Les sanctions en matière de réglementation des prix
p. 291-318
Texte intégral
11. En vue de garantir le respect de la législation des prix, le législateur a estimé devoir recourir au premier chef aux sanctions pénales. Il n’y a là rien d’étonnant ; le droit public économique dont relève la législation des prix, recourt en effet systématiquement aux sanctions pénales. Certes, les sanctions civiles subsistent, mais l’importance que le législateur économique leur attache est moindre, pour ne pas dire secondaire. Elles s’appliquent de surcroît. Ce manque d’intérêt pour les sanctions civiles se traduit même parfois — et c’est le cas en matière de législation des prix — par l’absence totale de toute disposition à leur sujet.
2L’espoir placé dans le droit pénal est quelque peu déçu ; la tentation est grande de recourir à des succédanés, les sanctions administratives.
CHAPITRE I. Les sanctions civiles en matière de réglementation des prix
32. La législation des prix est d’ordre public1 et, plus précisément encore, d’ordre public économique. Elle ne vise pas seulement à la protection d’intérêts privés, mais a pour objet la défense des intérêts essentiels de la collectivité. Toute société repose sur un certain ordre économique. Il en a toujours été ainsi et il en ira de même dans l’avenir. Seule la conception que l’on s’en fait évolue d’époque à époque.
4L’intervention croissante, à l’époque contemporaine, de l’Etat dans tous les secteurs de l’activité humaine, et tout particulièrement dans le domaine économique, a contribué à donner à cette notion d’ordre public économique un relief qu’elle n’avait pas auparavant. L’ordre public s’est fait envahissant. Tout ou presque tout en matière économique est devenu d’ordre public. Ce que la notion a gagné en importance, elle l’a perdu en précision. Le souci de serrer d’aussi près que possible la réalité économique sous-jacente conduit à d’incessantes modifications de la législation économique. Elle épouse les mouvements de la conjoncture. La législation des prix en est un exemple.
5Hier libres, les prix sont aujourd’hui taxés. Il n’est jusqu’au montant même de la taxe qui ne soit sujet à de multiples réajustements, tantôt à la baisse, tantôt à la hausse. L’ordre public économique devient un ordre public de circonstances. L’imprécision se double d’un sentiment de malaise. Se voulant l’instrument d’une politique économique, la règle de droit en partage les succès comme les échecs. L’objectif poursuivi est-il atteint, que la mesure juridique est jugée bonne ; dans le cas contraire, elle est considérée comme mauvaise. Ce malaise est d’autant plus grand qu’il n’existe plus d’unanimité quant à la politique à suivre. Les innombrables réglementations économiques existantes procèdent d’inspirations différentes, pour ne pas dire opposées, étant les unes néo-libérales, les autres marxistes, quand elles ne tendent pas à marier l’eau et le feu.
6Les opérateurs économiques doivent néanmoins se conformer dans leurs transactions à cet ordre public économique, sous peine d’encourir les sanctions, et notamment les sanctions civiles qui s’attachent à la méconnaissance de cet ordre. Ceci ne souffre aucune discussion. La question est toutefois de savoir si les sanctions traditionnelles doivent, compte tenu des particularités de l’ordre public économique, être appliquées telles quelles ou si certains tempéraments doivent leur être apportés. Le caractère essentiellement changeant et relatif de l’ordre public économique ne commande-t-il pas de tels assouplissements ?
SECTION 1. Le respect dû à l'ordre public économique existant au moment de la formation du contrat
73. La législation des prix étant d’ordre public, il s’ensuit que la nullité qui en sanctionne la violation est et ne peut être qu’absolue. Comme l’écrit le Professeur Limpens : « La sanction civile... résulte des principes généraux du droit, tels qu’ils sont exprimés dans les articles 6 et 1131 du Code civil : la vente conclue en méconnaissance du prix normal ou du prix maximum est contraire à l’ordre public et, partant, frappée de nullité absolue »2. Ceci entraîne, entre autres conséquences, que la nullité doit pouvoir être invoquée par toute personne qui y a intérêt. Le consommateur qui a contracté à un prix illicite justifie incontestablement d’un intérêt suffisant pour ce faire. L’on observe cependant que ce moyen est rarement invoqué par le consommateur, sans doute en partie en raison de l’ignorance des moyens légaux dont il dispose, mais aussi à cause de l’étendue de la nullité lorsque celle-ci est prononcée.
8En vue de multiplier les chances de voir prononcer la nullité de la convention conclue à un prix illicite, celle-ci pourra non seulement être invoquée par les parties, mais elle doit même au besoin être soulevée d’office. Ainsi, si les parties à la convention portent en justice une contestation ayant trait à son exécution, sans pour autant dénoncer l’illicéité du prix, il appartient au ministère public, agissant comme partie jointe, de soulever le moyen, et au Juge saisi de la contestation, de relever, même d’office, la nullité du contrat3.
9Le moyen tiré de l’illicéité du prix stipulé peut être invoqué en tout temps, et même pour la première fois devant la Cour de cassation. Celle-ci peut également le soulever d’office4.
10Une autre conséquence du caractère absolu de la nullité est que l’action en restitution des prestations effectuées en vertu du contrat déclaré nul se prescrit par 30 ans (article 2262 du Code civil).
114. S’il y a, sur tous ces points, unanimité, tant en doctrine qu’en jurisprudence, certaines questions demeurent par contre controversées.
12Un premier sujet de controverse est l’étendue de la nullité. Dans sa majorité, la doctrine et la jurisprudence belges optent en faveur de la nullité totale5. Cette solution n’est toutefois pas sans présenter de sérieux inconvénients. En effet, la nullité totale entraîne, en principe, la restitutio in integrum des prestations effectuées en exécution du contrat. S’agissant d’une vente conclue à un prix illicite, l’acheteur doit restituer au vendeur la chose vendue et le vendeur lui restituer le prix payé. Certes, l’acheteur pourra acquérir à nouveau le même bien, à un prix licite cette fois, mais il n’est nullement exclu qu’entretemps ce prix soit devenu supérieur à ce qu’il était jadis et, peut-être même, au prix illicite prévu dans le contrat annulé. En un tel cas, la nullité profite au vendeur et cause préjudice à l’acheteur. C’est en raison de ces inconvénients que certains auteurs se prononcent en faveur de la nullité partielle, consistant à maintenir le contrat mais en ramenant le prix à un niveau licite6. Cette solution — pour séduisante qu’elle soit — ne nous paraît pas pouvoir être retenue. En effet, la nullité partielle ne se conçoit que d’un élément accessoire du contrat, lorsque l’amputation de cet élément accessoire ne bouleverse pas l’économie du contrat et qu’il peut être admis que, même en l’absence de cet élément, les parties auraient contracté. Ces conditions ne sont pas réunies dans le cas de la vente conclue à un prix illicite. Le prix est en effet un élément de la vente et il est pour le moins douteux que les parties auraient malgré tout conclu la vente au prix licite.
13Certes, nous n’ignorons pas qu’un auteur comme Monsieur Ph. Simler donne de la nullité partielle une définition plus large. Pour lui, la nullité partielle s’entend également de la sanction qui frappe un acte vicié dans le quantum d’un élément essentiel et qui se réalise par la réduction du quantum excessif à la mesure de ce qui est permis, tout en laissant subsister l’acte lui-même, dès lors, en principe du moins, que le maintien de l’acte est conforme à l’intention des parties7.
