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Le paysage culturel, œuvre conjuguée de l’homme et de la nature, comme élément de droit français

p. 255-271


Texte intégral

1La notion de paysage culturel est née de la convention de l’UNESCO concernant la protection du patrimoine mondial du 16 novembre 1972. La création est d’abord implicite puisque la lettre de la convention ne fait mention, au titre des éléments protégés en qualité de patrimoine culturel, que des notions de monuments, ensembles et sites. Ce sont d’ailleurs ces sites qui se trouvent qualifiés d’« œuvres de l’homme ou conjuguées de l’homme et de la nature [...] qui ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue historique, esthétique, ethnologique ou anthropologique » (article 1er). L’existence juridique du paysage culturel devient explicite aux termes des orientations devant guider la mise en œuvre de la convention du patrimoine mondial de février 1994 : placée parmi les éléments de patrimoine culturel (et non du patrimoine naturel) et à la suite des éléments regardant les monuments puis des ensembles urbains (villes mortes, cités historiques vivantes, villes nouvelles du XXe siècle participant des deux situations précédentes), la notion de paysage culturel, venant ici se substituer à celle de site, représente « les ouvrages combinés de la nature et de l’homme désignés à l’article 1er de la convention » (§ 36), eux-mêmes divisés en trois catégories : d’abord le paysage clairement défini, conçu et créé intentionnellement par l’Homme (jardins et parcs, souvent associés à des constructions ou des ensembles religieux) ; ensuite, le paysage essentiellement évolutif, résultant d’une exigence à l’origine sociale, économique, administrative et/ou religieuse et ayant atteint sa forme actuelle par association et en réponse à son environnement naturel : cette forme de paysage peut être subdivisée, d’une part, en paysages reliques, ayant subi un processus évolutif qui s’est arrêté à un certain moment dans le passé mais dont les caractéristiques essentielles restent cependant matériellement visibles, et, d’autre part, le paysage vivant, lequel conserve un rôle social actif dans la société contemporaine, étroitement associé au mode de vie traditionnel et au sein duquel se prolonge le processus évolutif ; enfin, le paysage culturel associatif, caractérisé par la force de l’association des phénomènes religieux, artistiques ou culturels de l’élément naturel plutôt que par des traces culturelles qui peuvent être insignifiantes ou même inexistantes (§ 39). Il y est également précisé que ce type de paysage illustre « l’évolution de la société et des établissements humains au cours des âges, sous l’influence de contraintes et/ou des atouts présentés par leur environnement naturel et les forces sociales, économiques et culturelles successives, internes et externes »1. Si le cadre juridique proposé par l’UNESCO participe d’une assimilation de la notion de paysage culturel à celle de sites, la convention européenne du paysage, adoptée à Florence le 20 octobre 2000, considère sans détour que c’est la notion même de paysage qui mérite d’être définie comme « une partie de territoire telle que perçue par les populations, dont le caractère résulte de l’action de facteurs naturels et/ou humains et de leurs interrelations ». Le rapport explicatif confirme l’idée « que les paysages évoluent dans le temps, sous l’effet des forces naturelles et de l’action des êtres humains. Elle souligne également l’idée que le paysage forme un tout dont les éléments naturels et culturels sont considérés simultanément ». Ratifiée en 2005, la convention européenne du paysage est venue influencer nombre de systèmes juridiques internes. Tel est en premier lieu le cas de la loi québécoise n° 82 du 19 octobre 2011 relative au patrimoine culturel, dont le chapitre 1er, paragraphe I renvoie d’emblée à la notion de paysage culturel patrimonial entendu comme « tout territoire reconnu par une collectivité pour ses caractéristiques paysagères remarquables résultant de l’interrelation de facteurs naturels et humains qui méritent d’être conservées et, le cas échéant, mises en valeur en raison de leur intérêt historique, emblématique ou identitaire ». Une conception similaire du paysage se retrouve dans la loi espagnole 42 du 13 décembre 2007 sur la protection de la nature et de la biodiversité, dont la rédaction de l’article 3 alinéa 6 est largement empruntée à la formulation de la convention européenne du paysage. Tel est également le cas de l’article 131 du Code des biens culturels italien, de la loi portugaise du 7 avril 1987 relative à l’environnement, voire de certaines législations de cantons suisses ou de Länder allemands2. La question reste de savoir si le droit français connaît d’une même notion juridique. De prime abord, en dépit de l’extension contemporaine de la notion de paysage en direction d’une logique d’interaction de l’homme et de la nature, force est de constater qu’une telle conception dynamique et extensive n’est pas explicitement présente en droit français, le législateur ayant choisi d’ériger un système de protection diffus fondé sur les notions de sites et de monuments (I), de patrimoine architectural, urbain et paysager (II) et d’espaces naturels (III). Pourtant l’ensemble laisse apparaitre une forme de paysage culturel innommé, susceptible d’être considérée comme une catégorie hétérogène et multiple (IV).

