La France et la convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique – beaucoup de bruit pour rien ?
p. 273-293
Texte intégral
1C’est en 1686 qu’eut lieu le naufrage du navire français La Belle. René Robert Cavelier de La Salle avait été mandaté par Louis XIV pour coloniser l’embouchure du Mississipi. Alors que l’embarcation se trouvait dans le golfe du Mexique, les hommes de La Salle n’ont su la contrôler face à une violente tempête dans la Matagorda Bay. L’accident mit fin à l’entreprise d’implantation française. Tout d’abord découverte par les Espagnols dès 1686, l’épave est ensuite tombée dans l’oubli pendant plusieurs siècles. En 1995, elle fut retrouvée par une équipe de chercheurs américains opérant sous l’égide de la Texas Historical Commission. Après que les équipes locales aient retrouvé nombre d’objets militaires, de biens destinés à l’accomplissement de la mission, notamment en matière religieuse, de restes humains, etc., la France a demandé officiellement que son droit de propriété sur le navire soit reconnu, en prenant appui sur la circonstance qu’elle était l’Etat du pavillon. Par un accord du 31 mars 2003 avec le gouvernement des Etats-Unis d’Amérique, les droits de la France sur le navire ont été reconnus : « La République française n’a ni abandonné ni transféré son droit de propriété sur l’épave La Belle et exerce toujours les mêmes droits sur ladite épave »1. Pourtant, le retour de l’épave n’est pas requis : l’accord opte pour un prêt de quatre-vingt-dix-neuf ans, tacitement reconductible, de la France à la commission. En échange, la commission s’engage de son côté à prêter les biens trouvés pour des expositions publiques destinées à faire connaître l’histoire de l’épave, de l’expédition et de la région2.
2 Cette affaire eut un certain retentissement en France, car elle mettait en balance les droits de l’Etat côtier et du découvreur du navire d’Etat, d’une part, avec ceux de l’Etat du pavillon et de l’Etat d’origine du bien, d’autre part. Le règlement ad hoc qui a été trouvé a permis de mettre en évidence la possibilité de solutions équilibrées ne lésant pas les droits de l’Etat français sur des biens situés dans des eaux étrangères et avec lesquels il entretient des liens historiques. L’affaire de La Belle est de plus survenue à un moment décisif pour le règlement de ces questions, puisqu’elle a coïncidé avec la préparation, la conclusion puis les débuts de la convention pour la protection du patrimoine culturel subaquatique. Ce traité prétend précisément remédier aux situations dans lesquelles une découverte subaquatique met aux prises les droits de deux Etats.
3La convention signée le 6 novembre 2001 répond à un véritable besoin normatif. Avant elle, ces questions étaient partiellement résolues par le cumul d’instruments épars, bien souvent de droit mou, et par le recours à des solutions au cas par cas. La Recommandation définissant les principes internationaux à appliquer en matière de fouilles archéologiques contient des prescriptions applicables en matière de sites et de biens situés dans la mer territoriale des Etats membres de l’UNESC03. Elle se concentre sur la protection des biens, la concession et l’organisation des fouilles et la « collaboration internationale ». L’hypothèse d’une concurrence relative aux droits sur un élément particulier du patrimoine culturel subaquatique n’y est pas envisagée, pas plus que celle dans laquelle le patrimoine se trouverait en dehors d’un espace territorial étatique. Certes, la convention des Nations unies sur le droit de la mer vient remédier à certaines de ces carences. Ce traité quasi universel pose des règles pleinement obligatoires dont certaines sont spécifiquement dédiées à la question de l’archéologie sous-marine. Pourtant, ces règles ne constituent pas, ensemble, un tout cohérent et complet de nature à parfaire pleinement le régime juridique des biens culturels subaquatiques4. Pour exemple, la convention de Montego Bay ne mentionne pas la question des biens culturels situés sur le plateau continental. Si elle évoque pour la première fois dans un instrument international contraignant la possibilité de droits préférentiels au bénéfice de l’Etat historiquement lié à des éléments du patrimoine culturel subaquatique déterminés, c’est dans le cadre de la définition du régime de la zone, c’est-à-dire dans les hypothèses où de telles prérogatives nouvelles ne sont pas susceptibles d’entrer en conflit avec les droits territoriaux d’un Etat côtier5. La convention ainsi rédigée laisse donc entière la question soulevée par l’affaire de La Belle, par exemple.
4D’autres instruments internationaux sont encore venus compléter ce dispositif préexistant au texte de 2001. La convention de l’UNESCO concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels, conclue le 14 novembre 1970, interdit ainsi implicitement les mouvements transfrontaliers de biens archéologiques subaquatiques sans autorisation et en contradiction avec la loi de l’Etat côtier, puisqu’elle prévoit que « [s]ont illicites l’importation, l’exportation et le transfert de propriété des biens culturels, transfert de propriété des biens culturels, effectués contrairement aux dispositions prises par les Etats parties en vertu de la présente convention »6. La convention du patrimoine mondial, enfin, garantit aux biens subaquatiques inscrits sur la Liste du patrimoine mondial7 la même protection qu’aux autres biens de cette liste. Autrement dit, pour les biens culturels sous-marins situés dans le cadre d’un espace soumis à la juridiction territoriale d’un Etat, le régime juridique du patrimoine mondial vient en renfort du dispositif interne lorsque cela s’avère nécessaire. Les droits sur le bien ne sont néanmoins nullement affectés par la circonstance qu’il soit inscrit sur la liste.
5Ces différents instruments internationaux présentent l’inconvénient majeur de ne pas être centrés sur les problématiques propres au patrimoine culturel subaquatique. Ensemble même, ils ne permettaient guère d’épuiser toutes les configurations, ni de résoudre toutes les difficultés. Après que les travaux de la commission de la culture et de l’éducation du Conseil de l’Europe (1976), deux textes de soft law ont été proposés, respectivement par l’International Law Association (1994)8 et l’Assemblée générale du Conseil international des monuments et des sites (ICOMOS)9, mais ils n’ont pas abouti à la conclusion d’un texte contraignant. La convention élaborée dans le cadre de l’UNESCO a alors constitué le premier instrument mondial de droit positif dans ce domaine.