14Abstraction faite des problèmes pratiques auxquels la réduction du quantum peut donner naissance, spécialement en l’absence d’un prix fixe imposé d’autorité, la conception extensive de Monsieur Simler se heurte, selon nous, à deux objections majeures. D’une part, elle lui est personnelle. Il ne peut invoquer aucun texte de portée générale qui consacre cette solution, et la jurisprudence est également en sens contraire. Chaque fois que le législateur français a entendu maintenir le contrat en réduisant le quantum excessif à la mesure de ce qui est permis, il a estimé nécessaire de le prévoir expressément. Ensuite, devant la difficulté quasi insurmontable de démontrer que les parties auraient malgré tout conclu la vente au prix licite, cet auteur pose ce qui nous paraît être une pétition de principe, à savoir qu’en la circonstance, l’ordre public économique s’oppose à ce qu’il soit tenu compte de l’intention réelle des parties pour déterminer l’étendue de la nullité8.
15Ceci ne veut évidemment pas dire qu’en raison des inconvénients pratiques dénoncés ci-dessus, la nullité partielle ne serait pas plus indiquée que la nullité totale. Il y a seulement que cette solution ne peut être retenue sans une intervention expresse du législateur9. En attendant, le juge peut, par application de l’adage « in pari causa turpitudinis cessat repetitio », supprimer les effets négatifs que peut avoir la nullité totale en refusant au vendeur qui réclame paiement du prix illicite alors qu’il a déjà livré la chose vendue, la restitution de celle-ci10. Une telle « solution » ne se conçoit cependant que dans des cas extrêmes.
16Une autre controverse porte sur le point de savoir si la nullité absolue dont est atteint le contrat conclu à un prix illicite peut être couverte par les parties à la convention, lorsque le prix illicite est volontairement ramené par elles à son niveau licite, ou, en l’absence même de toute intervention des parties, par la constatation du fait objectif qu’au moment de l’exécution du contrat, le prix stipulé n’est plus considéré comme excessif. Si son utilité est discutable, la solution ne souffre, par contre, aucune discussion. La nullité absolue est indélébile et ni la volonté des parties, ni une modification de la législation existante ne peuvent l’effacer11.
SECTION 2. La modification des exigences de l’ordre public en cours de contrat
175. Le caractère d’ordre public de la législation des prix joue, de ce point de vue également, un rôle décisif. En effet, la doctrine et la jurisprudence belges sont unanimes à considérer que le principe de la survie de la loi ancienne ne s’applique à la matière qui lui est propre des contrats patrimoniaux que lorsque la loi nouvelle est supplétive ; s’agissant, par contre, d’une loi impérative et — a fortiori — d’une loi d’ordre public, c’est le principe général de l’application immédiate, mais sans aucune rétroactivité, de la loi nouvelle aux effets futurs du contrat d’ordre patrimonial conclu antérieurement à son entrée en vigueur, qui prévaut12.
186. Dans un passé relativement récent, le législateur belge a fait une application intéressante de ce principe. La loi du 30 mars 1976 relative aux mesures de redressement économique interdit, en son article 57, § 1er, de la manière la plus large, toute variation des prix industriels et/ou commerciaux en fonction des fluctuations de l’indice des prix à la consommation ou de tout autre indice. Seule demeure licite la clause de révision des prix répondant aux conditions énumérées au paragraphe 2. Il est précisé, au paragraphe 3, que ces dispositions nouvelles s’appliquent non seulement aux contrats qui seront conclus postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi, mais également aux effets futurs des contrats déjà existants. Mais le sort réservé à la clause prohibée n’est pas le même dans les deux cas. Dans le premier, le contrat subsiste, mais amputé de la clause litigieuse, sans qu’il y ait lieu de s’attarder au point de savoir si celle-ci constituait, pour les parties, un élément essentiel de leur consentement. Il s’agit donc d’une nullité absolue, mais partielle. Dans le second cas, la clause devenue illicite ne pourra plus être appliquée dans l’avenir mais elle sera remplacée, à la demande de l’une ou de l’autre partie au contrat, par une clause de révision de prix conforme aux dispositions du paragraphe 2 de l’article 5713.
19D’une manière générale, d’ailleurs, un changement de la réglementation des prix en cours de contrat, et singulièrement une modification du montant de la taxe, n’a pas pour effet de rendre rétroactivement illicite, le prix licite sur lequel les parties s’étaient accordées au moment de la conclusion du contrat. Il y a seulement substitution pour l’avenir du montant de la taxe au prix initialement convenu. La partie qui se voit réclamer le prix ancien, ne dispose pas d’une action en nullité du contrat, mais est fondée à obtenir de son cocontractant la restitution du trop perçu.
207. Nullité totale en cas de violation de l’ordre public économique existant au moment de la formation du contrat ; maintien du contrat, mais avec restitution de ce qui sera trop perçu dans l’avenir dans le cas où les parties n’adapteraient pas leur contrat aux exigences nouvelles de la réglementation des prix. Cette disparité de solutions, pour justifiée qu’elle soit du point de vue juridique, n’est pas rationnellement satisfaisante. Il conviendrait que dans les deux cas, la partie qui a payé un prix supérieur au prix licite en vigueur au moment de l’exécution du contrat, obtienne la restitution de l’excédent. Cette harmonisation souhaitable des solutions nécessite néanmoins, comme il a été montré ci-dessus, une intervention législative.
SECTION 3. La prévention des manquements à l'ordre public économique
218. L’action en nullité du contrat conclu à un prix illicite ou l’action en restitution du supplément illicite de prix sont des moyens à la disposition du consommateur en vue d’effacer les conséquences d’une atteinte déjà portée à l’ordre public économique. Guérir le mal ne suffit pas ; il faut également empêcher, dans toute la mesure du possible, que la pratique illicite ne puisse sortir ses effets et, en tout cas, en empêcher la répétition. C’est à ce besoin que répond l’action en cessation. La pratique de prix illicites n’est pas expressément visée par la loi du 14 juillet 1971 sur les pratiques du commerce. Il n’est toutefois pas douteux que la pratique de prix illicite constitue un « acte contraire aux usages honnêtes en matière commerciale par lequel un commerçant ou artisan porte atteinte ou tente de porter atteinte aux intérêts professionnels d’un ou de plusieurs autres commerçants ou artisans » (article 54 de la loi)14.
229. Demeure par contre controversée, la question de savoir si le consommateur agissant à titre individuel rentre dans la catégorie des « intéressés » visée à l’article 57, alinéa 1er, de la loi, à la requête de qui peut être formée la demande en cessation de tout acte contraire aux usages honnêtes en matière commerciale. Bien qu’une interprétation restrictive trouve un certain appui dans les travaux préparatoires de la loi15, il nous paraît que ce droit doit être reconnu au consommateur agissant à titre individuel.
23D’une part, le texte même de l’alinéa 1er de l’article 57 ne réserve pas aux seuls commerçants l’action en cessation, mais utilise la notion plus extensive d’intéressés. D’autre part, il n’existe aucun argument de raison qui justifie que l’on refuse au consommateur agissant à titre individuel le droit d’agir en cessation de tout acte contraire aux usages honnêtes en matière commerciale qui a pour auteur un commerçant ou un artisan, dès lors, d’une part, que cet acte est susceptible de porter atteinte aux intérêts professionnels d’un ou de plusieurs autres commerçants ou artisans (exigence formulée par l’article 54) et que, d’autre part, cet acte lui cause ou est susceptible de lui causer un préjudice personnel. Ce n’est pas parce que ce droit est refusé aux associations de consommateurs ou au ministre des affaires économiques qu’il doit être refusé au consommateur agissant à titre individuel. Il se conçoit en effet que dans un système juridique à caractère essentiellement individualiste comme le nôtre, le droit d’agir en cessation reconnu à l’association de consommateurs soit moins étendu que celui qui revient au consommateur agissant à titre individuel, et ne porte que sur une série de pratiques limitativement énumérées par la loi16.