I – Paysages culturels, sites et monuments

2Les premières lois relatives aux patrimoines culturel et naturel ne font nullement mention de la notion de paysage : la loi de 1913 ne se rapporte qu’aux seuls monuments historiques, tandis qu’aux termes des lois de 19063 et 19304, il n’est question que de sites et de monuments naturels. L’absence de définition juridique de ces termes ne laisse pas de soulever nombre d’interrogations quant à la relation de la notion de site avec celle de paysage, l’association étant par ailleurs évidente aux termes des textes proposés par l’UNESCO. Les commentaires de la loi de 1906, proposés par la société pour la protection des paysages en France, contribuent à apporter une première réponse à cette difficulté puisqu’il est proposé une distinction entre, d’une part, le « paysage » qui « est une partie de territoire dont les divers éléments forment un ensemble pittoresque ou esthétique, par la disposition des lignes, des formes et des couleurs », et, d’autre part, le « site », « portion de paysage d’un aspect particulièrement intéressant » ainsi qu’« un monument naturel », défini comme « un groupe d’éléments dus à la nature, comme rochers, arbres, bouleversements du sol, accidents de terrain et autres, qui séparément ou ensemble, forment un aspect digne d’être conservé »5. Il y est enfin et surtout précisé qu’« un paysage peut comprendre des éléments purement naturels ou bien englober dans son ensemble des œuvres de l’homme, tels que constructions, ruines, clochers, silhouettes, sites urbains, etc. »6. Dès 1906, le paysage est susceptible d’être assimilé à un ensemble composé d’éléments naturels et d’œuvres de l’homme, anticipant la notion de paysage culturel. Cependant, la loi du 2 mai 1930 n’a jamais traduit en droit une telle conception et a fait le choix d’identifier la notion de sites ou de monuments naturels au seul regard du caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque de ceux-ci et sans aucune référence à quelque dimension paysagère que ce soit (article 1er de la loi de 1930 et article L341-1 du Code de l’environnement). Il est dès lors impossible d’associer entièrement les notions de site et de monuments naturels à celle de paysage, les premiers étant susceptibles de correspondre à autre chose qu’à un paysage, comme en atteste la liste des sites et monuments naturels classés sous le régime des lois de 1906 et 1930 : le monument aux morts du maquis d’Ornano sur la commune de Penne, le site de caractère légendaire du tombeau de Merlin sur le commune de Paimpont, ou encore les nombreux ensembles constitués d’une Eglise et de son cimetière, s’ils constituent un site, ne peuvent être que difficilement considérés comme des paysages. Ces deux notions ne peuvent pour autant être dissociées, tel le site du cirque de Gavarnie et les cirques et vallées avoisinants, lesquels sont également considérés au titre du classement de l’UNESCO comme des éléments de paysage culturel. En réalité, sites et paysages ont avant tout ceci de commun qu’ils sont susceptibles de constituer des espaces mixtes, associant des éléments des patrimoines naturel et bâti et procédant d’un même ensemble. Cette logique d’ensemble mixte se retrouve de la même façon à travers le régime de protection des monuments classés ou inscrits et surtout du mécanisme de la servitude des abords7, laquelle peut rejoindre la notion d’immeuble. Il est opportun de citer à ce propos un arrêt de la Cour administrative d’appel de Bordeaux, en date du 4 juin 2007, à propos de terrains constituant une zone verte et situés aux abords immédiats du château de Merville, classé monument historique ainsi que de son parc. Pour le juge administratif, « compte tenu de l’intérêt paysager que présente la protection de cette zone verte, afin de préserver, d’une part, la vue depuis la route de l’ensemble constitué par ces terrains, le château et son parc, d’autre part, les abords de ce château, le classement litigieux [...] n’est pas entaché d’erreur manifeste d’appréciation ». La servitude des abords peut naturellement revêtir une dimension paysagère, dès lors qu’il s’agit non seulement de protéger le champ de visibilité du monument mais aussi d’assoder ce monument à un ensemble patrimonial et paysager. Il est tentant d’assimiler le régime des abords des monuments historiques à celui des sites et monuments naturels, d’autant plus que certains sites protégés au titre de la loi de 1930 peuvent tout à fait relever du régime de protection de la loi de 1913. En guise d’illustration, le pont neuf de Toulouse fut classé sous le régime de la loi du 2 mai 1930 par arrêté du 21 avril 1932, puis classé au titre des monuments historiques par arrêté du 14 mars 1991. Force est de reconnaître que la superposition, pour ne pas dire la redondance de ces deux régimes de protection soulève une vraie difficulté quant à l’intérêt ou la spécificité du régime résultant de la loi de 1930. En réalité, si une telle confusion peut exister, ces deux régimes de protection procèdent d’un périmètre différent, les sites et monuments naturels étant susceptible de dépasser largement la limite géographique propre à la servitude des abords. Dans le silence des textes, c’est au Conseil d’Etat qu’il incomba de préciser le champ d’application territorial de la législation sur les sites, laquelle peut trouver à s’appliquer à « des ensembles de paysages contigus présentant une certaine unité tant en eux-mêmes que par rapport aux paysages avoisinants », selon les termes de M. Guillaume, commissaire du gouvernement dans l’arrêt EBRI du 2 mai 1975. Le législateur pût lui-même constater qu’en dépit d’une limitation « au début à des sites d’étendue restreinte, le classement et l’inscription ont concerné au cours du temps des espaces de plus en plus vastes. Au nombre de 2 500 environ, les sites classés concernent en fait une très grande diversité de « paysages » ou d’éléments ponctuels du paysage : il peut s’agir d’un rocher, d’un arbre ou d’une cascade comme d’un paysage s’étendant sur une vaste superficie (comme le massif du Mont-Blanc avec 26 100 hectares) »8. Aux termes de la loi de 1930, telle qu’interprétée par le juge administratif, le site se définit par l’unité et l’identité de l’ensemble paysager qu’il entend saisir, quelle qu’en soit la sphère géographique, laquelle peut être ponctuelle ou étendue. Plus encore, l’unité et l’identité d’un site laissent supposer l’existence d’éléments naturels associés à un ensemble de facteurs sociaux, économiques, artistiques, architecturaux ou urbains, rejoignant dès lors la définition du paysage culturel. Nombre de sites classés -généralement qualifié d’« ensembles »– permettent d’illustrer le propos, tel l’ensemble formé par le site Giverny – Claude-Monet – confluent de la Seine et de l’Epte (classé en 1985), l’ensemble formé par le site de Rocamadour (classé en 1986), ou encore l’ensemble formé par les gorges du Gardon, le pont du Gard et les garrigues nîmoises (classé en 2013).

