II - Une institution dans la Première Guerre mondiale
p. 61-121
Texte intégral
1La guerre de 1914-1918 a eu différentes conséquences sur l’organisation et le fonctionnement de la Faculté de droit : diminution des effectifs et nombreuses pertes humaines, mobilisation de son personnel, baisse de son budget, diminution des conférences facultatives, accueil d’étudiants américains… La documentation en relation avec cette période rend compte de la formation de diverses mémoires (A). La Faculté, par ses engagements variés (B), tant humain que sur le terrain du droit et des valeurs, est pleinement investie dans ce conflit.
A – Mémoire(s)
2Appréhender l’organisation et le fonctionnement de la Faculté de droit mais aussi connaître les hommes qui la font vivre tout en les replaçant dans leur milieu social et leur environnement local est possible à l’aide de sources diverses. Elles ont été produites par l’institution elle-même. Leur rédaction rend compte du regard porté par les acteurs sur les évènements et les difficultés rencontrées. Elles offrent ainsi d’utiles et indispensables données sur la Faculté et le discours que certains de ses membres produisent.
1 - Conserver
3Au registre des délibérations du conseil de la Faculté de droit et de son assemblée pour les années 1908-19241 s’ajoutent les rapports annuels que le doyen présente au Conseil de l’Université avec les comptes rendus des travaux des Facultés et des observatoires2.
Registre des conseils et assemblées de la Faculté
4Le décret du 28 décembre 1885 modifie l’organisation des Facultés et accroît les compétences du doyen3. Il prévoit par ailleurs deux organes : l’assemblée et le conseil de la Faculté. La première existait déjà, régie par l’instruction du 19 mars 1807 pour les Écoles de droit qui prévoyait une réunion mensuelle. Elle devait comprendre les professeurs titulaires, les agrégés et chargés de cours titulaires du doctorat. Ces derniers n’avaient alors qu’une voix consultative. Le décret de 1885 précise les compétences de l’assemblée. Elle doit délibérer sur toutes les questions se rapportant à l’enseignement, spécialement les programmes des cours et des conférences. Le conseil est institué en 1885 (titre II). Il est composé des seuls professeurs titulaires. Il a compétence pour délibérer sur le budget de la Faculté, sur l’acceptation et l’emploi des dons et legs, pour édicter les règlements destinés à assurer l’assiduité des étudiants. Aucune périodicité n’est précisée quant à sa réunion.
5Le doyen, nommé pour trois ans par le ministre, est choisi parmi les professeurs titulaires « sur une double liste de deux candidats présentée, l’une par l’assemblée de la Faculté, l’autre par le conseil général des Facultés » (art. 22 du décret du 28 décembre 1885). Il représente la Faculté, en assure l’administration intérieure et la police. Il préside en outre le conseil et l’assemblée, assure l’exécution de leurs délibérations. Il veille à l’observation des lois, règlements et instructions ainsi qu’à l’exercice régulier des cours, conférences et examens. Enfin, il administre les biens propres de la Faculté, prépare les budgets et engage les dépenses.
6Le décret du 28 décembre 1885 prévoyait que les séances et les décisions de l’assemblée de la Faculté seraient consignées dans un registre spécial. Dans la pratique, à Toulouse comme à Bordeaux, un seul registre nous renseigne sur la tenue des assemblées et des conseils4. Les registres de la Faculté de droit de Toulouse sont conservés dans le fonds des archives de l’Université Toulouse Capitole5. La série 2Z2 est composée de plusieurs volumes dont ceux intéressant la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle6. Le registre 2Z2-16 de 1908 à 1924 est constitué de 424 pages dont 400 numérotées recto et verso renferment les délibérations7 pour les séances du 5 février 1908 au 7 mai 1924. Les 24 dernières pages correspondent à un index onomastique et thématique (175 entrées dont 38 noms de personnes)8.
7Pour rendre compte de la période où la Faculté de droit est plongée dans la Première Guerre mondiale, nous disposons des délibérations de l’année universitaire 1913-1914 à l’année universitaire 1918-19199 soit quelque 105 pages du registre. Les réunions de l’assemblée comme du conseil sont présentées de manière chronologique les unes à la suite des autres, des discours du doyen Hauriou sont aussi retranscrits à l’occasion des cérémonies de remise des prix aux étudiants10, d’obsèques (par exemple celles d’Habert, secrétaire honoraire en 1912)11 ainsi que des allocutions prononcées au cours des rentrées universitaires12. Pour la période considérée, du 15 novembre 1913 au 24 juin 1919, 16 conseils et 35 assemblées se sont tenues13. Si, jusqu’à la mi-mai 1916, la réunion de l’assemblée fait suite à la tenue du conseil (8 cas)14, passée cette période ce sont les assemblées qui sont le plus souvent réunies. Le nombre de conseils diminue fortement passant de cinq réunions en 1914 et 1915 à deux par an (1916 et 1917) puis une seule en 1918. Le conseil n’est pas réuni pendant un an, entre mai 1916 et mai 1917, puis entre décembre 1917 et décembre 1918. La moitié des membres est alors présente, l’autre est mobilisée, en congé ou excusée. Le nombre d’assemblées s’accroît, passant de quatre en 1914 à cinq (1915, 1916, 1917, 1918) puis huit réunions de janvier à juin 1919.
8Chaque compte rendu de réunion débute par la date et l’heure d’ouverture de la séance, indiquant la forme convoquée, le lieu (« local ordinaire ») puis la liste des présents, excusés, en congé ou mobilisés. Un secrétaire de séance est désigné. Après adoption du procès-verbal de la précédente séance, les différentes questions inscrites à l’ordre du jour sont examinées. La transcription se termine par l’indication de l’heure de levée de la séance ainsi que la signature du secrétaire et du doyen. Cette très classique présentation permet de formuler plusieurs observations quant à l’assiduité, à la durée des réunions et aux sujets traités.
9Qu’il s’agisse du conseil ou de l’assemblée, les plus assidus sont Cézar-Bru, Declareuil, Houques-Fourcade, Magnol, Mestre et Thomas. D’autres, par la force des choses, sont mobilisés ou en congé. Léon Polier est assez souvent en mission. Joseph Gheusi a été député de la Haute-Garonne (de 1908 à 1910 puis de 1910 à 1914) revenant ensuite, après sa défaite électorale, à la Faculté au début du mois de juin 1914. Il redeviendra député (Parti radical et radical socialiste) entre novembre 1919 et mai 1924 au sein de la « Chambre bleu horizon ».
10Les réunions tant du conseil que de l’assemblée sont courtes, en moyenne 40 minutes pour les premiers et une heure pour les secondes. La variation de durée est significative. Elle est de 15 minutes pour un conseil qui examine un compte d’administration, un budget additionnel, la suppression ou la transformation d’une chaire (en l’occurrence celle de droit romain) et des dispenses de droit de conférences (8 mai 1914) ou bien une assemblée qui fixe la date des concours de fin d’année (8 mai 1914). Elle a une durée maximum de deux heures pour le conseil du 2 décembre 1918 et les assemblées des 31 mars et 17 juin 1919. Dans le premier cas, le conseil ne s’était pas réuni depuis près d’un an et le nombre de questions examinées est exceptionnellement important (dix sujets). La deuxième réunion traite de la question des cours destinés aux étudiants américains démobilisés accueillis à la Faculté de droit. La troisième et dernière procède à la répartition des cours et conférences au sortir de la guerre pour préparer la première année universitaire de retour à la paix.
11L’ordre du jour des différentes réunions (assemblées et conseils) illustre les préoccupations principales du corps enseignant. Le décret relatif à l’organisation des Facultés du 28 décembre 1885 a déterminé les compétences respectives du conseil et de l’assemblée. Elles sont dans l’ensemble respectées. Ainsi, pour les 42 sujets abordés par le conseil (en moyenne deux par séance), le domaine financier et les affaires de scolarité représentent-ils à parts égales 70 % des points inscrits à l’ordre du jour. La question des chaires d’enseignement représente 15 %, le reste correspondant aux divers objets traités au cours de la séance du 2 décembre 1918 (avec par exemple : Livre d’or, retraite de l’appariteur, venue d’une mission américaine et britannique, adresse aux Facultés de droit de Lille et Nancy…). Plus intéressante est la pratique de l’assemblée pendant la guerre. La formulation du décret de 1885 est générale puisque lui donnant compétence pour « toutes les questions qui se rapportent à l’enseignement », notamment les programmes des cours et conférences, la distribution des enseignements, les cours libres. Parmi les 112 sujets inscrits à l’ordre du jour de l’ensemble des assemblées (en moyenne trois par séance), ce sont un peu plus de 39 % d’entre eux qui s’y rapportent. 30 % des questions traitées correspondent ensuite à des attributions du conseil désormais exercées par l’assemblée. La même confusion de compétences est observable, mais plus tardivement, à Bordeaux15. C’est tout particulièrement le cas concernant l’examen du budget au cours des assemblées des 7 décembre 1916, 7 décembre 1917, 16 mai 1918 et 23 mai 1919. C’est aussi le cas en matière de dons, ou d’affaires de scolarité traitées par le conseil (droits d’inscription, dispenses, répartition du produit des conférences). Enfin, 31 % des sujets sont des plus divers : concurrence des écoles libres de Limoges et Clermont-Ferrand, organisation de la salle Garrigou, vœu pour l’attribution du prix Nobel 1915 à la Belgique, distribution de prix à des élèves du lycée, situation des professeurs mobilisés, élection d’un délégué au conseil de l’Université, création d’un musée commercial…
12Le registre constitue une mise au propre de notes prises au cours des réunions de l’assemblée ou du conseil. Le recueil comporte malgré tout des corrections16, des ajouts17 et des ratures18, voire une feuille occasionnellement collée sur une partie du registre déjà rédigée pour en rectifier les données (par exemple, pour le budget additionnel de 1919, en ce qui concerne les recettes)19. Chaque page du registre est divisée en deux avec une marge à gauche, généralement laissée blanche. Elle est cependant parfois utilisée comme pour le Prix Ozenne-Deloume en 190920, pour féliciter André Fliniaux de son succès au concours d’agrégation et souhaiter la bienvenue à Alcée Dugarçon21, pour introduire Jacques Maury (agrégé), Jean Plassard et André Hauriou comme chargés de cours, transformant alors le conseil en assemblée au cours de la séance du 14 décembre 192222 ; il s’agit cependant d’ajouts ponctuels.
13Plus régulièrement, des pages du registre accueillent une feuille collée relative à une circonstance particulière : élections au conseil supérieur de l’Instruction publique (scrutin du 12 mai 1908, du 31 mai 1912)23, tableau des noms des membres de la Faculté de droit pour la présentation aux fonctions de doyen (18 juin 1909)24, tableau des noms des membres de l’assemblée de la Faculté de droit prenant part à l’élection d’un délégué au conseil académique (scrutin du 26 février 1910, du 1er juin 1912)25, tableau des noms des membres de la Faculté pour l’élection de délégués au Conseil de l’Université (16 décembre 1912, 8 février 1918)26, texte de la cérémonie du 1er mars 1918 à l’occasion du 47e anniversaire de la protestation des députés d’Alsace-Lorraine27 ou encore notice nécrologique de Joseph Bressolles extraite de l’Express du Midi28.
14Une autre méthode consiste à ajouter une feuille collée dans la marge. Elle est ainsi placée entre deux pages et sert de pièce justificative à l’un des points de l’ordre du jour de la réunion. Tel est le cas du tableau des jours et heures de cours (année scolaire 1909- 1910)29, du discours du doyen prononcé lors de la séance de distribution des prix (6 décembre 1911)30, des noms des membres de la Faculté de droit pour la présentation aux fonctions de doyen (18 juin 1912)31, d’un discours prononcé devant les étudiants à la rentrée universitaire 1914-191532, de la présentation le 28 mai 1921 des félicitations du doyen à l’occasion des différentes promotions reçues dans l’ordre de la Légion d’honneur33, des Observations et suggestions de la Faculté de droit de Toulouse à soumettre au Comité Consultatif au sujet de la Réforme des Études juridiques (délibération du 4 janvier 1922)34.
15Le registre des années 1908-1924 renferme aussi, entre deux pages, des documents volants tel le rapport sur la proposition de délivrance du titre de docteur honoris causa à Giuseppe Chiovenda présenté par « Monsieur J. Maury professeur de droit civil comparé à Monsieur le Doyen de la Faculté de Droit de l’Université de Toulouse »35. Ce rapport a d’ailleurs été mal inséré car Jacques Maury n’est professeur à la Faculté qu’à partir de 1920. On rencontre également les « Rapports adoptés par la Faculté de Droit de Toulouse dans ses séances des 3, 10 et 23 juin 1920 en exécution de la dépêche ministérielle du 14 avril 1920 relative à la réforme des études juridiques »36, le rapport sur les concours de la Faculté de droit pour l’année 1919/1920 présenté par le professeur Ricol37, pour l’année 1920/1921 par Louis Rigaud38, pour l’année 1921/1922 par Jacques Maury39 et 1922/1923 par Jean Plassard40. De manière semblable, les statuts de l’Institut de criminologie et de sciences pénales sont présents en lien avec la séance du conseil du 20 décembre 192341, tout comme le projet de convention entre la Faculté de droit de Toulouse et l’Institut technique de droit (séance du 27 février 1924)42 ou encore, en toute fin de registre, trois petits feuillets constituant un brouillon de notes prises pendant la séance de l’assemblée du 7 mai 192443. Ce document intéresse la confection du registre. Le secrétaire de l’assemblée est alors Jacques Maury (la fonction est confiée à un membre du corps enseignant). On dispose ainsi des notes préparatoires et de la mise au propre pour l’assemblée44 et non pour le conseil qui se tient afin d’examiner le compte d’administration de l’exercice 1923 et le budget additionnel pour l’exercice 192445.
16Six points sont inscrits à l’ordre du jour de cette assemblée : 1) choix par la Faculté des cours à option pour les examens de 3e année de licence, 2) renouvellement des cours et conférences pour l’année 1924-1925, 3) projet de création d’un emploi de bibliothécaire des salles de travail, 4) confection sur parchemin du « Livre d’Or », 5) élections au Conseil académique, 6) dispense du droit d’inscription aux conférences facultatives. Les trois feuillets de notes renferment deux éléments distincts. Les deux premiers sont les notes devant servir à la rédaction du compte rendu de la séance. Il y a là des indications générales que l’on retrouve pour chaque réunion46 : date, formation réunie et liste des membres présents, absents et excusés. L’ordre du jour est ensuite examiné. On constate d’ailleurs une erreur de numérotation dans les questions mises à l’ordre du jour. Le texte est raturé, des données chiffrées manquent, la liste des étudiants dispensés fait défaut. Ces éléments apparaissent dans la formulation finale du registre. Un renvoi est matériellement signalé (« # »). Il indique la place de l’ajout qui doit intervenir lorsque le texte sera mis au propre. Il s’agit de celui contenu dans le troisième feuillet. C’est le vœu formulé par l’assemblée de maintenir Jean Plassard comme chargé de cours jusqu’au 31 octobre suivant. Le texte est repris intégralement dans le registre à la fin du paragraphe concernant le renouvellement des cours.
17Les réunions situées entre le 15 novembre 1913 et le 24 juin 1919 offrent le témoignage d’une mémoire institutionnelle émanant d’un groupe clairement identifié de personnes qui se côtoient au sein de la Faculté de droit. Les questions abordées au cours de cette période intéressent l’organisation et le fonctionnement de l’établissement. Elles nous renseignent aussi sur l’adaptation de la Faculté aux difficultés engendrées par le conflit. La guerre est essentiellement présente à travers les hommes, les discours du doyen Hauriou et les finances. Il n’est pas fait mention de manière particulière de l’annonce de la déclaration de guerre alors que l’armistice donne lieu à une longue évocation47. Il n’y a pas non plus d’action matérielle spécifique pour se préserver des risques liés au conflit. En cela Toulouse se distingue de la capitale, directement menacée par l’avancée allemande lors de la bataille de la Marne, le conseil de la Faculté de droit de Paris décidant, le 5 septembre 1914, de protéger les archives en les descendants à la cave48.
Rapports annuels du doyen de la Faculté de droit au conseil de l’Université
18Chaque année, les doyens des Facultés toulousaines, les observatoires et la bibliothèque universitaire présentent devant le conseil de l’Université un « compte rendu des travaux ». Le recueil publié annuellement est précédé d’un rapport adressé au ministre de l’Instruction publique par le conseil de l’Université (après une présentation générale, vient une synthèse des différents rapports). Le doyen Hauriou fournit donc annuellement, en une dizaine de pages, un état de « la situation de la Faculté » durant l’année universitaire précédente. Ainsi, ouvre-t-il son rapport pour l’année 1913-1914 par les lignes suivantes : « Bien que ce rapport soit élaboré et lu en période de guerre, comme il n’est destiné à relater que des faits de scolarité antérieurs à l’ouverture des hostilités, nous n’aurons presque pas à faire état de ce grand évènement. Les conséquences diverses qu’il aura entraînées feront la matière du rapport de l’année prochaine »49. Le conseil de l’Université est maintenu dans sa composition au cours de la guerre. Le renouvellement prévu en 1915 n’a pas eu lieu sur décision ministérielle du 26 novembre 1915 prorogeant de manière exceptionnelle jusqu’à la fin des hostilités la composition du conseil et ses pouvoirs50.