6La convention de l’UNESCO a été signée le 2 novembre 2001 à Paris dans le cadre de l’UNESCO. Conçue comme un instrument à la fois de codification et de développement progressif du droit positif10, elle « vise à assurer et renforcer la protection du patrimoine » (art. 2). Elle se conçoit comme un instrument proposant un traitement global de la question du patrimoine culturel subaquatique. La convention a un objet relativement large : « On entend par "patrimoine culturel subaquatique" toutes les traces d’existence humaine présentant un caractère culturel, historique ou archéologique qui sont immergées, partiellement ou totalement, périodiquement ou en permanence, depuis 100 ans au moins ». Une énumération non limitative fait ensuite état des différents types de biens susceptibles d’être concernés11. Ainsi, le régime conventionnel ne se limite pas aux épaves qui, si elles constituent 95 % du patrimoine culturel subaquatique, coexistent avec des sites, des restes humains, des amphores ou colonnes romaines, etc. Le patrimoine culturel subaquatique, c’est ainsi tant l’épave du Titanic que le phare d’Alexandrie.
7La convention de Paris repose sur des principes clairs qui visent à assurer une balance entre les intérêts du patrimoine d’une part, et le respect des droits des Etats en mer tels que les a reconnus la convention des Nations unies sur le droit de la mer d’autre part. L’équation était complexe. Elle a été résolue de par l’éviction des droits de l’assistance et des trésors12 au bénéfice d’un droit nouveau, conforme à la convention de Montego Bay et plus adapté aux besoins du patrimoine13. De plus, ont été établis un certain nombre de principes et de règles fondamentaux destinés à satisfaire les objectifs de la convention, au premier rang desquels la conservation in situ14. Est également recherchée la mise en place d’une politique de conservation à long terme des biens découverts. Les biens culturels concernés ne sauraient, par ailleurs, faire l’objet d’une exploitation commerciale (vente, troc...)15. Enfin, la convention de 2001 pose une exigence générale de coopération entre Etats16.
8Comme toute convention internationale relative au patrimoine culturel, et comme toute convention relative au droit de la mer, la convention pour la protection du patrimoine culturel subaquatique a besoin, pour que le régime juridique qu’elle met en place soit efficace, d’atteindre une certaine universalité. Or, lors de l’adoption de la convention dans l’enceinte de l’Unesco, si quatre-vingt-sept Etats ont voté pour le texte, quatre ont voté contre, et quinze se sont abstenus, dont la France. Nous sommes ici face à des chiffres comparables à ceux qui ont concerné la convention pour la protection du patrimoine mondial en 1972, et qui n’ont guère empêché celle-ci de devenir quasi universelle17. La convention de 2001 pourrait connaître un rayonnement plus timide parce qu’elle suppose plus clairement de la part des Etats l’adoption de mesures déterminées, d’une politique internationale, et la mise en conformité de leur droit interne. L’on relèvera néanmoins que cet argument n’est pas nécessairement décisif : la convention concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriété illicite des biens culturels, qui requiert des Etats la mise en conformité de leur droit interne, lie aujourd’hui quasiment les deux tiers des Etats de la planète18, et a été considérée par plusieurs juges nationaux comme énonçant des règles d’ordre public international19.
9L’étude du cas français permet de tirer des enseignements plus larges quant aux rapports que nombre d’Etats ont entretenu, voire entretiennent, avec la convention de 2001. Tout d’abord, la France faisait partie, en raison de l’importance qu’y revêt le patrimoine archéologique sous-marin historiquement et quantitativement, des Etats potentiellement les plus intéressés par la conclusion d’un nouvel instrument international. De plus, la France est un Etat dont les hésitations face à cet instrument neuf sont caractéristiques de nombre de questions centrales pour le droit de la mer et la protection juridique du patrimoine culturel subaquatique en droit international. Enfin, la France constitue un Etat dont la participation pouvait être considérée comme décisive pour la réussite générale de la démarche conventionnelle.
10Pourtant, du point de vue des autorités françaises, le projet de convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique a soulevé bon nombre d’interrogations. Au cours des travaux préparatoires, menés au sein de l’UNESCO, la France a émis un certain nombre de réserves de questionnements. A l’issue des négociations, toutes les propositions françaises n’ayant pas été retenues, la question s’est posée de savoir si et à quelles conditions la France devait accepter d’être liée par une convention dont la visée protectrice ne pouvait bien entendu qu’être saluée, mais qui impliquerait que soient réalisés certains compromis, ou pris certains risques.
11Une analyse d’ensemble montre que l’exemple de la France s’avère plutôt encourageant pour l’avenir de la convention pour la protection du patrimoine culturel subaquatique. En effet la France, après avoir fait preuve d’une position initiale réservée (I), a finalement ratifié la convention. Voilà qui soulève désormais la question de sa mise en œuvre en droit français (II).
I – Avant la ratification, le doute
12Une part importante du patrimoine maritime français étant situé loin des côtes, la convention a tout d’abord été perçue comme un risque pour les intérêts de la France et pour ses droits sur ses biens culturels subaquatiques. Certes, la France n’a guère été la seule à exprimer des doutes à propos du projet de traité. D’autres participants aux travaux préparatoires adoptent une position réservée à l’égard de la convention. Ce fut le cas tout d’abord des grandes puissances maritimes ; en attestent les positions initiales de méfiance de la Norvège et la Fédération de Russie, qui votèrent contre le texte, mais aussi de l’Allemagne, des Pays-Bas et du Royaume-Uni, qui comptèrent parmi les abstentionnistes, ou encore les Etats-Unis d’Amérique, bien que, non membres de l’UNESCO, ils ne purent prendre part au vote. Les Etats proposant un pavillon de complaisance, ainsi que des Etats de la région Asie-Pacifique20 ont également exprimé nombre de réserves au cours des négociations.
13L’on relèvera que la quasi impossibilité pour les Etats parties de formuler des réserves, telle que l’organise l’article 30 de la convention21, n’a sans doute pas aidé la France à franchir le pas et à devenir immédiatement partie à la convention de 2001. Plusieurs reproches ont été formulés à l’encontre du projet de traité, dont la plupart avaient trait à son articulation avec le droit antérieur, et plus précisément avec la convention du droit de la mer signée à Montego Bay le 10 décembre 1982.