II – Paysages culturels et patrimoine architectural, urbain et paysager

3La loi n° 93-24 du 8 janvier 1993 sur la protection et la mise en valeur des paysages et l’ajout de l’élément paysager aux zones de protection du patrimoine architectural et urbain ainsi que la création des directives de protection et de mise en valeur des paysages constitue la première forme de législation regardant directement et exclusivement le paysage. A défaut de proposer quelque définition juridique explicite de la notion de paysage, la loi de 1993 (article L350-1 du Code de l’environnement) associe les directives de protection et de mise en valeur des paysages aux seuls « territoires remarquables par leur intérêt paysager ». Cette disposition fut complétée et précisée par un décret du 11 avril 19949, aujourd’hui codifié à l’article R 350- 1 du Code de l’environnement, et surtout par la circulaire n° 94-88 du 21 novembre 1994 prise pour l’application du décret n° 94-283 du 11 avril 1994 relatif aux directives de protection et de mise en valeur des paysages, dont le paragraphe 2.1 précise que « le paysage objet de la directive peut avoir été façonné par l’homme ou par la nature, son caractère remarquable peut être lié autant à ses composantes géographiques ou visuelles qu’à son contexte historique ou culturel ». Ces directives traduisent le souci du législateur d’accentuer la protection des ensembles paysagers face aux difficultés rencontrées au titre des instruments juridiques existants, procédant soit des lois de 1913 et 1930, soit des documents d’urbanisme classiques. L’article L350-1 du Code de l’environnement, issu de la loi paysage de 1993, autorise concurremment l’Etat et les collectivités territoriales à prendre l’initiative de directives de protection et de mise en valeur des paysages. Si celles-ci sont élaborées par l’Etat « sur des territoires remarquables par leur intérêt paysager », elles doivent toutefois faire « l’objet d’une concertation avec l’ensemble des collectivités territoriales intéressées et avec les associations de protection de l’environnement agréées au titre de l’article L. 141-1 et les organisations professionnelles concernées » en vue de déterminer « les orientations et les principes fondamentaux de protection des structures paysagères qui sont applicables à ces territoires »10. Surtout, ces directives sont appelées à être gérées localement, compte tenu notamment du caractère opposable de leurs dispositions aux demandes d’autorisations de défrichement, d’occupation et d’utilisation du sol, en l’absence de plan local d’urbanisme opposable aux tiers ou de tout document d’urbanisme en tenant lieu ou lorsque celui-ci n’a pas été mis en compatibilité avec le schéma de cohérence territoriale (article L 350-1 du Code de l’urbanisme). Les plans et contrats de paysage qui verront le jour peu après la loi de 1993 achèveront de démocratiser l’approche paysagère en direction de toutes formes de paysages, qu’ils soient quotidiens, remarquables, urbains, ruraux, péri-urbains11. La loi de 1993 fait également évoluer les zones de protection du patrimoine architectural et urbain, créées en 1983, en direction d’une prise en considération de l’élément paysager, sans toutefois poser la condition d’un « paysage remarquable ». Ces zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP) peuvent être créées par le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d’urbanisme, sur proposition du conseil municipal des communes intéressées ou de l’organe délibérant de l’EPCI concerné (anciens articles L 642-1 et L642-2 du Code du patrimoine). La création d’une telle zone permet d’imposer l’obtention, à l’intérieur de ces zones ou parties de zone, d’une autorisation spéciale, délivrée par l’autorité administrative compétente en matière de permis de construire et après avis de l’architecte des bâtiments de France en matière d’architecture et de paysages pour tous travaux de construction, de démolition, de déboisement, de transformation et de modification de l’aspect des immeubles compris dans le périmètre de la zone. Finalement, la loi de 1993 a permis d’accentuer les moyens de protection juridique des paysages, sans que ceux-ci puissent être considérés de façon isolée, que ce soit par l’intervention de l’Etat, à travers les directives de protection et de mise en valeur, ou au moyen du mécanisme décentralisé des ZPPAUP. Dans tous les cas, l’élément paysager est appelé à se combiner avec tout autre élément architectural ou urbain, participant dès lors d’une forme de mixité patrimoniale. Partant, il n’est guère surprenant de constater que le SIVOM de la juridiction de Saint-Emilion et les communes associées aient pris l’initiative de proposer de créer une ZPPAUP destinée à couvrir l’ensemble du territoire du site de Saint-Emilion inscrit en 1999 sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO en qualité de paysage culturel12. La suppression du mot paysager des aires de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine, (AVAP), conformément à la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement (article 28), fut sans incidence sur la place du paysage au sein de cette forme de protection patrimoniale, le nouvel article L642-1 du Code du patrimoine renvoyant aux « territoires présentant un intérêt culturel, architectural, urbain, paysager, historique ou archéologique »13. Surtout, le nouvel article L642-1 alinéa 2 du Code du patrimoine inscrit les AV AP dans une même logique de développement durable que la convention européenne du paysage, le modèle juridique de protection patrimoniale, architecturale et paysagère procédant désormais d’une étroite association entre ces différents éléments. Un même raisonnement peut être développé en direction du droit de l’urbanisme, lequel a dû progressivement se tourner en direction de la protection du paysage pour finalement, et suivant la logique propre à l’article L 121-1, exiger des schémas de cohérence territoriale, des plans locaux d’urbanisme et des cartes communales qu’ils déterminent notamment « les conditions permettant d’assurer [...] la qualité urbaine, architecturale et paysagère, notamment des entrées de ville », dans le respect des objectifs du développement durable tels qu’énoncés à L110 du Code de l’urbanisme. Le paysage constitue aujourd’hui et sans nul doute l’un des objets principaux du droit de l’urbanisme, comme en témoigne les articles L. 146-6 et L. 123-1-5, 7° du Code de l’urbanisme. En retour, le droit de l’urbanisme est désormais susceptible de prendre en considération cette forme de paysage qui procède de l’œuvre conjuguée de l’homme et de la nature.