19Le rapport présente généralement un état de la situation des enseignants (arrivée, départ et décès) et des événements les concernant (missions, décorations). Il s’intéresse ensuite aux effectifs étudiants et à leur évolution, des tableaux étant dressés en fin de rapport (par exemple pour l’année 1913-1914 : A) Étudiants inscrits et étudiants immatriculés, B) Inscriptions, C) Examens). Suivent une présentation chiffrée des diplômes obtenus durant l’année scolaire, la liste des publications et travaux du personnel de la Faculté ainsi que les noms des lauréats des divers concours (doctorat et licence). Les données fournies complètent les renseignements provenant du registre des assemblées et conseils quant aux effectifs, à l’enseignement et à la situation des personnels. Les rapports s’attachent aussi à recenser le nombre d’étudiants en cours d’études (ayant une inscription non périmée), le nombre des étudiants immatriculés (ceux ayant fait acte de scolarité dans l’année), le nombre des étudiants ayant pris quatre inscriptions dans l’année, le nombre des étudiants ayant subi au moins un examen dans l’année et le chiffre total des diplômes délivrés). Le rapport présenté par le doyen Hauriou traduit également les préoccupations relatives à la réussite des étudiants dans la période d’avant-guerre. L’attention est ainsi attirée sur leur niveau général et sur les taux d’échec. Ce ne sont pas là choses nouvelles. Ses prédécesseurs médiévaux et de l’époque moderne ont aussi formulé de telles remarques ; bien d’autres viendront après lui. Hauriou se montre tout particulièrement préoccupé par la situation des étudiants de première année51 car le nombre des ajournés est élevé. En cause, non seulement leur « inexpérience » mais aussi leur « légèreté » : « Quand ils arrivent chez nous, écrit-il dans son rapport de l’année 1907-1908, ils ne prennent pas suffisamment au sérieux nos études. Cependant ils devraient savoir qu’aujourd’hui tout ce qui est carrière ou préparation à une carrière est devenu sérieux : que la concurrence est partout singulièrement âpre, aussi bien au barreau, dans la magistrature, dans les fonctions publiques que dans l’industrie ou le commerce »52 ; et, à l’occasion de la distribution des prix de décembre 1911, de tancer cette insouciante jeunesse parfois plus motivée par ses « fêtes corporatives » que préoccupée par son avenir53.
2 - Rendre compte
20Pour le conseil de l’Université, le doyen Hauriou indique au début de son rapport pour l’année 1915-1916 que « en face d’une guerre qui a fini par créer un état durable, [l’Université] a dû s’adapter à cet état dans l’aménagement de ses locaux, dans la distribution de son enseignement, dans l’établissement de son budget »54. Elle est durement touchée dans ses effectifs, la Faculté de droit n’échappant évidemment pas au sort commun. La chute du nombre des étudiants a eu des conséquences sur les cours dispensés ce qui retentit particulièrement sur le produit des conférences facultatives.
Effectifs
21La Faculté de droit accueille, après une période de stabilité dans les années 1890, de plus en plus d’étudiants dans les premières années du XXe siècle. Les inscriptions atteignent un maximum en 1906. Elles s’élèvent alors à 1750. On observe ensuite une décrue que la guerre accentuera grandement.
22La diminution des effectifs étudiants suscite l’inquiétude du doyen Hauriou55 à compter de 1909. Il avance diverses explications : sur le plan national, concurrence de Paris qui bénéfice d’une forte attractivité56 ; au niveau régional, création des Écoles supérieures de droit de Limoges et Clermont-Ferrand, donc dans l’aire traditionnelle de recrutement toulousaine. De ce point de vue, sa réaction est d’autant plus vive que la chute des effectifs provoquée par cette nouvelle concurrence57 se traduit par une réduction des revenus de la Faculté58. Cette alarmante évolution est-elle spécifiquement toulousaine ? Pour le savoir, Hauriou prend l’initiative de réaliser une enquête auprès des différentes Facultés de droit. Il en présente les résultats au conseil de l’Université en 1912. Ils sont éloquents : douze Facultés ont enregistré un recul des inscriptions, deux seulement une augmentation. Tant en valeur absolue qu’en pourcentage, ce sont les Facultés du Midi (Aix, Bordeaux, Montpellier et Toulouse) qui, entre 1910 et 1911, ont le plus souffert avec un reflux de 15 à 20 % du nombre des inscriptions, la Faculté de Poitiers, en France métropolitaine, voyant bondir ses effectifs (près de 11 %). Hauriou affine alors son analyse des raisons de ce marasme. Certaines sont communes à toutes les Facultés : décret du 12 mai 190959 mettant fin aux dispenses de baccalauréat que pouvait accorder le ministre de l’Instruction publique pour permettre à de bons éléments de l’enseignement primaire d’accéder directement aux études supérieures, mesure d’ailleurs décriée par la gauche60 ; interdiction prise par le ministère de la Guerre, de prendre des inscriptions dans les Facultés durant le service militaire dont les dispenses sont d’ailleurs supprimées. D’autres explications sont plus spécifiquement locales et conjoncturelles : crise viticole dans le Midi à compter de 190761, engendrant de graves conséquences économiques et sociales ; tendances des jeunes gens à se détourner des études juridiques au profit des emplois offerts dans l’industrie, susceptible de procurer des revenus plus attrayants. Mais c’est surtout la lutte contre les Écoles supérieures de droit de Limoges et de Clermont-Ferrand qui mobilise le doyen Hauriou62. À ses yeux, la concurrence est d’ailleurs d’autant moins tolérable que l’école de Limoges, instaurée à la fin de l’année 1909, affiche un corps enseignant contestable puisqu’essentiellement composé d’avocats. En 1914, elle sera pourtant érigée en Faculté libre de droit avant de redevenir École libre de droit au cours des années 1920, ces effectifs chutant alors, tandis que les liens avec la Faculté de droit de Poitiers à laquelle elle était rattachée seront rompus.
23À plusieurs reprises, le conseil municipal de Clermont-Ferrand se prononce en faveur de la création d’une École de droit, en 1866, 1870 et 1872. À l’automne 1896 et au printemps 1897, à l’initiative de l’avocat Eugène Tallon, le conseil général se saisit de la question. L’École est finalement installée dans les locaux du Palais de l’Académie par la municipalité de Clermont-Ferrand en 1913. L’École ouvre le 14 novembre 1913. Elle accueille 77 étudiants63. Charles Crochepierre a sans doute été son premier directeur. Saisie par une lettre de Crochepierre, datée du 3 octobre 1913, l’assemblée de la Faculté de droit de Toulouse refuse son patronage le 15 novembre et décide de nommer une commission, composée d’Hauriou, Houques-Fourcade64, Ebren et Magnol. Le 3 décembre, le conseil dénonce « la concurrence déloyale ». Les relations entre la Faculté de Dijon et l’École de Clermont sont rompues (décret du 8 juillet 1914)65.
24En 1913, on dénombre 1032 inscriptions en droit à Toulouse. L’année suivante 295 étudiants sont inscrits66. L’étiage est atteint en 1916 avec 175 inscriptions. C’est ensuite un lent et progressif retour au chiffre d’avant-guerre. Il faudra cependant attendre 1930 pour repasser le seuil des 1 000 inscriptions. Une stabilisation des effectifs s’observe ensuite au cours des années 1930 jusqu’à la très forte augmentation de 1940 due à la situation militaire et à l’afflux de réfugiés au début de la Seconde Guerre mondiale.
25La variation des inscriptions n’est pas influencée par le nombre d’étudiants étrangers67. Concernant les premiers, les effectifs restent dans l’ensemble stables avec une moyenne de 26 étudiants par an. C’est surtout en 1925 et 1935 que leur nombre est le plus important. De 1895 à 1906, ils sont généralement moins d’une dizaine, essentiellement des Bulgares68 et des Egyptiens69, puis à partir de 1907 le nombre s’accroît jusqu’en 1914. C’est là un mouvement global qui profite à l’ensemble des Facultés de Toulouse et que l’on retrouve ailleurs70. Avec 34 étudiants en 1913-1914, une plus grande diversité des origines géographiques se fait jour (Argentine, Brésil, Espagne), spécialement avec l’arrivée de Russes71. Puis en 1917-1918 et en 1918-1919, 25 et 41 étudiants serbes rejoignent Toulouse72. Ils représentent alors plus de 90 % des étudiants étrangers de la Faculté de droit (en excluant les 167 étudiants américains démobilisés en 1918-1919). La plus forte augmentation du contingent étranger intervient ensuite autour de 1930 avec l’arrivée d’étudiants chinois73 et, dans une moindre mesure, roumains74.
26Les étudiantes en droit sont aussi relativement peu nombreuses pendant le premier conflit mondial75 : six en 1912-1913 dont trois Françaises, sept en 1913-1914 dont quatre Françaises, trois en 1914- 1915 et quatre en 1915-1916. Elles représentent alors moins de 3 % de l’ensemble des effectifs de la Faculté de droit.
Enseignements
27En dépit de la mobilisation des enseignants, les cours sont maintenus. Le doyen Hauriou indique que la rentrée universitaire 1913-1914 « a pu s’opérer de façon normale et [que] tous les cours essentiels pourront être faits l’année qui vient »76. L’année suivante tous les enseignements, y compris les cours complémentaires, sont assurés alors même que l’Université et l’État ont supprimé ou réduit leur participation au financement de ces cours complémentaires77. Il en va de même en 1915-1916 car c’est « un impérieux devoir de faire fonctionner, avec régularité les services dont [la Faculté] a la charge, manifestant par son désintéressement et par un redoublement de zèle, son dévouement à la cause nationale »78. C’est là l’occasion, qu’Hauriou ne néglige pas, de relever la situation délicate dans laquelle se trouve l’établissement79.
28Les inscriptions aux conférences facultatives qui étaient en hausse avant la guerre connaissent une forte décrue : 85 en 1910-1911 puis 107 en 1912-191380 avant de chuter brutalement à partir de l’année 1914-1915. Durant le premier semestre 1918-1919, on n’en enregistre plus aucune. À Bordeaux, elles sont supprimées de 1917 à 191981. Avec la paix retrouvée, les conférences sont alors davantage suivies et retrouvent leur importance d’avant-guerre en 1923-1924 avec quelques 104 inscriptions au premier semestre. Chaque semestre, des dispenses sont accordées aux fils de professeurs, aux lauréats de concours ou d’autres étudiants en ayant fait la demande.
29Les conférences sont proposées chaque année des études de licence ainsi qu’en doctorat à raison de deux pour le domaine juridique et deux pour le domaine politique. Le prix de chacune d’elle est de 50 francs, restant inchangé au cours de la guerre. Elles sont assurées par sept directeurs de conférences (par exemple pour le second semestre de l’année 1915-1916 : Mestre, Fliniaux, Cézar-Bru, Declareuil, Thomas, Hauriou et Polier). Pour le doyen Hauriou, ces conférences sont fondamentales. Il en rappelle le caractère et les finalités dans le discours qu’il prononce à l’occasion de la distribution des prix aux lauréats du concours de l’année 1912-191382 :
30« Messieurs, Nous attachons beaucoup d’importance à ce que la Faculté de Droit ne soit pas un bâtiment banal, une sorte de pas perdus comme le Palais de Justice ; nous désirons qu’elle soit une maison aussi bien pour les étudiants que pour les professeurs et que les uns et les autres, y retrouvant quelques-uns des attraits de chez soi, soient amenés à y demeurer une partie de la journée.
31« Pour les auditoires des amphithéâtres, qui ne font que passer, nous ne pouvions qu’aménager des locaux propres et confortables ; mais pour les membres de conférences, nous avons cherché à créer des domiciles. Nous avons pensé qu’en même temps qu’il s’y ferait un meilleur travail, il s’y établirait une plus grande solidarité dans les promotions des meilleurs élèves de chaque année… ».
32L’assemblée de la Faculté se saisit aussi de la question au cours de sa séance du 12 janvier 191883. Elle formule ainsi différents vœux ayant pour but de faire évoluer et de pérenniser les conférences, leur intérêt pédagogique paraissant essentiel dans la formation pratique des juristes. L’assemblée propose donc une réforme d’envergure avec des personnels, des locaux et des ressources tant scientifiques que financières spécifiques.
33Pendant la guerre, la cérémonie solennelle de distribution des prix est également interrompue. La dernière se tient le 3 décembre 1913 et permet au doyen de rendre hommage à Maurice Garrigou84. Au cours de la séance de l’assemblée du 25 novembre 1914, il est décidé, en raison des « circonstances tragiques », de supprimer cette cérémonie85. De même, par une circulaire du 15 mars 1915, le ministre annule les concours organisés par les Facultés entre les étudiants86. Les examens sont aménagés87. Une session extraordinaire est organisée sur décision ministérielle entre mi-novembre et mi-décembre pour les étudiants de la classe 191088. L’assemblée de la Faculté délibère le 18 mai 1916, sur proposition d’Hauriou, d’avancer les examens de licence pour les candidats exemptés ou ajournés des classes 1913 à 1917 car, ceux qui parmi eux seront incorporés, partiront vers la mi-juillet89. Elle se préoccupe aussi en mai 1918 de la situation des étudiants mobilisés et de l’organisation de jurys d’examen90. En janvier 1918, l’assemblée adopte comme projet de délibération, en lien avec une circulaire ministérielle du 27 novembre 1917, que des « mesures réparatrices en faveur des étudiants dont la guerre a interrompu les études et retardé l’avenir »91. Il est décidé que les étudiants subissent « leurs examens successifs à la suite », les horaires soient aménagés pour favoriser l’assistance aux cours et un allégement des programmes pour les examens de licence92. À l’initiative de Magnol, on décide, début 1919, de porter à la connaissance des jurys les citations attribuées aux étudiants au cours de la guerre93. Enfin, en lien avec un décret et une instruction ministérielle du 10 janvier 1919, est prévu que les étudiants des classes 1917 et antérieures puissent bénéficier d’un examen portant sur un « programme simplifié » organisé après quatre mois de scolarité afin de « faire deux années d’études en une »94.
Finances
34Le cadre financier et comptable est fixé par le décret portant règlement d’administration publique sur le régime financier et la comptabilité des Facultés du 22 juillet 189795 puis par le décret du 21 juillet 1917. On distingue entre budget ordinaire et budget extraordinaire. Seul le premier est présenté devant le conseil dans la première quinzaine de novembre, un avis étant donné en mai sur les comptes de l’ordonnateur – le doyen – et du comptable. La chronologie budgétaire du budget primitif au compte d’administration peut ainsi être retracée à partir du registre des assemblées et conseils de la Faculté96.
35Concernant les recettes (pour le budget primitif), leur montant total diminue de moitié passant de 16 000 à 8 000 francs entre 1914 et 1919. Seules les subventions de l’État restent relativement stables passant de 6 160 francs à 5 860 francs, mais leur part relative augmente fortement de 38,3 % à 72,6 % du budget de la Faculté. Une deuxième catégorie de ressources augmente à partir de 1916 (de 140 à 1 109 francs) ; il s’agit des revenus des biens meubles et des intérêts des fonds placés au Trésor, conséquence de la donation Garrigou97. Celle-ci intervient le 27 juin 1913 pour servir à un « fonds d’acquisition, d’abonnement et de reliure pour des journaux, revues et écrits périodiques » qui doivent être déposés dans une salle spéciale. Il faut ajouter le Prix Rozès, avoué à Toulouse, qui a donné le 18 janvier 1911 un titre de cent francs de rente pour la fondation d’un prix de procédure civile à décerner tous les ans après l’organisation d’un concours. Enfin, une somme annuelle de cent francs est mise à disposition de la Faculté par la famille du doyen Deloume pour « venir en aide à un étudiant de 3e année méritant et nécessiteux ». Pour le doyen Hauriou, il s’agit là d’« un commencement sérieux de patrimoine corporatif »98. Deux autres revenus, en revanche, connaissent une forte diminution : d’une part, l’allocation de l’Université pour l’acquisition de collections et le financement de travaux pratiques qui passe de 800 à 100 francs ; d’autre part, les produits des conférences facultatives qui connaissent une très forte diminution passant de 9 000 à 1 000 francs (de 56 % du budget de 1914 à 12 % dans le budget de 1919).
36Quant aux dépenses, nombre d’articles restent stables, liés à l’activité quotidienne de la Faculté (tenue des appariteurs, entretien du mobilier et des bâtiments, frais matériels d’examen, impressions et frais de bureau). D’autres connaissent une diminution résultant de la suppression de ressources (frais de travaux pratiques, acquisition de prix et médailles) mais aussi et surtout de la chute des inscriptions aux conférences facultatives dont le montant passe de 8 820 francs en 1914 à 980 francs en 1919. Enfin, certaines dépenses augmentent, soit en raison de nouvelles ressources (revenus, dons et legs), soit en raison des circonstances (éclairage et chauffage) liées aux hivers rigoureux de 1917 et 1918.
37Dans un contexte général de déstabilisation du système de gestion des finances publiques et de crise financière dès l’été 191499, la « mise en guerre » de la Faculté de droit nécessite une adaptation financière qui s’ajoute à l’engagement des étudiants et des enseignants à Toulouse et sur le terrain des opérations militaires.
3 - Se souvenir
38La Faculté se préoccupe de la conservation du souvenir de ses étudiants morts au combat. Un Livre d’or est rédigé qui dresse la liste « glorieuse et funèbre » des disparus.
Livre d’or de la Faculté
39Divers Livres d’or ont été rédigés à l’occasion de la Première Guerre mondiale. Une mise en mémoire est organisée au début du conflit. Dès le 18 septembre 1914, une circulaire du ministre de l’Instruction publique, Albert Saraut, organise la conservation du souvenir des évènements. Elle est due à l’initiative de Charles Petit-Dutaillis100 et recommande aux instituteurs non mobilisés de « tenir note de tous les événements auxquels ils assistent », de constituer ainsi un « admirable répertoire d’histoire locale »101. À la fin du conflit, la loi du 25 octobre 1919 « relative à la commémoration et à la glorification des morts pour la France au cours de la Grande guerre » prévoit l’établissement d’un Livre d’or qui devra contenir les noms des enfants de chaque commune y ayant pris part. Mais, pour des raisons financières, les 120 volumes initialement prévus ne seront finalement pas édités ; seuls subsistent les documents préparatoires102.
40S’agissant de la Faculté de droit de Toulouse, le Livre d’or est évoqué par Hauriou devant les étudiants le 13 novembre 1918103. Puis au cours de la séance du 2 décembre 1918, le doyen « fait connaître à ses collègues que les dossiers relatifs à l’établissement du Livre d’or sont à peu près réunis et notamment ceux des étudiants de la Faculté de Droit qui sont morts pour la France. La Faculté estime que le moment est venu de s’occuper de cette publication et charge une commission composée de MM. Houques-Fourcade, Magnol et Dugarçon de s’occuper de cette question »104.