14Tout d’abord, la France a exprimé des doutes relativement au champ d’application matériel de la nouvelle convention de 2001 : la définition retenue pour le patrimoine culturel subaquatique a été critiquée lors des travaux préparatoires et a fait l’objet d’amendements22. Ensuite, aux yeux de la France, le sort des navires de guerre constituait également une question sensible. Traditionnellement, ceux-ci bénéficient d’une immunité, dans la mesure où leur fonction les relie naturellement au souverain. Cette immunité suppose notamment l’interdiction de tout acte d’investigation à bord d’un navire de guerre, que ce soit en haute mer ou dans les eaux et ports étrangers (volet policier de l’immunité)23. Lors des négociations sous l’égide de l’UNESCO, la France, mais aussi les Etats-Unis, la Russie, l’Allemagne et le Royaume-Uni ont entendu garantir le statut particulier de ces navires. Selon ces derniers, l’Etat du pavillon devait préserver ses droits exclusifs sur ces biens, droits qui ne pouvaient prendre fin qu’en cas de renonciation expresse de la part du souverain. Il s’agissait ainsi d’empêcher qu’un Etat ou une personne privée ne puisse accomplir la moindre action sans l’autorisation de l’Etat d’origine du navire, la logique de préservation des intérêts et éventuellement secrets d’Etat primant toute autre, notamment patrimoniale. Le texte de la convention de 2001 prévoit que, dans sa mer territoriale et ses eaux archipiélagiques, un Etat côtier a la possibilité de consulter l’Etat du pavillon en cas de découverte. Voilà ce qui est susceptible de poser problème eu égard aux navires de guerre ayant sombré dans ces espaces, les droits de l’Etat du pavillon n’étant pas suffisamment préservés. Aussi la France avait-elle exprimé son désaccord avec le texte en négociation sur ce point lors des travaux préparatoires.
15En outre, de nombreuses interrogations et doutes quant à l’articulation du texte nouveau avec la convention des Nations unies sur le droit de la mer ont surgi. Avant toutes choses, il est apparu aux experts et plénipotentiaires français qui ont eu à s’exprimer au cours de l’élaboration du texte que le projet de convention de l’UNESCO ne réduirait pas les brèches du dispositif la convention des Nations unies sur le droit de la mer24. Si ce texte prétend opérer un règlement général des questions relatives au droit de la mer, il ne consacre que de rares dispositions au patrimoine culturel subaquatique, et laisse par conséquent nombre de points en suspens. Pour exemple, elle n’a pas prévu de régime juridique spécifique concernant le sort des biens culturels situés entre la fin de la zone contiguë et le plateau continental25. De manière plus fondamentale, la question du respect par la nouvelle convention de l’économie de la convention mondiale de codification est sans doute celle qui a le plus fait difficulté au cours des négociations26. L’équilibre entre les prétentions des Etats côtiers et ceux des Etats de pavillon des navires a été très délicat à établir en 1982 ; il est incarné par le fameux « package deal », destiné à enrayer les risques de « creeping jurisdiction ». Il ne s’agirait pas, dès lors, de prendre le risque de perturber cet acquis incontestable27. En outre, la convention de Montego Bay met en place, en sa partie XV, un mécanisme de règlement des différends en matière maritime dont l’article 287 suppose le choix par les Etats parties d’un ou de plusieurs moyens pour régler les questions relatives à l’interprétation ou l’application de la convention (Tribunal international du droit de la mer, Cour internationale de justice, arbitrage). La France a cherché à garantir cet acquis lors des travaux préparatoires. Les rédacteurs de la convention de l’UNESCO, conscients de ces enjeux de coordination, ont entendu préciser dès l’article 3 comment concilier les deux instruments internationaux :
16« Aucune disposition de la présente convention en porte atteinte aux droits, à la juridiction et aux devoirs des Etats en vertu du droit international, y compris la convention des Nations unies sur le droit de la mer. La présente convention est interprétée et appliquée dans le contexte, et en conformité avec les dispositions du droit international, y compris la convention des Nations unies sur le droit de la mer ». Le droit international général, et notamment la convention de 1982, priment ainsi sur la convention de 2001. La convention de Paris se conçoit comme complémentaire de celle de Montego Bay.
17De manière plus spécifique, les enjeux pour la France concernent essentiellement la question de l’articulation des compétences entre Etat côtier et Etat d’origine, en particulier dans le cas des navires d’Etat. La convention de 2001 propose plusieurs règles qui visent à concilier les intérêts de chacun des Etats concernés en cas de découverte dans la zone économique exclusive ou sur le plateau continental (art. 9 et 10). Ainsi, les découvertes doivent être obligatoirement déclarées aux Etats parties concernés, c’est-à-dire à l’Etat côtier et à l’Etat de pavillon ; la déclaration est ensuite transmise à l’ensemble des Etats parties, chacun pouvant, s’il présente « un lien vérifiable, en particulier un lien culturel, historique ou archéologique, avec le patrimoine culturel subaquatique considéré », demander à être consulté « sur la manière d’assurer la protection effective de ce patrimoine. L’Etat côtier devient ensuite « Etat coordonnateur », et consulte les autres Etats intéressés en cas d’intervention. Ce n’est qu’exceptionnellement, en cas d’urgence ou afin d’empêcher toute atteinte à ses droits souverains ou à sa juridiction, que l’Etat côtier se trouve habilité à agir seul. Un tel régime juridique paraît protecteur des droits des Etats d’origine. Il n’en prévoit pas moins une position privilégiée pour l’Etat côtier : celui-ci préserve non seulement une marge de manoeuvre dont l’ampleur est incertaine lorsqu’il est conduit à agir de manière unilatérale, mais également un droit de veto de facto dans toutes les hypothèses, en sa qualité de coordonnateur des opérations28.
18En somme, quelques éléments mis à part, la plus grande part des critiques françaises à l’égard du projet de convention tenaient à l’articulation des droits souverains, et plus précisément à la définition d’un point d’équilibre entre droits de l’Etat côtier et droits de l’Etat du pavillon. C’est donc bien le risque de perdre des droits en tant qu’Etat du pavillon face à l’Etat côtier, notamment dans le cas des navires qui ont échoué dans les eaux territoriales d’un autres Etat, qui est à l’origine des principales réticences françaises. Car en ce qui concerne les aspects patrimoniaux, la convention de l’UNESCO garantit plutôt une meilleure protection que le droit antérieur des éléments du patrimoine culturel subaquatique, en assurant une préservation des sites et la mise en place d’une coopération effective29.