III – Paysages culturels et espaces naturels

4La convention de l’UNESCO de 1972 et les différentes orientations devant guider la mise en œuvre de celle-ci placent les paysages culturels parmi les biens culturels, cette catégorie englobant tout à la fois les monuments, les ensembles et les sites (article 1er), tandis que la catégorie des biens naturels correspondent aux monuments naturels, aux formations géologiques et physiographiques et autres zones constituant l’habitat d’espèces animales et végétales menacées, ainsi qu’aux sites naturels ou zones naturelles, qui ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de la science, de la conservation ou de la beauté naturelle (article 2). La convention de l’UNESCO ajoute une troisième catégorie correspondant aux biens mixtes, « considérés comme « patrimoine mixte culturel et naturel s’ils répondent à une partie ou à l’ensemble des définitions du patrimoine culturel et naturel figurant aux articles 1 et 2 de la convention »14. Cette troisième catégorie correspond au site de Pyrénées-Mont Perdu, lequel, d’une part, « offre un paysage culturel exceptionnel qui allie la beauté panoramique à une structure socio-économique qui a ses racines dans le passé et illustre un mode de vie montagnard devenu rare en Europe » et, d’autre part, « présente un certain nombre de formations géologiques classiques telles que des canyons profondément creusés et des cirques spectaculaires. C’est également un paysage exceptionnel avec des prairies, des lacs, des grottes, des montagnes et des forêts ». Par conséquent, si les paysages culturels procèdent toujours de la seule catégorie des biens culturels, sous la seule réserve des biens mixtes, il semble a priori inopportun d’apprécier ces paysages culturels à la lumière de la catégorie des biens naturels. Pourtant, deux sites français inscrits sur la liste du patrimoine mondial imposent bien davantage de nuances : le site de Pyrénées-Mont perdu, dont le plan de gestion précise qu’il est « inclus dans le périmètre du parc d’Ordesa Monte Perdido, et, partiellement, de sa zone périphérique de protection, côté espagnol, et pour partie, dans celui du parc national des Pyrénées, côté français », et le site des Causses et des Cévennes, lequel participe essentiellement du parc national des Cévennes. Si l’on se situe du seul point de vue des instruments juridiques internes, force est de constater que la catégorie des paysages culturels procède tout autant du patrimoine culturel que du patrimoine naturel, et en premier lieu de la catégorie des parcs nationaux. L’exposé des motifs de la loi n° 60-708 du 22 juillet 1960 relative à la création des parcs nationaux précise à ce propos qu’« il n’est plus possible de trouver une seule étendue importante, vierge de toute intervention, même suffisamment ancienne, de l’homme et qui puisse être constituée en parc national classique, tel que les pays neufs ont pu en réaliser ». Pourtant, l’article 1er de la loi de 1960 centrait entièrement la création d’un parc national sur la préservation de l’espace naturel. Aujourd’hui, l’article L. 331-1 du Code de l’environnement, résultant de la loi n° 2006-436 du 14 avril 2006 relative aux parcs nationaux, aux parcs naturels marins et aux parcs naturels régionaux, exige que « le milieu naturel, particulièrement la faune, la flore, le sol, le sous-sol, l’atmosphère et les eaux, les paysages et, le cas échéant, le patrimoine culturel qu’ils comportent présentent un intérêt spécial et qu’il importe d’en assurer la protection en les préservant des dégradations et des atteintes susceptibles d’en altérer la diversité, la composition, l’aspect et l’évolution ». Selon les termes de la loi, les parcs nationaux procèdent de prime abord de la catégorie des biens mixtes, à l’image du site de Pyrénées-Mont perdu. Les chartes des différents parcs nationaux témoignent quant à elles d’une bien plus grande ouverture vers l’idée de paysage culturel. Ainsi la charte du parc national des Pyrénées, approuvée par le décret en conseil d’État n° 2012-1542 du 28 décembre 2012, entend « protéger un patrimoine naturel, culturel et paysager exceptionnel, dont la composition est déterminée en partie par certaines activités humaines respectueuses des espaces naturels qui concourent au caractère du parc, tout en prenant en compte la solidarité écologique entre les espaces protégés du cœur et les espaces environnants concernés par une politique de protection, de mise en valeur et de développement durable »15 (article 1er). La charte du parc national des Cévennes, approuvée par décret n° 2013-995 du 8 novembre 2013, prend tout