24Force est cependant de reconnaître d’un point de vue pratique que si, indépendamment du problème de la démocratisation de la justice, le consommateur retire d’une action en nullité ou en responsabilité un avantage pécuniaire tangible prenant la forme d’une restitution totale ou partielle du prix payé, il en va différemment dans le cas de l’action en cessation où le consommateur ne peut espérer obtenir autre chose que l’injonction faite au commerçant ou à l’artisan de cesser la pratique incriminée. Autrement dit, même si ce droit leur était reconnu sans aucune contestation, il ne faudrait pas s’attendre à de nombreuses initiatives de la part des consommateurs agissant à titre individuel17.
259. Le but poursuivi, empêcher la répétition de certaines pratiques commerciales et la propagation de leurs effets, a conduit le législateur à reconnaître aux associations de défense des consommateurs le droit d’agir en cessation d’un certain nombre d’actes tenus par lui comme portant atteinte aux intérêts en vue de la défense desquels ces associations ont été constituées. Ces actes sont ceux définis à l’article 55, litteras a à h de la loi du 14 juillet 1971. La pratique de prix illicites n’est pas visée. L’on peut s’étonner que cette reconnaissance ait été aussi timide, alors pourtant qu’elle ne présentait pas les mêmes difficultés que la reconnaissance au profit des associations de défense des consommateurs du droit d’agir en réparation18.
26La solution retenue est toutefois perfectible et la liste des actes à l’égard desquels l’association de défense des consommateurs peut agir en cessation, est susceptible d’être complétée, notamment en y ajoutant les pratiques de prix illicites. Plus regrettable est le peu de succès que cette action a rencontré auprès des organisations de consommateurs19.
2711. Bien plus actif est le rôle joué dans le domaine de l’action en cessation par le ministre des affaires économiques. L’on doit à la vérité d’ajouter que bien souvent, l’action du ministre sera introduite à la suite de plaintes déposées auprès de ses services par des consommateurs ou encore, plus fréquemment, par leurs organisations de défense. Les actes à l’égard desquels le ministre peut intervenir sont les mêmes que ceux vis-à-vis desquels les associations de consommateurs peuvent agir. Leur liste est susceptible d’être allongée et étendue à la pratique de prix illicites. Sans doute est-ce la reconnaissance de ce droit d’action au profit du ministre qui explique en fait que jusqu’à présent le ministère public n’a pas estimé devoir intervenir d’office sur la base de l’article 138 du Code judicaire. Cependant sur le plan des principes, le pouvoir d’action du ministre n’exclut pas celui du ministère public. L’action de ce dernier est à la fois plus restreinte et plus étendue. S’il ne peut intervenir qu’en cas d’impérieuse nécessité lorsque l’ordre public est compromis, les cas dont il peut requérir la cessation ne sont pas exclusivement ceux définis à l’article 55, littéras a à h ; ceux définis au littera i sont également visés dans la mesure où ils font courir un grave danger à l’ordre public. Le ministère public pourrait donc, dans certains cas, requérir la cessation de pratiques de prix illicites. Certes, le ministère public doit agir avec prudence et circonspection. Toutefois, comme l’écrit le Professeur L. Van Bunnen, « Dans la mesure où l'action en cessation tient le criminel en état (article 61 de la loi), il paraît normal que le ministère public puisse, s’il le préfère, agir en cessation dans les cas où il songeait à mettre d’office en mouvevement l'action pénale »20.
CHAPITRE II. Les sanctions pénales en matière de réglementation des prix
2812. D’emblée, il a été souligné qu’en matière de réglementation des prix, la répression était essentiellement pénale. Tout ou presque tout est érigé en infraction, et ces infractions sont, dans leur grande majorité, des infractions non intentionnelles, c’est-à-dire des infractions dans lesquelles la loi déduit de la matérialité du fait la présomption de la faute du prévenu21. Cette faute présumée consiste dans un manquement à l’obligation d’étudier les textes applicables à la matière et de les appliquer correctement.
29Citons les infractions les plus connues à la législation des prix :
- la vente de biens ou la prestation de services à un prix supérieur au prix normal ou au prix maximum, individualisé ou sectoriel ;
- la réalisation d’un bénéfice anormal ;
- l’absence de déclaration de hausse de prix ;
- l’application anticipée, sans autorisation, de la hausse de prix déclarée ;
- l’absence de notification du prix d’un produit ou d’une prestation pouvant être considérés comme nouveaux ;
- l’accroissement anormal de la marge de distribution dans les conditions prévues à l’article 9 de l’arrêté ministériel du 22 décembre 1971 ;
- le refus de vendre dans les conditions prévues aux articles 2, § 3, et 4 de la loi sur la réglementation économique et les prix.
30Toutes ces infractions et les autres sont recherchées, constatées poursuivies et punies conformément aux dispositions des chapitres II et III de la loi du 30 juillet 1971 sur la réglementation économique et les prix, dispositions considérées comme étant parmi les plus représentatives du droit pénal économique.
SECTION 1. La poursuite des infractions à la législation des prix
3113. Comme l’écrit le Doyen R. Savatier à propos de la plasticité de l’ordre public économique : « ...ce ne sont pas non plus les Parquets qui prendront d’eux-mêmes la responsabilité de poursuivre des délits économiques. L’économique entre, dans leur champ de vigilance, un peu comme un corps étranger. Ainsi qu'il arrive pour toutes les infractions techniques, une police spécialisée est nécessaire pour alerter le Parquet »22. Ce phénomène est particulièrement visible en matière d’infractions à la législation des prix. En pratique, ce sont presque exclusivement les agents de l’Inspection générale économique qui contrôlent la manière dont la législation des prix est appliquée, dressent des procès-verbaux faisant foi jusqu’à preuve contraire à charge des contrevenants et, sauf transaction administrative, transmettent le dossier au ministère public23. Pour pouvoir exercer leur mission de contrôle, les agents de l’Inspection générale économique disposent de pouvoirs exorbitants, vestige d’un temps révolu où sévissait le « marché noir ». Si l’existence d’un corps de fonctionnaires spécialisés dans le contrôle de l’application de toutes les réglementations économiques constitue un rouage essentiel d’une répression efficace, encore faut-il que ces fonctionnaires soient en nombre suffisant, compte tenu de l’étendue de la mission qui leur est confiée.
32Le droit de poursuivre la condamnation des contrevenants devant la juridiction répressive, appartient au ministère public. En droit belge, il n’a jamais été contesté que le consommateur agissant à titre individuel pouvait non seulement déposer plainte du chef d’infraction à la législation des prix, mais encore se constituer partie civile par intervention ou autrement. Le consommateur qui a subi un préjudice direct et personnel trouvant sa cause dans une infraction à la législation des prix, peut indifféremment en réclamer la réparation devant la juridiction civile ou devant la juridiction répressive.
3314. Si le droit des consommateurs de se constituer personnellement partie civile est consacré, le même droit est-il reconnu à leurs associations de défense ? Celles-ci peuvent-elles déclencher la mise en œuvre de l’action publique à charge des contrevenants à la législation des prix ?
34La doctrine belge la plus récente professe que les associations de défense des consommateurs, et de manière tout à fait générale les groupements de droit privé, ne peuvent, en l’absence d’une disposition légale, se constituer partie civile en vue de réclamer devant la juridiction répressive la réparation du préjudice atteignant dans l’intérêt en vue duquel ils se sont associés, tous et chacun des membres du groupement ou du préjudice portant atteinte aux intérêts pour la défense desquels le groupement s’est constitué sans que, dans ce second cas, cette atteinte doive nécessairement se traduire par un préjudice pour les membres du groupe. Le point de départ du raisonnement est le même. L’action civile est une action en responsabilité et suppose dès lors nécessairement l’existence d’un préjudice propre et réparable.