19L’observation comparée des deux textes prouve que dans le cas d’éléments situés dans la mer et dans les eaux territoriales, c’est-à-dire à l’intérieur même d’un territoire maritime national, l’Etat disposait d’ores et déjà de compétences exclusives en matière économique et policière avant la convention de Paris ; or ce texte lui impose désormais de prendre en considération les droits des Etats d’origine des biens culturels subaquatique lors de la prise de décision. Dans la zone contiguë, qui prolonge de douze miles marins la mer territoriale, le régime mis en place par la convention de Montego Bay était ambigu : l’article 303, § 2, prévoit que « Pour contrôler le commerce de ces objets [archéologiques et historiques découverts en mer], l’Etat côtier peut, en faisant application de l’article 33 [qui porte sur la zone contiguë], considérer que leur enlèvement du fond de la mer dans la zone visée à cet article, sans son approbation, serait cause d’une infraction sur son territoire ou dans sa mer territoriale, aux lois et règlements de l’Etat côtier visés à ce même article ». Cette disposition a donné lieu à de nombreux débats, relatifs à la question de savoir si une nouvelle zone de compétence avait été créée en matière patrimoniale. L’idée d’une « zone archéologique marine », et donc d’un renouvellement de la logique de découpage des espaces marins a été soutenue par une partie de la doctrine30, l’autre la rejetant énergiquement et ne voyant dans l’article 303, § 2, que la mise en place d’une nouvelle compétence fonctionnelle de l’Etat côtier31. La convention de 2001 ne répond pas à ces interrogations ; elle continue néanmoins de développer les prérogatives de l’Etat côtier sans pour autant créer de nouvel espace géographique marin : « les Etats parties peuvent réglementer et autoriser les interventions sur le patrimoine culturel subaquatique dans leur zone contiguë »32. Pour ce qui est de la zone économique exclusive (ZEE), traditionnellement conçue comme l’espace dans lequel l’Etat côtier exerce des droits économiques, la convention de Montego Bay ne prévoyait rien de particulier en matière culturelle. La convention de Paris précise pour sa part les obligations et droits respectifs de chacun des Etats : l’Etat territorial a des obligations de protection et d’information des autres Etats, et les Etats ayant un lien vérifiable avec le patrimoine subaquatique peuvent demander à être consultés sur les moyens de la protection33. Il en est de même lorsque ces biens se trouvent sur le plateau continental au sens de la convention de l’UNESCO, alors que la convention de Montego Bay restait silencieuse sur la question. Enfin, dans la zone, la dialectique est différente, puisqu’elle s’organise entre communauté internationale et Etat(s) d’origine du patrimoine culturel subaquatique34. En somme, une lecture croisée des deux textes démontre que le risque de voir la gestion d’un navire français confiée principalement à un Etat côtier étranger n’est pas significativement aggravé par la convention de 2001, les difficultés potentielles se concentrant sur certains espaces.
20D’ailleurs, la pratique consécutive a sans doute contribué à dissiper certaines craintes. Les droits de la France ont été reconnus dans des situations, comme celles de La Belle ou des bateaux de La Pérouse perdus dans l’Océan pacifique près des Iles Salomon. Dès 2011, les autorités françaises ont entendu, dans une déclaration publique à part, proposer une modification de l’article 7, § 3, du projet de traité afin de substituer une véritable obligation de consultation de l’Etat du pavillon à ce qui n’est en droit qu’une possibilité en cas de découverte dans les eaux archipélagiques ou la mer territoriale35. La France, une fois sa volonté connue, pouvait plus aisément signer et ratifier la convention de l’UNESCO, et en dépit de l’absence de conséquences juridiques de cet énoncé36. Un autre facteur, plus factuel, a également conduit Paris à finalement opter pour la ratification. Une réelle augmentation de la fréquence des attaques contre le patrimoine archéologique subaquatique, et essentiellement contre les épaves des grandes puissances maritimes historiques, a été constatée37. Dans un tel contexte, « après consultation interministérielle, la conclusion s’est imposée qu’en dépit de ses imprécisions, la convention constituait le seul instrument par lequel la France pouvait un tant soit peu protéger le patrimoine archéologique reposant sur son plateau continental de la cupidité des chasseurs d’épave »38.
21La convention était entrée en vigueur après le dépôt des instruments de ratification de trente Etats, soit le 2 janvier 2009. La France, après avoir observé de près les travaux des Etats parties, a finalement ratifié le traité en 2013, de sorte qu’il est entré en vigueur à son égard le 7 mai 201339. Elle a, ce faisant, suivi les pas de nombreux Etats de l’Union européenne et réduit la liste des grandes puissances maritimes exclues du régime de la nouvelle convention, laissant dans cette catégorie les Etats-Unis d’Amérique et le Royaume-Uni. Le volet diplomatique de l’affaire étant clos, restait à donner une réalité aux dispositions conventionnelles dans le droit interne.
II – Après la ratification, l’attente
22La France allait-elle, dans un second temps, aller au bout de sa démarche, et donner plein effet aux dispositions de la convention du 2 novembre 2001 ? La convention consacre quelques dispositions aux modalités de sa mise en œuvre. Il y apparaît que les Etats parties ont l’obligation positive de prendre des mesures permettant de garantir la protection du patrimoine subaquatique : en vertu de l’article 2, § 4, en effet, « [l]es Etats parties prennent (...) toutes les mesures appropriées, conformément à la présente convention et au droit international, qui sont nécessaires pour protéger le patrimoine culturel subaquatique, en employant à cette fin les moyens les mieux adaptés dont ils disposent, et selon leurs capacités respectives ».
23L’obligation générale ainsi énoncée constitue une obligation de moyens : elle tient compte des possibilités de chaque Etat, et s’avère être de réalisation progressive. La France a donc l’obligation de faire le nécessaire pour satisfaire, à la hauteur de ses possibilités, ses engagements internationaux et les objectifs de la convention. Dès lors, la question se pose de savoir si la France se conforme bel et bien à cette exigence. Pour l’heure, force est de constater qu’aucun texte de droit autre que le décret d’application n’a été adopté suite à la ratification française. Pour autant, l’adoption de la convention ne devrait pas être dépourvue de conséquences sur le droit français, puisque la future loi du patrimoine, en préparation alors que nous écrivons, devrait comporter des clauses consacrées à l’insertion des exigences conventionnelles dans le droit interne40. Certes, la convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique serait certainement considérée, du point de vue du droit interne, comme dépourvue d’effet direct, et ne requérant aucune mesure de mise en oeuvre : interrogé sur ce point, le juge administratif, selon lequel une stipulation d’une convention internationale est d’effet direct si elle n’a pas pour objet exclusif de régir les relations entre les États, et ne suppose pas l’intervention d’actes complémentaires pour produire des effets à l’égard des particuliers, soulignerait certainement que la convention concerne avant tout les relations interétatiques41, voire est dépourvue d’un degré suffisant de précision42.