aussi manifestement acte de l’inscription du site des Causses et des Cévennes sur la liste du patrimoine mondial, « les paysages y étant définis comme l’un des facteurs essentiels du caractère et de l’attractivité du Parc national des Cévennes, en tant que cadre de vie, de travail et de villégiature. Ces paysages façonnés par l’homme sont encore aujourd’hui intimement liés à sa présence et à ses activités. L’enjeu est donc de préserver leur identité et leur diversité, et d’éviter les changements brutaux et irréversibles amenant leur banalisation »16. La qualité de paysage culturel ne peut d’ailleurs être circonscrite à ces deux parcs nationaux : également inscrit sur la liste du patrimoine mondial en qualité de patrimoine naturel, les pitons, les cirques et les remparts du parc national de La Réunion forment un « paysage culturel marqué par l’originalité de son peuplement, d’abord avec le marronnage, puis avec l’arrivée des « Petits Blancs », qui y ont façonné un environnement naturel hostile »17. Une même idée se retrouve aux termes des Chartes du parc national des Ecrins, du parc national du Mercantour, ainsi que du parc amazonien de Guyane. Les parcs naturels régionaux, créés par le décret du 1er mars 1967, vont connaître une évolution équivalente à celle des parcs nationaux pour devenir à leur tour des éléments de valorisation des paysages culturels. Dès 1967, la création d’un parc naturel régional résulte de ce qu’un territoire « présente un intérêt particulier, par la qualité de son patrimoine naturel et culturel ». La loi paysage de 1993 vient préciser que ces parcs naturels « constituent un cadre privilégié des actions menées par les collectivités publiques en faveur de la préservation des paysages et du patrimoine naturel et culturel » (article 1er alinéa 1) tandis que le décret du 1er septembre 1994 relatif aux parcs naturels régionaux précise que la décision de classement d’un territoire en parc naturel régional repose, entre autres critères, sur la « qualité et caractère du patrimoine naturel, culturel et paysager représentant une entité remarquable pour la ou les régions concernées et comportant un intérêt reconnu au niveau national ». Le principe énoncé à l’article 1er de la loi de 1993, désormais codifié à l’article L 333-1 du Code de l’environnement, se prolonge sous la forme d’une charte dont il est précisé qu’elle « détermine les orientations et les principes fondamentaux de protection des structures paysagères sur le territoire du parc ». Il n’y a finalement rien de surprenant à constater que nombre de chartes de parcs naturels régionaux expriment aujourd’hui l’existence en leur sein de paysages culturels. Ainsi, la charte du parc naturel régional des Pyrénées catalanes 2014-2026 affirme que « les paysages, fruits de l’interaction entre la richesse biogéographique et l’activité humaine qui s’est développée au fil des siècles, constituent un élément fort de l’identité des Pyrénées catalanes ». La charte du parc naturel régional de Camargue 2011-2022 souligne quant à elle que l’histoire du delta démontre que « gérer la nature et la protéger indépendamment des activités humaines serait tout aussi illusoire que de s’occuper d’économie, de culture, de vie sociale, indépendamment des dynamiques naturelles ». Ces exemples témoignent de ce que l’idée de paysage culturel est aujourd’hui manifestement présente au cœur des instruments propres au patrimoine naturel. Il eut été également possible de faire mention, entre autres dispositifs législatifs, de la loi du 10 juillet 1976 sur la protection de la nature, visant notamment la protection des espaces naturels et des paysages et créant les réserves naturelles (dont le paysage se trouve cette fois-ci exclu), ainsi que les lois du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne et du 3 janvier 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral. Loin de satisfaire à l’exigence d’une liste exhaustive des instruments tournés vers la notion de paysage, la seule mention de la législation sur les parcs nationaux et parcs naturels régionaux, tout autant que de celle relative aux sites et autres éléments monumentaux, architecturaux, urbains et paysagers, permet d’illustrer l’existence, même implicite, de l’idée de paysage culturel en droit interne. Chacun de ces éléments témoigne surtout de l’émiettement, pour ne pas dire de la dilution dont souffre la notion de paysage culturel, laquelle, au contraire de la convention de l’UNESCO, ne semble constituer qu’une composante secondaire tout à la fois des espaces naturels protégés ainsi que du droit du patrimoine culturel et naturel.