35Si les justifications avancées diffèrent : impossibilité selon le Professeur J. Dabin de discerner dans les deux cas un préjudice qui serait propre au groupement24 ; reconnaissance par le Professeur J. Van Compernolle de l’existence d’un préjudice personnel de nature moral souffert par le groupement du fait de l’atteinte portée à la valeur en vue de la défense duquel le groupement a été constitué, mais constatation que ce préjudice demeure de pur fait et n’acquiert dès lors pas la nature d’une lésion de droit qui seule confère l’intérêt requis pour agir en justice25, la conclusion est la même : l’association se voit refuser le droit d’agir en réparation en se prévalant d’un préjudice collectivement souffert par ses membres ou d’une atteinte au but en vue de la défense duquel elle a été constituée et, par voie de conséquence, celui de constituer partie civile.
36Quant à la jurisprudence, elle paraît fermement établie dans le sens que les groupements de droit privé ne peuvent, à défaut d’une disposition légale les y autorisant, agir en réparation du préjudice subi par tous et chacun de leurs membres ou du préjudice portant atteinte aux intérêts pour la défense desquels ils se sont constitués. La démarche habituellement suivie par le juge est la suivante. Après avoir rappelé que pour être reçu à se constituer partie civile devant la juridiction répressive, on doit justifier que l’on est de ceux qui ont pu être victimes directes de l’infraction et que, faute de ce faire, on doit être tenu pour étranger à celle-ci et être écarté du débat par une fin de non-recevoir, le juge constate que dans le cas qui lui est soumis, l’association reste en défaut d’apporter cette justification. Il s’y ajoute en arrière fond, la préoccupation de préserver, autant que faire se peut, le monopole dont dispose le ministère public en matière de poursuites répressives26.
37Faut-il en déduire que la voie de la constitution de partie civile est définitivement fermée aux associations de défense des consommateurs ? Un mouvement existe — et il paraît bien irrésistible — qui vise à consacrer, voire à élargir le droit d’action en justice des groupements en général et des associations de défense des consommateurs en particulier Déjà, la loi du 14 juillet 1971 sur les pratiques du commerce leur a reconnu le droit d’agir en cessation. Mais il semble bien qu’il ne s’agit là que d’une simple étape. L’on peut, sans risque de se tromper, prédire que dans un avenir proche, ces mêmes associations se verront reconnaître le droit de se constituer partie civile. Il suffira d’une loi pour que cette réforme se réalise. Des précédents existent : la loi belge du 31 mars 1898 qui, telle qu’elle a été interprétée par la Cour de cassation, reconnaît aux unions professionnelles le droit d’agir en qualité de partie civile pour réclamer la réparation du préjudice causé à l’Union par l’atteinte aux intérêts pour la protection desquels l’Union a été constituée, et aussi le droit d’agir pour la défense des droits individuels que ses membres tiennent de leur qualité d’associés27, et plus récemment, en France, la loi Royer du 27 décembre 1973 dont l’article 46 dispose que les associations régulièrement déclarées ayant pour objet statutaire explicite la défense des intérêts des consommateurs peuvent, si elles ont été agréées à cette fin, exercer devant toutes les juridictions l’action civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif des consommateurs28. Si nécessaire que soit la réforme, il ne faut pas cacher que la reconnaissance au profit des associations de défense des intérêts des consommateurs du pouvoir de se constituer partie civile a pour effet une dénaturation de l’action civile.
38Les meilleurs auteurs en sont d’accord qui qualifient l’action civile des associations de défense des consommateurs d’« action civile fictive »29 (ou encore d’« action quasi publique »30. C’est qu’en effet l’action civile n’est plus que très accessoirement, pour ne pas dire artificiellement, une action en responsabilité. La demande de condamnation du contrevenant au paiement du franc symbolique à titre de réparation du dommage (moral) subi par le groupement masque mal l’objet et le but réels de l’action, qui sont la prévention et la répression des infractions ayant causé ou susceptibles de causer préjudice aux consommateurs.
39L’action civile ne se différencie guère en la circonstance de l’action publique exercée par le ministère public, si ce n’est qu’au lieu d’être exercée en vue de la défense de l’intérêt général, elle l’est dans l’intérêt d’une catégorie plus restreinte de bénéficiaires, les consommateurs. Il va sans dire que cette « dénaturation de l’action civile » ne peut aller de pair avec une « dévaluation de l’action publique ». Seules les associations véritablement représentatives des consommateurs peuvent être admises à se constituer partie civile. Comme l’écrit le Professeur R. Perrot « ... l’action collective, utile pour déclencher des procédures que le consommateur isolé hésiterait sans doute à engager, utile aussi dans la mesure où la décision de justice obtenue dans ces conditions peut avoir un effet préventif, ne fait pas et ne petit pas faire double emploi avec l’action individuelle... qui, en dernière analyse, reste la seule voie efficace d'indemnisation du consommateur personnellement lésé »31. Loin de s’exclure, les deux actions se complètent.
SECTION 2. Le pouvoir de transiger du ministère public
4015. Alors que suivant les principes traditionnels de la procédure pénale, il est interdit au ministère public de disposer de l’action publique, la loi sur la réglementation économique et les prix lui donne ce pouvoir.
41En effet, en vertu de l’article 11, § 1er de la loi, le procureur du Roi dispose du pouvoir de transiger. Il peut faire connaître, par lettre recommandée, au contrevenant qu’il lui est loisible d’éviter les poursuites en exécutant une ou plusieurs des prestations qu’il indique. En cas d’acceptation de l’offre de transaction et d’exécution de celle-ci dans le délai prescrit, l’action publique est définitivement éteinte. La transaction revêt en pratique une importance considérable. Elle est devenue le point normal d’aboutissement des poursuites. Si le procureur du Roi dispose d’un large choix quant aux prestations qu’il impose au « contrevenant » comme condition d’extinction de l’action publique, en pratique, la transaction porte sur le paiement d’une somme d’argent. Le procureur du Roi dispose d’une totale liberté pour en fixer le montant. En effet, la loi n’indique ni minimum ni maximum. Elle se borne à mentionner que le montant pourra dépasser le maximum de l’amende qui est de 1.000.000 francs. Dans la pratique, le parquet use avec une extrême modération — certains diront avec une extrême tiédeur — de son pouvoir32.
4216. En plus du pouvoir d’éteindre l’action publique par voie de transaction, le ministère public dispose également — ce qui est assez exceptionnel — de celui de prendre des mesures provisoires à l’endroit du prévenu en attendant que la juridiction de jugement se soit prononcée sur sa culpabilité. L’une de ces mesures, la mise en vente des biens saisis par les agents chargés de rechercher et de constater les infractions à la législation des prix, est totalement tombée en désuétude.
43L’autre mesure consiste dans la fermeture provisoire de l’établissement du contrevenant. Prononcée isolément, elle n’est guère plus usitée que la première. Il semble toutefois que certains Parquets aient eu l’idée d’appliquer ensemble les paragraphes 1 et 2 de l’article 11 de la loi sur la réglementation économique et les prix, en assortissant la mesure de fermeture provisoire de l’entreprise du contrevenant d’une offre de transaction. La Cour européenne des Droits de l’Homme s’est, dans son arrêt du 5 février 1980, rendu dans l’affaire Deweer, prononcée sur la compatibilité avec l’article 6, § 1er, de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales, qui consacre le droit à un procès équitable, de l’« utilisation combinée » des paragraphes 1 et 2 de l’article 11 de la loi sur la réglementation économique et les prix. Après avoir pris grand soin de préciser qu’elle n’entendait pas statuer sur la compatibilité avec la Convention de la mesure de fermeture provisoire ou de la transaction envisagée isolément, mais bien sur celle de leur utilisation combinée, la Cour a conclu à l’existence d’une violation de l’article 6, § 1er, de ladite Convention. Elle se fonde à cet effet sur la considération que si le système des amendes de composition, qui implique renonciation par le « contrevenant » à se prévaloir de son droit à un examen de sa cause par un tribunal, ne se heurte pas en principe à la Convention en raison des avantages indéniables qu’il présente pour les intéressés comme pour l’administration de la justice, encore n’est-ce qu’à la condition que cette renonciation ait lieu en l’absence de contraintes. Si la perspective de comparaître devant le juge pénal est — comme le relève la Cour — assurément de nature à inciter beaucoup d’« accusés » à se montrer accommodants et à accepter l’offre de transaction qui leur est faite, la pression qu’elle crée sur eux n’a rien d’incompatible avec la Convention. Constitue, par contre, une pression incompatible la mesure de fermeture qui devait prendre fin soit le lendemain du versement d’une somme de 10.000 francs à titre de règlement amiable, soit au plus tard le jour où il aurait été statué sur l’infraction. Cette pression était d’autant plus grande qu’il existait « une disproportion flagrante » entre les deux termes de l’alternative offerte au requérant. Comme le souligne la Cour, la « relative modicité » de la somme réclamée renforçait la pression exercée par l’ordre de fermeture. Elle la rendait si contraignante que l’on ne saurait s’étonner que l’intéressé y ait cédé.