41Un courrier est adressé par le doyen aux familles105, un questionnaire est joint106 pour permettre la rédaction d’une notice et une photographie de l’étudiant est demandée. Pas moins de 15 rubriques peuvent être renseignées : « nom ; prénom ; date et lieu de naissance ; situation civile au jour de la mobilisation ; régiment (ou formation) auquel il appartenait ; grade militaire au jour de la mobilisation ; promotions de grade obtenues et dates des promotions ; grade militaire au jour de la mort ou de la blessure ou de la décoration ou de la citation ; combats auxquels il a pris part ; lieu où il est tombé ou a été blessé ; blessures reçues ; citations obtenues (reproduire au verso le texte exact de la citation) ; décorations décernées ; œuvres qu’il a publiées avant ou pendant la guerre ; indication des notices qui ont été écrites sur lui ou sur ses œuvres ». Les réponses émanent le plus souvent du père ou de la mère, d’autres proviennent par exemple d’un oncle107 ou du maire108. Aux photos des jeunes gens en tenue militaire, en costume ou en toge s’ajoutent les lettres de parents adressées au doyen Hauriou. Ils font parfois parvenir l’extrait d’un article de journal à la mémoire de leur enfant disparu109 ou bien l’imprimé qu’un père a rédigé pour célèbrer la « culture intellectuelle » de son fils défunt110. Les renseignements collectés jusqu’au début de l’année 1924 ont permis la rédaction d’une première version de notices individuelles. Certaines sont alors complétées ou raturées111. Elles sont ensuite mises au propre dans le registre qui nous est parvenu. Les données recueillies ne sont pas toutes reprises. Les dossiers de Charles Alric112 ou de Claude, Antoine Chaux113 renferment nombre de données biographiques et notes de route. Le conseil du 7 mai 1924 vote des crédits supplémentaires pour l’impression du Livre d’or114.
42Il égraine 229 noms dont certains n’apparaissent pas sur le monument situé dans le vestibule de la Faculté. Ce document se présente, sans texte introductif, sous forme d’une liste alphabétique des étudiants morts pour la France115. Diverses indications sont portées pour chacun d’eux : état civil, scolarité, grade, parfois la profession, date et lieu du décès, décorations et citations s’il y a lieu.
43La liste des étudiants et anciens de la Faculté morts au combat, des suites de leurs blessures ou de maladie contractée en service, est dressée année après année116. Les rapports du conseil de l’Université font état des pertes, mesurent, de la Mer du Nord aux Dardanelles, l’étendue du conflit, distinguent plus particulièrement certains d’entre ses héros : « Ils sont tombés un peu partout, depuis la Belgique jusqu’à Gallipoli, en Artois comme en Champagne, mais en Champagne surtout, où le 17e corps a si longtemps tenu le front. Il y a des noms qui reviennent souvent : Perthes-les-Hurlus, Massiges, le bois Sabot. Et puis, tout à fait à la fin, le nom immortel de Verdun, et le dernier tombé là, à la reprise du fort de Douaumont, dans ce magnifique assaut, était un de nos meilleurs étudiants en doctorat, le lieutenant Alric »117. Manifestation de reconnaissance des professeurs pour ceux qui se sont sacrifiés, le 18 décembre 1917, on décerne le doctorat en droit à Ludovic Valatx, docteur en médecine mobilisé en tant qu’aide major de 1ere classe, après soutenance posthume de la thèse qu’il est parvenu à achever avant de mourir à Arcachon le 17 août 1916, à l’âge de 36 ans, des suites d’une maladie contractée au front118. À la fin des hostilités, un monument commémoratif est érigé dans le vestibule de la Faculté119 ; il ne compte pas moins de 224 noms120. Un second monument, de facture comparable, aujourd’hui situé dans l’escalier de l’Institut d’administration des entreprises de Toulouse, est dédié « À la mémoire des élèves de l’Institut technique de droit mort pour la France ». Il énumère 57 noms et fait parfois double emploi avec la liste consacrée aux étudiants de la Faculté de droit.
Disparitions
44« Nous entrons en agonie, nous attendons l’heure H, qu’on nous mette en croix, abandonnés de Dieu, condamnés par les hommes121 ».
Qui étaient-ils ?122
45Rien ne semblait les prédestiner à un sort si terrible. Parmi ceux qui, ayant achevé leurs études, sont entrés dans la vie active, les plus paisibles ou les moins aventureux sont avocat, profession largement la plus représentée123, juge, substitut de procureur, huissier, notaire ou clerc de notaire, agent d’assurances, employé de banque, contrôleur des contributions directes ou des douanes ; l’un d’eux est « négociant en toile », un docteur en droit est chef de gare à la « Compagnie des tramways électriques du Loir-et-Cher ». Aux côtés d’assez nombreux « surnuméraires de l’Enregistrement », marque de l’attrait pour la fonction publique, un père jésuite ; l’un est déjà docteur en médecine, l’autre ingénieur agronome, un plus jeune poursuit parallèlement des études de pharmacie ; un conseiller de préfecture à Agen côtoie un « chef de comptabilité à la Banque nationale de crédit de Carcassonne ». L’irruption des classes moyennes, voire populaires est désormais assez nette ; « faire son droit » n’est plus l’apanage de l’élite sociale traditionnelle qui, autrefois, ne recherchait souvent dans un titre universitaire qu’un surcroît de prestige124, même si sa présence est toujours attestée par des patronymes à consonance aristocratique. Beaucoup vivent en province, point trop loin de leur « petit pays » s’ils le peuvent125. Le Castrais René Grach, chef de cabinet du sous-secrétaire d’État à la Guerre, paraît une exception, de même que le Ruthénois Louis Virenque, sous-préfet de Saint-Nazaire ou, plus modestement, l’Albigeois Étienne Pujol, « rédacteur au ministère de la Justice ». Moins nombreux apparaissent ceux qui, attirés par des horizons plus lointains, ont trouvé leur place outre-mer, dans l’administration coloniale, tels le Toulousain Félix Guénot, chef de cabinet du gouverneur général de Madagascar ou le Murétain Raymond Leygue, « commis des services civils de l’Afrique équatoriale française », ou encore le Toulousain Louis Dubos, « attaché aux Domaines de l’État égyptien, au Caire ». Né à Mostaganem, Henri Nanta s’empresse de retrouver sa terre natale sitôt sa licence en poche ; il est avocat près la cour d’appel d’Alger. Pierre Schenck, né à Tunis, a trouvé à s’employer au « Crédit foncier et Agricole d’Algérie et de Tunisie, à Alger ». Inversement, Pierre Loustau, lui aussi né à Mostaganem, s’est enraciné à Dax où il est avocat. Parmi les victimes, on trouve aussi quatre Martiniquais126. Les plus jeunes ont à peine commencé à fréquenter les bancs des amphithéâtres de première année depuis quelques mois qu’ils les abandonnent, enthousiastes, devançant l’appel sous les drapeaux : ainsi, le sous-lieutenant Prosper Faduilhe et le caporal Gaëtan Sainctavit, tous deux engagés volontaires à 18 ans, ce qui leur permet de surcroît de choisir l’arme dans laquelle ils serviront. Leur aîné, André Gabaude, ne leur cède en rien dans l’élan patriotique. « Dispensé du service militaire », cet avocat âgé de 36 ans « aurait pu facilement passer inaperçu ». Il demande pourtant son incorporation : « J’ai songé, écrit-il simplement, à laisser la robe pour le flingot »127 ; caporal au 14e régiment d’infanterie, il meurt courageusement, le 16 février 1915, à Perthes-lès-Hurlus. Avec eux, le Livre d’or de la Faculté recense 12 autres engagés volontaires. Quant à ceux que le devoir appelle, ils ne rechignent pas, même si l’on ne peut être tout à fait certain qu’ils soient unanimement partis en chantant. Abel Muratet, 27 ans, n’a ainsi guère le temps de savourer son titre de docteur en droit, obtenu le 20 juillet 1914 ; il doit bientôt revêtir son uniforme de sous-lieutenant au 238e d’infanterie pour aller mourir, le 23 octobre, dans l’Aisne, à Goufrécourt ; deux mois, jour pour jour, sont accordés à Joseph Jouard, 26 ans, entre le 18 juillet 1914, moment où lui est décerné le diplôme de licence et celui où, le 18 septembre, il trouve la mort à Minaucourt, lors de la première bataille de la Marne, sous l’uniforme de lieutenant au 18e d’artillerie de campagne. Lorsqu’il est tué au feu à la première bataille de la Marne, le 7 septembre 1914, le capitaine Émile Baron, chevalier de la légion d’honneur et croix de guerre, vétéran des anciens de la Faculté, est âgé de 46 ans ; sur le tableau de ceux qui sont « morts pour la France », il voisine avec les benjamins parmi les victimes, presque des enfants : Gaëtan Sainctavit, tué à 19 ans dans la Marne, au Bois-Sabot, le 8 mars 1915, médaille militaire128 à titre posthume ; Prosper Faduilhe, croix de guerre avec palmes et étoiles d’or et d’argent129, mort à 20 ans devant le fort de Vaux, le 5 juillet 1916, chevalier de la légion d’honneur à titre posthume.
46Bien d’autres de leurs condisciples s’illustreront d’ailleurs avec un courage à toute épreuve. Parmi eux, Henri Malric, l’un des plus brillants à être passé par la Faculté qui ne manque pas d’énumérer ses titres à la reconnaissance de l’institution où il a été formé. Lauréat de la Faculté trois fois de suite, licencié à 22 ans, lauréat du concours général des Facultés de droit à 23 ans, docteur en droit à 26 ans, il se fait également remarquer au barreau, obtenant la médaille d’or du stage en 1907130. Sous-lieutenant au 283e régiment d’infanterie, il est grièvement blessé en Lorraine en septembre 1914. Croix de guerre avec étoile et palmes, il ne peut rejoindre son régiment qu’en juillet 1917 après une longue convalescence, est tué le 23 octobre suivant au chemin des Dames après être « sorti crânement » de sa tranchée sous « le feu d’écrasement de l’adversaire » et avoir « entrainé sa section à l’assaut des positions ennemies ». Cité à l’ordre de l’armée, chevalier de la légion d’honneur à titre posthume, il avait 34 ans. Le caporal Louis Deloume, 22 ans, avocat dans la vie civile, est fils d’un avoué auprès de la Cour d’appel et petit-fils du doyen de la Faculté de droit Antonin Deloume, décédé en 1911 ; « à peine arrivé sur le front » il est informé, « le 24 septembre 1914, que sa compagnie est désignée pour une attaque prochaine ». Il écrit à sa famille : « Nous sommes prêts à marcher, je suis décidé à faire mon devoir jusqu’au bout. J’ai fait tous les sacrifices, faites-les comme moi, d’un cœur et d’une âme de vrais Français. Quand ma lettre vous parviendra, tout sera peut-être fini pour moi. Je viens de me recommander à Dieu, je suis tranquille. Priez pour la France, priez pour nous ». Une semaine plus tard, ayant « atteint la tranchée ennemie, débordé et enveloppé par une contre-attaque, il refuse de se rendre et lutte jusqu’à la mort »131 ; cinq jours auparavant, à quelques centaines de mètres en avant du régiment de Louis, son cousin, l’aspirant Joseph Deloume, a été tué à la tête de sa section132. Une autre émouvante figure est Gilbert de Gironde, licencié en droit à 22 ans, entré dans l’ordre des Jésuites. Sur le front, il connaît une très rapide promotion : simple soldat réserviste lors de son arrivée au 81e régiment d’infanterie, il est caporal le 8 septembre 1914, décoré de la médaille militaire le 30, promu sergent le 16 octobre, sous-lieutenant le 26 novembre. « Toujours volontaire pour remplir les missions délicates et périlleuses », sachant « par son audace en rapporter des renseignements précis sur l’ennemi », il est surtout « pour ses camarades l’ami qui conseille, soutient et réconforte ». Croix de guerre avec palmes, il est tué près d’Ypres le 7 décembre suivant « dans une tranchée […] au moment où il allait prier sur le corps de deux hommes de sa compagnie » ; titulaire de trois citations dont l’une à l’ordre de l’armée, il avait 33 ans.
Les premiers, les derniers
47Les sept premiers morts issus de la Faculté de droit sont tués le même jour (22 août 1914) :
48- en Lorraine : Paul Arrès et Paul Géry, tous deux du 96e régiment d’infanterie (secteur de Lunéville), Gabriel Sabouroux (à Fillières, Meurthe-et-Moselle), Axel Loze (blessé et porté disparu à Sénon en Woëvre, décoré à titre posthume).
49- en Belgique : Alexandre Gabay133 (à Aloy, près de Charleroi), Jacques Fargues (à Bertrix)134. Ajoutons-y Henri Gaudou, blessé et fait prisonnier à Bertrix135, qui meurt des suites de ses blessures en Allemagne.
50- en Afrique équatoriale française : Raymond Leygue (attaque du poste allemand du Mont Biron).
51Les cinq derniers morts sont Eugène Picot, 26 ans, lieutenant au 44e bataillon de tirailleurs sénégalais, tué le 14 septembre 1918 à Courlandon (Marne)136 ; Marcel Lacabane, 24 ans, maréchal des logis au 13e chasseurs à cheval, mort le 4 octobre 1918 à Monastir (Macédoine) après avoir été blessé non loin de Salonique ; Charles Latour, 22 ans, sous-lieutenant au 356e d’infanterie, tué le 10 octobre 1918 à Bussy-le-Château (Marne) ; Jean Gély, 22 ans, aspirant au 11e régiment de tirailleurs algériens, 22 ans, tué le 17 octobre 1918 à Achery (Aisne) ; Louis Buscon, 21 ans, sous-lieutenant au 11e d’infanterie, tué le 18 octobre 1918 au cours de combats acharnés dans le village de Mont-d’Origny (Aisne).
Secteur de Perthes-lès-Hurlus, février-mars 1915 : les juristes toulousains décimés
52À la suite de la bataille de la Marne (6-9 septembre 1914) durant laquelle les armées françaises, en retraite depuis le 24 août, arrêtent les troupes allemandes qui reculent sur l’Aisne, l’échec de la « course à la mer » (14 septembre-17 novembre 1914) au cours de laquelle les forces en présence tentent mutuellement et sans succès de se déborder par le flanc, le front se stabilise ; partout on s’enterre, les tranchées s’étendent des rives de la Mer du Nord à la frontière entre la France et la Suisse. Après près six mois seulement de guerre, les pertes humaines sont énormes et, alors que la première bataille de Champagne dure depuis le 14 décembre 1914, les forces françaises, concentrant leur effort offensif sur un front d’à peine huit kilomètres environ, cherchent, du 3 février au 17 mars 1915, à provoquer une rupture totale des lignes ennemies. En ces lieux, certains noms résonnent de manière sinistre, évoquant les mines éventrant le sol en de gigantesques cratères, le hurlement incessant des obus, le grondement assourdissant des explosions, les hécatombes sans cesse renouvelées, par rangs entiers, d’hommes fauchés dans le no man’s land par les tirs des mitrailleuses, le froid puis la boue du dégel engloutissant tout. Ainsi en est-il, parmi tant d’autres effroyables exemples, de Perthes-lès-Hurlus, dans le nord-est du département de la Marne. Le nom, ne serait-ce que lui, est glaçant. « Hurlus, Hus lupis, hurle loup », affirment certains, peu regardants sur l’étymologie137. Durant les combats acharnés qui se déroulent là, ceux de la Faculté de droit de Toulouse, anciens ou fraîchement diplômés, n’ayant qu’à peine entamé leurs études pour d’autres, y versent un lourd tribut. A la « butte du Mesnil les Hurlus », Joseph Chal, adjudant au 280e régiment d’infanterie, 24 ans, avait été tué dès le 15 septembre 1914 puis, le 18, Joseph Jouard, 29 ans, lieutenant au 18e régiment d’artillerie de campagne. Louis Salgues, docteur en droit, 31 ans, capitaine de réserve au 207e d’infanterie est également tué le 20 décembre 1914 et, deux jours après lui, Adolphe Sieurac, 25 ans138. Mais rien de comparable à l’année 1915. Le 12 février, Jean Colombié, soldat au 11e d’infanterie, y est si grièvement blessé qu’il meurt une semaine plus tard à l’hôpital de Châlons ; « surnuméraire de l’Enregistrement », il avait 23 ans. Le 14 février, c’est au tour d’Ernest Denille, aspirant au 14e d’infanterie, d’être mortellement blessé « à la Cote 200, près de Perthes-les-Hurlus » en « s’avançant seul jusqu’à vingt mètres de l’ennemi pour reconnaître, avant d’y lancer sa section, une excavation produite par une explosion de mine » ; engagé volontaire dès l’obtention de la licence en droit, il avait fêté son vingt-et-unième anniversaire la veille. Le 16 février, Raoul Fabre, sergent au 88e d’infanterie subit le même sort « en arrivant à la tranchée ennemie » ; titulaire de la licence en droit, avocat près la Cour d’appel de Toulouse, il avait 25 ans. Le même jour, le caporal André Gabaude est le second juriste tué que dénombre le 14e d’infanterie ; docteur en droit, lui aussi avocat à la Cour d’appel de Toulouse, engagé volontaire, il avait 36 ans. Toujours le 16 février, un autre docteur en droit, l’adjudant au 20e d’infanterie Pierre Latour est porté « disparu à l’assaut de Perthes-les-Hurlus ». Son corps ne sera pas retrouvé ; dans le civil, « surnuméraire de l’Enregistrement », il avait 31 ans. À la « Cote 200, près de Perthes », autre « exemple de courage et de calme dans les circonstances les plus difficiles », le caporal mitrailleur au 59e d’infanterie Jean Saboulard est mortellement blessé le 17 février en « se portant à l’attaque d’une tranchée » ; licencié en droit, il avait 25 ans. Le 5 mars, c’est Édouard Mèche, sergent-major au 7e d’infanterie, qui trouve la mort ; « surnuméraire de l’Enregistrement », il avait 27 ans. Le même jour, Roger Lebbé, aspirant au 9e d’infanterie qui, tout comme le 14e et le 20e, perd avec lui son second juriste, est fauché à la tête de sa section qui charge à la baïonnette contre les tranchées allemandes, « dans une zone battue par un feu violent » ; il avait 22 ans. Le 9 mars, meurt Paul Laville, sergent-major au 9e d’infanterie ; il avait 25 ans. Le 12 mars, « au ravin de la Goutte près de Perthes-les-Hurlus », un troisième juriste du 20e, le lieutenant Édouard Ducret, après avoir, avec la compagnie qu’il commande, enlevé une tranchée et fait de nombreux prisonniers, est tué lors d’une contre-attaque ; licencié en droit, chef de cabinet du préfet de la Nièvre, il avait 25 ans. Le 16 mars, au « Mesnil-Les-Hurlus », Paul Camboué139, lieutenant de réserve au 2e régiment mixte de zouaves et de tirailleurs algériens, « tombe glorieusement en entraînant ses hommes dans une attaque à la baïonnette » ; licencié en droit, inspecteur régional d’assurances, il avait 31 ans. Le 20 mars, le sergent au 59e d’infanterie Jean Granier140, encore un avocat près la Cour d’appel de Toulouse, d’une « brillante conduite au feu », meurt dans son poste d’observation ; il avait 26 ans. Le 24 mars, Marcel Bousquet-Pontié, caporal au 207e d’infanterie, « blessé grièvement à son poste de combat », meurt sur place des suites de ses blessures. Après Louis Salgues en 1914, c’est le second docteur en droit que perd le 207e ; avocat, Bousquet-Pontié avait 38 ans.
