriste. Mais il se rend incommode aussi bien pour les uns que pour les autres : pour les historiens, à cause de sa mentalité juridique, pour les juristes, à cause de son penchant historique. Voir son travail « Ideengeschichte und Rechtgeschichte », Festschrift für Iulius von Gierke zu seinen goldeneen Doktorjuhilaum am 25 october 1948, Berlin, 1950, 288.
12 Il me disait une fois qu’il ne lui fallait dormir plus de six heures. Et à l’époque où il préparait son concours, il dormait quatre heures seulement.
13 On peut voir son curriculum complet – jusqu’en 1980 dans l’Anuario de Historia del Derecho Español, vol. 50, 1980, pages préalables XVII-XXVIII. Il continua à écrire après, presque jusqu’à sa mort, principalement dans l’Anuario.
14 Alfonso Garcia-Gallo, « Historia, Derecho e Historia del Derecho. Consideraciones en torno a la escuela de Hinojosa », AHDE, 23, Madrid 1953, 5-36.
15 La définition exacte en espagnol était : « La ordenación de la vida social con fuerza vinculante »
16 Professseur à l’Université de Navarre, aujourd’hui en qualité d’émérite. Il est un spécialiste de réputation incontestée du Droit de l’Amérique espagnole.
17 Il combina la vie académique avec la vie politique, et fut président du Tribunal Constitutionnel. Après son mandat, il retourna à l’Université Autonome de Madrid, où il fut assassiné dans son bureau par un terroriste de l’ETA.
18 Je fais référence aux concours que nous considérons vrais, vulgairement nommés « de patte noire », d’avant la loi de 1984 qui les décentralisa. Nous en reparlerons bientôt. Ils consistaient en six exercices, tous éliminatoires. Le 1er, curriculum et travaux. Le 2ème, exposé conceptuel et méthodologique. Le 3ème, la leçon magistrale, exposé complet d’une leçon choisie librement par l’agrégatif parmi celles de son programme. Il était d’usage qu’elle portât sur l’Histoire du droit privé, pénal ou de procédure. Le 4ème était une leçon sur ce même programme, choisie par le jury entre 10 tirées au sort. Ils tombaient toujours sur le sujet le plus difficile ou le moins brillant à exposer. Le 5ème était double : commentaire de texte manuscrit – il y fallait prouver ses connaissances en paléograhie et en diplomatique- et de texte imprimé. Et le 6ème était aussi double : deux compositions sur des sujets généraux proposés par le jury. Le concours était dur. mais personne n’est mort. Nous y passions nos peines, bien sûr, mais à la fin, le jury pouvait savoir combien de connaissances sur la discipline avait chaque candidat.
19 On y reviendra un peu plus tard.
20 Son manuel : Historia General del Derecho Español, dernière édition Madrid, 1981.
21 Il est auteur ou co-auteur de plusieurs manuels. Nous citerons ici son Curso general de Historia del Derecho, Madrid 1992. Il appliqua scrupuleusemet la méthodologie de l’Histoire Totale dans son travail Mayorazgo. Propiedad feudal en Castilla (1365-1836), dernière édition Madrid 1989, qui en est devenu le paradigme.
22 Il y avait, et il y a même aujourd’hui des enseignants qui sont capables d’enseigner l’Histoire du Droit, l’Histoire d’Espagne, ou le Droit romain avec une versatilité surprenante à première vue. En réalité, ils expliquent toujours la même chose. Ce sont des dilettantes, qui ont besoin d’un poste d’enseignant, mais qui ne se sont pas préoccupés d’acquérir une sérieuse formation en Histoire du Droit, ou même qui ne sont pas des juristes.
23 José-María Font i Rius, Apuntes de Historia del Derecho español, parte general, Barcelone, 1969.
24 Jesús Lalinde-Abadia, Iniciación histórica al Derecho español, dernière édition Barcelone, 1989. ID., Derecho Histórico español, dernière édition Barcelone, 1983. ID.. El Derecho en la Historia de la Humanidad, Barcelone, 1991.
25 José-Antonio Escudero, Curso de Historia del Derecho. Fuentes y instituciones político-administrativas, dernière édition, Madrid, 1995.
26 La figure du professeur agrégé a disparu dès la Loi de 1984, dite de Réforme universitaire. La nouvelle loi de 2001, intitulée « Loi Organique des Universités » ne l’a pas ressuscitée.
27 Tenir compte de ce que ce travail fut rédigé en 2005.
28 Le premier était l’exposition du curriculum ainsi que de la méthodologie pour un temps non limité par la loi, suivie de la discussion entre le candidat et le jury durant trois heures maximum. Le deuxième exercice était l’exposition d’un sujet de la discipline librement choisi par le candidat, suivi aussi de discussion durant le même délai.
29 Au contraire, dans les concours nationaux de la Loi de 1970, dont le contenu a été détaillé dans la note 18, il fallait choisir pour l’exposé (3ème exercice) un sujet qui n’ait rien à voir avec la recherche prédominante du candidat. Et, s’il était d’une région déterminée, il devait prouver sa connaissance du Droit des autres régions dans les publications qu’il présentait au concours. Plus clair : moi-même, étant navarrais, fus obligé par le professeur Sánchez-Bella à choisir le Droit de Castille et de Léon comme territoire de mon sujet de thèse (la disposition mortis causa durant le haut Moyen Âge)
30 Je me souviens d’avoir vu, lors d’un concours selon la loi de 1970 que. sitôt qu’un concurrent commençait à lire un exercice qui devait être exposé et non pas lu. le président lui coupait immédiatement la parole, en l’avertissant qu’il ne pouvait lire que les courtes citations des textes qui entraient dans l’exposé. Devant l’expression de surprise du candidat, le président renchérit : on pouvait suspendre l’exercice pendant une demi-heure pour que le candidat rédigeât quelques notes qui lui permissent une exposition orale. S’il refusait, il serait immédiatement éliminé. Il convient de dire que, des six exercices dont se composait le concours, détaillés dans la note 18, les quatre premiers devaient être exposés oralement. Les deux restants, par contre, devaient être rédigés pendant un certain temps et ensuite lus devant le jury à qui il fallait rendre ensuite les feuilles qu’on venait de lire.
31 La loi de 1984 élimina ce qu’on appelait le « concours de déplacement » (concurso de traslado), par lequel on pouvait demander un changement de destination à la même place libre d’une autre université, et dont le principal mérite était l’ancienneté dans le corps d’enseignant auquel appartenait le postulant. La loi de 2001 n’a pas osé ressusciter ce concours, pour ne pas contrarier l’autonomie des Universités ainsi que les gouvernements des Communautés Autonomes dont l’Espagne est composée de nos jours. Je le tentai en vain lorsque j’étais sénateur et un des rapporteurs généraux de cette loi au Sénat. Mais le Ministère n’en voulut point, ce qui en dit long sur ce qu’est devenu la séparation de pouvoirs de nos jours.
Auteur
Professeur à l’Université de Leon (Espagne).
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