24Pourtant, sur le fondement du droit international, la France a bel et bien l’obligation de respecter de bonne foi le traité conclu, et par conséquent de se conformer à l’article 2, § 4 en adoptant les mesures normatives nécessaires pour mettre en conformité son droit interne avec les exigences conventionnelles. Les directives opérationnelles viendront d’ailleurs préciser prochainement les obligations des Etats parties43, et une proposition de résolution soumise à la cinquième session de la conférence des Etats parties pour adoption à la fin du moins d’avril 2015 « Invite les États parties à totalement harmoniser leur législation nationale avec la convention, si cela n’est pas déjà fait, et à améliorer le développement d’outils juridiques cohérents permettant de transposer les mesures de protection du patrimoine prévues par les instruments normatifs de l’UNESCO dans les législations et les politiques nationales »44. Des mesures nationales de mise en œuvre paraissent donc opportunes suite à la ratification de la convention ; elles en constituent tout au moins la suite logique, et sont obligatoires au sens du droit international. Elles ont d’ailleurs été envisagées dès l’origine. En effet, aux côtés de la possibilité de retombées en matière d’emplois et de bénéfices économiques et environnementaux, le rapporteur de la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale a également évoqué, parmi les conséquences de la ratification française, nombre d’aspects juridiques ; aussi les autorités françaises n’entendaient-elles pas laisser la ratification sans lendemain45. Une mise en œuvre des objectifs de la convention en droit interne a donc bel et bien été envisagée dès l’origine.
25De l’inaction des autorités françaises suite à la ratification, l’on ne saurait donc déduire que la convention n’impliquerait pas, en l’état actuel du droit, de modifier les règles internes d’ores et déjà existantes. La ratification, dans une telle perspective, ne supposerait pas de changements substantiels dans le dispositif national pré-existant dans la mesure où le droit interne serait en lui-même suffisamment protecteur du patrimoine culturel subaquatique et satisferait aux obligations internationales de la France.
26Le droit français en la matière repose en grande partie sur le régime général des biens culturels. Ainsi, les règles relatives à l’archéologie terrestre ont vocation à régir également l’archéologie maritime46. De plus, le régime de la domanialité publique s’applique aux biens archéologiques situés dans la mer territoriale47 ; « L’autorité administrative peut, après avoir mis le propriétaire en mesure de présenter ses observations, déclarer d’utilité publique l’acquisition par l’Etat d’un bien culturel maritime situé dans le domaine public maritime »48. Enfin, plus d’une centaine d’épaves sont soumises au régime particulier des monuments historiques49.
27Peu de sources spéciales précisent, en droit français, le régime juridique des biens culturels situés sous l’eau. Après les lois n° 61-1262 du 24 novembre 1961 relative à la police des épaves à caractère archéologique, historique ou artistique et n° 63-1178 du 28 novembre 1963 relative au domaine public maritime, la loi de n° 89-874 du 1er décembre 1989 est venue compléter le droit existant afin d’empêcher les pillages et de garantir le maintien de l’unité des sites archéologiques50. La codification et refonte des dispositions internes relatives au patrimoine culturel a par la suite été effectuée par le biais de l’ordonnance n° 2004-178 du 20 février 2004. Ce texte n’a pas opéré de changement majeur sur le fond concernant les biens culturels maritimes. Pour exemple, le principe de la conservation in situ, dont on a vu combien il était fondamental dans le régime de la convention de l’UNESCO, se retrouve d’ores et déjà dans l’article 3 de la loi de 1989.
28Il convient de relever que la convention ne concerne pas l’ensemble des éléments d’ores et déjà protégés par le droit interne. En effet, la définition du patrimoine culturel subaquatique proposée en 2001 s’avère plus limitative que la notion de « biens culturels maritimes » telle qu’elle existe dans le droit français. En atteste le facteur temporel tout d’abord : la convention se limite aux biens submergés depuis au moins cent ans dans un espace marin51, alors que le droit interne, depuis la loi de 1989 qui introduit la notion de « bien culturel maritime », protège également les biens culturels plus récents52, même s’ils sont situés en eaux douces53. Sur le plan matériel, le droit français paraît lui aussi potentiellement compréhensif. En effet, l’article 1er de la convention énumère, certes de façon non limitative (« notamment »), des types de biens susceptibles d’être qualifiés de biens culturels subaquatiques ; l’énumération de l’article L. 532-1 de l’ordonnance du 20 février 2004 est plus nettement ouverte encore à tout type de possibilités, puisque sont cités « les gisements, épaves, vestiges, ou généralement tout bien qui présente un intérêt préhistorique, archéologique ou historique ». Ainsi, les menues divergences observées n’appellent a priori pas de mise en conformité du droit français, d’ores et déjà plus compréhensif.
29La convention pour la protection du patrimoine culturel subaquatique requiert des autorisations afin que des fouilles puissent avoir lieu dans la zone économique exclusive, sur le plateau continental54 et dans la zone55. Or le droit français prévoit d’ores et déjà pour les épaves à caractère historique ou archéologique situées dans la mer intérieure, territoriale ou dans la zone contiguë un régime d’autorisations : le découvreur, dit l’« inventeur », doit déclarer sa découverte56 ; par la suite toute prospection, déplacement ou prélèvement sur le bien n’est réalisable qu’après l’obtention d’une autorisation administrative57, délivrée par le département des recherches archéologiques sous-marines (DRASSM)58.
30En vertu de l’article 22, § 1, de la convention, les Etats sont tenus de mettre en place une ou plusieurs institution(s) interne(s) compétente(s) en matière d’inventaire, de protection, de recherche et de sensibilisation. Comme de nombreux autres Etats59, la France dispose d’ores et déjà de services compétents et procède au classement de nombre de biens60, ce qui n’est pourtant pas le cas de tous les Etats parties au traité de 2001. Le DRASSM, relevant de la direction générale des patrimoines et du ministère de la Culture et de la Communication, a été créé en 1966 par André Malraux, puis modernisé en 199661. Compétent pour toutes les recherches archéologiques nécessitant le recours à la plongée, il est en particulier chargé de l’application des dispositions du Code du Patrimoine relatives aux biens culturels maritimes62.
31La principale interrogation que fait surgir la mise en œuvre de la convention en droit français concerne la politique répressive mise en place en vue de protéger le patrimoine subaquatique contre des pratiques dommageables et désormais également illicites. Comme l’indiquait le rapporteur de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale dans son rapport, « les sanctions en vigueur dans le droit français sont actuellement modérées et pourraient utilement être revues (...) pour être réellement dissuasives comme l’article 17 de la convention le prévoit »63.