SECTION 3. Le jugement des infractions à la législation des prix
4416. Dans son étude précitée, le Doyen Savatier présente l’ordre public économique comme étant essentiellement mouvant, empreint d’une grande plasticité, empirique et opportuniste. La réglementation des prix présente les mêmes caractères. Le juge est d’abord confronté avec une réglementation sujette à de constants changements. De même que celui qui a vendu un bien ou s’est engagé à prester un service à un prix illicite n’échappe pas à la sanction civile par suite d’une simple modification de la réglementation des prix, de même, il n’échappera pas à la sanction pénale. Ceci se comprend. L’application au prévenu de la lex mitior ne se justifie pas. La mesure réglementaire a été prise dans un contexte économique donné. Si ce contexte vient à se modifier, une autre mesure devra être prise. La mesure initiale n’en était pas moins justifiée et il n’existe aucune raison valable de ne pas appliquer au délinquant les sanctions pénales dont elle était alors assortie. Admettre le contraire serait, au surplus, inciter le prévenu à recourir à des manœuvres dilatoires pour postposer le jugement jusqu’à la survenance d’une nouvelle réglementation qui lui soit plus favorable. Ce n’est que s’il était certain que le changement de réglementation correspond à un repentir de son auteur que la lex mitior redeviendrait applicable33.
4518. La plasticité de la matière se manifeste notamment dans la définition des infractions économiques. Alors qu’en droit pénal classique, les définitions se caractérisent par leur concision et leur clarté, bien souvent la définition du délit économique, et entre autres des infractions à la législation des prix, manque de précision et de netteté. Ainsi, pour ne prendre qu’un exemple, comment distinguer le délit de refus de vendre visé à l’article 4, littéra b, du refus de vendre dont il est question à l’article 2, § 3, de la loi sur la réglementation économique et les prix ?34. La définition est parfois même laissée inachevée. Tel est le cas du délit de vente ou de prestation de service à un prix anormal ou encore du délit de réalisation d’un bénéfice anormal. Dans les deux cas, c’est au juge qu’est laissé le soin de préciser les contours de l’infraction.
4619. Une autre difficulté provient du caractère empirique de l’ordre public économique. La règle procède encore, dans une très large mesure, par voie d’approximations et de tâtonnements. Les prévisions qu’elle formule et sur lesquelles elle se fonde, constituent toujours un pari sur l’avenir. Ces prévisions peuvent être déjouées, soit que des événements imprévus se soient produits, soit encore parce que le diagnostic a été mal posé. L’on comprend dès lors que si le juge répressif n’éprouve aucune hésitation à sanctionner l’assassin ou le violeur, il se sente moins à l’aise lorsqu’il s’agit de punir celui qui a contrevenu à une réglementation économique présentant un caractère expérimental et temporaire. Ceci s’applique tout particulièrement aux arrêtés fixant des prix maxima dont il s’avère, par après, qu’ils ont compromis la rentabilité, sinon l’existence même de l’entreprise ou des entreprises concernées.
4720. Enfin, l’ordre public économique se veut opportuniste. Ce qui est avant tout recherché, c’est l’efficacité des mesures économiques adoptées. Les sanctions pénales font, dans une certaine mesure, office d’épouvantail. Leur rôle est essentiellement préventif. La plupart du temps, elles ne sont pas appliquées. C’est par voie d’avertissements ou de transactions administratives que les contrevenants à la réglementation des prix sont ramenés dans le droit chemin. Ce n’est que dans les cas les plus graves ou lorsqu’il y a récidive que des poursuites pénales seront intentées et des sanctions pénales requises et prononcées.
4821. Ce qui d’emblée attire l’attention est, d’une part, le large éventail de peines susceptibles d’être prononcées par le juge pénal et, d’autre part, leur extrême gravité. La loi sur la réglementation économique et les prix prévoit la peine de l’emprisonnement. Mais cette peine revêt en pratique un caractère tout à fait exceptionnel. La peine la plus fréquemment prononcée est celle de l’amende. Il n’y a là rien que de très normal. Ce qui l’est beaucoup moins est l’extrême rareté des décisions dans lesquelles le juge pénal a prononcé, en sus de la peine d’amende, la condamnation du contrevenant à payer une somme correspondant au bénéfice indûment réalisé ou à la hausse illicite des prix. Une répression efficace des infractions à la législation des prix devrait, à notre sens, conduire à l’application systématique par les cours et tribunaux de ces deux peines, qui se complètent naturellement en condamnant le contrevenant à payer une somme correspondant au bénéfice indûment réalisé ou à la hausse illicite des prix, l’on efface les conséquences de l’infraction : l’opération devient « blanche » ; en prononçant une amende, l’opération devient déficitaire.
49En sus de l’amende et de l’attribution au profit du Trésor, la loi sur la réglementation économique et les prix prévoit, comme autre peine privative de patrimoine, la confiscation spéciale dans des conditions largement dérogatoires au droit commun35. L’efficacité de cette peine est, il convient de le noter, renforcée dans la mesure où les objets sur lesquels elle porte, peuvent avoir été préalablement saisis par les agents chargés de rechercher et de constater les infractions36.
50Comme autres peines, la loi sur la réglementation économique et les prix prévoit des interdictions professionnelles. Les cours et tribunaux peuvent prononcer l’interdiction ou la restriction pour le contrevenant du droit d’exercer personnellement ou par personne interposée la profession ou le commerce dans l’exercice duquel l’infraction a été commise ou une profession ou un commerce connexes. Cette mesure peut être définitive ou temporaire. Il s’agit là manifestement d’une interdiction professionnelle personnelle. Les cours et tribunaux peuvent également prononcer, à titre de peine, la fermeture de l’établissement pour une durée n’excédant pas un an. Réelle en raison de l’objet auquel elle s’applique, l’entreprise, cette mesure a également un caractère personnel. En effet, sauf le cas exceptionnel du tiers de mauvaise foi, la fermeture ne peut plus frapper l’établissement d’un tiers, mais uniquement celui du contrevenant. Comme l’écrivait M. R. Hayoit de Termicourt, alors premier avocat général : « Il ne suffit pas que l'infraction ait été commise dans un établissement déterminé, pour que la fermeture de celui-ci puisse être ordonnée : il faut que cet établissement soit celui d’un auteur ou complice de l’infraction ou, s’il s’agit d’une société, que l’organe ou le représentant légal de celle-ci soit auteur ou complice de Γ infraction »37. Il n’existe à notre connaissance aucune décision dans laquelle le juge pénal a estimé devoir prononcer séparément ou cumulativement les deux interdictions. Il ne faut pas s’en étonner. En matière d’infractions à la législation des prix, cette peine apparaît comme totalement démesurée et conduisant à des conséquences sociales néfastes tant pour le contrevenant que pour les tiers. Par contre, l’on s’explique mal pourquoi les cours et tribunaux ne recourent pas plus souvent à la possibilité que leur offre la loi sur la réglementation économique et les prix de donner une large publicité à leurs décisions de condamnation par la voie de la presse, du film ou de la radio. Une telle publicité à rebours est en effet de nature à faire réfléchir sérieusement le contrevenant et à le dissuader de retomber dans les mêmes errements. Elle permet également d’éviter un effet de contagion de la pratique illicite. Dans son étude « Le rôle du juge pénal belge en présence des problèmes économiques », Monsieur J. Messinne signale qu’à sa connaissance, il est une seule décision à avoir été diffusée par la radio ; il s’agissait d’une condamnation pour la location de chambres à des prix anormaux pendant l’Exposition Universelle de 1958 à Bruxelles38.