53Au cours des assauts répétés contre la position de la « ferme de Beauséjour » dominée par un camp retranché aménagé par les Allemands en 1914141, pris et repris sept fois entre la mi-février et la mi-mars 1915, la Faculté dénombre trois tués dans les rangs du 122e régiment d’infanterie : le 17 mars le sous-lieutenant Ferdinand Moly, 27 ans et l’adjudant Fernand Mignonac, 23 ans ; le 24 mars, le caporal Jean Cathala, 26 ans.
54Dans le même secteur, au Bois Sabot, le 143e régiment d’infanterie perd, le 9 mars, l’aspirant « superbe de courage » Louis Montussé du Lyon142, 22 ans, le sous-lieutenant Achille Vassal, plein de « bravoure et qualités remarquables », 22 ans, et le soldat de 2e classe Henri Certain, 24 ans. Le « très brave et très dévoué » caporal au 15e d’infanterie, Gaëtan Sainctavit, engagé volontaire, avait subi le même sort l’avant-veille ; son cursus universitaire se limitait encore à la première année de droit car il n’avait que 19 ans. Le 10 mars, jour où le capitaine au 33e régiment d’infanterie Charles de Gaulle, 25 ans, est blessé à Perthes-lès-Hurlus, le 143e perd encore André Capelle, 21 ans, caporal-fourrier « toujours volontaire pour les missions les plus dangereuses ». Le 13 mars, l’aspirant au 15e régiment d’infanterie Louis Vigneau, 22 ans, grièvement blessé par des « éclats à la tête, au bras et cinq ou six dans la poitrine » en réchappe de peu ; il sera tué à Verdun, devant le fort de Vaux, le 24 février 1916. Blessé le même jour, Pierre Birabent143, caporal au 8e régiment d’infanterie, 23 ans, survit aussi. Il n’est qu’en sursis ; la mort l’attend au chemin des Dames, le 11 avril 1917. Toujous à Perthes-lès-Hurlus, Auguste Pous, soldat au 53e d’infanterie, est tué le 19 avril 1915 ; il avait 25 ans.
55Après l’échec sanglant de ce coup de boutoir, de lourdes pertes sont encore enregistrées dans cette zone, surtout lors de la grande offensive de Champagne qui débute le 25 septembre 1915.
56Le 15 août, Bernard Polère, soldat au 22e régiment d’infanterie coloniale, grièvement blessé mourra le 29 septembre suivant à l’hôpital militaire de Poitiers (34 ans).
57Le 2 septembre, Jean Delrieu, aspirant au 24e régiment d’infanterie coloniale (20 ans).
58Le 26 septembre, Fernand Arabet, juge suppléant au tribunal civil de Rouen, caporal au 416e régiment d’infanterie, tué le lendemain de son anniversaire (28 ans).
59Le 27 septembre 1915, Charles Latour, sous-lieutenant au 356e régiment d’infanterie, 21 ans, blessé à Perthes, sera tué le 10 octobre 1918 à quelques kilomètres de là, à Bussy-le-Château, près de Suippe.
60Le 28 septembre, Roger Delteil, sergent au 122e régiment d’infanterie (24 ans).
61Le 30 septembre, Louis Deloume, caporal (22 ans) et Charles Brocard (22 ans), tous deux du 80e régiment d’infanterie.
62Le 6 octobre, Jean Rascol, licencié en droit, clerc de notaire et avocat stagiaire, aspirant au 80e régiment d’infanterie (24 ans) ; Louis Dubos, sergent fourrier au 80e régiment d’infanterie (27 ans) ; Raoul Ruffel144, aspirant au 80e régiment d’infanterie (20 ans) ; Henri Fusié, caporal-fourrier au 81e régiment d’infanterie (22 ans) ; Henri Roques, docteur en droit, négociant en toiles, sergent au 96e régiment d’infanterie, engagé volontaire (32 ans).
63Le 8 octobre, Augustin Saury, sergent au 69e bataillon de chasseurs à pied, porté disparu à la « Butte de Souain » (23 ans).
64Le 8 décembre, Louis Coucoureux, caporal au 122e régiment d’infanterie (34 ans).
65Le 10 janvier 1916, Joseph Leygonie, sous-lieutenant au 412e régiment d’infanterie (32 ans).
66Le 15 novembre 1916, Paul Amouroux, canonier téléphoniste au 27e régiment d’artillerie (21 ans).
Mourir loin du pays
67Ils sont nés à Paulhan (Hérault), Argens (Aude), Brassac (Tarn), Mirande (Gers), Rodez (Aveyron), Cambes (Lot) ; l’un d’entre eux, né à Tunis, vivait à Alger. Ils sont allés mourir dans les rangs de l’armée d’Orient ; le sergent Georges Causon, le 20 mai 1915 à Séddul-Bahr, « presqu’île de Galippolli » (Turquie), tout comme, le 3 juin suivant, le sous-lieutenant tunisois Pierre Schenck ; Jules Lauriol à Salonique (Grèce), le 7 octobre 1916145 ; le maréchal des logis Georges Carayon, à l’ambulance de Gumendzé (Serbie) le 10 juillet 1917 après que, le 27 juin, il ait été « blessé et brûlé mortellement à Ljumica » par des tirs d’artillerie bulgares prenant sa pièce pour cible, « sur le front du Vardar » ; le sous-lieutenant Maurice Tamalet « à l’attaque de la Cote 11248 , au nord de Monastir » (Macédoine), le 16 mars 1917 ; le maréchal des logis Marcel Lacabane, le 4 octobre 1918, également à Monastir, le 4 octobre 1918 ; l’intendant militaire Pierre Aubry, à Odessa en 1919, peut-être de maladie.
Certains ne survivent que peu de temps au retour de la paix
68Adrien Prévost de Saint-Cyr amputé le 5 novembre 1918, mort des suites de ses blessures le 15 novembre ; Jules Lasserre blessé le 28 septembre 1916, mort des suites de ses blessures le 18 novembre 1918, à l’hôpital de Rosendaël (Nord) ; Eugène Bordel, mort à l’hôpital militaire de Vassy (Calvados) le 28 janvier 1919 ; Raymond Duolé, mort à l’hôpital militaire n° 1 de Strasbourg le 25 février 1919 « des suites de maladie contractée en service » ; Eugène Chevalier du Fau, le plus récent mobilisé (20 ans, classe 1918), victime d’une attaque aux gaz, mort à l’hôpital militaire de Lille en avril 1919 ; Jules Araou, blessé en 1917 lors de l’offensive de la Somme, mort des suites de ses blessures le 28 mai 1919, à Béziers146 ; Jean Ducassou147, mort des suites de ses blessures à l’hôpital Saint-Pierre à Marseille le 3 mars 1920.
Les disparus
69Axel Loze, « blessé et disparu au combat de Senon en Woëvre » le 24 août 1914 ; René Glangeaud le 28 août 1914 (sans autre indication) ; Elie Sibra entre le 1er et le 15 novembre 1914 à Wyrschaëte, près d’Ypres ; Louis Dedieu au bois 40, nord de Wyrschaëte près d’Ypres le 30 novembre 1914 ; Pierre Latour à Perthes-lès-Hurlus, le 16 février 1915 ; Paul Gellis au bois des Caurières, dans la Meuse, le 14 septembre 1917 ; Henri d’Ysarn de Freyssinet de Valady à Saint-Amand près Ribécourt, Oise, le 11 juin 1918.
L’attrait pour les nouvelles armes : avions et chars de combat
70L’immense majorité de ceux qui sont tombés ont servi dans l’infanterie, réputée « reine des batailles ». Pourtant, Jean Herran148 a pu rapidement rejoindre une toute nouvelle élite, celle des aviateurs, échappant ainsi à la boue et au carnage des tranchées. Lieutenant au 2e régiment d’artillerie de campagne, blessé dans son avion d’observation à Vathiménil, il se distingue « par les vols les plus audacieux dans les circonstances les plus défavorables », meurt le 16 juin 1916 « au retour d’une de ses expéditions nocturnes ». Jules Araou149, maréchal des logis « attaché à une escadrille d’avions de combat », blessé lors de l’offensive de la Somme de 1917 « au cours d’une mission périlleuse sur les premières lignes ennemies, et qu’il avait sollicitée », mourra à Béziers le 28 mai 1919 des suites de ses blessures. Georges Fourcade, « sous-lieutenant aviateur », est abattu en juillet 1916. Fabien Tassot, docteur en droit, juge au tribunal civil de Tulle, servira en tant qu’« adjudant aviateur de patrouille maritime » avant d’être emporté par la grippe, peut-être « espagnole », le 4 août 1918, à l’hôpital de Marseille150.
71Le révolutionnaire char Renault FT-17151, machine légère dotée d’une tourelle pivotant à 360 degrés, plus rapide et véloce que ses prédécesseurs britanniques et français, joue un rôle décisif dans la victoire finale. Engagé pour la première fois le 31 mai 1918, durant la seconde bataille de la Marne, il est ensuite utilisé en masse de plus en plus nombreuses, supplantant armes et tactiques traditionnelles. Le 18 juin 1918 à Soissons, ce n’est peut-être cependant pas encore l’un d’eux que dirige Maurice Haon, tant son action évoque toujours les premières épopées solitaires des patauds chars Schneider et Saint-Chamond entrés en service depuis 1917. Sous-lieutenant au 38e groupe d’artillerie d’assaut152, adjoint au commandant du groupe, il demande « à prendre un char de combat [et le] conduit avec un entrain remarquable. Pénétrant à plus de quatre kilomètres dans les lignes ennemies »153, il est « tué à son poste de combat »154. Peu de place au doute, en revanche, concernant Adrien Prévost de Saint-Cyr. Issu d’une vieille famille d’épée, licencié en droit le 9 juillet 1918, ce lieutenant de 24 ans au 507e régiment d’artillerie d’assaut fait preuve d’une extrême bravoure155. Le 28 octobre, devant Guise, après que « son appareil » ait été « détruit et son mécanicien blessé »156, il continue de combattre à pied en avant de sa section, « malgré un feu violent » de mitrailleuses allemandes. « Fortement contusionné lors de la destruction de son deuxième char », il trouve cependant l’énergie de ramener sa section dans les lignes françaises. Son comportement lui vaut d’être fait chevalier de la légion d’honneur sur le champ de bataille, le 29 octobre. Grièvement blessé dès le lendemain 30 octobre, amputé le 5 novembre, il meurt le 15.
B – Engagement(s)
72La situation de guerre se manifeste de diverses manières au sein de la Faculté même si ses locaux ne sont pas réquisitionnés157 contrairement à ceux de Bordeaux158. Les examens sont aménagés, la cérémonie solennelle de distribution des prix est supprimée159, l’emprunt de la victoire est souscrit160. Qu’ils restent ou qu’ils partent au front, enseignants et étudiants de la Faculté de droit participent à l’effort de guerre.
1 – Mobiliser
73Les enseignants, bien qu’aucun d’eux n’ait été au front contrairement à d’autres juristes161, ont été mobilisés. Leur engagement se manifeste aussi par d’autres actions individuelles et collectives. Le rôle de la Faculté de droit est aussi exprimé de manière plus solennelle par son doyen à chaque rentrée universitaire, à l’occasion du discours qu’il prononce devant les étudiants.
Missions des enseignants
74La participation des enseignants des Facultés de droit à la Grande Guerre est connue162. Ainsi 109, en France, ont été mobilisés, soit environ 43 % des effectifs enseignants163. Sans obligation militaire, certains se sont engagés. Le plus âgé est Louis Fraissaingea, 54 ans, suivi de Joseph Magnol (38 ans, réformé pour « défaut de taille »164). Les pertes des autres membres mobilisés se situent à 16,6 %, chiffre comparable à la moyenne des pertes nationales165. La Faculté de droit de Toulouse ne déplore aucun tué parmi ses enseignants contrairement à la Faculté des sciences dont les premiers collègues morts sont évoqués devant le conseil de l’Université dans son rapport pour l’année 1915-1916166.
75Le rapport du conseil de l’Université fait état de 87 enseignants mobilisés à Toulouse dont 8 pour la Faculté de droit (55 en médecine et pharmacie, 20 en sciences et 4 en lettres) ainsi que de 31 personnes des bureaux et services auxiliaires167. Au début des hostilités, un état de leur situation est dressé : « Des professeurs ont été mobilisés, mais ils sont restés sur place et, grâce aux facilités données par l’autorité militaire, ils ont avec beaucoup de dévouement assuré leur service de la Faculté. Ce sont Mérignhac et Perreau, mobilisés dans l’Intendance militaire ; Fraissaingea, dans le service de santé ; Gheusi et Mestre, dans le service des Conseils de guerre ; Magnol au bureau militaire de la censure ; Fliniaux, dans le service auxiliaire des bureaux ; Polier a contracté l’engagement spécial de la loi Dalbiez168 pour contribuer au service du contrôle des télégrammes, auquel le doyen participe aussi au titre civil. Cézar-Bru est président de la commission des allocations de l’arrondissement de Villefranche. Thomas est interprète auprès des prisonniers allemands de la rue Caraman »169. Les rapports du conseil de l’Université permettent ensuite de suivre, avec les dossiers individuels des enseignants, les différentes affectations durant le temps de leur mobilisation. Ainsi Thomas est-il envoyé à Agen comme attaché de l’intendance de la XVIIe région militaire avec l’autorisation de se rendre deux jours par semaine à Toulouse pour assurer ses cours170. Mérignhac a été mobilisé du 2 août 1914 au 24 octobre 1919 : un an et demi comme sous-intendant militaire (2e et 3e service de l’intendance) puis au service du contentieux de l’intendance militaire de la XVIIe région à compter du 3 décembre 1917 et jusqu’à la cessation des hostilités. Il a également été associé de l’Institut de droit international, désigné comme membre du comité consultatif de la conférence de la paix (1917-1918)171. Polier est appelé à Paris pour être rattaché à un service spécial du ministère de la Justice172. Magnol est soldat auxiliaire des ouvriers d’administration attaché à la commission centrale de ravitaillement, puis au bureau militaire de la censure en 1914-15 et part en avril 1918 pour l’Institut français de Florence173.
Allocutions du doyen
76Durant ses premières années à Toulouse, différents conflits opposent Maurice Hauriou aux doyens Bonfils et Paget. Il souhaite à plusieurs reprises être nommé à Paris sans succès174. Sa volonté d’accéder au Conseil d’État au début des années 1920 est infructueuse175. Il s’affirme alors en province par « une stratégie de rayonnement périphérique par défaut »176, faisant figure d’« individual entrepreneur » (M. Milet). Demeurant à Toulouse, son investissement au profit de sa Faculté est entier. Assesseur du doyen Deloume, il est ensuite élu doyen en juin 1906177 entrant en fonction à la rentrée universitaire suivante. Mots choisis pour l’institution, méthode revendiquée et voie tracée ressortent du bref discours prononcé devant le conseil de la Faculté le 9 novembre 1906 :
77« Je ne considère point ma fonction comme un gouvernement d’hommes, notre honneur est de savoir nous gouverner nous-mêmes. Je la considérerai comme une gestion de nos intérêts communs et aussi comme la gestion de cette importante institution qu’est la Faculté de droit de Toulouse avec sa grosse population, institution qui est sans doute susceptible de développements. Je ne suis pas un improvisateur et vous pourrez être témoins d’hésitations et de tâtonnements. Ce que je puis vous promettre, c’est de m’appliquer à ma tâche avec persévérance et je l’espère avec un certain progrès dans les résultats »178.
78Il occupe le décanat jusqu’en 1926, est admis à la retraite le 1er octobre 1926. La Première Guerre mondiale a été le temps de la confirmation de sa pensée scientifique comme « inventeur de l’État » au même titre que le doyen de Bordeaux, Léon Duguit (1859-1928)179.
79Les discours qu’il prononce devant les étudiants toulousains à chacune des rentrées universitaires de la guerre ne sont pas isolés. Ils s’inscrivent dans un ensemble d’interventions d’universitaires, spécialement des doyens des Facultés de droit. La bataille pour la conception du droit défendue par les juristes français contre les positions allemandes mobilise180. La « guerre du droit » est un thème fécond181. La Faculté de droit de Paris s’adresse en novembre 1914 aux « facultés de droit du monde entier »182. Les discours sont une des formes d’expression de la défense d’un droit contre l’autre183. L’allocution de Joseph Barthélemy (1874-1945)184, devant quelques 150 étudiants réunis à la Faculté de droit de Paris le 9 novembre 1914, en témoigne185. Il s’élève contre la « théorie allemande du ‘droit de nécessité’, contre la ‘théorie du but’ enseignées dans les universités allemandes », rappelant que « la France représente contre les vieilles féodalités guerrières de la Germanie, les droits et les libertés du monde moderne »186. Le doyen Larnaude (1853-1942), dans un discours du 30 septembre 1914, s’écrie que « ce droit que nous enseignons ici et qu’on enseigne dans toutes les universités françaises ne succombera pas ! »187. Il en est de même dans son discours du 23 juin 1919 devant l’assemblée de la Faculté188. Quelques mois plus tard, Larnaude au cours de la séance de rentrée de l’Université de Paris le 20 décembre 1919189, évoque la particularité du récent conflit : « Ainsi, tandis que dans les guerres antérieures, ce sont les intérêts dynastiques ou économiques, les ambitions politiques ou territoriales qui ont armé les peuples les uns contre les autres, dans la guerre, que les historiens appelleront la guerre du droit, c’est un principe, c’est l’idéal de justice qui les a ligués contre l’État minotaure ! »190. Le professeur Ernest Gérard dressant un rapport général sur la situation à Lille précise que « c’est l’année de la victoire, enfin réalisée de la justice et du droit sur la barbarie […] le triomphe de la civilisation gréco-latine sur celle d’une Allemagne contemporaine »191.