IV – Le paysage culturel, catégorie hétérogène et multiple

5Cinq sites français furent inscrits sur la liste du patrimoine mondial en qualité de paysages culturels : d’abord, en 1997, le site de « Pyrénées-Mont Perdu », puis les sites de « Juridiction de Saint-Émilion » (1999), de « « Val de Loire entre Sully-sur-Loire et Chalonnes » (2000), enfin, plus récemment, les sites des « Causses et les Cévennes, paysage culturel de l’agro-pastoralisme méditerranéen » (2011) et du « bassin minier du Nord-Pas-de-Calais » (2012). Si la convention de l’UNESCO identifie les paysages culturels au seul patrimoine culturel, le droit français situe ces paysages culturels innommés tout autant dans la catégorie du patrimoine culturel que dans celle du patrimoine naturel voire tout autre espace protégé. L’analyse des multiples instruments de droit interne permet surtout de mettre en évidence l’hétérogénéité intrinsèque de la catégorie des sites inscrits sur la liste du patrimoine mondial en qualité de paysages culturels. En premier lieu, le site de Pyrénées-Mont perdu (Gavarnie) et le site des Causses et Cévennes, tirant essentiellement leur identité de la substance et de la richesse de leur patrimoine naturel respectif et la structure socio-économique qui s’y trouve associée. La qualité de paysage culturel se situe ici dans la relation du patrimoine naturel à la pratique et l’influence de l’agro-pastoralisme méditerranéen ou pyrénéen sur cet espace protégé. Du point de vue des instruments juridiques internes, ces deux sites voient leur protection davantage tournée vers les espaces naturels protégés que vers le régime des monuments inscrits ou classés (un monument historique inscrit sur le site de Gavarnie – Eglise Notre Dame du Bon Port de Gavarnie – et une soixantaine seulement, dont vingt monuments classés, sur le site des Causses et Cévennes, excluant tout secteur sauvegardé, ZPPAUP ou AVAP, mais incluant un abondant petit patrimoine rural). Le territoire de chacun de ces deux sites se trouve en revanche couvert par un parc national (la totalité du parc national des Cévennes et une partie du parc national des Pyrénées), auquel il faut ajouter, pour le site des Causses et Cévennes, le parc naturel régional des grandes causses, réserve de biosphère des Cévennes, les grands sites des Gorges du Tarn, de la Jonte et des Causses, de Navacelles et de Saint-Guilhem le Désert ou encore la réserve naturelle de Combe chaude. Un constat inverse s’impose, en second lieu, en ce qui concerne le site de la Juridiction de Saint Emilion, lequel couvre le territoire de huit communes (Saint-Emilion, Saint-Christophe-des-Bardes, Saint-Etienne-de-Lisse, Saint-Hippolyte, Saint-Laurent-des-Combes, Saint-Pey-d’Armens, Saint-Sulpice-de-Faleyrens et Vignonet) pour une surface limitée à 7 847 hectares contre 302 319 hectares pour le site des Causses et Cévennes et 30 639 hectares pour le site de Pyrénées-Mont perdu. Suivant les critères gouvernant l’inscription sur la liste du patrimoine mondial, « la Juridiction de Saint-Emilion est un exemple remarquable d’un paysage viticole historique qui a survécu intact et est en activité de nos jours [illustrant] de manière exceptionnelle la culture intensive de la vigne à vin dans une région délimitée avec précision »18. Peu d’instruments juridiques internes regardant la protection du patrimoine naturel ou d’espaces naturels sont tournés en direction du paysage viticole de Saint-Emilion. Tout au plus peut-on faire mention de trois sites protégés au titre de la loi de 1930, dont certains concernent en partie le vignoble. En revanche, le territoire couvert par le site de la juridiction de Saint-Emilion rassemble un certain nombre d’instruments tournés en direction du patrimoine monumental, urbain et paysager : on y trouve notamment quinze monuments historiques classés (notamment à la fin du XIXe et au début du XXe siècles) et six monuments inscrits, dont l’essentiel se trouve dans la commune de Saint-Emilion. En outre, le territoire de la commune de Saint-Emilion est couvert par un plan de sauvegarde et de mis en valeur, afférent au secteur sauvegardé créé par arrêté ministériel du 4 août 1986. Plus important encore fut la constitution, en 2007, d’une ZPPAUP sur l’ensemble du périmètre de la juridiction de Saint-Emilion, à l’exception du champ couvert par le PSMV du village de Saint-Emilion19. Cette ZPPAUP fut envisagée dès la préparation du dossier de présentation, en juin 1998, en vue de l’inscription sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, partant de l’idée que « les ZPPAU(P) s’attachent au cadre bâti non pas prioritairement pour sa valeur historique, comme les secteurs sauvegardés, mais dans son expression multiple de paysage et d’ambiance urbain où l’espace en creux tient une place importante et où le vernaculaire, témoin d’une culture locale porteuse d’identité, prend une dimension prépondérante »20. Elle se retrouve également au cœur de la charte patrimoniale conclue le 24 juillet 2001 entre les huit communes membres de la juridiction de Saint-Emilion : cette charte constitue tout à la fois le prolongement de la décision de l’UNESCO d’inscrire le site en qualité de paysage culturel, en vue de l’élaboration future du plan de gestion, et le préalable à la création d’une ZPPAUP destinée tant à « la sauvegarde et la protection du paysage culturel » et à « la valorisation et au développement du patrimoine paysager et culturel »21. Cette charte insiste surtout sur la nécessité de faire évoluer les instruments de planification d’occupation des sols ainsi que la règlementation patrimoniale, notamment par l’élaboration d’une ZPPAUP, en complément des POS/PLU et du PSMV. Le règlement de la ZPPAUP s’inscrit en conséquence dans une logique de protection et de la valorisation du paysage culturel dans le périmètre de la juridiction Saint-Emilion. En troisième lieu, l’inscription du bassin minier du Nord-Pas-de-Calais en qualité de paysage culturel résulte de sa nature de paysage évolutif et vivant, témoignant « de manière exceptionnelle des échanges d’idées et d’influences à propos des méthodes d’exploitation des filons charbonniers souterrains, de la conception de l’habitat ouvrier et de l’urbanisme, ainsi que des migrations humaines internationales qui ont accompagné l’industrialisation de l’Europe » ; ce paysage minier est également identifié comme un « espace structuré par un urbanisme, des constructions industrielles spécifiques et les reliquats physiques de cette exploitation (terrils, affaissements) ». Il s’agit enfin d’un paysage culturel associatif, renvoyant « aux