32Les dispositions actuelles du droit français ne sont guère satisfaisantes eu égard aux exigences posées par l’article 17 de la convention de 2001. Chaque Etat partie doit imposer des sanctions « pour toute infraction aux mesures qu’il a prises aux fins de la mise en œuvre de la présente convention », et pose un principe de coopération en la matière. Les saisies illlicites doivent ainsi faire l’objet d’une sanction administrative. Dans le Code du patrimoine, les articles L. 544-5 et L. 544-6 punissent d’une amende le fait « d’enfreindre les obligations de déclaration », et l’intervention sur des biens sans autorisation. L’article L. 544-7 prévoit quant à lui une peine d’emprisonnement (deux ans) et une amende en cas de déplacement du bien, afin de garantir la préservation in situ. Par ailleurs, aucune sanction particulière n’est prévue à l’encontre des ressortissants français ou des navires qui procèderaient, en dehors des zones relevant des compétences de la France, à des interventions illicites à l’égard d’éléments du patrimoine culturel subaquatique64. En cas d’exportation illicite, les dispositions régissant le cas général des biens culturels meubles illicitement exportés ou volés pourraient également permettre de sanctionner les comportements contraires à la convention de 2001. Si l’article 14 de ce traité prévoit que « Les Etats parties prennent des mesures pour empêcher l’entrée sur leur territoire, le commerce et la possession de patrimoine culturel subaquatique exporté illicitement et/ou récupéré, lorsque cette récupération viole les dispositions de la présente convention », la mise en œuvre des conventions de 197065 et de 199566 est ici également en question. En atteste la proposition normative de la loi-type publiée par l’UNESCO en 2013, qui propose d’énoncer : « A person or corporation, who (...) exports any cultural heritage without a valid export certificate (...) is guilty of an offence and is liable to a fine up to [EC$ 100, 000.00] or, in the case of a person, to imprisonment of up to [5] years or to both a fine and imprisonment [or community service] »67.
33Restera à voir sur les nouvelles dispositions et les dispositions révisées du Code du patrimoine suite à l’adoption de la future loi du patrimoine prendront pleinement la mesure de ces exigences internationales.
34D’autres adaptations du droit français avaient par ailleurs été appelées et anticipées par le rapport de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale préalablement à la ratification du texte. Ensemble, ces différentes modifications visaient à permettre un retoilettage du droit interne non plus uniquement en fonction d’impératifs de protection matérielle mais également en tenant compte d’exigences liées aux intérêts et droits des autres Etats. Ont ainsi été successivement énumérées l’obligation de déclaration des découvertes effectuées dans une zone économique exclusive68, la mise en place de mesures de sauvegarde contre tout danger immédiat pour le patrimoine culturel subaquatique69, la prohibition de l’utilisation du territoire national à l’appui d’interventions illicites au sens de la convention70, et les moyens de s’assurer de ce que les ressortissants français ainsi que les navires battant pavillon français s’abstiennent de procéder à des interventions sur le patrimoine culturel subaquatique d’une manière non conforme aux dispositions conventionnelles71. L’inaction des autorités françaises dans tous ces domaines demeure heureusement temporaire. Reste à voir si le projet de loi du patrimoine prendra la mesure des potentialités mais également des obligations de la France en raison de la convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique.
*
* *
35Pour conclure, la circonstance que la France soit désormais partie à la convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique de l’UNESCO n’a pas encore induit de véritables changements dans son droit interne. Le texte de 2001 n’a donc pas encore joué son rôle de prescripteur de normes internes, et demeure essentiellement un instrument destiné à orchestrer les relations internationales. En l’état actuel du droit, la France ne satisfait donc pas pleinement à ses obligations internationales nouvellement contractées.
36Il convient par ailleurs de relever que la ratification de la France aurait pu avoir un effet boule de neige, entraînant d’autres pays initialement réticents à sauter eux aussi le pas. L’entrée dans le concert des Etats parties d’une grande puissance maritime a été salué ; l’arrivée de l’année 2014, et avec elle du centenaire de la première guerre mondiale, aurait pu constituer un seuil psychologique pour ceux qui, telle la France, détiennent tant de navires de guerre hérités de ce conflit. Pourtant, à l’heure actuelle, force est de constater que nombre d’Etats, parmi lesquels de grandes puissances maritimes, ne paraissent pas pressées de rejoindre le concert des Hautes Parties contractantes72. Après la France, sont devenus parties Antigua-et-Babuda, le Togo, la Belgique, Bahreïn, la Hongrie, Guyana, Madagascar et l’Algérie73. La route paraît encore longue pour que la convention de 2001 s’impose comme la loi générale des Etats en la matière, et puisse de ce fait produire pleinement ses effets.
Notes de bas de page
1 Accord du 31 mars entre le gouvernement de la République française et le gouvernement des Etats-Unis d’Amérique concernant l’épave de La Belle, Washington, 31 mars 2003, art. 1 § 2.
2 Décret n° 2003-540 du 17 juin 2003 portant publication de l’accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement des Etats-Unis d’Amérique concernant l’épave de La Belle, signé à Washington le 31 mars 2003.
3 UNESCO, Conférence générale. Recommandation définissant les principes internationaux à appliquer en matière de fouilles archéologiques, 5 décembre 1956. L’article 1, § 2 prévoit : « Les dispositions de la présente recommandation s’appliquent à tout vestige dont la conservation présente un intérêt public du point de vue de l’histoire ou de l’art, chaque Etat membre pouvant adopter le critère le plus propre à déterminer l’intérêt public des vestiges se trouvant sur son territoire. Devraient notamment être soumis au régime prévu par la présente recommandation les monuments, meubles ou immeubles, qui présentent un intérêt du point de vue de l’archéologie au sens le plus large ».
4 Son article 303. § 1, pose une obligation générale de coopération pour la protection des objets archéologiques ou historiques découverts en mer ; d’autres dispositions précisent le régime juridique de certaines zones maritimes en particulier (zone contiguë et Zone).
5 L’article 149 prévoit en effet que « [t]ous les objets de caractère archéologique ou historique trouvés dans la zone sont conservés ou cédés dans l’intérêt de l’humanité toute entière, compte tenu en particulier des droits préférentiels de l’Etat ou du pays d’origine, ou de l’Etat d’origine culturelle, ou encore de l’Etat d’origine historique ou archéologique ».
6 Convention concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels, 14 novembre 1970, art. 3.
7 La ville engloutie de Port Royal est sur la liste indicative de la Jamaïque depuis 2009.
8 ILA, Buenos Aires Draft convention on the Protection of the Underwater Cultural Heritage, 1994 (Report of the Sixty-Sixth Conference Held at Buenos Aires, Argentina, 14 to 20 August 1994, p. 432-447.