80Hauriou veille à ce que les jeunes étudiants réunis dans le grand amphithéâtre soient informés d’un présent difficile mais ils doivent aussi inscrire dans une chaîne des temps de valeurs et d’idées (jusnaturalisme, christianisme et patriotisme). C’est pour lui un moment permettant d’envisager de manière optimiste et confiante un avenir moralement régénéré. Ses discours ont une tonalité différente des écrits d’un « penseur, pessimiste, de la résignation, de la chute »192. Au fil des cinq discours, retranscrits dans le registre des délibérations des années 1908-1924, ici réunis et édités pour la première fois193, le doyen toulousain mobilise son auditoire pour dire la guerre, dénoncer l’ennemi, défendre des valeurs et s’engager pour l’avenir.
81Hauriou raconte la guerre. Certains de ses étudiants, parmi les survivants, lui conteront la leur194. Il dépeint les théâtres d’opérations, les hommes qui y jouent leur vie. Il évoque ainsi la Marne et l’Yser, Douaumont. Il rappelle le sacrifice d’anciens étudiants tels Alric en 1916 puis, en juin 1919, Coeurveillé, Eydoux, Deloume, Pujol et Virenque. Le souvenir de ceux qui, « jetés dans la fournaise », sont tombés est rappelé le 13 novembre 1918 en relation avec Livre d’Or. Hauriou marque aussi les esprits par les images de la guerre qu’il développe au fil de ses discours. Il dit le quotidien des soldats confrontés aux balles, aux bombardements, aux gaz, leur situation dans les tranchées, exposés qu’ils sont aux ensevelissements, aux blessures, aux mutilations et le sort de leurs camarades faits prisonniers ou morts.
82Il dénonce aussi l’ennemi, qualifie et décrit « l’autre ». Les vocables évoquent la force bestiale de la barbarie (« bête », « féroce », « sauvagerie »). Il glisse alors du « mal » à la maladie, filant la métaphore, parlant de l’« abcès », de la « fièvre » mais aussi d’un corps social qui a été « infecté », du « poison » qui s’y est distillé. Le 8 novembre 1915, il affirme que l’espoir d’une décision rapide désormais abandonnée ne remet cependant pas en cause sa foi en la victoire finale : « l’ennemi est un malade qui suit le chemin de sa maladie ; il peut être long, mais le dénouement est fatal »195. Autant d’éléments caractéristiques du camp adverse revendiquant le « droit du plus fort », cette force qui s’oppose à la défense du droit et des valeurs portées par une autre civilisation. S’affrontent ainsi « forces brutales » et « forces morales ».
83Cette guerre des civilisations et des droits oppose l’héritière de la tradition gréco-latine à celle d’origine germanique. Lorsque, en 1918, il met en garde les étudiants contre « le dilettantisme des doctrines qui a régné chez nous des années 1880 à 1910 (durant lesquelles) se sont introduites dans nos théories beaucoup trop de doctrines allemandes », il exprime là l’idée que la pensée juridique allemande a préparé la guerre en assimilant droit et force196. À la conception allemande reposant sur le droit du plus fort, le non-respect du droit international, porteuse d’une guerre injuste, il oppose la défense du droit des plus faibles, de l’égalité, de la liberté et de la justice. La France est l’une des représentantes, et non des moindres, de cette civilisation du droit. Elle a pris part à son édification avec la Révolution de 1789 tout comme, en d’autres temps, la révolution anglaise. Il illustre alors son propos au travers des thèmes familiers qui sont autant d’éléments limitant le pouvoir et protégeant le plus faible, évocateurs pour les étudiants qui l’écoutent, qu’il s’agisse de la formation du droit constitutionnel, du droit administratif ou du droit international. Comme il le faisait déjà avant-guerre197, dans l’ensemble de ses discours, Hauriou rappelle aux étudiants la nécessité de défendre des valeurs, puisant aussi dans l’histoire pour développer sa conception morale198 et l’idée de justice, mobilisant des principes de la Révolution199. Il évoque aussi les 27 juin et 4 août 1789. La défense de la liberté est affirmée. Sa pensée établit une chaîne de valeurs dans le temps. Le 6 novembre 1916, avec la reprise de Douaumont, l’espoir de l’ouverture de la « barrière » est formulé. Entrevoir la victoire est désormais permis grâce à une « renaissance morale ». Alors que les juristes français ne conçoivent le droit qu’en tant que science et s’astreignent alors à la neutralité200, certains expriment néanmoins leur patriotisme et leur nationalisme201. Début novembre 1914, l’Université de Toulouse signe le « Manifeste des Universités françaises » répondant à l’« Appel des Allemands aux nations civilisées »202. Elle signe aussi, en 1916, « Un message de la France intellectuelle aux États-Unis d’Amérique » faisant écho au message de cinq cents intellectuels américains203.
84Au cours de la Première Guerre mondiale, les théories d’Hauriou et de Duguit ont été confortées204. Le doyen toulousain s’inscrit dans un mouvement d’affirmation du droit au sein de la République205, de l’importance de la science juridique206 et de l’opposition du droit à la force et à la violence207. Sa réflexion juridique s’affirme pendant la guerre avec l’importance de l’État en tant qu’« acteur interventionniste au sein de la vie publique » et « d’un droit public orienté vers l’intérêt général et la protection des citoyens »208.
85Le 1er mars 1918, une cérémonie est organisée à l’occasion du 47e anniversaire de la protestation des députés d’Alsace-Lorraine209. Dans son allocution, le doyen Hauriou se place « dans la maison du droit », évoque « le principe de la société des nations et le Droit nouveau des nations », s’inscrit dans les « principes éternels du droit ». Il s’engage devant les étudiants toulousains dans un combat pour la défense d’un idéal qui a le « droit comme horizon »210. Il en appelle à la liberté d’initiative individuelle et d’entreprise pour les jours meilleurs211.
86Son vocabulaire est désormais marqué du sceau de l’optimisme. À un temps récent de difficultés doit laisser place un avenir d’espérances et de réformes. La terminologie évolue alors, passant de « dépouiller », « désorganiser », « désorienter », « dévaster » à « reconstruire », « régénérer », « réorganiser », « revivre ». Il engage les étudiants sur la voie de l’action afin de mobiliser les énergies individuelles et collectives, libérer les initiatives, affirmer la place des juristes dans ce renouveau. Avec la victoire, Hauriou en appelle à des réformes qui n’ont que trop tardées. Il en appelle aussi à une régénération morale tendue vers l’« idéal absolu de justice et la moralité humaine ». Il écrit encore en 1916 : « Quand j’ai abandonné les études de sociologie générale pour les études juridiques, je n’ai pas renoncé pour cela à la conception morale de la société, au contraire, j’ai simplement choisi un champ d’observation plus restreint ». Ses discours prononcés devant les étudiants toulousains en sont une expression, l’une des manifestations de son engagement « libéral, catholique, thomiste » dont la réflexion a été influencée par les idées bergsonienne et durkheimienne212 et qui développe un vitalisme social. Il appartient aussi à un mouvement qui affirme l’« esprit juridique français » comme permettant de compter sur les juristes pour participer à l’effort de réforme une fois la guerre terminée.
2 – Agir
87Parmi les membres du corps professoral, certains ont également œuvré tant matériellement qu’intellectuellement à la mobilisation des esprits213 et des secours.
Initiatives individuelles
88Les enseignants de la Faculté de droit de Toulouse ont contribué par leurs écrits comme par la tenue de conférences à défendre la place de la France. Tel a été le cas d’Hauriou. Doyen de guerre, il a publié divers articles exprimant sa « mobilisation patriotique »214 et un appel à une Confédération européenne des États dans Le Figaro215 ou encore Le Correspondant216. Un extrait de son discours de 1914 est repris la même année concernant la question de la Belgique217. Une polémique l’oppose à Henry Berthélemy (1857-1943)218 qui lui reproche « d’être un partisan convaincu de la doctrine allemande de la souveraineté subjective de l’État »219. Il fait paraître en 1918 dans la Revue intellectuelle du catholicisme libéral un article intitulé « Le droit naturel et l’Allemagne ». C’est l’occasion de formuler une critique de théories juridiques allemandes et de pointer leur part de responsabilité, d’allier philosophie et droit pour éclairer l’évolution de la pensée juridique qui a dévoyé le droit naturel220. Deux ans auparavant, Joseph Declareuil dressait déjà un tableau du pangermanisme critiquant la propension de « l’Allemagne [à créer] des idées pour ses besoins et pour sa défense, comme elle crée des canons, des zeppelins, des submersibles »221. Il lui arrive aussi d’occulter les apports germaniques afin d’éclairer « la complexité du tempérament français et des éléments qui l’ont formé » ; ainsi, en 1925, dans son Histoire générale du droit français222. Hormis ceux d’Hauriou et Declareuil, les écrits des juristes toulousains paraissent plus rares. Cézar-Bru s’intéresse aux pensions militaires223 et Mérignhac à la résolution des conflits. Il est alors un « militant réaliste » de l’établissement de la paix par le droit224. Léon Polier participe à une série de six conférences en avril 1915 à l’Institut français de Madrid fondé par les Universités de Bordeaux et de Toulouse225. Elles sont imprimées sous le titre Les forces de la France d’hier et de demain226. Il s’y inscrit alors en faux face à la légende d’une décadence française, dresse un « état actuel et [des] chances prochaines de la vitalité française »227, développe ainsi des arguments économiques, culturels, politiques, historiques et juridiques destinés à promouvoir le « génie français [qui] est comme un mur compact et sans fissures »228. Certains professeurs maintiennent aussi, autant que faire se peut, des liens directs avec les jeunes gens mobilisés. Ainsi, en 1916, Cézar-Bru, président de l’Académie de législation, informe l’un de ses anciens étudiants, Fernand Bastide, du prix qui vient de lui être décerné. La réponse du lauréat décrit la violence des « interminables nuits […] passées, l’hiver dernier, dans les tranchées de Carency »229. Elle s’oppose, avec une douloureuse nostalgie, au souvenir des temps de paix, celui des studieux « cours de la faculté de droit de Toulouse »230. Notons aussi les actions matérielles menées par certains enseignants. Campistron organise à Gimont (Gers) un hôpital auxiliaire de 150 lits, en grande partie à ses frais. Lors du décès de son collègue, Hauriou ne manquera pas de lui rendre hommage231. À la fin de la guerre, Dugarçon s’investit particulièrement pour organiser l’accueil à Toulouse des étudiants américains démobilisés. Hauriou est membre d’honneur du Comité national d’action pour la réparation intégrale des dommages causés par la guerre fondé en octobre 1914 par Léon Francq232.
Choix collectifs
89Reprenant une initiative de leurs collègues de la Faculté des lettres, les juristes votent en assemblée du 25 novembre 1914 en faveur d’un prélèvement de 2 % sur leur traitement mensuel destiné à « venir en aide aux infortunes causées par la guerre ». Ils décident d’en attribuer la moitié aux œuvres de charité locale et l’autre moitié au Comité de secours national créé le 4 août 1914 par Albert Kahn pour venir en aide aux victimes civiles de la guerre. La mesure est généralisée à l’ensemble des membres de l’Université. Le rapport pour l’année 1915-1916 précise que « l’Université (le personnel des secrétariats compris) a cru devoir s’imposer, depuis novembre 1914, un impôt de guerre, une sorte d’impôt patriotique volontaire, prélevé sur son traitement »233. Chaque année de guerre, ce sont environ 12 000 francs qui sont ainsi reversés à la Société de secours aux blessés, aux Femmes de France, à la Fédération des Œuvres de guerre, aux réfugiés des départements envahis ou encore aux pupilles de l’École et aux Marraines des orphelins de guerre234. S’y ajoute le produit de conférences assurées par Polier ou encore Bulh de la Faculté des sciences et Graillot de la Faculté des lettres, comme le souligne le rapport du conseil de l’Université : « Nos diverses Facultés, représentées par plusieurs de leurs membres dans le Comité central des Œuvres de guerre du département de la Haute-Garonne, ont contribué à augmenter les ressources de ces œuvres, par le produit de conférence faites gracieusement au théâtre des Variétés »235. À la fin de la guerre, le prélèvement des 2 % permet de participer au soutien de l’École de rééducation de mécanique agricole pour les mutilés et réformés de la guerre. Elle a été organisée à partir du mois de juin 1918 à la station de mécanique agricole de l’Université et reçoit 174 mutilés et réformés qui y sont alors rééduqués236. Enfin, les enseignants de la Faculté réunis en assemblée le 5 janvier puis le 28 janvier 1915 émettent le vœu, pour l’année 1915, que la nation belge puisse recevoir le prix Nobel de la paix ou qu’il soit remis au roi Albert237.
3 – Accueillir
90Hauriou est à la tête d’une institution meurtrie. La guerre a emporté nombre de ses étudiants disparus sont honorés dans le Livre d’Or. Plus chanceux, d’autres reviendront et seront progressivement démobilisés. Parmi eux, l’Université de Toulouse et, en son sein, la Faculté de droit accueillent des étudiants américains.
Des Américains à Toulouse238
91Le 6 avril 1917, des universitaires américains manifestent le souhait de voir organisé un soutien aux étudiants d’outre-Atlantique mobilisés en France et en Angleterre. L’American University Union est créée le 7 juillet 1917 pour leur venir en aide en Europe239. L’Office national des universités et des écoles françaises (O.N.U.E.F.) va prendre en charge l’accueil d’étudiants répartis entre Paris (2 000), Toulouse (1 200), Lyon (373), Grenoble (371), Poitiers (249), Aix-Marseille (204) ainsi qu’à Bordeaux, Caen, Nancy, Rennes ou encore à Beaune, Clermont-Ferrand et Dijon240. Charles Petit-Dutaillis (1868- 1947)241 relaie la demande américaine auprès des Universités. Leur intégration a été riche d’échanges et de rencontres dont ils ont laissé des témoignages. Elle participe aussi d’une politique de développement des relations franco-américaines. Le conseil municipal de Toulouse, le 4 juillet 1918, décide de rebaptiser la place Lafayette en place Wilson. Il accueille aussi très favorablement la demande de création d’un consulat américain.
92Les Universités doivent faire connaître pour la fin de l’année universitaire leur proposition d’enseignements à destination des boys américains. Les Facultés de droit ont alors préparé leur venue en prévoyant des enseignements spécifiques242. L’Office et l’Université s’accordent sur le principe d’envoyer 1 560 étudiants à Toulouse à partir du 1er février 1919243 pour une durée de quatre mois. Ils sont en définitive 1 223 (dont 167 pour le droit) qui arrivent du 23 février au 10 mars. Ils s’ajoutent aux 1 364 étudiants toulousains (dont 201 étrangers). Le registre des assemblées et conseils de la Faculté de droit de Toulouse évoque leur venue au cours de la séance du 24 janvier 1919244.
93L’assemblée de la Faculté est ensuite réunie le 5 février 1919 afin de préciser les mesures à prendre et entendre un rapport d’Alcée Dugarçon245. Pour déterminer les leçons qui seront dispensées, une commission est chargée d’y réfléchir (Dugarçon, Houques-Fourcade, Cézar-Bru et Magnol).
94Des cours d’une heure sont assurés. Ainsi, quinze leçons sont-elles dispensées portant sur des sujets très divers mais correspondant à ce que les juristes toulousains considèrent comme faisant partie d’une introduction à la formation juridique, voire d’une culture historique et juridique : Le système féodal et sa liquidation (Thomas), La vie économique de la France au Moyen Âge (Dugarçon), Les lois fondamentales de la monarchie française (Declareuil), La France et la Guerre de l’Indépendance américaine (Fliniaux), Les idées politiques de la Révolution française (Hauriou), Libertés publiques de la France (Magnol), L’impôt moderne (Rigaud), La famille française pendant la guerre (Cézar-Bru), La justice militaire, La femme française, La puissance paternelle (Gheusi), La situation des travailleurs en France (Houques-Fourcade), L’intendance militaire française pendant la guerre (Perreau), Origines de la Faculté de Droit de Toulouse (Rigaud), L’expansion française en Afrique (Rouard de Card) et La navigation commerciale (Fraissaingea). Alexandre Mérignhac a publié une série de conférences concluant par les mots de Mirabeau : « Le droit sera un jour le Souverain du Monde »246. Achille Mestre assure avec grand succès des conférences musicales247 autour de Bizet et Déodat de Séverac248. Il est assisté par la mezzo-soprano Mathilde Calvet et par Mathilde Tarquini d’Or249. L’ensemble des premier; enseignements se termine le 5 avril. Ils sont suivis par les cours décidés le 31 mars 1919 par l’assemblée de la Faculté de droit250.
95À leur issue, le 30 juin 1919, les étudiants américains obtiennent un certificat attestant de leur assiduité. À Toulouse comme ailleurs, certains ne s’en contenteront pas251. Ils passeront un examen pour l’obtention d’un diplôme. Ils sont ainsi 27 sur 167 à la Faculté de droit de Toulouse.
96Si une mémoire institutionnelle est exprimée par les rapports du conseil de l’Université de Toulouse ainsi que par les registres des assemblées et des conseils de la Faculté de droit, une autre mémoire se forme aussi localement. Elle émane des étudiants américains qui témoignent de leur vie quotidienne pendant les quelques semaines où ils sont accueillis.
Un journal étudiant
97À Toulouse, les étudiants américains ont publié, sans doute plus régulièrement qu’ailleurs. Le journal Qu’est-ce que c’est ?252 paraît du 19 mars 1919 (n° 1) au 30 juin 1919 (n° 14). Il existe en d’autres lieux diverses publications : Deux mots à Clermont-Ferrand ; Voilà ! a weekly published by the Americans of the University of Bordeaux ; As you were published weekly by the A.E.F. students, university of Rennes ; The Besançonian. Published monthly by the American students at the University of Besançon et The Soldier-Student qui occupe une à deux pages dans Le petit Méridional, journal de Montpellier et Les Beaux Jours, à Poitiers.
98L’hebdomadaire Qu’est-ce que c’est ? est porté par une équipe de douze personnes sans lien a priori avec les responsables américains présents à Toulouse. Le journal connaît un succès certain. La forte augmentation des exemplaires imprimés laisse deviner sa large réception. Ainsi, progresse-t-il de 4 000 exemplaires pour son troisième numéro à 15 000 lors des derniers titages253.