évènements sociaux, techniques et culturels associés à l’histoire du Bassin minier », illustrant « de manière unique et exceptionnelle la dangerosité du travail de la mine et l’histoire de ses grandes catastrophes (Courrières) », « témoignant de l’évolution des conditions sociales et techniques de l’exploitation des houillères », et représentant « un lieu symbolique majeur de la condition ouvrière et de ses solidarités, des années 1850 à 1990 » ainsi que de « la diffusion des idéaux du syndicalisme ouvrier et du socialisme »22. D’une surface de 3 943 hectares, le site peut avant tout être identifié à un ensemble de biens résultant de l’exploitation minière et essentiellement assimilable à un patrimoine industriel, tels les nombreux sites miniers, fosses, chevalements de fosses, bâtiments de compagnies minières ainsi que tout autre élément patrimonial religieux, urbain, architectural, au premier rang desquels certaines parties de cités minières, nombre de ces immeubles sont désormais inscrits ou classés au titre des monuments historiques. Il apparait à ce propos que « 145 des 353 éléments inclus dans le périmètre sont protégés par la loi au titre des monuments historiques de 1913 (en tant qu’objet monument historique ou objet concerné par les abords) »23, auxquels viennent s’ajouter plusieurs ZPPAUP (Carvin, Valenciennes, Béthune, Labeuvrière, Vaurdicourt). Cela ne suffit toutefois pas à identifier entièrement l’étendue patrimoniale du bassin minier, lequel correspond également à un ensemble de terrils et d’étangs d’affaissement, indissociables de l’activité économique passée et ayant durablement marqué le paysage du Nord-Pas-de-Calais. Les deux terrils d’Haveluy ont d’ailleurs été inscrits à l’inventaire des monuments naturels et des sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque par arrêté du 8 avril 1988. Ces deux terrils constituent également une zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique ou floristique (ZNIEFF I ou II), tout comme 27 autres terrils du bassin minier, à l’image des terrils 85 et 89, 84 et 205 d’Hénin-Beaumont, le marais et les terrils de Oignies, le terril n° 36 à Noeux-les-Mines, le terril de Germignies-Nord et de Rieulay-Pecquencourt, le terril de Quiévrechain, le terril 37 de Verquin, les terrils de Haillicourt et Ruitz, le terril Renard à Denain, le terril 75 des Crêtes de Pinchonvalles, à Avion, ces deux derniers terrils ayant également fait l’objet d’arrêtés préfectoraux de protection du biotope. Il reste que ces différents instruments ne sont pas opposables aux tiers, et n’ont pour seule vocation que de dresser un inventaire de la biodiversité ; il faut aller au-delà du seul périmètre du bien inscrit, c’est-à-dire dans la zone tampon, pour trouver à titre principal trois réserves naturelles (réserve naturelle du marais de Wagnonville, réserve naturelle des Annelles, Lains et Pont Pinnet, réserve naturelle du marais de Cambrin et prairies humides Annequin-Cuinchy-Festubert), ainsi que le parc naturel régional de Scarpe Escaut. En quatrième lieu, le site du Val de Loire entre Sully-sur-Loire et Chalonnes ne constitue pas un paysage culturel équivalent aux précédents, d’abord parce que l’activité humaine ayant façonné l’espace naturel ne résulte pas d’une activité économique (minière, viticole ou agro-pastorale), mais d’une oeuvre tout à la fois politique et architecturale, ensuite parce qu’il consiste en une forme équilibrée de paysage culturel, résultant d’instruments juridiques tournés en direction tout autant de sites et d’espaces naturels protégés que d’un patrimoine monumental et urbain, sans que l’un ne vienne dominer l’autre. Le site du Val de Loire fut considéré comme paysage vivant et paysage clairement défini, c’est-à-dire créé intentionnellement par l’Homme. L’UNESCO y souligne avant tout le caractère « remarquable » du site compte tenu de la « qualité de son patrimoine architectural, avec ses villes historiques telles que Blois, Chinon, Orléans, Saumur et Tours, et plus particulièrement pour ses châteaux de renommée mondiale, comme celui de Chambord », mais également de l’existence d’« un paysage culturel exceptionnel le long d’un grand fleuve », témoignant d’un « échange d’influences de valeurs humaines et sur le développement harmonieux d’interactions entre les hommes et leur environnement sur deux mille ans d’histoire » et illustrant « à un degré exceptionnel les idéaux de la Renaissance et du siècle des Lumières sur la pensée et la création de l’Europe occidentale »24. Sous l’angle du droit français, le site rassemble une multitude d’instruments procédant du patrimoine monumental, architectural, urbain et paysager : on trouve dans le périmètre de la zone, d’une étendue de 85 394 hectares, cinq secteurs sauvegardés (Amboise, Blois, Chinon, Tours ainsi que Saumur), dont certains ont un volet paysage, 12 ZPPAUP (Candes Saint-Martin, Chinon, Saint-Dyé sur Loire, Olivet, Saint-Cyr en Val, Saint-Hilaire-Saint-Martin Saint-Pryvé, Saint-Mesmin, Meung-sur-Loire, Rochecorbon et Orléans) et une AV AP (Grandes-Saint-Martin) ainsi que 227 monuments classés et 648 monuments inscrits25. Cet ensemble monumental est complété par de multiples sites et monuments naturels classés ou inscrits au titre de la loi de 1930 (p. ex., l’île Saint-Jean sur la Commune d’Amboise, la partie du parc allant du rond-point de Madame au mur de soutènement situé près des douves du château sur la commune de Commune de Châteauneuf-sur-Loire, les perspectives de la Loire sur la commune de Tours, l’ensemble formé, sur la commune de Sully-sur-Loire, par le parc du château et les douves...), 6 réserves naturelles (Saint-Piyvé-Saint-Mesmin, Vallée de la Grand-Pierre et Vitain, réserve biologique du Coteau, réserve régionale géologique de Pontlevoy, réserve biologique du Vallon du Maupas, réserve régionale Marais de Taligny), mais aussi en excluant les nombreuses ZNIEFF, ZICO, ZPS, zones humides et autres sites Natura 2000, le parc naturel régional Loire Anjou Touraine, dont la charte 2008-2020, là encore, insiste sur l’indispensable complémentarité avec la mission Val de Loire, reconnaissant l’existence d’un paysage culturel et se donnant même pour mission d’éduquer à la notion de paysage culturel vivant26. Le paysage culturel ligérien consiste ainsi en un ensemble aussi riche que complexe et témoigne finalement de ce que les cinq sites français inscrits sur la liste du patrimoine mondial en qualité de paysage culturel ne sont en rien équivalents au regard des instruments juridiques français, confirmant la dilution des mécanismes de protection des paysages culturels.