51Le juge peut ordonner l’exécution provisoire des condamnations nonobstant tout recours. C’est là un pouvoir exhorbitant du droit commun qui ne nous paraît nullement justifié.
CHAPITRE III. Les sanctions administratives en matière de réglementation des prix
5222. Si l’administration, et singulièrement l’Inspection générale économique, a toujours joué un rôle essentiel dans la recherche et la constatation des infractions à la législation des prix, le pouvoir de décider de la suite à donner aux procès-verbaux dressés par les inspecteurs de l’inspection générale économique a, jusqu’il y a peu, été l’apanage du ministère public. C’est à lui qu’il appartenait de décider de classer l’affaire sans suite, d’éteindre l’action publique par voie de transaction ou encore de mettre l’action publique en mouvement et de requérir du juge pénal l’application de la peine estimée adéquate. Désormais, le monopole dont disposaient ainsi les autorités judiciaires est battu en brèche. La loi du 30 juillet 1971 dite loi sur la réglementation économique et les prix, modifiant l’arrêté-loi du 22 janvier 1945, renforce considérablement les pouvoirs de l’administration. Celle-ci se voit d’abord conférer le pouvoir d’éteindre l’action publique par voie de transaction. Lorsque les inspecteurs de l’inspection générale économique constatent des infractions, ils peuvent fixer une somme d’argent dont le paiement volontaire par l’auteur de l’infraction éteint l’action publique. En clair, ceci signifie que c’est le ministre des affaires économiques qui, par l’intermédiaire de ses agents spécialisés dans la détection des infractions à la législation des prix, décide souverainement de la suite à donner aux procès-verbaux dressés par ses fonctionnaires. Le ministère public se voit contraint de jouer les seconds rôles. En effet, seules les affaires qui n’ont pu se régler « à l’amiable » seront, le cas échéant, transmises pour suite au parquet. La reconnaissance à l’administration de ce pouvoir de transiger peut se comprendre : ce pouvoir est accordé à un corps de fonctionnaires spécialisés dans des matières techniques avec lesquelles les membres du Parquet sont généralement peu familiarisés ; la conclusion d’une transaction met rapidement fin à la situation délictueuse ; judicieusement appliquée, la transaction permet de faire un tri préalable entre les infractions qui méritent les foudres de la répression pénale et les autres. Par ailleurs, l’on ne peut reprocher à cette procédure de distraire le prévenu de son juge naturel puisque la transaction ne lui est pas imposée, mais doit être acceptée par lui.
5323. L’administration s’est non seulement vue conférer, comme le parquet, le pouvoir de transiger, mais elle a également reçu de la même loi du 30 juillet 1971 le pouvoir, qui précisément appartenait aux seuls procureur du Roi et magistrat instructeur, d’ordonner la fermeture provisoire de l’établissement du contrevenant. Si la fermeture provisoire ordonnée par le ministre des affaires économiques a la même nature de mesure de police administrative que celle ordonnée par le parquet ou par le juge d’instruction, les conditions d’exercice ne sont cependant pas les mêmes. Ainsi, elle ne peut être prononcée qu’en cas de non-observation d’un prix maximum sectoriel ou individuel et pour autant que le contrevenant refuse d’obtempérer aux instructions des agents commissionnés par le ministre. Elle ne peut avoir lieu sans mise en demeure préalable notifiée à l’intéressé par pli recommandé, et sa durée ne peut excéder 5 jours. Autre particularité de la mesure quand elle est ordonnée par le ministre : celui qui en fait l’objet dispose d’un droit de recours à exercer par voie de requête, dans les 5 jours de la notification de la décision du ministre, auprès de la chambre du conseil du tribunal de première instance compétente en matière répressive dans le ressort de laquelle est établi le domicile du prévenu ou le siège de son entreprise. La chambre du conseil statue sur le recours dans les 8 jours du dépôt de la requête, et ce en dernier ressort, après avoir entendu le ministre ou l’agent délégué par lui en son rapport, l’intéressé ou son conseil en ses moyens et le procureur du Roi en son avis. La chambre du conseil doit contrôler si la décision du ministre a été prise dans les formes et dans les conditions prescrites par la loi. En disposant qu’elle doit également vérifier si les faits sont susceptibles d’être constitutifs d’infraction, la loi du 30 juillet 1971 se réfère visiblement au pouvoir d’appréciation dont dispose la chambre du conseil lorsqu’elle règle la procédure à la fin de l’instruction préparatoire. Comme on le sait, elle ne se prononce pas sur la culpabilité, mais se limite à vérifier s’il existe ou non des indices suffisants justifiant le renvoi du prévenu devant la juridiction du fond. En l’espèce, l’existence de charges suffisantes justifie la fermeture provisoire de l’entreprise du contrevenant. Il nous paraît que dans l’exercice de cette mission, même ainsi limitée, la chambre du conseil du tribunal de première instance ne peut se dispenser de se prononcer sur la légalité, tant externe qu’interne, de l’arrêté ministériel fixant un prix maximum sectoriel ou individuel qui sert de base légale à la décision de fermeture provisoire de l’entreprise. Ceci suppose bien entendu qu’elle soit régulièrement saisie de conclusions contestant la légalité de l’arrêté ministériel en question39.
CHAPITRE IV. Vers une dépénalisation des infractions en matière de prix
5424. L’octroi à l’administration du pouvoir d’éteindre l’action publique par voie de transaction constitue déjà une manifestation de cette tendance à la dépénalisation. Il en est d’autres. En vue d’assurer le respect effectif du prix maximum de vente au détaillant ou au consommateur fixé par voie réglementaire ou contractuelle, la loi du 23 décembre 1969 érige en délit pénal le refus par les producteurs et distributeurs de satisfaire, dans la mesure de leurs possibilités et dans les conditions conformes aux usages commerciaux, les demandes de produits ou de prestations de services faites par les distributeurs ou les consommateurs lorsqu’elles ne présentent aucun caractère anormal et qu’elles émanent de demandeurs de bonne foi.
55Ce refus n’est punissable que si le but poursuivi par son auteur est de tenir en échec le prix maximum. La loi prévoit expressément que toute partie qui s’estime lésée par le refus de vente considéré peut s’adresser aux cours et tribunaux. Référence est de la sorte faite au droit de la partie qui a subi un préjudice à la suite d’une infraction, de se constituer partie civile à charge de l’auteur de cette infraction. Il est toutefois manifeste que c’est là, dans l’esprit du législateur, une solution extrême à laquelle il ne devrait être recouru qu’en désespoir de cause. Sa préférence va manifestement à une procédure de conciliation. La partie lésée peut et, en réalité, est même invitée à s’adresser à la commission pour la régulation des prix laquelle regroupe, comme on le sait, les représentants de toutes les parties prenantes, en ce compris les représentants des consommateurs n’y étant toutefois représentés qu’indirectement.