99Les différents numéros se composent de plusieurs rubriques rendant compte aussi bien de cérémonies254, que d’activités culturelles, sociales et sportives255. Des nouvelles, des poésies, des illustrations sont aussi insérées. Le journal brosse également, dans son dernier numéro du 30 juin 1919, un portrait de différents doyens toulousains : Henri Guy256, Paul Sabatier257, Maurice Hauriou258.
100Le journal met en lumière la situation des étudiants accueillis au sein de la Faculté de droit. Ils s’organisent pour disposer de notes en anglais des cours de droit dispensées par les professeurs français259. Un American Law Club of Toulouse apparaît dès la fin avril. Les étudiants américains saluent la parfaite organisation, qualifiée de « very active and intelligent preparation »260, et tout particulièrement le rôle du professeur Alcée Dugarçon261.
101Lors de l’arrêt de la publication du journal, les étudiants américains décident que le bénéfice réalisé (14 548 francs) sera consacré à une œuvre témoignant de leur passage à Toulouse. Il est convenu d’employer cette somme « à la fondation d’une bibliothèque américaine à l’Université de Toulouse »262.
102Les étudiants américains partis et les étudiants toulousains démobilisés revenus, le rapport du conseil de l’Université, pour l’année 1918-1919, constate sèchement, de manière administrative, que « le personnel s’étant retrouvé au complet, la vie de la Faculté a repris son cours normal et tous les enseignements ont pu y être donnés de façon régulière »263.
Notes de bas de page
1 Archives de l’Université des sciences sociales – Toulouse 1, 2Z 2-16, p. 369 (séance du 9 juin 1923) et 2Z2-17, p. 3 (séance du 12 juin 1924). Elle reprend sa dénomination de conseil le 5 mai 1925, p. 26 et p. 28.
2 Bibliothèque universitaire de Toulouse, 90227, Rapport annuel du Conseil de l’Université avec les comptes rendus des travaux des Facultés et des observatoires.
3 A. de Beauchamp, Recueil des lois et règlements sur l’enseignement supérieur, t. 4, Paris, 1884-1889, p. 203-211.
4 M. Malherbe, La Faculté de droit de Bordeaux (1870-1970), Bordeaux, 1996, p. 79.
5 Sur les archives de la Faculté de droit, O. Devaux, « La Faculté de droit de Toulouse : état des travaux et des sources », Les Facultés de droit de province au XIXe siècle…, op. cit., p. 147-150 ; Ph. Delvit et D. Floreck, « Registres, parchemins et papiers. Les archives de la faculté de droit de Toulouse (1805- 1914) », Les Facultés de droit de province au XIXe siècle…, p. 151-167. Archives de l’Université des sciences sociales – Toulouse 1, Série Z, fonds hors format - Registres patrimoniaux- 2Z2. La série intéresse tout le XIXe siècle 2Z2-1 à 2Z2-11.
6 Ibid. - 2Z2-14. Registre de délibérations de l’assemblée de la Faculté de droit, répertoire alphabétique en annexe. Nomenclature des sujets donnés au concours général et annuel de licences (1896-1907). - 2Z2-16. Registre des assemblées de la Faculté de droit (1908-1924). - 2Z2-17. Registre des assemblées de la Faculté de droit (1924-1936).
7 « Le présent registre des Délibérations de l’Assemblée de la Faculté de Droit de Toulouse contenant quatre cents feuillets, celui-ci non compris a été coté et paraphé sur premier et dernier par nous, Doyen de la Faculté de Droit. Toulouse le 5 février 1908. Le Doyen [Maurice Hauriou. Tampon de la Faculté de Droit de Toulouse] ».
8 Dans le recueil, des mots sont soulignés en bleu ou en rouge pour permettre d’établir cet index (par exemple « Aménagement du 1er étage de la Faculté de droit », « Amis de l’Université de Toulouse », « Budget », « Concours Licence », « Décès », « Livre d’Or », « Rapports »…).
9 Archives de l’Université des sciences sociales – Toulouse 1, Série Z, fonds hors format - Registres patrimoniaux- 2Z2, p. 186-293.
10 Ibid., entre p. 118 et 119.
11 Ibid., p. 123.
12 Ibid., entre p. 206 et 207, p. 232-233.
13 Annexes 1 à 3.
14 Pour une pratique semblable et qui se prolonge jusuqu’en 1953 à la Faculté de droit de Bordeaux, M. Malherbe, La Faculté de droit de Bordeaux (1870- 1970)… op. cit., p. 79.
15 Ibid., p. 79, l’auteur évoque les années 1941, 1952 et 1967.
16 Archives de l’Université des sciences sociales – Toulouse 1, 2Z2-16, p. 24, correction en rouge pour la répartition du produit des conférences ; p. 85, remplacement du mot « Assemblée » par « Conseil » et suppression de trois noms parmi les membres.
17 Ibid., entre pages 384-385.
18 Ibid., p. 302.
19 Ibid., p. 48.
20 Ibid., p. 63.
21 Ibid., p. 91.
22 Ibid., p. 357.
23 Ibid., p. 13, p. 135.
24 Ibid., p. 53.
25 Ibid., p. 69, p. 137.
26 Ibid., p. 159, p. 260.
27 Ibid., p. 263-265.
28 Ibid., p. 271.
29 Ibid., p. 55.
30 Ibid., entre pages 118 et 119.
31 Ibid., p. 139.
32 Ibid., entre pages 206 et 207.
33 Ibid., p. 327.
34 Ibid., entre les pages 240 et 241, le même document est inséré entre les pages 348 et 349.
35 Ibid., entre les pages 204 et 205.
36 Ibid., entre p. 316 et 317. Ces rapports ont été publiés par l’imprimerie G. Berthomieu à Paris en 1920 (24 p.) : rapport de Dugarçon sur la licence, de Perreau sur le doctorat et de Houques-Fourcade sur l’« extension universitaire ».
37 Ibid., entre p. 322 et 323.
38 Ibid., entre p. 334 et 335.
39 Ibid., entre p. 356 et 357.
40 Ibid., entre p. 382 et 383.
41 Ibid., entre p. 356 et 357.
42 Ibid., entre p. 394 et 395.
43 Ibid., entre p. 396 et 397.
44 Ibid., p. 396-398.
45 Ibid., p. 399-400.
46 Le compte rendu de la réunion se termine par la signature du secrétaire du conseil ou de l’assemblée et du doyen.
47 Archives de l’Université des sciences sociales – Toulouse 1, 2Z2-16, p. 272-277.
48 M. Milet, Les professeurs de droit citoyens. Entre ordre juridique et espace public, contribution à l’étude des interactions entre les débats et les engagements des juristes français (1914-1995), thèse de science politique, Paris ii, 2000, p. 82 note 1.
49 Bibliothèque universitaire de Toulouse, 90227, Rapport 1913-1914, p. 34.
50 Ibid., Rapport 1915-1916, p. 15.
51 Rapport 1907-1908, p. 34.
52 Rapport 1907-1908, p. 34.
53 Archives de l’Université des sciences sociales – Toulouse 1, 2Z2-16, p. 118.
54 Bibliothèque universitaire de Toulouse, 90227, Rapport 1915-1916, p. 9.
55 Les développements suivants reprennent pour partie F. Garnier, « Le doyen Hauriou et la création de l’Ecole supérieure de droit de Clermont-Ferrand en 1913 », Mélanges en l’honneur de Dominique Turpin. État du droit, état des droits, Cl. Marliac (contributions réunies par), Paris, 2017, p. 395-408.
56 M. Milet, « La Faculté de droit de Paris sous la Troisième République : une domination sans partage ? (1871-1939) », Paris, capitale juridique (1804-1950)…, op. cit., p. 157-158.
57 Pour une situation comparable avec l’École supérieure de commerce de Toulouse, O. Devaux, « Aux origines de l’Ecole supérieure de commerce de Toulouse : 1898- 1918 », Enseignements et recherches en gestion…, op. cit., p. 179-182.
58 Rapport 1909-1910, p. 35.
59 Rapport 1908-1909, p. 27.
60 Le député socialiste de la Seine Gustave Rouanet, proche de Jean Jaurès, signe ainsi, le 30 décembre 1909, un virulent article dans l’Égalité de Roubaix Tourcoing : « Un usage s’était établi dont la pratique effaçait en partie les résultats de l’iniquité sociale, en vertu de laquelle, les élèves des écoles primaires […] pouvaient accéder à l’enseignement supérieur sans passer par l’enseignement secondaire, enseignement de privilégiés, disons le mot, des plus riches, non des plus intelligents et des plus aptes. Le ministre accordait des dispenses […]. Les fils de privilégiés se sont révoltés […]. Des enfants du peuple […] venaient leur faire concurrence. De quoi leur servait d’avoir pendant huit ans ânnoné sur les auteurs latins, d’avoir acheté un enseignement secondaire, payé à beaux deniers comptants […] si le premier venu, parce qu’il se sent intelligent, travailleur et capable de recevoir l’enseignement supérieur, venait s’asseoir à leurs côtés sur les mêmes bancs, à la Faculté de droit, à la Faculté de médecine, des lettres ou des sciences […]. Vite ! qu’on les chasse ! […] Le ministre de l’Instruction publique a donné raison aux fils de privilégiés. D’un trait de plume, il a rétabli la barrière entre les enfants du peuple et l’enseignement supérieur. Par décret du 12 mai dernier, l’abus dont se plaignaient les ‘bacheliers’ a été supprimé. Désormais il n’y aura plus de dispense. La chose a été faite en cinq secondes, sans que l’on ait daigné justifier au Journal officiel les raisons de cette mesure. Et voilà une réforme de plus à l’actif de la République ! », http://www.bnf.fr/presse/pdf/PRAERT/PDF/1909/PRAERT10901230001.pdf(consulté le 25 mars 2017).
61 F. Pic et J. Sagnes, « La crise de 1907 en Languedoc et en Roussillon : bilan historiographique et essai de bibliographie », Annales du Midi, vol. 101, n° 187, 1989, p. 289-320. J. Harvey Smith, « La crise d’une économie régionale : la monoculture viticole et la révolte du Midi (1907) », Annales du Midi, vol. 92, n° 148, 1980, p. 317-334. P. Plas, Avocats et barreaux dans le ressort de la cour d’appel de Limoges (1811-1939), Limoges, 2007, p. 648 et p. 652 note 158.
62 Rapport 1911-1912, p. 23.
63 http://crdp-pupitre.ac-clermont.fr/daac-auvergne/5505--daac-auvergne.htm
64 Sur son rôle dans la création de l’École supérieure de commerce, O. DEVAUX, « Aux origines de l’École supérieure de commerce de Toulouse : 1898-1918 », Enseignements et recherches en gestion…, op. cit., p. 147-183.
65 Rapport 1913-1914, p. 25-26.
66 À titre de comparaison pour l’évolution du nombre d’inscriptions à la Faculté de roit de Douai et de Lille (1865-1914), S. Dormard, « L’enseignement juridique et e corps professoral de la faculté de droit de Lille, du Second Empire à la Première Guerre Mondiale », Revue du Nord, 2010/1, n° 384, p. 132. Voir aussi M. Milet, es professeurs de droit citoyens…, op. cit., p. 82.
67 Voir de manière plus générale l’étude de C. Barrera, Étudiants d’ailleurs…, op. cit., passim.
68 Ibid., p. 89-90.
69 Ibid., p. 90-91.
70 Ibid., p. 76 et note 3.
71 Bibliothèque universitaire de Toulouse, 90227, Rapport 1913-1914, p. 21. C. Barrera, Étudiants d’ailleurs… op. cit., p. 91-92.
72 Ibid., p. 93-95.
73 Ibid., p. 82 et p. 96-97.
74 Ibid., p. 85-89.
75 Bibliothèque universitaire de Toulouse, 90227, Rapport 1915-1916, p. 16.
76 Ibid., Rapport 1913-1914, p. 23.
77 Ibid., Rapport 1914-1915, p. 24 : « Grâce à cette présence à Toulouse de tout le personnel de la Faculté, tous les enseignements ont été assurés, même les cours complémentaires. Sans doute, l’Université s’est vue dans l’obligation de supprimer la rémunération de ceux qu’elle rétribuait, et l’État lui-même n’a rétabli qu’une partie de ceux qui sont à sa charge. Néanmoins le personnel a tenu à honneur de les faire tous comme à l’habitude ».
78 Ibid., Rapport 1915-1916, p. 12.
79 Ibid., Rapport 1914-1915, p. 25 : « On me permettra à ce sujet une réflexion. La bonne moitié des enseignements réguliers et obligatoires de la Faculté de droit sont sous forme de cours complémentaires et comme, sous cette forme, ils ne comportent pas de traitement attaché à la situation d’un fonctionnaire déterminé, comme ils ne comportent qu’un émolument de complément, l’État et l’Université n’hésitent pas à les supprimer par raison d’économie. Si cependant ces enseignements, comme il arrive dans les autres Facultés, étaient tous érigés en chaires ou en maîtrise de conférences séparées et constituaient ainsi la situation fondamentale d’un fonctionnaire déterminé, non seulement on n’y toucherait pas en temps de guerre, mais cela coûterait beaucoup plus cher à l’administration en temps de paix, parce qu’il faudrait entretenir un personnel double. Les Facultés de droit sont ainsi victimes, en temps de guerre, de ce qu’elles sont organisées en temps de paix par un procédé plus économique que les Facultés des autres ordres. Il y a là quelque chose qui n’est pas très juste et qui devra appeler l’attention, d’autant que, si la situation de guerre se prolonge, ou même si sa situation d’après-guerre se caractérise par la gêne financière, et si la même politique d’économie sur les cours complémentaires continue à prévaloir, l’enseignement des Facultés de droit se trouvera désorganisé ».
80 Ibid., Rapport 1912-1913, p. 10 et p. 30.
81 M. Malherbe, La Faculté de droit de Bordeaux (1870-1970)… op. cit., p. 127- 128.
82 Voir Infra, Transcription, p. 189.
83 Ibid., p. 257-258.
84 Ibid., p. 190.
85 Ibid., p. 206.
86 Ibid., p. 225.
87 Archives de l’Université des sciences sociales – Toulouse 1, 2Z2-16, p. 206.
88 Voir Infra, Transcription, p. 189.
89 Ibid., p. 230.
90 Ibid., p. 268.
91 Ibid., p. 258-259.
92 Ibid., p. 258.
93 Ibid., p. 277.
94 Ibid., p. 279.
95 A. de Beauchamp, Recueil des lois et règlements de l’enseignement supérieur, t. V, juin 1889-mai 1898, Paris, 1898, p. 710-714.
96 Annexe 4.
97 Voir Infra, Transcription, p. 190, notaire de Toulouse et en particulier de l’Université.
98 Bibliothèque universitaire de Toulouse, 90227, Rapport 1912-1913, p. 31.
99 Voir le récent cycle de journées d’études sur Les Finances dans la Grande Guerre sous la direction de F. Descamps et L. Quennouëlle-Corre : La mobilisation financière en France et à l’étranger. Le front financier, un troisième front, Paris, 2015 ; Finances publiques en temps de guerre, 1914-1918. Déstabilisation et recomposition des pouvoirs, Paris, 2016 et Une fiscalité de guerre ? Contraintes, innovations et résistancces 1914-1918, à paraître.
100 Charles Petit-Dutaillis (1868-1947), diplômé de l’École des Hautes Études (1888), chartiste, agrégé d’histoire-géographie (1890), docteur ès lettres (1895), professeur d’histoire au lycée de Troyes (1894-1895), directeur de l’École supérieure de commerce de Lille (1899-1908), il enseigne l’histoire médiévale à l’Université de Lille à partir de 1895 puis passe à l’Université de Grenoble (1908) et devient recteur de l’académie de Grenoble, fonction qu’il occupe jusqu’en 1916. Il sera ensuite inspecteur général de l’Instruction publique (1916-1917) puis directeur de l’Office national des universités et écoles fançaises (1917-1936). Il a aussi collaboré à l’Histoire de France publiée sous la direction d’Ernest Lavisse.
101 Bulletin de l’enseignement primaire, n° 348, septembre-octobre 1914. Voir par exemple, R. Cazals, « Travailler pour l’histoire : les notes des instituteurs audois sur la Grande Guerre », Travailler à l’arrière 1914-1918. Actes du colloque international organisé à Carcassonne les 23-24 mai 2013 par l’Université Toulouse-Jean Jaurès, les Archives départementales de l’Aude et l’association Les Audois, Carcassonne, Archives départementales de l’Aude, 2014, p. 11-27.
102 http://www.siv.archives-nationales.culture.gouv.fr/siv/cms/content/helpGuide.action?preview=false&uuid=16e841bb-ffaa-4359-bf09-9714cb25c1ac. (consulté le 10 février 2017).
103 Archives de l’Université des sciences sociales – Toulouse 1, 2Z2-16, p. 272.
104 Ibid., p. 276.
105 « La Faculté de Droit de l’Université de Toulouse a décidé de publier un Livre d’Or, consacré à la mémoire de ses étudiants ou anciens étudiants qui sont morts pour la France ou qui ont été blessés ou cités pour leur belle conduite à l’ennemi. J’ai l’honneur de vous prier de vouloir bien me faire parvenir sur M. votre fils une notice aussi détaillée que possible et contenant notamment, outre des renseignements sur sa vie antérieure à la guerre, les indications portées sur le questionnaire ci-joint, que je vous serais reconnaissant de me retourner dûment rempli. À ces renseignements la Faculté serait heureuse de vous joindre la photographie de M. votre fils […] P.-S. – La Faculté vous serait obligée de vouloir bien, en outre, lui signaler ceux de ses étudiants ou anciens étudiants, qui, à votre connaissance, auraient été tués à l’ennemi, blessés, décorés ou cités ».
106 Le questionnaire est intitulé « Renseignements à insérer au Livre d’Or de la Faculté de Droit ». Voir Arch. dép. Haute-Garonne, 3160 W 247, 248 et 329.
107 Par exemple pour Pierre-Henri Benoît, Arch. dép. Haute-Garonne, 3160 W 247, p. 361.
108 Par exemple pour Jean, Quirin Causse (mairie de Pia dans les Pyrénées-Orientales), ibid., p. 71.
109 Ibid., p. 9-12 avec un article dans l’Express du Midi à propos de Gabriel Cassan. Son père indique que l’article à été rédigé par René Languedoc correspondant au pseudonyme de Gabriel Viguier, « docteur en droit, avocat à Albi camarade et ami de notre regretté fils ».