Notes de bas de page

1 Voir http://whc.unesco.org/fr/PaysagesCulturels/

2 Voir Marie CORNU, Jérôme FROMAGEAU et Catherine WALLAERT, Dictionnaire comparé du droit du patrimoine culturel, CNRS édition, Paris, 2012, p. 764 et s.

3 Loi du 21 avril 1906 organisant la protection des sites et monuments naturels de caractère artistique.

4 Loi du 2 mai 1930 ayant pour objet de réorganiser la protection des monuments naturels et des sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque.

5 Société pour la protection des paysages en France, La loi pour la protection des sites et monuments naturels, textes, documents et commentaires relatifs à son application, Paris, 1909, p. 7.

6 Ibid., p. 7-8.

7 Loi du 13 décembre 1913 sur les monuments historiques.

8 Jean-François LEGRAND, Rapport fait au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan du Sénat sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, sur la protection et la mise en valeur des paysages et modifiant certaines dispositions législatives en matière d’enquêtes publiques, 9 décembre 1992, p. 16.

9 Décret n° 94-283 du 11 avril 1994 pris pour l’application de l’article 1er de la loi n° 93-24 du 8 janvier 1993 sur la protection et la mise en valeur des paysages et modifiant certaines dispositions législatives en matière d’enquêtes publiques et relatif aux directives de protection et de mise en valeur des paysages.

10 Voir notamment la circulaire n° 94-88 du 21 novembre 1994 prise pour l’application du décret n° 94-283 du 11 avril 1994 relatif aux directives de protection et de mise en valeur des paysages.

11 Céline FOLINAIS. Plans de paysage, Eléments de bilan, décembre 2006. p. 9.

12 Juridiction de Saint Emilion, Charte patrimoniale pour la mise en place d’un plan de gestion, 2001.

13 Pascal PLANCHET, « De la ZPPAUP à l’AVAP, le double jeu de la réforme », AJDA 2011. p. 1538 et s.

14 UNESCO, Comité intergouvernemental pour la protection du patrimoine mondial culturel et naturel, Orientations devant guider la mise en œuvre de la convention du patrimoine mondial, juillet 2013, § 46.

15 Charte du parc national des Pyrénées, approuvée par le décret en Conseil d’État n° 2012-1542 du 28 décembre 2012, p. 4.

16 Charte du parc national des Cévennes, approuvée par décret n° 2013-995 du 8 novembre 2013, p. 35.

17 Charte du parc national de la Réunion, approuvée par décret n° 2014-49 du 21 janvier 2014, p. 97.

18 http://whc.unesco.org/fr/PaysagesCulturels/

19 Communauté de communes de la juridiction de Saint-Emilion, Règlement de ZPPAUP, mars 2007, p. 3.

20 Dossier de présentation en vue de l’inscription sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO au titre du paysage culturel, p. 89.

21 Juridiction de Saint-Emilion, Charte patrimoniale pour la mise en place d’un plan de gestion, p. 7.

22 http://whc.unesco.org/fr/PaysagesCulturels/

23 Raphaël Alessandri, « Le Plan de gestion du bassin minier, organisation, gouvernance et gestion des projets », in Les biens en série du patrimoine mondial : nouvel enjeu, nouveaux critères, 17-18 décembre 2012, Poitiers, France, p. 150.

24 http://whc.unesco.org/fr/PaysagesCulturels/

25 Voir le site de la mission val de Loire : http://www.valdeloire.org

26 Parc naturel régional Loire Anjou Touraine, Charte 2008-2020, partie II – Rapport, p. 107 et 116.

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