9 ICOMOS, 11ème Assemblée générale, Sofia, Bulgarie, 5-9 octobre 1996, Charte internationale sur la Protection et la Gestion du Patrimoine Culturel Subaquatique.
10 L. SAVADOGO, « La convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique (2 novembre 2001) », RGDIP 2003, spéc. p. 32.
11 Art. 1, § 1, a).
12 Article 4. Le droit de l’assistance concerne le secours d’un autre navire, et apparaît notamment à l’article 98 de la convention de Montego Bay. Pour leur part, la « law of salvage and other rules of amiralty », inconnue ou presque dans les pays latins mais issue du droit de plusieurs pays de common law, a été écarté dès Montego Bay.
13 L’article 303, § 3, de la convention de Montego Bay préservait pour sa part les « droits des propriétaires identifiables, au droit de récupérer des épaves et aux autres règles du droit maritime », et les « lois et pratiques en matière d’échanges culturels ».
14 Art. 2 § 5 : elle constitue « l’option prioritaire » (dans le même sens : Règles relatives aux interventions sur le patrimoine culturel subaquatique, annexées à la convention. Règle 1 ; Directives opérationnelles pour la convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique, CLT/CEH/CHP/2013/OG/H/1, août 2013, § 37).
15 Art. 2 § 7.
16 Art. 2 § 2.
17 191 Etats parties au 15 janvier 2015. Sur ces questions : L. V. PROTT, « The Significance of World-Wide Ratification of the 2001 UNESCO convention on the Protection of the Underwater Cultural Heritage », in : G/ HENDERSON, A. VIDUKA, Towards Ratification : Papers From the 2013 AIMA Conference Workshop, Australian Institute for Maritime Archaeology, Special Publication N° 17, 2014, spéc. p. 5.
18 Au 17 avril 2015, elle compte 128 Etats parties.
19 Tribunale di Torino, Sezione Ia Civile, Repubblica dell’Ecuador – Casa della culturalecuadoriana, 25 marzo 1982, dans RDIPP 1982, p. 633-635 ; Tribunal Fédéral suisse, ATF, 123 II 134, 1er avril 1997.
20 II s’agit de la région comptant de loin le plus petit nombre d’Etats parties (source : Conférence des Etats parties, Cinquième session. Proposition de stratégies permettant d’améliorer les ratifications et la mise en œuvre de la convention de 2001, UCH/15.5. MSP/5).
21 Les réserves à la convention de 2001 font l’objet d’une interdiction générale, à l’exception toutefois de réserves portant sur le champ d’application géographique de la convention (art. 29).
22 Voir par exemple : CLT-2000/CQNF.201/3. p. 2-3.
23 L’article 32 est relatif à l’immunité en général (« Sous réserve des exceptions prévues à la sous-section A et aux art. 30 et 31, aucune disposition de la convention ne porte atteinte aux immunités dont jouissent les navires de guerre et les autres navires d’Etat utilisés à des fins non commerciales ») l’article 95 traite du cas spécifique de la haute mer (« Les navires de guerre jouissent en haute mer de l’immunité complète de juridiction vis-à-vis de tout Etat autre que l’Etat du pavillon »).
24 Sur ce point, voir notamment : J-N. TURCAT, « La protection du patrimoine culturel subaquatique », dans : CORNU, FROMAGEAU, Le patrimoine culturel et la mer. Aspects juridiques et institutionnels, Collection droit du patrimoine culturel et naturel, l’Harmattan, Paris, 2002, tome 1.
25 Voir infra.
26 Voir notamment : CLT-2000/CONF.201/3. Etat récapitulatif des observations relatives au projet de convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique, 3-7 juillet 2000, p. 2.
27 Voir notamment la déclaration des Pays-Bas dans : R. GARABELLO, T. SCOVAZZI (dir.), The Protection of the Underwater Cultural Heritage : Before and After the 2001 convention, Leiden : Brill, 2003, spéc. p. 239-253.
28 Pour l’énoncé de ces deux critiques pour le compte des Etats, voir : S. DROMGOOLE, « Reflexions on the position of the major maritime powers with respect to the UNESCO convention on the Protection of the Underwater Cultural Heritage 2001 », Marine Policy 38 (2013), spéc. p. 119.
29 Voir, à l’occasion du 10ème anniversaire de la convention pour la protection du patrimoine culturel subaquatique : Regional Meeting on the Protection of the Underwater Cultural Heritage, Final Report, 15 December 2011, Royal Library of Belgium, Bruxelles, Belgique :
http://www.unesco.org/new/fileadmin/MULTIMEDIA/HQ/CLT/pdf/UCH_Brussels_FReports.pdf (consulté le 17 avril 2015).
30 Voir par exemple : L. CAFLISCH, « Submarine Antiquities and the International Law of the Sea », NYBIL 1982, p. 3-32 ; S. KARAGIANNIS, « Une nouvelle zone de juridiction : la zone archéologique marine », Espaces et ressources maritimes, 1989, p. 1 ; A. STRATI, The Protection of the Underwater Cultural Heritage : An Emerging Objective of the Contemporary Law of the Sea, La Haye, Martinus Nijhoff Publishers, 1995, p. 168.
31 Voir par exemple : H. PAZARCI, « Sur la recherche archéologique subaquatique en Méditerrannée », dans : Il regime giuridico del mare mediterraneo / The International Legal Regime fo the Mediterranean Sea / Le régime juridique de la mer Méditerranée. A cura di Umberto Leanza, Università degli Studi di Roma, Milano y Guiffrè, 1987, p. 359. La France fait partie des rares Etats à avoir utilisé la possibilité ouverte par l’art. 303, § 2, de la convention de Montego Bay de développer une zone archéogique sous-marine (sous la direction de la DRASSM).
32 Article 8.
33 Article 9.
34 La convention de Montego Bay prévoit, dans son article 149 : « Tous les objets de caractère archéologique ou historique trouvés dans la zone sont conservés ou cédés dans l’intérêt de l’humanité toute entière, compte tenu en particulier des droits préférentiels de l’Etat ou du pays d’origine, ou de l’Etat d’origine culturelle, ou encore de l’Etat d’origine historique ou archéologique ».
35 UNESCO, Projet de convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique. Projet d’amendements au projet de résolution figurant au paragraphe 13 du document 31/24, 31 C/COM. IV/DR.4*, 26 octobre 2001.