5625. La loi du 23 décembre 1969 est célèbre à un autre titre. C’est elle qui a conféré au ministre des affaires économiques le pouvoir de conclure des contrats de programme qui — la loi le prévoit expressément — sont assortis d’une clause prévoyant une indemnité à payer en cas d’inexécution. L’utilisation du terme « indemnité » n’est pas le fruit du hasard ; elle correspond à la volonté délibérée du législateur de « dépénaliser » la matière. La sanction est exclusivement de nature contractuelle. Plus précisément, il s’agit d’une sanction contractuelle pécuniaire relevant de la catégorie des pénalités. Comme nous l’avons relevé ailleurs, elle en présente, en effet, les principales caractéristiques : évaluation forfaitaire des dommages et intérêts dans le contrat, privilège du préalable, non-exigence d’un préjudice et cumul possible avec la sanction résolutoire. Une particularité est toutefois à signaler : le titre que le ministre se donne n’est pas pleinement exécutoire. La décision ne pourra, en cas de recours, être exécutée qu’après que le juge judiciaire se sera définitivement prononcé sur sa régularité40.
5726. Un autre exemple de dépénalisation complète de la matière nous est offert par l’article 57 de la loi du 30 mars 1976 relative aux mesures de redressement économique, qui réglemente l’utilisation des clauses d’indexation des prix industriels et commerciaux. Que le contrat contenant une clause d’indexation illicite ait été conclu antérieurement ou postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi, la solution est la même dans les deux cas : le contrat subsiste, mais la clause illicite est réputée non écrite. Cette sanction purement civile est la seule que les parties cocontractantes puissent encourir.
58L’intérêt de la distinction entre contrat conclu avant ou après l’entrée en vigueur de la loi réapparaît ailleurs. Lorsque le contrat a été conclu avant l’entrée en vigueur de la loi, chaque partie au contrat peut exiger de l’autre l’insertion, en remplacement de la clause devenue interdite, d’une clause de révision licite. En cas de désaccord des parties sur le texte de cette clause, la procédure de règlement du litige est également de nature exclusivement civile. La demande est portée, par voie de requête, devant le tribunal de première instance. Une procédure de conciliation facultative est prévue. Les parties peuvent même si elles le préfèrent, transiger et compromettre. Ceci vaut même pour l’Etat et les personnes de droit public.
Conclusion
5927. La loi du 22 janvier 1945 sur la réglementation économique et les prix, anciennement arrêté-loi du 22 janvier 1945 concernant la répression des infractions à la réglementation relative à l’approvisionnement du pays, fait figure de précurseur.
60Les éminents pénalistes qui se sont penchés sur le phénomène du droit pénal économique, y voient un texte tout à fait fondamental auquel ils empruntent nombre d’exemples. En procédant à un examen d’ensemble des dispositions répressives de cette loi, nous avons pu vérifier et souligner leur caractère original. Il s’y exprime, de manière continue, le souci d’adapter les sanctions aux exigences de l’ordre public économique. Pendant longtemps, il apparut que seul le droit pénal était en mesure d’assurer une répression efficace des infractions à la législation des prix.
61L’on prit donc pour modèle le droit pénal existant, mais en y apportant, toujours au nom de l’efficacité, de nombreuses dérogations allant toutes dans le sens d’un renforcement de la répression. L’objectif poursuivi a-t-il été atteint ? La discussion est ouverte. D’aucuns prétendront que la seule crainte de cette répression suffit à garantir l’efficacité du système mis en place, d’autres feront au contraire valoir que les
62 moyens répressifs disponibles sont à ce point exorbitants que ceux qui en disposent répugnent à les utiliser — ce qui contribue à créer dans l’esprit des contrevenants un sentiment d’impunité.
63L’observation des faits et l’évolution législative semblent donner raison à ces derniers. La tendance est à une certaine dépénalisation. Ceci se traduit par la reconnaissance au profit de l’Administration du pouvoir d’éteindre l’action publique moyennant paiement d’une amende transactionnelle. Les sanctions pénales existantes demeurent, mais elles ne seront plus appliquées que dans les cas extrêmes. C’est par la voie de la « persuasion contraignante » ou encore par le recours à la « conciliation » que l’on entend mettre fin aux pratiques de prix illicites. Dans d’autres cas, la dépénalisation est complète. La répression est exclusivement civile.
64La coexistence au sein d’une même législation de dispositions prohibitives dont les unes sont sanctionnées pénalement et les autres civilement, sans que rien a priori ne permette d’en apercevoir la raison d’être, contribue à renforcer l’impression que les dispositions répressives de la législation sur la réglementation économique et les prix constituent le champ d’expérience d’un « droit pénal économique » encore à la recherche de son identité.
65Cette recherche doit bien entendu se faire en fonction des intérêts que la législation consacre et entend promouvoir. Ces intérêts sont au premier chef ceux de la collectivité toute entière, mais ils peuvent également être ceux des consommateurs. Il s’agit donc de sauvegarder les premiers, sans pour autant sacrifier les seconds. La reconnaissance au profit des consommateurs et de leurs organisations représentatives de moyens d’action efficaces ne peut que favoriser la réalisation de cet objectif.
Notes de bas de page
1 Selon la formule classique de la Cour de cassation, est d’ordre public « la loi qui touche aux intérêts essentiels de l’Etat ou de la collectivité ou qui fixe, dans le droit privé, les bases juridiques sur lesquelles repose l’ordre économique ou moral de la société ».
Cf. récemment encore Cass. 10 novembre 1978, R. W., 1979-1980, col. 1479 et s., note A. VAN OEVELEN.
2 R. P. D. B., V° Vente, no 1316 ; Cf. récemment encore Comm. Bruxelles, 29 juin 1977, in J. T., 1980, p. 87, obs. P. DE VROEDE.
3 L’article 138, alinéa 2, du Code judiciaire permet également au Ministère public d’agir d’initiative au civil lorsque l’ordre public est réellement mis en danger par un état de choses auquel il importe de remédier — ce qui implique plus que la simple violation d’une norme d’ordre public ; Cass., 5 novembre 1975, J. T., 1976, p. 193, obs. A. FETTWEIS. La question de savoir si cette disposition trouve à s’appliquer en matière de réglementation des prix nous paraît devoir être résolue affirmativement. En pratique toutefois, le Ministère public préférera agir au pénal.
4 Cass., 17 octobre 1946, Pas., 1946, I, p. 366 à propos d’un contrat de travail ayant pour objet l’accomplissement d’un travail pour compte de l’ennemi.
5 Voy. à ce sujet P. DE VROEDE, Prijsregeling, A. P. R., nos 417 et s.
6 P. DE VROEDE, ibidem, et obs. du même sous comm. Bruxelles, 29 juin 1977, J. T., 1980, p. 88.
7 Ph. SIMLER, La nullité partielle des actes juridiques, Paris, 1969, no 11.
8 Ph. SIMLER, op. cit., nos 322 à 339.
9 Dans le même sens, voy. M. FONTAINE et Th. BOURGOIGNIE, Le droit de la consommation en Belgique et au Luxembourg, Londres, 1981, no 76.
10 G. HORSMANS et I. VEROUGSTRAETE, Le régime des prix en Belgique : aspects nationaux. L’application judiciaire des principes, 1980, inédit, no 6.
11 Sur cette controverse, cf. notre ouvrage La réglementation des prix en droit belge, Bruxelles, 1977, p. 335 et 336.
12 H. DE PAGE, Traité élémentaire de droit civil belge, Bruxelles, 1962, t. Ier, p. 341 ; W. VAN GERVEN, Beginselen van Belgisch privaatrecht, Antwerpen, 1966, nos 25 et 26 ; Cass., 29 janvier 1951, Pas., 1951, I, p. 350 et Cass., 21 octobre 1966, R. W., 1966-1967, col. 1572.
C’est la même solution qui est adoptée aux Pays-Bas, cf. Hoge Raad, 14 février 1964, N. J., 1965, p. 95.