110 Ibid., p. 381 pour Jean, Fernand Arabet.
111 Ibid., p. 224-230 à la mémoire de Marcel Barthe.
112 Ibid., p. 427-446. Sur Charles Alric, infra, Annexe 7, classe 1914.
113 Ibid., p. 106-113. Sur Claude, Antoine Chaux, infra, Annexe 7, classe 1912.
114 Archives de l’Université des sciences sociales – Toulouse 1, 2Z2-16, p. 400.
115 Voir aussi, E. Gojosso, « Les ‘Morts pour la France’ de la Faculté de Droit de Poitiers durant la Première Guerre Mondiale », Cahiers poitevins d’histoire du droit, n° 2, Paris, 2009, p. 221-227.
116 Bibliothèque universitaire de Toulouse, 90227, Rapport 1915-1916, p. 36-39 ; Rapport 1916-1917, p. 35-37 ; Rapport 1918-1919, p. 8 (« La Faculté de Droit y inscrira environ 160 noms, la Faculté de Médecine et de Pharmacie plus de 50, la Faculté des sciences au moins autant, la Faculté des Lettres 30, la Bibliothèque universitaire 1, l’Observatoire du Pic-du-Midi 1 ») et p. 77. R. Mesquida, Les monuments aux morts de l’Université Toulouse 1 Capitole : une mémoire vivante de la Grande Guerre, mémoire Master 2, Ph. Delvit (dir.) 2016-2017.
117 Rapport 1915-1916, p. 35. Lauréat de la Faculté en 1911, 1912 et 1913, avocat, fils d’avocat (son père est aussi sur le front), âgé de 22 ans, il est tué le 24 octobre 1916 aux carrières d’Haudromont. Voir Annexe 7, classe 1914 et l’hommage qui lui est rendu par le bâtonnier.
118 Rapport 1917-1918, p. 32.
119 Archives de l’Université des sciences sociales – Toulouse 1, 2Z2-16, p. 277 (séance du 9 janvier 1919) et p. 292, p. 325. Rapport 1920-1921, p. 31.
120 Le parti pris du classement des noms par ordre alphabétique n’est pas toujours respecté.
121 G. Chevalier, La peur, Paris, 1930.
122 Sauf indication contraire, les informations qui suivent sont extraites du Livre d’or de la Faculté.
123 17 anciens étudiants de la Faculté étaient avocats, 12 avocats stagiaires, 1 avoué au tribunal civil de Toulouse et 1 « avocat-avoué » à Limoux. Cette surreprésentation conduira le bâtonier Lafforgue évoquant la mémoire de confrères toulousains, « ces beaux soldats issus de la bourgeoisie », à rappeler que « l’empereur Justinien a recueilli dans son Code un texte célébrant le courage des avocats, aussi glorieux que le courage militaire ». Discours prononcé le 23 novembre 1919 à la rentrée solennelle de la conférence des avocats stagiaires par Me Lafforgue Bâtonnier de l’Ordre des Avocats à la Cour d’appel de Toulouse, Toulouse, Imprimerie spéciale de la Gazette des Tribunaux du Midi, 1920, p. 20.
124 Sur cet aspect, V. Karady, « De Napoléon à Duruy : les origines et la naissance de l’université contemporaine », J. Verger (dir.), Histoire des Universités en France…, op. cit., p. 306-308.
125 48 sont nés en Haute-Garonne dont 26 à Toulouse ; 22 dans l’Aude, 17 dans le Tarn, 16 dans le Tarn-et-Garonne, 11 en Aveyron, 9 dans le Gers, 9 dans l’Hérault, 8 en Ariège, 8 dans le Lot-et-Garonne, 6 dans le Lot, 5 en Algérie, 5 en Corrèze, 5 dans les Pyrénées-Orientales, 5 à Paris, 4 dans les Basses-Pyrénées, 4 en Dordogne, 4 en Gironde, 4 à la Martinique, 3 dans le Cantal, 3 dans les Hautes-Pyrénées, 2 dans la Loire, 2 en Saône-et-Loire, 2 dans le Vaucluse. L’Ain, l’Allier, les Alpes-Maritimes, l’Ardèche, les Basses-Alpes, le Cher, la Côte-d’Or, le Finistère, le Gard, la Haute-Loire, la Haute-Vienne, l’Indre, la Manche, la Tunisie, le Var et la Vendée comptent 1 représentant. L’attracivité de la Faculté semble donc relativement limitée.
126 André Peux, né à Fort-de France est tué en 1915 « du côté d’Ypres » ; Louis Berté et Félix Pinel de Golleville, tous deux originaires de Saint-Pierre, trouveront tous deux la mort en 1916 en Lorraine, le premier à Mamay, le second à soixante kilomètres de là, à Verdun ; toujours en 1916, Édouard Simon, né à Lamentin, meurt « entre Cléry et Maurepas ».
127 Discours prononcé le 23 novembre 1919 à la rentrée solennelle des avocats stagiaires…, p. 9. Tout aussi modeste se montrera Jean Plassard, agrégé d’histoire au lycée de Tarbes en 1919, chargé de cours à la Faculté de droit de Toulouse en 1922, agrégé (droit privé et droit criminel) en 1924, titulaire de la chaire de droit civil en 1924, assesseur du doyen en 1934, avocat. En deux phrases lapidaires, il résumera ses quatre années de guerre durant lesquelles sa conduite lui vaut la légion d’honneur et la croix de guerre avec palmes : « J’ai cédé au goût du confort […]. L’aviation, ce n’était pas moins dangereux [que les tranchées]. Mais on pouvait s’y laver ». Passé à la Faculté de droit de Paris en 1938, il sert avec le grade de lieutenant-colonel (justice militaire) au début de la seconde guerre mondiale, vit « le désastre de la Meuse et, selon les témoignages de ses compagnons, [fait] la retraite les armes à la main ». Revenu à Toulouse, il meurt d’épuisement et de maladie à l’hôpital militaire en juillet 1940, à l’âge de 48 ans. J.-L. Gazzaniga (dir.) Histoire des avocats et du barreau de Toulouse, Toulouse, Privat, 1992, p. 299 et p. 303 ; Ph. Delvit, Toiles, gravures, fusain et sanguine…, op. cit., p. 55.
128 Créée le 22 janvier 1852 par Napoléon III qui la concevait comme « la légion d’honneur du sous-officier », elle devient rapidement si prestigieuse qu’elle sera souvent la seule décoration portée par les généraux et maréchaux. Les décorations françaises, Collection du patrimoine, Paris, 2004, p. 33.
129 La conduite au feu, dans des conditions extrêment dures, des soldats de 1914 et 1915 conduisit bien des généraux et hommes politiques à souhaiter la création d’une décoration pour ceux qui avaient mérité d’être cités « à l’ordre » de l’armée. Ce fut la « croix de guerre », instituée par la la loi du 8 avril 1915. Les décorations françaises…, op. cit., p. 34.
130 Discours prononcé le 23 novembre 1919 à la rentrée solennelle de la conférence des avocats stagiaires..., p. 8.
131 Ibid., p. 17. Louis reçoit la croix de guerre à titre posthume, la citation à l’ordre du régiment qui l’accompagne étant plus succincte. Voir annexe 7, classe 1913.
132 Joseph était fils du greffier en chef du tribunal civil de Toulouse. Voir annexe 7, classe 1907.
133 Il figure dans le Livre d’or mais pas sur le tableau des « Étudiants de la Faculté de droit morts pour la France ».
134 Id.
135 Les soldats de la 33e division d’infanterie, basée à Montauban et à laquelle appartiennent nombre d’étudiants de la Faculté de droit de Toulouse, sont décimés dans les bois de Bertrix, le 22 août 1914. M. Florens, « La bataille de Bertrix », Arkheia. Revue d’histoire. Histoire, mémoire du Vingtième siècle en Sud-Ouest, Montauban, 1999 [en ligne].
136 Il figure dans le Livre d’or mais pas sur le tableau des « Étudiants de la Faculté de droit morts pour la France ».
137 F. Chef, « La mémoire des villages perdus », Étranges pays de la Marne, éd. du Coq à l’Ane, 2001. Le lieu apparaît pourtant sous la désigation de Ursulus au Xe siècle, de Ullus ou Urlus au XIVe siècle, de Urlu ou Hurlu en 1686. Le village de Perthes-lès-Hurlus -151 habitants au recensement de 1911- est totalement rasé durant les combats. Il n’a jamais été reconstruit, son nom étant aujourd’hui rattaché à celui de la commune de Souain. Dans ce secteur, quatre autres villages (Tahure, Repont, Les Hurlus et Le Mesnil-lès-Hurlus) disparaissent définitivement.
138 Le Livre d’or de la Faculté de droit ne mentionne ni le grade, s’il en avait un, ni le régiment auquel appartenait Adolphe Sieurac.
139 Il figure dans le Livre d’or mais pas sur le tableau des « Étudiants de la Faculté de droit morts pour la France ».
140 Granié sur le tableau des « Étudiants de la Faculté de droit morts pour la France ».
141 Construite en 1820 le long du chemin reliant Minancourt au Mesnil-lès-Hurlus, la ferme de Beauséjour est, en 1914, un hameau que ses habitants ont évacué. Il a totalement disparu du fait des combats qui s’y sont déroulés.
142 Montoussé-Dulyon sur le tableau des « Étudiants de la Faculté de droit morts pour la France ».
143 Biraben sur le tableau des « Étudiants de la Faculté de droit morts pour la France ».
144 Il figure dans le Livre d’or mais pas sur le tableau des « Étudiants de la Faculté de droit morts pour la France ».
145 Id.
146 Id.
147 Id.
148 Id.
149 Id.
150 Selon l’Institut Pasteur, en quelques mois, la « grippe espagnole » fera cinquante millions de morts dont plus de 400 000 en France.
151 Ch. de Gaulle, Mémoires de guerre, Paris, Plon, rééd. 2016, p. 13-14.
152 Lieutenant-colonel Raymond Lafitte, L’artilerie d’assaut de 1916 à 1918, Paris-Limoges, éd. Henri Charles-Lavauzelle, 1921. Voir gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6570768 (consulté le 22 mars 2017). L’auteur ne mentionne pas l’action du 38e groupe d’artillerie d’assaut, mais celui du 3e composé de chars lourds Saint-Chamond. L’artillerie d’assaut est créée le 30 septembre 1916, Ibid.
153 Ce qui correspond à la tactique assignée aux chars moyens et lourds précédant l’infanterie pour leur ouvrir la voie.
154 Au soir du 18 juillet 1918, la contre-offensive française a réussi mais la seule Xe armée dont relève le groupement de Joseph Naon a perdu 102 chars sur les 223 engagés. Lieutenant-colonel Lafitte, op. cit.
155 Déjà, le 20 octobre 1914, Galvez Prévost de Saint-Cyr, 31 ans, licencié en droit le 12 juillet 1911, sergent au 280e régiment d’infanterie, croix de guerre, avait été tué à l’attaque du village de Vermelles (Pas-de-Calais) alors qu’il avait pris la place de son chef de section mis hors de combat et conduit « énergiquement » ses hommes à l’assaut.
156 L’équipage du char Renault se compose de deux hommes : le pilote et le chef de char. L’intervention des « chars légers » du 507e régiment d’artillerie d’assaut est confirmée par le lieutenant-colonel Raymond Lafitte, op. cit.
157 Bibliothèque universitaire de Toulouse, 90227, Rapport 1913-1914, p. 23.
158 M. Malherbe, La Faculté de droit de Bordeaux (1870-1970)…, op. cit., p. 50- 51. M. Milet, « La doctrine juridique pendant la Guerre : à propos de Maurice Hauriou et de Léon Duguit », Jus Politicum, n° 15, Le droit public et la Première Guerre Mondiale (janvier 2016), http://juspoliticum.com/numero/Le-droit-public-et-la-Premiere-Guerre-mondiale-67.html, p. 2.
159 Archives de l’Université des sciences sociales – Toulouse 1, 2Z2-16, p. 206.
160 Ibid., p. 219-220 (séance du 27 novembre 1915).
161 Parmi une riche bibliographie, voir : Ch. Charle, La République des universitaires, 1870-1940, Paris, 1994. A. Stora-Lamarre, F. Audren, J.-L. Halpérin, La République et son droit (1870-1930), Paris, 2011. F. Audren, J.-L. Halpérin, La culture juridique française. Entre mythes et réalités XIXe-XXe siècles, Paris, 2013. M. Milet, « La doctrine juridique pendant la Guerre : à propos de Maurice Hauriou et de Léon Duguit », Jus Politicum…, op. cit. C. Fillon, « De la chaire aux canons, les engagements combattants des enseignants des Facultés de droit pendant la Grande Guerre », Revue d’Histoire des Facultés de Droit et de la culture juridique du monde des juristes et du livre juridique, n° 35, 2015, p. 11-30.
162 C. Fillon, « De la chaire aux canons, les engagements combattants des enseigants des Facultés de droit pendant la Grande Guerre », op. cit.
163 Ibid., p. 13.
164 Ibid., p. 14.
165 Ibid., p. 28.
166 Bibliothèque universitaire de Toulouse, 90227, Rapport 1915-1916, p. 6.
167 Ibid. Rapport 1913-1914, p. 23-24 ; Rapport 1914-1915, p. 24 ; Rapport 1918- 1919, p. 6.
168 Loi du 17 août 1915 « assurant la juste répartition et une meilleure utilisation des hommes mobilisés ou mobilisables », dite « Dalbiez » du nom du député des Pyrénées-Orientales, Victor Dalbiez, lui-même injustement accusé par Le Cri de Paris d’avoir été envoyé « au front à Biskra, en Algérie » alors qu’il a réellement combattu d’août 1914 à août 1915. Ayant pour but de lutter contre la « plancomanie », elle permettra de récupérer quelques 350 000 hommes (dont un peu plus de 30 000 ouvriers mobilisés à l’arrière et fonctionnaires) qui, pour la plupart, seront versés dans le service armé). Selon son article 2 : « Dans les administrations, établissements et services publics, il sera pourvu au remplacement temporaire des fonctionnaires, agents ou sous-agents incorporés, de préférence 1°) Par des fonctionnaires, agents ou sous-agents retraités qui pourront, sur leur demande et s’ils sont reconnus aptes, être rappelés à l’activité pour la durée de la guerre… ». Voir, Ch. Ridel, « Le scandale des embusqués français dans la tourmente (1914-1918) », Parlement [s] Revue d’histoire politique, 2008/2, n° 10 : La guerre des mots. 14-18 dans les Parlements européens, p. 31-45.
169 Rapport 1914-1915, p. 24.
170 Rapport 1915-1916, p. 16 et p. 33.
171 Rapport 1917-1918, p. 9.
172 Ibid.
173 Rapport 1918-1919, p. 17.
174 F. Audren, J.-L. Halpérin, La culture juridique française…, op. cit., p. 123. Voir aussi : http://siprojuris.symogih.org/popup/commentaires/109811 (consulté le 25/02/2016).
175 M. Milet, « La Faculté de droit de Paris sous la Troisième République : une domination sans partage ? (1871-1939) », Paris, capitale juridique (1804-1950)…, op. cit., p. 162.
176 Ibid., p. 162.
177 Archives de l’Université des sciences sociales – Toulouse 1, 2Z2-14, p. 357 (procès-verbal du 23 juin 1906 inséré dans le registre).
178 Ibid., p. 364.
179 D. Espagno, Léon Duguit : de la sociologie et du droit, éditions L’Epitoge, 2013 et « Une rencontre entre Léon Duguit et Maurice Hauriou : l’analyse institutionnelle du service public », Mélanges offerts à Jean-Arnaud Mazères, Litec, 2008, p. 333- 351. M. Milet, « La doctrine juridique pendant la Guerre : à propos de Maurice Hauriou et de Léon Duguit », op. cit.
180 F. Cherfouh, Le juriste entre science et politique. La Revue générale du droit, de la législation et de la jurisprudence en France et à l’étranger (1877-1938), coll. « Bibliothèque d’histoire du droit et droit romain », t. 31, Paris, 2017, p. 267 et s.
181 Par exemple, G. Ripert, « L’idée du droit en Allemagne et la guerre actuelle », Revue internationale de l’enseignement, 1915, p. 169-183. Voir aussi M. Devigne, « Une ‘culture de guerre universitaire’ ? L’expérience des professeurs de l’enseignement secondaire français mobilisés dans la Grande Guerre », Amnis Revue de civilisation contemporaine Europes/Amériques, n° 10, Culture de guerre. Représenter et penser l’affrontement (XIXe siècle à nos jours), 2011 [en ligne]. On se reportera aussi aux contributions réunies dans le dossier « Le droit public et la Première Guerre mondiale », Jus Politicum…, op. cit.
182 M. Milet, Les professeurs de droit citoyens…, op. cit., p. 91.
183 Sur la pensée juridique allemande, O. Jouanjan, Une histoire de la pensée juridique en Allemagne, 1800-1918, coll. Léviathan, Paris, 2005, M. Stolleis et J.- L. Mestre, Histoire du droit public en Allemagne. 1800-1914, Paris, 1914 et J.-L. Halpérin, Histoire de l’état des juristes. Allemagne XIXe-XXe siècles, coll. Histoire du droit, n° 2, Paris, 2015, en particulier p. 259 et s.
184 J.-P. Allinne, « De la toge à la francisque. Joseph Barthélemy, un juriste entre République et réaction », Thémis dans la Cité : contribution à l’histoire contemporaine des facultés de droit et des juristes, Études réunies par N. Hakim et M. Malherbe, Pessac, 2009, p. 31-62.
185 M. Milet, Les professeurs de droit citoyens…, op. cit., p. 82.
186 Le Temps, 11 novembre 1914, p. 4.
187 Cité par M. Milet, Les professeurs de droit citoyens…, op. cit., p. 85 note 12.
188 Ibid., p. 84.
189 « Séance de rentrée de l’Université de Paris (20 décembre 1919) », Revue internationale de l’enseignement, t. 74, 1920, p. 15-24.
190 Ibid., p. 16.
191 Cité par J.-Fr. Condette, Les Facultés des lettres de Lille de 1887 à 1945 : une faculté dans l’histoire, Lille, 1999, p. 253.