36 Il a été envisagé d’assortir la ratification française d’une déclaration (Projet de loi autorisant la ratification de la convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique, Etude d’impact, NOR : MAEJ1206777L/Bleue-1 : « La formulation de cette déclaration pourrait être : ‘La France souhaite rappeler que toutes les dispositions de la présente convention doivent être interprétées et appliquées en tenant compte de son article 3. Il en va ainsi en particulier des règles protégeant la propriété des Etats sur les biens leur appartenant’ ». La crainte de voir requalifier la déclaration de réserve alors que la convention n’en admet pas (voir supra) a peut-être contribué à écarter l’hypothèse d’une telle déclaration.
37 Projet de loi..., Etude d’impact, op. cit.
38 Projet de loi..., Etude d’impact, op. cit.
39 Le décret de publication 2012-1476, publié au JORF du 29 décembre 2012, a été adopté le 28 décembre 2012.
40 L’article L 532-1 du Code du patrimoine devrait être modifié de sorte que trois sections y seraient consacrées aux biens culturels maritimes (voir l’exposé des motifs du projet de loi relatif au patrimoine culturel, en l’état du projet au mois de mars 2014).
41 Voir sa jurisprudence en ce sens à propos de la convention du patrimoine mondial, et notamment : CE, 23 décembre 1981, Commune de Thionville, req. n° 15309 ; CE, 3 novembre 1997, Comité intercommunal de défense du site du Pont-du-Gard, req. n° 160438.
42 Voir : CE, GISTI et FAPIL, req. n° 322326. 11 avril 2012.
43 Les directives opérationnelles sont actuellement en cours d’élaboration ; lors de la cinquième réunion des Etats parties (2013). tous les détails n’ont pu être réglés. Elles ne constituent pas une interprétation de la convention, mais ont simplement pour but d’en faciliter l’application en donnant des indications pratiques » (voir le texte du projet de directives opérationnelles révisé, par exemple dans : Conférence des Etats Parties à la convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique. Troisième session, Paris, 13-14 avril 2011, Examen et adoption éventuelle des Directives opérationnelles, UCH/11/3. MSP/220/7, p. 7).
44 Conférence des Etats parties. Cinquième session, Proposition de stratégies permettant d’améliorer les ratifications et la mise en œuvre de la convention de 2001, op. cit.
45 Rapport de Jean Glavany, député, membre de la commission des affaires étrangères, sur le projet de loi n° 90 autorisant la ratification de la convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique, 14 novembre 2012.
46 Voir l’ordonnance n° 2004-178 du 20 février 2004..., op. cit.
47 J.-B. AUBY, Revue de droit immobilier (RDI), 1991, p. 38.
48 Ordonnance n° 2004-178 du 20 février 2004..., op. cit., art. L. 532-11.
49 Les premiers bateaux monuments historiques furent classés en 1982 ; il s’agissait de la Duchesse Anne (Dunkerque) et de Mad Atao (Lampaul-Plouarzel). Fin 2001, cent bateaux étaient protégés au titre des monuments historiques, dont la grande majorité pour le domaine maritime (78).
50 Voir également le décret d’application n° 91-1226 du 5 décembre 1991 (JO, 7 décembre 1991, p. 16017-160).
51 Article 1er.
52 La définition du champ d’application du droit français ne comporte aucune condition temporelle.
53 L’article L. 532-1 de l’ordonnance n° 2004-178 du 20 février 2004 relative à la partie législative du Code du patrimoine énonce : « Constituent des biens culturels maritimes les gisements, épaves, vestiges ou généralement tout bien qui, présentant un intérêt préhistorique, archéologique ou historique, est situé dans le domaine public maritime ou au fond de la mer dans la zone contiguë ». Pour sa part, l’article 1er de la convention prévoit : « On entend par ‘patrimoine culturel subaquatique’ toutes les traces d’existence humaine présentant un caractère culturel, historique ou archéologique qui sont immergées, partiellement ou totalement, périodiquement ou en permanence, depuis 100 ans au moins (...) ».
54 Article 10.
55 Article 12.
56 Ordonnance n° 2004-178 du 20 février 2004 relative à la partie législative du Code du patrimoine, art. L. 532-3.
57 Ordonnance n° 2004-178 du 20 février 2004..., op. cit., art. L 532-7.
58 Voir également : UNESCO, Model for a National Act on the Protection of Cultural Heritage,
http://www.unesco.org/new/fileadmin/MULTIMEDIA/HQ/CLT/pdf/UNESCO_MODEL_UNDERWATER_ACT_2013.pdf, consulté le 17 avril 2015 : le III, point 6, de la loi type de l’UNESCO, et plus précisément le § 10 concernant la zone économique exclusive et le plateau continental.
59 In S. DROMGOOLE, Underwater Cultural Heritage and International Law, Cambridge Studies in international and Comparative Law, Cambridge UP, 2013, spéc. p. 309.
60 Plus d’une centaine d’épaves sont classées monument historique, et bénéficient donc de ce statut protecteur.
61 Arrêté du 4 janvier 1996 portant création et organisation du département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marine (DRASSM). Il fusionne alors avec le Centre national de la recherche archéologique subaquatique, en charge de la protection du patrimoine culturel sous-marin.
62 Ordonnance n° 2004-178 du 20 février 2004..., op. cit., titre III, chapitre 2.
63 Rapport de Jean Glavany, député, membre de la commission des affaires étrangères, sur le projet de loi n° 90 autorisant la ratification..., op. cit.
64 Article 16.
65 Convention concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels, 14 novembre 1970 (UNESCO).
66 Convention sur les biens culturels volés ou illicitement exportés, 24 juin 1995 (Unidroit).
67 UNESCO, Model for a National Act on the Protection of Cultural Heritage, op. cit., point 22, § 1.
68 Voir les articles 9 et 11.
69 Art. 10, § 4. Sur ce point, voir la proposition issue de la loi-type proposée par l’UNESCO en 2013 : UNESCO, Model for a National Act on the Protection of Cultural Heritage, op. cit., V, § 15.
70 Art. 15.
71 Art. 16.
72 Sur ces questions et les possibles avancées : S. DROMGOOLE, « Reflexions on the position... », op. cit. ; Conférence des Etats parties, Cinquième session. Proposition de stratégies permettant d’améliorer les ratifications et la mise en œuvre de la convention de 2001, op. cit.
73 http://www.unesco.org/eri/la/convention.asp?KO=13520&language=F&order=alpha, consulté le 17 avril 2015.
Auteur
Maître de conférences HDR à l’Université Paris Ouest Nanterre La Défense
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