La situation demeure par contre confuse en France où à la différence de la jurisprudence administrative qui fait prévaloir le caractère d’ordre public de la législation des prix sur la volonté des parties, telle qu’elle s’est exprimée jadis dans le contrat, la jurisprudence judiciaire continue à considérer que le prix fixé par les parties au moment de la conclusion du contrat reste d’application entre elles, qu’il y ait ou non depuis lors taxation des prix et quel que soit le montant de la taxe (P. LEMOYNE DE FORGES, Ordre public et réglementation des prix, in R. T. D. Comm., 1976, p. 16 et s.).
13 Pour plus de détails, cf. notre étude Les instruments juridiques de la politique des prix, in Ann. dr., 1977, p. 363 à 371.
14 I. VEROUGSTRAETE, Bevoegdheid van de voorzitter van de rechtbank van koophandel rechtdoende op grond van artikel 55 W. H. P., in R. W., 1978-1979, col. 825 et s. ; Comm. Bruxelles, 13 mars 1978, J. C. B., 1979, p. 434.
15 Cf. M. GOTZEN, Le consommateur peut-il intenter à titre individuel l’action en cessation prévue par l’article 55 de la loi du 14 juillet 1971 sur les pratiques du commerce ?, in J. T., 1974, p. 260 et 261.
16 Se prononcent également en faveur de cette reconnaissance, H. BOCKEN, Ook de individuele verbruiker kan de vordering tot staking instellen, voorzien bij artikel 57 van de wet van 14 juli 1971 op de handelspraktijken, in T. P. R., 1973, p. 553 et s. ; A. DE CALUWE, Procédure de protection du consommateur en droit belge (Actes du Colloque de Montpellier des 10-11 et 12 décembre 1975 sur les moyens judiciaires et parajudiciaires de la protection des consommateurs), in Publication de la Commission des Communautés européennes, 1976, p. 100 et G. HORSMANS et I. VEROUGSTRAETE, op. cit., no 8.
17 G. SCHRICKER et B. FRANCQ, La répression de la concurrence déloyale en Belgique et au Luxembourg, Paris, 1974, p. 194.
18 Comme l’observe J. DABIN, la seule condition nécessaire pour agir en cessation de l’activité préjudiciable est l’existence dans le chef du groupement d’un intérêt à la mesure demandée ; l’existence d’un préjudice qui lui soit propre n’est pas requise, cf. La recevabilité des actions en réparation intentées par les groupements privés autres que les sociétés en raison du dommage causé soit à la généralité de leurs membres, soit aux fins qu’ils poursuivent, in R. C. J. B., 1958, p. 267, no 26.
19 Sur les raisons — bonnes et mauvaises — invoquées par les organisations de consommateurs, cf. l’opinion exprimée par l’une d’entre elles, Test-Achats, Vers une nouvelle position du consommateur : les propositions de Test-Achats, Bruxelles, 1981, p. 69-70.
20 L. VAN BUNNEN, Mise en œuvre de l’action en cessation, procédure et incidents, in Journée d’étude de la L. I. C. C. D. du 8 juin 1978 sur l’action en cessation, texte stencilé, p. 3 à 5.
21 Cass., 6 mars 1934, Pas., 1934, I, p. 207.
22 R. SAVATIER, L’ordre public économique, in D., 1965, Chr., p. 37 et s.
23 Ainsi, sur les 179 dossiers traités par le parquet de Bruxelles en 1979 (dossiers ouverts ou terminés pendant cette année), 175 lui ont été transmis par l’Inspection générale économique.
24 S’agissant du second type de préjudice, l’éminent civiliste écrit que « s’il est vrai que... la considération du but est l’élément moteur et directeur du groupe, il est tout aussi vrai que le but, pris en lui-même, demeure extérieur à l’être du syndicat, qu’il n’est par son bien propre, que le syndicat n’en a même pas le monopole. Car le but est à la merci de la libre émulation de tous ceux qui, dans le groupe ou hors du groupe, sont disposés à le servir, comme il est exposé à la contradiction de tous ceux qui, en dehors du groupe ou même dans le groupe cherchent à lui faire tort ». Cf. J. DABIN, op. cit., no 24, p. 265 et 266.
25 « C’est qu’en effet — écrit cet auteur — sauf disposition particulière, aucun lien de droit ne vient consacrer, sur le plan juridique, la relation existant entre cette valeur (la valeur constitutive de la fin poursuivie par le groupement) et le groupement dont s’agit : qu’il s’agisse du bien de la chasse, du bien de la pêche, du bien des familles, du bien de la profession, rien ne vient juridiquement transformer en un bien propre cette valeur que librement le groupement s’est assignée (par opportunité, convenance, conviction...) et qui reste, par ailleurs, livrée aussi bien à la compétition et à l’émulation qu’à la contradiction. En l’absence d’une disposition légale faisant que le bien dont s’agit devienne propre au groupement (sien), l’on reste, en d’autres termes, sur le plan d’un intérêt de pure jouissance et non d’un intérêt d’appartenance : la lésion de pareil intérêt peut assurément être ressentie par le groupement comme un préjudice personnel ; mais ce préjudice qui demeure de pur fait n’est point réparable ». J. VAN COMPERNOLLE, Le droit d’action en justice des groupements, Bruxelles, 1972, p. 392.
26 Sur l’état de la jurisprudence en droit belge, cf. J. VAN COMPERNOLLE, op. cit., p. 308 et 309 ; cf. également Bruxelles, 1er décembre 1981 et Corr. Bruxelles, 2 décembre 1981, J. T., 1982, p. 60 à 62.
27 Sur cette question, cf. J. VAN COMPERNOLLE, op. cit., p. 278 et s. et 299 et s.
28 En ce qui concerne la loi Royer, cf. J. MAURY, Les voies judiciaires de protection du consommateur en droit français (Actes du Colloque de Montpellier des 10-11 et 12 décembre 1975), in Publication de la Commission des Communautés européennes, 1976, p. 55 et s. et L. HARTEMANN, L’action civile et les infractions à la législation économique après la loi Royer, in Rev. de science crim., 1976, p. 329 et s.
29 J. DABIN, op. cit., no 30.
30 L. BIHL, L’action syndicale des associations, in Gaz. Pal., 1973, Doc., p. 523 et s.
31 R. PERROT, Rapport de synthèse (Actes du Colloque de Montpellier des 10-11 et 12 décembre 1975), in Publications de la Commission des Communautés européennes, 1976, p. 286 ; cf. également J. MAURY, op. cit., p. 64.
32 Sur les 179 dossiers traités par le parquet de Bruxelles en 1979 (dossiers ouverts ou terminés pendant cette année), 148 se sont terminés par la conclusion d’une transaction, soit 82,7 % ; de ces 148 transactions, 87 ont porté sur un montant inférieur à 6.001 francs et 141 sur un montant inférieur de 20.001 francs, soit respectivement 58,8 % et 95,3 %. La transaction la plus élevée —· une seule — a porté sur 50.000 francs.
33 Sur cette question, cf. R. P. D. B., Compl., t. IV, v° Infractions et répression en général, nos 63 et 85 ; P. DE VROEDE, op. cit., p. 200 et notre ouvrage La réglementation..., op. cit., p. 313 et 314.
34 A ce sujet, A. DE CALUWE, Weigering van verkoop, economisch en financieel recht vandaag, I, Gakko S. V., 1972, p. 281 et s.
35 R. ANDERSEN, La réglementation..., op. cit., p. 319 et 320.
36 R. ANDERSEN, ibidem, p. 293 et 294.
37 Cass., 12 mai 1947, Pas., 1947, I, p. 201, conclusions de l’avocat général.
38 J. T., 1970, p. 431, no 23.
39 R. ANDERSEN, op. cit., p. 302 à 309.
40 R. ANDERSEN, Le contrat de programme, in R. J. D. A., 1975, p. 252 à 254.
Auteur
Avocat. Chargé de cours à l’Université catholique de Louvain
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