192 Maurice Hauriou, Ecrits sociologiques…, op. cit., p. XL.
193 2Z2-16, p. 206-207, p. 217-218, p. 232-233, p. 272-273 et p. 292. Ces discours ont aussi été imprimés dans la presse à chaque rentrée universitaire.
194 J. Thabaut, Souvenirs de la Grande Guerre, Paris, 1917 (préface M. Barrès). La bibliothèque Germain Sicard (CTHDIP) de l’Université Toulouse Capitole possède un exemplaire dédicacé de l’auteur « À Monsieur le Doyen Hauriou, hommage respectueux de son élève ». Jules Thabaut, docteur en droit, avocat à la Cour d’appel de Toulouse, a servi en tant que lieutenant d’artillerie et achève son ouvrage « aux Armées, en octobre 1916 ».
195 2Z2-16, p. 217-218.
196 M. Milet, Les professeurs de droit citoyens…, op. cit., p. 84-86, p. 93-98 et p. 107-117. L’auteur souligne que la conception d’Hauriou se retrouve aussi chez Larnaude ou encore Ripert.
197 J.-M. Blanquer, « Hauriou, Maurice », Dictionnaire historique des juristes français…, op. cit., p. 516-519.
198 Les prises de positions morales se retrouvent dans le travail d’arrêtiste du doyen Hauriou, commentateur de la jurisprudence du conseil d’État. Un parallèle peut être établi entre le discours prononcé en 1916 devant les étudiants et la note que, peu de temps auparavant, il a rédigé sous « l’arrêt Astruc » (note sous CE, 7 avril 1916, Astruc et Société du théâtre des Champs-Elysées c. ville de Paris, Sirey 1913, 3. 41). Cet arrêt est connu pour avoir refusé la qualification de service public à un théâtre parce que l’activité se pratiquait sans aucune intervention de la personne publique. Mais Hauriou va plus loin, plaçant la question sur le terrain de « la moralité administrative », surtout « en ces heures graves de la guerre qui remettent à leur véritable place les valeurs sociales ». Il considère en effet que la juridiction administrative condamne la conception qui consisterait à « ériger en service public, comme à la période romaine, les jeux du cirque ». Et de s’en prendre aux conclusions du commissaire du gouvernement : car, au-delà des aspects de pure analyse juridique, la jurisprudence du Conseil d’État « doit reposer sur cette idée que l’entreprise de spectacles, dont l’exploitation renferme tant d’éléments de démoralisation, répugne par elle-même au service public, et, si le juge ne croit pas devoir avouer expressément ce fondement moral, il appartient à l’interprète de le mettre en évidence ». Ce à quoi il se livre sans délai ; les théâtres et autres entreprises de spectacle ont pour « inconvénient même […] d’exalter l’imagination, d’habituer les esprits à une vie factice et fictive, au grand détriment de la vie sérieuse, et d’exciter les passions de l’amour, lesquelles sont aussi dangereuses que celles du jeu et de l’intempérance ». Une allusion transparente lui permet au passage de s’étonner « qu’il existe des besoins publics contraires aux bonnes mœurs », même si « un instant de réflexion suffit à se convaincre qu’il n’en manque malheureusement pas, depuis ceux dont la satisfaction est simplement tolérée jusqu’à ceux qui sont satisfaits en des établissements payant ouvertement patente ».
199 M. Milet, Les professeurs de droit citoyens…, op. cit., p. 96.
200 F. Cherfouh, Le juriste entre science et politique…, op. cit., passim. F. Cherfouh, « La neutralité du discours des juristes face à l’Allemagne durant la Première Guerre mondiale », Les savants, la guerre, la paix, S. Mazauric (dir.), Actes du 136e Congrès national des Sociétés historiques et scientifiques, Éditions du CTHS, 2013, p. 68-80.
201 F. Cherfouh, Le juriste entre science et politique…, op. cit., p. 272-276.
202 M. Milet, « La doctrine juridique pendant la Guerre : à propos de Maurice Hauriou et de Léon Duguit », Jus Politicum, op.cit., p. 5-6.
203 Ibid.
204 Ibid., p. 10-18.
205 A. Stora-Lamarre, J.-L. Halpérin, F. Audren, La République et son droit…, op. cit.
206 F. Audren et M. Milet, « Maurice Hauriou sociologue : entre sociologie catholique et physique sociale », Ecrits sociologiques…, op. cit., p. V-LVII.
207 M. Milet, « La doctrine juridique pendant la Guerre : à propos de Maurice Hauriou et de Léon Duguit », op. cit., p. 7-8 citant aussi G. Sawicki, « Le droit prime la force : réalités et limites d’un principe républicain sous la Troisième République », A. Stora-Lamarre, J.-L. Halpérin, F. Audren, La République et son droit…, op. cit., p. 263-280.
208 Op. cit.
209 G. Sawicki, « Le droit prime la force : réalités et limites d’un principe républicain sous la Troisième République », op. cit., p. 263-265.
210 M. Milet, « La doctrine juridique pendant la Guerre : à propos de Maurice Hauriou et de Léon Duguit », op.cit., p. 8.
211 Ibid., p. 232-233.
212 E. Millard, « Hauriou et la théorie de l’institution », Droit & Société, 1995, p. 387.
213 Voir aussi sur le rôle des juristes allemands, J.-L. Halpérin, Histoire de l’état des juristes…, op. cit, p. 259-266.
214 J.-M. Blanquer, « Hauriou Maurice », Dictionnaire historique des juristes français…, op. cit., p. 518. Voir en dernier lieu, à propos notamment des articles publiés par Hauriou et de l’attaque de Maurras à son encontre, M. Milet, « La doctrine juridique pendant la Guerre : à propos de Maurice Hauriou et de Léon Duguit », op. cit.
215 M. Hauriou, « L’expédition de l’affaire courante », Le Figaro, 7 septembre 1915, p. 1 ; « Vers une confédération des puissances de l’Entente », Le Figaro, 4 mars, 2 mai et 27 mai 1916, p. 1.
216 M. Hauriou, « Le droit naturel et l’Allemagne », Le Correspondant, 25 septembre 1918, p. 914-939 (reproduit dans Aux sources du droit. Le pouvoir, l’ordre et la liberté, Paris, 1933).
217 M. Hauriou, « À la faculté de droit de Toulouse », Le journal des débats, 30 novembre 1914, p. 3.
218 « Le fondement de l’autorité publique. 1. Lettre du Pr. Hauriou, 2. Lettre du Pr. Berthélemy, 3. Réplique du professeur Hauriou », Revue du droit public et de la science politique en France et à l’étranger, fasc. 1, janvier-février-mars 1916, p. 20- 25. Voir M. Milet, « La doctrine juridique pendant la Guerre : à propos de Maurice Hauriou et de Léon Duguit », op. cit.
219 M. Milet, Les professeurs de droit citoyens…, op. cit., p. 110. Voir aussi la Revue du droit public et de la science politique, XXXII, 1915, p. 20-25 et tome XXXIII, 1916, p. 20-25.
220 M. Milet, « La doctrine juridique pendant la Guerre : à propos de Maurice Hauriou et de Léon Duguit », op. cit., p. 13-14.
221 J. Declareuil, « ‘Les discours de la Nation allemande’ de J.-Gottlieb Fichte », Revue du droit public et de la science politique en France et à l’étranger, t. 34, XXIVe année, 1917, p. 366.
222 Voir le compte-rendu de R. Grand, R.H.D.F.E., 1925, p. 646 qui critique cette « thèse trop absolue, réaction contre la thèse ultra-germanique qui ne l’est pas moins ».
223 Ch. Cézar-Bru, La législation des pensions des armées de terre et de mer et des victimes civiles de la guerre : Commentaire de lois du 31 mars et du 26 juin 1919, Bureaux des lois-nouvelles, Paris, 1919.
224 J. Begliuti, « Un juriste pacifiste avant 1914 : Alexandre Mérignhac », Ch. Mengès-Le Pape (dir.), Enseigner la guerre ?..., op. cit., p. 233-249 en particulier p. 236 et p. 242. Voir aussi Conférence aux étudiants américains sur l’arbitrage international. La doctrine de Monroe. La Société des Nations, Toulouse, Imprimerie Vve Bonnet, 1919, p. 58.
225 Sur la propagande française en Italie avec l’action du professeur grenoblois Julien Luchaire au sein de l’Institut français de Milan, S. Roussel, L’Université de Grenoble : les défis de l’autonomie (1896-1939), thèse d’histoire du droit, Communauté Université Grenobles Alpes, 2017, p. 377-384.
226 L. Polier, Les forces de la France d’hier et de demain, 2e éd., Lausanne, 1915. Les conférences sont intitulées : « La légende de la décadence française » ; « Les forces productives de la France » ; « L’or français » ; « La France au-delà des mers » ; « L’expansion de la langue française dans le monde » et « Le génie français ».
227 Ibid., p. 163.
228 Ibid., p. 167.
229 Commune du Pas-de-Calais. La bataille de Carency est livrée le 9 mai 1915 au cours de la seconde bataille de l’Artois, http://www.cheminsdememoire-nordpasdecalais.fr/lhistoire/batailles/la-seconde-bataille-dartois-9-mai-juin-1915.html (consulté le 20 avril 2017).
230 Cité par P.-L. Boyer, Un cercle intellectuel de province au cœur de l’évolution de la pensée juridique…, op. cit., p. 164 et note 872.
231 Voir Infra, Transcription, p. 248 : « Aux premiers jours de la guerre, c’est à son initiative et en grande partie avec ses deniers que fut organisé un hôpital de blessés dans sa ville natale ».
232 N. Foulquier, « La mobilisation de la Faculté de droit, le Comité national d’action pour la réparation intégrale des dommages causés par la guerre », Revue d’Histoire des Facultés de Droit et de la culture juridique du monde des juristes et du livre juridique, n° 35, 2015, p. 45-59.
233 Bibliothèque universitaire de Toulouse, 90227, Rapport 1915-1916, p. 8-9.
234 Rapport 1917-1918, p. 8.
235 Rapport 1915-1916, p. 9.
236 Rapport 1918-1919, p. 8.
237 Infra, Transcription, p. 208 et p. 209.
238 Sur cette question, qu’il nous soit permis de renvoyer aux développements plus nourris et repris en partie ici dans notre étude, F. Garnier, « Des mémoires et des hommes », Mélanges en l’honneur de Nicole Dockès-Lallement, L.-A. Barrière et D. Deroussin (dir.), Paris, 2017 (sous presse).
239 American University Union in Europe, s.n., 1919, p. 9 [en ligne] : https://babel.hathitrust.org/cgi/pt?id=mdp.39015063769411;view=1up;seq=9(consulté le 15 février 2017).
240 A.E. Cornebise, Soldier-scholars : Higher Education in the A.E.F., 1917-1919, vol. 221, American Philosophical Society, Philadephia, 1977, p. 138.
241 F. Olivier-Martin, « Éloge funèbre de M. Charles Petit-Dutaillis, membre de l’Académie », Comptes rendus des séances de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 91e année, n° 3, 1947, p. 456-463 spécialement p. 458.
242 C. Bouglé, « L’Université franco-américaine », Revue de Paris, 26, t. 3, 1919, p. 750-765. S. H. Bush, « Un détachement de l’armée américaine dans les écoles de Paris », Revue internationale de l’enseignement, t. 74, 1920, p. 345-358. M. Hanna, « French Women and American Men : ‘Foreign’ Students at the University of Paris, 1915-1925 », French Historical Studies, vol. 22, n° 1, 1999, p. 87-112.
243 Bibliothèque universitaire de Toulouse, 90227, Rapport 1920, p. 48-50. C. Barrera, « Les étudiants-soldats américains en France au sortir de la Première Guerre mondiale », op. cit., p. 32.
244 Archives de l’Université des sciences sociales – Toulouse 1,2Z2-16, p. 278-279 et p. 291.
245 Ibid., p. 280 : « M. Dugarçon fait connaître dans quelles conditions les étudiants Américains annoncés seront hébergés et logés à la Poudrerie de Toulouse. Il expose la question de l’installation de l’éclairage électrique de la Faculté. Au nom de la Faculté, M. le Doyen remercie M. Dugarçon de son dévouement et le félicite de sa compétence. // L’Assemblée arrête ensuite les jours, heures et sujets des leçons que les professeurs de la Faculté de Droit décident de faire aux étudiants Américains ».
246 Conférence aux étudiants américains sur l’arbitrage international…, op. cit., p. 59.
247 Gaston Monnerville qui suivit le cours de droit civil dispensé par Achille Mestre, se souviendra en ces termes de son professeur, au demeurant parfois quelque peu immodeste : « C’était un homme d’une intelligence vive, claire, attirante ; un esprit très compréhensif, à la méthode directe, recherchant le dialogue avec l’étudiant, s’efforçant de nous ouvrir l’esprit plutôt que de nous meubler la mémoire de notions abstraites. Il était un musicien de valeur et un pianiste réputé, qui jouait de mémoire beaucoup d’œuvres d’auteurs classiques ou modernes : Mozart, Bach, Beethoven, Chopin ; ou Debussy, Fauré, Ravel. Jusqu’à sa mort, survenue à plus de quatre-vingts ans, Achille Mestre alla régulièrement, tous les ans, à la saison Mozart à Salzbourg, ou à Bayreuth suivre la saison wagnérienne. Cet esprit éclectique eut l’heureuse initiative de créer un cycle de conférences musicales hebdomadaires ouvertes à tous ceux qui s’intérressaient à la musique. Elles firent florès, le grand amphithéâtre de la faculté de droit était archi-comble. Achille Mestre traitait chaque année d’un ou de deux grands musisciens français ou étrangers. Originalité : il s’accompagnait lui-même au piano, et enrecoupait son exposé d’extraits des œuvres de ces auteurs, commentant tel trait, analysant tel mouvement, recréant sous nos yeux, peu à peu, l’œuvre du Maître dont il nous entretenait. C’était vraiment de la musique vivante ! […] Pour donner une définition de la Musique, ou mieux, pour expliquer cette expression : faire de la musique, il nous disait : ‘L’œuvre de l’auteur est couchée là, dans ce cahier, comme un Lazare emmailloté dans ses bandelettes. Moi, malheureux homme de chair et d’os, avec mes muscles et mes nerfs, mes bras et mes doigts, au moyen de cette boîte en bois des îles renfermant des cordes métalliques sur lesquelles viennent tomber des marteaux en communication avec ces touches faites de l’ivoire des animaux de la jungle, j’attaque l’introduction dont les notes soulèvent la pierre du sépulcre, et l’âme de Beethoven se lève, la sonate sort, grandit et chante ! ’ […]. Les conférences du professeur Achille Mestre avaient une autre vertu : elles étaient en même temps un bain de culture générale et une leçon de volonté. Les souffrances de l’artiste qui créé son œuvre, cette sorte de parturition souvent douloureuse, nous étaient présentées comme un exemple, non seulement à admirer, mais à suivre », G. Monnerville, Témoignage, t. 1, op. cit., p. 73-75. Voir aussi J.-M. Blanquer et M. Milet, L’Invention de l’État, op. cit., p. 275 rapportant qu’A. Mestre dispense un cours d’histoire de la musique à la Faculté de lettres en 1920-1921.
248 Qu’est-ce que c’est ?, 26 mars 1919, n° 2, p. 1.
249 Bibliothèque universitaire de Toulouse, 90227, Rapport 1920, p. 54-55.
250 Archives de l’Université des sciences sociales – Toulouse 1, 2Z2-16, p. 281-282.
251 C. Barrera, « Les étudiants-soldats américains en France au sortir de la Première Guerre mondiale », op. cit., p. 39.
252 Qu’est-ce que c’est ? (published weekly by the American students of the University of Toulouse), Bibliothèque universitaire de l’Arsenal, SCD Toulouse I, Service du livre ancien, Res. 400532.
253 Bibliothèque universitaire de Toulouse, 90227, Rapport 1918-1919, p. 67.
254 Depuis la réception solennelle en l’église des Jacobins qui se tient le 9 mars 1919 sous la présidence du recteur Cavalier jusqu’au Memorial Day le 26 mai 1919 (Qu’est-ce que c’est ?, 19 mars 1919, n° 1 p. 1 et 4 juin 1919, n° 12, p. 3).
255 C. Barrera, Étudiants d’ailleurs…, op. cit., p. 197-201.
256 Ibid., 21 mai 1919, n° 10, p. 3.
257 Ibid., 28 mai 1919, n° 11, p. 3.
258 Ibid., 30 juin 1919, n° 14, p. 3. « The French law professor does not act as counselor to corporations, not enter into politics. He does not give conference to womens clubs. When he is not delivering his lectures, he is in his study reading, reflecting, digesting. Such a scholar is Maurice Hauriou, dean of the Faculty of Law of Toulouse University. His work on administrative Law is the reorganized standard in France. His analytical study of the theory of national sovereignty is world known. The Harvard Law Review of April 1918 says of these essays : ‘ He has shown with high distinction the way in wich law emerges as the balance between conficting and cooperative forces’. But Dean Hauriou is primarily a leader and not a writer. He has no office, no stenographers, no card index system – Yet he has organized a law school that is unique and known throughout France. He has arranged the courses so that after three years of general lectures the students go over the same doctorate course in groups of four or five. The dean prefers to give these doctorate courses himself. With his students he goes into the basis of each law, and each decision. Theorist, sculptor, delver into the secret of government, he is yet the intimate coworker of every student in his faculty ».
259 Ibid., 26 mars 1919, n° 2, p. 1.
260 Ibid., 19 mars 1919, n° 1, p. 1.
261 Le doyen Hauriou, au cours de la séance du 19 mars 1919, « … fait connaître à l’Assemblée que M. le Recteur et M. le doyen Guy ont adressé leurs plus chaleureux remerciements à M. Dugarçon pour le dévouement et l’habileté dont il a fait preuve dans l’organisation de la fête universitaire donnée pour la réception des Étudiants Américains en l’église des Jacobins le samedi 15 mars courant. M. le Doyen rappelle le beau succès de cette fête et, se faisant l’interprète de ses collègues, il adresse à M. Dugarçon les meilleures félicitations de la Faculté » (Archives de l’Université des sciences sociales – Toulouse 1, 2Z2-16, p. 280).
262 Bibliothèque universitaire de Toulouse, 90227, Rapport 1918-1919, p. 69.
263 Ibid., p. 18.
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